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Petit guide
d’astro pratique*
SÉBASTIEN FONTAINE
Médiateur scientifique au département
d’astronomie-astrophysique du Palais de la découverte
* L’ensemble des observations que l’on
vous propose d’effectuer dans cet article
sont valables, entre autres, sur le continent européen.
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L’observation astronomique du ciel est possible
tout au long l’année. Durant les vacances, tout
converge vers la contemplation. Mais jouir des
spectacles de la nature ne signifie pas être oisif,
bien au contraire. Les vacances riment de moins
en moins avec farniente et repos abusif sur la
plage ou glisse sur les pistes de ski, mais, au
contraire, avec le désir de plus en plus vif
d’apprendre, d’expérimenter, de découvrir.
oin du Palais de la découverte, rien ne
vous empêche d’appréhender intelligemment les richesses d’un ciel étoilé.
En toute rigueur astronomique, la période
estivale n’est pas la plus favorable pour
l’observation. En effet, les nuits sont
courtes et commencent tard. En revanche, vers
la fin de l’été, les nuits sont plus longues, ce qui
est un avantage non négligeable pour les
astronomes… Bien entendu, il faut s’entendre
sur le terme de « nuit ». La nuit ne commence
pas avec le coucher du soleil mais, comme
chacun le sait, sitôt passé le crépuscule.
L
Qu’est-ce qu’un crépuscule ?
La question peut paraître curieuse, voire
naïve, mais le crépuscule trouve dans le
vocabulaire de l’astronome une définition très
précise. Rappelons tout d’abord que l’on parlera aussi bien du crépuscule du soir que du
crépuscule du matin. En effet, les crépuscules
peuvent être définis comme les lueurs atmosphériques qui accompagnent les levers et les
couchers de Soleil. Lueurs qui créent une pollution lumineuse naturelle bien gênante.
On distinguera ainsi trois types de crépuscule :
– le crépuscule civil, qui se termine lorsque le
Soleil se trouve à une hauteur de 6° sous
l’horizon. C’est généralement le moment où
les lampadaires s’illuminent ;
– le crépuscule nautique, qui se termine
lorsque le Soleil se trouve à une hauteur de
12° sous l’horizon. C’est en deçà de ce niveau
de luminosité que le point en mer ne pouvait,
autrefois, plus se faire ;
– le crépuscule astronomique, qui se termine
quand le Soleil se trouve à une hauteur de 18°
sous l’horizon. Il fait alors complètement nuit.
Les observations astronomiques peuvent dès
lors décemment commencer.
Les crépuscules les plus longs coïncident
avec le solstice du 21 juin, soit le début de
l’été pour les observateurs européens, situés
dans l’hémisphère nord de la Terre. À la latitude de Paris (49° Nord), la nuit n’est jamais
complète (pour les astronomes en tout cas) du
13 au 30 juin ! Le reste de l’année, le crépuscule astronomique dure environ deux heures,
sauf durant les mois de juillet et d’août où les
crépuscules peuvent atteindre plus de trois
heures. Ainsi, les astronomes « travaillent »
moins en été qu’en hiver.
Quelques conseils
pour commencer
Bien entendu, que ces considérations techniques ne vous empêchent pas de pratiquer
l'été une astronomie de qualité. Cette pratique
est souvent associée aux lunettes et autres
télescopes. Pourtant, une simple paire de
jumelles et un appareil photo peuvent suffire
pour commencer une initiation. Mais c’est à
l’œil nu que tout doit débuter. Cependant, il
convient de préparer son observation. Pour les
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séances diurnes, un chapeau, de la crème
solaire, des lunettes de soleil et de l’eau sont
indispensables. Pour les séances nocturnes (et
même en été !), des vêtements chauds, des
couvertures, des bâches (au petit matin,
l’herbe est humide), une carte du ciel, une
lampe de poche avec un filtre rouge (pour
éviter d’être ébloui, le filtre peut être bricolé
sur n’importe quel type de lampe de poche),
de quoi écrire, une boisson chaude et un encas composent le paquetage minimal de tout
astronome amateur.
Le choix du site d’observation est également
important. Optez, si possible, pour un endroit
éloigné de toute pollution lumineuse et attendez dans l’obscurité la plus totale au minimum 20 minutes. C’est le temps dont ont
besoin vos yeux pour s’accoutumer au noir.
Alors, c’est 3 000 ou même 4 000 étoiles qui
vous seront accessibles. Tandis qu’elles semblent n’être que quelques dizaines en ville ou
au cœur d’un village éclairé.
N’importe quel guide pratique du ciel ou
séance de planétarium vous présentera les
principales constellations et une méthode
pour retrouver l’Étoile polaire (fig. 1 à 3). Je
ne m’attarderai donc pas sur ces thèmes.
Cependant, les cartes du ciel qui indiquent les
positions des constellations et des étoiles s’y
rapportant ne comportent pas d’échelle. Il est
déconcertant de ne pas retrouver les astres
imprimés sur le papier dans le ciel. Si l’on
veut se repérer sur la voûte céleste, il faut connaître l’écartement des étoiles les unes par
rapport aux autres. Cela revient à mesurer des
angles dans le ciel. Ce sont ces distances
angulaires qui vont permettre une approche
correcte du firmament. Mais à quoi correspond
au-dessus de sa tête une distance angulaire de
20 degrés, de 15 minutes ou de 6 secondes
d’arc ? Pour mesurer les angles dans le ciel,
une méthode simple consiste à se servir de ses
mains. En effet, bras tendu, une main écartée
vaut environ 20°, le poing fermé 10° et la
largeur du pouce 2°. De plus, les diamètres
apparents du Soleil et de la Lune correspondent à un demi-degré, soit 30’.
Vous êtes maintenant paré pour suivre
décemment un stage pratique d’astronomie.
C’est l’objectif que se fixent les prochaines
pages.
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η
LA GRANDE OURSE
γ
δ
β
Les Gardes
{
ξ
ε
90˚
α
γ
β
η
ξ
ε
Pôle
90˚
α
+
δ
LA PETITE
OURSE
La polaire
LE COCHER
ε
α
γ
La chèvre
ou Capella
δ
β
η
α
CASSIOPÉE
FIGURE 1
Autour du pôle Nord.
L’Étoile polaire se trouve alignée avec les Gardes de la Grande Ourse, ce qui permet de la repérer
facilement.
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α
Deneb
δ
ε
γ
LE CYGNE
η
ε
χ
γ
δ
β
δ ξ
γ
β
Albireo
α
ξ
γ
LE DAUPHIN
η
ε
α
β
β
α
β
γ
ξ
Altaïr
ε
L' AIGLE
θ
Véga
LA LYRE
LA FLÈCHE
δ
α
δ
FIGURE 2
Le Triangle d’été.
Ses trois sommets sont Véga, dans la constellation de la Lyre, Deneb, dans la constellation
du Cygne, et Altaïr dans la constellation de l’Aigle. Ces trois constellations sont visibles
simultanément en France, de juillet à septembre toute la nuit.
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Kiffa Boréal
β
Kiffa
Austral
α
LA BALANCE
γ
β
ν
Antarès
ι
γ
δ
π
σ
α
ι
LE SCORPION
ε
µ
µ
π
ξ
ο
λ ν
δ
λ
γ
σ
ε
ι
ξ
η
χ
η
ι
θ
ξ
LE SAGITTAIRE
LA COURONNE
AUSTRALE
FIGURE 3
Le Scorpion et le Sagittaire.
Le Scorpion est une constellation des nuits d’été. Entre ses « pinces » se trouve la constellation
de la Balance. À sa gauche, se trouve la constellation du Sagitaire appelée aussi tea-pot par les
Anglo-Saxons.
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> Observation 1
Le mouvement diurne
Après avoir attendu le début de la nuit, polaire nous semble alors immobile et devient
familiarisez-vous avec les positions des astres ainsi le « pivot » du mouvement apparent du
visibles en début de nuit.
ciel, appelé mouvement diurne.
Par ailleurs, n’importe qui a pu être surpris
Que voir ?
de constater à quelle vitesse le Soleil pouvait
Rapidement, on remarque que les constella- se coucher. La vitesse de ce mouvement
tions semblent bouger. Plus globalement, les apparent est la même en qui concerne les
astres se lèvent vers l’est et se couchent vers étoiles. En effet, la Terre tourne toujours à la
l’ouest en donnant l’impression de tourner même vitesse sur elle-même. Ainsi, la course
autour de l’Étoile polaire.
des astres s’effectue toujours au même
rythme.
Interprétation
Contrairement à ce qui a longtemps été prétendu, ce n’est pas l’Univers avec ses étoiles et
ses planètes qui tourne autour de la Terre, mais
bien notre planète qui tourne sur elle-même,
d’ouest en est et en 24 heures. Bien entendu, je
n’ai pas la prétention de vous l’apprendre.
Mais posez-vous ces questions : depuis combien de temps savez-vous que la Terre tourne
sur elle-même ? Qui vous l’a enseigné ? Et
surtout, comment le vérifier par vous-même ?
À moins d’être astronaute, personne ne peut
avoir le privilège de voir la Terre tourner sur
elle-même. Pourtant, des expériences en
apportent la démonstration, telle l’expérience
du pendule de Foucault.
Néanmoins, chacun sait que la Terre tourne
sur un axe qui passe par ses pôles. En plantant
un poteau à la verticale du pôle Nord de la
Terre, et en l’élevant indéfiniment vers les
astres, il pointerait une région fixe du ciel : le
pôle Nord céleste, prolongement du pôle
Nord de la Terre dans le ciel. Se trouvant à
proximité du pôle Nord céleste, l’Étoile FIGURE 4
Appareil photo numérique sur un trépied.
© S. Fontaine.
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une étoile bien brillante et photographiez-la.
Ensuite, dans le mode lecture de l’APN,
grossissez au maximum l’image obtenue
précédemment. Pour garantir une image
nette, il faut que l’étoile soit la plus « ronde »
possible. Recommencez l’opération autant
que nécessaire car le bon résultat final de
l’expérience en dépend !
– déclenchez en notant l’heure ;
– pendant toute la durée de la pose, prenez
garde à ce qu’aucune lumière ne soit allumée
à proximité et ne touchez plus à l’installation.
Evitez même de marcher, les vibrations produites par vos pas altéreraient inéluctablement l’acquisition de l’image ;
– après une pose de 20 minutes minimum,
refermez l’obturateur.
FIGURE 5
Photographie du mouvement diurne,
prise en très longue pose.
© S. Fontaine.
Expérimentation
Le mouvement diurne peut donc facilement
être observé mais il peut également être mis
en évidence par l’utilisation de la photographie. Appareils argentiques ou numériques
dotés d’un mode « longue pose », ou pose
« B », donnent des résultats très intéressants.
Après avoir installé l’appareil photo sur un
pied bien stable (fig. 4), visez la direction de
l’Étoile polaire et conformez-vous aux
instructions suivantes :
– placer le déclencheur souple ou programmer le minuteur ;
– réglez la netteté à l’infini. Si vous disposez
d’un appareil photo numérique (APN), visez
Résultats
Après un temps de pose de plusieurs
dizaines de minutes, toutes les étoiles se sont
déplacées autour de l’Étoile polaire et ont
tracé des arcs de cercle centrés sur le pôle
Nord céleste (fig. 5). On peut chercher à
reconnaître les constellations. Pour ce faire,
posez un calque sur la photographie et notez
la position des étoiles les plus brillantes au
début de la pose. Ce type de cliché porte le
nom de filé d’étoiles. Le filé sera d’autant
plus grand que la pose sera longue. En choisissant judicieusement un premier plan, vous
pourrez aussi composer une image très esthétique.
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> Observation 2
Découvrir les couleurs des étoiles
Une fois vos yeux correctement accoutumés
à l’obscurité, regardez très attentivement les
étoiles les plus éclatantes.
Que voir ?
Dans de bonnes conditions d’observations,
et à l’œil nu, on remarquera que les étoiles ne
sont pas toutes blanches. En effet, de la même
manière que le Soleil est jaune, d’autres
étoiles sont rouges, orange ou bleues. Seules
les étoiles les plus brillantes offrent leur
couleur à l’observateur. Avec une paire de
jumelles, ce sont des milliers d’étoiles qui, à
leur tour, révèlent leur teinte (fig. 6).
Interprétation
La couleur d’une étoile est directement liée
à sa température de surface. À l’inverse des
codes de couleur des robinets, les étoiles
bleues sont les plus chaudes, au moins
10 000 °C, tandis que les étoiles rouges sont
les moins chaudes, 3 000 °C environ. Les
étoiles jaunes comme le Soleil, avec une
couleur intermédiaire entre le bleu et le rouge,
ont une température de surface également
intermédiaire de 6 000 °C environ. Là encore,
une méthode photographique simple permet
de bien mettre en évidence cet état de fait.
Expérimentation
Après avoir installé votre dispositif de même
que pour l’expérience précédente, pointez
l’appareil photo en direction de l’étoile
Antarès, dans la constellation du Scorpion
(fig. 3). Si possible en zoomant, effectuez à
nouveau une longue pose pour mettre en évidence le mouvement apparent des astres. Si
vous disposez d’un APN, choisissez la sensibilité numérique la plus forte (800 ou 1 600
ISO) et procédez à des temps de poses plus
courts que précédemment (de l’ordre d’une
FIGURE 6
Les étoiles n’ont pas toutes la même couleur.
Sur ce filé d’étoiles, certaines apparaissent blanches,
d’autres jaunes ou bleues.
© S. Fontaine.
vingtaine de secondes) mais en défocalisant.
C’est-à-dire en prenant délibérément une
image « floue » des étoiles. Procédez à ces
mêmes opérations sur l’étoile Véga, dans la
constellation de la Lyre (fig. 2).
Résultats
Sur les « filés d’étoiles » et les images
« floues », la couleur des étoiles apparaît nettement. Antarès est rouge et Véga est bleue.
Attention, toutefois car la couleur bleue est
difficile à voir à l’œil nu et délicate à rendre
compte sur une photographie. En effet, notre
œil n’est pas très sensible à cette couleur et la
saturation est vite atteinte en photographie, ce
qui a pour conséquence de donner une image
blanche de l’étoile. Cependant, avec un peu
d’entraînement, ces deux méthodes rendent
bien compte des colorations stellaires.
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> Observation 3
Des étoiles filantes par milliers
Toute l’année, l’observation d’étoiles
filantes est possible. Mais, à certains
moments, ce sont de véritables pluies qui s’abattent sur la planète. Nul besoin de parapluie
pour en profiter et encore moins de jumelles
ou de télescope. C’est à l’œil nu que le spectacle est le plus merveilleux.
Que voir ?
Les étoiles filantes apparaissent comme de
fugitives traînées lumineuses (fig. 7). Avec un
peu de patience et de chance, vous aurez l’oc- FIGURE 7
casion d’en compter jusqu’à plusieurs Pluie d’étoiles filantes.
dizaines par minute. Le phénomène ne dure Les météorites paraissent émaner d’un même point
qu’une fraction de seconde. Mais les plus bril- appelé « radiant ». © Palais de la découverte.
lantes peuvent être admirées pendant
plusieurs secondes, laissant derrière elles une du mois d’août. Cette année, le moment le
traînée persistante (de quelques secondes à plus favorable pour observer les Léonides est
quelques dizaines de secondes).
prévu dans la nuit du 17 novembre. Toutes ces
poussières proviennent de la comète 109 P
Interprétation
Swift-Tuttle. Le nom de ces pluies d’étoiles
Contrairement à ce que laisse supposer leur filantes provient de la région du ciel d’où
nom, les étoiles filantes ne sont pas des semblent venir ces astres rapides (fig. 7). Les
étoiles. Encore moins des cadavres d’étoiles étoiles filantes des Perséides semblent ainsi
nous tombant dessus, comme on l’entend sou- venir de la constellation de Persée.
vent dire ! Dans sa course autour du Soleil, la
Terre croise sur son orbite des poussières et Expérimentation
autres « pierres ». Lorsque l’une d’entre elles Pour réaliser cette expérience dans de
pénètre dans l’atmosphère, elle se consume. bonnes conditions, il faut s’assurer de se trouTotalement ou partiellement. Lorsqu’une de ver sur un site très sombre avec un ciel sans
Installez-vous
confortablement.
ces pierres extraterrestres touche le sol, on Lune.
parle alors de météorite. Attirés par la Terre, Chaises longues, transats et autres couvertures
ces corps peuvent nous foncer dessus jusqu’à sont de rigueur pour cette observation. Soyez
la vitesse de 100 km/s ! À cette vitesse, le attentifs et révisez vos constellations (fig. 1 à
frottement contre l’air est si fort que la 3) en attendant de faire des vœux. Quant aux
matière s’échauffe brutalement jusqu’à s’illu- résultats, c’est à vous de juger.
miner. Régulièrement, la Terre croise sur son
orbite des régions riches en poussières (la plu- En bonus
part du temps laissées par une comète de pas- Pendant que vous scruterez le ciel à la
sage). De ces rencontres naissent les pluies recherche d’étoiles filantes, vous serez cerd’étoiles filantes. Les plus remarquables sont tainement amené à remarquer la présence de
celles des Quadrantides (début janvier), des points semblables à des étoiles assez brilÉta Aquarides (de fin avril à mi-mai), des lantes, se promenant dans les constellations
Léonides, des Géminides (autour du 14 pour disparaître subitement avant de toucher
décembre) et, bien sûr, des célèbres Perséides l’horizon. Il s’agira très probablement de
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satellites artificiels. Ils sont des centaines à
tourner autour de la Terre et sont très remarquables en raison de leur éclat et de leur
curieuse traversée céleste. Si vous en repérez,
dirigez-vous vers ce site : www.obsat.com,
afin de connaître l’origine et l’objectif du
satellite. Mais ne vous trompez pas d’interprétation quant à leur éclat. C’est le Soleil qui
les éclaire et non pas un dispositif lumineux
qui leur serait propre. Lorsqu’un satellite disparaît du ciel alors qu’il se trouve encore haut,
c’est qu’il passe dans l’ombre de la Terre. La
Station spatiale internationale (ISS) est, elle
aussi, fréquemment visible au-dessus de la
France comme un point étonnamment brillant. Mais comment savoir si ce que vous
observez est bien l'ISS ? Si vous allez sur la
page http://esa.heavens-above.com/esa/iss_
step1.asp, qui vous indique où se trouve l'ISS
au moment précis où vous allez sur le site,
vous saurez au moins si elle se trouve audessus de la France !
> Observation 4
Mouvements et phases de la Lune
La Lune, l’astre le plus proche de la Terre,
est bien changeant : parfois visible ou invisible, parfois pleine ou sous la forme d’un
croissant visible le matin, ou le soir. Comment
expliquer ces changements d’aspect et de
position ? L’observation de ces phénomènes
peut apporter des éléments de réponse. Alors,
observons !
a)
Que voir ?
Le principe de cette expérience est d’observer régulièrement la Lune sur un mois
entier. L’idéal consiste à noter l’heure de l’ob- b)
servation, l’aspect et éventuellement la position par rapport aux étoiles de notre satellite.
L’utilisation de la photographie est conseillée.
Pour vos repérages, vous pouvez vous aider
d’un calendrier précisant les phases de la
Lune. Pour information, voici les dates des
phases les plus remarquables pour le mois de
septembre :
04 septembre : DQ (Dernier Quartier),
11 septembre : NL (Nouvelle Lune),
19 septembre : PQ (Premier Quartier),
FIGURE 8A) et B)
26 septembre : PL (Pleine Lune),
Photographies du déplacement de la lune
03 octobre : DQ Dernier Quartier).
On peut rapidement mettre en évidence le devant les étoiles. © S. Fontaine.
mouvement de la Lune en notant sa position
par rapport à des repères fixes comme les
étoiles (fig. 8). La Lune tourne autour de la
Terre. L’intervalle moyen entre deux retours
consécutifs de la Lune devant une même
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Lumière solaire
Nouvelle lune
Croissant du soir
Croissant du matin
1
2
Premier quartier
8
3
Dernier quartier
7
4
6
5
Lune gibbeuse
Lune gibbeuse
Pleine lune
1
2
3
4
FIGURE 9
La Lune, telle qu’on la voit de la Terre.
Lorsque la Lune est dans la direction
du Soleil, c’est la Nouvelle Lune.
Le satellite présente à la Terre sa partie
non éclairée. Elle est invisible dans le ciel.
À mesure que la Lune va tourner autour
de la Terre, sa partie éclairée va
apparaître de plus en plus, comme un fin
croissant qui va « s’épaissir ».
Environ une semaine après la Nouvelle
Lune, c’est le Premier Quartier. La Lune
se trouve à 90° du Soleil ; elle se lève en
milieu de journée, culmine vers le coucher
du Soleil et se couche en milieu de nuit.
Puis la Lune devient gibbeuse (bossue)
jusqu’à la Pleine Lune.
La Lune se trouve alors à l’opposé du
5
6
7
8
Soleil (par rapport à la Terre). Elle nous
présente entièrement sa partie éclairée
et est toute « ronde » dans le ciel. Elle
brille toute la nuit, se lève au coucher du
Soleil et se couche à son lever. C’est le
moment le plus défavorable pour
observer le ciel. La lumière engendrée
par une Pleine Lune est suffisante pour
lire un livre ! Autant dire que notre
satellite devient alors une source de
pollution lumineuse très gênante.
Passée cette phase, la Lune décroît
jusqu’à la Nouvelle Lune en passant par
le Dernier Quartier. Lors de cette phase,
la Lune se lève en milieu de nuit, culmine
au lever du Soleil et se couche vers le
milieu de la journée.
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Soleil
27,3 j
29,5 j
FIGURE 10
Différence entre
révolution sidérale
(27,3 j.) et révolution
synodique (29,5 j.).
Pendant que la
Lune tourne autour
de la Terre, la Terre
tourne autour
du Soleil. Donc,
si la Lune revient
à une position
précise de son
orbite au bout
de 27 jours
et 8 heures (1 et 2),
il faut qu'elle tourne
encore un peu
pour être dans la
même position par
rapport à la Terre
et au Soleil (3).
3
Terre
Pleine lune
2
Pleine lune
1
Vers l'étoile
Vers l'étoile
Terre
Pénombre
Soleil
Ombre
Orbite de la lune
FIGURE 11
Principe de l’éclipse de Lune.
Il y a éclipse de Lune lorsque la Lune passe dans le cône d'ombre qu'engendre la Terre en
tournant autour du Soleil.
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étoile vaut 27 jours 7 heures et 43 minutes.
C’est la révolution sidérale. Chaque jour, elle
se décale par rapport aux étoiles d’environ
13 ° vers l’est. Ce déplacement important est
donc facile à mettre en évidence. De plus, en
l’espace de seulement une heure d’observation, la Lune se décale de l’équivalent de son
diamètre. Vérifiez-le en vous référant à une
étoile bien brillante.
La Lune est éclairée par le Soleil. D’un côté,
il y fait jour, de l’autre, il y fait nuit. À mesure
qu’elle va tourner autour de la Terre, sa position va donc changer dans le ciel. Et elle va
traverser chacune des 13 constellations du
zodiaque (Ophiuchus vient s’ajouter aux
12 signes du zodiaque, nom de la bande du
ciel où vont s’observer les principaux corps
du système solaire et qui est situé dans le prolongement du plan de l’écliptique). Depuis la
Terre, elle va présenter différentes phases
(fig. 9). En effet, la partie de la Lune éclairée
par le Soleil est plus ou moins orientée vers la
Terre. C’est la progression de ces change-
ments d’aspect que l’on appelle les phases de
la Lune. Un cycle complet, la lunaison, dure
environ 29 jours 12 heures et 44 minutes.
C’est la révolution synodique, qui correspond
à l’intervalle moyen de temps entre, par exemple, deux Pleines Lunes successives. La différence entre révolution sidérale et révolution
synodique s’explique par le mouvement de la
Lune autour de la Terre, combiné au mouvement de la Terre autour du Soleil (fig. 10).
Au cours de ces observations, vous constaterez que si la Lune est par exemple visible
le soir, elle se lève environ 50 minutes plus
tard le lendemain. Si ces observations sont
sérieusement réalisées, vous constaterez
également la différence entre révolution
sidérale et révolution synodique. Notez enfin
que la Lune est souvent parfaitement visible
en plein jour.
La régularité des phases de la Lune ont permis la création des premiers calendriers, dont
certains sont toujours en usage aujourd’hui, tel
le calendrier musulman.
> Observation 5
Mesurer la distance de la Terre à la Lune
Un peu d'histoire
La première estimation de la distance
Terre-Lune a été faite par Aristarque de
Samos (vers 310-230 av. J.-C.). Sa méthode
ne donnait pas de résultat en terme de valeurs
absolues mais sous forme de proportion.
Ainsi, il avait calculé une distance TerreLune d’environ 60 rayons terrestres. Vers 200
av. J.-C, Ératosthène proposa une valeur du
diamètre de la Terre à partir de la mesure de
sa circonférence (ce qui sous-entend que les
astronomes de l'époque pensaient que la
Terre était ronde, ce qui ne sera pas forcément le cas par la suite !). Il savait qu’au solstice de juin, à midi, le Soleil se trouvait
directement au-dessus de la ville de Syène
(dans le sud de l’Égypte, l’actuelle Assouan).
L’histoire raconte que les rayons du Soleil
parvenaient à toucher le fond d’un puits étroit
et profond. En revanche, observé le même
jour, à midi, mais à Alexandrie (dans le nord
de l’Égypte), le Soleil ne se trouvait pas au
zénith de la ville. Les objets projetaient une
ombre. Ératosthène mesura l’ombre d’un
obélisque à Alexandrie et calcula que les
rayons du Soleil tombaient à un angle de 7°
par rapport à la verticale. Il supposa que le
Soleil était assez éloigné de la Terre pour que
l’on puisse considérer que les rayons qui
tombent à Alexandrie sont parallèles à ceux
qui tombent au même moment à Syène. Si la
circonférence de la Terre est de 360°, la distance d’Alexandrie à Syène égale les 7/360
de la circonférence de la Terre. À l’époque
d’Ératosthène, cette distance est connue. En
unités modernes, elle était estimée à environ
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820 kilomètres. Tous les éléments ont ainsi
été réunis pour mesurer la taille de la Terre !
820 x 360/7 = 42 000 kilomètres.
La valeur réelle est proche de 40 000 kilomètres, ce qui représente un écart d’à peine
5%!
Un demi-siècle plus tard, Hipparque réussit
un autre exploit remarquable. Il mesura la distance de la Terre à la Lune. Son génie a été de
comprendre que la durée d’une éclipse de
Lune (fig. 11) est directement liée à la distance qui la sépare de la Terre. De plus, il connaissait la durée de la révolution synodique de
notre satellite (29,5 jours environ, soit
708 heures) et avait estimé que les éclipses de
Lune les plus longues duraient 2,5 heures.
Ainsi, les éclipses les plus longues occupent
0,35 % (2,5/708) du temps d’une révolution
complète de la Lune.
À partir de ces connaissances, Hipparque
déduisit que, pour que l’éclipse représente
0,35 % de l’orbite, il fallait que la Lune soit à
une distance correspondant à 32,5 diamètres
terrestres (en réalité la Lune se situe à une distance de 30 diamètres terrestres). S’appuyant
sur les travaux d’Ératosthène, Hipparque
détermina la distance Terre-Lune avec une
marge d’erreur de moins de 10 %.
Expérimentation
Un soir de Pleine Lune, disposez sur une
pique ou un poteau une balle de ping-pong.
En prenant du recul, placez-vous à la distance
depuis laquelle la balle cache exactement la
Lune et mesurez votre distance à la balle.
Pour déduire la distance Terre-Lune à partir
de cette expérience, les données nécessaires
sont en votre possession.
Résultat
Si votre balle de ping-pong a un diamètre de
4 centimètres (0,04 mètres), elle sera placée à
4,6 mètres de vous pour paraître aussi grosse
que la Lune. Le rapport distance/taille vaudra
4,6/0,04 = 115. Il en sera de même pour la
Lune dont la distance à la Terre vaudra 115
fois son diamètre réel, soit 3 476 kilomètres
(valeur moderne) multiplié par 115. Soit une
distance de 400 000 kilomètres environ.
De la même façon, en pleine journée, l’om-
bre de la balle se projette à la même distance
de 4,6 mètres. Ce qui montre que, vus depuis
la Terre, la Lune et le Soleil ont un même
diamètre apparent et cela rend de ce fait possible le phénomène des éclipses totales de
Soleil. Cependant, les distances Terre-Lune et
Terre-Soleil varient. Les diamètres apparents
varient donc également. Ainsi, la Lune semble
parfois trop petite pour masquer totalement
notre étoile. Elle laisse visible un anneau de
Soleil (éclipse annulaire de Soleil).
Remarquez que l’on ne trouve pas toujours
la valeur 115 selon que la Lune se trouve au
périgée ou à l’apogée : la distance Terre-Lune
varie de 356 000 kilomètres à 407 000 kilomètres. De nos jours, c’est quotidiennement
que cette distance est mesurée précisément.
Grâce aux tirs laser effectués depuis plusieurs
observatoires sur les réflecteurs disposés par
les astronautes des missions Apollo, la précision est désormais de l’ordre du centimètre.
Conclusion
Nombreuses sont les étoiles et les planètes à
observer toute l'année. Même si vous ne
partez pas en vacances loin des agglomérations, rien ne vous empêche de mettre en pratique l’essentiel des conseils et suggestions
d’observations précédentes. Souvent, les
meilleurs souvenirs que l’on garde d’une
soirée d’observation sont liés aux imprévus et
aux heures de contemplation, ou de débat, que
le regard porté sur les astres suscite. Repérer
les planètes du soir, dans les dernières lueurs
du crépuscule, est un moment émouvant à
vivre. Et nul besoin d’être un grand connaisseur des choses du ciel pour le faire !
S. F.
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Médiateur scientifique au département
d’astronomie-d’astrophysique du Palais
de la découverte, Sébastien Fontaine
est observateur associé à l’observatoire
du pic du Midi. Il coordonne
régulièrement des expositions
scientifiques à l’étranger.
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