Modifications récentes apportées à la loi du 11 janvier - CTIF-CFI
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Modifications récentes apportées à la loi du 11 janvier - CTIF-CFI
Modifications récentes apportées à la loi du 11 janvier 1993 par la loi programme du 29 mars 2012 Avec la loi programme du 29 mars 2012, publiée au Moniteur Belge du 6 avril 2012 (entrée en vigueur le 16 avril 2012) différentes modifications ont été apportées à la loi du 11 janvier 1993. Ces mesures ont pour objectif de mettre le dispositif législatif belge en conformité avec la pratique dans d’autres pays voisins. Il est en effet crucial de s’aligner sur ces pratiques afin d’éviter que notre pays et ses secteurs financier et non financier ne soient utilisés pour la réalisation d’opérations de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme rendues plus difficiles ou plus hasardeuses pour les criminels et délinquants dans les États voisins. 1. Renforcement des limitations de paiement en espèces Afin de lutter plus efficacement contre l’économie souterraine, le blanchiment d’argent et la fraude fiscale et sociale, la loi programme du 29 mars 2012 a renforcé les limitations en matière de paiements en espèces. Le législateur a estimé utile de prendre des mesures d’accompagnement suite au récent assouplissement du secret bancaire à l’égard des autorités fiscales. Le risque de voir un retour à des paiements en espèces était non négligeable et a justifié la prise de cette mesure. En modifiant les articles 20 et 21 de la loi du 11 janvier 1993 (voir Ressources – dispositions législatives – législation belge), la loi programme renforce la limitation des paiements en espèces dans une première phase de 15.000 EUR à 5.000 EUR, et ceci à dater du 16 avril 2012. Les prestations de services sont aussi dorénavant visées par cette interdiction. Le législateur vise la vente par un commerçant d’un ou de plusieurs biens ainsi qu’une ou plusieurs prestations de services fournies par un prestataire de services. Le prix de la vente par un commerçant d’un ou de plusieurs biens ainsi que le prix d’une ou de plusieurs prestations de services fournies par un prestataire de services pour un montant de 5.000 euros ou plus, ne peut être acquitté en espèces que pour un montant n’excédant pas 10 % du prix de la vente ou de la prestation de services et pour autant que ce montant ne soit pas égal ou supérieur à 5 000 euros, que la vente ou la prestation de services soit effectuée en une opération ou sous la forme d’opérations fractionnées qui apparaissent liées. Une nouvelle diminution du seuil autorisé à 3000 EUR à partir du 1er janvier 2014 est prévue pour la vente de biens et pour la prestation de services, pour mettre la Belgique au même niveau que la plupart des autres pays. Il faut finalement souligner que ces mesures ne s’appliquent pas aux paiements effectués entre particuliers, ni aux versements sur comptes bancaires. Ces derniers sont en effet déjà soumis aux obligations de vigilance et d’identification prévues par la loi du 11 janvier 1993 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. En ce qui concerne la vente de biens immobiliers le prix de vente d’un bien immobilier ne pourra plus du tout être réglé en espèces à partir du 1er janvier 2014. Jusqu’à cette date, les paiements en espèces lors de l’achat de biens immobiliers en Belgique sont limités à 10% du prix de la vente pour autant que ce montant ne soit pas supérieur à 5000 euros. La limite de 15.000 EUR pour les paiements en espèces qui était d’application en Belgique était relativement élevée en comparaison avec la pratique d’autres pays européens. En Italie, par exemple, ce montant s’élève à 1.000 EUR. En France, toute transaction commerciale de plus de 3.000 EUR ne peut être réglée en espèces. De plus le champ d’application en Belgique était trop limité par rapport à ce qui ce fait dans d’autres pays, puisque l’interdiction de paiements en espèces pour les prestations de services n’étaient pas visés par notre législation. Dans le futur, les commerçants et prestataires de services devront signaler à la CTIF le non respect de l’interdiction de paiements en espèces (y compris les tentatives de paiements en espèces) pour plus de 5.000 EUR (3.000 EUR à partir du 1er janvier 2014). Cette dernière obligation n’est pas encore entrée en vigueur (un Arrêté Royal doit encore désigner les secteurs (commerçants et prestataires de services) qui seront visés par cette obligation d’informer la CTIF. Cette désignation se fera sur base d’une analyse de risque en concertation avec les secteurs concernés et sur avis de la Cellule de Traitement des Informations Financières. 2. Allongement à 5 jours ouvrables du délai d’opposition de la CTIF à l’exécution d’opérations Le délai d’opposition de la CTIF prévu à l’article 23 § 2 de la loi du 11 janvier 1993 (voir Ressources – dispositions législatives – législation belge) est porté de 2 à 5 jours ouvrables. La CTIF peut dorénavant s’opposer à l’exécution d’une opération pendant maximum cinq jours ouvrables à compter de la notification. Un jour ouvrable est chaque jour à l’exception d’un samedi, un dimanche ou un jour férié légal. Dans la majorité des cas, la CTIF dispose de suffisamment de temps avec un délai de 2 jours ouvrables. Toutefois, dans certaines circonstances un délai plus long est susceptible de renforcer l’action des autorités judiciaires. 3. Interdiction d’informer le client L’allongement à 5 jours ouvrables du délai d’opposition de la CTIF est accompagné d’une mesure d’assouplissement de l’interdiction d’informer le client tel que prévue à l’article 30 § 2 de la loi du 11 janvier 1993 (voir Ressources – dispositions législatives – législation belge). L’interdiction d’informer le client ou un tiers d’un blocage des opérations est levée après expiration des deux jours ouvrables du délai visé à l’article 23, § 2, alinéa 3 (voir Ressources – dispositions législatives – législation belge). En pratique cette levée d’interdiction ne devrait s’appliquer que dans les cas très limités où il apparait impossible pour l’institution financière de ne pas donner suite aux demandes d’explication du client concernant le blocage temporaire d’une opération. La Cellule sera particulièrement attentive à trouver les solutions opérationnelles les plus adéquates et les plus équilibrées dans le cadre de l’application des dispositions nouvelles. 4. La Mise en place d’une collaboration structurée et effective entre la CTIF et l’Organe Centrale pour la Saisie et la Confiscation (OCSC) Lorsque que la CTIF, vu l’urgence ou la gravité de l’affaire, s’oppose à l’exécution d’une opération et lorsque dans le délai de cette opposition elle transmet les informations au procureur du Roi ou au procureur fédéral, elle doit dorénavant en vertu de l’article 34 (voir Ressources - dispositions législatives – législation belge) en informer sans délai l’Organe Centrale pour la Saisie et la Confiscation (OCSC). Celui-ci pourra user de ses prérogatives pour assister les parquets qui jugent opportun de saisir judiciairement les avoirs bloqués par la CTIF. Cette même mesure s’applique aussi lorsque des avoirs d’une valeur significative, de quelque nature que ce soit, sont disponibles en vue d’une saisie judiciaire éventuelle. 5. Un meilleur échange d’information entre les autorités compétentes en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et la saisie et la confiscation des produits du crime Dans le cadre d’une coopération plus efficace entre les services administratif de l’Etat qui sont directement ou indirectement impliqués dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, le législateur a estimé qu’il était indiqué que les fonctionnaires des services administratifs de l’Etat, ainsi que les curateurs et administrateurs provisoires, qui constatent des faits qu’ils savent ou suspectent d’être en relation avec du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, en informent la CTIF. La CTIF peut faire usage de toutes les compétences qui lui ont été conférées par la loi du 11 janvier 1993 pour analyser ces informations. Ces informations sont traitées par la CTIF comme des déclarations de soupçon au même titre que les déclarations reçues des organismes et personnes visées. Ces nouvelles dispositions figurent à l’article 33 de la loi du 11 janvier 1993 où entre le deuxième et le troisième alinéa un alinéa supplémentaire a été ajouté (voir Ressources – dispositions législatives - législation belge). Dans cette même optique (un meilleur échange d’information et une meilleure perception pour l’Etat en cas de condamnation d’un prévenu à une amende ou à la confiscation d’avoirs patrimoniaux), le législateur a aussi modifié l’article 15, § 2 de la loi du 26 mars 2003, portant création d'un Organe Central pour la Saisie et la Confiscation (OCSC) et portant des dispositions sur la gestion à valeur des biens saisis et sur l'exécution de certaines sanctions patrimoniales. L’article 15 § 2 de la loi du 26 mars 2006 portant création de l’OCSC a été modifié en sorte que la CTIF puisse aujourd’hui transmettre des informations à l’OCSC sur la situation patrimoniale d’une personne condamnée dans le cadre d’une enquête de solvabilité si l’OCSC en fait la demande. L’échange réciproque d’informations entre l’OCSC et la CTIF au sujet de la situation patrimoniale de personnes condamnées n’était jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi programme du 29 mars 2012 juridiquement pas possible.