HTA chronique : les risques gravidiques La prévalence de l

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HTA chronique : les risques gravidiques La prévalence de l
HTA chronique : les risques gravidiques La prévalence de l’hypertension artérielle chronique chez les femmes débutant une grossesse augmente, en raison de l’âge plus tardif auquel les femmes entreprennent de procréer, mais aussi du fait de la prévalence croissante du surpoids dans la population générale. Aujourd’hui, 3% des femmes enceintes, hypertendues avant la grossesse, sont dans cette situation, définie par des chiffres tensionnels >140/90 mmHg avant la grossesse ou au cours de ses 20 premières semaines. Si la majorité des femmes atteintes de cette hypertension chronique au cours de la grossesse a un pronostic favorable, elles sont néanmoins exposées à un risque maternel et fœtal accru. Les complications gravidiques sont d’autant plus fréquentes et sévères que les chiffres tensionnels avant la grossesse sont élevés, et que le retentissement sur les organes cibles est plus marqué. Le risque de pré‐éclampsie est plus élevé chez les femmes hypertendues que chez les non hypertendues (17 à 25% vs 3 à 5%) et a pu être corrélé à la durée d’évolution de l’HTA. Les décollements placentaires, retards de croissance fœtale, la prématurité et le taux de césariennes sont également majorés chez les hypertendues. Dans une série de 861 femmes hypertendues suivies au cours d’une grossesse, la survenue d’une pré‐ éclampsie est observée chez 22% d’entre elles, souvent tôt (dans la moitié des cas avant la 34ème semaine de gestation, c'est‐à‐dire plus tôt que les pré‐éclampsies survenant chez les femmes indemnes d’HTA auparavant). Le risque évolutif n’est pas limité à la seule survenue d’une pré‐éclampsie, dans la mesure où l’hypertension s’aggrave au cours de la grossesse chez environ 20% des femmes hypertendues indemnes de pré‐éclampsie. La surveillance de la femme enceinte hypertendue doit donc être plus fréquente (progression des chiffres tensionnels, protéinurie comparée aux valeurs de référence avant ou au début de la grossesse, uricémie, thrombopénie, transaminases). Le traitement de l’hypertension aggravée pendant la grossesse limite le risque d’HTA sévère, mais les 28 essais randomisés dont nous disposons n’ont pas montré qu’il réduisait les risques de pré‐éclampsie, de retard de croissance fœtale, de décollement placentaire. Les traitements anti‐
hypertenseurs les plus utilisés sont la methyldopa, le labetalol, le metoprolol, la nifedipine (à libération prolongée), l’hydralazine. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et ceux des récepteurs de l’angiotensine II sont contrindiqués. Administrés au cours du 3ème trimestre, ils peuvent induire des oligohydramnios, une anurie néonatale, un retard de croissance fœtal, et le décès fœtal. En début de grossesse, ils majorent le risque de malformations cardiaques et neurologiques. Dans la mesure où près de la moitié des grossesses ne sont pas clairement programmées, il est donc préférable d’éviter les inhibiteurs du système rénine angiotensine chez les femmes en âge de procréer, ou du moins de les avertir du risque que représente la survenue d’une grossesse sous traitement. Seely EW, Ecker J. Chronic hypertension in pregnancy. N Engl J Med 2011; 365: 439‐46. HTA gravidique L’HTA gravidique atteint 6 à 17% des femmes enceintes au‐delà de la 20ème semaine de grossesse, et la pré‐éclampsie (protéinurie associée, nullipares jusqu’alors indemnes d’HTA) 2 à 7% supplémentaires. L’une et l’autre sont plus fréquentes chez les femmes présentant un surpoids et exposent à un risque de prématurité, de retard de croissance intra‐utérin, et à une mortalité périnatale augmentée pour la pré‐éclampsie. Les enfants et adolescents nés de mères ayant eu une HTA gravidique ou une pré‐éclampsie ont des chiffres tensionnels plus élevés, que les études épidémiologiques ont souvent rapportés à la présence d’un surpoids « familial ». La cohorte parents‐enfants du comté d’Avon (Royaume Uni) a suivi de façon prospective les 14 541 femmes enceintes dont le terme était prévu entre avril 1991 et décembre 1992, puis les 13 678 enfants (grossesses gémellaires et multiples exclues), dont 6343 ont pu être examinés à l’âge de 9 ans. Les chiffres de PA des enfants dont les mères ont eu une HTA gravidique ou une pré‐
éclampsie dépassent ceux des enfants dont les mères en ont été indemnes (différence moyenne de 2 mmHg pur la systolique et de 1 mmHg pour la diastolique), et ce après ajustement sur l’adiposité maternelle et celle de l’enfant. Lorsqu’on ajuste sur le terme et poids à la naissance, cette association entre pré‐éclampsie et PA de l’enfant à l’âge de 9 ans s’annule, alors qu’elle se maintient pour l’HTA gravidique. L’interprétation de ces résultats est assez séduisante, par sa portée au‐delà de la seule épidémiologie : ‐
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L’HTA gravidique et la pré‐éclampsie sont associés à des chiffres tensionnels plus élevés chez les enfants des mères qui en ont été atteintes Cette association n’est pas liée à une obésité familiale Les mécanismes liant pré‐éclampsie et HTA à une PA plus élevée chez l’enfant sont probablement différents l’un de l’autre Le faible poids à la naissance des enfants de mère atteintes de pré‐éclampsie est probablement impliqué. Geelhoed JJM, Fraser A, Tilling K, et al. Preeclampsia and gestational hypertension are associated with childhood blood pressure independently of family adiposity measures. Circulation 2010; 122: 1192‐99.