LA PARODIE DE CONTE

Transcription

LA PARODIE DE CONTE
S É Q U E N C E
1
LA PARODIE DE CONTE
Danièle Marmillon
F I C H E S
1
À
1 8
A N N E X E S
1. Lady Red (texte d’élèves)
2. Le Chaperon Rouge (texte d’élèves)
3. La Barbe Bleue, de Charles Perrault
4. Contraintes à donner aux groupes d’élèves
5. Jeu de cartes à partir de titres
6. Corrigé de la fiche 7
7. Aide-mémoire
Volume 4
Expression écrite
Narrer
Etapes
Buts
Activités
Matériel
Mise en situation
• Reconnaître certaines caractéristiques du conte
• Comprendre ce qu'est une
parodie
• Mettre en place un projet
• Constitution d'une liste de
caractéristiques à partir de contes
connus
• Comparaison de contes et de leur
parodie
• parodies diverses
au choix du maître
• annexes 1 et 2
Production initiale
• Rédiger la première version
d'une parodie
• Analyser les textes produits en
fonction de critères donnés
• Lecture du conte original
• Rédaction de la parodie
• Comités de lecture
• annexe 3
Module 1
Structure générale
du conte et rôle des
personnages
• Reconnaître la structure d'un
conte
• Identifier le rôle et les
caractéristiques des différents
personnages
• Observation de la structure d'un conte
bref
• Mise en parallèle de ce conte et du conte
utilisé pour la parodie
• Repérage des caractéristiques des
personnages et de leur rôle dans le
conte original
• fiches 1, 2 et 3
Module 2
Le début du texte
• Caractériser le personnage
principal
• Mettre en place une distance
parodique
• Choisir un titre approprié
• Observation d'un fragment de texte
d'élève et comparaison avec des débuts
de contes
• Rédaction de la présentation du
personnage principal à partir d'un titre
de conte parodié
• Amélioration du texte d'élève
• Repérage des éléments transformés
dans un texte d'élève
• Rédaction d'un début de parodie selon
des contraintes données
• Jeu d'appariement de titres de contes et
de leur parodie
• fiches 4, 5 et 6
• annexes 4 et 5
Module 3
Choix des éléments
importants
et résumé
• Inscrire les éléments parodiques dans une cohérence
maintenue jusqu'à la fin du
récit
• Résumer le conte original en
retenant les éléments importants
• Mise en rapport de fragments d'une
parodie avec le texte original
• Repérage des éléments de parodie
• Rédaction de deux passages manquants
de la parodie
• fiche 7
• annexe 6
Module 4
Les paroles
rapportées
• Reconnaître les paroles rapportées en discours direct
dans un texte
• Comprendre la fonction du
discours direct dans un conte
• Mettre en page correctement
le discours direct
• Choisir les verbes introducteurs
• Repérage des paroles de personnages et
du moment où elles interviennent dans
le conte original
• Observation et mise en pratique des
marques typographiques du discours
direct
• Insertion de verbes introducteurs et
d'éléments de récits dans une brève
scène
• fiches 8, 9 et 10
Module 5
L'organisation
du texte
• Organiser un texte à l'aide de
marqueurs temporels
• Créer des paragraphes et
utiliser la ponctuation
• Insertion dans un récit d'organisateurs
temporels
• Reconstitution d'un conte donné sous la
forme d'un puzzle et repérage des organisateurs temporels
• Introduction de marques de
paragraphes dans un conte
• Amélioration d'un texte d'élève
• fiches 11, 12, 13 et 14
Etapes
Buts
Activités
Module 6
Le système temporel
• Eviter les ruptures de système
temporel inadéquates
• Distinguer l'emploi du passé
simple de celui de l'imparfait
• Utiliser le plus-que-parfait
pour exprimer l'antériorité
dans un récit avec passé
simple
• Correction de ruptures de système
temporel dans deux débuts de contes
• Observation de l'utilisation de
l'imparfait et du passé simple dans un
fragment de conte
• Transposition d'un conte donné au
présent
• Comparaison entre l'ordre des
événements et l'ordre du récit
• Insertion de formes verbales adéquates
dans un fragment de texte
• fiches 15, 16 et 17
Production finale
• Mettre en œuvre les
apprentissages effectués au
cours de la séquence
• Réécriture de la production initiale (ou
rédaction d'une nouvelle parodie)
• production initiale
• aide-mémoire
(cf. annexe 7)
• grille d'évaluation
(fiche 18)
Matériel
Fi ch e 1
1•
1
Lis le conte suivant et résume-le en cinq phrases.
Il était une fois une petite fille extrêmement têtue et imprudente qui n’écoutait
pas ses parents et qui n’obéissait pas quand ils lui avaient dit quelque chose.
Un jour, la fillette dit à ses parents : « J’ai tellement entendu parler de Dame
Trude que je veux une fois aller chez elle : il paraît que c’est fantastique et qu’il
y a tant de choses étranges dans sa maison, alors la curiosité me démange. »
Les parents le lui défendirent rigoureusement et lui dirent : « Écoute : Dame
Trude est une mauvaise femme qui pratique toutes sortes de choses mauvaises et impies ; si tu y vas, tu ne seras plus notre enfant ! »
La fillette se moqua de la défense de ses parents et alla quand même là-bas.
Quand elle arriva chez Dame Trude, la vieille lui demanda :
– Pourquoi es-tu si pâle ?
– Oh ! dit-elle en tremblant de tout son corps, j’ai eu si peur de ce que j’ai vu.
– Et qu’est-ce que tu as vu ? demanda la vieille.
– J’ai vu sur votre seuil un homme noir, dit la fillette.
– C’était un charbonnier, dit la vieille.
– Après, j’ai vu un homme vert, dit la fillette.
– Un chasseur en uniforme, dit la vieille.
– Après, j’ai vu un homme tout rouge de sang.
– C’était un boucher, dit la vieille.
– Ah, Dame Trude, dans mon épouvante, j’ai regardé par la fenêtre chez vous,
mais je ne vous ai pas vue : j’ai vu le Diable en personne avec une tête de feu.
– Oho ! dit la vieille, ainsi tu as vu la sorcière dans toute sa splendeur ! Et cela,
je l’attendais et je le désirais de toi depuis longtemps : maintenant tu vas me
réjouir.
Elle transforma la fillette en une grosse bûche qu’elle jeta au feu, et quand la
bûche fut bien prise et en train de flamber, Dame Trude s’assit devant et s’y
chauffa délicieusement en disant : « Le bon feu, comme il flambe bien pour une
fois ! »
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Muriel Bloch, Dame Trude dans 365 contes pour tous les âges, Gallimard.
Résumé en cinq phrases
1. _______________________________________________________________________________________
2. _______________________________________________________________________________________
3. _______________________________________________________________________________________
4. _______________________________________________________________________________________
5. _______________________________________________________________________________________
1. La parodie de conte
1/1
Fi ch e 2
•
1/1
Compare les contes Dame Trude et Barbe-Bleue et note les principales similitudes
et différences dans le tableau ci-dessous.
énonciateur
Dame Trude
Barbe-Bleue
1
similitudes
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
différences
morale :
morale :
1. La parodie de conte
Fi ch e 3
3•
Complète le tableau ci-dessous.
Personnages
1
•
Caractéristiques
Rôle
Barbe-Bleue → A
_______________________________
_______________________
sa femme → B
______________________________
_____________________
Anne, la sœur → C
______________________________
_____________________
les deux frères → D + E
______________________________
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Voici comment on pourrait schématiser le conte Barbe-Bleue :
1. A dont l’allure est repoussante cherche à se marier.
2. B est séduit par sa richesse et l’épouse.
3. A met B à l’épreuve avec une interdiction.
4. B désobéit à cause de sa curiosité.
5. B découvre le secret de A et sa cruauté.
6. A ne peut que punir B.
7. B demande de l’aide à C qui sera la sentinelle.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
8. D et E vont aider à délivrer B et faire justice.
•
Quels sont les points ci-dessus à garder absolument dans la parodie ? ______________
•
Sur quoi peuvent porter les modifications ?
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1. La parodie de conte
1/1
Fi ch e 4
1•
1/1
a) Voici le début du conte parodié d’une élève de 7 e, Aurore. Lis-le attentivement et
donne ton avis sur cette façon de commencer le récit.
BARBE-BLEUE
Il était une fois dans une vallée lointaine de la Chine, un empereur qui possédait la moitié du pays. Pendant une kinkongaparty, il fit la connaissance d’une
superbe Pékinoise vêtue d’un magnifique kimono rose pâle. Tombé amoureux
d’un coup, il eut l’idée de la demander en mariage. La jeune Pékinoise très flattée répondit oui sans réfléchir.
Tout allait pour le mieux jusqu’au jour où Barbe-Bleue dut partir à Hong Kong
pour l’essai de la bombe atomique. Avant de partir, il confia les clés du palais à
sa ravissante épouse.
b) Voici trois extraits de contes originaux. Observe la présentation du personnage
principal. Qu’ont en commun ces trois présentations ?
RIQUET À LA HOUPPE
(...) Tout cela consola un peu la pauvre reine, qui était bien affligée d’avoir mis
au monde un si vilain marmot. Il est vrai que cet enfant ne commença pas plus
tôt à parler, qu’il dit mille jolies choses, et qu’il avait dans toutes ses actions je
ne sais quoi de spirituel, qu’on en était charmé. J’oubliais de dire qu’il vint au
monde avec une petite houppe de cheveux sur la tête, ce qui fit qu’on le
nomma Riquet à la Houppe car Riquet était le nom de la famille...
CENDRILLON
(...) Lorsqu’elle avait fait son ouvrage, elle allait se mettre au coin de la cheminée et s’asseoir dans les cendres, ce qui faisait qu’on l’appelait communément,
dans le logis, Cucendron. La cadette, qui n’était pas si malhonnête que son
aînée, l’appelait Cendrillon...
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
LE PETIT POUCET
(...) Il était fort petit, et quand il vint au monde il n’était guère plus grand que le
pouce, ce qui fit qu’on l’appela le petit Poucet. Ce pauvre enfant était le souffre-douleur de la maison, et on lui donnait toujours tort. Cependant, il était le
plus fin et le plus avisé de tous ses frères, et s’il parlait peu, il écoutait beaucoup...
c) Choisis ci-dessous un titre transformé d’un conte connu et écris la présentation
du personnage qui lui correspondrait :
Le petit Chaperon rouge
La Belle au Bois Dormant
Blanche-Neige
→
→
→
Culotte verte
Le Vilain endormi
Sable d’Or
1. La parodie de conte
1
Fi ch e 5
2a
•
Voici le début d’un conte parodié écrit par Aurélie et Joëlle, élèves de 7 e année.
LA PETITE AFRICAINE TOUTE VERTE
Il était une fois, en Afrique, un roi et une reine qui disaient chaque jour : « Ah,
que ne pouvons-nous avoir un enfant... » Et jamais il ne leur en venait. Or, un
jour que la reine prenait un bain de boue dans la mare derrière le village, un
gros serpent apparut et lui dit : « Ton souhait va être exaucé, avant que dix
lunes se soient écoulées, tu mettras une fille au monde. » La prédiction
s’accomplit et le roi, fou de joie, réunit toute la tribu pour une grande
cérémonie avec tam-tam et bamboulas. Il y invita les sorciers des villages alentour afin qu’ils soient favorables à l’enfant. Malheureusement il en oublia un.
L’un après l’autre, les sorciers invités prononcèrent des formules magiques qui
assuraient à la fillette tous les bonheurs possibles. Après les vœux de l’avantdernier sorcier, celui qui avait été oublié se présenta furieux et, pour se venger,
jeta un mauvais sort à la petite princesse. Il lui prédit que le jour de son
mariage, elle se ferait mordre par un cobra et qu’elle deviendrait toute verte.
Heureusement, un sorcier devait encore prononcer sa formule magique. Il
adoucit le maléfice en disant : « Seul le baiser d’un prince pourra rompre ce
mauvais sort. »
Le roi ordonna qu’on extermine tous les cobras du pays.
1
•
Indique ci-dessous quel est le conte original.
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Souligne les éléments qui ont été transformés.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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1. La parodie de conte
1/1
Fi ch e 6
2b
•
•
•
1/4
Voici le début du conte Blancheneige de Grimm dans Contes, Gallimard, 1976 1.
Lisez-le attentivement et récrivez-le en une quinzaine de lignes en tenant compte
des contraintes que vous avez reçues.
Il n’est pas nécessaire de conserver tous les détails.
1
Un jour, c’était au beau milieu de l’hiver et les flocons de neige tombaient du
ciel comme du duvet, une reine était assise auprès d’une fenêtre encadrée
d’ébène noir, et cousait. Et tandis qu’elle cousait ainsi et regardait neiger, elle
se piqua le doigt avec son aiguille et trois gouttes de sang tombèrent dans la
neige. Et le rouge était si joli à voir sur la neige blanche qu’elle se dit : « Oh,
puissé-je avoir une enfant aussi blanche que la neige, aussi rouge que le sang
et aussi noire que le bois de ce cadre ! » Peu après, elle eut une petite fille qui
était aussi blanche que la neige, aussi rouge que le sang et aussi noire de cheveux que l’ébène, et que pour cette raison on appela Blancheneige. Et quand
l’enfant fut née, la reine mourut.
Un an plus tard, le roi prit une autre épouse. C’était une belle femme, mais fière
et hautaine, et elle ne pouvait pas souffrir que quelqu’un la surpassât en
beauté. Elle avait un miroir magique, quand elle se mettait devant et s’y contemplait, elle disait :
Petit miroir, petit miroir chéri,
Quelle est la plus belle de tout le pays ?
Et le miroir répondait :
Madame la Reine, vous êtes la plus belle de tout le pays.
Alors elle était tranquille, car elle savait que le miroir disait vrai.
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S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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1. Traduction de Marthe Robert.
1. La parodie de conte
Fi ch e 6
2b
•
1
Voici le début du conte Cendrillon de Charles Perrault dans Contes de ma mère
l’Oye, L’Ecole des loisirs, 1978.
•
Lisez-le attentivement et récrivez-le en une quinzaine de lignes en tenant compte
des contraintes que vous avez reçues.
•
Il n’est pas nécessaire de conserver tous les détails.
Il était une fois un gentilhomme qui épousa en secondes noces une femme, la
plus hautaine et la plus fière qu’on eût jamais vue. Elle avait deux filles de son
humeur, et qui lui ressemblaient en toutes choses. Le mari avait, de son côté,
une jeune fille, mais d’une douceur et d’une beauté sans exemple : elle tenait
cela de sa mère, qui était la meilleure personne du monde.
Les noces ne furent pas plutôt faites, que la belle-mère fit éclater sa mauvaise
humeur : elle ne put souffrir les bonnes qualités de cette jeune enfant, qui rendaient ses filles encore plus haïssables. Elle la chargea des plus viles occupations de la maison : c’était elle qui nettoyait la maison et les montées, qui frottait la chambre de madame et de mesdemoiselles ses filles ; elle couchait tout
en haut de la maison, dans un grenier, sur une méchante paillasse, pendant
que ses sœurs étaient dans des chambres parquetées, où elles avaient des lits
les plus à la mode et des miroirs où elles se voyaient depuis les pieds jusqu’à
la tête. La pauvre fille souffrait tout avec patience, et n’osait se plaindre à son
père, qui l’aurait grondée, parce que sa femme le gouvernait entièrement.
Lorsqu’elle avait fait son ouvrage, elle allait se mettre au coin de la cheminée
et s’asseoir dans les cendres, ce qui faisait qu’on l’appelait communément,
dans le logis, Cucendron. La cadette, qui n’était pas si malhonnête que son
aînée, l’appelait Cendrillon. Cependant, Cendrillon, avec ses méchants habits,
ne laissait pas d’être cent fois plus belle que ses sœurs quoique vêtues magnifiquement.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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1. La parodie de conte
2/4
Fi ch e 6
2b
•
Voici le début du conte Le maître chat ou le chat botté de Charles Perrault dans
Contes de ma mère l’Oye, L’Ecole des loisirs, 1978.
•
Lisez-le attentivement et récrivez-le en une quinzaine de lignes en tenant compte
des contraintes que vous avez reçues.
•
Il n’est pas nécessaire de conserver tous les détails.
1
Un meunier ne laissa pour tout bien à trois enfants qu’il avait que son moulin,
son âne et son chat. Les partages furent bientôt faits : ni le notaire, ni le procureur n’y furent appelés ; ils auraient eu bientôt mangé tout le patrimoine.
L’aîné eut le moulin, le second eut l’âne, et le plus jeune n’eut que le chat.
Ce dernier ne pouvait se consoler d’avoir un si pauvre lot. « Mes frères »,
disait-il, « pourront gagner leur vie honnêtement en se mettant ensemble ;
pour moi, lorsque j’aurai mangé mon chat, et que je me serai fait un manchon
de sa peau, il faudra que je meure de faim. »
Le chat, qui entendit ce discours, mais qui n’en fit pas semblant, lui dit d’un air
posé et sérieux : « Ne vous affligez point, mon maître ; vous n’avez qu’à me
donner un sac et me faire faire une paire de bottes pour aller dans les broussailles, et vous verrez que vous n’êtes pas si mal partagé que vous croyez. »
Quoique le maître du chat ne fît pas grand fonds là-dessus, il lui avait vu faire
tant de tours de souplesse pour prendre des rats et des souris, comme quand
il se pendait par les pieds ou qu’il se cachait dans la farine pour faire le mort,
qu’il ne désespéra pas d’être secouru dans sa misère.
Lorsque le chat eut ce qu’il avait demandé, il se botta bravement ; et mettant
son sac à son cou, il en prit les cordons avec ses deux pattes de devant, et s’en
alla dans une garenne où il y avait grand nombre de lapins. Il mit du son et des
lacerons dans son sac, et s’étendant comme s’il eût été mort il attendit que
quelque jeune lapin, peu instruit encore des ruses de ce monde, vînt se fourrer
dans son sac pour manger ce qu’il y avait mis.
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1. La parodie de conte
Fi ch e 6
2b
•
1
Voici le début du conte Le petit Poucet de Charles Perrault dans Contes de ma mère
l’Oye, L’Ecole des loisirs, 1978.
•
Lisez-le attentivement et récrivez-le en une quinzaine de lignes en tenant compte
des contraintes que vous avez reçues.
•
Il n’est pas nécessaire de conserver tous les détails.
Il était une fois un bûcheron et une bûcheronne qui avaient sept enfants, tous
garçons ; l’aîné n’avait que dix ans, et le plus jeune n’en avait que sept. On
s’étonnera que le bûcheron ait eu tant d’enfants en si peu de temps : mais c’est
que sa femme allait vite en besogne, et n’en faisait pas moins de deux à la fois.
Ils étaient fort pauvres, et leurs sept enfants les incommodaient beaucoup,
parce qu’aucun d’eux ne pouvait encore gagner sa vie. Ce qui les chagrinait
encore, c’est que le plus jeune était fort délicat et ne disait mot ; prenant pour
bêtise ce qui était une marque de la bonté de son esprit.
Il était fort petit, et quand il vint au monde il n’était guère plus grand que le
pouce, ce qui fit qu’on l’appela le petit Poucet. Ce pauvre enfant était le souffre-douleur de la maison, et on lui donnait toujours tort. Cependant, il était le
plus fin et le plus avisé de tous ses frères, et s’il parlait peu, il écoutait beaucoup.
Il vint une année très fâcheuse, et la famine fut si grande, que ces pauvres gens
résolurent de se défaire de leurs enfants.
Un soir que ses enfants étaient couchés, et que le bûcheron était auprès du feu
avec sa femme, il lui dit le cœur serré de douleur : « Tu vois bien que nous ne
pouvons plus nourrir nos enfants ; je ne saurais les voir mourir de faim devant
mes yeux, et je suis résolu de les mener perdre demain au bois, ce qui sera
bien aisé, car tandis qu’ils s’amuseront à fagoter, nous n’avons qu’à nous
enfuir sans qu’ils nous voient. »
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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1. La parodie de conte
4/4
Fi ch e 7
•
Aux pages 2 à 5 de cette fiche se trouve le conte Barbe-Bleue de Charles Perrault que
vous avez lu avant d’écrire la version modifiée.
Ci-dessous figure la version parodiée de ce même conte écrite par Yak Rivais dans
Les Contes du miroir, L’Ecole des loisirs, 1988.
Cette version a été coupée en morceaux et ceux-ci ont été mélangés. Deux morceaux ont été supprimés.
•
Découpez chaque morceau et remettez l’histoire dans l’ordre en faisant correspondre chaque partie avec celle du conte de Perrault.
•
Délimitez exactement la partie à laquelle le morceau correspond en traçant une
accolade.
•
•
Marquez aussi les passages manquants par une accolade.
Du point de vue de la longueur des deux textes, qu’est-ce qui vous frappe ?
VERSION PARODIÉE (FRAGMENTS À DÉCOUPER)
Un week-end, Barbe-Bleue dit à son
épouse :
– Darling, je dois aller à un meeting international prendre la parole sur des problèmes
de marketing. Je te laisse les clés du loft. Et
parmi celles-ci, voici une clé spéciale qui
ouvre une kitchenette secrète que je t’interdis de visiter.
Là-dessus, Barbe-Bleue embrassa sa femme
en disant « I love you, baby », et il s’en alla
en break à la ville.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
✂
Il était une fois un play-boy à la barbe bleue
qui épousa une jeune pin-up. Cette pin-up
avait un peu peur de son mari car il avait un
look généralement sombre et mystérieux.
Dans les garden-parties et cocktails mondains, les mauvaises langues disaient qu’il
avait été marié déjà six fois, mais qu’on ne
savait pas ce que ses femmes étaient devenues.
✂
Plus tard, avec les dollars de son mari, elle
leur acheta des grades de capitaine à la
NASA. Puis elle épousa un joyeux hippie
qu’elle aimait depuis longtemps et qui
jouait de la guitare dobbro dans les snacks.
C’est comme ça que l’histoire s’achève en
happy end. That’s all, Folks !
✂
Et justement, Barbe-Bleue faisait un comeback parce qu’il avait oublié quelque chose.
– Je suis revenu, dit-il, car j’ai oublié mon
attaché-case.
Alors il remarqua que sa femme était si
troublée qu’elle était au bord du breakdown. Et, à la voir si peu cool, il devina
qu’elle avait ouvert la kitchenette !
– Okay, dit-il, rends-moi mes clés !
– Je les ai laissées dans le living-room ! balbutia la malheureuse femme affolée.
– Va les chercher, exigea Barbe-Bleue de sa
belle voix de crooner.
✂
Mais les frères arrivaient avec des soldats,
browning au poing. Ils lui tirèrent dans le
ventre une quinzaine de balles dum-dum,
et l’affreux mari à la barbe bleue tomba sur
le plancher.
La femme de Barbe-Bleue se jeta dans les
bras de ses frères en disant thank you.
✂
1. La parodie de conte
1/6
1
Fi ch e 7
VERSION ORIGINALE
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1
VERSION PARODIÉE
Il était une fois un homme qui avait de belles
maisons à la ville et à la campagne, de la vaisselle d’or et d’argent, des meubles en broderie
et des carrosses tout dorés. Mais, par malheur,
cet homme avait la barbe bleue : cela le rendait
si laid et si terrible, qu’il n’était ni femme ni fille
qui ne s’enfuît de devant lui. Une de ses voisines, dame de qualité, avait deux filles parfaitement belles. Il lui en demanda une en mariage,
en lui laissant le choix de celle qu’elle voudrait
lui donner. Elles n’en voulaient point toutes
deux, et se le renvoyèrent l’une à l’autre, ne pouvant se résoudre à prendre un homme qui eût la
barbe bleue. Ce qui les dégoûtait encore, c’est
qu’il avait déjà épousé plusieurs femmes, et
qu’on ne savait ce que ces femmes étaient devenues.
La Barbe-Bleue, pour faire connaissance, les
mena, avec leur mère et trois ou quatre de leurs
meilleures amies et quelques jeunes gens du
voisinage, à une de ses maisons de campagne,
où on demeura huit jours entiers. Ce n’était que
promenades, que parties de chasse et de pêche,
que danses et festins, que collations : on ne dormait point et on passait toute la nuit à se faire
malices les uns aux autres ; enfin tout alla si
bien, que la cadette commença à trouver que le
maître du logis n’avait plus la barbe si bleue, et
que c’était un fort honnête homme.
Dès qu’on fut de retour à la ville, le mariage se
conclut.
Au bout d’un mois, la Barbe-Bleue dit à sa
femme qu’il était obligé de faire un voyage en
province, de six semaines au moins, pour une
affaire de conséquence ; qu’il la priait de se bien
divertir pendant son absence ; qu’elle fît venir
ses bonnes amies ; qu’elle les menât à la campagne, si elle voulait ; que partout elle fît bonne
chère.
« Voilà », lui dit-il, « les clés des deux gardemeubles ; voilà celle de la vaisselle d’or et
d’argent, qui ne sert pas tous les jours ; voilà
celle de mes coffres-forts, où est mon or et mon
argent ; celle de mes cassettes où sont mes
pierreries ; et voilà le passe-partout de tous les
appartements.
Pour cette petite clef-ci, c’est la clef du cabinet
au bout de la grande galerie de l’appartement
bas ; ouvrez tout ; allez partout ; mais, pour ce
petit cabinet, je vous défends d’y entrer, et je
vous le défends de telle sorte que, s’il vous
arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne
deviez attendre de ma colère. »
Elle promit d’observer exactement tout ce qui
lui venait d’être ordonné ; et lui, après l’avoir
1. La parodie de conte
2/6
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Fi ch e 7
embrassée, monte dans son carrosse, et part
pour son voyage.
Les voisines et les bonnes amies n’attendirent
pas qu’on les envoyât quérir pour aller chez la
jeune mariée, tant elles avaient d’impatience de
voir toutes les richesses de sa maison, n’ayant
osé y venir pendant que le mari y était, à cause
de sa barbe bleue qui leur faisait peur.
Les voilà aussitôt à parcourir les chambres, les
cabinets, les garde-robes, toutes plus belles et
plus riches les unes que les autres. Elles montèrent ensuite aux garde-meubles, où elles ne pouvaient assez admirer le nombre et la beauté des
tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des
guéridons, des tables et des miroirs où l’on se
voyait depuis les pieds jusqu’à la tête, et dont
les bordures, les unes de glace, les autres
d’argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu’on eût jamais
vues ; elles ne cessaient d’exagérer et d’envier
le bonheur de leur amie, qui cependant ne se
divertissait point à voir toutes ces richesses, à
cause de l’impatience qu’elle avait d’aller ouvrir
le cabinet de l’appartement bas.
Elle fut si pressée de sa curiosité que, sans considérer qu’il était malhonnête de quitter sa compagnie, elle descendit par un escalier dérobé, et
avec tant de précipitation, qu’elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois. Etant arrivée à la
porte du cabinet, elle s’y arrêta quelque temps,
songeant à la défense que son mari lui avait
faite, et considérant qu’il pouvait lui arriver malheur d’avoir été désobéissante ; mais la tentation était si forte qu’elle ne put la surmonter ;
elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet.
D’abord elle ne vit rien, parce que les fenêtres
étaient fermées. Après quelques moments, elle
commença à voir que le plancher était tout couvert de sang caillé, dans lequel se miraient les
corps de plusieurs femmes mortes, attachées le
long des murs : c’étaient toutes les femmes que
la Barbe-Bleue avait épousées et qu’il avait
égorgées l’une après l’autre.
Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet,
qu’elle venait de retirer de la serrure, lui tomba
de la main. Après avoir un peu repris ses sens,
elle ramassa la clef, referma la porte, et monta à
sa chambre pour se remettre un peu. Ayant
remarqué que la clef du cabinet était tachée de
sang, elle l’essuya deux ou trois fois ; mais le
sang ne s’en allait point ; elle eut beau la laver et
même la frotter avec du sable et du grès, il y
demeura toujours du sang ; car la clef était fée,
et il n’y avait pas moyen de la nettoyer tout à
fait : quand on ôtait le sang d’un côté, il revenait
de l’autre...
3/6
1
1. La parodie de conte
Fi ch e 7
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1
La Barbe-Bleue revint de son voyage le soir
même, et dit qu’il avait reçu des lettres en chemin, qui lui avaient appris que l’affaire pour
laquelle il était parti venait d’être terminée à
son avantage. Sa femme fit tout ce qu’elle put
pour lui témoigner qu’elle était ravie de son
prompt retour. Le lendemain, il lui demanda les
clefs, et elle les lui donna mais d’une main si
tremblante, qu’il devina sans peine tout ce qui
s’était passé. « D’où vient », lui dit-il, « que la clef
du cabinet n’est point avec les autres ? »
« Il faut », dit-elle, « que je l’aie laissée là-haut sur
ma table. »
« Ne manquez pas », dit la Barbe-Bleue, « de me
la donner tantôt. »
Après plusieurs remises, il fallut apporter la
clef. La Barbe-Bleue, l’ayant considérée, dit à sa
femme : « Pourquoi y a-t-il du sang sur cette
clef ? »
« Je n’en sais rien », répondit la pauvre femme,
plus pâle que la mort.
« Vous n’en savez rien ? » reprit la Barbe-Bleue ;
« je le sais bien, moi. Vous avez voulu entrer
dans le cabinet ? Eh bien, madame, vous y
entrerez, et irez prendre place auprès des
dames que vous y avez vues. »
Elle se jeta aux pieds de son mari, en pleurant et
en lui demandant pardon, avec toutes les marques d’un vrai repentir de n’avoir pas été obéissante. Elle aurait attendri un rocher, belle et
affligée comme elle était ; mais la Barbe-Bleue
avait un cœur plus dur qu’un rocher : « Il faut
mourir, madame », lui dit-il, « et tout à l’heure. »
« Puisqu’il faut mourir », répondit-elle en le
regardant, les yeux baignés de larmes, « donnezmoi un peu de temps pour prier Dieu. »
« Je vous donne un demi-quart d’heure », reprit
la Barbe-Bleue, « mais pas un moment davantage. »
Lorsqu’elle fut seule, elle appela sa sœur, et lui
dit : « Ma sœur Anne » (car elle s’appelait ainsi),
« monte, je te prie, sur le haut de la tour, pour
voir si mes frères ne viennent point ; ils m’ont
promis qu’ils me viendraient voir aujourd’hui ;
et si tu les vois, fais-leur signe de se hâter. »
La sœur Anne monta sur le haut de la tour, et la
pauvre affligée lui criait de temps en temps :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
Et la sœur Anne répondait : « Je ne vois rien que
le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie. »
Cependant la Barbe-Bleue, tenant un grand coutelas à la main, criait de toute sa force :
« Descends vite, ou je monterai là-haut. »
« Encore un moment, s’il vous plaît », lui
répondit sa femme. Et aussitôt elle criait tout
bas : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien
venir ? » Et la sœur Anne répondait : « Je ne vois
1. La parodie de conte
4/6
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Fi ch e 7
que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie. »
« Descends donc vite », criait la Barbe-Bleue,
« ou je monterai là-haut. » « Je m’en vais »,
répondit la femme ; et puis elle criait : « Anne,
ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
« Je vois », répondit la sœur Anne, « une grosse
poussière qui vient de ce côté-ci... »
« Sont-ce mes frères ? »
« Hélas ! non, ma sœur, je vois un troupeau de
moutons... »
« Ne veux-tu pas descendre ? » criait la Barbe-Bleue.
« Encore un petit moment », répondit sa femme ;
et puis elle criait : « Anne, ma sœur Anne, ne
vois-tu rien venir ? »
« Je vois », répondit-elle, « deux cavaliers qui viennent de ce côté ; mais ils sont bien loin encore. »
« Dieu soit loué ! » s’écria-t-elle un moment
après, « ce sont mes frères. »
« Je leur fais signe tant que je puis de se hâter. »
La Barbe-Bleue se mit à crier si fort que toute la
maison en trembla. La pauvre femme descendit,
et elle alla se jeter à ses pieds tout éplorée et
tout échevelée.
« Cela ne sert de rien », dit la Barbe-Bleue, « il
faut mourir. » Puis, la prenant d’une main par les
cheveux, et de l’autre levant le coutelas en l’air,
il allait lui abattre la tête.
La pauvre femme se tournant vers lui, et le
regardant avec des yeux mourants, le pria de lui
donner un petit moment pour se recueillir.
« Non, non », dit-il, « recommande-toi bien à
Dieu », et levant son bras...
Dans ce moment, on heurta si fort à la porte,
que la Barbe-Bleue s’arrêta tout court. On
ouvrit, et aussitôt on vit entrer deux cavaliers
qui, mettant l’épée à la main, coururent droit à
la Barbe-Bleue.
Il reconnut que c’étaient les frères de sa femme,
l’un dragon et l’autre mousquetaire, de sorte
qu’il s’enfuit aussitôt pour se sauver ; mais les
deux frères le poursuivirent de si près qu’ils
l’attrapèrent avant qu’il pût gagner le perron. Ils
lui passèrent leur épée au travers du corps, et le
laissèrent mort. La pauvre femme était presque
aussi morte que son mari, et n’avait pas la force
de se lever pour embrasser ses frères.
Il se trouva que la Barbe-Bleue n’avait point
d’héritiers, et qu’ainsi sa femme demeura maîtresse de tous ses biens. Elle en employa une
partie à marier sa jeune sœur Anne avec un
jeune gentilhomme dont elle était aimée depuis
longtemps ; une autre partie à acheter des charges de capitaine à ses deux frères ; et le reste à
se marier elle-même à un fort honnête homme,
qui lui fit oublier le mauvais temps qu’elle avait
passé avec la Barbe-Bleue.
5/6
1
1. La parodie de conte
Fi ch e 7
LES DEUX PASSAGES MANQUANTS DE LA VERSION PARODIÉE
1
Dès qu’il eut tourné les talons, sa femme
qui était curieuse speeda ouvrir la kitchenette. Elle manqua tomber knock-out à la
vue du spectacle qu’elle découvrit ! En
effet, les cadavres des six premières épouses de Barbe-Bleue étaient là, entassés
comme dans un western ou un thriller. La
jeune femme effrayée en laissa tomber la
clé dans le sang rouge comme de la sauce
ketchup. Mais elle eut beau ensuite laver
avec du white-spirit la clé tachée, elle ne
réussit pas à effacer les traces de sang, car
c’était une clé magique.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
✂
La femme grimpa vite au sommet du building. Elle rencontra sa sœur à la sortie du
lift.
– Anne ! lui demanda-t-elle. Regarde par le
bow-window si tu vois nos frères arriver !
Car elle attendait ses frères qui étaient militaires et servaient dans les tanks. Anne se
mit aussitôt à scruter la campagne avec un
zoom. Pendant ce temps, en bas, BarbeBleue trompait son impatience en buvant
un whisky on the rocks.
– Baby ! cria-t-il. Si tu ne descends pas, je
vais monter te chercher et je te transformerai en hamburger !
La pauvre femme s’affolait et pleurait tellement que le make-up de ses yeux fondait et
coulait sur ses joues.
– Anne, sister Anne, ne vois-tu rien venir ?
criait-elle.
– Je ne vois que l’herbe qui verdoie sur le
green du golf à côté de chez nous, répondait la sœur parfaitement relaxe.
D’en bas, Barbe-Bleue hurlait qu’il allait
transformer sa femme en porridge.
– Anne, sister Anne, implorait la malheureuse, ne vois-tu rien venir, please ?
– Je vois une jeep qui roule sur la route ! Elle
est pleine de boys de l’US Army !
Cependant, Barbe-Bleue, énervé, ouvrit son
grand bowie-knife et grimpa l’escalier pour
aller trancher la gorge de sa femme.
– Kiss me, et fais tes prières ! lui dit-il.
✂
1. La parodie de conte
6/6
Fi ch e 8
1•
•
Relis le conte original Barbe-Bleue de C. Perrault et repère les passages dans lesquels les paroles des personnages apparaissent telles qu’ils les ont dites.
Pour chaque passage, indique qui sont les interlocuteurs et de quelle scène il s’agit.
Interlocuteurs
•
Moment
1. _______________________________________
__________________________________________
2. _______________________________________
__________________________________________
3. _______________________________________
__________________________________________
4. _______________________________________
__________________________________________
A ton avis, pourquoi ces passages sont-ils écrits ainsi ? Quel effet les paroles des personnages créent-elles ?
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1/1
____________________________________________________________________________________
____________________________________________________________________________________
1. La parodie de conte
1
Fi ch e 9
2•
•
Souligne dans le passage de Barbe-Bleue ci-dessous les paroles des personnages.
Utilise des couleurs différentes pour distinguer les personnages.
Le lendemain, il lui demanda les clefs, et elle les lui donna, mais d’une main si tremblante,
qu’il devina sans peine tout ce qui s’était passé.
– D’où vient, lui dit-il, que la clef du cabinet n’est point avec les autres ?
– Il faut, dit-elle, que je l’aie laissée là-haut sur ma table.
1
– Ne manquez pas, dit la Barbe-Bleue, de me la donner tantôt.
Après plusieurs remises, il fallut apporter la clef. La Barbe-Bleue, l’ayant considérée, dit à
sa femme :
– Pourquoi y a-t-il du sang sur cette clef ?
– Je n’en sais rien, répondit la pauvre femme, plus pâle que la mort.
– Vous n’en savez rien ? reprit la Barbe-Bleue, je le sais bien, moi. Vous avez voulu entrer
dans le cabinet ? Eh bien, madame, vous y entrerez, et irez prendre place auprès des
dames que vous y avez vues.
•
Comment sont marquées typographiquement les paroles des personnages ?
____________________________________________________________________________________
•
•
Encadre dans le texte ce qui permet de savoir qui parle.
Que constates-tu en ce qui concerne la place de ces éléments ?
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
____________________________________________________________________________________
3•
•
•
Voici un passage de Barbe-Bleue qui n’a pas été mis en page correctement.
A toi de faire la distinction entre récit et paroles des personnages en le récrivant correctement sur une feuille à part.
Attention : tu dois aussi ajouter des majuscules.
(...) Elle aurait attendri un rocher, belle et affligée comme elle était ; mais la Barbe-Bleue
avait un cœur plus dur qu’un rocher : il faut mourir, madame, lui dit-il, et tout à l’heure.
Puisqu’il faut mourir, répondit-elle en le regardant, les yeux baignés de larmes, donnezmoi un peu de temps pour prier Dieu. Je vous donne un demi-quart d’heure, reprit la
Barbe-Bleue, mais pas un moment davantage. Lorsqu’elle fut seule, elle appela sa sœur, et
lui dit : ma sœur Anne, monte, je te prie, sur le haut de la tour, pour voir si mes frères ne
viennent point ; ils m’ont promis qu’ils me viendraient voir aujourd’hui ; et si, tu les vois,
fais-leur signe de se hâter. La sœur Anne monta sur le haut de la tour...
1. La parodie de conte
1/1
Fi che 10
4•
Voici une scène dans laquelle les expressions qui introduisent les paroles ont été
supprimées.
•
A toi de comprendre qui parle et de clarifier les échanges en ajoutant les expressions
qui te semblent les plus adéquates ainsi que la ponctuation. Tu devras ajouter aussi
quelques éléments de récit.
•
Prends exemple sur le début du texte, où ce qui a été ajouté est en caractères gras, et
continue depuis les petits traits.
– Descends vite, ou je monterai là-haut.
– Encore un moment s’il vous plaît.
– Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
– Je ne vois que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie.
-- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -- -– Descends donc vite, ou je monterai là-haut.
– Je m’en vais.
– Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
– Je vois une grosse poussière qui vient de ce côté-ci.
– Est-ce que ce sont mes frères ?
– Hélas non, ma sœur, je vois un troupeau de moutons...
– Ne veux-tu pas descendre ?
– Encore un petit moment.
– Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
La Barbe-Bleue, tenant un grand couteau, cria de tous ses poumons :
– Descends vite, ou je monterai là-haut !
– Encore un moment s’il vous plaît, lui demanda sa femme qui se pencha à la fenêtre et
appela sa sœur :
– Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
– Je ne vois que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie, répondit la sœur.
____________________________________________________________________________________
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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1. La parodie de conte
1/1
1
Fi che 11
1•
•
1
Dans le conte suivant, les lacunes correspondent à des éléments (mots ou groupe de
mots) qu’on a oublié de recopier.
Lis le texte et essaie de trouver à quoi peuvent correspondre ces éléments.
_____________________________________ la terre étant couverte d’une épaisse couche de neige, un pauvre garçon dut sortir pour aller chercher du bois en traîneau.
_____________________________________________ il était tellement gelé qu’il ne voulut pas rentrer chez lui tout de suite, mais faire du feu pour se réchauffer un peu
d’abord. Il balaya la neige, et tout en raclant ainsi le sol, il trouva une petite clé d’or.
Croyant que là où était la clé, il devait y avoir aussi la serrure, il creusa la terre et
trouva une cassette de fer. Pourvu que la clé aille ! pensa-t-il, la cassette contient
sûrement des choses précieuses. Il chercha, mais ne vit pas le moindre trou de
serrure ; _________________________________ il en découvrit un, mais si petit que
c’est tout juste si on le voyait. Il essaya la clé, elle allait parfaitement.
_______________________
il
la
tourna
une
fois
dans
la
serrure,
et
___________________________________ il nous faut attendre qu’il ait fini d’ouvrir et
soulevé le couvercle, nous saurons ___________________________ quelles choses
merveilleuses étaient contenues dans la cassette.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
•
D’après La clé d’or de Grimm dans Contes, Gallimard, 1976.
Traduction de Marthe Robert.
A toi maintenant de compléter le récit pour le rendre plus clair.
1. La parodie de conte
1/1
Fi che 12
2•
•
•
Voici un conte tahitien donné en neuf parties qui ont été mélangées.
Découpez ces parties et reconstituez le puzzle.
Soulignez, sur le texte reconstitué, les organisateurs temporels qui marquent les étapes principales du récit.
Quand ils s’aperçurent que des taches rouges brillaient entre les crocs formidables, ils comprirent que le lézard, affamé, avait mangé leurs enfants. Aveuglés de douleur et de colère, ils prirent de lourdes pierres pour écraser le
monstre. Le lézard se réveilla et prit la fuite, poursuivi par les parents. Il gravit la montagne jusqu’à la plus haute cime de l’Aorai.
✂
Quand il fut tout en haut, il vit que ses poursuivants approchaient. Alors il se
jeta dans le vide, du haut de la paroi, et s’écrasa au pied de la falaise. Sa
queue, brisée par le choc, se détacha et tomba un peu plus loin, donnant
naissance à un massif de bambous qui existe toujours. On peut voir encore,
dans la vallée de la Fataua, un rocher qui porte les empreintes de ce grand
lézard.
✂
Aussi, un matin, le père, la mère et les deux enfants se mirent-ils en route
vers l’intérieur de l’île, à la recherche de fei, ces grosses bananes rouges qui
ne se mangent que cuites. Mais la route était longue et les enfants furent si
fatigués que leurs parents décidèrent de les laisser sur le bord du chemin,
jusqu’à leur retour, sous la protection du lézard. Leur absence se prolongeait, et les enfants et le lézard sentirent la faim devenir plus pressante.
✂
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1/2
Quelques jours plus tard, alors que toute la famille prenait son repas, un
grand craquement se fit entendre au fond de la grotte. La femme alla voir ce
que signifiait ce bruit et vit que l’œuf avait donné naissance à un gigantesque
lézard. Son mari et ses enfants, mis au courant de cet événement étrange, en
bons Tahitiens ne s’en formalisèrent pas et adoptèrent l’intrus. Celui-ci, soigné avec attention, atteignit bientôt des proportions énormes. Il était
d’ailleurs très doux et devint le favori des enfants.
✂
1. La parodie de conte
1
Fi che 12
1
Un jour, deux femmes, s’éloignant de leurs compagnes, virent, dans un
paquet d’algues, un œuf énorme qui avait dû être amené par la mer. L’une
des deux femmes prit cet œuf, objet de curiosité, et le plaça dans un
récipient de bois à large ouverture dont on se servait pour mettre le poisson
cru. Elle emporta le tout chez elle, dans la grotte à flanc de montagne où elle
vivait avec son mari et ses deux enfants, un garçon et une fille. Après avoir
fait admirer l’œuf à ses voisines extasiées et envieuses, elle le rangea dans
un coin reculé de la grotte familiale, et n’y pensa plus.
✂
Alors le lézard, profitant de l’assoupissement des deux enfants, ouvrit sa
large gueule et engloutit successivement le petit garçon et la petite fille ; puis
il se coucha confortablement sur la fougère et s’endormit.
✂
Dans les temps lointains, les Tahitiens étaient trop nombreux pour vivre sur
le rivage ; une grande partie de la population avait élu domicile dans les grottes, au fond des vallées, et souvent devait descendre à la mer afin de remplir
d’eau salée ses calebasses et ses bambous, eau qu’elle faisait ensuite évaporer au soleil, afin d’en recueillir le sel.
✂
Hélas, survint cette période de sécheresse qui devait peu à peu atteindre
toutes les terres du Pacifique. Pour résister à la famine, les Tahitiens durent
aller très loin dans les montagnes et les vallées y chercher une maigre nourriture.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
✂
Avec le soir, les parents revinrent, portant sur leurs épaules une provision
suffisante de fei pour attendre la fin de la famine. Ce fut en vain qu’ils cherchèrent et appelèrent leurs enfants. Ils ne virent que le lézard endormi.
✂
D’après Le grand lézard de Fataua dans Contes et légendes de Tahiti et des Mers du Sud
de E. V. Dufour, Nathan, 1966.
1. La parodie de conte
2/2
Fi che 13
3•
•
1/1
La mise en page de la légende ci-dessous a été modifiée.
Par un trait vertical dans le texte, indique les endroits où tu penses qu’il faudrait
marquer un paragraphe.
Le grand sorcier, qui connaît le secret des étoiles, l’avait prédit bien longtemps
à l’avance. Si longtemps, que les hommes insouciants avaient oublié. Pourtant
elle vint, cette sécheresse impitoyable qui brûla les rivières. Nulle part, il n’y
eut plus d’eau douce. Ni pour les animaux, ni pour les hommes. Même les cascades cachées, les sources profondes avaient disparu et la soif terrible se faisait cruellement sentir. Un jour, le Woobat, qui est une sorte de cochon sauvage, était en train de creuser un trou dans la terre sèche, avec l’espoir de
trouver un peu de fraîcheur. Il déplaça une très grosse pierre, et du trou de
cette pierre jaillit une source d’eau limpide qui se répandit sur la terre craquelée. Aussitôt, tous les animaux, alertés par ces mille petits signes qui sont leur
langage, accoururent pour se désaltérer et burent avec respect de cette eau
miraculeuse qui était leur vie. Tous furent sages et prudents. L’eau était rare et
il fallait la ménager. Ils s’arrêtèrent vite de boire. Tous, sauf un. Le grand serpent. Il but, il but, il but le ruisseau tout entier. Les autres animaux essayèrent
de l’en empêcher. Mais rien n’y fit, et leur colère augmenta avec leur impuissance. Et les animaux tuèrent le grand serpent qui avait bu toute leur eau. Et
l’esprit du serpent s’envola vers le ciel. Quelques jours plus tard, les bêtes
assoiffées virent s’agiter dans la poussière de tout petits serpents qui venaient
de naître. Le Kiwi aurait bien voulu les manger, mais le Kangourou s’interposa :
« Attends ! ils sont trop jolis, ces petits serpents, avec leurs couleurs vives.
Nous allons les mettre à l’ombre d’une pierre. Peut-être pourront-ils y vivre. »
Quand le grand serpent, dans le ciel, vit les soins dont ses petits étaient entourés, il s’attendrit et, se parant de merveilleuses couleurs, il renvoya aux animaux toute l’eau qu’il leur avait bue. Et la pluie remplit les bouches, les poitrines, les rivières. Aussi, chaque fois que dans la poussière on trouve un petit
serpent égaré, il faut en prendre grand soin, si l’on veut que dans le ciel son
grand-père envoie de l’eau pour faire chanter les cascades.
La légende de l’arc-en-ciel dans Contes et légendes de Tahiti et des Mers du Sud de E. V. Dufour, Nathan, 1966.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1. La parodie de conte
1
Fi che 14
4•
•
•
1
Voici un extrait du texte d’une élève de 7 e année.
Pourquoi ce texte est-il difficile à lire ?
Proposez des améliorations en récrivant les passages corrigés sur les lignes ajoutées
et/ou en corrigeant directement sur le texte avec un crayon de couleur.
La femme de Barbe-Bleue trouva le trousseau de clés de son mari. Comme elle était très
____________________________________________________________________________________
curieuse, elle s’empressa d’aller ouvrir toutes les portes elle réussit à ouvrir chaque porte
____________________________________________________________________________________
et glisser la clé dans la serrure, elle se rendit compte qu’une clé ne convenait à aucune
____________________________________________________________________________________
serrure elle se dit que peut-être c’était celle de la porte de la cave où elle n’était jamais
____________________________________________________________________________________
entrée et c’était bien celle-là la porte s’ouvrit, la jeune femme mit un pied à l’intérieur elle
____________________________________________________________________________________
n’en crut pas ses yeux, il y avait beaucoup de cadavres c’étaient les ex-femmes de Barbe-
____________________________________________________________________________________
Bleue mortes, certaines avaient la tête coupée et d’autres plus de mains, elle cria et de
____________________________________________________________________________________
peur elle laissa tomber la clé par terre elle reprit la clé et s’aperçut qu’elle avait une tache
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S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
de sang elle frotta avec des produits mais ne parvint pas à enlever la tache. Son mari entra,
____________________________________________________________________________________
il avait oublié son costume de bain. Il lui demanda son trousseau mais il s’aperçut qu’il
____________________________________________________________________________________
manquait la clé de la cave. Il lui dit d’aller la chercher. Elle ne revenait pas, il courut la cher-
____________________________________________________________________________________
cher et la prit par le bras et sortit son couteau. Il y eut un gros bruit. Ses deux frères arri-
____________________________________________________________________________________
vèrent et tuèrent Barbe-Bleue.
____________________________________________________________________________________
1. La parodie de conte
1/1
Fi che 15
1•
La personne qui a recopié ces débuts de contes a commis des erreurs dans l’emploi
du temps des verbes. Peux-tu corriger ces erreurs et donner les raisons de tes
corrections ?
Il était une fois une vieille reine, son époux était mort depuis longtemps et sa
fille était très belle. Quand elle fut grande, on l’a fiancée au prince d’un pays
lointain. Une fois venu le temps des épousailles, comme la jeune fille devait
partir pour le royaume étranger, la vieille mit dans sa malle beaucoup de vaisselle précieuse et de parures, d’or et d’argent, de coupes et de joyaux, bref
tout ce qui fait partie d’une dot royale, car elle chérissait son enfant de tout
son cœur. Elle lui donna aussi une camériste qui devait l’accompagner à cheval et la remettre entre les mains de son fiancé, et chacune d’elles reçut une
monture. Or, le cheval de la princesse s’appelait Falada et savait parler. Quand
vient l’heure des adieux, la vieille mère monta dans sa chambre à coucher,
prend un canif, et se coupe les doigts si fort qu’ils se mirent à saigner. Puis elle
mit dessous un chiffon blanc et y laissa tomber trois gouttes de sang, après
quoi elle le donna à sa fille en disant : « Ma chère enfant, conserve-les bien, tu
en auras besoin en route. »
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1/1
D’après La gardeuse d’oies de Grimm dans Contes, Gallimard, 1976.
Traduction de Marthe Robert.
Il était une fois un homme qui était sur le point de faire un grand voyage, et au
moment de partir, il demanda à ses trois filles ce qu’il devait leur rapporter.
L’aînée demanda des perles, la deuxième des diamants, quant à la troisième,
elle dit : « Cher père, je voudrais une alouette chanteuse et sauteuse. » Le père
dit : « Oui, si je peux en trouver une, tu l’auras », puis il les embrassa et s’en fut.
Quand le temps fut venu de prendre le chemin du retour, il avait acheté les perles et les diamants pour les deux aînées, mais l’alouette chanteuse et sauteuse
demandée par la cadette, il l’avait cherchée partout en vain, et cela le chagrinait, car c’était son enfant préférée. Or, son chemin passait par une forêt au
cœur de laquelle s’élevait un château splendide, et à côté du château il y avait
un arbre, et tout en haut de l’arbre il vit une alouette chanter et sauter. « Eh, tu
tombes fort à propos », se dit-il tout heureux, et il a appelé son domestique
pour qu’il montât sur l’arbre et prît le petit animal. Mais quand il s’est approché de l’arbre, un lion en est sorti d’un bond […] et se mit à rugir si terriblement que le feuillage en trembla sur les arbres.
D’après L’alouette chanteuse et sauteuse de Grimm dans Contes, Gallimard, 1976.
Traduction de Marthe Robert.
1. La parodie de conte
1
Fi che 16
2•
1
a) Observez attentivement les temps des verbes utilisés dans ce début de conte.
Soulignez, en les distinguant de deux couleurs différentes, les verbes au passé
simple et ceux à l’imparfait.
Il était une fois un roi qui avait un joli jardin d’agrément derrière son château,
et là il y avait un arbre qui portait des pommes d’or. Quand les pommes furent
mûres, on les compta, mais dès le lendemain, il en manqua une. On rapporta la
chose au roi, qui ordonna qu’on eût chaque nuit à monter la garde sous l’arbre.
Le roi avait trois fils. A la nuit tombante, il envoya le premier au jardin, mais
sur le coup de minuit, il ne put pas s’empêcher de dormir, et le lendemain
matin, il manquait de nouveau une pomme. La nuit suivante, ce fut le deuxième
fils qui prit la garde, mais il lui arriva la même chose : quand minuit eut sonné
il s’endormit et le matin il manquait une pomme. Vint alors le tour du troisième
fils qui était prêt aussi à monter la garde. Mais le roi n’avait guère confiance en
lui et pensait qu’il se montrerait moins capable encore que ses frères ; pourtant, il finit par le lui permettre. Le jeune homme s’étendit donc sous l’arbre,
resta éveillé et sut résister au sommeil. Quand minuit sonna, un frémissement
parcourut l’air et il vit au clair de lune un oiseau qui venait vers lui à tire-d’aile
et dont le plumage brillait comme de l’or. L’oiseau se percha sur l’arbre et il
venait juste de becqueter une pomme quand le jeune homme lui décocha une
flèche. L’oiseau s’enfuit, mais la flèche l’avait atteint et l’une de ses plumes d’or
tomba.
L’oiseau d’or de Grimm dans Contes, Gallimard, 1976.
Traduction de Marthe Robert.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
b) Voici le début d’un conte dont les verbes ont été mis au présent.
Récrivez ce passage en utilisant un système avec passé simple et en commençant
par : Il était une fois...
C’est l’histoire de deux frères, un riche et un pauvre. Le riche est orfèvre et
méchant de cœur, le pauvre gagne son pain en faisant des balais, et il est bon
et honnête. Le pauvre a deux enfants, deux frères jumeaux qui se ressemblent
comme une goutte d’eau ressemble à une autre. Les deux garçons vont de
temps en temps dans la maison du riche et, parfois, on leur donne quelques
restes à manger.
Il advient que le pauvre homme, en allant chercher du petit bois dans la forêt,
voit un oiseau qui est tout doré, et si beau que jamais encore ses yeux n’en ont
vu de pareil. Alors il ramasse un caillou, le lui jette et touche juste. Mais il ne
tombe qu’une plume d’or et l’oiseau s’envole. L’homme prend la plume et la
porte à son frère, celui-ci la regarde et dit : « C’est de l’or pur », et il lui donne
beaucoup d’argent en échange.
D’après Les deux frères de Grimm dans Contes, Gallimard, 1976.
Traduction de Marthe Robert.
COMPLÉTEZ LE CONSTAT SUIVANT :
Dans un récit,
– on utilise le passé simple ______________________________________________
– on utilise l’imparfait __________________________________________________
1. La parodie de conte
1/1
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Fi che 17
3•
Voici une version de Barbe-Bleue où les événements ne sont pas racontés dans
l’ordre où ils ont eu lieu.
•
En utilisant les numéros de paragraphes à gauche, indique dans quel ordre les événements se sont passés. _____ _____ _____ _____ _____ _____ _____
•
Observe les trois premiers paragraphes. Quel temps n’est utilisé que dans le
deuxième paragraphe et pourquoi ?
•
A partir du quatrième paragraphe, complète le texte en utilisant les verbes dans la
marge de droite au temps approprié.
•
Applique ce que tu viens de constater à propos du deuxième paragraphe.
1
Un jour Barbe-Bleue, personnage inquiétant qui portait ce nom à cause de la couleur
de sa barbe, dit à sa femme qu’il devait partir en voyage. Il lui laissa les clés de toutes
les pièces de la maison mais il attira son attention sur une clé particulière qui ouvrait
un cabinet secret. Il lui interdit formellement d’ouvrir cette pièce et s’en alla. La jeune
mariée réfléchit à la situation. Elle était très curieuse mais elle ne connaissait pas
encore bien son mari.
2
La première fois qu’elle l’avait vu, elle avait eu peur parce qu’il était laid et on lui avait
dit qu’il avait été marié plusieurs fois et que ses femmes avaient toutes disparu mais,
ensuite, elle s’était laissé convaincre de l’épouser parce qu’il était riche et qu’il s’était
montré gentil lors d’une invitation qu’il lui avait faite.
3
Trois jours plus tard, Barbe-Bleue était de retour et demandait son trousseau de clés.
En voyant sa femme si troublée, il comprit que la clé du cabinet manquait et ordonna
à sa femme d’aller la chercher. Celle-ci courut dans sa chambre et tenta de gagner du
temps pour pouvoir demander de l’aide à sa sœur. Elle était en danger de mort.
faire
4
En effet, dans le cabinet , elle ................................ une macabre découverte : les autres
femmes de Barbe-Bleue égorgées baignaient dans une mare de sang. Prise de
panique, elle ................................ la clé dans le sang et celle-ci ................................
Lorsqu’elle ....................................... la nettoyer, elle ....................................... que c’était
inutile parce que la clé était magique.
5
Heureusement, au moment où Barbe-Bleue ................................ punir de mort la désobéissance de sa femme, les deux frères de la malheureuse ..................................... dans
la pièce et ............................................ leur sœur bien-aimée en tuant son affreux mari.
aller
entrer
délivrer
6
Par chance, Anne, la sœur appelée à l’aide ................................................... sur la tour et
..................................... venir les deux frères. Elle leur ..................................... des signes
désespérés pour les avertir de se dépêcher. Ils ......................................... qu’il se passait
quelque chose d’anormal et ils ................................................
monter
voir, faire
comprendre
accélérer
7
Tout ................................ fort bien. La jeune femme ................................ d’une coquette
fortune grâce à laquelle elle ................................ sa sœur à un gentilhomme,
................................ des charges de capitaine pour ses frères et ................................ellemême avec un homme qui la ................................ très heureuse.
se terminer, hériter
marier
acheter, se marier
rendre
lâcher, se tacher
vouloir, se rendre
compte
1. La parodie de conte
1/1
1
Fi che 18
LA PARODIE DE CONTE : CRITÈRES DE RÉUSSITE ET D’ÉVALUATION DE LA PRODUCTION FINALE
texte de : _______________________________________________________
1
Critères
oui
non
commentaires
valeur
Le texte original est résumé.
Ses étapes principales figurent dans la parodie.
Les transformations de la parodie servent à
amuser le lecteur.
Elles se trouvent dans tout le texte.
Le personnage principal est présenté au début
du texte.
Le titre de la parodie est bien choisi.
S'il y a des paroles rapportées, elles se trouvent
à des moments importants du récit.
Les règles de mise en page des paroles
rapportées sont respectées.
On comprend qui parle, de quelle manière et
quelle est son intention.
Le texte est organisé à l'aide de marqueurs de
temps.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Il est divisé en paragraphes et la ponctuation
est adéquate.
Le système de temps est un système avec passé
simple.
L'imparfait et le passé simple sont bien utilisés.
L'antériorité est exprimée par le plus-queparfait.
L'orthographe est correcte.
1. La parodie de conte
1/1
Annex e 1
1/1
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
LADY RED
Lady Red était la plus belle fille de toute la région et beaucoup d’hommes la
désiraient. Elle vivait aux alentours de la petite ville de Death City. Un jour, elle se
rendit en ville pour aller trouver sa grand-mère, tenancière du bar le Perroquet
Jaune, car elle savait que celle-ci avait besoin d’une bouteille de whisky et de cacahuètes.
Pour se rendre là-bas, elle devait emprunter un petit chemin sinueux qui passait par
Ghosts’ Vallee. Sur sa route, elle rencontra le célèbre Wolf-Boy pas net, méchant et
soûl qui lui demanda où elle se rendait. Nullement impressionnée par cet énergumène, Lady Red lui répondit d’un air hautain qu’elle allait trouver Big-Mama, sa
grand-mère. Celui-ci, alléché par les rondeurs de Big-Mama et par la séduisante
demoiselle, emprunta donc un raccourci secret pour arriver avant Lady Red au Perroquet Jaune.
Au bar, il vit la grosse Big-Mama qui nettoyait le comptoir. Elle le regarda d’un air
soucieux et lui aboya au visage :
– Qu’est-ce que tu veux mon gars ?
Celui-ci lui répondit qu’il la voulait. Celle-ci flattée s’approcha tout près du loup
cow-boy. Alors il l’engloutit avant qu’elle n’ait pu réaliser l’horrible destin qui
l’attendait. Après l’avoir avalée, Wolf-Boy se revêtit des amples habits de Big-Mama
pour duper Lady Red. Lorsque la jeune fille arriva quelques minutes plus tard, elle
trouva que sa grand-mère avait changé et peut-être un peu maigri. C’est pourquoi
elle interrogea :
– N’aurais-tu pas un peu maigri ?
– J’ai fait un régime mon chou.
– Quelle haleine ! Aurais-tu bu ?
– Quelques gouttes parce que je m’ennuyais.
– Mon Dieu ! Quelles dents jaunes et immenses !
– C’est pour mieux te dévorer, baby !
Au moment où il se préparait à la manger, les portes du bar claquèrent et apparut le
très beau et courageux John, le shérif de Death City.
Quand il vit ce que s’apprêtait à faire Wolf-Boy, il sortit son revolver et lui assena un
coup de crosse dans le ventre. Le méchant loup cracha la grand-mère sur le coup.
Celle-ci se sentit un peu gluante. Lady Red s’écria :
– Oh mon sauveur !
Le beau John lui sourit et l’éclat de ses dents l’éblouit davantage. Tout à coup WolfBoy frappa le beau shérif dans le dos. Celui-ci tomba, se releva et provoqua le loup
en duel. Il fut fixé à midi sonnant.
Midi. Les hommes arrivent prêts à s’entre-tuer pour Lady Red. Le soleil est au
zénith, la chaleur est atroce et les deux bandits transpirent à grosses gouttes. Ils se
regardent intensément, prêts à dégainer. Au douzième coup, le shérif tire avant que
la balle du loup ne l’atteigne. John s’écroule et gémit tandis que Wolf-Boy s’effondre.
Pas très « fut-fut » les gars...
M. P. et L. R. dans 25 piges, juin 1999
1. La parodie de conte
1
Annex e 2
LE CHAPERON ROUGE
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1
Il était une fois une fille qui s’appelait le Chaperon Rouge. Elle avait ce nom original pour
deux raisons. D’abord, elle se promenait tout le temps avec un imperméable rouge et ne
portait que ça. De plus, elle était la descendante lointaine du premier Chaperon Rouge.
C’était une fille aimable mais qui avait son caractère et savait se défendre. Elle habitait
avec ses parents, qui étaient riches, dans une grande maison de banlieue.
Un jour, sa mère lui dit :
– Ma chérie, ta grand-mère a cent ans aujourd’hui. Va lui porter cette boîte de caviar
et cette bouteille de champagne. Ton père et moi vous rejoindrons dans la soirée et
nous fêterons son anniversaire ensemble.
La fillette prit le sac avec le caviar et le champagne, démarra avec son vélomoteur et
partit en direction de la villa que sa grand-mère occupait en bordure de la forêt.
Pendant ce temps, ce qui semblait être un homme bien habillé conduisait une grosse
Mercedes. Mais c’était en fait un loup ! Il avait dévoré la propriétaire de la Mercedes,
lui avait pris ses vêtements et sa voiture. Il avait appris, on ne sait comment, à conduire. Il allait aussi chez la grand-mère du Chaperon Rouge afin de la dévorer et de
sauver l’honneur de son ancêtre, car il était aussi le descendant du premier grand
méchant loup.
Comme il conduisait comme une pantoufle et sur la même route que le Chaperon
Rouge, la fillette le rattrapa vite avec son vélomoteur. Quand il la vit dans son
rétroviseur, il en resta bouche bée.
– Incroyable ! se dit-il. Je suis sûr que c’est le descendant du Chaperon Rouge !
Mais soudain, il se rendit compte qu’elle allait le dépasser. Il ne perdit pas une
seconde. Il lui fit une queue de poisson et pila sur les freins. Le Chaperon Rouge voulut éviter la voiture et se cassa la figure. Le loup sortit de la voiture et aida le Chaperon Rouge en disant :
– Mille excuses, mademoiselle ! Je voulais freiner pour vous laisser passer et j’ai
dérapé. Vous n’avez rien ? !
Le Chaperon était un peu étourdi mais trouva ce monsieur poilu fort aimable. Le
loup poursuivit :
– Vous devriez vous reposer quelques minutes pour vous remettre de cette émotion.
Le Chaperon Rouge accepta et commit l’erreur de raconter où elle allait. Le loup ne
perdit pas un instant. Il sauta dans sa voiture et démarra en trombe.
La grand-mère était restée très jeune et dynamique malgré son grand âge. Elle était
en train de jouer à un jeu vidéo quand le loup arriva. Quand il sonna à la porte, la
grand-mère grommela :
– Juste au moment où j’allais gagner ! On n’est jamais tranquille !
Quand elle vit le loup dans le judas, elle cria :
– Fiche-moi le camp, sale bête, ou je vais chercher mon fusil !
Mais le loup sauta par une fenêtre et se jeta sur la grand-mère. Mais la vieille femme
connaissait le judo. Elle renversa à terre le loup qui se jeta à nouveau sur elle.
Quand le Chaperon Rouge arriva à la villa, il entendit un grand vacarme. Il voulut
assommer le loup qui se battait avec la grand-mère. Il prit un tisonnier mais ne réussit qu’à assommer la grand-mère. Du coup, le loup se jeta sur lui. Mais le Chaperon
avait gardé le tisonnier et lui envoya un coup en pleine figure, ce qui l’assomma. Elle
le jeta dehors d’un coup de pied au derrière. Peu après, les parents arrivèrent et ils
fêtèrent ensemble l’anniversaire de la grand-mère. Quant au loup, il se dit :
– Je vais dire à mes enfants de me venger !
Emmanuel, élève de 6e
1. La parodie de conte
1/1
Annex e 3
1/3
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
LA BARBE-BLEUE
Il était une fois un homme qui avait de belles maisons à la ville et à la campagne, de
la vaisselle d’or et d’argent, des meubles en broderie et des carrosses tout dorés.
Mais, par malheur, cet homme avait la barbe bleue : cela le rendait si laid et si terrible, qu’il n’était ni femme ni fille qui ne s’enfuît de devant lui. Une de ses voisines,
dame de qualité, avait deux filles parfaitement belles. Il lui en demanda une en
mariage, en lui laissant le choix de celle qu’elle voudrait lui donner. Elles n’en voulaient point toutes deux, et se le renvoyèrent l’une à l’autre, ne pouvant se résoudre
à prendre un homme qui eût la barbe bleue. Ce qui les dégoûtait encore, c’est qu’il
avait déjà épousé plusieurs femmes, et qu’on ne savait ce que ces femmes étaient
devenues.
La Barbe-Bleue, pour faire connaissance, les mena, avec leur mère et trois ou quatre
de leurs meilleures amies et quelques jeunes gens du voisinage, à une de ses maisons de campagne, où on demeura huit jours entiers. Ce n’était que promenades,
que parties de chasse et de pêche, que danses et festins, que collations : on ne dormait point et on passait toute la nuit à se faire malices les uns aux autres ; enfin tout
alla si bien, que la cadette commença à trouver que le maître du logis n’avait plus la
barbe si bleue, et que c’était un fort honnête homme.
Dès qu’on fut de retour à la ville, le mariage se conclut.
Au bout d’un mois, la Barbe-Bleue dit à sa femme qu’il était obligé de faire un
voyage en province, de six semaines au moins, pour une affaire de conséquence ;
qu’il la priait de se bien divertir pendant son absence ; qu’elle fît venir ses bonnes
amies ; qu’elle les menât à la campagne, si elle voulait ; que partout elle fît bonne
chère.
« Voilà », lui dit-il, « les clés des deux garde-meubles ; voilà celle de la vaisselle d’or
et d’argent, qui ne sert pas tous les jours ; voilà celle de mes coffres-forts, où est
mon or et mon argent ; celle de mes cassettes où sont mes pierreries ; et voilà le
passe-partout de tous les appartements.
Pour cette petite clef-ci, c’est la clef du cabinet au bout de la grande galerie de
l’appartement bas ; ouvrez tout ; allez partout ; mais, pour ce petit cabinet, je vous
défends d’y entrer, et je vous le défends de telle sorte que, s’il vous arrive de
l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne deviez attendre de ma colère. »
Elle promit d’observer exactement tout ce qui lui venait d’être ordonné ; et lui,
après l’avoir embrassée, monte dans son carrosse, et part pour son voyage.
Les voisines et les bonnes amies n’attendirent pas qu’on les envoyât quérir pour
aller chez la jeune mariée, tant elles avaient d’impatience de voir toutes les richesses de sa maison, n’ayant osé y venir pendant que le mari y était, à cause de sa
barbe bleue qui leur faisait peur.
Les voilà aussitôt à parcourir les chambres, les cabinets, les garde-robes, toutes
plus belles et plus riches les unes que les autres. Elles montèrent ensuite aux gardemeubles, où elles ne pouvaient assez admirer le nombre et la beauté des tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des guéridons, des tables et des miroirs où
l’on se voyait depuis les pieds jusqu’à la tête, et dont les bordures, les unes de
glace, les autres d’argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu’on eût jamais vues ; elles ne cessaient d’exagérer et d’envier le bonheur
de leur amie, qui cependant ne se divertissait point à voir toutes ces richesses, à
cause de l’impatience qu’elle avait d’aller ouvrir le cabinet de l’appartement bas.
1. La parodie de conte
1
Annex e 3
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
1
Elle fut si pressée de sa curiosité que, sans considérer qu’il était malhonnête de
quitter sa compagnie, elle descendit par un escalier dérobé, et avec tant de précipitation qu’elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois. Etant arrivée à la porte du
cabinet, elle s’y arrêta quelque temps, songeant à la défense que son mari lui avait
faite, et considérant qu’il pouvait lui arriver malheur d’avoir été désobéissante ;
mais la tentation était si forte qu’elle ne put la surmonter ; elle prit donc la petite
clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet.
D’abord elle ne vit rien, parce que les fenêtres étaient fermées. Après quelques
moments, elle commença à voir que le plancher était tout couvert de sang caillé,
dans lequel se miraient les corps de plusieurs femmes mortes, attachées le long des
murs : c’étaient toutes les femmes que la Barbe-Bleue avait épousées et qu’il avait
égorgées l’une après l’autre.
Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet, qu’elle venait de retirer de la serrure, lui tomba de la main. Après avoir un peu repris ses sens, elle ramassa la clef,
referma la porte, et monta à sa chambre pour se remettre un peu ; mais elle n’en
pouvait venir à bout, tant elle était émue. Ayant remarqué que la clef du cabinet
était tachée de sang, elle l’essuya deux ou trois fois ; mais le sang ne s’en allait
point ; elle eut beau la laver et même la frotter avec du sable et du grès, il y demeura
toujours du sang ; car la clef était fée, et il n’y avait pas moyen de la nettoyer tout à
fait : quand on ôtait le sang d’un côté, il revenait de l’autre...
La Barbe-Bleue revint de son voyage le soir même, et dit qu’il avait reçu des lettres
en chemin, qui lui avaient appris que l’affaire pour laquelle il était parti venait d’être
terminée à son avantage. Sa femme fit tout ce qu’elle put pour lui témoigner qu’elle
était ravie de son prompt retour. Le lendemain, il lui demanda les clefs, et elle les lui
donna mais d’une main si tremblante, qu’il devina sans peine tout ce qui s’était
passé. « D’où vient », lui dit-il, « que la clef du cabinet n’est point avec les autres ? »
« Il faut », dit-elle, « que je l’aie laissée là-haut sur ma table. »
« Ne manquez pas », dit la Barbe-Bleue, « de me la donner tantôt. »
Après plusieurs remises, il fallut apporter la clef. La Barbe-Bleue, l’ayant considérée, dit à sa femme : « Pourquoi y a-t-il du sang sur cette clef ? »
« Je n’en sais rien », répondit la pauvre femme, plus pâle que la mort.
« Vous n’en savez rien ? » reprit la Barbe-Bleue ; « je le sais bien, moi. Vous avez
voulu entrer dans le cabinet ? Eh bien, madame, vous y entrerez, et irez prendre
place auprès des dames que vous y avez vues. »
Elle se jeta aux pieds de son mari, en pleurant et en lui demandant pardon, avec toutes les marques d’un vrai repentir de n’avoir pas été obéissante. Elle aurait attendri
un rocher, belle et affligée comme elle était ; mais la Barbe-Bleue avait un cœur plus
dur qu’un rocher :
« Il faut mourir, madame », lui dit-il, « et tout à l’heure. »
« Puisqu’il faut mourir », répondit-elle en le regardant, les yeux baignés de larmes,
« donnez-moi un peu de temps pour prier Dieu. »
« Je vous donne un demi-quart d’heure », reprit la Barbe-Bleue, « mais pas un
moment davantage. »
Lorsqu’elle fut seule, elle appela sa sœur, et lui dit : « Ma sœur Anne » (car elle
s’appelait ainsi), « monte, je te prie, sur le haut de la tour, pour voir si mes frères ne
viennent point ; ils m’ont promis qu’ils me viendraient voir aujourd’hui ; et si tu les
vois, fais-leur signe de se hâter. »
1. La parodie de conte
2/3
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Annex e 3
La sœur Anne monta sur le haut de la tour, et la pauvre affligée lui criait de temps en
temps : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? » Et la sœur Anne répondait :
« Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie. » Cependant la
Barbe-Bleue, tenant un grand coutelas à la main, criait de toute sa force : « Descends
vite, ou je monterai là-haut. » « Encore un moment, s’il vous plaît », lui répondit sa
femme. Et aussitôt elle criait tout bas : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien
venir ? » Et la sœur Anne répondait : « Je ne vois que le soleil qui poudroie et l’herbe
qui verdoie. »
« Descends donc vite », criait la Barbe-Bleue, « ou je monterai là-haut. » « Je m’en
vais », répondit la femme ; et puis elle criait : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien
venir ? »
« Je vois », répondit la sœur Anne, « une grosse poussière qui vient de ce côté-ci... »
« Sont-ce mes frères ? »
« Hélas ! non, ma sœur, je vois un troupeau de moutons... »
« Ne veux-tu pas descendre ? » criait la Barbe-Bleue.
« Encore un petit moment », répondit sa femme ; et puis elle criait : « Anne, ma sœur
Anne, ne vois-tu rien venir ? »
« Je vois », répondit-elle, « deux cavaliers qui viennent de ce côté ; mais ils sont bien
loin encore. »
« Dieu soit loué ! » s’écria-t-elle un moment après, « ce sont mes frères. »
« Je leur fais signe tant que je puis de se hâter. »
La Barbe-Bleue se mit à crier si fort que toute la maison en trembla. La pauvre
femme descendit, et elle alla se jeter à ses pieds tout éplorée et tout échevelée.
« Cela ne sert de rien », dit la Barbe-Bleue, « il faut mourir. » Puis, la prenant d’une
main par les cheveux, et de l’autre levant le coutelas en l’air, il allait lui abattre la
tête.
La pauvre femme se tournant vers lui, et le regardant avec des yeux mourants, le
pria de lui donner un petit moment pour se recueillir.
« Non, non », dit-il, « recommande-toi bien à Dieu », et levant son bras...
Dans ce moment, on heurta si fort à la porte, que la Barbe-Bleue s’arrêta tout court.
On ouvrit, et aussitôt on vit entrer deux cavaliers qui, mettant l’épée à la main, coururent droit à la Barbe-Bleue.
Il reconnut que c’étaient les frères de sa femme, l’un dragon et l’autre mousquetaire,
de sorte qu’il s’enfuit aussitôt pour se sauver ; mais les deux frères le poursuivirent
de si près qu’ils l’attrapèrent avant qu’il pût gagner le perron. Ils lui passèrent leur
épée au travers du corps, et le laissèrent mort. La pauvre femme était presque aussi
morte que son mari, et n’avait pas la force de se lever pour embrasser ses frères.
Il se trouva que la Barbe-Bleue n’avait point d’héritiers, et qu’ainsi sa femme
demeura maîtresse de tous ses biens. Elle en employa une partie à marier sa jeune
sœur Anne avec un jeune gentilhomme dont elle était aimée depuis longtemps ; une
autre partie à acheter des charges de capitaine à ses deux frères ; et le reste à se
marier elle-même à un fort honnête homme, qui lui fit oublier le mauvais temps
qu’elle avait passé avec la Barbe-Bleue.
La Barbe-Bleue dans Contes de C. Perrault, L’Ecole des loisirs, Neuf, 1978.
1. La parodie de conte
3/3
1
Annex e 4
Contraintes à donner aux groupes d’élèves après tirage au sort d’un conte
conte
1
groupe
Cendrillon
1
Cendrillon
2
Le chat botté
1
transformations
– lieu + époque : dans la Rome antique
– Cendrillon devient un simple soldat
– époque : en 2125
– Cendrillon devient un robot
– lieu : dans le Grand Nord
– le chat devient un oiseau
– lieu : à Lausanne
Le chat botté
2
– le chat ne demande pas un sac et une paire
de bottes mais un téléphone et un ordinateur portables
– lieu : à New-York
Le petit Poucet
1
– époque : de nos jours
– le petit Poucet devient un géant
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Le petit Poucet
2
– le petit Poucet devient une fille
– son père est un riche homme d’affaires
– époque : en été 2125
Blancheneige
1
– la particularité de la fillette n’est pas la
beauté mais l’intelligence
– époque : de nos jours
Blancheneige
2
– Blancheneige devient un garçon et sa particularité n’est pas la beauté mais la force
1. La parodie de conte
1/1
Annex e 5
1/6
Module 2 activité 3 : jeu de cartes
titres
titres parodiés
La top modèle et le SDF
La Belle et la Bête
La miss et le monstre
Les trois petits cochons
Les quatre grosses truies
Hansel et Gretel
Ficelle et Bretelle
Les deux nigauds
Les deux finaudes
Le livre de la jungle
La BD de la forêt
Les 101 Dalmatiens
Les 99 Siamois
Les Aristochats
Les Ploutochiens
Le chat botté
La souris pantouflarde
Vingt mille lieues sous les mers
Dix mille bornes en bateau
Le bon petit diable
La méchante petite sainte
Les malheurs de Sophie
La chance de Pierrot
Poil de carotte
Toison d’ébène
On a marché sur la lune
On a roulé sur la terre
La cigale et la fourmi
Le flambeur et le banquier
Le petit Poucet
La grosse poussette
Le corbeau et le renard
Le fromager et le flatteur
Les habits neufs de l’empereur
La reine n’a plus rien à se mettre
Moitié de Poulet
Quart de cochon
Le loup et l’agneau
L’innocence et la mauvaise foi
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
La Belle et le Clochard
1. La parodie de conte
1
La Belle et la Bête
La miss et le monstre
La top modèle et le SDF
Les quatre grosses truies
Les trois petits cochons
Ficelle et Bretelle
Hansel et Gretel
1
La Belle et le Clochard
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Annex e 5
1. La parodie de conte
2/6
Le livre de la jungle
La BD de la forêt
Les deux nigauds
Les deux finaudes
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Les 99 Siamois
Les 101 Dalmatiens
Les Ploutochiens
Les Aristochats
Annex e 5
1. La parodie de conte
3/6
1
Vingt mille lieues
sous les mers
Dix mille bornes en bateau
La souris pantouflarde
La méchante petite sainte
Le bon petit diable
La chance de Pierrot
Les malheurs de Sophie
1
Le chat botté
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Annex e 5
1. La parodie de conte
4/6
On a marché sur la lune
On a roulé sur la terre
Poil de carotte
Toison d’ébène
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Le flambeur et le banquier
La cigale et la fourmi
La grosse poussette
Le petit Poucet
Annex e 5
1. La parodie de conte
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1
Moitié de Poulet
Quart de cochon
Les habits neufs
de l’empereur
La reine n’a plus rien
à se mettre
Le fromager et le flatteur
L’innocence et la mauvaise foi
Le loup et l’agneau
1
Le corbeau et le renard
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Annex e 5
1. La parodie de conte
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Annex e 6
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Corrigé de la fiche 7
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
VERSION ORIGINALE
Il était une fois un homme qui avait de belles
maisons à la ville et à la campagne, de la vaisselle d’or et d’argent, des meubles en broderie
et des carrosses tout dorés. Mais, par malheur,
cet homme avait la barbe bleue : cela le rendait
si laid et si terrible, qu’il n’était ni femme ni fille
qui ne s’enfuît de devant lui. Une de ses voisines, dame de qualité, avait deux filles parfaitement belles. Il lui en demanda une en mariage,
en lui laissant le choix de celle qu’elle voudrait
lui donner. Elles n’en voulaient point toutes
deux, et se le renvoyèrent l’une à l’autre, ne pouvant se résoudre à prendre un homme qui eût la
barbe bleue. Ce qui les dégoûtait encore, c’est
qu’il avait déjà épousé plusieurs femmes, et
qu’on ne savait ce que ces femmes étaient devenues.
La Barbe-Bleue, pour faire connaissance, les
mena, avec leur mère et trois ou quatre de leurs
meilleures amies et quelques jeunes gens du
voisinage, à une de ses maisons de campagne,
où on demeura huit jours entiers. Ce n’était que
promenades, que parties de chasse et de pêche,
que danses et festins, que collations : on ne dormait point et on passait toute la nuit à se faire
malices les uns aux autres ; enfin tout alla si
bien, que la cadette commença à trouver que le
maître du logis n’avait plus la barbe si bleue, et
que c’était un fort honnête homme.
Dès qu’on fut de retour à la ville, le mariage se
conclut.
Au bout d’un mois, la Barbe-Bleue dit à sa
femme qu’il était obligé de faire un voyage en
province, de six semaines au moins, pour une
affaire de conséquence ; qu’il la priait de se bien
divertir pendant son absence ; qu’elle fît venir
ses bonnes amies ; qu’elle les menât à la campagne, si elle voulait ; que partout elle fît bonne
chère.
« Voilà », lui dit-il, « les clés des deux gardemeubles ; voilà celle de la vaisselle d’or et
d’argent, qui ne sert pas tous les jours ; voilà
celle de mes coffres-forts, où est mon or et mon
argent ; celle de mes cassettes où sont mes
pierreries ; et voilà le passe-partout de tous les
appartements.
Pour cette petite clef-ci, c’est la clef du cabinet
au bout de la grande galerie de l’appartement
bas ; ouvrez tout ; allez partout ; mais, pour ce
petit cabinet, je vous défends d’y entrer, et je
vous le défends de telle sorte que, s’il vous
arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne
deviez attendre de ma colère. »
Elle promit d’observer exactement tout ce qui
lui venait d’être ordonné ; et lui, après l’avoir
VERSION PARODIÉE
1
Il était une fois un play-boy à la barbe bleue qui
épousa une jeune pin-up. Cette pin-up avait un
peu peur de son mari car il avait un look généralement sombre et mystérieux. Dans les gardenparties et cocktails mondains, les mauvaises
langues disaient qu’il avait été marié déjà six
fois, mais qu’on ne savait pas ce que ses femmes étaient devenues.
Un week-end, Barbe-Bleue dit à son épouse :
– Darling, je dois aller à un meeting international prendre la parole sur des problèmes de marketing. Je te laisse les clés du loft. Et parmi celles-ci, voici une clé spéciale qui ouvre une
kitchenette secrète que je t’interdis de visiter.
Là-dessus, Barbe-Bleue embrassa sa femme en
disant « I love you, baby », et il s’en alla en break
à la ville.
1. La parodie de conte
Annex e 6
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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embrassée, monte dans son carrosse, et part
pour son voyage.
Les voisines et les bonnes amies n’attendirent
pas qu’on les envoyât quérir pour aller chez la
jeune mariée, tant elles avaient d’impatience de
voir toutes les richesses de sa maison, n’ayant
osé y venir pendant que le mari y était, à cause
de sa barbe bleue qui leur faisait peur.
Les voilà aussitôt à parcourir les chambres, les
cabinets, les garde-robes, toutes plus belles et
plus riches les unes que les autres. Elles montèrent ensuite aux garde-meubles, où elles ne pouvaient assez admirer le nombre et la beauté des
tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des
guéridons, des tables et des miroirs où l’on se
voyait depuis les pieds jusqu’à la tête, et dont
les bordures, les unes de glace, les autres
d’argent et de vermeil doré, étaient les plus belles et les plus magnifiques qu’on eût jamais
vues ; elles ne cessaient d’exagérer et d’envier
le bonheur de leur amie, qui cependant ne se
divertissait point à voir toutes ces richesses, à
cause de l’impatience qu’elle avait d’aller ouvrir
le cabinet de l’appartement bas.
Elle fut si pressée de sa curiosité que, sans considérer qu’il était malhonnête de quitter sa compagnie, elle descendit par un escalier dérobé, et
avec tant de précipitation, qu’elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois. Etant arrivée à la
porte du cabinet, elle s’y arrêta quelque temps,
songeant à la défense que son mari lui avait
faite, et considérant qu’il pouvait lui arriver malheur d’avoir été désobéissante ; mais la tentation était si forte qu’elle ne put la surmonter ;
elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet.
D’abord elle ne vit rien, parce que les fenêtres
étaient fermées. Après quelques moments, elle
commença à voir que le plancher était tout couvert de sang caillé, dans lequel se miraient les
corps de plusieurs femmes mortes, attachées le
long des murs : c’étaient toutes les femmes que
la Barbe-Bleue avait épousées et qu’il avait
égorgées l’une après l’autre.
Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet,
qu’elle venait de retirer de la serrure, lui tomba
de la main. Après avoir un peu repris ses sens,
elle ramassa la clef, referma la porte, et monta à
sa chambre pour se remettre un peu. Ayant
remarqué que la clef du cabinet était tachée de
sang, elle l’essuya deux ou trois fois ; mais le
sang ne s’en allait point ; elle eut beau la laver et
même la frotter avec du sable et du grès, il y
demeura toujours du sang ; car la clef était fée,
et il n’y avait pas moyen de la nettoyer tout à
fait : quand on ôtait le sang d’un côté, il revenait
de l’autre...
Dès qu’il eut tourné les talons, sa femme qui
était curieuse speeda ouvrir la kitchenette. Elle
manqua tomber knock-out à la vue du spectacle
qu’elle découvrit ! En effet, les cadavres des six
premières épouses de Barbe-Bleue étaient là,
entassés comme dans un western ou un thriller.
La jeune femme effrayée en laissa tomber la clé
dans le sang rouge comme de la sauce ketchup.
Mais elle eut beau ensuite laver avec du whitespirit la clé tachée, elle ne réussit pas à effacer
les traces de sang, car c’était une clé magique.
1. La parodie de conte
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S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
Annex e 6
La Barbe-Bleue revint de son voyage le soir
même, et dit qu’il avait reçu des lettres en chemin, qui lui avaient appris que l’affaire pour
laquelle il était parti venait d’être terminée à
son avantage. Sa femme fit tout ce qu’elle put
pour lui témoigner qu’elle était ravie de son
prompt retour. Le lendemain, il lui demanda les
clefs, et elle les lui donna mais d’une main si
tremblante, qu’il devina sans peine tout ce qui
s’était passé. « D’où vient », lui dit-il, « que la clef
du cabinet n’est point avec les autres ? »
« Il faut », dit-elle, « que je l’aie laissée là-haut sur
ma table. »
« Ne manquez pas », dit la Barbe-Bleue, « de me
la donner tantôt. »
Après plusieurs remises, il fallut apporter la
clef. La Barbe-Bleue, l’ayant considérée, dit à sa
femme : « Pourquoi y a-t-il du sang sur cette
clef ? »
« Je n’en sais rien », répondit la pauvre femme,
plus pâle que la mort.
« Vous n’en savez rien ? » reprit la Barbe-Bleue ;
« je le sais bien, moi. Vous avez voulu entrer
dans le cabinet ? Eh bien, madame, vous y
entrerez, et irez prendre place auprès des
dames que vous y avez vues. »
Elle se jeta aux pieds de son mari, en pleurant et
en lui demandant pardon, avec toutes les marques d’un vrai repentir de n’avoir pas été obéissante. Elle aurait attendri un rocher, belle et
affligée comme elle était ; mais la Barbe-Bleue
avait un cœur plus dur qu’un rocher : « Il faut
mourir, madame », lui dit-il, « et tout à l’heure. »
« Puisqu’il faut mourir », répondit-elle en le
regardant, les yeux baignés de larmes, « donnezmoi un peu de temps pour prier Dieu. »
« Je vous donne un demi-quart d’heure », reprit
la Barbe-Bleue, « mais pas un moment davantage. »
Lorsqu’elle fut seule, elle appela sa sœur, et lui
dit : « Ma sœur Anne » (car elle s’appelait ainsi),
« monte, je te prie, sur le haut de la tour, pour
voir si mes frères ne viennent point ; ils m’ont
promis qu’ils me viendraient voir aujourd’hui ;
et si tu les vois, fais-leur signe de se hâter. »
La sœur Anne monta sur le haut de la tour, et la
pauvre affligée lui criait de temps en temps :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
Et la sœur Anne répondait : « Je ne vois rien que
le soleil qui poudroie, et l’herbe qui verdoie. »
Cependant la Barbe-Bleue, tenant un grand coutelas à la main, criait de toute sa force :
« Descends vite, ou je monterai là-haut. »
« Encore un moment, s’il vous plaît », lui
répondit sa femme. Et aussitôt elle criait tout
bas : « Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien
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1
Et justement, Barbe-Bleue faisait un come-back
parce qu’il avait oublié quelque chose.
– Je suis revenu, dit-il, car j’ai oublié mon attaché-case.
Alors il remarqua que sa femme était si troublée
qu’elle était au bord du break-down. Et, à la voir
si peu cool, il devina qu’elle avait ouvert la
kitchenette !
– Okay, dit-il, rends-moi mes clés !
– Je les ai laissées dans le living-room ! balbutia
la malheureuse femme affolée.
– Va les chercher, exigea Barbe-Bleue de sa belle
voix de crooner.
La femme grimpa vite au sommet du building.
Elle rencontra sa sœur à la sortie du lift.
– Anne ! lui demanda-t-elle. Regarde par le bowwindow si tu vois nos frères arriver !
Car elle attendait ses frères qui étaient militaires et servaient dans les tanks. Anne se mit aussitôt à scruter la campagne avec un zoom. Pendant ce temps, en bas, Barbe-Bleue trompait
1. La parodie de conte
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S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
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venir ? » Et la sœur Anne répondait : « Je ne vois
que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie. »
« Descends donc vite », criait la Barbe-Bleue,
« ou je monterai là-haut. » « Je m’en vais »,
répondit la femme ; et puis elle criait : « Anne,
ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? »
« Je vois », répondit la sœur Anne, « une grosse
poussière qui vient de ce côté-ci... »
« Sont-ce mes frères ? »
« Hélas ! non, ma sœur, je vois un troupeau de
moutons... »
« Ne veux-tu pas descendre ? » criait la Barbe-Bleue.
« Encore un petit moment », répondit sa femme ;
et puis elle criait : « Anne, ma sœur Anne, ne
vois-tu rien venir ? »
« Je vois », répondit-elle, « deux cavaliers qui viennent de ce côté ; mais ils sont bien loin encore. »
« Dieu soit loué ! » s’écria-t-elle un moment
après, « ce sont mes frères. »
« Je leur fais signe tant que je puis de se hâter. »
La Barbe-Bleue se mit à crier si fort que toute la
maison en trembla. La pauvre femme descendit,
et elle alla se jeter à ses pieds tout éplorée et
tout échevelée.
« Cela ne sert de rien », dit la Barbe-Bleue, « il
faut mourir. » Puis, la prenant d’une main par les
cheveux, et de l’autre levant le coutelas en l’air,
il allait lui abattre la tête.
La pauvre femme se tournant vers lui, et le
regardant avec des yeux mourants, le pria de lui
donner un petit moment pour se recueillir.
« Non, non », dit-il, « recommande-toi bien à
Dieu », et levant son bras...
Dans ce moment, on heurta si fort à la porte,
que la Barbe-Bleue s’arrêta tout court. On
ouvrit, et aussitôt on vit entrer deux cavaliers
qui, mettant l’épée à la main, coururent droit à
la Barbe-Bleue.
Il reconnut que c’étaient les frères de sa femme,
l’un dragon et l’autre mousquetaire, de sorte
qu’il s’enfuit aussitôt pour se sauver ; mais les
deux frères le poursuivirent de si près qu’ils
l’attrapèrent avant qu’il pût gagner le perron. Ils
lui passèrent leur épée au travers du corps, et le
laissèrent mort. La pauvre femme était presque
aussi morte que son mari, et n’avait pas la force
de se lever pour embrasser ses frères.
Il se trouva que la Barbe-Bleue n’avait point
d’héritiers, et qu’ainsi sa femme demeura maîtresse de tous ses biens. Elle en employa une
partie à marier sa jeune sœur Anne avec un
jeune gentilhomme dont elle était aimée depuis
longtemps ; une autre partie à acheter des charges de capitaine à ses deux frères ; et le reste à
se marier elle-même à un fort honnête homme,
qui lui fit oublier le mauvais temps qu’elle avait
passé avec la Barbe-Bleue.
Ch. Perrault, Barbe-Bleue.
son impatience en buvant un whisky on the
rocks.
– Baby ! cria-t-il. Si tu ne descends pas, je vais
monter te chercher et je te transformerai en
hamburger !
La pauvre femme s’affolait et pleurait tellement
que le make-up de ses yeux fondait et coulait
sur ses joues.
– Anne, sister Anne, ne vois-tu rien venir ? criaitelle.
– Je ne vois que l’herbe qui verdoie sur le green
du golf à côté de chez nous, répondait la sœur
parfaitement relaxe.
D’en bas, Barbe-Bleue hurlait qu’il allait transformer sa femme en porridge.
– Anne, sister Anne, implorait la malheureuse,
ne vois-tu rien venir, please ?
– Je vois une jeep qui roule sur la route ! Elle est
pleine de boys de l’US Army !
Cependant, Barbe-Bleue, énervé, ouvrit son
grand bowie-knife et grimpa l’escalier pour aller
trancher la gorge de sa femme.
– Kiss me, et fais tes prières ! lui dit-il.
Mais les frères arrivaient avec des soldats,
browning au poing. Ils lui tirèrent dans le ventre
une quinzaine de balles dum-dum, et l’affreux
mari à la barbe bleue tomba sur le plancher.
La femme de Barbe-Bleue se jeta dans les bras
de ses frères en disant thank you.
Plus tard, avec les dollars de son mari, elle leur
acheta des grades de capitaine à la NASA. Puis
elle épousa un joyeux hippie qu’elle aimait
depuis longtemps et qui jouait de la guitare dobbro dans les snacks. C’est comme ça que l’histoire s’achève en happy end. That’s all, Folks !
Y. Rivais, Barbe-Bleue, in Les Contes du Miroir,
L’École des Loisirs, 1988.
1. La parodie de conte
4/4
Annex e 7
1/1
Aide-mémoire pour écrire une parodie de conte
1. Le texte doit ressembler à un conte, éventuellement commencer par « Il était une
fois... »
1
2. Le texte original est résumé mais ses étapes principales figurent dans la parodie, en
particulier la complication (dans Barbe-Bleue : l’interdiction et la désobéissance).
3. Les transformations de la parodie peuvent porter sur les personnages, les lieux, l’époque et elles servent à amuser le lecteur.
Ces transformations se trouvent dans tout le texte.
4. Le personnage principal est présenté lorsqu’on parle de lui pour la première fois, en
particulier s’il a un nom original qui est aussi le titre du conte.
S’exprimer en français, Volume IV © Corome/De Boeck, 2001
5. Les paroles des personnages rapportées telles qu’elles ont été dites créent un effet de
réalité et se trouvent donc à des moments importants du récit.
Elles sont mises en page selon des règles précises.
Elles permettent d’identifier qui parle, de quelle manière et quelle est son intention.
6. Pour que le récit soit cohérent et compréhensible, il faut l’organiser à l’aide de marqueurs de temps.
Les différentes parties sont visibles grâce à des paragraphes.
La ponctuation est importante.
7. Dans la parodie comme dans le conte, le système de temps est un système avec passé
simple.
On utilise le passé simple pour les événements qui font avancer le récit et on utilise
l’imparfait pour les éléments d’arrière-plan.
L’antériorité est exprimée par le plus-que-parfait.
1. La parodie de conte