Fiche technique Innover dans le moule pour une autre alternative

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Fiche technique Innover dans le moule pour une autre alternative
Technique
Supplément technique N°17
Innovations
t
Innover dans le moule pour une autre alternative
aux politiques d’achats à bas prix
La France, troisième
au rang européen
dans le domaine de la
fabrication du moule,
est en perte de vitesse
dans ce domaine.
Le Pôle Européen de
Plasturgie, cherche à
redynamiser la filière
via des programmes de
recherches intégrant à
la fois des moulistes et
des transformateurs.
L’un de ses axes de
recherches est la fusion
laser.
L
e marché de la fabrication
du moule est en croissance
au niveau mondial (+5 à +6%
par an) avec un développement
généré en grande partie par les
pays émergents tels que la Chine,
l’Inde ou l’Europe de l’est. Face à
ces concurrents lowcost, la proximité des donneurs d’ordre avec
les moulistes français n’est plus
un avantage suffisant et la santé
financière de ces sociétés est compromise par la dégradation des
relations avec leurs clients. C’est
particulièrement le cas sur le marché de l’automobile où, les pratiques des services achats en délais
de paiement fragilisent le secteur.
De plus, Les moulistes (500 sous
le code NAF 295N, dont seuls 370
affichent des bénéfices), essentiellement des PME de moins de 50
personnes (en moyenne 17), n’ont
pas individuellement les ressources pour mettre en place des programmes de recherche et garder
leur avance technologique.
Redynamiser la
flilière
Dans ce contexte, le Pôle
Européen de Plasturgie propose
aux industriels, via des programmes de recherche regroupant
moulistes et transformateurs, de
s’approprier des technologies de
pointes telles que la fusion laser.
Ce procédé innovant de mise en
forme a la capacité d’apporter une
forte valeur ajoutée au moule par
une réduction considérable des
temps de cycle grâce au Conformal
Cooling : de 10 à 50% selon les
applications.
Constat sur le
marché du moule
rope de l’Est et d’Asie se révèlent
comme des concurrents agressifs.
Ceci entraîne un investissent plus
massif dans les pays émergents,
dont les sociétés sont de plus en
plus organisées et de taille plus
importante.
De leur coté, les moulistes français
doivent répondre :
aux exigences de qualité des
donneurs d’ordre,
w aux exigences de la législation
alourdissant les coûts de production,
w au respect environnemental,
w à l’augmentation importante du
besoin de fonds de roulement
avec des rentabilités qui restent
inchangées et proches de zéro.
w
Les moulistes français sont donc
amenés à se positionner sur :
w
les moules à forte technologie,
w la supervision pour les donneurs
d’ordre français de la réalisation
des moules dans les pays lowcost,
w l’entretien de l’important parc
moules en France (activité non
délocalisable)
w la remise en conformité de moules provenant des pays lowcost
qui ne répondent pas au cahier
des charges en termes de fonctionnement ou de temps de cycle,
CONTACT
Dans ce contexte, le PEP s’est
lancé dés 2001 dans l’étude de la
fabrication de moule par procédé
génératif de matière (SLS, DMLS,
SLM…), qui a abouti en 2005 à la
mise en place d’un projet collaboratif nommé UFFO, Utilisation de
la Fusion laser pour la Fabrication
d’Outillage, avec une utilisation
collaborative par 10 industriels de
la machine EOS M270.
Les évolutions
de la fabrication
rapide
Les procédés génératifs de matières, comme la fusion laser, consistent à assembler des éléments les
uns avec les autres jusqu’à obtenir
la forme souhaitée. L’intérêt de
cette technologie par rapport aux
procédés de mise en forme dits
« conventionnels » est d’obtenir
des formes complexes et creuses,
par exemple des moules avec
des canaux de refroidissement
à sections évolutives aux plus
proches de la surface, la fusion
laser permet ainsi d’optimiser le
refroidissement, concept nommé
« Conformal Cooling ». La thermique moule « quasi parfaite »
donnée par les inserts en fusion
laser induit également un temps
Guillaume VANSTEENKISTE
Chef de projet
Figure 1 : Conception et étude de l’écoulement
Pôle Européen de Plasturgie
2, rue Pierre et Marie Curie
01100 Bellignat
[email protected]
VISIONS/janvier 2009
Les prix des moules restent élevés, de 20 000 € pour des moules
simples pour de petites pièces et
jusqu’à 500 000 € pour de grandes
pièces techniques telles que les
pare-chocs, ce coût s’explique par
la part importante de main d’œuvre (près de 80%). C’est pourquoi,
avec des coûts de main d’œuvre
largement inférieurs (jusqu’à 20
fois moins chers), les pays d’Eu-
avec une production à perte chez
le transformateur.
Cependant il ne faudrait pas limiter l’activité des moulistes français à la remise en conformité de
moules, puisqu’ils sont capables
de proposer des procédés à forte
technologie et des outillages hyper
productifs.
de mise au point plus rapide du
moule (moins d’itérations essaismodification). Cela se traduit par
un gain de temps et d’argent sur le
développement du projet.
Le déploiement de cette technologie est lent car elle est encore trop
souvent associée aux anciennes
générations de machine utilisant
non la fusion, mais le frittage laser.
La méconnaissance de ces procé-
dés et de leurs évolutions est compréhensible devant la multiplicité des systèmes, d’appellations
associées et d’articles de presses
contradictoires.
En ce qui concerne la fusion laser
métallique, les récentes évolutions
permettent désormais de s’affranchir des problèmes de porosité
et de délamination. Elle va même
plus loin puisqu’elle propose des
aciers dédiés outillages. Par exemple, l’acier Maraging d’EOS peut
atteindre, après traitement, une
dureté de 50HRC et subir toutes
transformations (reprise d’usinage, soudage, érosion…) comme un
bloc d’acier ordinaire.
Ce dernier matériau, par son très
bon comportement à la fusion et
ses bonnes caractéristiques mécaniques, est celui principalement
utilisé en outillage. C’est le cas
des inserts conçus pour la société
Pernoud présentés ci-dessous.
Application de la
fusion laser par le
mouliste Pernoud
Via le projet UFFO, la société
Pernoud a confié au PEP la fabrication d’un insert de dimension
330x40x175 mm pour un moule de
casquette de tableau de bord en
PA66 pour Corsa garanti 1.000.000
de pièces. Le temps de cycle
escompté pour ce type de pièce
est de 70 s, la difficulté étant de
refroidir le fond de la pièce. La
fusion laser répond parfaitement
à cette problématique.
projet UFFO
Le projet UFFO consiste en
une utilisation partagée de la
machine EOS M270, ayant débuté
en 2006, pour un groupe de 10
industriels de la région RhôneAlpes : SVO, COGEMOULE,
PERNOUD,
GROSFILLEY,
TECHNIMOLD, SOMP, DROP,
MBP, FPSA, INITIAL. Dans le
cadre de ce projet, cofinancé
par les industriels, la région et la
DRIRE Rhône-Alpes, 200 heures
machines par an sont mises à
disposition de chaque industriel
pour acquérir un savoir-faire sur
la technologie de fusion laser.
La reprise en usinage est nécessaire pour obtenir la qualité d’état
de surface souhaitée. En effet, malgré une valeur Rt de rugosité de
l’ordre de 20 µm et des tolérances
dimensionnelles de +/- 50 µm, on
ne peut directement obtenir une
pièce intégrable dans un assemblage. La phase de fusion laser
dans la gamme opératoire consiste
donc à créer une ébauche d’insert
avec des formes internes habituellement impossibles à obtenir par
un autre procédé. Pour faciliter la
reprise en usinage, un système de
référencement peut être conçu en
même temps que la pièce.
que l’étape de reprise en peinture
n’est plus nécessaire.
Cet exemple montre que le PEP
peut proposer une autre alternative aux politiques actuelles
d’achats lowcost en donnant la
possibilité aux moulistes français
de proposer des moules technologiquement avancés, apportant une
forte valeur ajoutée au transformateur et au donneur d’ordre.
Application de la
fusion laser par
le transformateur
Mark IV
Une des principales difficultés
de la plasturgie provient d’une
gestion commerciale, et non technico-commerciale, des politiques
d’achats sans vision globale et
sans prise en compte des performances. En effet, le service achat
souhaitera à tous prix faire une
économie à l’appel d’offre de 50%
sur l’acquisition d’un outillage
via les pays lowcost, économie
ramenée entre 15 et 20% seulement après prise en compte du
Une autre alternative aux outillages lowcost consiste à utiliser le
savoir-faire des moulistes dans
les technologies de pointe. C’est
le choix stratégique effectué par
Mark IV, leader dans le développement et la production de systèmes complets de transmission
de puissance, d’admission d’air
et de refroidissement moteurs.
Ce transformateur a une démarche d’intégration systématique
de technologies avancées, le but
étant d’obtenir des moules hyper
productifs. Pour ces raisons, Mark
IV a pour politique commerciale
d’acheter 2 moules en France pour
le prix de 3 en Chine. Le bilan économique est alors simple : pas de
perte sur le coût de l’outillage avec
une productivité accrue.
Cette démarche a été appliquée
par le groupe Mark IV sur un
moule de BSE, Boitier de Sortie
d’Eau, pour PSA. Il comporte un
pavé rapporté obtenu par fusion
laser. La capacité de refroidissement des canaux est telle qu’une
nervure a été rajoutée sur la
pièce pour la renforcer. Malgré
cet ajout de matière et donc de
Après injection sur presse, le
temps de cycle des inserts fusionnés a été mesuré à 43 s soit un gain
de 35 %, ce qui signifie que 2 moules comportant un insert fusionné
ont la même productivité que 3
moules conventionnels, soit un Figure 2 : Insert de moule sortie de fusion laser et thermographie de la pièce injectée
gain estimé sur le coût de fonctionnement des machines d’injection
Pour cela, les étapes de
calories supplémentaires à disside 50 000 € annuel par machine
transport (6 € du kilo par avion),
fabrications sont les suivantes
per, le contrôle par thermographie
pour un surcoût initial de 25 000 €
de la mise au point, de la mise
(voir figure 1) :
infrarouge sur la pièce à l’issu du
(étude et fabrication). De plus, un
en service, de la maintenance…
w conception des canaux au plus
démoulage montre que l’insert
contrôle par thermographie infraAlors qu’un surcoût sur l’achat du
proche de la surface (Conformal
conçu par fusion laser a permis
rouge a mis en évidence une très
moule peut être remboursé par
Cooling),
une réduction de température en
bonne homogénéité en tempérases performances en moins d’un
w validation par simulation fluidisurface de 30°C par rapport au
ture de la pièce en sortie de moule,
an et ensuite faire économiser au
que du bon écoulement,
pavé initialement prévu (figure 3).
impliquant une amélioration des
service de production 10 à 50%
D’où une réduction du temps de
w fabrication de l’insert par fusion
qualités dimensionnelles, géoméd’immobilisation machine.
cycle de 34%.
laser
triques et d’état de surface (voir
De plus, les transformateurs et
w reprise par usinage des surfaces
figure 2). De ce fait, la gamme de
donneurs d’ordres Français sont
Conclusion
externes de l’insert.
fabrication a été simplifiée puisen train de générer un flux de
transport de dizaines de milUne nouvelle alternative éconoTémoignage de la société Mark IV
liers de tonnes d’aciers par an à
mique pour la plasturgie existe.
travers le monde avec le transElle nécessite une compréhension
port de la France vers la Chine
et une synergie entre mouliste
d’acier de qualité pour usinage
et transformateur via la création
puis leur retour sous forme de
d’outillage avancé, utilisant des
moule. Ces transports vont à
technologies innovantes. La fusion
l’encontre des valeurs environlaser est une de ces technologies
nementales défendues par la
avec laquelle la plasturgie franCe type de boîtier, moulé à l’aide de nombreux mécanismes, empêche la mise en place Fédération de la Plasturgie et
çaise peut atteindre d’importants
d’une régulation thermique du moule efficace. Les passages d’eau, souvent trop faibles, des recommandations établies
gains de productivités et reprenet la conception des produits de plus en plus complexe nous obligent à accepter des com- par le Grenelle de l’Environnedre ainsi un nouveau souffle. l
promis au détriment de la qualité des pièces moulées.
ment : réduction des impacts,
Dans cette application, la technique de fusion laser de poudre a permis d’optimiser les éco-conception, comportement
sections de passage d’eau et d’approcher des zones moulantes jusqu’alors inaccessibles. responsable.
Dans le cas présent, malgré une nervure supplémentaire dans un évidement de la pièce,
30°C ont pu être gagné sur la température de démoulage grâce à cette technologie.
VISIONS/janvier 2009