Supply Chain Magazine 103 - Enquête e

Transcription

Supply Chain Magazine 103 - Enquête e
ENQUÊTE
e-commerce
Des livraisons
à la carte
C
Les points relais se sont développés historiquement
comme une alternative à la livraison à domicile.
Aujourd’hui, c’est au tour du retrait en magasin et des
consignes automatiques. Et demain, ne doit-on pas s’attendre à une transformation de l’écosystème de la livraison avec l’arrivée des géants du Web et des start-up de
l’économie collaborative ?
oup de tonnerre en
2015 ! La livraison à
domicile est passée
pour la première fois
sous la barre des 50 %,
49 % pour être exact.
Les points relais quant
à eux représentent 45 % des livraisons,
le retrait en magasin et les consignes
respectivement 6 % (en croissance de
2 points par rapport à 2014) et 0,3 %.
De nombreuses études rapportent que
les options de livraison sont un « facteur
de recrutement » de nouveaux clients.
Stéphane Tomczak, Fondateur de Deliver et Coordinateur pour la Fevad de
l’Observatoire logistique e-commerce,
nuance ce constat : « L’e-commerce
reste avant tout une affaire de produit
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N°103 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - AVRIL 2016
et de prix. En revanche, la livraison
joue un rôle extrêmement important
dans la fidélisation ». Quels sont les critères de choix d’un mode de livraison
plutôt qu’un autre ? « Avec le phénomène mondial de la gratuité des livraisons, le prix est un élément prépondérant. La commodité est aussi un aspect
important. Le consommateur souhaite
une livraison perturbant le moins possible son quotidien », estime Stéphane
Tomczak. Jean-Marc Soulier, Président
de Metis Consulting, identifie, quant à
lui, 4 attentes prioritaires : « La praticité (choix des modes, des lieux, des
délais, des créneaux horaires,des solutions de retour, etc.), la vitesse, la fiabilité et l’interactivité. Le commerçant
doit être capable d’assurer le suivi,
©M IPAN-FOTOLIA
de communiquer des informations
précises au consommateur et de lui
proposer une re-planification de la
livraison ». La plupart des experts
croient à toujours plus d’accélération
des flux et au raccourcissement des
délais. « A iso-prix de vente, la vitesse
améliore le taux de transformation.
C’est ce qu’a compris Amazon qui
garantit en France une livraison à J+1
pour les clients Prime et a même lancé
depuis quelques mois un service de
livraison le jour même en soirée sur des
créneaux de 2 h. Le service attendu
aujourd’hui en France est de plus en
plus la livraison le lendemain. Aux
USA, Amazon relocalise depuis 2 ans
ses entrepôts à proximité des grosses
agglomérations dans lesquelles il pro-
… aux consignes automatiques
Les réseaux, aujourd’hui très marginaux, sont en cours de constitution
essentiellement dans des lieux à forte
fréquentation. Inpost, producteur et
opérateur de consignes automatiques,
se fixe comme objectif à horizon fin
2018 l’installation de 2.500 Abricolis,
contre 320 à présent. Il a annoncé en
octobre dernier avoir conclu un partenariat avec Total pour équiper une
centaine de stations-service à l’extérieur des boutiques. Fin novembre
Le retrait en magasin,
dans l’air du temps
A la croisée du point retrait et du
magasin, le Groupe La Poste a lancé il
y a 18 mois son concept de Pickup
Store, une boutique, située sur le trajet
domicile-travail, offrant aux e-acheteurs une solution de livraison de colis
et un accès à des services pratiques du
quotidien (pressing, cordonnerie, café,
etc.). 3 gares en sont pour l’instant
équipées : Saint-Lazare, Ermont-Eaubonne et Evry Courcouronnes. Ce
concept embryonnaire en France existe
déjà en Angleterre à travers le réseau
Doddle Store, constitué de 45 boutiques. A propos de magasins, qu’en
est-il du phénomène du moment, le
retrait en boutiques ? Le rempart des
distributeurs contre les assauts des pure
players, entend-on régulièrement. Click
and collect, web-to-store, … tous ces
anglicismes défraient la chronique
pour évoquer le sujet de l’omni-canal.
Augustin
Gueldry,
©COLICOACH
Fondateur
de
Colicoach
Jean-Marc
Soulier,
©M ETIS CONSULTING
Président
de Metis
Consulting
Stéphane
Tomczak,
Fondateur
de Deliver et
Coordinateur
pour
la Fevad de
l’Observatoire
logistique
e-commerce
©ST
Des points relais…
Vous l’avez compris, la diversité des
canaux proposés par le commerçant est
un atout précieux. Historiquement, la
première alternative à la livraison à
domicile mise en œuvre fut les points
relais. Il s’agit de la solution hors domicile la plus aboutie, le territoire étant
correctement maillé et les clients habitués à cette alternative. On compte
4 réseaux en France : Pickup (7.800 relais)
du Groupe La Poste, UPS Access Point
anciennement Kiala (4.500 relais), Mondial Relay du Groupe 3SI (4.300 relais)
et Relais Colis du groupe français Redcats (4.200 relais). Pour l’e-commerçant,
elle est synonyme de mutualisation des
flux et donc d’économies sur le coût de
distribution, pour le client, d’un prix
inférieur à la livraison à domicile. « La
limite des points relais réside dans la
pérennisation des réseaux car les commerçants considèrent souvent leur
rémunération insuffisante au regard de
la surcharge de travail générée », alerte
Augustin Gueldry, Fondateur de Colicoach. Autre limitation, les horaires. Les
consommateurs souhaitant s’affranchir
de cette contrainte, les consignes automatiques, très répandues en Allemagne,
ont récemment fait leur apparition en
France. Celles-ci, susceptibles d’être
accessibles 24h/24 et 7j/7, sont également utilisables pour les retours.
2013, Neopost Shipping a lancé Packcity. A l’inverse d’Inpost, sa stratégie
ne consiste pas à constituer un réseau.
Après une première association avec
Relais Colis, Neopost Shipping a signé
un contrat avec La Poste visant à installer 1.000 consignes Packcity en
France (1/3 en bureau de Poste, 1/3 dans
les gares, 1/3 dans le domaine public).
250 sont déployées à ce jour. Les
consignes intéressent aussi les distributeurs dont les volumes de retrait en
magasins sont importants. Neopost
Shipping, qui considère ce matériel
pertinent à partir de 20 à 30 colis par
jour, a installé 20 consignes chez
Decathlon, utilisées exclusivement
pour gérer les flux du distributeur. Des
tests sont actuellement en cours chez
Auchan, en partenariat avec Mondial
Relais, également pour des flux tiers
(hors Auchan). Néanmoins, certaines
questions restent en suspens : les
moyens financiers seront-ils mis en
œuvre suffisamment rapidement pour
permettre aux consignes de s’inscrire
dans le paysage auprès de la clientèle ?
Quid des difficultés d’implantation
potentielles sur les voies publiques ?
Sans oublier, la démonstration nécessaire de la pertinence du modèle économique face au réseau de points relais
déjà existants.
Denis
Labastrou,
Directeur
Commercial
Groupe
de SED
Supply Chain
Solutions
©SED
pose un service « same day », inclus
dans l’offre Prime. Par ailleurs, des
tests y sont actuellement en cours pour
de la livraison en H+1 », complète JeanMarc Soulier. Transporter un colis dans
l’heure requérant la disponibilité du
produit à proximité du lieu de livraison,
les magasins sont un atout précieux
pour les distributeurs traditionnels.
AVRIL 2016 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°103
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ENQUÊTE
e-commerce
En général, ce mode de distribution,
déjà mature au Royaume-Uni, est proposé gratuitement aux e-consommateurs dans la mesure où le distributeur
mutualise ses flux. A cela s’ajoutent les
gains en matière de trafic dans ses
magasins. « Le click and collect se
développe très fortement en France et
représente même environ 40 % du CA
généré en ligne par les grandes
enseignes (Fnac, Darty, Décathlon, etc.)
contre 0 il y a seulement 2 ou 3 ans »,
détaille Stéphane Tomczak. Autre illustration avec le cas de Cdiscount qui
s’appuie sur le réseau physique de sa
maison mère, les magasins Casino. Rue
du Commerce dont l’acquisition par
Carrefour a été finalisée en début d’année profitera certainement aussi du
réseau de magasins du distributeur.
Un maillage insuffisant
Mais, contrairement à ce qu’oublient
de rappeler les distributeurs, tout n’est
pas complètement rose… « L’immense
majorité des réseaux de vente, à l’exception de l’alimentaire, ont un maillage insuffisant. Les réseaux de distri-
entrepôts. Outre-Manche, au-delà de sa
propre filiale e-commerce (George.com),
Asda, aidé de l’éditeur Manhattan,
ouvre son réseau physique à d’autres
e-marchands pour le retrait de commandes et la gestion des retours. Et
demain ? Dans la veine de l’économie
collaborative, la piste des « voisins »
fait son apparition avec notamment la
société Voisins Relais dont l’ambition
est de constituer d’ici 2 ans une communauté de 45.000 voisins, bien plus
que n’importe quel réseau de points
relais. L’assurance pour le transporteur
de trouver son destinataire dès le premier passage.
La livraison à domicile,
choix N°1 des consommateurs
Au-delà de ces canaux de livraison
imaginés pour réduire les coûts des
e-commerçants et in fine, celui du
consommateur, gardons à l’esprit que la
livraison à domicile reste la préférence
des clients. « Les études d’intention révèlent qu’environ 80 % des consommateurs préfèrent la livraison à domicile,
toute chose égale par ailleurs. Dans les
©I NPOST
Consigne
automatique
Abricolis (Inpost)
à Nîmes
bution sont souvent constitués de seulement quelques centaines ou dizaines
de points de vente, autrement dit parfois très éloignés des consommateurs,
explique Augustin Gueldry. Et d’ajouter : L’enjeu consiste à définir la manière
d’intégrer des processus très opérationnels de gestion de flux de marchandises
(réception, contrôle, accueil de la clientèle pour les retraits, etc.) aux opérations de vente. Les magasins doivent
être suffisamment structurés (SI, organisation, place disponible, etc.) pour
accueillir cette nouvelle activité. » Les
grandes enseignes se retroussent justement les manches pour tenter d’appliquer aux magasins les bonnes pratiques de préparation en place dans les
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faits, elles représentent moins de 50 %
des volumes. Cette différence s’explique
par le prix des frais de port », confirme
Stéphane Tomczak. Une livraison à
domicile, dans un délai rapide à un coût
compétitif ? Une articulation jugée
comme impossible il y a encore 3 ans,
résignant le consommateur à opter pour
des solutions alternatives. « Nullus tenetur ad impossibile », tel fut l’adage martelé par les e-commerçants. C’était sans
compter la révolution opérée par Amazon avec son offre « Premium » : des
livraisons à domicile illimitées à J+1
pour la modeste somme de 49 € par an.
Un véritable changement de paradigme.
Ces abonnements annuels, offrant des
livraisons « à volonté » en express, sont
également proposés par d’autres acteurs
tels que Cdiscount ou même la Fnac.
Mais à quel prix ? « 50 % des frais de
port ne sont pas refacturés par Amazon
à ses clients du fait de cette gratuité »,
révèle Augustin Gueldry. Pour Amazon,
il ne fait aucun doute que cet investissement est de nature marketing. L’objectif est clair : capter et verrouiller une
clientèle le plus vite possible. Cette
démarche de « recrutement » de nouveaux clients est agressive mais efficace.
Un client Amazon Prime par souci de
rentabiliser son abonnement est moins
tenté d’acheter ailleurs. En outre, il semble que la dépense moyenne des abonnés Prime soit largement supérieure à
celle d’un client ordinaire. Pour les petits
e-commerçants, le combat de la livraison est donc biaisé. C’est David contre
Goliath mais sans le « happy end ». Difficile de ne pas imaginer qu’une fois la
concurrence à terre, Amazon ne facturera pas le prix réel de la livraison…
Comment rivaliser ? Faire cadeau de la
livraison au consommateur au risque de
déposer le bilan très vite, ou la facturer
à son coût réel au risque de complètement se démarquer du « market
maker ». Difficile dans un tel contexte
de convaincre le client de payer le juste
coût logistique.
Le choc des titans
En outre, le géant de la toile fait ses
premiers pas dans le secteur de la
livraison… Amazon négocie actuellement la location d’au moins 20 Boeing
767 cargo pour assurer son propre fret
aérien sur le territoire américain, ouvre
des centres de tri, travaille d’arrachepied sur son prototype de drone, achète
des remorques, etc. En France, Amazon
a décidé de racheter 100 % du capital
de Colis Privé et ouvre ses propres
consignes (Amazon locker). Même si
l’idée initiale est de venir en complément et non en remplacement de l’offre existante, afin d’assurer les pics
d’activité pour lesquels les moyens
capacitaires du marché font défaut,
l’ambition est pourtant sans ambiguïté : intégrer la chaîne logistique
dans sa globalité. Pourquoi ne pas imaginer à terme Amazon proposer ses
prestations de transport à d’autres
e-commerçants sur le modèle de son
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ENQUÊTE
e-commerce
Suite de la page 42
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N°103 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - AVRIL 2016
Virginie Ducrot
Présidente d’EnvoiMoinsCher.com
Aider les petits e-commerçants à améliorer
leur offre en matière de frais de ports
«
©ENVOI MOINSCHER.COM
Notre offre de services englobe des expressistes (UPS,
Fedex, TNT, Chronopost, DHL), des points relais (Relais Colis,
Mondial Relais, Pick Up), Colissimo ainsi que des transporteurs de palettes. Notre module de livraison s’intègre sur le
site e-commerce de nos clients. Ils ont accès instantanément
aux transporteurs avec lesquels nous travaillons et aux tarifs
pré-négociés par nos équipes (jusqu’à 75 % de remise). Cela
signifie pour eux, un seul interlocuteur, une seule facture et un
unique service client de qualité assuré par nos soins pour l’ensemble des transporteurs. Notre offre s’adresse aux petits ecommerçants avec des volumes modestes en quête de tarifs
plus compétitifs et souhaitant élargir la palette de transporteurs proposée à leurs
propres clients. Ils peuvent ainsi élaborer une vraie démarche marketing sur les
frais de port visant à augmenter le taux de conversion. ■ BS
La livraison :
un élément crucial de l’achat en ligne
©PRODUCTION PERIG-FOTOLIA
Star’s Services et l’Ifop ont conjointement mené une étude en novembre dernier
portant sur les attentes des consommateurs français en matière de livraison ecommerce. On y apprend que de manière spontanée, les répondants citent la
livraison comme le critère le plus important lors d’achats sur Internet. 1/4 des
clients déclarent changer d’e-commerçant après une mauvaise expérience de livraison. A l’inverse, une bonne expérience incite presque systématiquement à renouveler les achats sur le même site. On retrouve parmi les attentes concernant la
livraison : le prix (68 %), le respect des engagements (45 %), la traçabilité (37 %)
et la rapidité (31 %). On y découvre également que plus de la moitié des répondants seraient intéressés par une livraison le jour même et par une livraison sur
un créneau horaire de 2 h pour un prix de respectivement 4 € et 4,3 €. ■ BS
SOURCE : ÉTUDE D’APPÉTENCE POUR DES SERVICES DE LIVRAISON PREMIUMS – STAR’S SERVICE & IFOP
»
©FOTOLIA
programme de Fulfillment (FBA) pour
la logistique ? Mais serait-ce vraiment
une situation de rêve pour les petits ecommerçants de confier leurs flux à la
concurrence ? On peut en douter… Audelà d’Amazon, d’autres nouveaux
acteurs pointent leur nez sur le marché
de la livraison à domicile. Google fait
parler de lui avec son service de livraison par drone et ses fourgons autonomes de livraison. Si les drones
aériens vous paraissent encore romanesques, sachez néanmoins que depuis
mars, la société Starship Technologies
teste de la livraison de colis par drone
terrestre à Londres. L’économie à la
demande s’invite aussi dans la danse.
Uber avec UberRush aux Etats-Unis,
un service de livraison pour les commerçants qui s’appuie sur son réseau
de chauffeurs de VTC, mais aussi sur
des livreurs pouvant aussi bien être à
pied qu’en vélo. « Je crois beaucoup
à l’ubérisation des transports de livraison. Evidemment, cela exige une
réflexion en matière de cadre réglementaire (sûreté, sécurité, etc.) mais
cette tendance est inéluctable et même
une réponse évidente à la problématique de la livraison urbaine dans les
grosses agglomérations », nous confie
Denis Labastrou, Directeur Commercial
Groupe de SED Supply Chain solutions,
qui rappelle que « les premiers acteurs
de messagerie étaient des cars de transport de passagers dont l’utilisation
était détournée pour transporter sur les
toits des petits colis ». Le match de
demain risque d’opposer l’approche
traditionnelle des acteurs historiques
avec des moyens physiques à l’approche technologique reposant sur
l’économie collaborative et des platesformes interactives de mise en relation.
De nombreuses start-up dans le
domaine du crowd-sourcing (livraison collaborative au moyen d’une
communauté de particuliers) du dernier kilomètre voient le jour. L’émergence de ces jeunes sociétés visant à
réduire le coût du dernier kilomètre et
des géants du Web ne risque-t-elle pas
de freiner l’essor ou même de balayer
les solutions alternatives à la livraison
à domicile déjà en place (points relais)
ou en cours de développement (magasins, consignes, etc.) ? La réponse dans
quelques années… ■ BRUNO SIGUICHE
SOURCE : « CUSTOMER PULSE REPORT 2015 DE JDA
Ailleurs en Europe…
Une enquête (datant de 2015) menée
conjointement par JDA et Centiro Pulse
Report, au Royaume-Uni, en Allemagne et en
Suède, révèle que les retards de livraison sont
le problème N°1 des commandes en ligne.
Elle met également en évidence que les
consommateurs choisissent de plus en plus
les distributeurs en fonction des options de
livraison. « Au Royaume-Uni, 46 % des répondants ont choisi de faire leurs achats auprès
d’un distributeur qui offrait de multiples choix
de livraison au détriment de ceux qui n’en proposaient qu’un seul, suivi par 32 % en Suède
et 29 % en Allemagne. Alors que de nombreux distributeurs ont mis l’accent sur l’importance de la livraison rapide voire le jour même,
l’enquête indique que dans toute l’Europe, le
coût et la commodité sont des éléments plus
déterminants que la rapidité ». Les services
comme le « Click & Collect » ou le « Drive »
sont de plus en plus considérés comme des
alternatives à la livraison à domicile pour des
raisons de coût et de praticité. ■ BS
Epicerie, fruits & légumes, repas : Amazon
passe à table et accélère la cadence…
Après les Etats-Unis (avec Amazon Fresh), Amazon a lancé début mars au
Royaume-Uni, suite à la signature d’un accord avec la chaîne de supermarchés Morrisons, une offre de livraison concernant des produits secs,
frais et surgelés. Celle-ci est réservée aux détenteurs d’un abonnement
« Prime Now » et aux clients Amazon Pantry (service de livraison de produits d’épicerie lancé fin 2015 au Royaume-Uni). Rappelons que les clients
« Prime Now » peuvent y être livrés en 1 h en s’acquittant de 6,99 £ supplémentaires. Ils ont aussi la possibilité de recevoir gratuitement leur commande dans un créneau de 2 h le jour même entre 8 h et minuit, et ce,
tous les jours de la semaine. En février, c’est à Milan (Italie) que l’e-commerçant a lancé un service de livraison de fruits et légumes dans l’heure.
Amazon a par ailleurs annoncé en janvier l’extension de son service de
livraison de repas à domicile (Amazon Restaurants) à Chicago, la 6e ville
américaine à en bénéficier, pour laquelle le temps moyen de livraison est
de 39 min. D’autres « nouveaux » acteurs font leur entrée sur le marché de
la livraison à domicile. Google Express teste actuellement la livraison de fruits,
légumes, viandes et produits laitiers à Los Angeles et à San Francisco. Par ailleurs, UberEats a fait une arrivée remarquée à Paris en octobre dernier. Ce
service de livraison à domicile, déjà existant dans une dizaine de villes aux
Etats-Unis, propose une livraison… en moins de 10 min ! 10.000 km plus
à l’Est, Baidu, le géant de l’Internet chinois, livre aussi pour presque gratuitement des repas à domicile depuis 2011 via son offre Waimai. ■ BS
AVRIL 2016 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°103
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ENQUÊTE
e-commerce
La promesse logistique du Top 20 français
Isabelle Badoc
Chiffres clefs 2015
en France
publiés par la Fevad
■ 64,9 Md€ dépensés sur Internet
(+14,3 %)
46
à 78 € (environ -4 %) notamment liée
à l’utilisation croissante de la livraison
en points relais (la plupart du temps
gratuite) et à l’augmentation
de la fréquence d’achat
■ 23 transactions annuelles
pour les cyberacheteurs
(+13 % en nombre
de commandes,
+8 % des dépenses)
■ +10 % (>70 Md€)
attendu en 2016
©M LAMONT-FOTOLIA
SOURCE : B ILAN 2015 DE LA FEVAD
■ 835 M de transactions (+19 %)
■ Baisse du panier moyen annuel
N°103 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - AVRIL 2016
©GENERIX
* Etude réalisée, durant le 3e trimestre 2015, par Generix Group
sur la base des informations affichées en ligne par les leaders du
e-commerce (hors alimentaire) selon l’EC30 LSA - Toluna - PWC
Quelques données
logistiques
A l’occasion du salon e-commerce One to One, la Fevad et 3 autres membres fondateurs (WelcomeTrack, Neopost Shipping et DDS Logistics) de
l’Observatoire de la logistique e-commerce ont rendu public des chiffres
édifiants, fruits de l’analyse des données transmises par 1.000 marchands
entre janvier 2015 et février 2016 :
■ Click-to-possession : 5,3 j (de 3,5 j pour le point relais express à 17,1 j pour
le volumineux)
■ délai de livraison : 1,5 j ouvré
■ délais de préparation et expédition : 32 % le jour même, 95 % dans
les 2 j après la commande
■ Délais d’expédition et livraison : 4 % le jour même de
la commande, 60 % le jour même ou le lendemain,
94 % dans les 2 j après la commande
■ Taux de livraisons réussies
dès la 1ère tentative : 79 %
SOURCE : OBSERVATOIRE DE LA LOGISTIQUE E- COMMERCE – FEVAD
©GENERIX
Generix Group, en partenariat avec Bruno Durand (Université de Nantes), a examiné les initiatives logistiques menées
par 20 e-commerçants français (reconnus comme les leaders), hors alimentaire et hors service. « Nous avons étudié la
promesse logistique faite par chacun de ces sites : disponibilité du stock, délai, le prix et le lieu de la livraison », nous
explique Isabelle Badoc,
Product Marketing Manager
Supply Chain chez Generix
Group. Et de préciser :
« Nous estimons que l’offre
logistique influe à au moins
50 % sur la décision d’achat
du client final. Il s’agit donc
d’un véritable levier sur
lequel les e-commerçants souhaitent se différencier ». L’infographie suivante
représente les
principales bonnes
pratiques observées. ■ BS
ENQUÊTE
e-commerce
Christian Boileau
Directeur Supply Chain de Delamaison.fr (groupe Adeo)
« Nous veillons à apporter une réponse en
termes de disponibilité produit très rapide »
Le spécialiste de la décoration et du mobilier en ligne distingue 2 flux : les petits colis et les encombrants. En
découlent des modes de livraison sensiblement différents.
avec GLS à J+2/3, 10 % en J+1 avec
Chronopost. Le prix dépend du seuil
de commande, de la typologie du produit et du service de livraison. Nous
menons actuellement une réflexion
autour du bon positionnement des
frais de ports.
Supply Chain Magazine: Quels types
de produits propose Delamaison.fr ?
Christian Boileau : Delamaison est
un pure player dans le monde de la
décoration, du mobilier de maison
intérieur et extérieur. La société a été
créée en 2006, puis rachetée en 2012
par Adeo. La Supply Chain de Delamaison se caractérise par une double
problématique : des produits dits
mécanisables de petit format (jusqu’à
30kg) nécessitant des modes de transport relativement standard, et des produits encombrants (meubles, canapés,
etc.) plus compliqués à transporter.
SCMag : Quid des produits
encombrants ?
C.B. : Nous veillons à apporter une
réponse en termes de disponibilité
produit très rapide, ce qui n’est pas le
cas des marchands traditionnels de
meubles dont les délais de livraison
sont souvent de plusieurs semaines ou
mois. Nous travaillons donc sur stock
et essayons de rendre notre offre de
transport la plus attractive possible.
SCMag : Au-delà des transporteurs,
comment améliorer la qualité
de service de la livraison ?
C.B. : La qualité de l’OMS impacte
directement celle de la livraison. Par
exemple, pour nos produits constitués
de plusieurs cartons stockés sur des
Delamaison en chiffres
■ 500 marques
■ 50.000 références
■ 1.500 nouveautés/mois
■ 60 M€ CA
■ jusqu’à 3 M de visiteurs uniques
mensuels
■ 40.000 m² d’entrepôt
■ 180 salariés
48
N°103 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - AVRIL 2016
©DELAMAISON
SCMag : La livraison est-elle un
facteur de différenciation par rapport
aux concurrents ?
sites différents, l’OMS doit être capable de regrouper au bon endroit les
bonnes expéditions pour les remettre
au bon transporteur. Par ailleurs, le
TMS impacte aussi directement la
qualité de la livraison. L’évolution de
nos outils est donc un de nos axes
majeurs de travail.
SCMag : Que proposez-vous pour
les petits colis en matière de canal
de distribution, de délai et de prix ?
C.B. : La livraison à domicile est assurée par GLS. Sa solution FDS (Flex
Delivery Service) permet au client de
recevoir l’information concernant la
livraison et lui donne la possibilité de
modifier, si nécessaire, la date et/ou le
lieu. Nous avons récemment mis en
place avec Chronopost une livraison
express. Enfin, nous proposons une
livraison en point Relais avec Mondial
Relais. Les flux se répartissent environ
à 50/50 entre ces 2 canaux. 90 % des
livraisons à domicile sont réalisées
C.B. : Nous travaillons avec Relais
Colis pour la livraison à domicile et
avec Mondial Relais pour les points
relais pour encombrants. Bien qu’il y
ait une forte demande de nos clients
(en raison du prix), l’offre existante en
points relais pour encombrants est
malheureusement insuffisante. Nous
étudions actuellement au sein des
enseignes Adeo la possibilité de mise
en place d’un système alternatif. Par
ailleurs, nous avons élaboré une offre
de transport interne à Delamaison en
région parisienne avec nos propres
louageurs. Cette solution supprime les
ruptures de charge (délais raccourcis)
et fournit une qualité de service très
élevée. Nous souhaitons la déployer à
plus grande échelle dans les mois à
venir. Nous avons également développé un « drive » (<1 % des volumes),
c’est-à-dire un point de livraison dans
notre entrepôt des Ulis, auquel nous
avons adjoint un magasin. D’une
manière générale, nous souhaitons
faire évoluer notre offre transport en
améliorant la qualité de notre panel
de transporteurs et en enrichissant les
services proposés. Pour les e-commerçants, le montant des frais de ports
facturés est toujours inférieur à celui
de la prestation logistique et au coût
du transport. Mais cet écart se réduit
sur des prestations à haute valeur
ajoutée. ■
PROPOS RECUEILLIS PAR
BRUNO SIGUICHE
ENQUÊTE
e-commerce
Julien Laurent
Président de MissNumerique.com
« Nous choisissons de faire payer la livraison
considérant que ce service a une valeur »
Le pure player du matériel photographique a étoffé depuis peu son offre de livraison avec l’ouverture d’une
boutique. Au-delà de la palette des choix proposés au client, l’e-commerçant insiste sur l’importance de la qualité
de la livraison.
Julien Laurent : Notre société (30 personnes) a été créée il y a 10 ans. Nous
vendions à l’époque des cartes
mémoire. En 2006, nous avons étendu
notre gamme au matériel de la photographie numérique (réflex, trépied, etc.)
et depuis plus récemment, à la vidéo et
aux drones. Notre particularité est de
tout gérer en interne : la logistique, les
achats, le marketing, le service client,
etc. Nous stockons nos produits pour
assurer des délais d’expédition très
courts. Notre siège se trouve à Nancy
dans un entrepôt de 1.100 m2. Jusqu’à
présent pure player, nous avons ouvert
en novembre 2015 notre premier
magasin à Nancy, utilisé notamment
comme point de retrait (livraison gra-
©M ISSN UMÉRIQUE.COM
Supply Chain Magazine :
Pourriez-vous nous présenter
MissNumérique.com ?
tuite). Si les objectifs fixés sont atteints,
nous envisagerons alors l’ouverture
d’autres magasins.
SCMag : Outre le magasin de Nancy,
que proposez-vous comme
canal de livraison ?
J.L. : Au démarrage du e-commerce,
la livraison se faisait exclusivement à
©M ISSN UMÉRIQUE.COM
Préparateur MissNumérique.com
50
domicile. Sont arrivés ensuite les
relais qui se sont réellement démocratisés depuis 3-4 ans. Dès lors, la part
de nos flux hors domicile s’est envolée (environ 50 % de nos volumes) en
raison d’une communication massive
sur ce mode de livraison et de son prix
moindre. Néanmoins, la proportion de
consommateurs optant pour la livraison à domicile restera toujours conséquente. Nos clients ont le choix entre
2 délais de livraison : express en 24 h
(pour une commande passée avant
17h à J, livraison à J+1 avant 13h) ou
du standard en 48 h.
SCMag : Quelle est votre stratégie
en matière de frais de port ?
J.L. : Ne pas perdre d’argent sur la
livraison est quelque chose de difficile. Les mauvais résultats de certaines
sociétés sont souvent liés à la gratuité
de ce service, la logistique étant en
général dans le top 3 des dépenses.
Contrairement à beaucoup d’e-commerçants, nous choisissons de faire
payer la livraison considérant que ce
service a une valeur. Nous proposons
des forfaits dont le montant dépend
du canal de livraison et du délai
choisi. Il faut compter un rapport de
1 à 2 entre la livraison hors domicile
et celle à domicile en mode express.
Le panier moyen élevé de nos acheteurs (environ 200 €) facilite l’acceptation par nos clients de ce coût. Nous
maintenons ainsi une qualité de service élevée, une structure financière
saine et notre indépendance. Par ailleurs, nous choisissons avec soin nos
prestataires, en favorisant systématiquement la qualité de service au prix.
SCMag : Comment gérer
l’antagonisme entre l’appétence
des consommateurs pour la livraison
N°103 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - AVRIL 2016
à domicile et la volonté du
e-commerçant de développer des
alternatives pour réduire les coûts ?
J.L. : La livraison à domicile reste inévitable, notamment dans les zones
moins denses. Nous assistons actuellement à la création de nombreuses
start-up et à une « ubérisation » plus
générale de notre économie. Ces startup visent à s’appuyer sur des particuliers pour assurer les livraisons.
L’avenir nous dira si ce nouveau mode
de livraison permet ou non de réduire
les coûts.
SCMag : Quels sont vos sujets
de réflexion actuels en lien
avec la livraison ?
J.L. : Nous travaillons sur l’amélioration de l’interface d’achat pour simplifier la démarche du client au
moment du choix de la livraison. En
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Entrepôt MissNumérique.com
outre, le sujet lié à notre développement à l’export (Suisse et Belgique
historiquement, Allemagne, Italie,
Espagne et Angleterre à la cible) nous
occupe beaucoup, en particulier la
problématique posée par les coûts de
transport à l’international. Nous nous
interrogeons sur la pertinence d’externaliser pour obtenir des prix plus
intéressants ou au contraire d’élaborer une stratégie de développement à
l’international plus ambitieuse avec
les volumes ad hoc permettant de
mieux négocier avec les transporteurs.
La 2e option est pour l’instant celle
favorisée. ■
PROPOS RECUEILLIS PAR
BRUNO SIGUICHE
AVRIL 2016 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°103
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