Les origines de l`Univers : science et foi

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Les origines de l`Univers : science et foi
 Les origines de l’Univers : science et foi
Conférences de Jean Duhaime et d’Hubert Reeves
Soirée du 23 octobre 2008
Bible et science
complémentarité?
devant
les
origines
de
l’Univers :
opposition
ou
Par Jean Duhaime
Théologien, bibliste, sociologue, Jean Duhaime enseigne à la Faculté de théologie
et de sciences des religions de l’Université de Montréal depuis 1976. Il a fait des
études bibliques à l’Université de Montréal de même qu’à l’École biblique et
archéologique française de Jérusalem. Intéressé par les Psaumes, les prophètes et
les textes de Qumrân, il est très engagé dans le dialogue interreligieux,
particulièrement entre judaïsme et christianisme.
Introduction
Pendant plusieurs siècles, dans le judaïsme et dans la chrétienté, on a pensé les origines de
l’Univers principalement à partir des données bibliques sur la création, et notamment du récit du
premier chapitre de la Genèse, qui évoque une création du monde par Dieu en six jours il y a
6 000 ans. Avec le développement des outils scientifiques, une autre vision s’est progressivement
mise en place : il est devenu courant aujourd’hui d’évoquer une explosion initiale, le « Big
bang », survenu il y a environ 13,7 milliards d’années, d’où aurait jailli un Univers en expansion
où l’humanité est apparue au terme d’un long processus de sélection naturelle.
Une personne croyante doit-elle choisir entre ces deux versions des origines? Pour certains,
elles sont irréconciliables et, si l’on croit que la Bible est la Parole de Dieu, il faut rejeter le point
de vue scientifique. Pour d’autres, la foi et la science sont complémentaires et peuvent apporter,
chacune à sa manière, un éclairage pertinent sur la question des origines de l’Univers.
Pour illustrer ces deux points de vue divergents, je propose d’abord de parcourir les
principales données bibliques, puis d’explorer brièvement la manière dont elles sont interprétées
par les promoteurs du « créationnisme » ou du « dessein intelligent » et par un théologien
représentatif de ceux qui soutiennent la compatibilité des visions biblique et scientifique.
2 Quelques données bibliques sur les origines de l’Univers
La Bible s’ouvre sur deux récits de création. Dans le premier (Gn 1,1–2,4a), Dieu agit en
souverain qui fait advenir les choses par sa parole. Il crée d’abord le temps en séparant la lumière
et les ténèbres, ensuite l’espace en séparant les cieux, les eaux et la terre puis il meuble ces
espaces de leurs occupants : les luminaires célestes, les bêtes de la mer et de la terre, et après ces
dernières, comme point d’orgue, l’être humain, créé à son image, mâle et femelle, qui reçoit
mission de dominer la terre. Dieu trouve que tout ce qu’il avait fait en ces six premiers jours du
monde était « très bon » :
Gn 1,26–2,1
Dieu dit : « Faisons l'homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu'il soumette les
poissons de la mer, les oiseaux du ciel, les bestiaux, toute la terre et toutes les petites bêtes qui
remuent sur la terre! »
27 - Dieu créa l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa; mâle et femelle il les
créa.
28 - Dieu les bénit et Dieu leur dit : « Soyez féconds et prolifiques, remplissez la terre et
dominez-la. Soumettez les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et toute bête qui remue
sur la terre! »
29 - Dieu dit : « Voici, je vous donne toute herbe qui porte sa semence sur toute la surface
de la terre et tout arbre dont le fruit porte sa semence; ce sera votre nourriture.
30 - À toute bête de la terre, à tout oiseau du ciel, à tout ce qui remue sur la terre et qui a
souffle de vie, je donne pour nourriture toute herbe mûrissante. » Il en fut ainsi.
31 - Dieu vit tout ce qu'il avait fait. Voilà, c'était très bon. Il y eut un soir, il y eut un
matin : sixième jour.
2, 1 - Le ciel, la terre et tous leurs éléments furent achevés.
Dans le second récit (Gn 2,4b-24), un Dieu artisan fabrique d’abord l’homme à partir de la
poussière du sol et plante ensuite un jardin où il place le « terrien » (Adam) pour le garder et le
cultiver. Il veut ensuite pour l’homme une « aide accordée »; il crée les animaux, mais l’homme
n’y trouve pas la partenaire recherchée; la femme est finalement créée à partir d’une des côtes et
l’homme y reconnaît enfin « l’os de ses os et la chair de sa chair » :
Gn 2,4b-15*
Le jour où le SEIGNEUR Dieu fit la terre et le ciel,
5 - il n'y avait encore sur la terre aucun arbuste des champs, et aucune herbe des champs
n'avait encore germé, car le SEIGNEUR Dieu n'avait pas fait pleuvoir sur la terre et il n'y
avait pas d'homme pour cultiver le sol;
6 - mais un flux montait de la terre et irriguait toute la surface du sol.
7 - Le SEIGNEUR Dieu modela l'homme avec de la poussière prise du sol. Il insuffla
dans ses narines l'haleine de vie, et l'homme devint un être vivant.
8 - Le SEIGNEUR Dieu planta un jardin en Éden, à l'orient, […]
3 15 - Le SEIGNEUR Dieu prit l'homme et l'établit dans le jardin d'Éden pour cultiver le
sol et le garder.
La thématique de la création se retrouve également ailleurs dans la Bible, par exemple dans le
Ps 104 et en Jb 38–41. Le Ps 104 est apparenté au récit de la création en six jours, avec quelques
particularités intéressantes. Encadré par une invitation à bénir le Seigneur, (v. 1a.35b) il évoque
en première partie la maîtrise de Dieu sur les eaux (v. 1b-18) : il les domine depuis les cieux
(v. 1b-4), les a séparées de la terre, a limité leur territoire (v. 5-9) et s’en sert pour donner la vie
(v. 10-18). La deuxième partie, parallèle à la première, montre comment Dieu dispense la vie
(v. 19-35a) : en faisant alterner ténèbres et lumière, il permet la circulation sans heurt des bêtes
féroces, de nuit, et des hommes, de jour; chacun pouvant ainsi se procurer sa nourriture (v. 1923); on trouve la même surabondance de vie dans la mer qui n’est plus un chaos, mais un
grouillement d’animaux innombrables (v. 24-26); Dieu donne non seulement la nourriture, mais
aussi le souffle à chacune de ses créatures, à chaque instant, en se tenant à une distance suffisante
pour ne pas l’anéantir de son regard ou de son toucher; ceux qui abusent de ce souffle, les
pécheurs, sont appelés à disparaître (v. 27-35a). L’idée est ici non seulement d’un geste initial de
création, mais de la maîtrise constante du chaos par Dieu et du don de la vie sans cesse
renouvelé :
Ps 104,27-30
Tous comptent sur toi pour leur donner en temps voulu la nourriture:
28 - tu donnes, ils ramassent; tu ouvres ta main, ils se rassasient.
29 - Tu caches ta face, ils sont épouvantés; tu leur reprends le souffle, ils expirent et
retournent à leur poussière.
30 - Tu envoies ton souffle, ils sont créés, et tu renouvelles la surface du sol.
Dans les chapitres 38 à 41 du livre de Job, Dieu se manifeste au héros qui, après avoir rejeté
toutes les explications possibles à sa souffrance, réclamait d’en débattre avec Dieu lui-même.
Mais au lieu de lui offrir l’explication demandée, Dieu lui décrit sa puissance créatrice et le met
au défi d’en faire autant. Il a posé la pierre d’angle de la terre, l’a assise sur ses piliers immergés
et a freiné les eaux pour la protéger. Il commande au matin, aux neiges et aux vents, et s’occupe
des animaux sauvages, même ceux qui sont apparemment les plus dangereux et les plus
monstrueux. Devant tant de puissance, Job se confond en humbles excuses et renouvelle sa
confiance à Dieu :
Job 38,4-12*
Où est-ce que tu étais quand je fondai la terre? Dis-le-moi puisque tu es si savant.
5 - Qui en fixa les mesures, le saurais-tu? Ou qui tendit sur elle le cordeau?
6 - En quoi s'immergent ses piliers, et qui donc posa sa pierre d'angle […]
8 - Quelqu'un ferma deux battants sur l'Océan quand il jaillissait du sein maternel,
9 - quand je lui donnais les brumes pour se vêtir, et le langeais de nuées sombres.
4 10 - J'ai brisé son élan par mon décret, j'ai verrouillé les deux battants
11 - et j'ai dit : « Tu viendras jusqu'ici, pas plus loin; là s'arrêtera l'insolence de tes flots! »
12 - As-tu, un seul de tes jours, commandé au matin, et assigné à l'aurore son poste […] ?
Voilà quelques-uns des principaux textes bibliques qui évoquent les origines de l’Univers. La
cosmologie qu’ils suggèrent est relativement simple : trois espaces, le ciel, au-dessus de nos têtes,
la terre, sans doute plate et assise sur ses piliers, la mer menaçante mais contenue dans ses limites
et leurs habitants, créés tels que nous les voyons encore par un Dieu puissant qui continue de
pourvoir au bon ordre du monde et qui nourrit les vivants.
Malgré leur cohérence apparente, ces textes comportent des divergences. L’une des plus
évidentes est la séquence des événements qui diffère du récit de Gn 1 au récit de Gn 2. Mais on
aura aussi remarqué que le récit de Gn 1 est le seul où l’homme se voit confier la « domination de
la terre ». Dans Gn 2, il est placé dans le jardin pour le cultiver et le garder. Dans le Ps 104, il est
totalement intégré à son environnement et dépendant de Dieu pour la nourriture et le souffle au
même titre que toutes les autres créatures. Chez Job, on souligne son impuissance radicale devant
un Univers qui le dépasse complètement.
La Bible, en somme, n’offre pas un regard parfaitement homogène et cohérent sur les origines
de l’Univers. Plutôt que de chercher à éliminer ou à réconcilier ces contradictions, il vaut mieux
reconnaître que la Bible, en ce domaine comme en d’autres, a plusieurs manières d’aborder la
question pour dire à travers chacune quelque chose de la richesse d’un mystère qui échappe en
bonne partie à l’esprit humain. Cette diversité suggère également que d’autres points de vue sur
les origines de l’Univers sont également possibles… Pourtant, depuis que le développement des
sciences de la nature a proposé une vision évolutive des origines du monde, certains interprètes
de la Bible se sont braqués contre elle, tandis que d’autres ont cherché à l’intégrer dans leur
réflexion.
Bible et science en opposition. Créationnisme et dessein intelligent
On associe généralement les premiers heurts entre la Bible et la science à l’élaboration par
Copernic, Kepler et Galilée, au 16e et 17e siècle, d’un nouveau modèle du monde fondé sur des
données empiriques apparemment incompatibles avec les affirmations de la Bible. Mais c’est
surtout vers la fin du 19e et au début du 20e siècle qu’il faut situer la crise entre Bible et science
autour des origines de l’Univers. Dans un article récent sur le créationnisme, Arthur McCalla
retrace l’histoire de cette crise, qui se poursuit toujours.
Le contexte : l’avènement de la critique biblique moderne
À cette époque, la découverte de divers récits de création provenant d’anciennes civilisations du
Proche-Orient (Mésopotamie, Égypte, Ugarit) et dont certains semblent avoir servi de modèle
aux récits bibliques, ébranlait l’idée que la Bible proviendrait d’une révélation divine
exceptionnelle et exclusive. Ces découvertes amènent également à distinguer dans les textes
5 bibliques et extrabibliques divers genres littéraires, à interpréter chacun selon sa spécificité. Les
premiers chapitres de la Genèse seraient à considérer comme des récits à caractère mythique,
véhiculant une vérité de foi et non une vérité historique proprement dite.
On assiste simultanément au développement de la méthode historique (ou historico-critique)
qui commence à distinguer dans les livres bibliques plusieurs couches de rédaction superposées :
ainsi les cinq premiers livres (le Pentateuque) proviendraient non pas de Moïse (13e s. avant notre
ère), mais de quatre courants de pensée (yahviste, élohiste, deutéronomique et sacerdotal), dont
les textes, élaborés entre le 10e et le 6e s. avant notre ère se distinguent par leur style et leur
théologie. Le récit de Gn 1, appartiendrait à la couche la plus récente (sacerdotale) et celui de Gn
2 à la plus ancienne (yahviste), ce qui expliquerait leurs divergences.
Les découvertes archéologiques et l’avènement de la critique biblique ont secoué les Églises
chrétiennes, aussi bien catholiques que protestantes. La crise fut d’autant plus grande en milieu
protestant que la Bible constitue théoriquement la seule référence autorisée et qu’il importe qu’on
puisse s’y fier entièrement. Comment pourrait-on se fier à des textes anonymes comportant des
contradictions, du moins en apparence?
Créationnisme et fondamentalisme au début du 20e siècle
C’est dans ce contexte que se situe le débat entourant la théorie de Darwin sur l’origine des
espèces (parue en 1859). Darwin prétendait démontrer de manière empirique que le monde
animal comme nous le connaissons et dont nous faisons partie est le résultat d’un processus
évolutif échelonné sur une très longue période. Ni les animaux ni l’homme ne seraient sortis tels
quels des mains de Dieu il y a 6 000 ans, au moment de la création, comme la Bible le raconte.
Certains chrétiens libéraux, qui avaient déjà admis que les récits de la Genèse n’étaient pas de
l’histoire véritable, avaient intégrées les idées de Darwin « confiants que le processus de
l’évolution témoignait de l’intelligence et de la bienveillance de Dieu » (McCalla, 2007, p. 548).
D’autres au contraire, particulièrement aux États-Unis, y virent une attaque supplémentaire contre
ce qu’ils définissaient comment l’« inerrance » de la Bible. Pour eux, l’inerrance est l’un des cinq
points fondamentaux qu’un chrétien doit affirmer. L’inerrance biblique telle que définie par ces
« fondamentalistes » au début du 20e siècle signifie que « chaque mot est divinement inspiré et
que, par conséquent, la Bible ne contient aucune erreur d’aucune sorte, aucun mythe, et rien qui
ne soit devenu désuet » (p. 548-549).
Au milieu des années 1920, au Tennessee, les militants de la World’s Christian Fundamentals
Association (WFCA) parvinrent à faire adopter une loi interdisant « d’enseigner toute théorie qui
nie le récit de la création divine de l’être humain tel qu’enseignée par la Bible et d’enseigner à la
place que l’être humain descend d’un ordre inférieur d’animaux » (cité par McCalla, 2007,
p. 549). La constitutionalité de cette loi fut débattue en cour (procès Scope, 1925), avec un
résultat mitigé.
6 Le créationnisme des années 1960
Les premiers fondamentalistes prenaient parfois certains passages de la Bible « au figuré » pour
en préserver l’inerrance en dépit des évidences apportées par la recherche scientifique. Ainsi,
selon certains, les six « jours » de la création correspondraient à six « périodes » plutôt qu’à des
journées de 24 heures. On pouvait de cette manière concilier le récit biblique avec la théorie
scientifique qui supposait une terre très ancienne.
Mais une deuxième vague de fondamentalistes se montra plus radicale. Ce nouveau
créationnisme apparut en 1961, avec la publication par John C. Whitcomb et Henry M. Morris
d’un ouvrage intitulé The Genesis Flood : the Biblical Record and Its Scientific Implications.
Selon les auteurs, l’interprétation des six jours de la création comme six périodes de l’histoire
esquive le sens littéral de la Bible.
Se basant sur les visions de la prophétesse adventiste Ellen Gould White et les travaux d’un de
ses disciples, George McCready Price, Whitcomb et Morris soutiennent que la création du monde
a eu lieu en six journées de 24 heures. Selon eux, le récit biblique enseigne aussi que la mort est
la conséquence du péché d’Adam et Ève (Gn 3) et par conséquent les fossiles découverts par les
scientifiques doivent dater d’après cet événement. Enfin, la surface actuelle de la terre aurait été
modelée par le déluge (Gn 6–9) survenu il y a environ 6 000 ans.
En s’appuyant sur la Bible, réputée inerrance, et sur une utilisation sélective de données
scientifiques qui vont dans leur sens, les créationnistes de la deuxième vague soutiennent que la
terre est jeune, que la mort n’apparaît pas avant le péché et que le déluge fut universel. Selon eux,
conclut McCalla (p. 551), « puisque toute science véritable doit se conformer à ces faits, les
sciences modernes de la géologie historique et de la biologie évolutive, qui les contredisent,
doivent être fausses ».
La « science » de la création
Dans la foulée de cet ouvrage, Morris et quelques collègues ont créé un Institut de recherche sur
la création qui s’est donné pour mission d’appuyer la théorie de la jeunesse de la terre et de la
présenter comme une donnée scientifique plutôt que comme une donnée biblique. L’objectif
serait de discréditer le modèle évolutionniste pour consolider le créationnisme et à en promouvoir
l’enseignement dans les écoles en tant que science.
En 1968, une décision de la Cour suprême américaine a déclaré inconstitutionnelles les lois
d’États qui bannissaient l’enseignement de la théorie de l’évolution dans les écoles parce que ces
lois avaient un but manifestement religieux. On établissait ainsi la neutralité religieuse comme
norme à respecter pour toute décision antiévolutionniste future.
Les tenants de la « science » de la création ont alors fait valoir que leur point de vue était aussi
scientifique que celui des évolutionnistes et réclamé un traitement équitable des deux théories
dans les écoles. Ils ont eu gain de cause en Arkansas et en Louisiane en 1981, pour une courte
période seulement : les lois des deux États ont été rejetées par les instances supérieures qui ont
7 estimé que la science de la création, fondée sur l’enseignement de la Bible, n’avait rien de
scientifique.
Le « dessein intelligent »
Toujours selon McCalla, la réplique des créationnistes à la décision des tribunaux fut
l’émergence d’un nouveau courant, celui du « dessein intelligent ». Ce courant chercherait à
« esquiver les objections constitutionnelles à l’enseignement du créationnisme en éliminant
complètement le cadre biblique de la science de la création » (p. 554).
L’un des arguments principaux du biochimiste Michael Behe, un promoteur du dessein
intelligent, est que « la théorie darwinienne de l’évolution est inapte à rendre compte de l’extrême
complexité des cellules telle que la découvre la biologie moléculaire » (p. 554). Il faut supposer
derrière cette « complexité irréductible » une intelligence qui a conçu la vie organique. Le
mathématicien William Demski a monté un argumentaire similaire à propos de la complexité
informationnelle de l’ADN des êtres vivants.
La théorie du dessein intelligent a donné lieu à de nouvelles disputes juridiques qui se sont
soldées de la même manière que les précédentes. Les tribunaux ont jugé que cette théorie n’est
pas scientifique, mais qu’il s’agit plutôt d’« un habile camouflage de créationnisme conçu pour
protéger une interprétation particulière de la Bible » (p. 556).
Au terme de ce tour d’horizon, McCalla conclut que le créationnisme, en réalité, n’est pas
préoccupé d’abord par la science, mais « par le statut de la Bible dans le monde moderne » et
qu’il a pour but principal de « défendre l’autorité de la Bible en tant que réservoir d’une vérité
transhistorique » et de protéger « une compréhension supranaturelle et providentialiste du
monde » (p. 556). Les diverses formes qu’il a prises depuis un siècle montrent l’incapacité de ses
promoteurs à intégrer les découvertes scientifiques récentes dans une vision du monde inspirée
par la Bible. Plutôt que de renoncer à ce qu’ils conçoivent comme la vérité de la Bible, ils
préfèrent nier les découvertes scientifiques ou tenter de les assimiler à une vision fondamentaliste
de la Bible. Pourtant une autre voie est possible, celle de l’intégration de la Bible et de la science
sous le mode de la complémentarité dans le respect de leur identité respective.
Bible et science en complémentarité
Plusieurs tentatives ont été faites pour rapprocher le point de vue de la Bible et celui de la
science. À l’époque où s’élaboraient la première vague fondamentaliste américaine, le jésuite et
paléontologue Teilhard de Chardin (1969) esquissait déjà une vision évolutive du monde dont il
voyait l’achèvement dans un Christ cosmique. Plus récemment, une tentative des plus
intéressantes a été proposée dans le Petit traité du commencement de toutes choses du théologien
Hans Küng (2008), dont je veux présenter ici l’essentiel concernant notre propos.
Dans cet ouvrage volontairement succinct, Küng entend mettre en dialogue les avancées des
sciences physiques et biologiques et celles de la recherche biblique et théologique pour répondre
8 à la question : « Que peut encore dire un croyant de la Création et d’un Dieu créateur maintenant
que l’on sait que la Terre a 13,7 milliards d’années, que la Vie en a près de 5 milliards et que les
premiers hommes sont apparus il y a environ 2 millions d’années? » (4e de couverture) Le livre se
divise en cinq parties. Je m’arrêterai aux trois premières.
En première partie (« Y a-t-il une théorie unifiée pour tout? »), après avoir résumé la manière
dont la physique moderne se représente les origines de l’Univers, Küng pose la question de savoir
« ce qui tient le monde au plus profond », c’est-à-dire la question « de l’origine et du sens du
Tout de la réalité » (p. 60). Pour y répondre, il préconise « un modèle de la complémentarité,
modèle d’interaction constructive et critique entre sciences de la nature et religion, où les sphères
propres de chaque discipline sont préservées, tous les passages illégitimes évités et toute
absolutisation écartée et dans lequel pourtant on tente, dans un questionnement et un
enrichissement mutuels, de rendre justice à la réalité dans son ensemble et en toutes ses
dimensions » (p. 61).
Dans la deuxième partie (« Dieu comme commencement? »), Küng souligne que la science
moderne doit, « si elle veut procéder méthodiquement et de manière irréprochable, s’abstenir de
prendre en compte Dieu – qui ne peut […] être constaté et analysé empiriquement » (p. 74). Les
sciences physiques, affirme-t-il, « n’ont pas le droit d’étendre leur jugement au-delà de l’horizon
de l’expérience » (p. 75). Cela n’empêche pas le physicien, en tant qu’être humain responsable,
de se laisser interpeller par ce que Küng appelle le mystère ultime de la Réalité : « C’est la
question de la relation fondamentale du monde à une origine, un appui, un but ultime de la
Réalité, et cette question est posée non seulement au scientifique, mais à l’homme en tant
qu’homme » (p. 104).
Cette réalité ultime, ce mystère initial de la Réalité, les religions monothéistes le « désignent
du nom souvent mal compris, souvent mal utilisé, de Dieu ». Küng recommande donc aux
scientifiques, s’ils ne veulent pas renoncer à cette question des causes, « de prendre Dieu en
compte du moins comme une hypothèse » (p. 105). Une telle hypothèse est certes indémontrable
aussi bien par les sciences physiques que par le raisonnement philosophique, mais on peut
pourtant l’admettre en avançant à partir « d’une décision et d’une disposition de base qui fait
fond sur la confiance et dont il est possible de répondre rationnellement » (p. 106). L’idée que
Dieu soit le fondement ultime de la Réalité offre, selon Küng, une sorte de point d’Archimède,
« un appui solide à partir duquel il peut aborder les grandes questions » existentielles sur l’origine
et le sens de l’Univers et en dégager des orientations éthiques (p. 109).
Dans la troisième partie (« Création du monde ou évolution? »), Küng évoque les travaux de
Darwin et présente les points de vue d’Auguste Comte, Teilhard de Chardin et Alfred North
Whitehead sur le rapport entre Dieu et l’évolution. Pour le premier, père du positivisme, le
progrès n’a pas besoin de Dieu. Pour le second, savant et mystique, l’évolution converge vers
l’accomplissement du monde et de l’homme en Dieu. Pour le troisième, mathématicien et
philosophe, Dieu et le monde sont en devenir, en procès. Après avoir montré sommairement les
possibilités et limites de ces trois manières d’articuler la question, Küng offre sa propre réflexion.
Küng propose la formulation suivante : « Voici ce qui est fondamental : Dieu est dans cet
9 Univers, et cet Univers est en Dieu. Simultanément, Dieu est plus grand que le monde » (p. 136).
Dans quelques pages extrêmement denses, il développe sa pensée en évoquant ce qu’il considère
comme les principales caractéristiques de Dieu : « Dieu n’est pas isolé dans cet Univers. Son
incommensurabilité enveloppe le monde, elle n’est pas localisable ». Il est à la fois « immanent
au monde », qu’il « traverse de l’intérieur » et sur lequel il agit, et « transcendant au monde »,
« supérieur au cosmos ». Il est éternel, mais d’une éternité qui « est contemporaine de toutes les
parties du temps ». Il est « la dynamique même, il crée le monde en lui-même, il le maintient et le
meut invisiblement de l’intérieur ». Il est par conséquent « pensable dans le contexte d’une
compréhension de la réalité moderne, unitaire et dynamique » (p. 136-137).
Qu’en est-il alors des récits bibliques de la création? La Bible, « parole de Dieu dans la parole
humaine, utilise pour décrire l’activité créatrice de Dieu un langage métaphorique et analogique
inspiré de l’activité humaine. Elle cherche de cette manière à répondre « à des questions déjà
soulevées par les hommes de l’époque, et encore importantes pour les hommes d’aujourd’hui »
(p. 149). Elle « ne décrit pas des faits relevant des sciences physiques; en revanche, elle les
interprète, y compris pour notre vie et notre activité humaine actuelles » (p. 150). Son langage
religieux ne saurait être assimilé sans plus au langage scientifique : « Ce qui veut dire ceci :
théorie du Big bang et foi en la Création, théorie de l’évolution et création de l’homme ne se
contredisent pas, mais il est impossible de les harmoniser » (p. 150) comme ont tenté de le faire
les créationnistes Morris et Whitcomb.
Pour Küng, les récits bibliques de la création répondent à des « questions existentielles
élémentaires ». Ils affirment qu’au début, n’existait qu’un Dieu bon, « origine de toutes choses et
de tout un chacun », sans autre dieu, sans dualisme entre le bien et le mal ou entre l’esprit et la
matière (p. 154). Le récit de Gn 1 affirme que le processus de création a pour but « l’homme au
cœur du cosmos » et non « l’homme isolé » (p. 155), ce qui le pose dans une relation non
seulement envers Dieu, mais envers l’ensemble du cosmos auquel il appartient. Cela lui fournit
un sens et des orientations pour son action : « Croire au Dieu créateur me fait saisir avec plus de
gravité, de réalisme et d’espoir ma responsabilité envers mes semblables et mon environnement,
ainsi que les devoirs qui m’incombent à leur égard » (p. 158).
La démarche de Küng est systématique, bien informée et éclairante. Elle met en dialogue les
sciences de la nature et les sciences bibliques sans les confondre et sans chercher à les assimiler.
On pourrait certes en discuter un détail ou l’autre et nuancer certaines affirmations encore
débattues aussi bien dans un milieu que dans l’autre. Elle constitue néanmoins, à mon sens un
exercice remarquablement réussi dans son ensemble et un modèle à suivre.
Conclusion
J’aimerais conclure par deux citations qui résument l’essentiel de ce parcours en précisant le sens
qu’on peut donner aujourd’hui, comme croyant, au concept de création. J’emprunte la première à
Luc Plateaux, ex-professeur en biologie animale et évolution à l’Université Henri-Poincaré
(Nancy I) et co-auteur de l’ouvrage Pour lire la création, l’évolution. Il écrit au sujet du rejet de
10 diverses formes de créationnisme par de nombreuses Églises chrétiennes :
Cela ne signifie aucunement que la foi chrétienne s’écarte de l’affirmation d’une création. Car
il ne faut pas confondre la notion de création avec une théorie créationniste. Il est
parfaitement concevable de professer la foi en un Dieu créateur de tout ce qui est, sans en
conclure que la création est instantanée. La notion de création s’est maintenant laissée
pénétrer par la perspective historique qui imprègne toute la Bible (histoire des actions et
paroles de Dieu pour les hommes) et il est devenu classique pour des croyants chrétiens de
percevoir la création comme une action permanente du Créateur, dont l’évolution nous décrit
l’histoire (p. 9).
La seconde provient d’une profession de foi des Évêques de France publiée en 1978 sous le titre
Il est grand le mystère de la foi et cité dans le même collectif. Elle va dans le même sens :
« Création : ce terme n’évoque pas tellement l’instant zéro ou la chiquenaude initiale; s’il désigne
une origine temporelle lointaine, il signifie plutôt le lien actuel avec l’Invisible de toute existence
qui constitue le monde dans sa réalité et son dynamisme » (les Évêques de France, p. 19, cité par
Montenat, Plateaux et Roux, p. 162).
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12 Que savons-nous des premiers temps de l’Univers?
Par Hubert Reeves
Astrophysicien, communicateur scientifique et écologiste, Hubert
Reeves a fait ses études classiques au Collège Jean-de-Brébeuf
(B.A., 1950). Inscrit à la Faculté de sciences de l'Université de
Montréal, il obtient un baccalauréat ès sciences en physique (1953),
puis une maîtrise de l'Université McGill (1955). Il poursuit ses
études en astrophysique nucléaire à l'Université Cornell (Ithaca,
N.Y.) où il soutien sa thèse de doctorat (1960). De 1960 à 1964, il
est professeur de physique à l'Université de Montréal, tout en étant conseiller scientifique à la
NASA. Professeur invité à l'Université de Bruxelles en 1964-1965, il est, à partir de 1966,
directeur de recherche au Centre national de recherche scientifique (CNRS) avec affectation au
Commissariat à l'énergie atomique de Saclay en France, tout en restant attaché à l'Université de
Montréal à titre de professeur associé. Ses écrits ont été traduits en plusieurs langues. Son livre
Patience dans l'azur a été considéré comme un chef-d'œuvre de vulgarisation faisant éclater notre
vision de l'Univers1.
*****
Le mot « création », thème de cette soirée, n’est pas, à proprement parlé, du domaine de la
science. On peut expliquer « quelque chose » à partir « d’autre chose », mais pas à partir de
« rien ». La science n’est pas un domaine de vérité, mais de plausibilité. À la lumière de
l’ensemble des observations et des théories de la physique, que pouvons-nous dire du cosmos et
de son passé? Aujourd’hui, la théorie du Big bang paraît la mieux adaptée, la plus crédible, la
plus plausible. Mais il ne s’agit nullement d’un savoir figé : cette théorie a ses problèmes et ses
limites, elle n’est pas achevée. De surcroît, comme toute théorie scientifique, elle est vulnérable :
elle pourrait être mise en péril et même détrônée par de futures observations. Mais, à ce jour, elle
reste, et de loin, notre meilleur choix parmi les différentes théories cosmologiques.
Que dit-elle? Que l’Univers a été plus chaud, plus dense et plus lumineux dans le passé. Que
des extrapolations nous amènent à la conclusion qu’il y a 13,7 milliards d’années, la température,
la densité et la luminosité de l’Univers atteignaient des valeurs extrêmes qui posent à la physique
des problèmes loin d’être résolus. Il est habituel de parler alors d’un « début de l’Univers », dans
un sens qui reste assez vague. Il nous est encore impossible de décrire « ce qu’il y avait avant ».
Pénétrer dans ce domaine inconnu, dans cette nouvelle Terra incognita, exigerait de trouver au
préalable la solution de l’un des plus grands problèmes contemporains : comment concilier la
théorie de la relativité générale d’Albert Einstein et la physique des atomes, ou physique
quantique? En d’autres mots, comment trouver une formulation satisfaisante d’une théorie
quantique de la gravitation?
La théorie du Big bang nous dit que, depuis cette période, l’Univers est en expansion et que
1
Source : http://www.ordre-national.gouv.qc.ca/membres/membre.asp?id=148
13 cette expansion ne se fait pas à partir d’un point qui en serait le centre, mais à partir de chaque
point de l’espace; que l’Univers n’a donc ni centre ni frontière. À grande échelle (celle des amas
de galaxies), il est homogène.
Une image prise par le satellite WMAP nous montre l’aspect de l’Univers quelque
400 000 ans après le Big bang. À cette époque, la matière cosmique était à environ 3 000 degrés
absolus, soit environ 2 700 °C. Elle était extrêmement homogène en densité et en température,
avec cependant des fluctuations de quelques cent millièmes de la valeur moyenne. La différence
entre valeurs observées et valeurs attendues pour un rayonnement thermique à la température
2,725 degrés absolus est généralement inférieure à 1 %. Cette concordance entre théorie et
observations constitue une des meilleures preuves de la crédibilité de la théorie du Big bang.
Une telle isothermie pose problème : quel agent physique aurait pu la réaliser si peu de temps
après le Big bang? Pour expliquer ce phénomène, on fait l’hypothèse d’un bref épisode
d’expansion spatiale extrêmement rapide (appelé « inflation »). Cette hypothèse a le mérite
d’expliquer bien d’autres particularités de la matière cosmique initiale, comme par exemple
l’apparition de ces fluctuations dans la distribution de la matière, fluctuations qui ont favorisé la
germination des galaxies. Mais la cause de cette inflation reste à ce jour inconnue.
La physique quantique impose l’existence de nouvelles formes d’énergie appelées « énergies
du vide », qui devraient, au même titre que toutes les autres formes d’énergie (thermique,
gravitationnelle, etc.) influencer l’expansion de l’Univers. En l’absence d’une théorie quantique
de la gravité, la physique contemporaine ne nous permet pas d’estimer correctement la densité
cosmique de ces énergies. Les estimations les plus approximatives donnent des valeurs si élevées
qu’elles auraient limité la durée de l’Univers à une infime fraction de seconde, ce qui n’est
manifestement pas le cas!
Ce désaccord peut être contourné par l’introduction de nouvelles hypothèses, mais, selon ces
dernières, cette densité serait égale à zéro, ce que contredisent les résultats de l’observation de
l’énergie sombre, qui indiquent qu’elle n’est pas nulle, mais, en fait, comparable à la densité de la
matière cosmique! Ce problème est connu sous le nom d’« énigme de la constante cosmologique
d’Einstein ». À ce jour, aucune solution crédible ne semble se profiler à l’horizon. Ajoutons que
ce problème n’est pas spécifique à la théorie du Big bang : il est celui de la physique tout entière.