question de synthese

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question de synthese
QUESTION DE SYNTHESE
Il est demandé au candidat :
1. de conduire le travail préparatoire qui fournit des éléments devant être utilisés dans la synthèse ;
2. de répondre à la question de synthèse :
 par une argumentation assortie d’une réflexion critique, répondant à la problématique donnée dans l’intitulé,
 en faisant appel à ses connaissances personnelles,
 en composant une introduction, un développement, une conclusion pour une longueur de l’ordre de trois pages.
3. Ces deux parties sont d’égale importance pour la notation.
4. Il sera tenu compte, dans la notation, de la clarté de l’expression et du soin apporté à la présentation.
La calculatrice n’est pas autorisée.
THÈME : La mobilité sociale
1 – TRAVAIL PRÉPARATOIRE (10 pts)
Vous répondrez à chacune des questions en une dizaine de lignes maximum.
Q1 – Comparez les destinées des filles et des fils de cadres et professions intellectuelles supérieures en utilisant
les chiffres du document 1. (1 point)
Q2 – Que nous apprennent les données de la diagonale (cases en gras) sur les destinées des hommes et des
femmes ? (Document 1). (2 points)
Q3 – Expliquez le passage souligné. (Document 2). (2 points)
Q4 – Montrez à l'aide d'un exemple comment la socialisation différenciée selon le sexe influence les choix
professionnels. (Document 1 et document 2). (2 points)
Q5 – Retrouvez le mode de calcul de la donnée en gras. (Document 3). (1 point)
Q6 – Comment les choix d'orientation des garçons et des filles influencent-ils leur destinée professionnelle ?
(Document 3). (1 point)
Q7 – Expliquez la phrase soulignée. (Document 4) (1 point)
2 – QUESTION DE SYNTHÈSE (10 pts)
Sujet = Après avoir mis en évidence les principales inégalités entre les hommes et les femmes en
matière de mobilité sociale, vous en présenterez les explications.
DOCUMENT 1 – Catégories socioprofessionnelles des femmes et des hommes en 2003 en fonction de celle
des pères (en %)
Extrait d'une table mixte des destinées
PCS des pères
AE
ACCE
PCIS
PI
E
O
Total
H
22
1
0
0
0
1
4
F
12
1
0
0
1
1
2
H
6
21
6
8
7
8
9
F
3
7
3
3
4
4
4
H
9
22
52
33
22
10
19
F
6
15
33
15
9
5
10
H
17
24
26
33
28
23
24
F
21
25
36
32
26
16
22
H
9
9
6
9
17
12
10
F
46
45
26
42
51
55
49
H
37
24
9
17
26
46
34
F
12
7
2
7
10
20
13
100
100
100
100
100
100
100
PCS des fils et filles
Agriculteur exploitant
Artisan, commerçant, chef d'entreprise
Cadre, profession intellectuelle supérieure
Profession intermédiaire
Employé
Ouvrier
Total
Champ : hommes et femmes, actifs occupés ou anciens actifs occupés en mai 2003, âgés de 40 à 59 ans.
Pour chaque CS, la ligne H correspond aux hommes et la ligne F aux femmes.
(Source : D'après enquête FQP 2003, INSEE).
DOCUMENT 2 –
Un système binaire de représentations nous montre partout dans le monde le féminin associé à la douceur et le masculin à
la violence, et les comportements sociaux des individus, les normes institutionnelles et le regard collectif imposent à chaque
individu d'être le plus conforme possible à la définition commune du genre. Des jouets offerts aux réprimandes, des
compliments aux injonctions, des comportements préférentiels aux brimades, de la réprobation à la récompense, tout est mis en
œuvre, tout conduit dès la prime enfance les enfants de l'un ou l'autre sexe à assumer seulement l'un des deux caractères.
Pour ne pas parler des images lourdement incitatives que les enfants voient à la télévision.
(Source : Françoise Héritier, Masculin-féminin II, Dissoudre la hiérarchie, Éditions Odile Jacob, 2002).
DOCUMENT 3 – Séries suivies par les élèves en classe de première de l'enseignement général et technologique
(Rentrée 2000-2001)
Filles
Garçons
Part des filles
Effectifs en % Effectifs en %
en %
Littéraire
37 665
27,1
7 384
7,5
83,6
Économique
45 583
32,8
23 234
23,6
66,2
Scientifique
55 813
40,1
67 725
68,9
45,2
Ensemble
139 061
100
98 343
100
58,6
Sciences médico-sociales
8 531
15,4
327
0,6
96,3
Sciences et technologies industrielles
2 383
4,3
30 598
53,2
7,2
Sciences et techniques de laboratoire
3 104
5,6
2 548
4,4
54,9
Sciences et technologies tertiaires
41 403
74,7
24 009
41,8
63,3
Ensemble
55 421
100
57 482
100
49,1
Séries générales
Séries Technologiques
Champ : France métropolitaine et départements d'outre-mer, Enseignement public.
Source : Repères, Statistiques, Références, Ministère de l'éducation nationale, 2002.
DOCUMENT 4 –
Quant à la mixité du monde du travail, elle n’existe toujours pas. Les 5 millions d’actives supplémentaires venues sur le
marché du travail depuis les années 60 ne sont pas dispersées dans les différents secteurs économiques. Elles ont intégré les
secteurs peu valorisés socialement et déjà fortement féminisés.
La réussite scolaire et universitaire des filles s’est accompagné du maintien d’une ségrégation sexuée des filières
d’enseignement, pour différentes raisons, intériorisation par les filles des modèles féminins, sexisme des manuels scolaires,
orientation par les parents et enseignants, choix “raisonnable” effectué par les filles en fonction du marché du travail...) qui
produisent un cercle vicieux. Du côté des entreprises, le système d’embauche et de déroulement des carrières est très
“ségrégué”. Le monde du travail fonctionne toujours avec une vision figée de ce qu’est le travail féminin et masculin. Pour tel
poste, l’employeur est convaincu qu’il faut un homme, ou une femme, d’ailleurs. Or la palette des emplois considérés comme
masculin est bien plus large.
Par ailleurs, lorsqu’on écoute les employeurs, on a l’impression que les femmes sont perpétuellement enceintes ou
chargées d’enfants en bas âge. Dans les entretiens d’embauche, on leur demande si elles ont des enfants ou si elles en
veulent, ce qu’on ne demande jamais aux hommes, qui eux, sont considérés comme des êtres sans famille. Les pays
scandinaves ont innové dans le bon sens en instaurant des congés de paternité, qui sont perdus si le père ne les prend pas.
Car, tant que l’on réfléchit à des solutions spécifiques pour les mères, on creuse le sillon de la discrimination.
(Source : Margaret Maruani, Le Monde, 28 mars 2000)
MOBILITE SOCIALE MASCULINE ET FEMININE
1 – TRAVAIL PREPARATOIRE
Q1 – La destinée sociale compare la position sociale occupée par une génération à celle de la génération précédente pour une
catégorie sociale donnée. En France, en 2003, 52% des hommes de 40-59 ans, issus de la catégorie cadres supérieurs et
professions libérales, appartiennent à la même catégorie que leur père alors que ce n’est le cas que pour 33% des femmes du
même âge et de même origine. En conséquence, la mobilité des femmes, qui avaient un père cadre supérieur, est
descendante : 36% d’entre-elles appartiennent aux professions intermédiaires à 40-59 ans et 26% sont devenues employées
de bureau ou de commerce ;
Q2 – En matière de mobilité sociale intergénérationnelle, la diagonale nous informe sur le poids de la reproduction sociale ou
de l’immobilité sociale, c’est-à-dire de la probabilité de retrouver le milieu d’origine de son père. De ce point de vue, on peut
faire trois constats :
 Quelque soit le sexe, la reproduction sociale est plus forte aux deux extrêmes de la hiérarchie sociale. En France, en
2003, 52% des fils de cadres supérieurs retrouvent la position de leur père à 40-59 ans, 46% des fils d’ouvriers sont
dans le même cas et 51% des filles d’employés sont elles-mêmes employées au même âge.
 A l’exception de la catégorie Employé, l’immobilité est plus forte pour les hommes que pour les femmes. Elle est 1,5
fois plus forte dans la catégorie cadre supérieurs et 2,3 fois plus forte dans la catégorie ouvrier.
 La mobilité est plus forte pour les classes moyennes mais elle est plus ascendante pour les hommes que pour les
femmes. Un tiers des fils de professions intermédiaires accèdent à la catégorie cadres supérieurs à 40-59 ans alors
que cela ne concerne que 15% des femmes issues du même milieu au même âge.
Q3 – Les comportements des acteurs sociaux renvoient à des stéréotypes de genre imposés par la société et les institutions.
Ces stéréotypes correspondent à des modèles de comportements attendus pour chaque sexe de la part de la société. De plus
un contrôle social, c’est-à-dire l’ensemble des moyens utilisés par les groupes sociaux pour rendre l’individu conforme, s'exerce
pour faire en sorte que les modèles de comportements masculins et féminins correspondent aux normes sociales et aux valeurs
définies par la société. Ces modèles de comportement sont transmis par la socialisation différentielle des garçons et des filles et
s'expriment par des comportements attendus à leur égard (« une fille est courtisée », « un garçon ne doit pas pleurer »). Les
normes sociales s’imposent aux individus dans la perspective holiste de Durkheim. Elles sont extérieures à l’individu et
s’imposent à lui.
Q4 – La socialisation est le processus par lequel un individu apprend et intériorise les normes et les valeurs propres à un
groupe social et à une société. Garçons et filles ne reçoivent pas pendant l’enfance la même socialisation primaire. Par des
injonctions différenciées (« sois belle », « soit fort »), par des couleurs différentes (le rose opposé au bleu), par des jouets
différents (la poupée et ses attributs opposés à la voiture ou au pistolet), les enfants vont apprendre les différences de genre.
En effet, les attentes des parents sont différentes envers leur fils ou leur fille et ces attentes correspondent à un système de
représentations préexistantes bien qu'en évolution. C'est ainsi que l'on pense que les garçons sont plus doués que les filles
pour les matières scientifiques à l'école, que l'on attend des garçons un comportement « viril » et des filles une certaine «
docilité » (voir Bourdieu). Cela va se traduire par le fait que les « qualités » attribuées aux filles les poussent vers des études et
des métiers plus « sociaux » au contact de la population (caissières, vendeuses, assistantes sociales, infirmières ou
enseignement pour les catégories supérieures) et que les garçons vont exercer des métiers plus en rapport avec leurs qualités
supposées (Ingénieurs, techniciens, ouvriers, chauffeurs…). En France, 2003, la moitié des femmes de 40-59 ans sont
employées (Tertiaire) alors que 13% seulement d’entre elles sont ouvrières (Industrie).
Q5 – Il suffit de faire une règle de trois. Nombre de filles en littéraire divisé par effectif total dans cette section multiplié par cent.
37 665/37 665 + 7 384 x 100 = 83,6%
Q6 – Les filles sont surreprésentées dans les filières littéraires (83,6% des élèves de la série L sont des filles), elles constituent
aussi la quasi totalité des séries « sciences médico-sociales ». Par contre on en rencontre une plus faible proportion dans les
sections scientifiques (40,1% des élèves de la série S sont des filles) et surtout en STI (4,3% des élèves de cette section sont
des filles). Ces choix d'orientation sont importants dans le sens où ils préfigurent les choix d'orientation dans le supérieur et le
futur métier exercé par les filles. Elles, se destinent dès le secondaire à des professions d'aide aux personnes, d'enseignement,
de techniques de laboratoire... Cela ne signifie cependant pas qu'elles sont exclues des carrières scientifiques ou de direction,
mais leur probabilité d'y accéder est moins importante que celle des garçons.
Q7 – Dans une perspective individualiste, on peut comprendre les choix raisonné d’orientation des filles. Elles calculent le gain
qu’elles peuvent espérer en choisissant un métier considéré comme féminin (plus grande perspective d’embauche, horaires
aménagés ou décalés, forte présence féminine et moindre discrimination…) et le coût du choix d’un métier masculin (horaires
plus contraignant pour la vie de famille, moindre considération, salaires plus faibles, discrimination dans l’avancement…). Si les
gains l’emportent sur les coûts, elles choisissent en toute connaissance de cause des métiers féminins. L’orientation scolaire
n’est plus imposée. Elle résulte d’un choix calculé des acteurs selon Max Weber ou Raymond Boudon.
2 – SYNTHESE
Introduction



Amorce = En décidant d’instaurer la parité dans son gouvernement, le Premier ministre Ayrault et le Président Hollande
ont voulu montrer que la destinée sociale des femmes devait être égale à celle des hommes. L’égalité des chances
promises à tous est un élément essentiel du consensus social. L'observation de la structure par genre des PCS montre
que les femmes sont surreprésentées dans certains métiers (employés, certaines professions intermédiaires comme
agents du service social, de la santé). Pourtant elles poursuivent aujourd'hui des études plus brillamment que les
garçons et leurs choix d'orientation scolaire sont libres.
Problématique = En quoi la circulation des femmes dans l’espace sociale est-elle différente de celle des hommes ? Tous
les individus, quelque soit leur genre, ont-ils les mêmes chances de changer de position sociale au cours de leur vie
(mobilité verticale intra-générationnelle) ou par rapport à celle de leurs parents (mobilité verticale intergénérationnelle) ?
Cette mobilité est-elle plus ascendante ou plus descendante pour les femmes ? Comment expliquer ces différences ?
Annonce du plan = Après avoir repéré les principales inégalités entre hommes et femmes en matière de mobilité, nous
en présenterons les explications.
1 – LES MOBILITES SOCIALES DES HOMMES ET DES FEMMES NE SONT PAS EGALES
A – LES FEMMES SONT PLUS MOBILES
Phrase introductive = La mobilité féminine a été peu étudiée jusqu’à présent car une majorité de femmes était inactive
pendant une partie des trente glorieuses à la suite du baby-boom. Cependant, la forte croissance de l’activité féminine à la fin
des années 1960 nous permet maintenant de comparer la position sociale des hommes et celle des femmes comparée à celles
de leur père. Qu’ont-elles de différent ?

L’immobilité sociale est plus forte pour les hommes que pour les femmes. La diagonale d’une table de destinée nous
informe sur le poids de la reproduction sociale ou de l’immobilité sociale, c’est-à-dire de la probabilité de retrouver le
milieu d’origine de son père (Q2, Doc1). De ce point de vue, on peut faire trois constats :




Quelque soit le sexe, la reproduction sociale est plus forte aux deux extrêmes de la hiérarchie sociale. En France,
en 2003, 52% des fils de cadres supérieurs retrouvent la position de leur père à 40-59 ans, 46% des fils d’ouvriers
sont dans le même cas et 51% des filles d’employés sont elles-mêmes employées au même âge.
A l’exception de la catégorie Employé, l’immobilité est plus forte pour les hommes que pour les femmes. Elle est
1,5 fois plus forte dans la catégorie cadre supérieurs et 2,3 fois plus forte dans la catégorie ouvrier.
La mobilité est plus forte pour les classes moyennes mais elle est plus ascendante pour les hommes que pour les
femmes. Un tiers des fils de professions intermédiaires accèdent à la catégorie cadres supérieurs à 40-59 ans
alors que cela ne concerne que 15% des femmes issues du même milieu au même âge.
La mobilité féminine est plus concentrée sur un nombre réduit de PCS et de professions.


Les femmes restent concentrées dans les catégories employés et professions intermédiaires qui sont en
expansion alors que les hommes ont plus de chances de connaître une palette de position sociale plus large. En
2003, 49% des femmes de 40-59 ans sont employées et 22% appartiennent aux professions intermédiaires alors
que les hommes sont plus dispersés : 19% d’entre eux sont cadres, 24% appartiennent aux professions
intermédiaires, 34% sont ouvriers… (Doc 1).
Les destinées des femmes renvoient également à une structure très concentrée. En France, en 2003, 55% des
filles d'ouvriers sont employées à 40-59 ans, 51% des filles d'employés restent dans cette catégorie au même âge
contre 9% des garçons, 42% des filles issues des catégories intermédiaires deviennent employées à 40-59 ans
contre 10% des garçons. Les trajets des femmes sont des trajets courts (Doc 1).
B – MAIS LEUR MOBILITE EST PLUS DESCENDANTE QU’ASCENDANTE
Phrase introductive = La destinée sociale compare la position sociale occupée par une génération à celle de la génération
précédente pour une catégorie sociale donnée. Si les femmes sont plus mobiles, cela signifie-t-il qu’elles bénéficient d’une
mobilité ascendante qu’elle devrait pouvoir obtenir puisqu’elles réussissent mieux scolairement que les garçons ?

L’accès aux positions sociales élevées est plutôt réservé aux hommes. La probabilité de devenir cadre (la catégorie la
plus en expansion) est plus forte pour les hommes que pour les femmes quelque soit l’origine sociale. En France, en
2003, 52% des hommes de 40-59 ans, issus de la catégorie cadres supérieurs et professions libérales, appartiennent à
la même catégorie que leur père alors que ce n’est le cas que pour 33% des femmes du même âge et de même origine.
Cette inégalité de genre dans l'accès à la profession de cadre est vérifiée quelle que soit la catégorie sociale d'origine 9%
des fils d’agriculteurs contre 6% des filles de même origine et de même âge, 33% des fils de professions intermédiaires
contre 15% des filles de même milieu social, 22% des fils d'employés contre 9% des filles de même catégorie
sociale…(Q1, Doc 1)

A l'opposé, les femmes ont plutôt une mobilité descendante. En France, en 2003, 52% des hommes de 40-59 ans, issus
de la catégorie cadres supérieurs et professions libérales, appartiennent à la même catégorie que leur père alors que ce
n’est le cas que pour 33% des femmes du même âge et de même origine. En conséquence, la mobilité des femmes, qui
avaient un père cadre supérieur, est descendante : 36% d’entre-elles appartiennent aux professions intermédiaires à 4059 ans et 26% sont devenues employées de bureau ou de commerce. De même, 42% des femmes de 40-59 ans, dont le
père appartenait aux professions intermédiaires, sont « descendues » dans la catégorie employée … (Q1, Doc 1). Seule,
les filles d’ouvriers ont connu une mobilité majoritairement ascendante.
Conclusion partielle = Ces observations nous montrent une grande inégalité sociale entre filles et garçons en ce qui
concerne leur destinée. Les positions sociales restent sexuées : les employés sont en grande majorité des femmes, les ouvriers
sont en grande majorité des hommes. Enfin nous observons une des facettes de la « domination masculine » (Bourdieu) qui fait
que les femmes sont dominées sur le marché du travail comme dans leur activité professionnelle. Il est donc important d'étudier
les raisons qui conduisent à cette situation
2 – CE QUI RENVOIENT AUX INEGALITES DE GENRE
A – LA SOCIALISATION DIFFERENCIEE
Phrase introductive = La circulation des hommes et des femmes dans l’espace social au cours de leur vie ou d’une
génération à l’autre est-elle le fait des contraintes sociales qui s’imposent aux individus ou résultent-elles des choix conscients
des individus eux-mêmes ? Cette inégalité observée entre hommes et femmes dans le domaine de la mobilité sociale peut
s'expliquer de plusieurs façons.

Tout d’abord, elle est le reflet d’une socialisation différenciée. La socialisation est le processus par lequel un individu
apprend et intériorise les normes et les valeurs propres à un groupe social et à une société. Garçons et filles ne reçoivent
pas pendant l’enfance la même socialisation primaire. Par des injonctions différenciées (« sois belle », « soit fort »), par
des couleurs différentes (le rose opposé au bleu), par des jouets différents (la poupée et ses attributs opposés à la
voiture ou au pistolet), les enfants vont apprendre les différences de genre. En effet, les attentes des parents sont
différentes envers leur fils ou leur fille et ces attentes correspondent à un système de représentations préexistantes bien
qu'en évolution (Q4, Doc 2).

Ensuite, cette socialisation familiale va être renforcée par d’autres instances de socialisation et par le contrôle social. Les
comportements des acteurs sociaux renvoient à des stéréotypes de genre imposés par la société et les institutions
(l’Ecole, les médias, les pairs). Ces stéréotypes correspondent à des modèles de comportements attendus pour chaque
sexe de la part de la société. De plus un contrôle social, c’est-à-dire l’ensemble des moyens utilisés par les groupes
sociaux pour rendre l’individu conforme, s'exerce pour faire en sorte que les modèles de comportements masculins et
féminins correspondent aux normes sociales et aux valeurs définies par la société. Ces modèles de comportement sont
transmis par la socialisation différentielle des garçons et des filles et s'expriment par des comportements attendus à leur
égard (« une fille est courtisée », « un garçon ne doit pas pleurer »). Les normes sociales s’imposent aux individus dans
la perspective holiste de Durkheim. Elles sont extérieures à l’individu et s’imposent à lui (Q3, Doc 2).

Enfin, cette socialisation va induire des choix d’orientation scolaire et professionnels. Cette socialisation a des
conséquences très importantes dans la vie future des filles car, c'est à partir de celle-ci qu'elles vont suivre certains types
d'étude et se diriger vers une profession :


En effet nous voyons que les études suivies par les filles ne sont pas les mêmes que celles suivies par les
garçons. Les filles sont surreprésentées dans les filières littéraires (83,6% des élèves de la série L sont des filles,
soit 37 665 filles sur 45 049 élèves de la série), elles constituent aussi la quasi totalité des séries « sciences
médico-sociales ». Par contre on en rencontre une plus faible proportion dans les sections scientifiques (40,1%
des élèves de la série S sont des filles) et surtout en STI (4,3% des élèves de cette section sont des filles) (Q5 et
6, Doc 3). Nous pouvons aussi remarquer qu'à résultats scolaires équivalents, les filles et leurs parents ont moins
d'ambition que les garçons (Marie Duru-Bellat) et qu'elles se dirigent essentiellement vers des sections qui sont
en rapport avec leurs qualités définies par des stéréotypes sociaux : le social, les soins, l’éducation…
Les études suivies par les filles conditionnent leur destinée professionnelle. Les « qualités » attribuées aux filles
les poussent vers des études et des métiers plus « sociaux » au contact de la population (caissières, vendeuses,
assistantes sociales, infirmières ou enseignement pour les catégories supérieures) et que les garçons vont
exercer des métiers plus en rapport avec leurs qualités supposées (Ingénieurs, techniciens, ouvriers,
chauffeurs…). En France, 2003, la moitié des femmes de 40-59 ans sont employées (Tertiaire) alors que 13%
seulement d’entre elles sont ouvrières (Industrie) (Q4, Q6, Doc 1, et 3).
B – LES INEGALITES DANS LE PARTAGE DES TÂCHES
Phrase introductive = Le poids des contraintes sociales n’empêchent pas certaines femmes de transgresser les codes
sociaux. Un nombre croissant de médecins sont des femmes. Il en est de même pour les ingénieurs, les pilotes d’avion ou de
bus…Les femmes pénètrent les bastions professionnels masculins. Comment expliquer que ce mouvement ne soit pas plus
puissant ?

D’une part les femmes s’identifient à la répartition des métiers existants. Certains métiers sont dits « féminins » (sagefemme, institutrice, caissière, secrétaire…) alors que certains métiers sont dits « masculins » (ingénieurs, dockers,
chauffeur…) parce qu’ils sont massivement investis respectivement par les femmes et par les hommes. Accéder à un
métier masculin pour une femme a un coût : réprobation de la famille, moqueries des camarades de travail qui
considèrent qu’elles n’a pas les capacités pour exercer ce métier (l’armée par exemple), moindre disponibilité pour les
tâches domestiques… (Q7, Doc 4).

D’autre part, ces choix sont des choix raisonnés. Dans une perspective individualiste, on peut comprendre les choix
raisonné d’orientation des filles. Elles calculent le gain qu’elles peuvent espérer en choisissant un métier considéré
comme féminin (plus grande perspective d’embauche, horaires aménagés ou décalés, forte présence féminine et
moindre discrimination…) et le coût du choix d’un métier masculin (horaires plus contraignant pour la vie de famille,
moindre considération, salaires plus faibles, discrimination dans l’avancement…). Si les gains l’emportent sur les coûts,
elles choisissent en toute connaissance de cause des métiers féminins. Cette différence entre garçons et filles dans
l'accès à certaines professions ne correspond pas à une interdiction pour les filles d'accéder à certains métiers mais
provient « d'intérêts bien compris » de leur part et de la définition des rôles de leur sexe qu'elles ont intériorisé.
L’orientation scolaire n’est plus imposée. Elle résulte d’un choix calculé des acteurs selon Max Weber ou Raymond
Boudon. De plus nous pouvons remarquer que les femmes ont une forte tendance encore aujourd'hui à se ranger
derrière la carrière professionnelle de leur mari comme le montre François De Singly « Fortune et infortune de la femme
mariée ».
Conclusion


Rappel de la démonstration = Le type spécifique de mobilité sociale des filles par rapport aux garçons que nous avons pu
repérer est directement lié aux représentations concernant les femmes dans la société contemporaine. Les stéréotypes
concernant chaque sexe sont transmis dès le plus jeune âge par le processus de socialisation et s'actualisent par la suite
dans le type d'étude choisi par les filles et par leur accès à certaines professions qui leur sont « réservées ». Ces
professions sont en relation directe avec l'image de la femme que se donne la société contemporaine.
Ouverture = De fait l'évolution des mœurs pourrait se traduire par une modification des représentations attachées aux
femmes et ainsi changer leur place dans le monde professionnel. De ce point de vue, il serait intéressant d’avoir une
table de mobilité sociale comparant la position sociale des filles et la position sociale de leur mère.