Ordonnance du 4 octobre 2012
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Ordonnance du 4 octobre 2012
CONSEIL D'ÉTAT Statuant au contentieux N° 363144 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE SYNDICAT NATIONAL DE CHIRURGIE PLASTIQUE RECONSTRUCTRICE ET ESTHÉTIQUE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Ordonnance du 4 octobre 2012 LE JUGE DES RÉFÉRÉS Vu la requête, enregistrée le 28 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée par le Syndicat national de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique, dont le siège est 26, rue de Belfort à Courbevoie (92400), représenté par son président ; le syndicat demande au juge des référés du Conseil d'Etat : 1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des dispositions figurant au point 40 du bulletin officiel des finances publiques – impôts du 27 septembre 2012, relatives à l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des actes de chirurgie et de médecine esthétique ; 2°) d'enjoindre au ministre de l'économie et des finances d'adresser une instruction formelle, claire et publiée à ses services pour que les dispositions contestées ne soient pas appliquées à compter du 1er octobre 2012 ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que : – la condition d'urgence est remplie dès lors que l'application des dispositions contestées aux actes réalisés à compter du 1er octobre 2012 est susceptible de porter une atteinte grave et immédiate à la situation financière des praticiens, au bon fonctionnement des services de soins et de chirurgie esthétique ainsi qu'aux intérêts des patients ; – les moyens soulevés dans le recours en annulation sont de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées ; Vu l'acte dont la suspension de l'exécution est demandée ; Vu la copie de la requête à fin d'annulation de l'acte contesté ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu la directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ; Vu le code général des impôts ; Vu le code de justice administrative ; 1. Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article T. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés peut ordonner la suspension de l'exécution d'un acte administratif à la condition, notamment, que l'urgence le justifie ; que tel est le cas lorsque l'exécution d'un acte porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'article L. 522-3 du même code permet au juge des référés de rejeter sans instruction ni audience les demandes de suspension qui ne présentent pas un caractère d'urgence ; 2. Considérant que, s'agissant d'un acte énonçant la position de l'administration sur l'application de dispositions législatives ou réglementaires, l'urgence doit être appréciée compte tenu de ses effets propres ; qu'à cet égard, un tel acte qui réitère, en prescrivant de l'appliquer, une règle contenue dans des dispositions en vigueur n'est pas, par lui-même, constitutif d'une situation d'urgence ; 3. Considérant qu'il résulte du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts que sont notamment exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée « Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées » ; que ces dispositions, qui assurent la transposition de celles de l'article 13 A, paragraphe 1, sous c) de la directive du 17 mai 1977, doivent s'entendre, ainsi que l'a jugé la Cour de justice des Communautés européennes dans ses arrêts du 20 novembre 2003, rendus dans les affaires C307/01 et C-212/01, comme visant seulement les prestations à finalité thérapeutique ; 4. Considérant qu'aux termes du « rescrit » n° 2012/25 (TCA) du 10 avril 2012 de la Direction générale des finances publiques, relatif aux conditions d'exonération des actes de médecine et de chirurgie esthétique : « (…) peuvent être considérés comme poursuivant une finalité thérapeutique et donc bénéficier de l'exonération les actes pris en charge totalement ou partiellement par l'Assurance maladie, c'est-à-dire notamment les actes de chirurgie réparatrice et certains actes de chirurgie esthétique justifiés par un risque pour la santé du patient ou liés à la reconnaissance d'un grave préjudice psychologique ou social » ; que, dans la version insérée le 27 septembre 2012 au bulletin officiel des finances publiques – impôts, il est indiqué à ce propos que « les seuls actes qui bénéficient de l'exonération de TVA sont ceux qui sont pris en charge totalement ou partiellement par l'Assurance maladie (…) » ; qu'il est en outre spécifié que cette interprétation « ne donnera lieu ni à rappel ni à restitution s'agissant des actes de médecine et de chirurgie esthétique effectués antérieurement au 1er octobre 2012 » ; 5. Considérant que, pour justifier de l'urgence à ordonner la suspension de ces dernières dispositions, le syndicat requérant fait valoir qu'elles portent une atteinte grave et immédiate à la situation financière des praticiens, au bon fonctionnement des services de soins et de chirurgie esthétique ainsi qu'aux intérêts des patients, eu égard à la brièveté du délai séparant la date de leur publication de celle du 1er octobre 2012 ; 6. Considérant toutefois, en premier lieu, qu'il résulte des termes mémés, rappelés plus haut, du 1° du 4 de l'article 261 du code général des impôts que l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée ne concerne pas l'ensemble des prestations assurées par les membres des professions médicales, mais seulement « Les soins dispensés aux personnes », ce qui vise, ainsi que l'a jugé la Cour de justice des Communautés européennes, les prestations à finalité thérapeutique ; qu'il suit de là que l'assujettissement des actes de chirurgie et de médecine esthétique, lorsqu'ils ne poursuivent pas une telle finalité, résulte de la loi et non de l'interprétation qu'en a donnée l'administration ; qu'ainsi, les dispositions contestées du bulletin officiel des finances publiques ne créent, par ellesmêmes, aucune situation d'urgence en tant qu'elles énoncent cette interprétation ; 7. Considérant, en second lieu, qu'à supposer que, comme le soutient le requérant, le critère tiré de la prise en charge par l'assurance maladie puisse conduire à assujettir des prestations qui, bien que non prises en charge, poursuivraient effectivement des finalités thérapeutiques, la modification des termes dans lesquels la Direction générale des finances publiques fait état de ce critère dans la version publiée le 27 septembre 2012, par rapport à celle du 10 avril 2012, ne fait pas non plus apparaître une situation d'urgence ; qu'au demeurant, il appartient aux praticiens à qui. l'administration demanderait d'acquitter la taxe sur la valeur ajoutée à raison de prestations non prises en charge, mais poursuivant néanmoins des finalités thérapeutiques, de contester les impositions correspondantes en présentant une réclamation, laquelle est suspensive de paiement, puis en saisissant, le cas échéant, la juridiction compétente ; 8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'une des conditions à laquelle est subordonné l'exercice, par le juge des référés, des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas remplie ; qu'il y a lieu, eu conséquence, de rejeter l'ensemble des conclusions de la requête selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code, y compris celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 de ce code ; ORDONNE : Article 1er : La requête du Syndicat et esthétique est rejetée. national de chirurgie plastique reconstructrice Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat national de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique. Copie en sera adressée pour information au ministre de l'économie et des finances. Fait à Paris, le 4 octobre 2012 Signé : Jacques Arrighi de Casanova Pour expédition conforme, Le secrétaire, Béatrice Guinet