les items de - La Revue du Praticien
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LES ITEMS DE SEPTEMBRE 2016 _ TOME 66 _ NUMÉRO 7 W W W. L A R E V U E D U P R AT I C I E N . F R ITEM 61 ITEM 289 ITEM 249 ITEM 34 ITEM 93 ITEM 117 Trouble schizophrénique Diagnostic des cancers Amaigrissement Anomalies du cycle menstruel Radiculalgie et syndrome canalaire Handicap psychique ITEM 198 Biothérapies et thérapies ciblées Supplément au tome 66 - numéro 7 de la revue principale • Ne peut être vendu séparément Les items de larevuedupraticien VOL. 66 n SEPTEMBRE 2016 Items 61 289 249 198 34 93 117 314, Bureaux de la Colline, 92213 Saint-Cloud Cedex Tél. : 01 55 62 68 00 Fax : 01 55 62 68 12 [email protected] www.larevuedupraticien.fr DIRECTION GÉNÉRALE-DIRECTION DES PUBLICATIONS Alain Trébucq (6903) [email protected] DIRECTION DES RÉDACTIONS MÉDICALES RÉDACTEUR EN CHEF Jean Deleuze RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT Marie-Aude Dupuy SECRÉTARIAT DE LA RÉDACTION Patricia Fabre COMITÉ DE LECTURE ET DE RÉDACTION SCIENTIFIQUE Jean-Noël Fiessinger, Jean-Michel Chabot, Jean-François Cordier, Richard Delarue, Jean Deleuze, Olivier Fain, Bernard Gavid, Alexandre Pariente, Alain Tenaillon A COLLABORÉ À CE NUMÉRO Hélène Esvant RELECTEURS ET CONSEILLERS SCIENTIFIQUES 2015-2016 P. Astagneau, E. Baron, A. Benachi, J.-F. Bergmann, C. Bergoignan-Esper, P. Bey, O. Bouchaud, B. Cariou, T. Carmoi, B. Chevallier, P. Couratier, B. Crestani, N. Danchin, Y. Dauvilliers, J.-C. Delchier, J.-R. Delpero, F. Desgrandchamps, I. Durrieu, J.-P. Fermand, C. Glorion, P. Gorwood, O. Gout, C. Gras-Le Guen, P. Guggenbuhl, A. Hartemann, S. Hercberg, D. Houssin, X. Jouven, V. Leblond, Y. Lachkar, C. Lepage, O. Lortholary, J.-L. Mas, G. Meyer, V. Navarro, J.-F. Nicolas, V. de Parades, P. Parize, É. Pautas, P.-F. Plouin, G. de Pouvourville, S. QuintonFanconi, G. Rajzbaum, B. Riou, J. Sahel, M. Tauber, P. Tattevin, É. Thervet, C. Tourette-Turgis, F. Zinzindohoué COMITÉ D’HONNEUR Sommaire Trouble schizophrénique de l’adolescent et de l’adulte David Misdrahi, Guillaume Fond, Pierre-Michel Llorca DIRECTRICE ARTISTIQUE Item 289 • e291-297 Cristina Hoareau RÉDACTEURS-RÉVISEURS Virginie Laforest, Jehanne Joly ITEM 289 ITEM 249 ITEM 34 ITEM 93 ITEM 117 Trouble schizophrénique Diagnostic des cancers Amaigrissement Anomalies du cycle menstruel Radiculalgie et syndrome canalaire Handicap psychique ITEM 198 Biothérapies et thérapies ciblées Supplément au tome 66 - numéro 7 de la revue principale • Ne peut être vendu séparément © PHANIE Schizophrenic disorder in adolescents and adults › FOCUS 61 • e290 Prendre en charge la schizophrénie SECRÉTAIRE DE RÉDACTION W W W. L A R E V U E D U P R AT I C I E N . F R ITEM 61 David Misdrahi, Guillaume Fond, Pierre-Michel Llorca RÉDACTION EN CHEF TECHNIQUE Cécile Formel SEPTEMBRE 2016 _ TOME 66 _ NUMÉRO 7 Item 61 • e283-289 Claude-François Degos, Dominique Laplane Chantal Trévoux (6806) [email protected] LES ITEMS DE Management of schizophrenia Diagnostic des cancers. Signes d'appel et investigations Diagnosis of cancer. Warning signs and paraclinical paracliniques ; caractérisation du stade ; pronostic Benoîte Mery, Guillaume Moriceau, Romain Rivoirard, Olivier Collard investigations; characterization of the stadium; prognosis › FOCUS 289 • e298 Les métastases des cancers larevuedupraticien® Benoîte Mery, Guillaume Moriceau, Romain Rivoirard, Olivier Collard est une publication de GLOBAL MÉDIA SANTÉ SAS Principal actionnaire : ATMED SAS www.globalmediasante.fr Item 249 • e299-304 Amaigrissement à tous les âges Cancer metastasis Weight loss at all ages Anne-Laure Fauchais, Anne Cypierre Capital de 4 289 852 e Durée de 99 ans à compter du 30.03.99 N° de commission paritaire : 0220 W 90254 Impression RAS Villiers-le-Bel (95400) Item 198 • e305-309 Biothérapies et thérapies ciblées Targeted and biological therapies Arsène Mekinian, Olivier Fain Item 34 • e311-319 Anomalies du cycle menstruel. Métrorragies Menstrual abnormalities. Metrorrhagias Sandra Curinier, Michel Canis Item 93 • e321-325 Radiculalgie et syndrome canalaire Nerve root pain and tunnel syndrome Emmanuelle Dernis, Frédéric Medina › FOCUS 93 • e321-325 Les signes d’alerte d’une lomboradiculalgie Warning signs in in nerve root pain Emmanuelle Dernis, Frédéric Medina Item 117 • e327-330 La revue adhère à la charte de formation médicale continue par l’écrit du Syndicat de la presse et de l’édition des professions de santé (SPEPS) et en respecte les règles. (Charte disponible sur demande). Reproduction interdite de tous les articles sauf accord avec la direction. Les liens d’intérêts des membres du Comité de lecture et de rédaction scientifique sont consultables sur www.larevuedupraticien.fr (Qui sommes-nous ?). Le handicap psychique Psychic disability Clélia Quilès, Christophe Lançon › FOCUS 117 • e331 La remédiation cognitive, une technique de prise en charge à différencier de la thérapie cognitivo-comportementale Clélia Quilès, Christophe Lançon Cognitive remediation, a technique of care to differentiate from the cognitive behavioral therapy RR Item 61 TROUBLE SCHIZOPHRÉNIQUE DE L’ADOLESCENT ET DE L’ADULTE Dr David Misdrahi1, Dr Guillaume Fond2, Pr Pierre-Michel Llorca3 1. Centre hospitalier Charles-Perrens, Bordeaux, fondation FondaMental, CNRS UMR5287-INCIA, université de Bordeaux, France 2. Pôle de psychiatrie des Hôpitaux universitaires Henri-Mondor, DHU Pe-PSY, université Paris-Est Créteil, fondation FondaMental, INSERM U955, équipe de psychiatrie translationnelle, Créteil, France 3. CMP B, CHU, EA 7280 faculté de médecine, université d’Auvergne, fondation FondaMental, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand Cedex 1, France [email protected] objectifs DIAGNOSTIQUER un trouble schizophrénique. ARGUMENTER l’attitude thérapeutique et PLANIFIER le suivi à tous les stades de la maladie. Diagnostiquer un trouble schizophrénique Aspects généraux La schizophrénie est une maladie psychiatrique fréquente, avec une prévalence de 0,7-1 %, soit environ 600 000 patients atteints en France et avec un sex-ratio approximativement égal à 1. Il s’agit d’un trouble psychiatrique sévère, d’évolution chronique. Le début chez l’adulte jeune entre 15 et 25 ans est la règle. Cette maladie peut se manifester plus rarement chez l’enfant dans une forme plus sévère ou parfois dans une forme d’apparition tardive (après 35 ans), le plus souvent chez la femme. Elle est présente dans toutes les régions du globe mais semble plus fréquente en milieu urbain. Le mode de début, la symptomatologie et l’évolution de cette maladie sont variés d’un sujet à l’autre, ce qui rend parfois le diagnostic difficile. Si les symptômes aigus bruyants comme les idées délirantes permettent un diagnostic précoce, une évolution insidieuse source de handicap important explique le diagnostic retardé en moyenne de deux ans après le début des troubles. Évaluation clinique Les symptômes de la schizophrénie sont hétérogènes et sont rarement présents en totalité chez un même patient. Ces manifestations cliniques sont nombreuses mais d’expression et d’intensité variable d’un individu à un autre et chez un même individu au cours de l’évolution de la maladie. Aucun signe n’est pathognomonique de la maladie, mais ils sont tous impliqués à des degrés divers dans un dysfonctionnement des domaines cognitif, émotionnel ou comportemental. Ils sont classés en trois grands groupes syndromiques : les symptômes positifs, la désorganisation et les symptômes négatifs. 1.Symptômes positifs (délire, hallucination) Ce sont les symptômes les plus bruyants. Ils sont le témoin d’une distorsion de la réalité, et leur présence facilite le diagnostic. Historiquement, le délire dans la schizophrénie a été défini sous le terme de délire « paranoïde » par opposition au délire chronique « paranoïaque » systématisé. Les mécanismes sont multiples, souvent intuitifs, interprétatifs ou hallucinatoires. Les thématiques sont polymorphes, avec prédominance des thèmes de persécution. Peuvent être aussi observés des thèmes mystiques, de filiation, ou de mégalomanie. Les hallucinations peuvent toucher l’ensemble des 5 sens, mais c’est le plus souvent des hallucinations auditives ou acoustico-verbales qui sont décrites (voix, bruits) avec parfois des attitudes d’écoute (comportement traduisant la présence active d’hallucinations au moment de l’examen). Il s’agit d’un délire non systématisé, c’est-à-dire flou, peu cohérent, avec une adhésion forte de la part du patient et une participation affective variable selon les situations cliniques. L’automatisme mental et le syndrome d’influence sont des entités fréquemment retrouvées. Elles consistent en une perte de l’intégrité psychique avec des hallucinations dites intrapsychiques comme des devinements de la pensée ou des vols de la pensée, des idées de références (attribution d’événements extérieurs comme directement liés à soi), des commentaires ou échos de la pensée. Dans des situations extrêmes de délire intense avec une adhésion totale, des injonctions délirantes peuvent conduire à des passages à l’acte auto- ou hétéro-agressifs. 2.Désorganisation Elle peut toucher la pensée, la parole, les émotions et le comportement. Il s’agit d’une altération de l’organisation de la pensée et un relâchement des processus de pensée. La perte logique de l’enchaînement des pensées donne un discours peu compréhensible avec l’emploi de néologismes (création de mots) ou de Vol. 66 _ Septembre 2016 e283 RR Item 61 T R O U B LE SC HIZ OPHR É NIQU E DE L’ADOL E SC E NT E T DE L’ADU LT E paralogismes (usage de mots inappropriés au contexte). Le langage peut être parfois totalement incohérent, symptôme appelé la schizo phasie. Des réponses à côté, un fading mental (ralentissement du débit verbal avec réduction du volume sonore) ou des barrages (suspension du langage avec reprise de la conversation sur un autre sujet) peuvent être observés. L’altération du système logique de pensée peut limiter les capacités d’abstraction, donner lieu à des propos absurdes ou des rationalismes morbides (explication absurdes pseudo-logiques). La répétition des mots de l’interlocuteur (écholalie) ou un mutisme peut également être observé. Sur le plan émotionnel, le patient peut exprimer des émotions contraires dans la même conversation, ce qui est une expression de l’ambivalence affective. Des rires ou pleurs immotivés peuvent témoigner de la perte de cohérence entre les pensées et les réactions émotionnelles. Sur le plan comportemental, on peut observer un maniérisme (attitudes empruntées) et des stéréotypies. Sur le plan cognitif, des altérations de l’attention, de la concentration et de la mémoire sont souvent présentes. L’atteinte des fonctions exécutives se traduit par une incapacité à planifier des tâches simples de la vie quotidienne, source de handicap. 3.Symptômes négatifs Ils ont des conséquences fonctionnelles importantes (sociales, professionnelles) sur les patients, d’autant que les traitements médicamenteux sont moins efficaces sur eux que sur le reste de la symptomatologie. Ils consistent en un appauvrissement affectif et émotionnel et un retrait social. Plus spécifiquement, les patients peuvent présenter un émoussement affectif (froideur, pauvreté des affects, indifférence émotionnelle), un apragmatisme (réduction d’activité avec perte d’initiative), une perte d’intérêt, une incurie et une pauvreté du contenu du discours (alogie). On distingue les symptômes négatifs primaires qui sont les manifestations directes de la maladie, des symptômes négatifs secondaires induits par les antipsychotiques ou la symptomatologie dépressive qui peut être associée. 4.Symptômes associés et comorbidités En dehors de ces trois dimensions syndromiques, il existe des symptômes associés non spécifiques tels que l’anxiété ou les troubles du sommeil. Dans plus de 60 % des cas, le niveau de conscience de la maladie (ou « insight ») est faible, ce qui contribue à une mauvaise observance thérapeutique. Un état dépressif associé est de diagnostic difficile car les symptômes peuvent se confondre avec les symptômes négatifs de la schizophrénie. On peut observer aussi des symptômes obsessionnels ou rituels atypiques. La consommation de tabac est très fréquente, avec une prévalence autour de 50 % (contre 30 % dans la population française générale). Les troubles liés à l’usage d’alcool et de cannabis sont souvent associés à la schizophrénie et de mauvais pronostic. Les patients dangereux pour la société sont une minorité mis en avant à l’occasion de faits divers. Cette agressivité est souvent liée à une consommation de toxiques. À l’occasion d’un épisode aigu, des injonctions délirantes peuvent conduire à des passages à l’acte médico-légaux (agression, meurtre, exhibition, troubles de l’ordre public). e284 Vol. 66 _ Septembre 2016 Examens complémentaires et diagnostics différentiels Le diagnostic de schizophrénie se fait exclusivement sur l’examen clinique (évaluation clinique, anamnèse et antécédents personnels et familiaux). Cependant, des examens complémentaires sont requis dans une démarche de diagnostic différentiel et de bilan préthérapeutique. La réalisation d’une imagerie cérébrale (TDM ou IRM) chez un patient jeune au début de la maladie permet d’éliminer d’autres étiologies d’origine neurologique comme une tumeur cérébrale. La recherche de toxiques dans les urines permettra d’orienter le diagnostic vers un trouble psychotique induit par les substances psychoactives (cannabis, LSD, champignons). Un bilan biologique (hémogramme, ionogramme sanguin, protéine C réactive [CRP], thyréostimuline [TSH], bilan hépatique) permettra d’éliminer les causes somatiques infectieuses ou inflammatoires. La présence des symptômes psychotiques pendant une période supérieure à 6 mois confirme le diagnostic de schizophrénie et permet d’écarter les diagnostics de trouble schizophréniforme (durée < 6 mois) et d’épisode psychotique bref (durée < 1 mois). Les autres diagnostics psychiatriques à éliminer sont le trouble bipolaire à l’occasion d’un accès maniaque ou dépressif associé à des caractéristiques psychotiques (v. item 62), les troubles délirants chroniques (v. item 63) et les troubles envahissant du développement (v. item 65). Le trouble schizo-affectif correspond à la présence, sur une même période de temps, à la fois des symptômes de la schizophrénie et de symptômes d’un épisode thymique caractérisé (dépressif, ou maniaque). Comme dans un trouble bipolaire, il peut y avoir une alternance de périodes dépressives et de périodes d’excitation psychomotrice maniaque. Le diagnostic ne peut se faire que de façon longitudinale. Cette forme serait de meilleur pronostic. Modes évolutifs Le début peut être brutal (50 % des cas) sous la forme d’un épisode psychotique aigu, avec des symptômes positifs et une désorganisation au premier plan. Dans l’autre moitié des cas, l’évolution est d’apparition insidieuse, de diagnostic plus difficile, progressive, avec des symptômes négatifs (désinvestissement social, scolaire ou professionnel). La schizophrénie est une maladie d’évolution chronique. En général, elle évolue avec des rechutes (phases aiguës) durant les premières années, puis se stabilise avec une persistance de symptômes résiduels. Dans 50 % des cas, la résolution est partielle, avec une stabilité vers un état fonctionnel « disadaptatif ». Dans 20 à 25 % des cas, on observe une détérioration progressive avec dégradation sociale et psychique profonde. Chez 20 à 25 % des patients, une restitution ad integrum est possible avec un retour à l’état fonctionnel au niveau prémorbide. Un peu moins de la moitié des patients souffrant de schizophrénie réaliseront au moins une tentative de suicide au cours de l’évolution. Le taux de décès par suicide est Facteurs pronostiques Trouble schizophrénique de l’adolescent et de l’adulte POINTS FORTS À RETENIR C’est une pathologie fréquente (0,7 % de la population) de l’adulte jeune et atteignant avec la même fréquence hommes et femmes. La symptomatologie repose sur un trépied associant de façon variable pendant au moins 6 mois : – des symptômes dits « positifs » constitués des idées délirantes dont les thèmes et mécanismes sont polymorphes, et qui sont non systématisées ; – des symptômes dits « négatifs » associant repli, apragmatisme, émoussement affectif et troubles cognitifs ; – une désorganisation de la pensée et du langage et une désorganisation comportementale. Les risques associés à l’évolution de la schizophrénie sont : – la dépression mais aussi le risque suicidaire, nettement supérieur à celui de la population générale ; – les comorbidités somatiques qui sont très fréquentes, avec notamment les risques métabolique et vasculaire, et réduisent considérablement l’espérance de vie. Elles peuvent être aggravées par certaines thérapeutiques antipsychotiques ; – la désinsertion sociale, notamment liée à la symptomatologie négative. Le traitement doit toujours associer le traitement médicamenteux par antipsychotique de seconde génération, en première intention, en monothérapie, après un bilan préthérapeutique, et le traitement non médicamenteux comprenant notamment psychothérapie de soutien, psychoéducation, thérapie cognitivo-comportementale (TCC), remédiation cognitive et soutien aux familles. La prise en charge sociale est impérative. Elle comprend la prise en charge en ALD 30, la demande d’allocation adulte handicapé en cas d’incapacité fonctionnelle, des mesures de réinsertion socio-professionnelle et l’évaluation de la nécessité d’une mesure de protection des biens. proche de 7 %. L’espérance de vie est en moyenne de 15 à 20 ans inférieure à celle de la population générale, principalement du fait des troubles somatiques comorbides et du risque suicidaire élevé. Plusieurs comorbidités physiques sont retrouvées chez les patients souffrant de schizophrénie. Il s’agit de l’obésité abdominale (augmentation du périmètre abdominal et hypertriglycéridémie), du syndrome métabolique (obésité abdominale, diabète, hypertension, HDL-cholestérol diminué) et des maladies cardiovasculaires et cérébrovasculaires. Le pronostic varie en fonction des caractéristiques de la maladie. Il dépend de la qualité du soutien psychosocial, de l’accès aux soins et de l’adhésion à la prise en charge. Un diagnostic précoce, le recours à un traitement antipsychotique, la réduction des durées d’hospitalisation au long cours sont des déterminants d’une meilleure évolution. Parmi les facteurs de bon pronostic, on retrouve : le sexe féminin, une situation sociale et familiale stable, une bonne conscience de la maladie (bon insight), une prise en charge précoce, un début tardif de la maladie et une bonne observance thérapeutique. Inversement, une période longue avant l’accès au diagnostic et aux soins, des symptômes négatifs intenses, la persistance de symptômes résiduels en dépit d’un traitement bien conduit, une comorbidité addictive, et une mauvaise observance sont de mauvais pronostic. Formes cliniques Les formes cliniques décrites dans le DSM IV-R (paranoïde, indifférenciée, catatonique et résiduelle) ont été abandonnées dans la nouvelle version du DSM-5. Elle étaient peu utilisées car considérées comme non pertinentes pour définir des profils évolutifs ou des stratégies thérapeutiques. Le syndrome catatonique fait partie maintenant des critères retenus dans le diagnostic de schizophrénie selon le DSM-5 (tableau). Pourtant, il faut retenir que le syndrome catatonique est « transnosographique ». Il n’est pas spécifique de la schizophrénie et peut se rencontrer dans de très nombreuses pathologies. En psychiatrie, le syndrome catatonique est d’ailleurs plus fréquemment présent dans les troubles de l’humeur. C’est un syndrome psychomoteur associant la catalepsie (flexibilité cireuse des membres avec maintien des attitudes imposées) au négativisme (attitudes de résistance voire d’opposition active pouvant aller jusqu’au refus de s’alimenter). Des troubles du comportement sont décrits comme des stéréotypies, impulsions, ou encore écholalie (répétition non volontaire de la fin des phrases, mots ou sons de l’interlocuteur) ou échopraxie (imitation non volontaire en miroir des gestes de l’interlocuteur). Hypothèses étiopathogéniques Comme pour les autres maladies psychiatriques, la schizophrénie reste une maladie complexe dont l’origine est encore mal connue. Son origine est multifactorielle, associant des facteurs génétiques et environnementaux. L’hypothèse d’une origine neuro-développementale est confortée par plusieurs études épidémiologiques qui ont mis en évidence des liens entre des facteurs de stress précoce – que ce soit dans la période in utero (lors de la grossesse de la mère) ou durant la période périnatale – et un risque accru de schizophrénie. Ces situations de stress seraient responsables de perturbations dans la maturation du système nerveux central dont les conséquences pourraient être l’apparition au moment de l’adolescence (en particulier lors de certains remaniements dans la vie du sujet mais également de Vol. 66 _ Septembre 2016 e285 RR Item 61 déséquilibres hormonaux) d’un dysfonctionnement du système nerveux central. La schizophrénie ne peut pas apparaître comme une maladie de transmission génétique simple mais plutôt comme une maladie polygénique (impliquant plusieurs gènes de susceptibilité). Il n’existe pas de gène spécifique au développement de la maladie, mais le risque de schizophrénie passe de 1 % à 30-40 % chez les jumeaux monozygotes, ce qui vient conforter cette hypothèse. Le poids des facteurs environnementaux reste mal connu : ––des facteurs précoces obstétricaux ou infectieux peuvent influencer le développement cérébral ; ––des facteurs de risque plus tardifs sont aussi identifiés : ce sont les traumatismes (abus ou négligence physiques, émotionnels ou sexuels), la consommation de substance (cannabis), le fait de vivre en milieu urbain ou encore d’être enfant issu de l’immigration. La notion de maladie plurifactorielle et polygénique conduit à intégrer la notion d’une vulnérabilité, sous-tendue à la fois par les aspects génétiques et non génétiques (neuro-développementaux, environnementaux, sociaux et psychologiques). Une hyperdopaminergie sous-corticale méso-limbique pourrait rendre compte des symptômes positifs. Une hypodopaminergie préfrontale serait à l’origine des symptômes négatifs. Ce modèle explicatif des symptômes observés par des anomalies du système de la neurotransmission dopaminergique est conforté par le mécanisme d’action des antipsychotiques qui agissent tous sur la neurotransmission dopaminergique. Plus récemment, le développement des techniques d’imagerie cérébrale suggère l’existence d’anomalies morphologiques ou fonctionnelles au niveau cérébral. Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi à tous les stades de la maladie TABLEAU T R O U B LE SC HIZ OPHR É NIQU E DE L’ADOL E SC E NT E T DE L’ADU LT E Critères diagnostiques de la schizophrénie selon le DSM-5 A Deux ou plus des symptômes suivants sont présents pendant une partie significative du temps sur une période d’un mois (ou moins quand elles répondent favorablement au traitement). Au moins l’un d’entre eux doit être 1, 2 ou 3. ❚❚1. Idées délirantes ❚❚2. Hallucinations ❚❚3. Discours désorganisé (coq-à-l’âne fréquents ou incohérence) ❚❚4. Comportement grossièrement désorganisé ou catatonique ❚❚5. Symptômes négatifs (réduction de l’expression émotionnelle, aboulie) B Pendant une partie significative du temps depuis la survenue du début du trouble, un ou plusieurs domaines majeurs du fonctionnement tels que le travail, les relations interpersonnelles, ou les soins personnels sont nettement inférieurs au niveau atteint avant la survenue du trouble (ou, en cas de survenue dans l’enfance ou dans l’adolescence, incapacité à éteindre le niveau de réalisation interpersonnelle, scolaire, ou dans d’autres activités auxquelles on aurait pu s’attendre). C. Des signes permanents du trouble persistent pendant au moins 6 mois. Cette période de 6 mois doit comprendre au moins 1 mois de symptômes (ou moins quand ils répondent favorablement au traitement) qui répondent au critère A (c’est-à-dire symptômes de la phase active), et peut comprendre des périodes de symptômes prodromiques ou résiduels. Pendant ces périodes prodromique et résiduelle, les signes du trouble peuvent se manifester uniquement par des symptômes négatifs ou par deux ou plus des symptômes figurant dans le critère A présents sous une forme atténuée (par exemple, croyances bizarres, perceptions inhabituelles). D Un trouble schizo-affectif et un trouble dépressif ou bipolaire avec caractéristiques psychotiques ont été éliminés soit 1) parce qu’aucun épisode dépressif majeur ou maniaque n’a été présent simultanément aux symptômes de la phase active, soit 2) parce que si des épisodes thymiques ont été présents pendant les symptômes de la phase active, ils ne l’ont été que pour une faible proportion de la durée des périodes actives et résiduelles. E La perturbation n’est pas due aux effets physiologiques directs d’une substance (c’est-à-dire une drogue donnant lieu à un abus, un médicament) ou d’une affection médicale. F En cas d’antécédents d’un trouble du spectre autistique ou d’un trouble de la communication débutant dans l’enfance, le diagnostic additionnel de schizophrénie n’est fait que si les idées délirantes ou les hallucinations sont prononcées et sont présentes avec les autres symptômes requis pour le diagnostic pendant au moins 1 mois (ou moins quand elles répondent favorablement au traitement). Principes généraux 1.Objectifs du traitement Les objectifs du traitement médicamenteux sont de réduire ou d’éliminer les symptômes, de prévenir le risque suicidaire, de prévenir les rechutes, de préserver les capacités cognitives et les capacités d’adaptation pour contribuer à l’autonomie et à la qualité de vie. Les objectifs du traitement non médicamenteux sont d’aider le patient à prendre conscience de sa pathologie et à accepter son traitement, d’assurer une prise en charge globale du patient et un soutien de l’entourage, d’assurer et engager des mesures psycho-éducatives pour le patient et son entourage. La prise en charge doit être globale et multidisciplinaire (psychiatre, médecin traitant, équipe paramédicale, services sociaux). La prise en charge somatique ne doit pas être négligée au profit de la prise en charge psychiatrique, la mortalité par maladies cardio-vasculaires étant très élevée chez ces patients. 2.Modalité de prise en charge (ambulatoire ou hospitalisation) Les hospitalisations sont souvent nécessaires en début de maladie et lors des épisodes de décompensation aiguë. La dé- e286 Vol. 66 _ Septembre 2016 cision d’hospitalisation dépend de la gravité de l’épisode, de l’évaluation du risque suicidaire et du risque hétéro-agressif et des capacités d’étayage de l’entourage. Une hospitalisation libre doit toujours être préférée mais, en raison de la mauvaise conscience du trouble ou parfois du risque hétéroagressif, un soin sans consentement peut être réalisé (soin psy- chiatrique sur demande d’un tiers ou sur décision du représentant de l’État). En dehors des hospitalisations, le patient est suivi en ambulatoire avec des consultations médicales rapprochées et/ ou des journées d’hospitalisation à temps partiel (hôpital de jour, centre d’accueil thérapeutique à temps partiel). Traitements médicamenteux Les antipsychotiques constituent le traitement pharmacologique de référence. Leurs effets indésirables doivent être prévenus et recherchés. Le choix de la molécule doit notamment tenir compte du bilan clinique et biologique initial (v. infra). Le traitement médicamenteux antipsychotique est indispensable dans la schizophrénie. Il permet à la fois une action curative sur les symptômes de la phase aiguë, essentiellement les symptômes positifs, et une action préventive des rechutes. Le traitement médicamenteux est souvent insuffisant à lui seul, et la prise en charge de la schizophrénie renvoie à d’autres modalités thérapeutiques synergiques. Les antipsychotiques de deuxième génération sont recommandés en première intention, en raison d’un profil efficacité-tolérance neurologique plus favorable que les antipsychotiques de première génération. Les antipsychotiques de deuxième génération disponibles en France sont : la rispéridone, l’olanzapine, l’aripiprazole, la quétiapine, le palmitate de palipéridone, l’amisulpride et la clozapine (v. items 72 et 326). Le traitement doit être instauré si possible en monothérapie, après bilan préthérapeutique, per os, avec possibilité de passer ensuite à une formulation d’action prolongée. La posologie minimale efficace est recherchée par la suite. Une surveillance rapprochée de l’efficacité et de la tolérance du traitement doit être réalisée : électrocardiogramme (allongement du QT), température (syndrome malin aux neuroleptiques), syndrome métabolique (poids, périmètre abdominal, bilan lipidique et glycémie). Le traitement des symptômes associés doit être intégré : ––agitation, troubles du comportement : utilisation d’antipsychotique sédatif (cyamémazine, loxapine) et/ou benzodiazépine. Dans ce type de situation, la voie orale, notamment par solution buvable ou comprimé oro-dispersible, en monothérapie doit être privilégiée. La voie intramusculaire doit être préférée à la voie intraveineuse si l’administration parentérale est nécessaire. Ces traitements devront être interrompus dès que l’état clinique du patient le permet ; ––symptômes dépressifs : utilisation d’anxiolytiques et d’anti dépresseurs ; ––symptômes catatoniques : utilisation de benzodiazépines (lora zépam ou zolpidem) en première intention, sinon sismothérapie. Les antipsychotiques de première génération et la rispéridone seront évités car ils aggraveraient la symptomatologie. La résistance au traitement est définie par l’échec de deux séquences de traitements antipsychotiques, dont au moins un de seconde génération et si possible de mécanismes différents, bien conduits (durée suffisante d’au moins 6 semaines, et posologie suffisante). Il convient d’éliminer d’autres causes de mauvaise réponse : défaut d’observance, conduites addictives, inter actions médicamenteuses, pathologie somatique. La clozapine est indiquée dans les formes résistantes de schizophrénie, avec une surveillance (hebdomadaire pendant 18 semaines puis mensuelle pour toute la durée du traitement) de l’hémogramme en raison du risque d’agranulocytose (0,4 % des cas). La durée du traitement est longue, la prévention des rechutes nécessite la poursuite d’une chimiothérapie antipsychotique à la posologie minimale efficace ayant permis de traiter l’épisode aigu. Après la résolution symptomatique d’un épisode unique, le traitement est maintenu pendant au moins 2 ans en cas de premier épisode psychotique en dehors d’un diagnostic de schizophrénie avéré. L’arrêt est alors progressif en maintenant un suivi régulier de l’état clinique du malade en concertation avec le médecin. En cas de rechute, le traitement est maintenu au moins 5 ans. Au-delà de 3 épisodes psychotiques ou en cas de schizo phrénie avérée, le traitement antipsychotique au très long cours est la règle. Prises en charge psychothérapeutiques Ce sont : ––la psychothérapie cognitivo-comportementale : elle peut être centrée sur la gestion des crises et des symptômes résiduels (notamment des hallucinations persistantes), la dépression, l’anxiété et les symptômes négatifs. Elle comprend un travail sur les habiletés sociales et la motivation ; ––la remédiation cognitive : son but est d’améliorer les fonctions cognitives (concentration, mémoire, planification) ; ––la réhabilitation : elle vise à favoriser la réadaptation, l’intégration et l’insertion sociale ; ––la psychothérapie de soutien : elle est réalisée à chaque consultation de suivi ; ––la psychoéducation de groupe du patient et de sa famille ; ––la psychothérapie de soutien à la famille : entretiens médicaux avec les familles, mise en contact avec des associations de malades, parfois thérapie familiale. Prise en charge sociale La mise en place d’une prise en charge à 100 % en affection de longue durée (ALD) est la première étape. La plupart des démarches sociales nécessitent la constitution d’un dossier auprès de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Le but de la MDPH est avant tout de favoriser l’insertion professionnelle par un bilan de compétence, formation préparatrice au travail. Une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) est mise en place. Elle vise à une insertion en milieu professionnel ordinaire : entreprise adaptée (EA) ; ou en milieu protégé : établissement et service d’aide par le travail (ESAT). Vol. 66 _ Septembre 2016 e287 RR Item 61 T R O U B LE SC HIZ OPHR É NIQU E DE L’ADOL E SC E NT E T DE L’ADU LT E Message de l'auteur Exemple d’un cas clinique et des questions qui peuvent être posées peuvent imposer la contrainte, dans un dossier progressif. et éventuellement des « soins sans M. D., 22 ans, est amené par les qui peut être qualifié par sa thématique pompiers aux urgences. Il aurait fait « de persécution », ses mécanismes tomber les étalages d’une supérette en « polymorphes », avec une « adhésion criant : « Les aliments sont empoisonnés, totale au délire ». je dois combattre le sort ! Ça ne peut pas avec une procédure classique », compte tenu de la présence de ses parents. Une question classique est celle des pièces nécessaires pour cette modalité On peut également vous demander d’hospitalisation, en l’occurrence « deux d’identifier des symptômes spécifiques certificats médicaux émanant de deux tels que le « fading », les « attitudes médecins différents » et « l’accord écrit d’écoute » et « l’incurie ». d’un proche ». donnent des boutons, regardez… ». Par Le bilan à pratiquer aux urgences est Des questions peuvent vous être posées la suite, au cours de l’entretien, il reste également une question classique. Dans sur les stratégies thérapeutiques aux replié sur lui-même. Il ne croise jamais le ce cas, il comprend un « bilan biologique regard de son interlocuteur et, méfiant, standard », une « recherche des toxiques explique que « Satan a désolidarisé sa urinaires » et éventuellement « une continuer comme ça ! ». Au premier contact, le patient est sale et débraillé. Il présente une acné faciale, pour lequel il explique : « Les virus d’Internet me 3G, que les forces du Mal devinent ce qu’il pense, c’est pour ça qu’il doit imagerie cérébrale ». combattre les ondes qu’elles envoient ». Le diagnostic est une question Soudain, il semble tendre l’oreille comme incontournable et dans ce cas on peut pour écouter une conversation. Le évoquer la décompensation d’une rythme de son discours ralentit schizophrénie ou un épisode psychotique progressivement, et le volume de sa voix bref, mais les éléments anamnestiques diminue jusqu’au chuchotement. Ses apportés par les parents permettent de parents arrivent aux urgences et vous retenir celui de « schizophrénie ». informent que ces symptômes évoluent depuis un peu plus d’un an. Leur fils s’est progressivement totalement replié sur lui-même, ses propos devenant de moins en moins compréhensibles. « Au cours de l’année il a d’ailleurs arrêté sa Des questions peuvent également vous être posées sur la nécessité d’une hospitalisation et, compte tenu de ses troubles du comportement, sur la justification d’une hospitalisation sous urgences, qui peuvent comprendre la nécessité en cas d’agitation d’un « antipsychotique sédatif per os » et d’une « mise en chambre d’isolement thérapeutique ». Enfin, une question sur les mesures thérapeutiques dites « de fond » après le début de son hospitalisation en milieu spécialisé est « classique ». Elles comprennent : – un « traitement antipsychotique de seconde génération », pour lequel les mesures de surveillance du « syndrome métabolique » mais aussi de « l’hyperprolactinémie » peuvent être demandées ; contrainte. Dans ce cas-là, c’est – « les stratégies dites psychosociales » « l’absence de consentement aux soins » parmi lesquelles la « psychoéducation », Les premières questions peuvent porter mais aussi la « nécessité de soins « la psychothérapie de soutien », « la dans ce cas sur la sémiologie et par immédiats assortis d’une surveillance remédiation cognitive » et « les mesures exemple sur la caractérisation du délire constante en milieu hospitalier » qui de réinsertion professionnelle ». formation et n’a pas validé son CAP. » e288 consentement à la demande d’un tiers Vol. 66 _ Septembre 2016 + POUR EN SAVOIR ● !297!_rdp3_couv:Mise en page 1 11/03/13 9:48 Page 297 revue praticien PUBLICATION MENSUELLE DE FORMATION MÉDICALE CONTINUE 13 urhoff 11/03/ Page 12:19 325 vp_sch rdp3_a « états DOSSIER DU MOIS et/ou des iques » un état n vers prodrom des « états le taux de transitio r en charge et la prise objectif de diminue l’étude comme te pour », avec manifes x à risque mentau hrènes tique avéré. de 15 ans psycho nes schizop des vie réduite person nce de en lumière fait vie des e et met du nce de une espéra ion général venir. Au-delà … mais ntes, l’espéra à la populat les années à idités somaes importa rapport comorb dans lité, les ces avancé n 15 ans par porter que les i-morta Malgré devront d’enviro se qualité, d’une surmorb efforts es s’acmauvai reste réduite lesquels nos ables ou atypiqu le x est de es sur et respons e génération générau té. En outre,que domain second aux soins prises en charge d’obési et de es estime es dits que l’accès souvent mal asculair où l’on les chotiqu cardiov sont la mesure survient dans nts antipsy de maladies tiques é, dans mortalit ux traiteme risque accru et que celui-ci nte de nouvea ente, importa nent d’un nt par suicide tion perman compag e une cause hrènes décède et d’évolu sur des équipes constitu schizop suicide s, de réflexion % des sujets la maladie. source ment centrée es sanitaire de 10 à 15 trie est Actuelle structur tes es années soins en psychia innovan la société. entre les es ions dans premièr des interact ées en des structur r les sujets isation ent des L’organ t se greffer recherche organis s, bénéfici but de réinsére logique es viennen et de ayant pour les prises en charge s, psycho les , sur lesquell res de soins clinique triques, de secteur, de bilans psychia s et sociales . Ces structu s on -sociale réalisati experts les secteur médico tent la riat avec n des les centres l permet la questio nationa comme t en partena ions pas au niveau pour toute , et agissenns généralistes. réseau sociaux nous n’abord est, comme que la si médeci ues et te finalité ou les verrons somatiq complè dont la ions s. Nous tres libéraux ne serait pas hrénie patient aux interact psychia la schizop soigner nos raphie laissant trie grâce he sur psychia Cette monog de recherc urs, etc., r à mieux ntielle en , ingénie d’arrive axes ne, expone aticiens grands hrénie.• he en médeci pe de manière iens, mathém de schizop recherc atteints tes, statistic he se dévelop recherc tres, biologis r pour les patients entre psychia up d’espoi ir beauco entrevo ÉPREUVES CLASSANTES NATIONALES Q 249. Insuffisance aortique Q 90. Infections naso-sinusiennes Q 237. Fractures chez l’enfant Q 145. Tumeurs de la cavité buccale (...) Schizophrénie Rev Prat 2013; 63(3):323-62 DOSSIER √ CARDIOPATHIES CONGÉNITALES À L’ÂGE ADULTE Cardiopathies congénitales à l’âge adulte Monographie www.larevuedupraticien.fr Mars 2013 - Tome 63 - N° 3 Mars 2013 - Tome 63 - N° 3 (297-444) !323!_ n’avoir aucun lien l’item 195 DOC, DOC erche de Utilisez de rech ticien le moteur La Revue du Pra us sur : Rendez-vo Schizophrénies déclare erchez Vous rech plus de temps... dez Ne per ? praticien F. Schürhoff d’intérêts. revue La mise en place d’une allocation adulte handicapé (AAH) est justifiée si la personne n’est pas en capacité de travailler, avec éventuellement compléments d’allocation pour l’autonomie (APA) et d’aide pour le logement (APL). En cas d’incapacité au travail, une prise en charge en hôpital de jour ou centre d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) peut être proposée pour favoriser l’insertion sociale : activer les ressources disponibles pour éviter la désocialisation, l’exclusion, la stigmatisation. Il s’agit notamment d’intervenir sur plusieurs domaines de l’autonomie (aide à la recherche d’un logement, éventuellement accueil en appartement thérapeutique) et nécessiter la mise en place d’aides à domicile (infirmière à domicile, aides ménagères, portage des repas). Les hôpitaux de jour et CATTP collaborent étroitement avec des structures telles que les groupes d’entraide mutuelle (GEM), les services d’aide à la vie sociale (SAVS) et les services d’aide médico-sociale pour adultes handicapés (SAMSAH). Une mesure de protection des biens est parfois nécessaire : curatelle (simple ou renforcée) le plus souvent, qui préserve les droits civiques du patient. MONOGRAPHIE Schizophrénies L’importance d’un diagnostic précoce /docdoc praticien.fr ET AUSSI SUR LE WEB larevuedu Interviews • Vidéos • Photothèques • Quiz • Images mystérieuses LA REVUE VOL. 63 DU PRATICIEN 2013 Mars 325 Mais aussi : Haute Autorité de santé. ALD n° 23. Schizophrénies, www.has-sante.fr/portail/jcms/c_565630/fr/ald-n23-schizophrenies Petitjean F, Marie-Cardine M. Schizophrénies débutantes : diagnostic et modalités thérapeutiques. 6e Conférence de consensus de la Fédération française de psychiatrie (23-24 janvier 2003). Paris, John Libbey Eurotext, 2003, p. 304. Llorca PM. La Schizophrénie, https://www.orpha.net/data/patho/FR/fr-schizo.pdf Aménagement du mode de vie Le soignant doit informer des risques liés à l’usage du cannabis et autres substances psychoactives vis-à-vis des symptômes, des rechutes et particulièrement de la continuité des soins, inciter à l’arrêt de leur consommation et accompagner le patient dans cette démarche. Il doit également fournir des conseils hygiéno-diététiques (lutte contre l’excès de poids, activité physique, quantité de sommeil, réduction ou arrêt du tabagisme) pour lutter contre les effets indésirables des traitements pharmacologiques proposés (notamment syndrome métabolique). Le médecin reste attentif à la vie sexuelle (troubles de la libido, contraception, prévention des infections sexuellement transmissibles).• D. Misdrahi, G. Fond et P.-M. Llorca déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts. Vol. 66 _ Septembre 2016 e289 RR FOCUS Item 61 Prendre en charge la schizophrénie Voir l’item complet page e283 et sur larevuedupraticien.fr Ce FOCUS attire votre attention sur des points importants. Dr David Misdrahi1, Dr Guillaume Fond2, Pr Pierre-Michel Llorca3 1. Centre hospitalier Charles-Perrens, Bordeaux, fondation FondaMental, CNRS UMR5287-INCIA, université de Bordeaux, France 2. Pôle de psychiatrie des Hôpitaux universitaires Henri-Mondor, DHU Pe-PSY, université Paris-Est Créteil, fondation FondaMental, INSERM U955, équipe de psychiatrie translationnelle, Créteil, France 3. CMP B, CHU, EA 7280 faculté de médecine, université d’Auvergne, fondation FondaMental, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand Cedex 1, France [email protected] L a schizophrénie est une pathologie que l’on peut considérer comme emblématique des troubles psychiatriques. En effet, tout d’abord son nom est souvent l’objet de confusion car dans le langage courant la notion de « schizophrénie » est fréquemment associée à tort au « dédoublement de personnalité », ce qui ne correspond en rien à la maladie psychiatrique et à sa réalité clinique. De plus, il s’agit d’une pathologie qui est souvent associée à une stigmatisation des sujets qui en souffrent : dans l’esprit du grand public, mais aussi des professionnels de santé, elle correspond à des patients imprévisibles, dangereux et ne pouvant être traités de façon satisfaisante. Ces représentations ont un effet péjoratif pour la prise en charge, et donc par conséquent sur le pronostic global. Les enjeux pour les cliniciens sont multiples. Sur le plan clinique, le tableau qui associe différentes catégories de symptômes nécessite une grande rigueur pour être décrit de façon satisfaisante : ––les symptômes « emblématiques » de la schizophrénie que sont les hallucinations et les idées délirantes ne sont pas patho gnomoniques, et leur caractère bruyant fait parfois négliger les symptômes négatifs et cognitifs qui ont pourtant plus de conséquences sur le plan fonctionnel, altérant les possibilités d’insertion sociale du sujet ; ––les symptômes négatifs et cognitifs sont parfois difficiles à re pérer car d’apparition insidieuse, assimilés parfois à de simples « traits de caractère ». Le patient est considéré comme solitaire, parfois on lui reproche sa fainéantise, sans que le caractère pathologique de ces comportements ne soit perçu ; ––les patients souffrant de schizophrénie ont le plus souvent une altération de la conscience de leur trouble et de la nécessité de traitement, qui rend difficile l’identification des symptômes (car ils peuvent être dissimulés par le patient) et nécessite parfois la mise en œuvre de mesures de soins sans consentement. Cet aspect pose des problèmes pour le maintien de l’alliance théra peutique mais aussi en termes de responsabilité médicale dans la privation de liberté. 290 Vol. 66 _ Septembre 2016 Sur le plan thérapeutique, les stratégies médicamenteuses doivent toujours être assorties d’une prise en charge psycho sociale. Si l’effet observé sur les symptômes positifs est souvent assez rapide, celui sur les symptômes de repli et de désorgani sation est plus long et progressif. Cette dimension temporelle doit être intégrée par les professionnels, sous peine de percevoir les stratégies comme inefficaces. L’état de santé somatique des patients souffrant de schizo phrénie est souvent altéré, avec une mortalité très supérieure par rapport à une classe d’âge équivalente. Cet état de fait est la conséquence : ––de la nature même de la maladie, avec une vulnérabilité plus importante à des pathologies notamment métaboliques mais aussi aux conduites addictives ; ––des symptômes négatifs et cognitifs qui font que le patient recherche moins les soins et donc bénéficie moins des possi bilités de prise en charge par rapport à la population générale ; ––des thérapeutiques qui ont parfois un effet iatrogène ; ––de la stigmatisation évoquée plus haut, associée parfois à un relatif « rejet » de la part des professionnels. La responsabilité des soignants est donc de rechercher et prendre en charge ces comorbidités comme un élément à part entière du soin de la schizophrénie. Les enjeux pédagogiques d’une question sur la schizophrénie portent donc sur : ––le développement de la capacité d’identification et de description des symptômes pour éviter les errements diagnostiques en début de maladie et permettre une prise en charge précoce ; ––la possibilité de mise en œuvre de stratégies thérapeutiques les plus adaptées pour optimiser cette prise en charge ; ––la compréhension de la nécessité d’une prise en compte du patient dans sa globalité et en particulier sur le plan somatique et social pour améliorer le pronostic vital et fonctionnel.• D. Misdrahi, G. Fond et P.-M. Llorca déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts. RR Item 289 DIAGNOSTIC DES CANCERS Signes d'appel et investigations paracliniques ; caractérisation du stade ; pronostic Dr Benoîte Mery, Dr Guillaume Moriceau, Dr Romain Rivoirard, Dr Olivier Collard Département d’oncologie médicale, institut de cancérologie Lucien-Neuwirth, 42270 Saint-Priest-en-Jarez, France [email protected] objectifs DÉCRIRE les principes du raisonnement diagnostique en cancérologie. EXPLIQUER les bases des classifications qui ont une incidence pronostique. CONNAÎTRE les principaux marqueurs diagnostiques et prédictifs des cancers. L e diagnostic d’un cancer se fait en 2 étapes : une phase de présomption devant des signes cliniques ou paracliniques (circonstances de découverte), et une phase de certitude apportée par l’examen anatomo-pathologique. L’enjeu est de poser le diagnostic le plus précocement possible dans l’histoire naturelle de la maladie lorsque les chances de guérison sont les plus importantes. Une fois le diagnostic posé, il est nécessaire d’évaluer l’extension du cancer et son retentissement sur l’organisme, ce qui permet l’établissement d’un pronostic et la délivrance du traitement le plus adapté à la situation, le plus souvent pluridisciplinaire après une décision concertée. Diagnostic de cancer Circonstances de découverte Elles sont nombreuses. Tout symptôme, qui persiste ou s’aggrave malgré les traitements habituels ou qui s’accompagne d’une altération de l’état général, doit être pris au sérieux. Dépistage systématique : c’est la découverte du cancer à un stade précoce avant tout symptôme clinique (ex : cancer du sein, cancer du côlon dans le cadre des dépistages de masse ; cancer du poumon décelé sur une radiographie thoracique dans le cadre de la médecine du travail, cancer du col de l’utérus ou de la prostate dans le cadre de dépistage individuel). Signes d’alarme : c’est la découverte du cancer à un stade semiprécoce devant un symptôme banal qui attire l’attention : modification apparente d’une verrue ou d’un grain de beauté, nodule palpable dans le sein, trouble fonctionnel digestif, etc. Signes plus évocateurs : c’est la découverte du cancer à un stade plus évolué devant : ––des signes locaux orientant vers un organe précis ; signes d’irritation ou de compression (hémorragie, cystite, douleur, constipation, toux, dysphagie…) ; ––des signes généraux : asthénie, anorexie, amaigrissement liés au retentissement biologique d’une tumeur profonde d’évolution longtemps silencieuse ; ––des signes inflammatoires cliniques (fièvre…) et/ou biologiques, rebelles et sans cause évidente ; ––des signes de complication tels que coma, paralysie, hémorragie, occlusion, perforation, fracture, infection… Métastases prévalentes : le plus souvent ganglionnaires, elles doivent faire réaliser un examen cytologique, confirmé par l’examen histopathologique, ainsi qu’un examen complet des aires ganglionnaires et la recherche du cancer primitif (cancer ORL devant une adénopathie cervicale, cancer du sein devant une adénopathie axillaire, cancer du poumon devant une adénopathie médiastinale…). Parfois, il s’agit de métastases viscérales : pulmonaires, hépatiques, osseuses, cérébrales… Syndrome paranéoplasique : c’est l’ensemble des manifestations biologiques et anatomo-cliniques non cancéreuses associées au développement d’un cancer, mais non directement liées à la tumeur ou ses métastases. Ce sont de véritables « marqueurs » du cancer qui peuvent révéler la tumeur (dermatomyosite, polyglobulie, myasthénie), disparaissent en général avec le traitement de la maladie et réapparaissent en cas de récidive. Ils ne reflètent pas la gravité du cancer sous-jacent. Vol. 66 _ Septembre 2016 e291 RR Item 289 D IA G N O S T IC DE S C ANC E R S : SIGNE S D'APPE L E T INVE ST IGAT IONS… Examen anatomo-pathologique C’est l’acte essentiel que rien ne remplace pour obtenir la certitude du diagnostic. Il comprend l’examen direct de la lésion, suivi de son étude microscopique. 1.Aspects macroscopiques L’aspect macroscopique est évident si l’on a accès à la tumeur (peau, muqueuses par vision directe ou endoscopique, pièces opératoires), mais peut être apporté par des examens para cliniques tels que la tomodensitométrie (TDM) : ––tumeurs bourgeonnantes : végétantes avec des bourgeons charnus, implantés sur une base étroite (aspect de lacune sur la radiographie avec injection de produit de contraste) ; ––tumeurs infiltrantes : indurées souvent sur une grande surface reposant sur une base large (aspect de rigidité ou de sténose sur la radiographie), de symptomatologie souvent insidieuse plus tardive ; ––tumeurs ulcérantes : ulcérations qui ne cicatrisent pas avec une zone de nécrose centrale et une périphérie charnue (aspect de niche en radiographie). Souvent, il existe des formes mixtes ulcéro-bourgeonnantes ou ulcéro-infiltrantes. 2.Aspects microscopiques Ce sont les éléments fondamentaux pour le diagnostic et le traitement ultérieur. La cytologie : elle consiste à examiner des cellules isolées au cours d’un prélèvement dans des sécrétions naturelles (frottis vaginal, crachats) ou au cours de ponction à l’aiguille fine dans une séreuse (pleurésie, ascite) ou dans un nodule plein (ganglion, sein, foie…). C’est un examen simple, utile pour le dépistage de masse ou pour confirmer l’existence d’une autre localisation d’un cancer déjà connu, mais il présente quelques insuffisances : ––les résultats n’ont de valeur que s’ils sont positifs, les cellules malignes ayant pu échapper à un recueil très ponctuel ; ––l’affirmation du caractère malin des cellules repose sur l’existence d’anomalies nucléaires ou cytoplasmiques, nécessitant un observateur expérimenté en raison du nombre important d’anomalies douteuses ; ––les caractéristiques de la tumeur telles que son type histologique, son degré de différenciation ne peuvent être appréciées de façon précise. L’examen histologique : il est réalisé sur un fragment tissulaire, et non plus sur des cellules isolées. Il permet d’étudier à la fois les anomalies cellulaires et les modifications de structure du tissu. Il nécessite un matériel tumoral plus important obtenu par biopsie chirurgicale, ponction-biopsie (drill-biopsie dans les tumeurs du sein, biopsie endoscopique) ou examen de la pièce opératoire (avec examen extemporané, puis examen définitif). Cet examen permet : ––d’affirmer le diagnostic de cancer (anomalies cellulaires et de structure du tissu) ; e292 Vol. 66 _ Septembre 2016 ––de préciser sa variété histologique (adénocarcinome ou carci nome épidermoïde, sarcome, lymphome…) ; ––de définir certains caractères évolutifs et pronostiques tels que le degré de différenciation (de bien différencié à indifférencié), l’activité mitotique (nombre de cellules en cycle cellulaire par rapport à la population globale), le grade histologique (grade de Scarff-Bloom-Richardson [SBR] dans le cancer du sein) ; ––de déterminer l’extension microscopique dans les diverses couches du tissu atteint : c’est un élément pronostique essentiel dans de nombreuses localisations car l’atteinte d’un certain niveau d’extension conditionne en partie l’évolution locorégionale et métastatique (niveaux de Clark dans le mélanome, Dukes dans les cancers colorectaux…) ; ––de réaliser d’autres examens indispensables à la caractérisation de la tumeur et la définition du traitement : recherche de marqueurs biologiques dans des cellules sur une tumeur complexe (tumeur mixte du testicule), étude immunologique (lymphome), recherche de récepteurs hormonaux ou de HER2 (cancer du sein). Bilan d’extension Généralités Il repose sur un examen clinique ciblé et des examens complémentaires appropriés (sensible, spécifique, le moins invasif possible, disponible). Trois niveaux d’extension sont à explorer : ––local : évaluation des rapports de la tumeur par rapport aux organes de voisinage ; ––loco-régional : recherche d’adénopathie témoignant de l’atteinte des ganglions lymphatiques dans le territoire de drainage lymphatique de l’organe atteint par la tumeur primitive. Si le ganglion est palpable, la tétrade évocatrice (mais inconstante) d’une adénopathie tumorale est dure, fixée, immobile, rarement douloureuse ; ––général : recherche de lésions secondaires à distance du site primitif que l’on appelle des métastases. Les métastases peuvent être viscérales ou ganglionnaires dans le cas de ganglions qui ne sont pas dans le territoire de drainage. Moyens diagnostiques 1.Examen clinique Il peut s’agir de : ––syndrome tumoral : adénopathies périphériques palpables, hépatomégalie, splénomégalie, douleurs spontanées ou provoquées par la palpation, touchers pelviens ; ––signes d’insuffisance d’organe ; ––syndrome compressif : syndrome occlusif en cas de carcinose péritonéale, hydronéphrose par compression extrinsèque (tumeurs pelviennes) ou intrinsèque (tumeur urothéliale), dysphonie, dysphagie, dyspnée par compression respectivement des Diagnostic des cancers : signes d'appel et investigations paracliniques ; caractérisation du stade ; pronostic POINTS FORTS À RETENIR Le diagnostic de cancer repose toujours sur un examen anatomo-pathologique de la tumeur et/ou de ses métastases. Un bilan d’extension complet est fondé sur une évaluation de l’atteinte locale de la tumeur, lymphatique régionale et métastatique. La classification du cancer permet d’élaborer une prise en charge thérapeutique adaptée et de faire un portrait du pronostic global. La classification TNM est la plus utilisée. Les principaux marqueurs prédictifs de l’évolution d’un cancer correspondent à l’une des trois catégories suivantes : caractéristiques tumorales, terrain du patient, conditions du traitement. cordes vocales ou des nerfs laryngés, de l’œsophage, de la trachée ou des bronches par une tumeur ou des adénopathies cervicales ou médiastinales, déficit sensitif et/ou moteur et/ou troubles sphinctériens en cas de compression médullaire… ; ––syndrome paranéoplasique (hippocratisme digital, syndrome cave supérieur, syndrome de Claude-Bernard-Horner…). 2.Examens paracliniques Radiographies simples : disponibles, peu irradiantes, ce sont : ––radiographie de thorax (lésions pulmonaires unique ou multiples en « lâcher de ballon ») ; ––radiographies osseuses (lyse, condensation, fracture) ; ––mammographie. Échographie :simple, non invasive mais très opérateur-dépendante. Des échographies dynamiques sont possibles dans l’exploration du foie en cas de diagnostic différentiel : lésions d’angiomatoses (bénignes) ou métastatiques (malignes). Tomodensitométrie (TDM = scanner) : avec injection de produit de contraste iodé, elle reste l’examen de référence. Avantages : permet d’explorer tous les niveaux, peu opérateur-dépendant (ne pas lire le compte-rendu sans regarder les images !), comparaisons possibles entre plusieurs examens successifs (évaluation selon les critères RECIST 1.1 : réponse complète ou partielle, stabilité ou progression). Inconvénients : irradiation non négligeable (surtout en cas d’examens répétés), qualité de l’examen dépendant de l’injection d’un produit de contraste iodé (risque allergique, nécessité d’une fonction rénale conservée avec une clairance de la créatinine > 50 mL/min, arrêt des antidiabétiques oraux). Imagerie isotopique. Plusieurs sont possibles : ––tomographie par émission de positons (TEP = PET-scan) : traceur radioactif 18-FDG (flurorodésoxyglucose) : intérêt dans le bilan d’extension ganglionnaire et général, peu spécifique (hyperfixation également des foyers infectieux ou inflammatoires) ; ––scintigraphie osseuse au technétium (sensible, dans le bilan lésionnel de l’atteinte osseuse, peu spécifique, irradiant et invasif) ou au FNa (très spécifique sur l’os), scintigraphie thyroïdienne. Imagerie par résonance magnétique (IRM) : c’est un examen d’imagerie non irradiant. Il permet d’augmenter la sensibilité dans la détection des lésions secondaires cérébrales, méningées et hépatiques. C’est l’examen de référence pour l’évaluation de l’atteinte par compression médullaire. Elle nécessite une injection de gadolinium afin d’avoir des séquences avec injection permettant d’évaluer la vascularisation. Les contre-indications sont rares : corps étranger métallique, prothèse métallique, claustrophobie. Un délai d’au moins 6 semaines après la mise en place de matériel d’ostéosynthèse, par exemple, est à respecter en raison du risque de déplacement par le champ magnétique. C’est un examen long et encore peu disponible. Endoscopie :elle peut être digestive haute (gastroscopie) et basse (colonoscopie, rectoscopie), respiratoire (fibroscopie bronchique), urinaire (cystoscopie), gynécologique (hystéroscopie), permettant une localisation précise, une description, la recherche d’éventuelles complications (sténose, ulcération, perforation…) et la réalisation d’une biopsie permettant le diagnostic de certitude. Chirurgie : il s’agit par exemple de la cœlioscopie exploratrice à la recherche de nodule de carcinose péritonéale (métastases péritonéales en cas de cancer de l’ovaire ou de l’estomac). Place de la biologie : ––les marqueurs tumoraux sont peu sensibles et peu spécifiques, probablement plus utiles pour le suivi et l’évaluation de l’efficacité thérapeutique, discutables pour le dépistage des rechutes. Il n’y a pas d’intérêt au moment du diagnostic sauf alpha-fœtoprotéine et sous-unité bêta de l’hCG dans les tumeurs germinales, et l’alpha-fœtoprotéine (+ imagerie) dans le carcinome hépatocellulaire ; ––la biologie moléculaire sur pièce opératoire ou biopsie a un intérêt pronostique et thérapeutique : récepteurs hormonaux (cancer du sein), sur expression de HER2 (sein, estomac), mutation du récepteur de l’EGF (cancer colorectal, cancer bronchique non à petites cellules), B-Raf (mélanomes), k-Ras (cancers colorectaux)… Sur point d’appel uniquement : on retient en particulier le myélogramme à la recherche d’un envahissement médullaire, et la ponction lombaire à la recherche d’une méningite carcinomateuse. Bilan préthérapeutique Il a plusieurs objectifs : ––capacité du patient à supporter le traitement anticancéreux ; ––choix du traitement en fonction du terrain. Vol. 66 _ Septembre 2016 e293 RR Item 289 D IA G N O S T IC DE S C ANC E R S : SIGNE S D'APPE L E T INVE ST IGAT IONS… Retentissement général de la tumeur 1.Examen clinique Il évalue : poids et évolution du poids, indice de performance de Karnofsky ou de l’OMS, signe d’insuffisance d’organe, adénopathie périphérique palpable, hépatomégalie et splénomégalie, touchers pelviens, pression artérielle. 2.Examens paracliniques On discute en particulier l’imagerie (v. bilan d’extension) et la biologie avec : ––calcémie et calcémie corrigée en cas d’atteinte osseuse ; ––bilan hépatique : phosphatases alcalines (PAL) élevées en cas de métastases osseuses condensantes (cancer du sein ou de la prostate) ; cholestase anictérique avec élévation des PAL et des gamma GT sans élévation de la bilirubine en cas de métastases hépatiques ; bilirubine élevée en cas de compression (intrinsèque ou extrinsèque) des voies biliaires ; signe d’insuffisance hépatique (transaminases, TP, albumine) et rénale (urée, créatinine, calcul du débit de filtration glomérulaire) ; ––syndrome inflammatoire fréquent avec une CRP parfois élevée (jusqu’à plus de 100 mg/L), ferritine élevée avec une carence martiale fonctionnelle (coefficient de saturation de la transferrine < 20 %), pouvant entraîner à plus long terme une anémie ; ––hémogramme : anémie à documenter et à corriger : hémorragie aiguë ou à bas bruit, anémie inflammatoire ou carentielle ; leucopénie avec le risque infectieux ; thrombopénie avec le risque hémorragique (et se méfier d’une coagulation intravasculaire disséminée) ; ––myélogramme : en cas de pancytopénie, de suspicion de syndrome d’activation macrophagique) et de l’envahissement médullaire. Bilan du terrain Il est important en cas de comorbidité, avec une évaluation spécialisée au cas par cas et équilibre des traitements préexistants (diabète, insuffisance cardiaque, hypertension artérielle, asthme…). Bilan préopératoire Il évalue l’extension de la maladie et le retentissement fonctionnel pouvant nécessiter une chirurgie en urgence (occlusion, sténose, anurie…). Bilan pré-chimiothérapie Il est fonction du protocole de chimiothérapie envisagé, en lien avec les toxicités spécifiques de certaines molécules de chimiothérapie. Pose d’une voie veineuse centrale de type chambre implantable sous-cutanée ou cathéter central d’insertion périphérique (Picc line) permettant l’administration de la chimiothérapie intraveineuse (produits irritants ou vésicants) directement dans la veine cave supérieure. e294 Vol. 66 _ Septembre 2016 Cœur : les anthracyclines, le 5-fluoro-uracile, la capécitabine (5-FU oral) et le trastuzumab (anticorps monoclonal dirigé contre le récepteur HER2) ont une toxicité cardiaque : cumulative et irréversible dans le cas des anthracyclines, réversible pour le trastuzumab et risque de spasmes coronariens responsables d’un angor voire d’un syndrome coronaire aigu pour le 5-FU. Leur utilisation nécessite au préalable une consultation cardiologique avec au minimum un électrocardiogramme et une échocardiographie avec mesure de la fraction d’éjection ventriculaire gauche. Moelle osseuse : le caractère myélotoxique de la plupart des traitements de chimiothérapie impose la réalisation d’un hémogramme avant chaque cure. Fonction rénale et hépatique : elle doit être surveillée avant chaque cure de chimiothérapie présentant une toxicité rénale ou hépatique ou chez le patient ayant un risque de détérioration de l’une, l’autre ou des deux fonctions. Pulmonaire : on réalise des explorations fonctionnelles respiratoires avec mesure de la DLCO (mesure du transfert de l'oxyde de carbone) avant chimiothérapie par bléomycine en raison du risque de fibrose pulmonaire immuno-allergique. Ce risque est potentialisé par le tabagisme actif poursuivi pendant le traitement. La radiographie de thorax initiale permet de vérifier la position du cathéter central, épanchement pleural, adénopathies médiatisnales, foyer de pneumopathie… : à répéter au moindre doute. Classification Les objectifs des classifications sont de préciser le degré d’extension du cancer, en différentes classes, au décours du bilan local, régional et général, le choix de la thérapeutique et la détermination du pronostic global selon la classe déterminée. Généralités Le bilan d’extension local, régional et général du cancer permet de classer précisément la maladie en différents profils diag nostiques, de gravité croissante. La classification va aider le médecin dans ses choix thérapeutiques. Elle facilite également les échanges d’informations entre différents centres de traitement, notamment à l’international (classifications internationales des cancers). La classification permet aussi d’apprécier et de comparer objectivement les résultats des traitements. Chaque localisation de cancer dispose de sa propre classification. Classification TNM C’est la classification la plus utilisée pour la majorité des tumeurs solides. Elle est formulée par l’Union internationale contre le cancer (UICC). L’extension anatomique de la maladie repose sur les trois éléments suivants : ––T : degré d’extension de la tumeur primitive (T = tumor) ; ––N : absence ou présence, nombre de métastases ganglionnaires dans les territoires de drainage de la tumeur primitive, voire plus à distance pour certains cancers (N = node = ganglion) ; ––M : absence ou présence de métastases à distance de la tumeur primitive. Chaque élément (T, N et M) a un chiffre qui lui correspond. 1.T : tumeur primitive On distingue : ––Tis : carcinome in situ, à un stade très précoce. Pas d’invasion des tissus voisins ; ––T0 : pas de signe de tumeur primitive (clinique, paraclinique) ; ––T1-T2-T3-T4 : degré croissant de taille et/ou d’extension locale de la tumeur primitive ; ––Tx : données insuffisantes pour l’évaluation de la taille tumorale. 2.N : atteinte ganglionnaire régionale (adénopathies) On distingue : ––N0 : pas d’envahissement ganglionnaire régional ; ––N1-N2-N3 : augmentation en nombre et/ou en extension de l’envahissement ganglionnaire régional ; ––Nx : données insuffisantes pour l’évaluation de l’atteinte ganglionnaire. 3.M : Métastase à distance On distingue : ––M0 : absence de métastase à distance ; ––M1 : présence de métastase(s) à distance ; ––Mx : données insuffisantes pour l’évaluation des métastases à distance. 4.Règles de la classification TNM Chaque cas doit avoir une confirmation anatomo-pathologique du diagnostic avant classification. Pour chaque localisation, quatre classifications peuvent être données : ––classification clinique : TNM ou cTNM (clinical classification), qui s’appuie sur les constatations cliniques, radiologiques, endoscopiques… faites avant tout traitement. Les examens complémentaires requis pour cette classification varient selon la localisation de la tumeur primitive. Il s’agit de la classification la plus souvent utilisée en pratique clinique ; ––classification pathologique : pTNM (pathological classification), prenant en compte les informations anatomo-pathologiques supplémentaires recueillies au cours de l’acte d’exérèse chirurgicale ou suite à l’examen de la pièce opératoire ; ––classification de la rechute : rTNM (retreatment classification) ; ––classification à l’autopsie : aTNM (autopsy classification), réalisée au décours d’un examen post mortem. Un préfixe y précise que la classification pathologique a été réalisée pendant ou après un traitement néo-adjuvant (= préopératoire) ayant pu modifier la classification : ypTNM. Une fois établi initialement, le stade TNM n’est plus modifié quelle que soit l’évolution de la maladie. En cas de tumeurs multiples au sein d’une même localisation, la classification dépend de la tumeur de plus grande taille, et le nombre m total de tumeurs est indiqué entre parenthèses : T2(m) = T2(5) si présence de 5 tumeurs, par exemple. Quelques notions essentielles pour les examens, l'ECN et votre pratique future w Le diagnostic de cancer impose (sauf rares cas, par exemple l’hépatocarcinome) une preuve anatomo-pathologique. w L’IRM avec injection de gadolinium est l’examen de choix pour l’exploration des étages encéphaliques et pelviens. w Le bilan d’extension de la maladie comprend 3 niveaux : local, locorégional et général. w Privilégier autant que possible les examens complémentaires non irradiants. w Le poumon, le foie, l’os et le cerveau sont les principaux organes cibles des métastases. w Les marqueurs tumoraux biologiques n’ont pas leur place dans la stratégie diagnostique (seules exceptions : carcinome hépato-cellulaire, tumeurs germinales). w Principes de la classification TNM pour les tumeurs solides. w M+ = stade IV. w Le scanner avec injection de produit de contraste reste l’examen le plus sensible et le plus spécifique pour le niveau thoracique et abdominal. w Bilan préthérapeutique cardiaque avant traitement cardiotoxique. w Classification spécifique pour le cancer de la prostate, le cancer de l’ovaire. w Pronostic favorable = objectif CURATIF = guérison. w Pronostic défavorable = objectif PALLIATIF = limiter les symptômes sans trop de toxicité. Vol. 66 _ Septembre 2016 e295 RR Item 289 D IA G N O S T IC DE S C ANC E R S : SIGNE S D'APPE L E T INVE ST IGAT IONS… Message de l'auteur Cet item est très vaste, et aucun cas clinique ne peut être construit à partir de ce seul chapitre. Cependant, son contenu sera utilisé pour tous les dossiers portant sur un cas de cancer. Plusieurs types de dossiers peuvent être proposés nécessitant les connaissances fondamentales de cet item (dossier clinique pur sur un cancer en particulier et/ou dossier transversal). Il est impératif de savoir hiérarchiser les examens complémentaires et de garder en tête l’impérative nécessité d’une preuve anatomo-pathologique avant tout traitement du cancer. Il faut savoir penser au bilan d’extension après chaque diagnostic de cancer. Vous devez insister sur l’information donnée au patient, et la marche à suivre dans l’annonce diagnostique du cancer. Le mode décisionnaire en RCP de tout traitement pour un cancer est à connaître. Le cadre général des symptômes du cancer conduisant au diagnostic doit être compris et doit permettre d’élaborer des hypothèses diagnostiques (symptômes généraux, symptômes directement liés à la tumeur maligne, et syndromes paranéoplasiques), la majorité des dossiers comprenant de la cancérologie sont transversaux avec des complications liées au cancer lui-même (hypercalcémie, occlusion, compression médullaire…) ou à ses traitements. Les marqueurs tumoraux peuvent être demandés sur un cas clinique de cancer du sein, cancer de la prostate, cancer du pancréas, tumeurs germinales ou cancer du côlon. Les dépistages recommandés en France doivent être maîtrisés ainsi que les conditions particulières amenant un diagnostic individuel précoce. La classification TNM est à connaître pour les cancers du sein, du côlon, de la prostate et du poumon essentiellement. e296 Vol. 66 _ Septembre 2016 Classification en stades La classification TNM fournit une description très précise de l’extension anatomique du cancer. Une localisation tumorale dont la classification a 4 catégories de T, 3 catégories de N et 2 catégories de M correspond à 24 catégories TNM possibles. Dans une optique de simplification, toutes ces catégories sont généralement groupées en stades de gravité croissante. Chaque stade correspond à un groupe relativement homogène de catégories TNM sur le plan de la survie. Les différences de survie entre les différents stades sont souvent très importantes. Le plus souvent, on distingue 5 stades de gravité croissante : ––stade 0 : cancer in situ ; ––stade 1 : tumeur primitive de petit volume, sans adénopathie ni métastase ; ––stade 2 : extension locale plus avancée et/ou envahissement ganglionnaire minime ; ––stade 3 : extension locale très avancée avec possible atteinte des organes de voisinage et/ou envahissement ganglionnaire important ; ––stade 4 : présence de métastase(s) à distance et/ou adénopathies à distance de la tumeur primitive. Dans la majorité des cas, les cancers de stade 0, 1 et 2 sont traités avec un objectif curatif, tandis que les stades 3 et 4 sont des indications de traitement à but palliatif. Classifications spécifiques Pour certaines localisations de cancer, et à certains stades, des classifications spécifiques sont utilisées. Par exemple, la classification de D’Amico pour les cancers de prostate localisés : ––permet de déterminer le risque de rechute après traitement local du cancer ; ––distingue 3 groupes à risque de rechute faible, intermédiaire et élevé ; ––est fondée sur TNM, taux sanguin de PSA au diagnostic et score anatomo-pathologique de Gleason. La classification de la Fédération internationale de gynécologie et d’obstétrique (FIGO) distingue : ––pour le cancer de l’ovaire, 4 stades : limité à l’ovaire, extension vers les organes de voisinage, extension au péritoine ou lymphatique régionale, extension à distance (plèvre, foie) ; ––pour le cancer du col utérin, 4 stades : limité au col, extension au vagin (deux tiers supérieurs) et/ou aux paramètres, extension au tiers inférieur du vagin et/ou à la paroi pelvienne, extension à la vessie et/ou au rectum et/ou aux organes à distance ; ––pour le cancer de l’endomètre, 4 stades : limité au corps utérin, extension au stroma du col, extension ganglionnaire régionale et/ou annexes et/ou paramètres et/ou séreuses, extension à la vessie et/ou intestin et/ou à distance. Enfin, la classification d’Ann Arbor s’adresse aux lymphomes malins non hodgkiniens et lymphomes hodgkiniens. Pronostic Terrain Généralités Il évalue : ––l’âge ; ––l’état général et notamment le degré d’autonomie ; ––le statut nutritionnel : une dénutrition modérée à sévère est un facteur de mauvais pronostic ; ––la présence de comorbidités : insuffisance rénale, hépatique, cardiopathie, coronaropathie, artériopathie, insuffisance respiratoire obstructive, restrictive, déficit immunitaire ; ––l’état psychologique : dépression, troubles anxieux, troubles psychiatriques ; ––la situation socio-professionnelle : bas niveau socio-économique, précarité, mauvaise observance thérapeutique ; ––génétique : formes familiales (exemple : polypose adénomateuse familiale), cytogénétique ; ––statut hormonal (ménopause et cancer du sein). Les facteurs pronostiques sont des critères permettant de prévoir l’évolution du cancer, mais ils n’échappent pas aux incertitudes de toute prévision. Le but global est d’évaluer l’agressivité de la maladie, en termes de rechute locale, régionale ou métastatique. Ces facteurs pronostiques sont recueillis avant tout traitement, mais peuvent aussi évoluer pendant et après le traitement. L’évaluation d’un pronostic global avant tout traitement est indispensable pour définir la stratégie thérapeutique : ––pour un cancer à pronostic favorable, l’objectif est de réaliser un traitement le plus efficace possible et ayant le moins d’effets secondaires ; ––pour un cancer de mauvais pronostic, l’objectif est d’obtenir une réponse au traitement, en prenant le risque d’obtenir des effets secondaires plus importants. Les facteurs pronostiques sont très nombreux et correspondent schématiquement à 3 grandes catégories : la tumeur, le terrain, le traitement (3T). Tumeur L’évaluation dépend de : ––la taille de la tumeur et l’extension du cancer : . extension pariétale, aux organes de voisinage ; . extension ganglionnaire ; .extension à distance : la découverte de métastases est un facteur pronostique péjoratif majeur ; ––l’histologie, en particulier : . le type histologique (par exemple, pour les tumeurs cérébrales primitives, glioblastome de moins bon pronostic que les oligodendrogliomes) ; . le degré de différenciation : le caractère indifférencié aggrave le pronostic ; . l’index de prolifération : le temps de doublement court pour une tumeur est un marqueur d’agressivité donc de mauvais pronostic ; . l’envahissement vasculaire (emboles vasculaires péritumoraux) ; . le grade histologique (par exemple, score de Gleason pour le cancer de la prostate, score Scarff-Bloom-Richardson pour le cancer du sein, grade de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer [FNCLCC] dans les sarcomes des tissus mous). ––la biologie, par exemple : . hormonosensibilité : présence de récepteurs à l’estrogène et à la progestérone pour une tumeur du sein, facteurs de bon pronostic ; . analyse de l’expression (immuno-marquage) et/ou de l’amplification (FISH) de certains gènes dans la tumeur : par exemple, HER2 et cancer du sein ; .dosages sériques des marqueurs tumoraux : par exemple β-hCG, LDH et αFP dans le cancer du testicule, immunoglobuline monoclonale et myélome multiple. Traitement Les éléments importants sont : ––délai de prise en charge initiale : facteur pronostique majeur pour certains types de tumeurs ; ––qualité de l’exérèse chirurgicale (= marges) : une résection complète monobloc microscopique est un facteur de meilleur pronostic qu’une résection macroscopiquement incomplète ; ––réponse au traitement initial : chimiothérapie, radiothérapie ; ––prise en charge pluridisciplinaire, prérequis indispensable à un traitement de qualité ; ––récidive précoce malgré le traitement, élément pronostique péjoratif ; ––arrêt ou poursuite d’une exposition à risque (tabagisme, alcoolisme…). Conclusion Le cancer est devenu la première cause de mortalité en France et l’incidence augmente en raison du vieillissement de la population, de facteurs génétiques mais aussi toxiques, environnementaux, sociétaux. Dans le cadre de l’apprentissage de la cancérologie, il est important pour les étudiants en médecine, quelle que soit leur spécialité, d’être sensibilisés à l’intérêt des dépistages organisés (sein, col de l’utérus, côlon-rectum), aux signes d’appel évocateurs (syndrome tumoral, syndrome compressif, hémorragie, altération de l’état général…) et aux principaux facteurs de risque (antécédents personnels et familiaux, exposition professionnelle, tabagisme actif ou passif). • B. Mery, G. Moriceau, R. Rivoirard et O. Collard déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts. Vol. 66 _ Septembre 2016 e297 RR FOCUS Item 289 Les métastases des cancers Dr Benoîte Mery, Dr Guillaume Moriceau, Dr Romain Rivoirard, Dr Olivier Collard Voir l’item complet page e291 et sur larevuedupraticien.fr Ce FOCUS attire votre attention sur des points importants. Département d’oncologie médicale, institut de cancérologie Lucien-Neuwirth, 42270 Saint-Priest-en-Jarez, France [email protected] a métastase est une lésion cancéreuse dont l’origine est le tissu de la tumeur initiale. Une métastase hépatique d’un cancer du sein n’est pas un cancer du foie, mais une évolution d’un cancer du sein. La localisation des métastases dépend de la vascularisation des organes cibles et/ou d’affinité particulière d’un type tumoral pour un organe cible. Les principaux sites sont : ––les poumons : bien distinguer, au niveau thoracique, les méta stases pulmonaires parenchymateuses et les adénopathies médiastinales. Les métastases pulmonaires peuvent se voir dans pratiquement tous les cancers. Une métastase envahis sant une bronche ou un vaisseau expose à des complications qui peuvent être particulièrement sévères (pneumothorax, dé tresse respiratoire aiguë, hémoptysie…) ; ––le foie : les métastases hépatiques sont particulièrement fré quentes (et surviennent en premier lieu) dans les cancers digestifs (colorectal) mais aussi du sein ou du poumon. La double vascu larisation (système hépatique et système porte) explique l’affi nité du foie pour les localisations secondaires. Le nombre de lésions, leur localisation dans le parenchyme et le rapport avec les gros vaisseaux sont fondamentaux pour la prise en charge (chirurgie des métastases, radiofréquence…) ; ––l’os : les cancers les plus ostéophiles sont le cancer du poumon, du rein, du sein, de la prostate et de la thyroïde. Le bilan d’exten sion permet d’évaluer le risque fracturaire, ainsi que le rapport au canal médullaire en cas d’atteinte vertébrale ; ––le cerveau : les métastases cérébrales proviennent de cancer du sein, du rein, du poumon et du mélanome… On recherche tout particulièrement la survenue d’un effet de masse, d’un engagement, ou d’un signe de compression d’une zone fonc tionnelle en cas de signe d’appel neurologique. Pour le diag nostic de métastases cérébrales, l’IRM avec injection est plus performante que la TDM avec injection ; ––tout autre organe peut être le siège d’une métastase (rein, surrénale, choroïde, muscle, peau…). L’apparition de métastases constitue un tournant dans l’histoire naturelle du cancer. La maladie cancéreuse n’est plus limitée à un organe mais disséminée (éviter le terme « généralisée » même si, en pratique, c’est le cas). Savoir si le cancer est métastatique a un intérêt pronostique majeur dans la prise en charge médicale et chirurgicale du patient. e298 Vol. 66 _ Septembre 2016 Coll. J.-F. Cordier L FIGURE Métastases multiples d’un sarcome des parties molles. Aspect de « lâcher de ballons » avec masses multiples des deux poumons. Par ailleurs, le suivi des métastases (taille, aspect) permet d’ap précier la réponse au traitement. Le risque métastatique est théoriquement possible pour tous les types de cancer, même si, en pratique, il est en fait très va riable selon les localisations : par exemple, les carcinomes ba socellulaires ne donnent pas de métastases et les tumeurs céré brales exceptionnellement. Une adénopathie tumorale en dehors du territoire de drainage de l’organe atteint doit être considérée comme une métastase ganglionnaire (M du TNM) et pas comme une simple atteinte ganglionnaire (N du TNM). Des métastases peuvent être retrouvées sans que la tumeur primitive puisse être mise en évidence, le diagnostic histologique est fait sur l’une des métastases, le bilan à la recherche de la tumeur primitive (orienté par l’histologie, l’histoire de la maladie, les antécédents du patient…) peut être négatif et un traitement à « large spectre » est alors réalisé contre les métastases et le primitif présumé.• B. Mery, G. Moriceau, R. Rivoirard et O. Collard déclarent n’avoir aucun lien d’intérêts. RR Item 249 AMAIGRISSEMENT À TOUS LES ÂGES Pr Anne-Laure Fauchais, Dr Anne Cypierre Service de médecine interne A, CHU Dupuytren, 87000 Limoges, France [email protected] Le poids objectifs ARGUMENTER les principales hypothèses diagnostiques et JUSTIFIER les examens complémentaires pertinents. Définition L’amaigrissement est défini par une perte de poids supérieur à 5 % du poids corporel sur une période de 6 mois. Il est considéré important s’il est supérieur ou égal à 10 % du poids. L’amaigrissement est à distinguer de la maigreur constitutionnelle où le poids, bien qu’inférieur à la norme, est stable et ne s’accompagne d’aucun symptôme. L’amaigrissement peut avoir plusieurs origines : ––une insuffisance d’apport alimentaire ; ––un défaut d’absorption des aliments ; ––un excès de consommation métabolique (maladies inflammatoires, néoplasies…). Une grande variété de pathologies peuvent être à l’origine d’un amaigrissement, l’interrogatoire et l’examen clinique guidant habituellement la prise en charge. Lorsque l’amaigrissement est isolé, la démarche diagnostique doit faire appel à des examens complémentaires hiérarchisés. Démarche diagnostique Elle est essentielle, vrai travail de détective, s’appuyant sur le recueil précis des antécédents et des traitement suivis, retraçant les modalités et la rapidité d’installation des symptômes, chiffrant la perte de poids. L’amaigrissement, signe aspécifique, est rarement réellement isolé, et la démarche diagnostique doit s’attacher à découvrir un signe anamnestique, clinique ou biologique plus spécifique qui servira de fil conducteur à l’enquête étiologique. L’anamnèse pondérale s’assure tout d’abord de la réalité de l’amaigrissement (courbe de poids idéalement, antécédents pondéraux [anciennes consultations ou hospitalisations], changements de vêtements, changement des tours de taille et de cou…), des modifications du comportement alimentaire et apprécie la diminution éventuelle des apports alimentaires (anorexie, contexte socio-économique) ou leur augmentation. L’interrogatoire doit systématiquement évaluer l’apport en nourriture journalier de manière qualitative (exclusion ou non de certains aliments) et quantitative (nombre de calories). Dans les cas complexes, on s’aidera d’une enquête alimentaire menée par une diététicienne entraînée ou de l’observation directe de l’alimentation et de la perte de poids au cours d’une hospitalisation. On garde en mémoire que l’anorexie mentale restrictive est la première cause d’amaigrissement chez l’adolescent, et l’interrogatoire recherche alors régimes d’exclusion, activité physique intense et excessive, vomissements provoqués. Être systématique à l’interrogatoire, c’est être diagnostique L’interrogatoire recherche systématiquement des antécédents de cancer, d’anorexie mentale, de consommation de toxiques (alcool, tabac), de rapports sexuels à risque, de primo-infection et/ou de contage tuberculeux. La connaissance des conditions de vie (difficultés sociales et professionnelles) et le contexte psychologique font partie intégrante de l’évaluation. Le recueil des traitements suivis est indispensable, la polymédicamentation et/ou certaines classes médicamenteuses étant source d’anorexie, de dysgueusie conduisant à un amaigrissement parfois important, surtout chez le sujet âgé ou polypathologique. On recherche systématiquement les autres signes généraux associés (asthénie, anorexie et fièvre) et leur chronologie d’apparition. Vol. 66 _ Septembre 2016 e299 RR Item 249 A MA IG R IS SE ME NT À T OU S L E S ÂGE S On recherche également une aménorrhée, des troubles de la libido qui vont orienter vers une anorexie mentale ou une origine endocrinologique. L’examen clinique Le poids, la taille et le calcul de l’indice de masse corporelle sont à la base de l’évaluation, il ne faut pas se contenter de noter ce que déclare le patient mais il faut réaliser réellement les mesures. L’épaisseur cutanée tricipitale permet la mesure de la masse adipeuse. L’état nutritionnel est systématiquement évalué avec : ––la recherche d’une dénutrition : un indice de masse corporelle à moins de 17 ou une perte de poids en un mois supérieure à 5 % permettent de l’affirmer ; ––la recherche d’une amyotrophie ou de signes de carence (peau sèche, dépilation, chute des cheveux, purpura des membres inférieurs, gingivorragies…) ; ––la recherche d’un syndrome œdémateux lié à l’hypoprotidémie, les œdèmes pouvant masquer une partie de la perte de poids. On recherche ensuite plus particulièrement un syndrome tumoral ; la palpation des aires ganglionnaires est systématique, de même que la réalisation des touchers pelviens et un examen thyroïdien. Les signes de gravité clinique sont systématiquement recherchés : indice de masse corporelle < 15, perte de poids > 30 %, hypothermie, hypotension artérielle, bradycardie, ralentissement psychomoteur. Examens complémentaires Le bilan biologique recherche des signes de gravité : ––hypoglycémie ; ––troubles ioniques ; ––hypophosphorémie ; ––perturbation du bilan hépatique ; ––hypo-albuminémie profonde. Le choix des examens complémentaires doit être guidé avant tout par un point d’appel clinique : en l’absence, on réalise un bilan de première et deuxième intention non consensuel quant à son contenu (fig. 1 et 2) sans oublier le bilan de la dénutrition souvent associée. La recherche d’un syndrome inflammatoire doit être systé matique et permet de guider la démarche diagnostique. Sa présence fait discuter la biopsie de l’artère temporale chez le sujet âgé. Une hospitalisation est parfois nécessaire, permettant de reprendre l’enquête en recherchant à nouveau un trouble du comportement alimentaire (fiche de recueil alimentaire++), un trouble psychiatrique mais également d’approfondir la recherche d’une pathologie organique par la réalisation d’une tomodensitométrie thoraco-abdomino-pelvienne et d’endoscopies digestives. e300 Vol. 66 _ Septembre 2016 Étiologie Les principaux cadres diagnostiques sont les suivants, étio logiques, néoplasiques, infectieuses, digestives et endocrinologiques étant les plus fréquentes des pathologies somatiques responsables d’un amaigrissement chez l’adulte. Le tableau résume les points clés de certaines causes pouvant se révéler par un amaigrissement et à connaître pour l’ECN. Néoplasiques Tout cancer peut être révélé par un amaigrissement, la fréquence des origines néoplasiques pouvant atteindre 25 à 35 % des cas dans certaines études, avec une majorité de cancers digestifs. L’origine de la perte de poids est souvent multiple (cytokinique, réduction alimentaire conséquence directe des cancers digestifs et ORL, hypercatabolisme, douleurs). Le bilan est orienté par : ––des antécédents personnels ou familiaux néoplasiques ; ––le tabagisme, l’éthylisme chronique ; ––un syndrome tumoral clinique ; ––l’anémie de profil ferriprive (néoplasie digestive) ou inflammatoire (néoplasie rénale)… Causes organiques non néoplasiques Elles représentent de 30 à 50 % des causes. 1.Infectieuses Ce sont les infections subaiguës avec abcès profond, endocardites, tuberculose, virus de l’immunodéficience humaine (VIH), hépatites virales B et C chroniques, virus d’Epstein-Barr, cyto mégalovirus. Deux affections sont à rechercher systématiquement, la tuberculose et l’infection par le VIH. Le bilan est orienté par : ––l’interrogatoire avec pratiques à risque ; ––la fièvre ; ––le syndrome inflammatoire biologique ; ––l’hyperleucocytose et/ou la lymphopénie, le syndrome mononucléosique. 2.Métaboliques Ce sont l’hyponatrémie, l’hypercalcémie, l’insuffisance rénale aiguë ou chronique. Le bilan est orienté par : –– l’ionogramme sérique, la fonction rénale, le bilan phosphocalcique ; ––l’analyse des traitements pris par le patient+++. 3.Endocriniennes Ce sont le diabète de novo ou décompensé, l’hyper- ou l’hypo thyroïdie, l’insuffisance surrénalienne, panhypopituitarisme. Le bilan est orienté par : ––l’amaigrissement à appétit conservé (diabète, hyperthyroïdie) ; ––l’asthénie, la mélanodermie, l’hypotension (insuffisance surrénalienne) ; ––la thermophobie, les palpitations, les tremblements (hyperthyroïdie). Histoire pondérale / Enquête alimentaire Interrogatoire précis, examen clinique minutieux Poids stabilisé avec apports nutritionnels conservés Examen physique et bilan de première intention Perte de poids avec apports nutritionnels conservés ou augmentés Perte de poids avec apports nutritionnels diminués (anorexie) Maigreur constitutionnelle Diabète (glycémie) Hypertrophie (TSH) Malabsorption (SB carence) Bilan étiologique Éliminer ✗ causes organiques Attention chez SA ou polypathologique Causes intriquées Facteur déclenchant aigu Situation de rupture (cancer, infections, digestives, métaboliques, endocriniennes, neurologiques…) ✗ causes psychiatriques ✗ causes iatrogènes ✗ causes sociales FIGURE 1 Démarche diagnostique au cours d’un amaigrissement isolé. SB : signes biologiques ; TSH : thyréostimuline. Amaigrissement / Interrogatoire précis, examen clinique minutieux Orientation diagnostique Pas d'orientation diagnostique Exploration ciblée Bilan de première intention Bilan de deuxième intention NFS, plaquettes, taux de prothrombine, temps de céphaline activée, vitesse de sédimentation, protéine C réative, fibrinogène, EPP, ionogramme, urée, créatinine, glycémie, bandelette urinaire ± ECBU, calcium, phosphore, LDH, TSH, bilirubine, TGO, TGP, GT, sérologie VIH, anticorps antitransglutaminase, dépistage d'une malabsorption (albumine, pré-albumine, ferritine, folates, B12) Intradermoréaction à la tuberculine Tomodensitométrie thoraco-abdomino-pelvienne Endoscopies digestives avec biopsies systématiques duodénales Radiographie de thorax, échographie abdomino-pelvienne FIGURE 2 Bilan biologique et paraclinique hiérarchisé. NFS : numération formule sanguine ; EPP : électrophorèse des protéines plasmatiques ; ECBU : examen cytobactériologique des urines ; LDH : lactate déshydrogénase ; TSH : thyréostimuline ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine. Vol. 66 _ Septembre 2016 e301 TABLEAU RR Item 249 A MA IG R IS SE ME NT À T OU S L E S ÂGE S Quelques étiologies susceptibles d’être révélées par un amaigrissement isolé Étiologie Pour y penser Éléments paracliniques évocateurs Causes néoplasiques Tout type de cancer ❚❚Altération de l’état général aggravante ❚❚Syndrome tumoral clinique ❚❚Penser à l’existence parfois associée d’un syndrome de sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique ou d’une hypercalcémie aggravant l’anorexie ❚❚Dégoût des viandes : cancer digestif+++ ❚❚Syndrome inflammatoire peut manquer ❚❚Traquer l’anémie ferriprive pour le cancer digestif ❚❚Autres signes biologiques évocateurs : élévation de la lactate déshydrogénase (LDH), cytolyse ou cholestase Étiologies endocriniennes et métaboliques Diabète ❚❚Syndrome cardinal ❚❚Diabète de type 1 de novo ❚❚Diabète de type 2 déséquilibré ou devenant insulino-requérant ❚❚Glycémie ❚❚Hémoglobine glyquée (HbA1c) ❚❚Rechercher pancréatite chronique associée+++ Hyperthyroïdie ❚❚Signe de thyrotoxicose (tachycardie, diarrhée motrice, thermophobie…) ❚❚TSH effondrée Hypercalcémie ❚❚Anorexie ❚❚Syndrome polyuro-polydypsique ❚❚Calcémie corrigée ou Ca ionisé ❚❚Recherche hyperparathyroïdie, métastases, myélome (électrophorèse) Insuffisance surrénalienne ❚❚Hypotension, mélanodermie ❚❚Tableau pseudo-abdominal ❚❚Hyponatrémie et hyperkaliémie ❚❚Hypoglycémie ❚❚Traitement d’épreuve ❚❚Dosage matinal de cortisol et de l’ACTH Endocardite ❚❚Fièvre parfois au 2e plan ❚❚Modification ou apparition d’un souffle cardiaque ❚❚Porte d’entrée ++ ❚❚Hémocultures ❚❚Syndrome inflammatoire ❚❚Échocardiographie transthoracique ± échocardiographie transœsophagienne Tuberculose ❚❚Fièvre, anorexie ❚❚Sueurs nocturnes ❚❚Contexte socio-économique ❚❚Radiographie du thorax ❚❚Intradermoréaction à la tuberculine Causes infectieuses Causes hépatiques et digestives Malabsorption (maladie cœliaque, maladie de Crohn, pancréatite chronique…) ❚❚Diarrhée chronique parfois au second plan ❚❚Signe de carence clinique ❚❚Carence martiale chronique chez la femme non ménopausée +++ ❚❚Anticorps anti-transglutaminase (maladie cœliaque) ❚❚Carences vitaminiques ❚❚Endoscopie digestive avec biopsies systématiques Hépatopathies ❚❚Ictère ❚❚Hépato-splénomégalie ❚❚Origine virale, éthylique, dysmétabolique ou auto-immune Causes auto-immunes et inflammatoires Vascularite Sarcoïdose ❚❚Amaigrissement rarement isolé ❚❚Penser à l’altération de l’état général des formes systémiques pures de l’artérite à cellules géantes (syndrome inflammatoire) ❚❚Attention à la sarcoïdose multiviscérale avec tableau pseudonéoplasique TSH : thyréostimuline ; ACTH : adreno-cortico trophic hormone. e302 Vol. 66 _ Septembre 2016 ❚❚Syndrome inflammatoire si vascularite ❚❚Enzyme de conversion de l’angiotensine si suspicion de sarcoïdose ❚❚Pas de bilan auto-immun non orienté ❚❚Si amaigrissement au cours d’un lupus érythémateux disséminé, du syndrome de Sjögren : penser à rechercher la maladie cœliaque associée Amaigrissement à tous les âges POINTS FORTS À RETENIR Vérifier la réalité de l’amaigrissement. Rechercher la dénutrition associée. Éliminer le cancer (25-35 % des cas). Origine psychogène fréquente (20 %) mais diagnostic d’élimination. La « to do list » de l’amaigrissement 1. S’assurer de la réalité, quantifier l’amaigrissement et toujours rechercher une dénutrition associée. 2. Faire une rapide enquête alimentaire à la recherche d’une réduction des apports : les amaigrissements à appétit conservé évoquent hyperthyroïdie, diabète et malabsorption. 3. Rechercher une addiction (alcool, tabagisme). 4. Ordonnance à rallonge = source d’amaigrissement. 5. La recherche d’un cancer (25-35 % des cas) doit être systématique. 6. Rechercher les troubles digestifs, parfois au deuxième plan ; leur présence renforce l’indication d’explorations endoscopiques qui doivent s’accompagner systématiquement de biopsies duodénales. 7. Le bilan biologique et paraclinique devra être hiérarchisé et centré, au départ, sur un point d’appel clinique ou anamnestique. 8. Penser au bilan de malabsorption (hémogramme, TP, cholestérol, fer, ferritine, calcémie, électrophorèse des protides, vitamine B12, folates, stéatorrhée, créatorrhée…) et à la maladie cœliaque (anticorps anti-transglutaminase). 9. Rechercher dépression et troubles psychiatriques, parfois intriqués à une pathologie somatique aiguë. . Chez le sujet âgé, penser à explorer les causes sociales (misère, isolement), buccales (édentation, prothèses dentaires inadaptées), neurologiques (démences, maladie de Parkinson…), iatrogènes et psychiatriques souvent intriquées. 4.Digestives Ce sont les ulcères gastriques ou duodénaux, œsophagites, candidoses bucco-œsophagiennes, hépatopathies chroniques (éthylique, virale, métabolique et auto-immune), la malabsorption (insuffisance pancréatique, la maladie cœliaque, la pullulation microbienne, les maladies inflammatoires du tube digestif). Le bilan est orienté par : ––l’anorexie au premier plan, diarrhée chronique ; ––l’anémie de profil ferriprive associée. 5.Inflammatoires Ce sont surtout les vascularites (artérite giganto-cellulaire de Horton : forme systémique avec altération de l’état général isolée et syndrome inflammatoire), sarcoïdose, maladies auto-immunes systémiques, mais l’amaigrissement est rarement isolé dans ce cadre étiologique. L’amylose peut, en revanche, être responsable d’un amaigrissement isolé. Le bilan est orienté par : ––un syndrome inflammatoire chronique (protéine C réactive et fibrinogène élevés) ; ––des signes cliniques spécifiques à rechercher systématiquement. 6.Cardiaque On retient l’insuffisance cardiaque terminale (toute cardiopathie notamment de surcharge : amylose, hémochromatose, shunts vieillis). Le bilan est orienté par : ––un antécédent personnel ou familial ; ––la portion N-terminale du propeptide natriurétique de type B (NT-ProBNP), l’électrocardiogramme. 7.Pulmonaire Ce sont : l’insuffisance respiratoire chronique décompensée ou terminale (broncho-pneumopathie chronique obstructive, pneumopathies interstitielles…), la néoplasie pulmonaire, la tuber culose, les embolies pulmonaires récidivantes (néoplasie ou syndrome des antiphospholipides). Le bilan est orienté par : ––une dyspnée progressive ; ––une hémoptysie. 8.Iatrogénique C’est extrêmement fréquent chez le sujet âgé et/ou polypatho logique représentant 10-15 % des hospitalisations des personnes âgées de plus de 75 ans. Le bilan est orienté par la lecture de l’ordonnance : ––hyponatrémie des diurétiques et/ou des inhibiteurs de recapture de la sérotonine ; ––syndrome confusionnel des psychotropes ; ––insuffisance rénale aiguë des anti-inflammatoires non stéroïdiens ; ––surdosage en digitaliques… 9.Neurologique On retient la démence chez le sujet âgé, souvent non encore diagnostiquée, l’encéphalopathie carentielle, la maladie de Parkinson, les séquelles d’un accident vasculaire cérébral… Vol. 66 _ Septembre 2016 e303 RR Item 249 A MA IG R IS SE ME NT À T OU S L E S ÂGE S Le bilan est orienté par : ––une anomalie examen neurologique systématique, les fausses routes ; ––le mini-mental state (MMS) pathologique ; ––parfois des symptômes dysthymiques au premier plan en cas de démence débutante. 10.Anomalies de la cavité buccale Elles sont multiples (édentation, prothèse inadaptée, candidose chronique) surtout chez le sujet âgé. Causes psychogènes Elles comprennent le syndrome dépressif, l’anxiété avec somatisation, l’addiction (alcool, toxicomanie), l’anorexie mentale (triade anorexie, amaigrissement, aménorrhée). Les origines psychogènes représentent 15 à 60 % des cas selon les études. L’origine psychogène de l’amaigrissement reste un diagnostic d’exclusion. Le bilan est orienté par : ––la normalité de l’examen clinique et des examens complémentaires à visée étiologique ; ––l’attention à l’intrication avec une pathologie aiguë somatique. Amaigrissement inexpliqué Entre 10 et 15 % des amaigrissements restent inexpliqués malgré une enquête étiologique bien conduite. Principes de prise en charge et suivi La prise en charge est avant tout étiologique. Le protocole de renutrition sera adapté à la pathologie causale et à l’intensité de la perte de poids. On favorisera autant que possible l’alimentation entérale (compléments nutritionnels oraux avec supplémentation vitaminique et minérale...). Chez le sujet âgé, il faut tenir compte des problèmes éventuels de mastication et penser à introduire des aides à domicile pour les repas. Un amaigrissement isolé sans syndrome inflammatoire bio logique et anomalie clinique ou paraclinique (bilan hiérarchisé) doit être surveillé régulièrement en consultation. e304 Vol. 66 _ Septembre 2016 Message de l'auteur L’item « Amaigrissement » est le prototype du dossier progressif transversal où les premières questions se focalisent sur la démarche diagnostique (ne jamais oublier le bilan du retentissement, c’est-à-dire les signes de gravité et une dénutrition associée), le dossier débouchant ensuite sur le diagnostic de nombreuses pathologies, qu’elles soient néoplasiques (cancer digestif et anémie ferriprive), infectieuses (endocardite, tuberculose, VIH), digestives (diarrhée chronique de la maladie cœliaque ou des maladies inflammatoires du tube digestif) voire neurologiques (amaigrissement, confusion aiguë et diagnostic de démence)… L’amaigrissement inexpliqué peut également révéler un trouble des conduites alimentaires avec un diagnostic final d’anorexie mentale à la fin du dossier progressif. + POUR EN SAVOIR ● Leduc D, Rougé PE, Rousset H, Maitre A, Champay-Hirsch AS, Massot C. Clinical study of 105 cases of isolated weight loss in internal medicine. Rev Med Interne 1988 Nov-Dec;9(5):480-6. Hernández JL, Riancho JA, Matorras P, González-Macías J. Clinical evaluation for cancer in patients with involuntary weight loss without specific symptoms. Am J Med 2003;114(8):631-7. Metalidis C1, Knockaert DC, Bobbaers H, Vanderschueren S. Involuntary weight loss. Does a negative baseline evaluation provide adequate reassurance? Eur J Intern Med 2008 Jul;19(5):345-9. Baicus C, Rimbas M, Baicus A, Caraiola S. Cancer and involuntary weight loss: failure to validate a prediction score. PLoS One 2014 Apr 24;9(4):e95286. A.-L. Fauchais déclare avoir participé à des interventions ponctuelles pour les entreprises Actelion, Roche, GSK, LFB, Genzyme, Pzizer, Lilli et avoir été prise en charge, à l’occasion de déplacement pour congrès, par elles. A. Cypierre déclare n'avoir aucun lien d'intérêts. RR Item 198 BIOTHÉRAPIES ET THÉRAPIES CIBLÉES Dr Arsène Mekinian, Pr Olivier Fain Service de médecine interne, hôpital Saint-Antoine, AP-HP, université Paris-VI, 75012 Paris, France [email protected] Greffes de moelle ou de cellules souches objectifs CONNAÎTRE les bases cellulaires et moléculaires des cellules souches embryonnaires et adultes, des cellules reprogrammées. CONNAÎTRE les principes des thérapies cellulaires et géniques. EXPLIQUER les principes d’évaluation des biothérapies. CONNAÎTRE les bases cellulaires et tissulaires d’action des thérapies ciblées. ARGUMENTER les principes de prescription et de surveillance. Principes des thérapies cellulaires et géniques Cellules souches 1.Cellules souches adultes Les cellules souches adultes sont naturellement présentes dans les organes, et participent au renouvellement et à la réparation des tissus adultes. 2.Cellules souches embryonnaires Issues de l’embryon à un stade très précoce de son développement, les cellules souches embryonnaires sont capables de se multiplier à l’infini, par simple division (autorenouvellement), et de donner naissance à tous les types de cellules de l’organisme (pluripotence). Les cellules souches embryonnaires sont cultivées à partir de cellules dans l’embryon quand il est âgé de seulement quelques jours et, chez les humains, cela correspond au blastocyste. Elles sont pour le moment principalement utilisées en recherche médicale mais, du fait de leur pluripotence, elles pourraient l’être pour produire des cellules humaines différenciées et être transplantées afin de guérir les tissus malades. 1.Cellules souches hématopoïétiques (CSH) Les cellules souches médullaires sont des cellules capables de s’autorenouveler et de donner naissance à au moins une lignée cellulaire différenciée. Elles peuvent être totipotentes (à l’origine de toutes les lignées), pluripotentes (la quasi-totalité des cellules) ou multipotentes (plusieurs lignées cellulaires). Ces greffes peuvent avoir pour rôle de remplacer (une moelle aplasique, une population cellulaire génétiquement malade…) ou de lutter contre une maladie (hémopathie maligne). En effet, l’agression du greffon contre l’hôte a un effet positif, à savoir l’éradication des cellules malignes encore présentes. C’est l’effet GVL (graft versus leukemia) qui est recherché. 2.Principe Il s’agit de remplacer le tissu hématopoïétique du receveur par celui du donneur. De ce fait, l’allogreffe doit être précédée et accompagnée par une immunosuppression lourde, afin d’éviter la réaction de rejet (du greffon donneur vers le receveur). Les greffes peuvent être « myéloablatives » (conditionnement prégreffe standard, chimiothérapique, et parfois avec une irradiation corporelle totale, à triple activité : antitumorale, anti-moelle normale, immunosuppresseur) ou non myéloablatives (à conditionnement atténué : l’activité du greffon permet à elle seule d’éliminer la moelle résiduelle du receveur). Il y a moins de toxicité de ce type de greffe, mais un risque accru de maladie du greffon contre l’hôte. 3.Source cellulaire des cellules souches hématopoïétiques Cela peut être : ––à partir de la moelle osseuse (prélèvement en crête iliaque sous anesthésie générale) ; ––à partir du sang périphérique : les cellules souches hématopoïétiques sont obtenues par cytaphérèse après injection de G-CSF ; ––à partir du sang placentaire. 4.Donneurs de cellules souches hématopoïétiques (CSH) Ils peuvent être : ––apparentés (HLA identique ou pas) : un frère ou une sœur identique (1 chance sur 4), les parents pour un enfant (haploidentique) ; Vol. 66 _ Septembre 2016 e305 RR Item 198 B IO T H É R A P IE S E T T HÉ R APIE S C IB L É E S ––non apparentés : donneurs vivants non apparentés du registre international ; ––du sang placentaire (à partir d’un ou plusieurs donneurs). 5.Indications Ce sont : ––des hémopathies malignes myéloïdes (leucémies aiguës, leucémies chroniques, syndromes myéloprolifératifs) ou lymphoïdes (lymphomes, leucémies lymphoïdes chroniques…) ; ––des aplasies médullaires, le plus souvent idiopathiques ; ––des pathologies génétiques : drépanocytoses, déficits immunitaires combinés sévères, autres maladies génétiques rares. 6.Complications des greffes de cellules souches hématopoïétiques allogéniques Ce sont : ––des infections :du fait de l’immunosuppression nécessaire, il existe une augmentation du risque infectieux (bactérien, viral, fongique) ; ––une réaction du greffon contre l’hôte (GVH) :les réactions du greffon contre l’hôte peuvent être aiguës (avant J100) ou chroniques (après J100). La maladie du greffon contre l’hôte aiguë peut être de grade I à IV, avec une fièvre, une atteinte cutanée (rash, érythrodermie), une hépatite cholestatique, une atteinte digestive (diarrhée). Thérapie génique La thérapie génique est une stratégie thérapeutique fondée sur le transfert de gènes avec l’objectif d’introduire la copie normale ou de modifier l’expression du ou des gènes responsables de la maladie chez le patient. Le gène exogène est ainsi un médicament dont l’objectif est de modifier la source de la protéine ou de la molécule anormale, c’est-à-dire le matériel génétique. Il existe deux modalités de thérapie génique : ––somatique, qui consiste à transférer le(s) gène(s) au patient (soit in vivo dans le tissu cible à l’aide d’un vecteur, soit ex vivo en modifiant les cellules cibles qui seront ré-administrées au patient) ; ––germinale, qui n’est pas actuellement utilisée du fait de lois bioéthiques et qui consisterait à introduire un gène à l’embryon au stade précoce et ainsi le transmettre à toutes les cellules qui seront formées au cours de l’embryogenèse. Les vecteurs sont le plus souvent viraux, ou non viraux (tels que des sphères lipidiques, les liposomes). La thérapie génique est encore au stade d’essais cliniques, mais les indications théoriques pourraient être très nombreuses. Thérapie ciblée en oncologie et hématologie Dans le traitement des pathologies néoplasiques, les différentes stratégies peuvent comprendre le traitement carcinologique chirurgical, par radiothérapie ou chimiothérapie visant à diminuer ou éradiquer la masse tumorale. Les nouvelles thérapies ciblées complètent les choix des thérapeutiques possibles, visant de e306 Vol. 66 _ Septembre 2016 façon spécifique un élément ou événement moléculaire caractérisant une cellule tumorale. Pour qu’une cible soit pertinente, elle doit être exprimée par un grand nombre de cellules tumorales, être accessible à une thérapeutique et que son ciblage ait un impact clinique. La cible peut être un marqueur exprimé spécifiquement par un type cellulaire particulier, une molécule dans la transduction du signal, en particulier celui de la cellule tumorale (tel qu’un récepteur HER2), un facteur de croissance nécessaire à l’expansion tumorale (tel que le VEGF [pour vascular endothelial growth factor]). Les anomalies moléculaires spécifiques des cellules tumorales le plus souvent ciblées sont les molécules de la famille HER, les gènes de fusion (ABL-BCR) et la néo-angiogenèse tumorale. Ces cibles sont différentiellement exprimées entre les tissus sains et le tissu tumoral. Les anticorps monoclonaux humanisés (x-mab) ciblent ses marqueurs cellulaires et les petites molécules les fonctions tyrosine kinase (X-inib). Parmi les anticorps monoclonaux, les principaux sont les anticorps anti-CD20, ciblant les lymphocytes B de façon spécifique. Ils sont indiqués, entre autres, dans le traitement des lymphomes B. En oncologie, notamment dans le traitement de certains cancers du sein, les anticorps anti-HER2 bloquent la transmission du signal de la réplication du HER2, empêchant la prolifération des cellules tumorales. Le VEGF est un facteur de croissance des cellules endothéliales nécessaire à la croissance et la vascularisation des tissus. Le blocage de cette molécule peut inhiber la croissance tumorale. Les thérapies anti-angiogéniques ciblent la population endothéliale (stroma). L’anticorps monoclonal bévacizumab (Avastin) bloque le VEGF, il est utilisé dans le cancer colorectal et le cancer du sein métastatiques. Les « petites molécules » : le sorafénib (Nexavar) ou le sunitinib (Sutent) sont indiqués dans le carcinome hépatocellulaire et le cancer du rein métastatique. Dans ce cas, on cible une molécule produite par la tumeur et non pas directement la tumeur elle-même. Immunothérapies en oncologie et en médecine interne (tableaux 1 et 2) L’immunothérapie consiste à moduler (inhiber, activer) le système immunitaire, afin d’induire le contrôle d’une tumeur, d’une maladie auto-immune ou d’une greffe d’organe. Celle-ci peut être spécifique (par exemple d’un antigène tumoral particulier, d’un auto-antigène) ou non spécifique, modulant de façon générale non spécifique d’un antigène la réponse immunitaire. Bien qu’étant non spécifique d’un antigène tumoral ou d’un auto-antigène, cette immunothérapie non spécifique est une thérapeutique ciblée, inhibant par exemple une cytokine particulière (les anticorps anti-TNFα) ou un type de cellules en particulier (les lymphocytes B par les anticorps anti-CD20). Les différents types d’immunothérapie non spécifique sont dirigés contre les : ––cytokines immunomodulatrices (activatrices ou inhibitrices) ; ––molécules d’interaction cellulaires (anti-CTLA4, anti-PD1…) ; Biothérapies et thérapies ciblées POINTS FORTS À RETENIR L’allogreffe consiste à remplacer le tissu hématopoïétique du receveur par celui du donneur et de ce fait doit être précédée par une immunosuppression lourde, afin d’éviter la réaction de rejet. La thérapie génique est une stratégie thérapeutique fondée sur le transfert de gènes avec l’objectif d’introduire la copie normale ou de modifier l’expression du ou des gènes responsables de la maladie chez le patient. L’immunothérapie consiste à moduler (inhiber, activer) le système immunitaire, afin d’induire le contrôle d’une tumeur, d’une maladie auto-immune ou d’une greffe d’organe. Celle-ci peut être spécifique (antigène tumoral particulier, auto-antigène) ou non spécifique, modulant de façon générale non spécifique d’un antigène la réponse immunitaire. cytokine pro-inflammatoire est le tocilizumab, anticorps anti- IL6 récepteur, empêchant la fixation d’IL-6 soluble sur son récepteur et ainsi l’action de celui-ci sur la cellule cible. Molécules d’interaction cellulaire (anti-CTLA4, anti-PD1) De façon similaire, il existe des anticorps monoclonaux ciblant les molécules impliquées dans l’activation cellulaire ou les interactions entre les cellules et la synapse immunologique. Ainsi, l’abatacept et le bélatacept sont des protéines de fusion entre CTLA4 (CD152), un antigène lymphocytaire T apparenté à CD28 doué de propriétés immunorégulatrices, et le Fc d’une IgG1. Elles se lient aux molécules de costimulation CD80 et CD86 des cellules présentatrices d’antigène avec une plus forte affinité que CD28 et, de ce fait, elles bloquent le second signal et empêchent l’activation des lymphocytes T. Leur activité immunosuppressive est mise à profit dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde (abatacept) et en transplantation (bélatacept). Anticorps monoclonaux ciblant une cellule, un récepteur cellulaire ou une voie de signalisation ––molécules d’angiogenèse (anti-VEGF…) [v. chapitre précédent] ; ––cellules du système immunitaire. Les différents types d’immunothérapie spécifique sont : ––passive (administration d’effecteurs antitumoraux) : . anticorps monoclonaux ciblant une cellule, un récepteur cellulaire ou une voie de signalisation ; . transfert adoptif de lymphocytes T spécifiques CTL (spécifiques d’un antigène de tumeur ; lignées CTL modifiées pour exprimer un TCR spécifique d’un antigène tumoral) ; ––active (administration d’un antigène spécifique pour initier la réponse spécifique adaptative) : vaccination avec un antigène pour induire des lymphocytes T cytotoxiques de tumeurs spécifiques in vivo. Cytokines immunomodulatrices (activatrices ou inhibitrices) Les cytokines sont un ensemble hétérogène de molécules synthétisées par des cellules activées et qui se lient à un récepteur membranaire spécifique. Une même cytokine peut être produite par des cellules différentes et avoir des effets différents et redondants entre elles. Les cytokines sont impliquées dans l’inflammation, la réponse immunitaire et l’hématopoïèse. En ce qui concerne leur effet sur l’inflammation, on distingue des cytokines pro-inflammatoires (telles que TNF-α, IL-1, IL-6, etc.) et antiinflammatoires (tels que IL-10). Ainsi, parmi les anticorps anticytokines, ceux les plus utilisés dans les rhumatismes inflammatoires sont les anticorps anti-TNF-α qui bloquent l’action du TNF-α soluble et/ou membranaire en se liant au TNF-α avec une haute affinité et spécificité, et empêchent ainsi l’action de la cytokine sur les cellules cibles. Un autre anticorps monoclonal anti- Le rituximab est un anticorps monoclonal dirigé contre la molécule CD20 présente de façon spécifique à la surface des cellules B du stade pré-B au stade de lymphocyte B mature. Il s’agit d’un anticorps chimérique composé de domaines constants humains et de domaines variables murins. Le rituximab induit une déplétion lymphocytaire B par différents mécanismes, induisant une apoptose de lymphocytes B. Des anticorps contre l’ EGFR (epidermal growth factor receptor) [cétuximab et panitumumab] bloquent la croissance tumorale et sont indiqués dans le traitement des adénocarcinomes coliques et, pour le cétuximab, des carcinomes épidermoïdes de la sphère ORL. Un anticorps monoclonal dirigé contre le récepteur HER2, le trastuzumab, est indiqué dans le traitement des tumeurs du sein et de l’estomac surexprimant cet oncogène. Principes d’évaluation des biothérapies Les principales biothérapies ciblées utilisées actuellement en rhumatologie et médecine interne sont les antagonistes du TNFα (infliximab, étanercept, adalimumab, certolizumab, golimumab), les anti-IL1 (anakinra, canakinumab), les antagonistes IL-6R (tocilizumab), l’agoniste de CTLA-4 (abatacept), l’anti-BLYS (bélimumab) et l’anticorps anti-CD20 (rituximab). La prescription de la biothérapie sera dépendante de l’indication clinique, du choix de la galénique (sous-cutanée ou intraveineuse), du rythme de la perfusion d’entretien (mensuel pour le tocilizumab, tous les 6-8 semaines pour l’infliximab, une cure de J1-15 à renouveler selon la réponse pour le rituximab), d’autres facteurs tels que les habitudes de prescription, l’âge ou les comorbidités. Certains de ces traitements peuvent être utilisés en première ligne ou après échec d’autres traitements, en particulier les immunosuppresseurs conventionnels. Vol. 66 _ Septembre 2016 e307 TABLEAU 1 RR Item 198 B IO T H É R A P IE S E T T HÉ R APIE S C IB L É E S Différentes biothérapies utilisés pour le traitement des maladies auto-immunes Nom Caractéristique Voie d’administration et posologie Précaution d’utilisation Principaux effets secondaires Infliximab (Remicade) Étanercept (Enbrel) Adalimumab (Humira) ❚❚Antagonistes de TNFα ❚❚3-5 mg/kg 6-8 semaines (IV) ❚❚25-50 mg/semaine (SC) ❚❚40 mg/15 jours (SC) ❚❚Vaccinations, prévention BK ❚❚Réactions d’hypersensibilité ❚❚Infections ❚❚Réactivation BK ❚❚Cancers cutanés Tocilizumab (Roactemra) ❚❚Anti-IL-6 Récepteur ❚❚4-8 mg/kg/mois (IV) ❚❚Vaccinations, prévention BK, suivi dermatologique ❚❚Réactions d’hypersensibilité ❚❚Infections ❚❚Réactivation BK ❚❚Cancers cutanés anakinra (Kineret) ❚❚Anti-IL-1 ❚❚100 mg/jour (SC) ❚❚Vaccinations, prévention BK, suivi dermatologique ❚❚Réactions d’hypersensibilité ❚❚Infections ❚❚Réactivation BK rituximab (Mabthera) ❚❚Antagoniste de CD20 ❚❚1 g J1-J15 (IV) ❚❚375 mg/m2/semaine, 4 semaines (IV) ❚❚Vaccinations, prévention BK ❚❚Réactions d’hypersensibilité ❚❚Infections ❚❚Hypogammaglobulinémie TABLEAU 2 BK : bacille de Koch ; CD20 : cluster de différenciation 20 ; IL : interleukine ; IV : intraveineux ; SC : sous-cutané ; TNFα : tumor necrosis factor alpha. Différentes formes de thérapies ciblées utilisées en oncologie et hématologie (non exhaustif) Nom Caractéristique Biomarqueur Indication Imatinib, dasatinib ❚❚Inhibiteurs de tyrosine kinase ❚❚Translocation BCR-ABL ❚❚LMC, LAL Gefitinib ❚❚Inhibiteur de tyrosine kinase du récepteur de facteur de croissance épidermique ❚❚Mutation EGFR ❚❚Cancer poumon Sorafénib ❚❚Inhibiteur de tyrosine kinase du récepteur de VEGF - ❚❚Cancer hépatocellulaire, cancer du rein métastatique Cétuximab ❚❚Anticorps monoclonal ciblant le récepteur de facteur de croissance épidermique (EGFR) ❚❚Mutation KRAS (présence de mutation KRAS confère une résistance à cette molécule) ❚❚Cancer colorectal métastatique Trastuzumab ❚❚Anticorps monoclonal ciblant récepteur HER2 ❚❚Amplification HER2 ❚❚Cancer du sein, cancer gastrique Bévacizumab ❚❚Anticorps monoclonal ciblant le facteur de croissance VEGF- - ❚❚Cancer colorectal métastatique BCR-ABL: break-point cluster region-Abelson ; EGFR : epidermal growth factor receptor ; KRAS : kirsten rat sarcoma ; LAL : leucémie aiguë lymphoïde; LMC : leucémie myéloïde chronique; VEGF : vascular endothelial growth factor. e308 Vol. 66 _ Septembre 2016 Leur prescription nécessite : ––une évaluation de l’efficacité du traitement, sur les paramètres de la maladie mais également sur la qualité de vie et dans certaines situations, telle que la polyarthrite rhumatoïde, la diminution du risque de morbi-mortalité cardiovasculaire ; ––une surveillance des effets indésirables ; ––des conseils de prévention de risque infectieux dans les situations de chirurgie, de voyages et de grossesse. L’évaluation de l’efficacité comportera, selon le cadre de la maladie, des examens cliniques (amélioration ou disparition des atteintes cliniques et évaluation subjective du patient), biologique (tels que le syndrome inflammatoire biologique) et/ou immuno logique (tels que la normalisation des anti-ADN ou de complément), pouvant être combinés dans un score tel que DAS28 pour la surveillance de la polyarthrite rhumatoïde. Les principaux effets secondaires des biothérapies ciblées sont les allergies, les infections (virales, bactériennes et parasitaires), le risque de réactivation de tuberculose et le risque de cancers cutanés. De façon très rare, il existe un risque de pathologie auto-immune, telle qu’une maladie démyélinisante du système nerveux central ou un lupus. Message de l'auteur Connaître les principes de la greffe de moelle ou de cellules souches et de la thérapie génique. l Connaître les principes des thérapies ciblées et les principales cibles moléculaires. l Connaître les principes d’immunothérapie, les différents types et les principes d’évaluation des biothérapies. l Conclusion L’essor des immunothérapies et des thérapies ciblées devrait permettre de gagner en efficacité thérapeutique, tout en diminuant les effets secondaires. La stratégie, pour être efficace, doit cibler une molécule particulièrement impliquée dans la physiopathologie de la maladie. • A. Mekinian déclare avoir été pris en charge lors de congrès par LFB, Genzyme et Chugai. O. Fain déclare être conseiller scientifique auprès des laboratoires Shire, Behring, GSK et Pfizer. Vol. 66 _ Septembre 2016 e309 RR Item 34 ANOMALIES DU CYCLE MENSTRUEL. MÉTRORRAGIES Dr Sandra Curinier, Pr Michel Canis Pôle gynécologie obstétrique et reproduction humaine, CHU Estaing, 63003 Clermont Ferrand Cedex 1, France [email protected] objectifs Hypothalamus DIAGNOSTIQUER une aménorrhée, une ménorragie, une métrorragie. RECONNAÎTRE et TRAITER un syndrome prémenstruel. Rétrocontrôle négatif : œstrogène, inhibine GnRH Hypophyse FSH/LH Ovaires Utérus 1. Folliculogenèse, follicule dominant (De Graaf) : production d'œstrogènes 2. Corps jaune : production de progestérone 1. Prolifération endométriale 2. Différenciation et maturation endométriale Physiopathologie L’axe hypothalamo-hypohysaire L’anté-hypophyse sécrète de manière cyclique les hormones gonadotropes : l’hormone folliculo-stimulante (FSH, pour follicle stimulating hormone) et l’hormone lutéinisante (LH, pour luteinizing hormone) sous l’influence de l’hormone de libération des gonado trophines hypophysaires (GnRH pour gonadotropin releasing hormone) produite par l’hypothalamus. Il existe également des rétrocontrôles entre ces deux niveaux (fig. 1). Chez la femme, la FSH a pour rôle : ––de stimuler les cellules de la granulosa qui sécrètent de l’œstradiol et de l’inhibine B et expriment des récepteurs pour la LH ; sous l’influence de la FSH elles produisent également l’aromatase capable de convertir les androgènes en œstrogènes ; ––d’entraîner la croissance des follicules ; ––de permettre l’ovulation en fragilisant la paroi de l’ovaire. La LH a pour rôle de déclencher l’ovulation puis de provoquer la transformation du follicule rompu en corps jaune pendant la phase lutéale du cycle menstruel. FIGURE 1 Axe hypotalamo-hypophysaire et influences sur l’utérus et les ovaires. progestérone LH œstrogènes FSH Le cycle menstruel Il est indispensable de connaître les étapes du cycle menstruel pour procéder ensuite aux démarches diagnostiques et thérapeutiques des anomalies du cycle (fig. 2). Phase folliculaire J1 FIGURE 2 Phase lutéale J14 J28 Le cycle menstruel. Vol. 66 _ Septembre 2016 e311 RR Item 34 A N O MA L IE S DU C YC L E ME NST R U E L . MÉ T R OR R AGIE S 1.Phases Le cycle menstruel comprend 3 phases. De J1 à J14, phase folliculaire : la FSH stimule la croissance folliculaire. En quelques jours, les follicules vont produire les œstrogènes qui exerceront un rétrocontrôle négatif sur l’hypophyse pour réguler les taux de FSH et éviter l’hyper stimulation. Avant l’ovulation, le follicule dominant produit beaucoup d’œstrogènes, faisant ainsi chuter le taux de FSH. À J14, ovulation : comme on peut l’observer sur les courbes, c’est le rétrocontrôle positif des œstrogènes (lorsque leur taux dépasse les 200 pg/mL) qui provoque le « pic de LH ». Ce dernier induit l’ovulation dans les 24 à 36 heures qui suivent. Hyperplasie congénitale des surrénales TUMEUR VIRILISANTE DE L'OVAIRE : – Tumeur de Leydig – Arrhénoblastome Syndrome des ovaires polykystiques 17-OH P augmentée ± test au synactène Testostéronémie augmentée LH > FSH De J14 à J28, phase lutéale : après l’ovulation, le follicule devient corps jaune et entraîne la production de progestérone qui rend la glaire cervicale hostile. La progestérone effectue un rétrocontrôle négatif sur le complexe hypothalamo-hypophysaire. S’il n’y a pas eu fécondation, le corps jaune disparaît à J26, et la chute brutale des hormones (œstrogène et progestérone) provoque les menstruations. S’il y a eu fécondation, l’embryon produit l’hormone chorionique gonadotrope (hCG, pour human chorionic gonadotropin) et le corps jaune persiste. 2.Explorations En pratique, les bilans complémentaires à demander pour définir l’étiologie d’une anomalie de cycle testent les différents niveaux de cet axe hypothalamo-hypophyso-ovarien. Absent RETARD PUBERTAIRE Virilisés Aménorrhée primaire Caractères sexuels secondaires Absents Retard de croissance FSH et LH sont basses Surveillance simple Sésamoïde du pouce Présent IMPUBÉRISME Normaux Courbe de température Normale Douleur Oui Douleur Non Malformation Imperforation hyménéale Aplasie du col Diaphragme vaginal Aplasie vaginale Malformation Syndrome de Rokitansky Tuberculose prépubertaire FIGURE 3 e312 Monophasique FSH et LH basses Entraînement intense Anorexie mentale Hypothyroïdie fruste de Kallman-De Morsier (olfaction-) Syndrome de Morris 46XY Conduite à tenir devant une aménorrhée primaire. Vol. 66 _ Septembre 2016 FSH et LH augmentées Turner 45X0 Mosaiques Autres dysgénésies gonadiques Chimiothérapie Radiothérapie Auto-immunité Tumeur hypothalamohypophysaire Craniopharyngiome Gliome nerf optique Pan hypopituitarisme Toxoplasmose congénitale Pour l’axe hypothalamo-hypophysaire : ––un dosage de la FSH/LH à J3 du cycle ; ––un dosage de la prolactinémie car un adénome peut induire une diminution de la sécrétion de GnRH (syndrome de masse) ; ––le « test au Clomid » : qui par son effet anti-œstrogénique induit normalement une augmentation de la FSH et de la LH (dès le 3e ou 4e jour) par rétrocontrôle. Il teste également la réserve ovarienne car une élévation exagérée de la FSH signe une raréfaction des follicules primordiaux ; ––un dosage des FSH/LH après une injection de GnRH ; ––une IRM de la selle turcique. Pour les ovaires : ––dosage de l’œstradiol à J3 du cycle, progestérone à J21 ; ––dosage de l’hormone antimüllérienne (AMH, pour anti-müllerian hormone) pour évaluer la réserve ovarienne (à noter que le taux d’AMH ne varie pas en fonction du cycle mais est influencé par la méthode utilisée par le laboratoire et par les méthodes de conservation du prélèvement [dosage non remboursé]) ; ––dosage de la tyréostimuline (TSH, pour thyroid-stimulating hormone) car en cas d’hypothyroïdie on a une augmentation de l’hormone thyréotrope (TRH, pour thyrotropin-releasing hormone), ce qui induit une augmentation de la prolactinémie et donc une diminution de la GnRH) ; ––une échographie pelvienne avec compte folliculaire et évaluation de l’endomètre ; ––pour tester la fonction androgène : D4 androstènedione, dihydrotestostérone et globuline (SHBG, pour sex hormone-binding globulin) ; ––un caryotype pour les aménorrhées primaires (syndrome de Turner, monosomie du chromosome X) ; ––une courbe de température : c’est un moyen simple de renseigner la présence ou non d’une ovulation (décrochage sur la courbe en milieu de cycle). Radiographie du poignet et de la main gauche : elle permet de déterminer l’âge osseux, qui est un repère quantifiable de la maturation du squelette par les stéroïdes sexuels. L’apparition de l’os sésamoïde sur la radiographie du pouce se fait à 11 ans et demi d’âge osseux chez la fille et 13 ans et demi chez le garçon. En cas d’aménorrhée avec absence des autres caractères sexuels secondaires, la présence ou non de l’os sésamoïde permet de différencier l’« impubérisme » du « retard pubertaire » (fig. 3). Aménorrhée Diagnostic L’aménorrhée est définie par l’absence de règles. On parle d’aménorrhée primaire en cas d’absence de cycle menstruel chez la fille après l’âge de 16 ans et d’aménorrhée secondaire en cas d’interruption des règles pendant plus de 3 mois chez une femme préalablement réglée. Les causes sont liées à une atteinte de l’axe hypothalamo-hypophyso-ovarien ou à une anomalie anatomique de l’utérus et/ou du vagin. Anomalies du cycle menstruel. Métrorragies POINTS FORTS À RETENIR Il est indispensable de connaître les étapes du cycle menstruel pour procéder ensuite aux démarches diagnostiques et thérapeutiques des anomalies du cycle. Les dosages hormonaux sont toujours à réaliser à J3 du cycle. La première cause d’aménorrhée secondaire est la grossesse, toute patiente en période d’activité génitale et en aménorrhée doit bénéficier d’un dosage de bhCG. Le syndrome des ovaires polykystiques doit être connu car il touche 6-8 % des femmes en âge de procréer et constitue la première cause d’infertilité. Toute patiente en âge de procréer présentant des métrorragies doit également bénéficier d’un dosage de bhCG. L’apparition de métrorragies post-ménopausiques doit faire rechercher un cancer de l’endomètre mais également du col de l’utérus et de l’ovaire. Le syndrome prémenstruel est un ensemble de manifestations bénignes dont le traitement de première intention est symptomatologique. Causes 1.Aménorrhée primaire En cas d’aménorrhée primaire, l’examen clinique recherche les autres caractères sexuels secondaires pour différencier les aménorrhées primaires avec ou sans retard pubertaire. Chez la jeune fille, les caractères sexuels secondaires correspondent à la ménarche, la thélarche (développement de la glande mammaire), au développement de la pilosité pubienne (pubarche) et axillaire et au pic de croissance (différences également sur le squelette, la répartition des masses musculaire et graisseuse). L’examen recherche également des signes cliniques de virilisation, et en fonction de ces éléments on s’oriente vers les différentes causes (fig. 3). Aménorrhée primaire avec retard pubertaire : dans cette situation, la ménarche n’a pas eu lieu et les autres caractères sexuels secondaires sont également absents après l’âge de 16 ans. Si la cause est haut située sur l’axe hypothalamo-hypophysaire (FSH, LH, estradiol et progestérone bas), on parle d’un hypogonadisme hypogonadotrope, et les causes peuvent être : ––une tumeur hypothalamo-hypophysaire ; ––un retard pubertaire simple (diagnostic d’élimination) ; ––une anomalie congénitale (syndrome de Kallmann-De Morsier) ; ––un entraînement intense, une anorexie mentale. Vol. 66 _ Septembre 2016 e313 RR Item 34 A N O MA L IE S DU C YC L E ME NST R U E L . MÉ T R OR R AGIE S Aménorrhée primaire Examen clinique ± b-hCG Grossesse Courbes de température, FSH, LH, E2, prolactine, testostérone Courbes de température biphasiques FSH, LH, E2, PRL, T Normaux Prolactine ➚ Courbes de température plate FSH, LH, b E2 c Cause utérine Cause ovarienne Hystérosalpingographie Dysgénésie gonadique Hyper‑prolactinémie Échographie ovarienne Non IRM hypothalamohypophysaire FIGURE 4 Ménopause précoce Primitive Secondaire Chirurgie Chimioirradiation Adénome à prolactine ou tumeur hypothalamohypophysaire ou IRM normale IRM hypothalamo-hypophysaire Testostérone > 1,5 ng/mL b Scanner des surrénales Échographie ovarienne Deux gros ovaires Pathologique Tumeur ou infiltration de la région hypothalamohypophysaire Normale Ovaires polykystiques Enquête nutrition Aménorrhée psychogène Tumeur des surrénales ou ovarienne androgéno‑ sécrétante Conduite à tenir devant une aménorrhée primaire. Si la cause est bas située, les bilans biologiques retrouveront un hypogonadisme hypergonadotrope (FSH et LH élevées), et la cause peut être une dysgénésie gonadique comme on en retrouve dans le syndrome de Turner. Dans ce dernier, l’examen clinique retrouve d’autres éléments caractéristiques : petite taille, grand nombre de nævi (grains de beauté), lymphœdème des mains et des pieds, dysmorphie cranio-cervicale… Aménorrhée primaire sans retard pubertaire : dans ce cas, il n’y a pas eu de ménarche, mais le reste du développement pubertaire s’est produit normalement. Si la patiente présente une courbe de température normale et se plaint de douleurs cycliques, il peut s’agir d’une malformation type imperforation hyménéale ou diaphragme vaginal (avec hématocolpos) ou une aplasie vaginale. En l’absence de douleur, on recherchera une aplasie congénitale de l’utérus (syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser, fréquence 1/4 500). Si la courbe de température est monophasique, il peut s’agir d’un syndrome d’insensibilité aux androgènes (organes génitaux externes féminins normaux, organes génitaux internes féminins absents et caryotype 46XY). e314 Courbe de température plate FSH normale ; LH > FSH T normale ou < 1,5 ng/mL Insuffisance gonadotrope Enquête médicamenteuse Oui Sténose du col Synéchie • traumatique • tuberculose Courbe de température plate FSH, LH, E2 c Vol. 66 _ Septembre 2016 Aménorrhée avec signes de virilisation. Il existe trois causes principales : ––les tumeurs virilisantes de l’ovaire : la testostéronémie est augmentée ; ––l’hyperplasie congénitale des surrénales : la 17-OH progestérone est augmentée spontanément ou après simple stimulation par l’adrénocorticotrophine (ACTH, pour adrenocorticotrophic hormone) [test au Synacthène] ; ––enfin l’aménorrhée primaire est rarement le mode de découverte d’un syndrome des ovaires polykystiques (plus souvent, spanioménorrhée ou aménorrhée secondaire). 2.Aménorrhée secondaire Les deux causes à évoquer en première intention sont la grossesse et la ménopause. La ménopause est définie par l’absence de règles depuis plus de 2 ans souvent associée à des bouffées de chaleur. Pour les patientes en âge de procréer, on recherche les signes sympathiques de grossesse (nausées, vomissements, tension mammaire) et on demande un dosage de b-hCG. À noter qu’en post-partum la lactation retarde le retour de couches. TABLEAU 1 On retrouve ensuite deux types d’étiologies : centrale ou périphérique. Là encore, après l’examen clinique, c’est un bilan hormonal qui guide la recherche étiologique (fig. 4). Causes d’aménorrhée secondaire centrales : les causes hypothalamiques sont à rechercher à l’examen clinique : anorexie ou dénutrition, stress, pratique intensive du sport. Parmi les causes liées à l’hypophyse, on retrouve principalement l’adénome à prolactine qui par le syndrome de masse qu’il entraîne diminue la production de GnRH. La prolactinémie est augmentée, et une IRM de la selle turcique doit être demandée. Le syndrome de Sheehan, devenu exceptionnel, est également une cause d’aménorrhée secondaire par insuffisance antéhypophysaire consécutive à une anoxie lors d’une hémorragie de la délivrance. Causes d’aménorrhée secondaire périphériques : à l’interrogatoire, il faut rechercher la prise de contraception mais aussi l’antécédent de geste endo-utérin (curetage pour avortement spontané incomplet ou interruption volontaire de grossesse, révision utérine, embolisation…) ou d’hystérotomie (césariennes, myomectomies) qui peuvent être à l’origine de synéchies utérines. L’échographie pelvienne est l’examen de première intention à réaliser. Cette dernière peut également mettre en évidence des ovaires polykystiques. Le syndrome des ovaires polykystiques (fig. 5) touche 6 à 8 % des femmes en âge de procréer et constitue une cause d’infertilité. Ces patientes ont un taux de LH plus important qui stimule la sécrétion d’androgènes par les ovaires et entraîne une maturation folliculaire aberrante. Cliniquement, elles présentent des cycles anovulatoires (durée de plus de 35 jours ou moins de 8 menstruations par an), une spanioménorrhée et dans 50 % des cas une aménorrhée, dans La présence de deux critères sur trois est nécessaire • Oligoménorrhée ou aménorrhée (< 8 cycles/an) • Hyperandrogénisme clinique (hirsutisme, acné, alopécie) ou biochimique (b testostérone, rapport LH/FSH > 2*) • Au moins un ovaire polykystique à l'échographie (12 follicules ou plus de 2 mm à 9 mm de diamètre par ovaire ou augmentation du volume ovarien de > 10 mL [0,5 × longueur × largeur × épaisseur]) + Exclusion des autres causes d'hyperandrogénisme et anovulation (voir tableau 1) FIGURE 5 Critères diagnostiques du syndrome des ovaires polykystiques. * : un rapport LH/FSH augmenté est un élément de plus pouvant faciliter le diagnostic. D'après Lujan ME, Chizen DR, Pierson RA. Diagnosis criteria for polycystic ovary symdrome: pitfalls and controversies. J Obstet Gynaecol Can 2008;30:671-9. 69 % des cas des signes d’hyperandrogénisme (tableau 1) et dans 50 % des cas un indice de masse corporelle supérieur à 30 kg/m2. En cas d’insuffisance ovarienne précoce, la patiente peut présenter des signes de ménopause et avoir des antécédents familiaux. L’échographie retrouve peu ou pas de follicule, et la FSH est très augmentée. Diagnostic différentiel d'aménorrhée et d'hyperandrogénisme Affection Éléments à rechercher Hormones à doser Hyperprolactinémie z galactorrhée, troubles visuels z prolactine sérique (en avant-midi) Hyper- et hypothyroïdie z changement de poids, chaleurs, frilosité, diarrhée, constipation z TSH Grossesse z mastalgie, nausées, fatigue z b-hCG Troubles hypothalamiques z exercice excessif, trouble alimentaire, perte de poids z LH et FSH c Insuffisance ovarienne précoce z symptômes de ménopause, antécédents familiaux z FSH bb Hyperplasie des surrénales z apparition rapide d'acné et d'hirsutisme, raucité de la voie, clitomégalie z progestérone-17-OH b, DHEAS b Tumeurs ovariennes z mêmes éléments que pour l'hyperplasie des surrénales z testostérone bb Syndrome de Cushing z obésité du visage, du cou et du tronc, vergetures z cortisol sérique D'après Welt C, Barbieri RL. Etiology, diagnosis, and treatment of secondary amenorrhea. UpToDate, version 17.3. Site Internet : www.uptodate.com. Vol. 66 _ Septembre 2016 e315 RR Item 34 A N O MA L IE S DU C YC L E ME NST R U E L . MÉ T R OR R AGIE S Ménorragie et métrorragie Les règles normales ont une durée de 3 à 6 jours avec une perte sanguine menstruelle considérée comme normale jusqu’à 80 mL. La définition des ménorragies concerne donc des règles de plus de 7 jours et/ou une perte sanguine supérieure à 80 mL. Les métrorragies sont définies par des pertes sanguines d’origine utérine en dehors des règles. La prévalence des ménométrorragies est estimée de 11 à 13 % dans la population générale et augmente avec l’âge pour atteindre 24 % chez les 36-40 ans. L’interrogatoire recherche également les facteurs de risque et les signes sympathiques de grossesse. On note enfin les facteurs de risque personnels ou familiaux de trouble de l’hémostase (antécédent de maladie de Willebrand), hypothyroïdie, tabagisme, pathologie utérine connue, cancer, prise de contraception et observance, prise de médicaments inducteurs enzymatiques. 2.Examen physique On réalise un examen clinique complet avec en particulier une recherche des signes d’anémie, un examen soigneux du vagin et du col avec réalisation d’un frottis cervico-vaginal. Les pathologies cervico-vaginales représentent le diagnostic différentiel et ne sont pas traitées dans ce chapitre. Causes Examens complémentaires Définitions Elles sont rappelées dans le tableau 2. Examen clinique TABLEAU 2 1.Interrogatoire Il vise à quantifier les pertes en utilisant par exemple le score de Higham (tableau 3). Causes des ménométrorragies Causes organiques Iatrogènes z anticoagulant Causes fonctionnelles Idiopathiques z progestatif (atrophie endométriale) z stérilet au cuivre Systémiques z trouble de l’hémostase z causes endocriniennes : hypothyroïdie, diabète, obésité « D’ovulation » ou « fonctionnelles cycliques » z insuffisances cardiaques et respiratoires chroniques Locales z cancer de l’endomètre : à évoquer en 1re intention pour tout épisode de métrorragies post-ménopausiques Conduite à tenir Anovulatoires z syndrome des ovaires polykystiques z métrorragies périménopausiques par hyperœstrogénie relative z polype endométrial, fibrome interstitiel ou sous-muqueux, hypertrophie endométriale z adénomyose z atrophie endométriale z hydrorrhée z infection génitale haute z malformation artério-veineuse (antécédent de curetage) e316 Le bilan est guidé par les éléments retrouvés à l’examen clinique. En première intention on demande : –– b-hCG si la patiente est en âge de procréer ; ––hémogramme, ferritinémie ; ––échographie pelvienne ± hystérosonographie ; ––± recherche de troubles de l’hémostase, d’une maladie de Willebrand, en cas d’antécédent personnel ou familial, avec indications larges chez les adolescentes ; ––± une biopsie de l’endomètre à la pipelle de Cornier si la patiente est âgée de plus de 45 ans. En dehors d’une grossesse, en l’absence d’anémie et si l’examen clinique et l'échographie sont normaux, on ne poursuit pas les investigations. Dans le cas contraire, on peut prévoir : ––une hystéroscopie ; ––un bilan hormonal : . en cas de cycles irréguliers ou de syndrome des ovaires polykystiques : FSH/LH, testostérone, androgène, SHBG, 17 OH pro‑ gestérone, prolactinémie à J3 du cycle ; .en présence de facteurs de risque d’hypothyroïdie : TSH ± prolactinémie ; ––une IRM qui peut faire le bilan d’un utérus polymyomateux ou adénomyosique. Vol. 66 _ Septembre 2016 1.Chez les patientes ayant un désir de grossesse En cas de ménométrorragies fonctionnelles : la conduite à tenir est rappelée ci-dessous (fig. 6). En cas de ménométrorragies organiques : la conduite à tenir dépend de la cause (tableau 4). En ce qui concerne le traitement des ménométrorragies d’origine iatrogène, il faut retirer le dispositif intra-utérin au cuivre si les saignements sont mal tolérés et rechercher une infection à bas bruit. En cas d’atrophie endométriale liée aux progestatifs, on peut les remplacer par une pilule œstroprogestative, en l’absence de contre-indication. Pour les patientes sous traitement anticoagulant, il convient d’en vérifier la posologie avec le médecin référent, puis on peut proposer un dispositif intra-utérin au lévonorgestrel car les pilules œstroprogestatives et l’acide tranexanique sont TABLEAU 3 Score de Higham – Score d'évaluation objective des ménométrorragie Nom : Prénom : DN : Date : Jour de règles Serviette ou tampon 1 er 2 e 3 e 4 e 5e 6e 7e 8e Points 1 point / linge 5 points / linge 20 points / linge Caillots Débordement Total des points z Durant les règles, il faut noter, chaque jour, le nombre de linges (serviettes ou tampons) dans la case correspondant au degré d'imprégnation en sang. z En additionnant les points à la fin des règles, on obtient la valeur du score de Higham. z Un score supérieur à 100 points correspond à un saignement supérieur à 80 mL du sang (définition de la ménorragie). Extrait et adapté de Michel Ploin. Ménométrorragies : un symptôme souvent difficile à appréhender par le gynécologue. Génésis, numéro spécial, février 2003. contre-indiqués. En cas de découverte d’une coagulopathie, la prise en charge est multidisciplinaire et dépend de la cause. On discute ensuite des options thérapeutiques qui peuvent être la prise d’une pilule contraceptive ou la pose d’un dispositif intra-utérin au lévonorgestrel. Enfin, pour les métrorragies sous pilule œstroprogestative sans cause organique retrouvée, il est conseillé d’attendre 2 à 3 mois avant de changer de pilule. D’une manière générale, les pilules plus dosées en œstrogènes provoquent moins de saignements. Pour les ménorragies, on peut conseiller une administration de la pilule en continu. 2.Chez les patientes de plus de 40 ans et n’ayant pas de désir de grossesse dans l’avenir En cas de ménométrorragies fonctionnelles : la conduite à tenir est rappelée dans la fig. 7. Dans le cas des ménométrorragies périménopausiques par hyperœstrogénie relative, on propose en première intention un traitement par progestatifs du 5e au 25e jour si l’on cherche un effet contraceptif ou du 15e au 25e jour dans le cas contraire. En cas d’échec, on s’oriente vers une prise en charge chirurgicale (endométrectomie ou thermocoagulation de l’endomètre). En cas de ménométrorragies organiques : la conduite à tenir dépend de la cause (tableau 4). À noter que le traitement des myomes dépend de leur nombre, des éventuelles douleurs associées et également du choix éclairé de la patiente sur les différentes techniques. Pour les patientes sous anticoagulants, on peut proposer un dispositif intra-utérin au lévonorgestrel ou une endométrectomie, ou encore une destruction de l’endomètre par thermocoagulation. Désir de grossesse immédiat ? OUI NON • Dispositif intra-utérin au lévonorgestrel • Acide tranexanique • Acide tranexamique • Anti-inflammatoires non stéroïdiens • Contraceptifs oraux/progestatifs • Anti-inflammatoires non stéroïdiens SI ÉCHEC Curetage endo-utérin doux et superficiel ± dispositif intra-utérin au lévonorgestrel FIGURE 6 Ménorragies fonctionnelles chez une patiente ayant un désir de grossesse. Vol. 66 _ Septembre 2016 e317 TABLEAU 4 RR Item 34 A N O MA L IE S DU C YC L E ME NST R U E L . MÉ T R OR R AGIE S Conduite à tenir en cas de ménométrorragies organiques Chez les patientes de plus de 40 ans et n’ayant pas de désir de grossesse dans l’avenir Chez les patientes ayant un désir de grossesse Pathologie Options thérapeutiques Pathologie Options thérapeutiques Hyperplasie endométriale z curetage puis progestatifs (du 15 au 25 jour) Hyperplasie z curetage puis progestatifs ou endométrectomie Polype endométrial z résection hystéroscopique du polype ± dispositif intra-utérin au lévonorgestrel en postopératoire Polype z résection hystéroscopique du polype et endométrectomie ± dispositif intra-utérin au lévonorgestrel en postopératoire Myome sous-muqueux ou interstitiel de moins de 4 cm z dispositif intra-utérin au lévonorgestrel Résection hystéroscopique du myome ± analogues de la GnRH, une injection 6 semaines avant l’intervention ± dispositif intra-utérin au lévonorgestrel en postopératoire Myome sous-muqueux ou interstitiel de moins de 4 cm z dispositif intra-utérin au lévonorgestrel z résection hystéroscopique du myome ± analogues de la GnRH, une injection 6 semaines avant l’intervention ± dispositif intra-utérin au lévonorgestrel en postopératoire z myomectomie ou hystérectomie Myome de plus de 4 cm z Esmya (acétate d’ulipristal) z dispositif intra-utérin au lévonorgestrel z myomectomie par cœlioscopie ou laparotomie Myome de plus de 4 cm z Esmya (acétate d’ulipristal) z dispositif intra-utérin au lévonorgestrel z myomectomie ou hystérectomie z embolisation Adénomyose z dispositif intra-utérin au lévonorgestrel z analogues de la GnRH Adénomyose Malformation artério-veineuse z embolisation z dispositif intra-utérin au lévonorgestrel z analogues de la GnRH z hystérectomie e e Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ? CAS CLINIQUE QUESTION 5 Mme V., 38 ans, G3 P3, se plaint de ménorragies depuis 2 ans. Elle ne prend aucun traitement et n’a pas d’antécédent chirurgical. Elle a présenté une thrombose veineuse profonde du membre inférieur gauche il y a 5 ans alors qu’elle prenait une contraception par œstroprogestatifs et qu’elle fumait 10 cigarettes par jour. Elle ne fume plus et utilise actuellement des préservatifs. Elle n’a pas de désir de grossesse pour le moment. Mme V. se plaint également d’un syndrome prémenstruel. Quels sont les trois symptômes qui caractérisent ce syndrome ? QUESTION 1 QUESTION 3 Quelle est la définition des ménorragies ? Quel est le score utilisé en routine ? Quels traitements de première intention lui prescrivez-vous ? QUESTION 2 QUESTION 4 Le bilan morphologique de l’utérus est normal. Quels examens complémentaires de première intention prescrivez-vous ? Vos traitements médicamenteux n’ont pas été efficaces, vers quelle alternative chirurgicale orientez-vous la patiente ? QUESTION 6 Deux ans plus tard, elle vous demande une stérilisation tubaire. Quelles informations lui délivrez-vous ? QUESTION 7 Quelles sont les deux techniques chirurgicales permettant la stérilisation tubaire et quels sont les délais respectifs d’efficacité ? Retrouvez les réponses sur etudiants.larevuedupraticien.fr/item-ecni/N°item e318 Vol. 66 _ Septembre 2016 Syndrome prémenstruel DIU au lévonorgestrel ± ac tranexanique Contraceptifs oraux/progestatifs, AINS Définition Il s’agit de l’ensemble des manifestations cycliques bénignes pouvant toucher tous les appareils et apparaissant dans les jours qui précèdent les règles pour disparaître au début ou au cours de la menstruation. Il est très fréquent, puisqu’il touche environ 40 % des femmes. La physiopathologie est incertaine : une des explications serait la fluctuation hormonale de 2e partie de cycle : tandis que la sécrétion d’œstrogènes baisse, celle de la progestérone augmente, puis chute à son tour en l’absence de grossesse. La perméabilité tissulaire semble jouer un rôle, avec constitution d’un œdème tissulaire interstitiel (mammaire, cérébral et péritonéo-colique) secondaire à une hyperœstrogénie relative. Il pourrait aussi y avoir une fluctuation des neuro‑transmetteurs dans le cerveau (la sérotonine, en particulier). Signes fonctionnels L’interrogatoire doit rechercher la date de début des troubles et éventuellement le contexte psycho-émotionnel déclenchant, ce qui sera utile pour le traitement par la suite. Les manifestations sont multiples et varient selon les patientes, mais trois types de symptômes se rencontrent presque systématiquement : ––une tension mammaire d’intensité variable, de la légère tension à la mastodynie gênant les mouvements du bras. Cette gêne peut être présente sur un sein normal ou en présence d’une mastopathie fibrokystique ; ––des troubles abdomino-pelviens tels que pesanteur pelvienne, ballonnements, voire troubles du transit, avec parfois une prise de poids de 3-4 kg ; ––des signes neuropsychiques comme l’irritabilité, l’asthénie, les troubles de la concentration. La durée de l’épisode est variable (parfois débutant dès le milieu de cycle) mais l’évolution est constante : les symptômes s’amendent avec la survenue des règles. Il existe également des pathologies prémenstruelles dites cata méniales, sans syndrome prémenstruel proprement dit, de type neurologiques (comitialité, migraine), urinaires (cystalgie) ou pulmo naires (hémoptysie, asthme). Ce sont les fluctuations endocriniennes qui permettent à un terrain particulier de s’extérioriser. Il faut donc traiter la pathologie mais également limiter si possible les variations hormonales (prescription par exemple de pilules œstroprogestatives en administration continue). Examen physique SI ÉCHEC Non recommandé Techniques de destruction de l'endomètre TG 1 rollerball, TG 2 thermocoagulation FIGURE 7 Conduite à tenir en cas de ménométrorragies fonctionnelles chez une patiente de plus de 40 ans et n'ayant pas de désir de grossesse dans l'avenir. psychologique si l’on a retrouvé un facteur déclenchant dans l’histoire de la symptomatologie. En cas de syndrome prémenstruel dysphorique, on peut avoir recours aux inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine. On rappelle également des règles hygiéno-diététiques : limiter les excitants comme le thé, le café ou le tabac. Il est conseillé également de limiter les sucres rapides et les apports hydrosodés. Ensuite, il s’agit de délivrer des traitements symptomatiques : l’application locale de gel de progestérone pour les patientes atteintes de mastodynies, un traitement laxatif pour les patientes constipées et des antalgiques voire des anti-inflammatoires pour les patientes douloureuses. En cas d’échec de ces traitements, une hormonothérapie doit être discutée. On peut prescrire des progestatifs en 2e partie de cycle (ou du 5e au 25e jour si un effet contraceptif est attendu) voire la prise d’une pilule œstroprogestative afin de limiter les variations hormonales physiologiques. À noter que le mécanisme des céphalées cataméniales semble plus dépendre de la chute rapide de l’œstradiol, on utilise donc préférentiellement une œstrogénothérapie (éventuellement percutanée en périmenstruel). Enfin, dans les rares formes sévères ou résistantes de syndromes prémenstruels, on peut avoir recours au blocage du cycle par l’administration d’un agoniste de la GnRH. En cas d’utilisation prolongée, il faut systématiquement prescrire un traitement œstro progestatif substitutif. • S. Curinier et M. Canis ne déclarent aucun lien d’intérêts. + POUR EN SAVOIR ● 10:04 14 ossier 11/04/ Page P. 545 P. 551 Ménomé trorragie s utérins Fibrome Endomé triose Adénom yose P. 532 P. 540 Monographie 531 RDP4_D !531!_ s Il doit être complet (examen des seins bilatéral et comparatif, recherche d’adénopathie, frottis cervico-vaginal) et il est strictement normal. Aucun examen complémentaire ne doit être demandé. R DOSSIE Cancers du col et du corps de l’utérus Rev Prat 2014;64:771-820 BSIP Dossier nignes gies bé Patholo iques log gynéco iques du Traitement Pr Xavier Deffieux* Béclère, 92140 Clamart, France Antoine scientif on, Hôpital est élevée conseils de la reproducti t prévalence e et médecine car leur ne en rappor vie important r pelvien de un enjeu ou de douleu altérer la qualité représentent de saignement ent ité lourdem logiques e ie, nécess peuvent es gynéco tée à un problèm et asthén fait chez et elles anémie souvent gies bénign étriose) confron stic est protections, Les patholo sur quatre sera une endom port de Leur diagno traitement le plus femme yose ou le la successifs, indésirables, etc. (une femme e, une adénom et comme t), le médecin et de travail fibrom des effets à une infertilité) s : arrêts avec un vemen es aspect naux ayant ou définiti en proie par de multipl traitements hormo enfants (voire rairement des e des sse (tempo de prendr souhaitant encore avec une grosse VOL. 64 re. s DU PRATICIEN 2014 à résoud atible Avril LA REVUE des femme difficile t incomp e parfois est souven efficace à un dilemm ent face se retrouv Dossier élaboré avec les ie obstétriqu de gynécolog * Service c.aphp.fr fieux@ab xavier.def 531 En premier lieu, il faut rassurer la patiente sur la bénignité des symptômes. Il est parfois utile de proposer une prise en charge Hystérectomie Pathologie utérine bénigne Rev Prat 2014;64:531-52 Vol. 66 _ Septembre 2016 e319 RR Item 93 RADICULALGIE ET SYNDROME CANALAIRE Dr Emmanuelle Dernis, Dr Frédéric Medina Service de rhumatologie, centre hospitalier du Mans, 72037 Le Mans Cedex, France [email protected] objectifs SAVOIR DIAGNOSTIQUER une radiculalgie et un syndrome canalaire. IDENTIFIER les situations d’urgence et PLANIFIER leur prise en charge. ARGUMENTER l’attitude thérapeutique et PLANIFIER le suivi du patient. Radiculalgies On distingue les radiculalgies communes d’origine discale ou arthrosique et les radiculalgies symptomatiques secondaires à des affections infectieuses, inflammatoires ou tumorales. Lombo-radiculalgies communes 1.Lombosciatique La lombosciatique correspond à une lombo-radiculalgie affectant les racines L5 ou S1. Elle affecte préférentiellement l’homme entre 30 et 40 ans. Interrogatoire : la lombosciatique se manifeste par une lombalgie irradiant au membre inférieur au-dessous du genou. L’irradiation dépend de la racine touchée : –L5 : fesse, face postéro-externe de la cuisse, postéro-externe ou externe de la jambe, malléole externe ou gouttière prémalléolaire, dos du pied, gros orteil ; –S1 : fesse, face postérieure de la cuisse, creux poplité, face postérieure de la jambe, tendon calcanéen, rétromalléolaire externe, plante ou bord externe du pied en direction du 5e orteil. Parfois, le trajet est plus imprécis lorsque l’irradiation est incomplète (irradiation tronquée) ou peut concerner plusieurs territoires. Examen physique : le syndrome rachidien se manifeste par une attitude antalgique dans le plan sagittal (diminution ou perte de la lordose lombaire) et dans le plan frontal (inclinaison latérale irréductible) ainsi que par une raideur lombaire dans le plan sagittal (flexion-extension) et dans le plan frontal (inclinaisons latérales). On retrouve des contractures musculaires paravertébrales. Certains signes orientent vers un conflit disco-radiculaire : –signe de Lasègue : déclenchement de la douleur par élévation du membre inférieur en extension ; –signe de Lasègue croisé : déclenchement de la douleur par élévation du membre inférieur controlatéral ; –signe de la sonnette : déclenchement de la douleur par pression de l’espace interlamaire correspondant à la racine en cause. L’examen neurologique permet de rechercher des signes déficitaires du territoire atteint : –déficit moteur : L5 (tibial antérieur, extenseurs des orteils, fibulaires, marche sur les talons), S1 (triceps sural, marche sur la pointe des pieds) ; –abolition ou diminution du réflexe achilléen (S1) ; –hypoesthésie sur le territoire de la douleur. On recherche un syndrome de la queue de cheval. 2.Lombo-cruralgie Elle correspond à une lombo-radiculalgie affectant les racines L3 ou L4. Elle est moins fréquente que la lombo‑sciatique et touche plus fréquemment l’homme que la femme entre 50 et 60 ans. Interrogatoire : la topographie de la douleur dépend de la racine en cause : –L3 : face postéro-interne puis antéro-interne de la cuisse sans dépasser le genou ; –L4 : face antéro-externe de la cuisse, face antérieure de la jambe, malléole interne. La douleur est d’installation brutale associée à des dysesthésies (brûlures, sensation de broiement) et à recrudescence nocturne. Examen clinique : comme pour la lombosciatique, on recherche un syndrome rachidien (attitude antalgique et raideur lombaire). On recherche un signe de Léri : la douleur est reproduite par la flexion du genou à 90° lorsque le malade est en décubitus ventral (premier temps). Le deuxième temps correspond à l’extension de la cuisse sur le bassin mais il est moins spécifique. On recherche des signes neurologiques déficitaires : –déficit moteur : L3 (psoas), L4 (quadriceps) ; –déficit sensitif dans le territoire de la douleur (face antérieure de la cuisse) ; –abolition ou diminution du réflexe rotulien (L3 ou L4) ; –syndrome de la queue de cheval. Vol. 66 _ Septembre 2016 e321 TABLEAU 1 RR Item 93 R A D IC U L A LGIE E T SYNDR OME C ANAL AIR E Signes de complication des lomboradiculalgies z Anesthésie en selle z Dysurie, rétention d’urine z Incontinence urinaire et/ou fécale z Perte de la sensibilité lors du passage des urines et/ou des selles z Hypotonie du sphincter anal z Troubles de l’érection Lombo-radiculalgie paralysante z Déficit moteur o 3 Lombo-radiculalgie hyperalgique z Douleur résistante aux antalgiques de palier III TABLEAU 2 Syndrome de la queue de cheval Causes des lombo-radiculalgies symptomatiques z Métastase osseuse z Myélome z Lymphome z Tumeur osseuse primitive z Tumeur intrarachidienne (neurinome) Pathologie infectieuse z Spondylodiscite infectieuse z Méningoradiculite (Lyme, VZV, HSV, VIH) z Arthrite articulaire postérieure infectieuse Pathologie inflammatoire z Spondyloarthrite TABLEAU 3 Pathologie tumorale Signes d’alerte orientant vers une radiculalgie symptomatique z Âge de début : avant 20 ans et après 55 ans z Traumatisme de haute énergie z Douleur constante s’aggravant progressivement z Douleur de rythme inflammatoire z Atteinte pluriradiculaire z Douleur thoracique associée, terrain polyvasculaire, notion d’anévrisme de l’aorte z Altération de l’état général, perte de poids inexpliquée, sueurs nocturnes z Fièvre z Antécédent de néoplasie z Toxicomanie, séropositivité pour le VIH z Corticothérapie au long cours z Raideur lombaire multidirectionnelle et persistante z Déformation rachidienne importante e322 Vol. 66 _ Septembre 2016 3.Étiologie Lombo-radiculalgie par hernie discale : la lombo-radiculalgie d’origine discale est surtout rencontrée entre 30 et 40 ans, avec une prédominance masculine. Elle est évoquée par les données de l’interrogatoire et l’examen clinique. La douleur est de rythme mécanique, monoradiculaire, impulsive à la toux et associée à des lombalgies. On retrouve fréquemment un facteur déclenchant (effort de soulèvement). La douleur est augmentée par la station assise et par la mobilisation du rachis dans le plan sagittal. Elle est soulagée par le décubitus. Le patient présente généralement des antécédents rachidiens. Cliniquement on retrouve une attitude antalgique avec contractures paravertébrales et raideur lombaire, un signe de Lasègue et un signe de la sonnette. Deux situations représentent une urgence chirurgicale et imposent un examen d’imagerie en urgence : –la lombo-radiculalgie paralysante définie par un déficit moteur o 3 ; –la lombo-radiculalgie associée un syndrome de la queue de cheval. La lombo-radiculalgie hyperalgique est définie par une douleur rebelle à un traitement morphinique bien conduit. À l’heure actuelle, le traitement médical permet rapidement de réduire l’hyperalgésie de sorte que cette situation représente rarement une indication chirurgicale urgente. Lombo-radiculalgie d’origine arthrosique : il s’agit du diagnostic diffé‑ rentiel principal de la lombo-radiculalgie commune discale. Il n’y pas de signe de conflit disco-radiculaire (impulsivité, facteur déclenchant, signe de Lasègue et de Léri). La douleur est de rythme mécanique et entraîne parfois des réveils nocturnes liés aux changements de position. Elle est aggravée par la station debout statique, le décubitus ventral ou dorsal et la rotationextension du rachis lombaire. La position en chien de fusil et l’antéflexion lombaire soulagent la douleur. À l’examen clinique, il n’y a pas de contracture paravertébrale majeure. On retrouve des points électifs paravertébraux. Canal lombaire étroit : il concerne surtout le sujet âgé de plus de 60 ans. Il correspond à une sténose acquise du canal rachidien par prolifération ostéophytique, hypertrophie du ligament jaune et protrusion discale. Il peut toucher un ou plusieurs étages. Les douleurs sont pluriradiculaires et bilatérales, associées à des paresthésies. La douleur apparaît ou s’aggrave à la marche (claudication à la marche) du fait de l’accentuation du rétrécissement canalaire par la lordose en position debout et limite le périmètre de marche. La douleur est soulagée par la position penchée en avant (signe du Caddie). L’arrêt de la marche soulage la douleur en quelques minutes d’autant plus que le patient s’assoit. L’examen neurologique est assez pauvre. Le diagnostic différentiel est la claudication d’origine artérielle (artériopathie oblitérante des membres inférieurs) imposant la palpation des pouls périphériques et la réalisation d’un Doppler artériel au moindre doute. Radiculalgie et syndrome canalaire POINTS FORTS À RETENIR On distingue des lombo-radiculalgies communes (non spécifiques) et symptomatiques (spécifiques). L’interrogatoire et l’examen clinique permettent de rechercher des signes d’alerte en faveur d’une lombo-radiculalgie symptomatique. Deux situations nécessitent la réalisation d’un scanner ou d’une IRM en urgence et un avis chirurgical : la lomboradiculalgie déficitaire (force motrice o 3) et le syndrome de la queue de cheval. Les examens complémentaires sont réalisés en cas de signes d’alerte évoquant une lombo-radiculalgie symptomatique, de signes de complication (déficit moteur, syndrome de la queue de cheval) et en cas d’échec du traitement médical bien conduit après 7 semaines d’évolution. Le syndrome du canal carpien est le syndrome canalaire le plus fréquent caractérisé par des acroparesthésies dans le territoire du nerf médian. Fréquemment idiopathique, certaines étiologies doivent être évoquées (microtraumatisme, diabète, hypothyroïdie, rhumatisme inflammatoire…). Le traitement est le plus souvent médical. 4.Examens complémentaires Chez un adulte jeune, une lombo-radiculalgie commune typique non compliquée ne nécessite aucun examen complémentaire. Au contraire, chez un adolescent ou un patient de plus de 50 ans, en cas de fièvre, d’antécédent de tumeur, de signes neurologiques déficitaires ou de tableau clinique atypique, un examen radiologique est réalisé précocement. En dehors de ces cadres, il n’y a pas lieu de demander d’examen d’imagerie dans les 7 premières semaines d’évolution de la lombo-radiculalgie (recommandations de l’ANAES de 2000). Les examens d’imagerie permettent de mettre en évidence le conflit discoradiculaire et sont réalisés en vue d’une intervention chirurgicale. L’examen à demander est une IRM ou à défaut un scanner en fonction de l’accessibilité de ces examens. 5.Traitement Le traitement médical comprend la prescription d’antalgiques, d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et de myorelaxants. Un repos au lit relatif peut être nécessaire à la phase aiguë lorsque la douleur est intense. Les infiltrations péridurales peuvent être utiles. La guérison est généralement obtenue après 6 à 8 semaines. Après amélioration des douleurs, une rééducation est indiquée afin de renforcer la musculature paravertébrale et de la sangle abdominale. Le traitement chirurgical est réservé aux formes compliquées (tableau 1) ou résistantes au traitement médical après réalisation d’une imagerie par résonance magnétique (IRM) ou d’un scanner confirmant la concordance radioclinique. Il s’agit de la résection de la hernie discale. Le traitement chirurgical améliore la radiculalgie mais n’a pas d’action sur la lombalgie qui nécessite de la rééducation. Lombo-radiculalgies symptomatiques Il s’agit de lombo-radiculalgies qui ne sont pas dues à une origine discale ou arthrosique mais à des affections plus sévères (tableau 2). À l’interrogatoire et à l’examen clinique, on recherchera les signes d’alerte orientant vers une radiculalgie symptomatique (tableau 3). En cas de suspicion de lombo-radiculalgie symptomatique il faudra réaliser des radiographies standard et un bilan biologique (hémogramme, VS, CRP, électrophorèse des protides). Les autres explorations sont guidées par l’orientation diagnostique (IRM, myélogramme, hémocultures, ponction lombaire, ponction-biopsie disco-vertébrale…). Névralgie cervico-brachiale commune 1.Présentation clinique Il s’agit d’une douleur radiculaire par atteinte d’une des racines du plexus brachial associée à un syndrome cervical. Interrogatoire : la topographie de la douleur dépend de la racine atteinte : –C5 : moignon de l’épaule, face externe du bras ; –C6 : face externe du membre supérieur jusqu’au pouce ; –C7 : face postérieure du membre supérieur jusqu’aux 2e et 3e doigts ; –C8/T1 : face interne du membre supérieur jusqu’aux 4e et 5e doigts. Examen physique du rachis cervical : on recherche une raideur se traduisant par une limitation de la mobilité en flexion-extension, rotations et inclinaisons latérales. Les contractures intéressent les muscles de la ceinture scapulaire. Dans les formes aiguës, il peut s’agir d’une véritable attitude antalgique en torticolis. On recherche des signes déficitaires dans le territoire atteint : –hypoesthésie dans le territoire de la douleur ; –déficit moteur : C5 (deltoïde, rotateurs de l’épaule), C6 (biceps brachial, brachial, flexion du pouce, supination), C7 (triceps brachial, extenseurs du poignet et des doigts, pronation), C8/T1 (fléchisseurs des doigts, interosseux) ; –abolition du reflexe bicipital (C5), stylo-radial (C6), tricipital (C7) et cubito-pronateur (C8/T1). On recherche des signes d’irritation médullaire traduisant une myélopathie cervicarthrosique : syndrome pyramidal recherché aux 4 membres (réflexes vifs diffus et polycinétiques, signes de Babinski et Hoffmann, signe de Lhermitte). La présence d’un déficit moteur o 3, d’une douleur hyperalgique (résistant aux antalgiques de palier III) représentent une urgence chirurgicale et imposent la réalisation d’un scanner ou d’une IRM en urgence. Vol. 66 _ Septembre 2016 e323 RR Item 93 R A D IC U L A LGIE E T SYNDR OME C ANAL AIR E TABLEAU 4 2.Étiologie Hernie discale : elle concerne surtout le sujet jeune. La douleur est de rythme mécanique avec parfois une recrudescence nocturne en cas de douleur intense. On retrouve classiquement un facteur déclenchant. La douleur radiculaire est impulsive à la toux. À l’examen physique, la douleur peut être aggravée par la compression axiale, extension et rotation homolatérale de la tête (signe de Spurling) ou par la manœuvre d’étirement du membre supérieur en arrière. Elle peut être soulagée par une traction cervicale. Uncarthrose : elle concerne surtout les patients âgés de plus de 40 ans. Il s’agit d’une compression de la racine nerveuse par conflit disco-ostéophytique. 3.Examens complémentaires Les radiographies standard du rachis cervical de face, de profil et de trois quarts sont réalisées en première intention. Ils permettent d’analyser les foramens vertébraux et de mettre en évidence l’arthrose cervicale. Le scanner injecté ou l’IRM cervicale sont réalisés en deuxième intention en cas de névralgie cervicobrachiale résistant au traitement médical ou en urgence en cas de signes de complication. Ils permettent d’objectiver un conflit disco-radiculaire ou disco-ostéophytique. Étiologie du syndrome du canal carpien Causes traumatiques z Fracture de l’extrémité distale du radius ou du carpe z Cal vicieux z Pseudarthrose du scaphoïde z Maladie de Kienbock Causes microtraumatiques z Pathologie professionnelle (mouvements répétitifs) z Utilisation d’appareils vibrants Causes endocriniennes z Grossesse z Diabète z Hypothyroïdie z Acromégalie Causes mécaniques z Compression externe (cannes, chaise roulante) z Ténosynovite inflammatoire et infectieuse z Tumeur (kyste synovial, lipome, hémangiome) z Dépôts intracanalaires (chondrocalcinose, hydroxyapatite, goutte, amylose) z Malformations congénitales canalaires, musculaires et tendineuses z Vasculaires (persistance d’une artère médiane) Cause idiopathique e324 Vol. 66 _ Septembre 2016 4.Traitement Le traitement médical comprend la prescription d’antalgiques classiques et d’AINS ainsi qu’un repos par collier cervical. Dans les formes rebelles on peut proposer une corticothérapie systémique (0,5 mg/kg/j pendant 2 à 3 semaines). Les infiltrations cervicales périradiculaires et foraminales sous contrôle radiographique ou scanographique sont de moins en moins proposées en raison du risque d’infarctus médullaire et d’accident vasculaire cérébral. Le traitement chirurgical est rarement indiqué. Il est réservé aux formes compliquées ou en cas d’échec du traitement médical. Il s’agit de la résection des ostéophytes ou de la hernie discale. Névralgie cervico-brachiale symptomatique Il s’agit de névralgies cervico-brachiales d’origine traumatique (fracture vertébrale, luxation), infectieuses (spondylodiscite, méningoradiculite), tumorale bénigne (neurinome, syringomyélie, méningiome) ou maligne (métastase osseuse, myélome, lymphome, syndrome de Pancoast et Tobias). On recherchera les signes d’alerte orientant vers une radiculalgie symptomatique (tableau 3). Syndromes canalaires Les syndromes canalaires résultent de la compression des nerfs périphériques dans des zones de passage étroit. Le syndrome du canal carpien est le syndrome canalaire le plus fréquent. Syndrome du canal carpien Le syndrome du canal carpien correspond à la compression du nerf médian dans le canal carpien. Il s’agit d’un nerf mixte assurant la sensibilité palmaire des trois premiers doigts et de la moitié radiale du quatrième doigt, la sensibilité dorsale des 2e et 3e phalanges de l’index, du majeur et de la moitié radiale de l’annulaire. Il assure la motricité des muscles de l’éminence thénar et des deux lombricaux externes. Ce syndrome touche préférentiellement la femme (3 femmes pour 1 homme) à un âge moyen de 50 ans. Il est bilatéral dans 50 % des cas et prédomine au niveau du membre dominant. Il est reconnu comme maladie professionnelle (tableau 4). 1.Présentation clinique Il débute par une symptomatologie sensitive : acroparesthésies dans le territoire du nerf médian irradiant à l’avant-bras à prédominance nocturne ou au réveil obligeant le patient à se secouer la main ou à la tremper dans l’eau chaude. L’irradiation peut parfois atteindre l’épaule. Les paresthésies peuvent également être provoquées par des activités manuelles inhabituelles. La percussion de la face antérieure du poignet (test de Tinel) et la flexion forcée du poignet pendant une minute (test de Phalen) peuvent reproduire les paresthésies. L’évolution se fait vers la persistante des paresthésies entraînant une maladresse de la main associée à des troubles moteurs (déficit de la force du pouce) et une amyo trophie thénarienne représentant alors des signes de sévérité. Autres syndromes canalaires 1.Au membre supérieur Ce sont : –la compression du nerf radial dans la gouttière humérale ; –le syndrome de l’arcade de Fröhse : compression du nerf radial lors de la traversée du muscle supinateur ; –le syndrome du tunnel radial : compression de la branche motrice du nerf radial lors de son trajet entre l’articulation huméroradiale et sa sortie du muscle supinateur ; –la compression du nerf ulnaire au coude dans la gouttière épitro chléo-olécranienne ; –le syndrome de la loge de Guyon : compression du nerf ulnaire du poignet. 2.Au membre inférieur –la méralgie paresthésique : compression du nerf cutané latéral dans un canal ostéofibreux en regard de l’épine iliaque ; –le syndrome du tunnel tarsien : compression du nerf tibial postérieur lors de son passage dans le tunnel tarsien ; –le syndrome de Morton : compression du nerf digital dans le tunnel intermétatarsien ; –la névralgie pudendale ou syndrome d’Alcock : compression du nerf honteux pudendal. • E. Dernis déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour les entreprises Abbvie, MSD, Roche et Pfizer. F. Medina déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. + POUR EN SAVOIR ● Dossier DOSSIER LG IE ICU LA IEU RS ÉR ORAD LOMB RES INF gie ME MB LOMBORADICULALGIE adiculal DES lombor Lomboradiculalgie des membres inférieurs DES MEMBRES INFÉRIEURS ue ? une omatiq sympt ine discale ig une ou Comm mmune, d’or et si co rosique ? ou arth e devant nostiqu rs e diag rieu Conduit bres infé des mem DOSSIER RÉALISÉ SELON LES CONSEILS DU DR GÉRALD RAJZBAUM Service de rhumatologie, groupe hospitalier Paris-Saint-Joseph, Paris, France. douleur [email protected] tic. La dans la ter le diagnos origine est et d’orien lle son le ? Quel , son trajet ur prend-e bilatéra douleur e inférie uni- ou t être ie du membr re ? Est-elle? ressent ires peuven lgies 1) lombai adicula ée, et n’être imprécis, (tableau région adicula précis rs lombor lombor être tronqu cas de trajet ns rachison trajet es douleu t avec des r peut re valeur En s affectio antes La douleu du trajet. qui a la meilleu brûlure, , en rappor ou avec d’autreplus inquiét de les une partieplus distale nes à type mais ésies, GÉRALD RAJZBAUM que sur la commu décrite rares s ou parfois paresth douleur est souvent s plus lombotumeur ésies, de MICHEL SAMSON ants à c’est la dienne alors de ns, les trice. Elle de dysesth mes import gique infectio On parle Service de localisa pagner atoires. que les ts, symptô re neurolo ie, ent s’accom telles e. inflamm llemen égalem rhumatolog e. et peut caractè ismes diculair matiqu doit permettre ant le de fourmi ue ou rhumat plurira mode groupe hospitalier confirm parfois tique algie sympto bi- voire r la date et le aire (sciatiq t-Joseph, her car être diagnos radicul douleur he troncul peut hant, Paris-Sain une recherc . Elle de précise déclenc La démarc une atteinte chidienne à Paris, France. de la douleurogatoire permetr (événement aître que, son extrara aire. tre de de reconn une origine radicul L’interr de la douleu re mécani uels [email protected] permet ) ou ue Hernie discale. étée comme tique doit son caractè nnel, d’éventou de crurale de surven progressif), ue fonctio ent interpr te diagnos lgie au sement faussem la condui ie chroniq douleur adicula brutal retentis ns : la lombor Ainsi, té, son o, de lombalges questio lomboradiculalgies des membres inférieurs sont un motif de consultation quotidien. discale, à une G. Rajzbaum intensi lumbag hernie ion. re à deux ond-elle ents de cas de d’une répond nt à la défécat e? déclare des r corresp antécéd formes communes regroupent les douleurs d’origine discale ou arthrosique, lgie. En rareme ne, s’agit-il ? toux ou Les adicula ent que – la douleuou symptomatiqu des ve à la interventions pour lombor lgie commu autre cause finalem ne dehors avec en des composantes plus ou moins intriquées. Les progrès de l’imagerie ont t impulsi adicula ne sont commu e ? D’une ponctuelles est souven tismes de lombor arthros algie aiguë, considérablement simplifié la démarche diagnostique, mais une bonne interprétation – en cas ? D’une Les trauma une radicul e. AbbVie, Amgen, discale dans une : voie publiqudes images suppose une analyse clinique rigoureuse préalable. Malgré tout, il reste hernie Ipsen et MSD. en cause graves de la comm e gravité de ts ulalgi e, signes cliniquement acciden des difficiles des et sur le plan de l’imagerie ; la concordance radio-clinique est te déclare de la statiqu chercas Lomboradic que fréquen M. Samson fréquente recher he un trouble / est plus ner et essentielle, et touteantalgi discordance manifeste doit attirer l’attention du médecin. la plus homme attitude e discale n’avoir aucun ou une Exami du rachis recherc enne, une jeunes) en lgie d’origin40 ans. Le rapport icales. sujets rachidi Le mécanisme du conflit discoradiculaire conduisant à une radiculalgie est probablement lien d’intérêts. L’exam et adicula des chirurg 30 s ation séries discale La lombor jeune, entre ée non sympune déform herniesmultifactoriel, dans les quantifi compression et traction de la racine, et une agression chimique re. sujet où être s’associent ndiscales e des on 1,5 chez le de e peut taire lombai (apanag en tomode est d’envir uses hernies segmen et de l’indice résultant de laollibération dehe cytokines pro-inflammatoires au contact de la hernie discale. ique. enne lombair femme nombre les études faites raideur rachidi de très ce magnét ntent e doigts-s re recherc s par Il existe La raideur de la distanc résonan lombai Gérald Rajzbaum ues, révélée ie par , des zones région lgies représe dité mesure e tomatiq tébraux on de la en imager adicula par la et d’invali et sonnett rie ou r. La palpati muscles paraversigne de la n sitomét ies et lombor au travail e social un Schöbe ture des la pressio Les lombalg d’inaptitude à ce context ionnelles llement aire à une contrac et éventue re cause .1 Face r radicul s profess ts unieuses 378 Conduite diagnostique la premiè f P. f P. 384 Prise- en charge thérapeutique f P. 388 Infiltrations en France x de maladie doulour de la douleu restrein pro45 ans r le retentis , uction tableau en 1999, avant 391 Kinésithérapie P. 393 Traitement chirurgical de la hernie précise f P. f de discale (reprod moteur ). ique, deux ont été créés hernie permet déficit tébrale entier s économ lgies par her un général paraver corps douleur de la marche adicula ises au de recherc inte (pour les du régime charges L’étude ou L4, nnel et ns transm manuelle de t aux lombor algie L3 fonctio e talon-po vibratio quemen la ntion Vol. 66 _ Avril 2016 sement l’épreuv de radicul (flexion de s par des ent par En cas par la manute voquée notamm ou S1). 2 er le psoas n° 97) ou aires L5 n° 98). (tableau peut concern radicul (tableau ons moteur lourdes s questi tique. L’inter le déficit la : les bonne diagnos gatoire la démarche permet de décrire Interro clé de ux. Il rigoure C’est l’étape être re doit rogatoi L © BSIP L Rev Prat 2016;66(4):377-96 SOMMAIRE 2.Étiologie Le syndrome du canal carpien est idiopathique dans plus de 50 % des cas. Les causes sont listées dans le tableau 4. 3.Examens complémentaires Électromyogramme : il représente l’examen de référence. Il permet d’objectiver l’atteinte du nerf médian et d’éliminer une autre pathologie. La stimulodétection montre un ralentissement de la conduction motrice et/ou sensitive du nerf médian au canal carpien. Elle analyse également l’amplitude et la durée des réponses évoquées motrices et sensitives. Cet examen peut être normal dans les formes débutantes. Autres examens : l’échographie permet une analyse morpho‑ logique et dynamique du nerf médian. Elle montre un épaississement du nerf médian à l’entrée du canal carpien, un aplatissement à la partie distale du canal carpien et un bombement palmaire du rétinaculum des fléchisseurs. Elle permet éventuellement de mettre en évidence la cause de la compression du nerf médian : ténosynovites des fléchisseurs, tumeur synoviale. La radiographie du poignet peut mettre en évidence une anomalie osseuse (masse calcifiée, fracture des os du carpe). 4.Traitement Le traitement étiologique est mis en œuvre chaque fois que possible. Dans les formes sensitives pures, on privilégie le traitement médical en première intention : infiltrations cortisoniques intra‑ canalaires, attelle nocturne de repos. Le traitement chirurgical est indiqué dans les formes sévères (déficit moteur ou amyotrophie) et dans les formes résistant au traitement médical. Il consiste en la section du ligament annulaire sur son versant ulnaire. Cette section peut être réalisée par technique classique (ouverture palmaire) ou par technique endo scopique. Vol. 66 377 _ Avril 2016 378 Mais aussi : Portier A., Rajzbaum G. Névralgie cervico-brachiale : fréquente et parfois très douloureuse. Rev Prat 2016;66(5)549-54. Liverneaux P, Gouzou S. Syndrome du canal carpien et autres syndromes canalaires. Rev Prat 2013;63(9):1258-62. Vol. 66 _ Septembre 2016 e325 RR FOCUS Item 93 Voir l’item complet page e321 et sur larevuedupraticien.fr Les signes d’alerte d’une lomboradiculalgie Ce FOCUS attire votre attention sur des points importants. Dr Emmanuelle Dernis, Dr Frédéric Medina Service de rhumatologie, centre hospitalier du Mans, 72037 Le Mans Cedex, France [email protected] L’ interrogatoire et l’examen physique sont des temps essen tiels dans la démarche diagnostique d’une lomboradicu lalgie. En effet, ils permettent de rechercher les signes de gravité et les signes orientant vers une cause spécifique. Les lombo radiculalgies symptomatiques ou spécifiques témoignent d’affec tions rachidiennes ou extra-rachidiennes potentiellement sévères (infection, cancer, rhumatisme inflammatoire…) et doivent être diagnostiquées précocement pour ne pas retarder la mise en place du traitement. Les signes d’alerte (ou drapeaux rouges ou red flags) sont des signes qui doivent être systématiquement recherchés à l’examen clinique car ils indiqueraient une haute probabilité de cause spé cifique. Initialement, ils s’appliquaient aux lombalgies aiguës puis se sont étendus à toute lombalgie ou lomboradiculalgie. La pré sence d’au moins un signe d’alerte justifie la prescription précoce d’examens complémentaires (radiographies, biologie, scanner, IRM…).• IRM du rachis lombaire, étage L5S1. Hernie discale L5S1 paramédiane gauche, avec conflit sur la racine S1 gauche. FIGURE E. Dernis déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour les entreprises Abbvie, MSD, Roche et Pfizer. F. Medina déclare n’avoir aucun lien d’intérêts. Signes d’alerte d’une lombalgie ou lomboradiculalgie l Âge du début des symptômes inférieur à 20 ans ou de plus à 55 ans l Antécédent récent de traumatisme violent l Douleur permanente, progressivement croissante l Douleur non mécanique (non soulagée par le repos au lit, douleur supérieure le matin par rapport au soir) e326 Vol. 66 _ Septembre 2016 l Douleur thoracique l Perte de poids inexpliquée l Antécédents médicaux de tumeur maligne l Syndromes neurologiques diffus (incluant le syndrome de la queue de cheval) l Utilisation prolongée de corticoïdes l Toxicomanie, immunosuppression, infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) l Altération de l’état général l Déformation rachidienne importante l Fièvre RR Item 117 LE HANDICAP PSYCHIQUE (VOIR ITEM 54 ET 115) Dr Clélia Quilès1, 2, Pr Christophe Lançon3 1. Centre hospitalier Charles-Perrens, F-33000 Bordeaux, France 2. Université de Bordeaux, F-33000 Bordeaux, France 3. Pôle psychiatrie universitaire, CHU Sainte-Marguerite, F-13274 Marseille Cedex 09, France [email protected] objectifs ÉVALUER le handicap psychique de l’adulte. ANALYSER les implications du handicap en matière d’orientation professionnelle et son retentissement social. ÉVALUER le handicap psychique de l’enfant et de l’adolescent en matière d’intégration scolaire et d’articulation entre le secteur sanitaire et médico-social. ARGUMENTER les principes d’orientation, de prise en charge et d’aide (MDPH Auxiliaire de vie scolaire collectif et individuel, Médico-social – intégration scolaire, etc) pour les enfants porteurs de handicap psychique ARGUMENTER les principes d’utilisation et de prescription des principales techniques de remédiation cognitive. ARGUMENTER les principes d’utilisation et de prescription des principales techniques éducatives et d’entraînement cognitif chez les enfants porteurs de handicap psychique. Définitions « pour comprendre » Définition et épidémiologie du handicap Le handicap affecte 80 millions de personnes en Europe (selon l’European Disability Strategy) et 1 milliard de personnes dans le monde selon le rapport mondial sur le handicap de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) 2013. Le terme « handicap » se rapporte à la limitation des possibilités d’interaction d’un individu avec son environnement. Cette limitation est la conséquence d’une déficience, elle-même à l’origine d’une incapacité, conduisant à des difficultés psychiques, intellectuelles, sociales et/ou physiques. La loi n° 2005-102 du 11 février 2005, article 14 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, a défini la notion de handicap : « Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d’activités ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un polyhandicap ou d’un trouble de santé invalidant ». Le handicap n’est donc pas un « état », mais une « situation de handicap » d’origine physique, sensorielle, mentale, cognitive ou psychique. Les fonctions psychiques sont donc bien reconnues dans cette définition comme des sources de handicap (la loi de 2005 a ainsi « reconnu » le handicap psychique). Deux notions différentes doivent être distinguées : le handicap mental et le handicap psychique. La « situation de handicap d’origine mentale » est reliée à une altération cognitive globale entraînant une efficience intellectuelle diminuée (souvent non évolutive dans le temps). Présente dès la naissance, il s’agit d’une situation de handicap durable, nécessitant des soins médicaux habituellement peu fréquents, essentiellement de nature à diminuer l’impact du handicap. L’exemple d’une personne souffrant d’un retard mental dans le cadre d’une trisomie 21 peut être cité. La « situation de handicap d’origine psychique » est reliée à une altération cognitive spécifique ou des biais cognitifs (évoluant par poussées dans le temps) perturbant l’organisation des activités et des relations sociales. Le handicap psychique est donc secondaire à un trouble psychiatrique. Apparaissant à l’adolescence ou à l’âge adulte, ce handicap est évolutif, et requiert des soins médicaux indispensables, permettant de stabiliser le trouble psychiatrique (tels les psychotropes) et de diminuer l’impact du handicap (telle la remédiation cognitive, par exemple). Le handicap psychique fait partie des premières causes de handicap selon l’OMS. On estime à 700 000 le nombre de personnes présentant un handicap psychique en France. Il s’agit de la première cause de mise en invalidité par la Sécurité sociale. Vol. 66 _ Septembre 2016 e327 RR Item 117 L E H A N D ICAP PSYC HIQU E Modèle de l’OMS du handicap Prise en charge du handicap Trois niveaux (déficience, limitations et restriction de participation), de complexité croissante et en interaction les uns avec les autres, constituent le modèle de l’OMS du handicap. Il existe par ailleurs deux catégories de facteurs susceptibles d’influencer la cascade de conséquences menant des déficiences aux restrictions de participation : ––les facteurs personnels (conceptions issues de la psychologie de la santé : le stress perçu, le soutien social perçu, le contrôle perçu et les stratégies d’adaptation) ; ––et les facteurs environnementaux (éléments du contexte de vie de l’individu). Ces facteurs peuvent constituer des obstacles ou des facilitateurs de la participation à la vie sociale. 1.Déficience Les déficiences correspondent au dysfonctionnement des structures anatomiques. Les altérations cognitives retrouvées dans les troubles psychiatriques appartiennent à ce type de dysfonctionnement et s’évaluent par des tests neuropsychologiques, indispensables dans tout bilan de troubles psychiatriques sévères. Les altérations cognitives contribuent fortement au pronostic fonctionnel des troubles psychiatriques. 2.Limitation d’activité Les limitations d’activité désignent les difficultés qu’une personne peut rencontrer pour mener une activité, c’est-à-dire ce que la personne est capable ou non de faire. Ainsi, les limitations d’activités peuvent concerner différentes tâches de la vie quotidienne, ou encore les compétences sociales et professionnelles. 3.Restriction de participation Les restrictions de la participation désignent les problèmes qu’une personne peut rencontrer pour participer à une situation de la vie réelle. Il ne s’agit pas de ce que la personne est capable de faire ou pas, mais surtout de ce qu’elle fait réellement (fig. 1). Principes généraux de la prise en charge (fig. 2) Déficiences Problème de santé Limitation d'activités Facteurs personnels Facteurs environnementaux Restriction de participation FIGURE 1 Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé, OMS, 2001. e328 Vol. 66 _ Septembre 2016 La réhabilitation psychosociale comporte l’ensemble des stratégies qui permettent aux sujets souffrant de troubles psychiatriques de récupérer leur fonctionnement social et instrumental dans la plus large mesure possible en utilisant des procédés d’apprentissage et des mesures prothétiques. La réhabilitation inclut donc la remédiation, la réadaptation, la réinsertion. Prise en charge des déficiences et limitations d’activité : la psychoéducation et la remédiation cognitive Des interventions de psychoéducation ont été développées pour communiquer les connaissances actuelles sur la maladie et le traitement de personnes atteintes de schizophrénie, et leur permettre ainsi d’établir un lien entre d’éventuelles altérations rapportées par leur bilan et leurs conséquences concrètes. Il a été montré que la psychoéducation réduisait le taux de rechutes, de réadmissions à l’hôpital et la durée du séjour, et permettait d’améliorer l’observance médicamenteuse, et ce d’autant plus qu’elle intervient précocement dans l’évolution de la pathologie. La remédiation cognitive a pour objectif de diminuer les altérations cognitives des sujets souffrant de trouble psychiatrique. Les altérations cognitives se manifestent par : ––des altérations non spécifiques aux troubles psychiatriques (pouvant se retrouver dans les maladies neurologiques, par exemple), à savoir des altérations neurocognitives ; ––mais également par des altérations spécifiques aux troubles psychiatriques, à savoir la cognition sociale et la métacognition. La remédiation de ces altérations nécessite préalablement une évaluation complète neuropsychologique individuelle. L’objectif de cette évaluation est, d’une part, de connaître les altérations les plus importantes du sujet, et, d’autre part, de connaître les conséquences de ces déficiences dans la vie quotidienne (restrictions de participation). Le travail de remédiation ne cible en effet pas simplement une amélioration des performances cognitives dans les domaines les plus altérés mais aussi et surtout une réduction des répercussions de ces altérations. La schizophrénie représente l’une des principales indications de la remédiation cognitive, qu’elle soit non spécifique ou spécifique. Prise en charge des restrictions de participation Il s’agit principalement des techniques de réadaptation et de réinsertion. La réadaptation peut être définie comme l’ensemble des actions permettant de supprimer, atténuer, ou surmonter les obstacles générateurs de handicap. La réinsertion quant à elle a pour objectif d’aider un individu à retrouver son milieu familial, social et professionnel. La prise en charge des restrictions de participation nécessite le plus souvent des démarches administratives (maison départementale des personnes handicapées, MDPH) et/ou judiciaire POINTS FORTS À RETENIR Le modèle de l’OMS du handicap distingue trois niveaux : déficience, limitation d’activité, restriction de participation. Ce modèle s’applique à la psychiatrie comme au reste de la médecine. La prise en charge des déficiences et limitations d’activité en psychiatrie repose sur les techniques de remédiation cognitive, qui sont des techniques de rééducation ayant pour objectif de diminuer les altérations cognitives. La prise en charge des restrictions de participation repose sur les aides au logement, les aides financières, et le développement d’un réseau social. La prise en charge des déficiences, limitations d’activités et restriction de participation participent à la réhabilitation psychosociale. (tribunal de grande instance) spécifiques. Un dossier est ainsi constitué afin de demander l’ouverture de droits par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDPAH) à la MDPH. Les prestations, dans trois domaines en fonction du niveau de restriction de participation (sévérité du handicap évaluée par le guide d’évaluation des besoins de compensation de la personne handicapée [GEVA]), sont attribuées pour : ––le logement ; ––le travail ou aides financières ; ––le réseau social. Problème de santé 1.Logement Il existe plusieurs possibilités de logement pour les personnes souffrant de handicap psychique, en fonction des possibilités du sujet. Le logement peut ainsi être ordinaire, ou alors adapté (maisons relais, résidences d’accueil) ou encore en appartement communautaire ou associatif. Afin de maintenir l’autonomie dans ce logement et dans la vie quotidienne, il existe des possibilités d’accompagnement à la vie sociale sous la forme : ––d’un service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) ; ––ou d’un service d’accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH). Le SAMSAH propose, en plus de l’accompagnement dans la vie quotidienne pour les activités sociales et professionnelles, un accompagnement dans le suivi médical et paramédical du patient. Des aides ménagères peuvent s’ajouter. Enfin, il est aussi possible de demander l’intervention d’infirmiers à domicile, voire de soins médicaux ambulatoires, afin de compléter le suivi médical ambulatoire. Ces différents dispositifs ont pour objectif de favoriser un travail de réhabilitation psychosociale en condition écologique. 2.Travail et aides financières En fonction de la sévérité de son handicap, le patient peut travailler en milieu ordinaire, avec recherche d’emploi standard, ou bien bénéficier de la reconnaissance de qualité de travailleur handicapé (RQTH) accordée par la MDPH, permettant un aménagement de poste. Si le travail en milieu ordinaire est impossible, la RQTH permet également le travail en milieu protégé, soit en entreprise adaptée, soit en établissement et service d’aide par le travail (ESAT) qui peut s’associer temporairement à un foyer d’hébergement pour travailleurs handicapés. Si le travail n’est pas possible, le patient peut bénéficier soit d’une pension d’invalidité (versée par la Sécurité sociale) s’il a déjà travaillé, soit d’une allocation pour adulte handicapé (AAH), accordée par la MDPH. Déficiences • Altérations cérébrales • Altérations cognitives • Symptômes psychiatriques Limitation d'activités • Tâches cognitives plus ou moins complexes Restriction de participation • Activités de la vie quotidienne •Habiletés sociales • Logement, emploi, argent Pharmacothérapie Neurostimulation électrique Remédiation cognitive Réadaptation psychosociale Réhabilitation psychosociale Le handicap psychique (voir item 54 et 115) Sauvegarde de justice, curatelle, tutelle FIGURE 2 Schéma synthétisant les différents axes de la prise en charge du handicap psychique selon le modèle de l’OMS (Organisation mondiale de la santé). Vol. 66 _ Septembre 2016 e329 RR Item 117 L E H A N D ICAP PSYC HIQU E Message de l'auteur Les questions posées portant sur cette item s’intègreront parfaitement dans l’esprit de transversalité de l’ECN. Elles pourront facilement être intégrées à tout cas clinique portant sur une pathologie psychiatrique ou pathologie susceptible d’engendrer un handicap psychique. Les questions pourraient par exemple être les suivantes, à partir d’un cas clinique : – quelles sont les déficiences présentées par ce patient ? – quelles sont les limitations présentées par ce patient ? – quelles sont les restrictions de participation présentées par ce patient ? – quels sont les facteurs personnels et environnementaux influençant les déficiences limitations d’activités et restriction de participation chez ce patient ? – quelle prise en charge des limitations d’activité proposez-vous au patient – quelle prise en charge des restrictions de participation proposez-vous au patient ? – quelles mesures de réhabilitation psychosociale pourriez-vous proposer à ce patient ? Lorsque le handicap est très sévère, le patient peut être orienté en institution de type : ––foyer de vie, principalement pour les personnes qui ne peuvent pas exercer d’activité professionnelle, y compris en structure spécialisée ; ––foyer d’accueil médicalisé (FAM), pour les personnes nécessitant un accompagnement médical et une aide éducative pour favoriser le maintien ou l’acquisition d’une plus grande auto nomie dans les actes de la vie courante ; ––ou maison d’accueil spécialisée (MAS), lorsque l’état de santé de la personne handicapée doit nécessiter le recours à une tierce personne pour les actes de la vie courante et une surveillance médicale ainsi que des soins constants. Tous ces types d’hébergement s’adressent uniquement aux patients dans l’incapacité de mener une vie autonome à l’extérieur. Ces institutions organisent l’ensemble de la vie quotidienne et des activités du patient avec notamment des éducateurs spécialisés et des ergothérapeutes. Il faut par ailleurs souligner qu’il peut s’agir d’un lieu de vie transitoire, à un moment donné de la vie du patient. En effet, les mesures de réhabilitation, en particulier les mesures sanitaires dont la remédiation cognitive, peuvent contribuer à modifier la trajectoire de vie des usagers en leur permettant d’exprimer de manière plus efficace leurs potentialités, leur permettant alors de vivre à l’extérieur de manière indépendante. 3.Réseau social Il existe également des programmes de réhabilitation structurés comme le programme de renforcement de l’autonomie et des capacités sociales (PRACS). Ce programme propose de travailler 4 domaines de compétences sociales, à savoir gérer son argent, e330 Vol. 66 _ Septembre 2016 – quelles possibilités de logement peuvent être proposées à ce patient ? – des aides financières peuvent-elles être proposées à ce patient ? – quelles modalités de travail pourraient être proposées à ce patient ? – dans quel objectif proposez-vous une remédiation cognitive à ce patient ? – citez des possibilités d’aide dans les compétences sociales pour ce patient, afin d’élargir son réseau social. gérer son temps, favoriser ses capacités de communication et de loisirs, et améliorer sa présentation (avec éducation à la santé). Les activités sociales se déroulent sous la forme d’ateliers d’ergothérapie animés par un professionnel (généralement en hôpitaux de jour du suivi ambulatoire) ou sous la forme d’ateliers animés par les patients notamment dans le cadre de groupes d’entraide mutuelle (GEM) et d’associations (Club loisirs, etc.). Prise en charge judiciaire Lorsque le handicap nécessite une surveillance et un contrôle continu pour les actes de la vie civile (et parfois civique), des démarches judiciaires (tribunal de grande instance) spécifiques doivent être initiées par le médecin afin mettre en place des mesures de protection des biens des majeurs (sauvegarde de justice, tutelle, curatelle).• C. Quilès déclare avoir des liens durables ou permanents avec l’entreprise EdiPsy, avoir participé à des interventions ponctuelles pour le laboratoire Janssen, et avoir été prise en charge, à l’occasion de déplacement pour congrès, par Janssen et Lundbeck. C. Lançon déclare déclare avoir participé à des interventions ponctuelles (activités de conseil) pour l’entreprise pour les laboratoires Janssen, Roche, lundbeck et Lilly. + POUR EN SAVOIR ● Collège national universitaire des enseignants de psychiatrie (CNUP), Association pour l’enseignement de la psychiatrie (AESP). Le Référentiel de psychiatrie, Tours : Presses universitaires François-Rabelais, 2014. Franck N. Remédiation cognitive dans la schizophrénie. Encyclopédie médico-chirurgicale 2014 ;37-820-A-55. Union nationale des amis et familles de malades psychiques. http://www.unafam.org/ Voir l’item complet page e327 et sur larevuedupraticien.fr Ce FOCUS attire votre attention sur des points importants. RR FOCUS Item 117 La remédiation cognitive, une technique de prise en charge à différencier de la thérapie cognitivo-comportementale Dr Clélia Quilès1, 2, Pr Christophe Lançon3 1. Centre hospitalier Charles-Perrens, F-33000 Bordeaux, France 2. Université de Bordeaux, F-33000 Bordeaux, France 3. Pôle psychiatrie universitaire, CHU Sainte-Marguerite, F-13274 Marseille Cedex 09, France [email protected] L a remédiation cognitive a pour objectif de diminuer les altérations cognitives des sujets souffrant de trouble psychiatrique. La thérapie cognitivo-comportementale a pour objectif de modifier les distorsions cognitives ou biais cognitifs, conduisant aux idées délirantes. Il ne s’agit pas dans ce dernier cas d’altérations cognitives dans le sens où elle ne porte pas sur des processus de pensée, mais sur des contenus de pensée (pour distinguer ces deux aspects, prenons l’exemple de la lecture d’un texte ; si je me pose des questions sur l’histoire que je suis en train de lire, alors je me pose des questions sur le contenu de la pensée ; si je me pose des questions sur la vitesse de ma lecture, mes capacités de compréhension, alors je me pose des questions sur les processus de pensée). Certains programmes, tel le Michael’s game, jeu de cartes au cours duquel le patient doit trouver des hypothèses alternatives aux explications données par le personnage Michael sur des situations auxquelles il est confronté, permettent de travailler à la fois les biais cognitifs (erreurs de raisonnement par les hypothèses alternatives) et les altérations cognitives (par exemple, ici, la flexibilité cognitive). Les altérations des processus de pensée telles que les altérations cognitives sont accessibles via les programmes de remédiation cognitive. Les biais cognitifs, portant sur des contenus de pensée, sont accessibles via la thérapie cognitivo-comportementale. Les techniques de remédiation cognitive s’apparentent à celles de la rééducation et proposent soit un entraînement des processus altérés, soit un renforcement des processus préservés destinés à compenser les altérations. Les altérations cognitives se manifestent par des altérations non spécifiques aux troubles psychiatriques (pouvant se retrouver dans les maladies neurologiques, par exemple) ou par des altérations spécifiques aux troubles psychiatriques. Concernant les altérations non spécifiques, elles peuvent toucher comme dans les maladies neurologiques l’attention et la vitesse de traitement de l’information, la mémoire, les fonctions exécutives. La remédiation de ces altérations nécessite préalablement une évaluation complète neuropsychologique individuelle. L’objectif de cette évaluation est, d’une part, de connaître les altérations les plus importantes du sujet, et, d’autre part, de connaître les conséquences de ces déficiences dans la vie quotidienne (restrictions de participation). Le travail de remédiation ne vise en effet pas simplement une amélioration des performances cognitives dans les domaines les plus altérés mais aussi et surtout une réduction des répercussions de ces altérations. Plusieurs programmes de remédiation cognitive ciblant les altérations cognitives ont déjà été validés et sont disponibles en français (en particulier integrated psychological treatment [IPT], cognitive remediation therapy [CRT], remédiation cognitive par entraînement hiérarchisé assisté par ordinateur à l’aide du logiciel REHA-COM et programme de remédiation cognitive pour patients présentant une schizophrénie ou un trouble associé [RECOS]). Concernant les altérations cognitives spécifiques, particulièrement présentes dans la schizophrénie, est retrouvé une altération de : ––la métacognition (c’est-à-dire la connaissance et la conscience de son propre fonctionnement cognitif) ; ––la cognition sociale (c’est-à-dire les processus cognitifs impliqués dans les interactions sociales). La remédiation de ces altérations cognitives spécifiques nécessite également préalablement un bilan de cognition sociale mais qui ne fait pas encore l’objet d’un consensus. Des programmes destinés à traiter les troubles de la métacognition (metacognitive training ou MCT) et la cognition sociale sont déjà disponibles (remédiation de la théorie de l’esprit ou ToMRemed et Gaïa). D’autres sont en cours de développement ou de validation. La schizophrénie représente l’une des principales indications de la remédiation cognitive, qu’elle soit spécifique ou non.• C. Quilès déclare avoir des liens durables ou permanents avec l’entreprise EdiPsy, avoir participé à des interventions ponctuelles pour le laboratoire Janssen, et avoir été prise en charge, à l’occasion de déplacement pour congrès, par Janssen et Lundbeck. C. Lançon déclare déclare avoir participé à des interventions ponctuelles (activités de conseil) pour l’entreprise pour les laboratoires Janssen, Roche, lundbeck et Lilly. Vol. 66 _ Septembre 2016 e331