Diabète gestationnel: en avant, bougeons!

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Diabète gestationnel: en avant, bougeons!
Diabète gestationnel : en avant, bougeons !
Guide à l’usage des sages-femmes
Dominique Rouge, Infirmière Sage-femme
Directeur mémoire Prof. Michel Boulvain, HUG Genève
Un d i a b ète g es ta ti on n el es t u n e d es com p l i cati on s l es p l u s f réq u en tes d e l a
g r os s es s e. L es n ou vel l es n or m es d e d ép i s ta g e i n trod u i tes p a r con s en su s
i n ter n a ti on a l en 2010, r em etten t en q u es ti on nos p ra ti q u es . L es f em m es
en cei n tes q u i r eçoi ven t u n tel d i a g n os ti c s on t s ou ven t b ou l evers ées . Un s ou ti en
d e l a p a r t d es s ag es - f em m es s emb l e cou l er de s ou rce. Pou rta n t n os p oi n ts d e
r ep èr es et con n a i s s a n ces n e n ous p erm etten t p a s tou j ou rs d e n ou s s en ti r à l’ a i s e
l or s d ’ u n a ccom p a g n em en t.
S ou s f or m e d e r ép er toi r e n on - exh a u s ti f , voi ci l es p oi n ts es s en ti el s d e l a p ra ti q u e
a ctu el l e. D es d éf i n i ti on s a u x im p l i ca ti on s , d e l a p ra ti q u e m u l ti d i s ci p l i n a i re a u x
q u es ti on s d e p r éven ti on , l es con n a i s sa n ces sp éci f i q u es d es s a g es - f em m es s on t
u n a p p or t p ou r l es f emm es en cei n tes et p ou r les p rof es s i on n el s q u i g ra vi ten t
d a n s ces p r i s es en ch a r g e . D a ns un e op ti q u e d e p réven ti on g l ob a l e, l a
g r os s es s e es t au s s i u n e p ér i od e à in ves ti r.
Sujet d’actualité s’il en est, la thématique
du diabète est présente dans notre
quotidien. Programmes de prévention et
de dépistage sont à l’ordre du jour.
Depuis 2002, l’OMS* l’affirme : « C'est une
véritable épidémie de diabète qui est en
cours. En l'absence de prévention
primaire, l'épidémie de diabète va
continuer à s'étendre. » 1
En 2011, de nouvelles recommandations
de dépistage du diabète gestationnel
(DG) ont été adoptées par la SSGO*.
Cette modification dans le suivi de
grossesse est progressivement intégrée
par les équipes médicales et soignantes.
Elle demande une prise en charge
multidisciplinaire dans laquelle la sagefemme a un rôle à jouer.
« Les sages-femmes accompagnent les
femmes enceintes, les nouveau-nés, les
mères et les familles au cours d’une phase
très sensible de leur vie. Elle est une
personne spécialisée de référence
essentielle pour toute femme durant la
maternité (du début de la grossesse à la
fin de l’allaitement). En cas de risques, elle
collabore avec les médecins ainsi que
d’autres professionnel-s. » 2
Elle travaille en partenariat avec les
futures mères et les couples dans cette
étape importante de leur vie. Elle a une
place dans l’information et l’éducation à
la santé et son rôle de prévention peut se
révéler important. La sage-femme joue
également un rôle important auprès des
femmes et de leur entourage en lien avec
leur environnement psychologique.
Il ne faut pas négliger qu’un diagnostic de
diabète gestationnel « a un impact
significatif sur le vécu de la grossesse en
générant beaucoup d’angoisse chez les
patientes. » 3
Il devient utile, voire nécessaire de pouvoir
informer et soutenir les femmes qui
présentent un diabète gestationnel,
d’accueillir et d’accompagner ces
familles avec leur vécu.
En répertoriant les principaux aspects des
connaissances et de la pratique actuelle,
je souhaite que ce travail puisse être un
outil de référence utile à notre pratique
de sage-femme. Si de surcroît il peut
motiver une implication des sagesfemmes dans l’accompagnement des
femmes présentant ce trouble de
grossesse, aider à la prévention et
promouvoir une vision multidisciplinaire,
son but sera atteint.
1
Grossesse et glucose
La grossesse engendre une adaptation du métabolisme maternel dont le rôle est de
maintenir les besoins énergétiques de la mère et du fœtus.
Effet diabétogène de la grossesse
Phénomène
Effet
1ère moitié grossesse
Stockage de glycogène dans le foie et
autres tissus maternels
↑ Sécrétion insuline maternelle
↑ Réaction tissulaire à l’insuline
(anabolisme pour le développement fœtal)
2e moitié grossesse
↑ Résistance périphérique à l’insuline
(effet de l’hormone lactogène placentaire)
Glucose à disposition pour les besoins
du fœtus
L’insuline ne traverse pas la barrière placentaire
En cas de diabète
Sécrétion insuffisante d’insuline
Utilisation inadéquate de l’insuline
Hyperglycémie maternelle
selon « Soins infirmiers en périnatalité » 4è Edition 2010 Ladewig – London – Davidson – ERPI – p.335-336
L’hyperglycémie maternelle laisse ainsi une
quantité de glucose trop importante pour les
besoins du fœtus. Le glucose traverse le
placenta. Le fœtus y réagit en augmentant
sa production d’insuline ce qui va accroître
sa croissance et le stockage de graisses,
phénomène à l’origine de la macrosomie
fœtale.
Les risques de morbidité et de mortalité
périnatales sont dès lors augmentés.
Il s’agit d’une adaptation physiologique de
la grossesse dans un premier temps et d’une
complication si l’insuline n’arrive pas à
suppléer aux besoins qui augmentent dès la
seconde moitié de grossesse.
Diabète
Définition et classification
Le diabète est un trouble endocrinien qui
perturbe le métabolisme des glucides. Il
provient d’une sécrétion ou de l’utilisation
inadéquate de l’insuline.
En ce qui concerne la grossesse, on distingue le
diabète préexistant à celle-ci et le diabète
survenant au cours de la grossesse. Dans ce
dernier cas, le trouble métabolique se
manifeste pour la première fois durant la
grossesse, principalement lors de la deuxième
moitié et il se limite généralement à cette
période.
2
« Le diabète de type 1 (précédemment connu sous le nom de diabète insulino-dépendant
ou juvénile) est caractérisé par une production insuffisante d’insuline et exige une
administration quotidienne de cette dernière. » 4
« Le diabète de type 2 (précédemment appelé diabète non insulino-dépendant ou
diabète de la maturité) résulte d’une mauvaise utilisation de l’insuline par l’organisme. Il
représente 90% des diabètes rencontrés dans le monde. Il est en grande partie le résultat
d’une surcharge pondérale ou de la sédentarité. » 4
Un diabète de type 2 (DT2) peut être découvert lors d’une grossesse. Ce diabète préexistant à la
grossesse et méconnu de la patiente, persistera après l’accouchement et nécessite une prise en
charge spécifique.
Dans un suivi de grossesse, le dépistage de ce type de diabète reste essentiel lors d’une première
consultation.
Les facteurs de risques étant :
▪ obésité (BMI >30)
▪ origine : non-caucasienne et/ou migrante
▪ antécédent familial de diabète de type 2 (1er degré)
▪ antécédent personnel de diabète gestationnel
▪ syndrome des ovaires polykystiques
Ce dépistage sera basé sur la glycémie à jeun (≥ 7,0 mmol/L) et/ou sur une glycémie dans les 2-3
heures post-prandiales (≥ 11.1 mmol/L à 2 reprises). 5
Calcul BMI = poids (kg) / taille (m)² (s’entend poids avant la grossesse)
« Le diabète gestationnel est une hyperglycémie apparue ou décelée pour la première fois
pendant la grossesse. … Il est très souvent diagnostiqué au cours du dépistage prénatal et
non pas suite à des symptômes. » 4
Le diabète gestationnel est considéré comme
un trouble du métabolisme glucidique, un
désordre biochimique, qui débute
Il est habituellement asymptomatique. Parfois
des infections urinaires à répétition, une hauteur
utérine trop importante pour l’âge gestationnel
principalement en deuxième partie de
grossesse et disparaît après l’accouchement
chez la majorité des femmes.
(hydramnios, macrosomie), un contexte
d’hypertension artérielle, une glycosurie
peuvent être des signes d’appel.
3
Pour la mère
Pour l’enfant
Polyhydramnios
Hypertension gravidique
Pré-éclampsie, éclampsie
Menace accouchement prématuré
Césarienne, déchirures périnéales
Infections obstétricales
Macrosomie
Dystocie des épaules
(lésions du plexus brachial)
Hypoglycémie néonatale
Hyperbilirubinémie
Malformations (si DT1* ou DT2)
Long
terme
Risques
Grossesse
Post-partum
Complications maternelles et fœtales lors de diabète
DT2 dans les 5 à 20 ans suivants
(~ 50% des femmes présentant un DG)
Risque accru de DT2 et syndrome métabolique
Lors de glycémies bien équilibrées le pronostic est bon.
Un diabète de type 2 méconnu est plus souvent lié à des complications maternelles et fœtales. Il
existe un risque augmenté de malformations fœtales alors que ce risque n’est pas augmenté en cas
de diabète gestationnel.
Recommandations de dépistage
En 2010, les recommandations du groupe IADPSG (International Association of Diabetes and
Pregnancy Study Groups Consensus Panel) ont été adoptées par l’OMS et diverses sociétés
nationales et internationales de diabétologie et de gynécologie-obstétrique.
Ces recommandations apportent un changement dans le dépistage du diabète gestationnel. Elles
se fondent sur les conclusions de l’étude HAPO (Hyperglycemia and adverse pregnancy outcome)
publiée en 2008. Cette étude a permis d’établir un lien entre le niveau de glycémie maternelle et
certaines issues périnatales défavorables. Elle a mis en évidence un risque augmenté de
macrosomie, hyperinsulinisme et adiposité fœtaux au-dessus de certains seuils de glycémie
maternelle.
Test de dépistage - hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO)
Contre-indication : diabète connu
Réalisation du test









Entre la 24e et 28e semaine de grossesse
Alimentation habituelle les jours précédant le test
Avant le début du test : femme à jeun depuis 8 heures de temps au minimum,
sans fumer.
Prélèvement d’une glycémie à heure : 0
Ingestion de 75g de glucose anhydre dilué dans 300 ml d’eau minérale non
gazeuse à T° ambiante (remuer jusqu’à obtention d’une solution limpide, aromatiser
au jus de citron).
Ingestion en max 5 minutes.
Pendant le test, position couchée ou assise, sans fumer.
Glycémie à heure : 1
Glycémie à heure : 2
Prévoir une collation légère (jus orange et pain par ex.)
4
Interprétation des résultats
•
Glycémie à jeun ≥ 5.1 mmo/l (supérieur ou égal à 5.1mmol)
•
Glycémie à 1 h ≥ 10 mmol/l
•
Glycémie à 2 h ≥ 8.5 mmol/l
Un seul critère est suffisant pour poser le diagnostic.
Le dosage de la glycémie doit être réalisé sur du plasma veineux et il est important de s’assurer
que la femme est réellement à jeun depuis minuit. Les dosages capillaires ne sont pas
suffisamment fiables pour être utilisés lors du diagnostic.
Le tube de sang doit être spécifiquement conçu pour ce dosage, donc inclure un inhibiteur
de la glucose oxydase (sinon, on constate une diminution de l’ordre de 1 mmol/l. par
heure de délai avant le dosage). 5
Si le test n’a pas pu être réalisé entre 24 et 28 semaines de grossesse, il est recommandé de le réaliser
dès que possible.
Si le contact avec la femme enceinte est tardif, le dépistage se basera sur une glycémie à jeun
(positif si ≥ 7.0 mmol/L) ou post-prandiale (≥ 11.1 mmol/L). L’impact d’une prise en charge à ce stade
de grossesse devient assez limité.
L’HGPO est parfois répétée en présence de facteurs de risques survenant dans le suivi de grossesse :
polyhydramnios, macrosomie fœtale, traitement par progestérone ou corticoïdes à long terme.
Une alternative de dépistage en 2 temps est envisageable selon l’avis d’expert N° 37 publiée par la
Société suisse de gynécologie et d’obstétrique. ( Réf: 5)
Pour éviter le désagréable test de surcharge, une glycémie à jeun qui est d’emblée ≥ 5.1 mmol/l.
signe un test positif. On peut renoncer au test si la glycémie à jeun est < 4.4 mmol/l. car le diagnostic
de DG est peu probable.
Cette stratégie n’empêche pas le test de surcharge si une 1ère glycémie à jeun est ≥ 4.4 mmol/l. et
< 5.1 mmol/l.
Cas
particulier :
corticoïdes
L’utilisation de corticoïdes (cure de maturation pulmonaire
habituellement) élève généralement et provisoirement les glycémies
maternelles.
Pour les patientes insulino-dépendantes, cette cure nécessite un
suivi spécifique en milieu hospitalier sous supervision des
diabétologues. Les doses d’insuline plus importantes sont souvent
nécessaire.
Si un test d’HGPO est envisagé après une cure de corticoïdes,
planifier le test plusieurs jours après la fin des injections afin que les
résultats soient le moins possible modifiés par la cure. Selon les
équipes, il est recommandé d’attendre environ 5 à 7 jours.
5
Prise en charge
Un diagnostic de diabète est souvent bouleversant pour la femme enceinte et son entourage.
Le but de la prise en charge est de maintenir des glycémies maternelles adaptées afin d’assurer à la
mère et à son enfant une santé optimale.
La femme a besoin d’être informée, d’être instruite et soutenue dans cette nouvelle étape de
grossesse. Sa coopération est importante pour voir la grossesse évoluer au mieux. L’implication de son
partenaire, de son entourage, sont des éléments favorables et porteurs pour soutenir la femme dans
cette période souvent difficile pour elle.
La femme va rencontrer à tour de rôle des intervenants différents et complémentaires (équipes de
diabétologie et équipes obstétricales).
La sage-femme qui accueille et accompagne ces patientes joue un rôle dans cette prise en charge
pour autant qu’elle se sente suffisamment formée et compétente.
Autosurveillance glycémique
Pour évaluer les valeurs de sa glycémie, la femme va devoir apprendre à se faire des autocontrôles.
Plus la femme comprend les enjeux et l’impact de glycémies stables et adéquates, plus elle pourra
s’investir dans son traitement.
L’infirmière en diabétologie intervient habituellement auprès de ces patientes pour l’enseignement
de cette autosurveillance. Le matériel nécessaire est fourni lors de cet enseignement.
La sage-femme se trouve également sollicitée par ces patientes qui ont parfois besoin de l’exercer
un certain nombre de fois pour se sentir pleinement à l’aise. En milieu hospitalier où à domicile, il n’est
pas inhabituel de rencontrer des femmes dans cette situation.
Le prélèvement capillaire
Il s’effectue habituellement sur le bord latéral de la dernière phalange des doigts en
évitant le pouce et l’index (préservation de la pince). La préparation consiste à
effectuer un lavage simple des mains au savon et à l’eau chaude et de bien les
essuyer.
Un désinfectant est habituellement utilisé en milieu hospitalier après le prélèvement
pour des questions d’hygiène, mais n’est pas recommandé à domicile.
Fréquence
Lors de l’adaptation alimentaire
Modèle à 4 glycémies / j.
1 glycémie à jeun le matin
3 glycémies post-prandiales
Lors d’administration d’insuline
Modèle à 6 glycémies / j.
3 glycémies pré-prandiales
3 glycémies post-prandiales
Les glycémies post-prandiales sont prélevées : 1 heure ou 2 heures après le début du repas.
Objectifs glycémiques visés
(recommandations de la société suisse endocrinologie et diabétologie)
Glycémie capillaire à jeun
≤ 5.3 mmol/l
Glycémie capillaire 1 h. post-prandiale
≤ 8.0 mmol/L
Glycémie capillaire 2 h. post-prandiale
≤ 7.0 mmol/L
6
Par la suite, le nombre de glycémies quotidiennes sera adapté, en essayant de permettre
l’allégement du rythme dès que possible.
Un contrôle à jeun et post-prandial 2 à 3 x/semaine est envisageable dès que l’efficacité d’une
adaptation alimentaire est obtenue.
Adaptation du mode de vie
Les deux fondements d’une prise en charge diabétique (quel que soit le diabète en l’occurrence)
sont l’association d’une alimentation équilibrée avec une activité physique régulière.
Aspect diététique – habitudes alimentaires
Ce qui est habituellement appelé « régime » représente la pierre angulaire du traitement du
diabète gestationnel. L’apport alimentaire étant bien entendu totalement lié à une quantité
de glucose disponible. Une modification, une adaptation des habitudes alimentaires est la
première intention et permet dans la plupart des cas de maintenir des glycémies adéquates
jusqu’à l’accouchement.
Dans 85% des cas, cette modification alimentaire suffit à stabiliser les glycémies.
Les aspects diététiques liés au diabète de type 1 ou 2 ne seront pas abordés ici ; leur prise en charge
spécifique dépasse le cadre de cet article.
Dans la prise en charge du diabète gestationnel, la femme enceinte se verra habituellement
proposer un entretien avec une diététicienne. La plupart du temps, il s’agit d’un entretien
unique.
Il serait utile que les conseils donnés par la diététicienne figurent sur un document auquel
la femme puisse se référer.
Les informations verbales, données en nombre sur un court laps de temps, sont rarement
intégrées totalement. La femme a souvent de la peine à mémoriser ces nombreuses
informations et le bénéfice de la consultation peut s’en trouver amoindri.
Un document est également très utile aux soignants en lien direct et régulier avec la
future mère (p.ex. sage-femme indépendante, équipes hospitalières qui sont plus
amplement confrontées au quotidien de leurs patientes).
Les femmes qui ont un entretien planifié devraient être motivées à demander un tel
document.
Il n’existe pas de recommandations « standard ».
Un entretien diététique va s’élaborer au cas par cas, chaque femme ayant ses habitudes
alimentaires propres liées à son mode de vie, ses goûts et ses habitudes culturelles.
Le plaisir lié à l’alimentation est un élément à ne pas négliger.
Pour changer et améliorer un comportement,
il faut avoir compris les avantages de ce changement.
Il s’agit de manger sainement,
et non pas de manger comme d’habitude.
7
L’utilisation d’une pyramide alimentaire
6permet de visualiser et de décrire les
groupes alimentaires que tout un chacun
devrait retrouver dans son alimentation
quotidienne.
Elle peut être un support utile pour
évaluer les connaissances de base
qu’une personne a en matière de
nutrition et peut lui permettre de décrire
de quoi sont constitués ses repas
principaux, ses éventuelles collations ou
grignotages, etc.
La pyramide alimentaire téléchargeable sur le site la
Société suisse de nutrition (http://www.sgessn.ch/fr/toi-et-moi/boire-et-manger/equilibrealimentaire/pyramide-alimentaire/) existe en version
français, allemand, italien, anglais, espagnol,
portugais, tamil, serbo-croate, albanais, turc et arabe.
Cette documentation peut être utile pour les migrantes.
Idéalement :
« L’alimentation de la femme enceinte peut influencer positivement non seulement le bon
déroulement de la grossesse et le développement du fœtus, mais également l’état de santé,
à long terme, de la mère et de l’enfant. Durant la première moitié de la grossesse la qualité
des apports alimentaires est essentielle, alors que durant la seconde moitié, la quantité
prend également de l’importance, afin d’assurer la croissance harmonieuse du fœtus. C’est
donc dès le début de la grossesse, et si possible même avant la conception déjà, que les
bonnes habitudes en matière d’alimentation devraient être prises. » 7
Repères
▫
▫
▫
Avoir des horaires de repas réguliers et savourer ses repas
Débuter la journée avec un petit déjeuner
Fractionner l’alimentation en trois repas principaux et une collation entre les repas,
soit deux à trois chaque jour.
▫
A chaque repas principal :
▪
des glucides sous forme de farineux (pain, pâtes, riz, flocons…) riches en
fibres alimentaires.
Ils devraient représenter (du tiers à) la moitié de l’assiette.
▪
des légumes consommés à volonté
▪
du poisson, de la viande, des œufs, du tofu à volonté
▫
▫
Boissons : abondantes tout au long de la journée (1½ à 2l./j) : eau, infusions
Produits laitiers : 3-4 portions par jour, idem pour les fruits (4 portions max/j.) à
répartir entre repas principaux et collations.
Sucreries et boissons sucrées sont à consommer avec modération, dans l’idéal à
éviter.
Limiter la consommation de graisses (max 30%).
Collation envisageable : 1 portion fruit cru ou cuit sans sucre, 1 tranche de pain, 1
bâton de céréales, 3 biscuits, 1 verre de lait, 1 yogourt nature
▫
▫
▫
8
Pas de régime « minceur » pendant la grossesse. Eviter trop de privations.
L’hyperglycémie post-prandiale est augmentée par l’excès d’hydrates de carbones. Le petit
déjeuner est le repas où la résistance à l’insuline est la plus grande, d’où l’importante de choisir
des sucres lents et de réduire la quantité d’hydrates de carbones.
Le bénéfice diététique est pourtant controversé et les effets positifs à long terme ne sont
actuellement pas clairement démontrés. Dans les rares études publiées, un quelconque bénéfice
n’est pas encore mis en évidence.
Activité physique
« Pratiquer une activité physique raisonnable, comme la nage, la promenade, la marche ou
des exercices de gymnastique douce, contribue au bien-être de la future mère, cela
permettant d’atténuer les douleurs dorsales, la constipation, la fatigue ou la rétention d’eau.
Cela permet également de prévenir le risque d’un diabète gestationnel. » 8
Quand la grossesse poursuit son cours sans autres complications, la femme enceinte connue
pour un diabète gestationnel bénéficie d’une activité physique régulière et adaptée à son
état. Il est important d’encourager ces femmes et de les soutenir dans leurs efforts.
▪
▪
▪
▪
▪
Une activité physique après un repas modère l’hyperglycémie post-prandiale.
L’exercice le plus profitable est celui pratiqué régulièrement.
L’idéal serait au moins 30 minutes de marche par jour ou son équivalent (natation ‘plaisir’,
aquagym, gym douce, Pilates, …). Cette période peut être fractionnée en 2 x 15 minutes
ou 3 x 10 minutes.
Sa fréquence de trois à cinq fois par semaine est recommandée.
Même une activité réduite est bénéfique.
Message clé

une alimentation saine et variée

une activité physique régulière
contribuent à la gestion du diabète de grossesse
apprennent de saines habitudes de vie
luttent contre de surpoids
9
Insuline
Si l’alimentation et l’activité physique ne suffisent pas à atteindre les objectifs glycémiques définis
précédemment, une insulinothérapie sera habituellement introduite.
En principe (sur l’une ou l’autre des 4 glycémies quotidiennes) lorsque trois valeurs sont dépassées en
une semaine (Hyperglycémies non expliquées par un écart alimentaire ou un repas riche).
Ce traitement est parfois difficile à faire accepter par la patiente. Une écoute active de son vécu est
importante.
Le médecin diabétologue gère ce suivi et prescrit le type d’insuline et les dosages.
Le suivi de grossesse sera dès lors le même que pour un DT1.
Les antidiabétiques oraux ne sont pas utilisés actuellement.
Suivi de grossesse – Accouchement – Suites de couches
Les prises en charge varient selon les pratiques hospitalières spécifiques.
Habituellement :
Si le DG est :
▪
bien équilibré  suivi comme toute grossesse habituelle
▪
lié à d’autres facteurs de risques (HTA, obésité, mal équilibré)  surveillance rapprochée
(planifiée au cas par cas)
▪
non insulino-dépendant  provocation à 40 – 41 SA*
▪
insulino-dépendant  prise en charge selon avis diabétologue + provocation dès 38e SA
▫ Provocation à discuter selon caractéristiques individuelles
▪
avec poids fœtal estimé > 4’500g  césarienne élective envisagée
En péripartum, éviter les perfusions de glucose (hypoglycémies néo-natales subséquentes).
Surveillances glycémiques selon les protocoles hospitaliers internes.
En post-partum immédiat, la glycémie se normalise rapidement. Un profil glycémique réalisé 48
heures après l’accouchement permet de s’assurer d’un retour à la normale. Pour les femmes
atteintes de diabète de type 2 méconnu avant la grossesse, l’anomalie glycémique persiste
après l’accouchement.
Pour le nouveau-né, le risque d’hypoglycémie sévère est faible. L’alimentation doit débuter dès
la naissance. Une surveillance glycémique est recommandée pour les nouveau-nés de mère
connue pour un DG et traitée avec insuline ou dont le poids de naissance est < (3e), 10e ou >
90e percentile (selon les équipes).
L’allaitement maternel est à conseiller.
La contraception est à adapter aux facteurs de risques cardio-vasculaires. Dans ces cas, le
dispositif intra-utérin semble un excellent choix.
Au moment du contrôle post-partum, un dépistage d’autres formes de diabète (DT2, MODY*)
est idéalement réalisé (Glycémie à jeun ≥ 7.0 mmol/l. - HGPO à 75g ≥ 11.1 mmol/l. à 2h. et/ou
HbA1c*). Ce dépistage est à renouveler tous les un à trois ans en fonction des facteurs de
risques.
A savoir : Le risque de dépression post-partum est augmenté pour ces femmes.
10
Promotion de la Santé - La multidisciplinarité au service des patientes
« Le système de santé suisse est toujours fortement orienté vers la médecine aiguë. Des experts
et des organisations internationales telles que l’OCDE* et l’OMS* demandent à la Suisse
d’investir davantage dans la promotion de la santé et de la prévention. Dans leur travail, les
sages-femmes mettent fortement l’accent sur la promotion de la santé. » 2
Dans la définition de ses compétences, la sage-femme « …exerce un rôle important en
éducation sanitaire, non seulement auprès des femmes, mais aussi auprès des familles et de la
communauté. Elle y inclut l'éducation prénatale et la préparation au nouveau et futur rôle de
parents. Elle conduit une information sur les conseils d'hygiène, les soins de santé particuliers à la
mère et à l'enfant, sur l'alimentation, sur la gymnastique périnatale… » 9
Les médecins diabétologues, diététiciennes,
infirmières-cliniciennes en diabétologie,
physiothérapeutes (selon les équipes)
proposent des consultations adaptées.
la prise en charge des situations complexes. La
communication entre tous les partenaires et les
patient(e)s est un outil fondamental pour une
prise en charge constructive.
Les équipes d’obstétriques (médecins et/ou
sages-femmes) sont plus ou moins investies
dans cette prise en charge.
Dans une étude récente menée dans le
canton de Vaud, « les soignants consultés
soutiennent que tous les professionnels doivent
être intégrés dans la prise en charge pour
travailler en réseau. …la prise en charge est
compliquée par le manque de personnel.
Un langage, basé sur des recommandations de
pratique clinique validées par tous, est
indispensable au travail interdisciplinaire. » 10
Force est de constater que, dès que l’on parle
« diabète », l’attitude dominante consiste en
une passation de pouvoir aux équipes de
diabétologie.
Pourtant, une perspective interdisciplinaire
permet une complémentarité des
compétences professionnelles. Cette
complémentarité se met au service des
patientes qui ont besoin de conseils et de
soutien. Les accompagnements en périnatalité
se sont amplement développés ces dernières
années. Ils apportent une vision nouvelle dans
Des connaissances spécifiques sont utiles pour
maitriser le sujet. Des formations continues
appropriées permettent aux soignants de
donner du sens à leurs interventions et
permettent une meilleure gestion des situations
complexes.
Le modèle genevois : la consultation « diabète »
Prise en charge conçue au sein du service de consultations prénatales de la maternité des
HUG*, les femmes enceintes dépistées avec un diabète gestationnel sont reçues lors d’une
matinée « Consultation Diabète » pour une prise en charge globale et multidisciplinaire.
Les équipes de diabétologie et de diététique rejoignent le secteur de la maternité pour cette
matinée de consultation spécialisée.
Le premier entretien est proposé avec une sage-femme. Celle-ci accueille les femmes parfois
accompagnées de leurs conjoints, avec leurs vécus et leurs questions, reprend l’anamnèse
globale de la grossesse et constitue un dossier utile lors du suivi ultérieur. Un gynécologueobstétricien est présent et intervient selon les besoins.
11
Lors de cette matinée, la femme (le couple) rencontre l’équipe de diabétologie (médecin et
infirmière-clinicienne en diabétologie). Cette consultation permet d’échanger avec le
médecin diabétologue qui va donner des explications, répondre à des questions. L’infirmière
clinicienne se charge de l’enseignement des autocontrôles glycémiques. Première étape de
la prise en charge.
Une diététicienne, également présente, offre un entretien avec des conseils diététiques
adaptés à la situation personnelle de chaque femme enceinte présente.
La sage-femme planifie un nouveau rendez-vous pour le suivi ultérieur selon les besoins de
chaque situation.
Durant cette matinée, la femme enceinte rencontre les personnes significatives de sa prise en
charge spécifique. La complémentarité des intervenants réunis en un temps déterminé sur un
même lieu permet une coordination et une collaboration. Le travail en équipe est renforcé et
la communication est facilitée.
Effet bénéfique d’une prise en charge des soignants
Dans le suivi des personnes diabétiques, les soignantes ont une place de soutien privilégiée pour
les patients.
En 2006, une étude menée au CHUV à Lausanne a mis en évidence les effets bénéfiques d’une
prise en charge infirmière de première ligne.
Cette étude a montré que la prise en charge des femmes qui développent un diabète
gestationnel « a un triple effet :
▪ elle diminue les conséquences pour le bébé du diabète gestationnel de la mère.
▪ elle améliore la sensibilisation des patientes à la prévention du diabète
▪ elle améliore également la prise en compte des besoins spécifiques des femmes
présentant un diabète gestationnel ». 11
Conclusions
La grossesse est une étape clé dans la vie d’une femme et d’une famille.
Les programmes de prévention y trouvent pleinement leur place. Ils ont un rôle porteur pour l’avenir
des personnes concernées.
L’annonce et la prise en charge d’un diabète gestationnel ne sont pas sans conséquence.
Les qualifications et compétences des sages-femmes sont un apport dans le suivi de ces patientes :
▫
L’enseignement (nutritionnel entre autre), le soutien et l’accompagnement de ces
femmes, de leur(s) enfant(s) à naître, reste un défi.
▫
La grossesse est une période favorable aux changements profonds.
▫
Les liens que les couples et les familles établissent avec leur(s) sage(s)-femme(s) offrent
une possibilité réelle d’actions préventives pour stimuler à un mode de vie sain.
Une formation continue est essentielle pour chaque professionnel en activité.
Une formation sur le sujet du diabète gestationnel pourrait être utile pour nos pratiques et nos
accompagnements.
S’agirait-il d’un investissement pour le long terme ? Un diabète gestationnel implique pour la moitié
des femmes touchées la survenue d’un DT2 dans les 20 ans qui suivent et un risque accru de
syndrome métabolique pour leur enfant.
Pour eux, leur famille et nos sociétés : en avant, bougeons !
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Abréviations :
DG : Diabète gestationnel
DT1 : Diabète de type 1
DT2 : Diabète de type 2
HbA1c : hémoglobine glyquée
HGPO : hyperglycémie provoquée par voie orale
HUG : Hôpitaux universitaires Genève
OCDE : Organisation de coopération et de développement économiques
MODY : Maturity Onset type Diabetes of the Young
OMS : Organisation mondiale de la santé
SSGO : Société Suisse de Gynécologie et d’Obstétrique
SA : semaine d’aménorrhée
http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs236/fr/
Diabète: le coût du diabète - Aide-mémoire N°236 - septembre 2002
2 http://www.hebamme.ch/x_dnld/htag/2013/CommuniqueDePresse5mai2013.pdf
3 Précis d’obstétrique – Patrick Hohlfeld &, François Marty – 4e édition - LAVOISIER MSP – 2011
4 http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs312/fr/
Diabète - Aide-mémoire N°312 - Mars 2013
5 Boulvain M., Brändle M., Drack G., Hoesli I., Honegger C., Lehmann R., Raio L., Singer M., Surbeck D., Troendle A., Zommermann R. - SSGO
- Dépistage du diabète gestationnel – Avis d’expert N° 37 - 01.06.2011
6 par ex. : poster à télécharger sur http://www.sge-ssn.ch/media/medialibrary/2012/04/poster-pyramide-alimentaire.pdf
7 SSN - Société Suisse de nutrition - L’alimentation de la femme enceinte – Edition 2011
8 OFSP – Office fédéral de la Santé publique - Alimentation durant la grossesse et la période d’allaitement – Publication :
décembre 2008
9 http://www.heds-ge.ch/portail/welcome.nsf/pages/sagefemmeF
10 I. Haugon-Traub, V. Schülter, L. Chinet – Faire face à l’épidémie de diabète : réponses à l’échelle du canton – Revue
médicale suisse – 5 juin 2013
11 CHUV magazine – Etude sur les femmes développant un diabète pendant la grossesse – avril 2007
1
Mémoire réalisé par Dominique Rouge, infirmière sage-femme, pour l’obtention du
CAS - Certificat de formation continue - Obstétrique, médecine maternelle et fœtale
Faculté de médecine - Université de Genève - janvier à décembre 2013
Directeur Mémoire : Prof. Michel Boulvain – HUG Genève
Experts : Prof. Michel Boulvain – HUG Genève & Dr Y. Vial – CHUV Lausanne
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