Une centrale nucléaire est un site industriel utilisant la fission de
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Une centrale nucléaire est un site industriel utilisant la fission de
Energie Nucléaire 1. Notions de base 1.1 Structure de l’atome L’atome est constitué d'un noyau composé de protons et de neutrons autour desquels gravitent des électrons. En chimie, les atomes sont les éléments de base. Ils constituent la matière et s’assemblent en molécules en partageant des électrons. Dans toutes les réactions chimiques, les noyaux des atomes restent intacts. Le plus souvent le noyau d’un atome contient un nombre donné de neutrons. Cependant, certains atomes ont des noyaux comprenant un nombre variable de neutrons. Ces différents atomes sont appelés des isotopes. Tous les isotopes d’un atone donné ont les mêmes propriétés chimiques. Mais certains sont radioactifs. Exemple : le C12 (carbone 12) n’est pas radioactif alors que le C14 (carbone 14) est radioactif. 1.2 Radioactivité a) Définition La radioactivité, terme inventé vers 1898 par Pierre Curie, est un phénomène physique naturel au cours duquel des noyaux atomiques instables se désintègrent spontanément en d'autres noyaux, avec dégagement d'énergie sous forme de divers rayonnements. Si les noyaux ainsi créés sont instables, ceux-ci donnent à leur tour lieu à un phénomène radioactif. Souvent, ce processus conduit donc à une chaîne de désintégrations successives – plus ou moins longue et complexe – avant d'aboutir à des noyaux atomiques stables qui ne sont plus radioactifs. La période d’un élément radioactif est la durée nécessaire pour que la radioactivité de l’élément (sa mesure) soit divisée par 2. b) Radioactivité naturelle La roche terrestre contient des éléments radioactifs. Citons : l'isotope 238 de l'uranium : 238U le radon (gaz) l'isotope 235 de l'uranium : 235U qui se trouve dans la Nature en concentrations très faibles associées à l'isotope 238U, mais dont on « enrichit » la concentration par des techniques adaptées pour qu'il puisse servir à des besoins civils et militaires. l'isotope 14 du carbone : 14C. Il est constamment produit dans la haute atmosphère par des rayons cosmiques interagissant avec l'azote. Datation par le carbone 14. La concentration du 14C reste plus ou moins constante au cours du temps dans l'air et dans les organismes vivants qui respirent cet air. Une fois un organisme mort, la concentration en 14C diminue dans ses tissus alors que le carbone 12 demeure, et permet de dater le moment de la mort. Cette datation au radiocarbone est un outil de recherche très prisé en archéologie et permet de dater avec une bonne précision des objets organiques dont l'âge ne dépasse pas cinquante à cent mille ans. c) Radioactivité artificielle - Fission et fusion Dans la fission nucléaire le noyau (lourd tel que celui de l’uranium) est cassé. Dans la fusion, des noyaux (légers tels que le deutérium – isotope de l’hydrogène) fusionnent pour donner des atomes plus lourds. Dans les 2 cas il y a génération de nouveaux atomes et production d’une grande quantité d’énergie. La production d'énergie peut être : brève et intense : c'est le principe d'une bombe nucléaire (bombe A ou H), contrôlée à des fins de production civile (fission) 2. Centrale nucléaire de production d’électricité 2.1 Définition Une centrale nucléaire est un site industriel utilisant la fission de noyaux atomiques pour produire de la chaleur, dont une partie est transformée en électricité (entre 30% et 40%). C'est la principale mise en œuvre de l'énergie nucléaire dans le domaine civil. Une centrale nucléaire est constituée d'un ou plusieurs réacteurs nucléaires (jusqu'à 8) appelés aussi « tranches », dont la puissance électrique varie de quelques mégawatts à plus de 1 500 mégawatts pour le réacteur soviétique de grande puissance RBMK. Selon les promoteurs du futur réacteur européen EPR, il devrait atteindre une puissance record de 1 600 mégawatts. Les années 50 voient le début de la production d’électricité d’origine nucléaire aux USA, en URSS, en Angleterre et en France. Le projet ITER que la France a réussi à faire installer à Cadarache constitue une étape dans la longue histoire (et rêve) du contrôle de la fusion nucléaire. Le soleil constitue un réacteur de fusion fiable et efficace à 100%. 2.2 Description Une centrale nucléaire regroupe l'ensemble des installations permettant la production d'électricité sur un site donné suivant le schéma ci-après. La différence essentielle entre une centrale nucléaire et une centrale thermique classique est constituée par le remplacement de la chaudière consommant des combustibles fossiles par un réacteur nucléaire. 2.3 Rendement d'une centrale nucléaire Le rendement d'une centrale nucléaire est de l'ordre de 33%, valeur proche de celle d’une centrale thermique classique. Les pertes en ligne sur le réseau Très Haute Tension sont de l’ordre de 10%. 2.4 Types de réacteurs Une centrale nucléaire est équipée d'un ou plusieurs réacteurs nucléaires. Un réacteur nucléaire peut appartenir à diverses filières, qui ont chacune leur caractéristiques techniques. Le réacteur EPR (European Pressurised water Reactor) en est un type et constitue une évolution/amélioration des centrales actuelles et n’a rien de révolutionnaire. 2.5 Centrales en exploitation en France La France dispose de 58 réacteurs répartis sur 19 sites qui produisent environ 80% de l’électricité consommée. 2.6 Adaptabilité de la production à la consommation Les centrales nucléaires sont caractérisées par leur manque de souplesse dans la production. On peut dire qu’elles produisent à un niveau constant et que l’ajustement à la demande est effectuée par EDF par modulation de la production des autres types de centrales (à fuel, hydraulique ,…). 3. La ressource - Uranium Gisement et production L’uranium se trouve dans des minerais à faible concentration qui nécessitent des processus de concentration pour être exploité. Dans les années 1980, la production d'uranium a été très supérieure aux besoins civils des centrales électriques. Une grande partie a été utilisée pour des besoins militaires et pour des réserves stratégiques. Depuis la signature de traités internationaux de limitation des armements nucléaires, une grande partie de l'uranium militaire (enrichi à 92%) a été diluée dans l'uranium naturel pour obtenir un uranium enrichi à 3,5% puis mis sur le marché de l'uranium civil. Depuis 1989, la consommation d'uranium est supérieure à la production. Tandis que la consommation continuait d'augmenter, la production diminuait avant de commencer à augmenter vers l'an 2000. La consommation mondiale d'uranium est de 67.000 tonnes par an, la production est de 42.000 tonnes. La différence de 25.000 tonnes provient des stocks civils et militaires qui seront épuisés en 2015. Production d’uranium par pays La France a cessé d’exploiter ses mines et importe la totalité de sa consommation. Pénurie ? Un rapport daté de 2006 de EWG (Energy Watch Group) conclut à une pénurie de combustible (uranium) dans environ 20 ans et que d’ici là, la majeure partie de l’investissement dans ce domaine concernera le remplacement de réacteurs âgés. Soulignons que mettre en chantier de nouvelles centrales nucléaires n’implique pas nécessairement que la ressource en combustible soit au rendez-vous pour la production. Risque sanitaire lié à l’exploitation L’exploitation de mines d’uranium expose les travailleurs de ce secteur à un risque d’irradiation. Aucun système de protection n’existe excepté par des parois de plomb ce qui est impraticable et conduit à une irradiation de faible niveau mais permanente de ces personnes avec effet cumulatif dans le temps. Il s’avère que de nombreux sites miniers ont été mal réhabilités en France et que l’on s’est débarrassé des déchets d’enrichissement de l’uranium pour effectuer diverses opérations de comblement et remblaiement pour la construction, entre autre, de routes. Dans d’autres cas les anciens sites ont été laissé à l’abandon, mal ou pas balisés. 4. Importance et perspectives de production 4.1 Situation mondiale actuelle Il est abondamment communiqué sur l’avenir et la quasi-obligation de recours à l’énergie nucléaire pour assurer l’avenir énergétique de la planète. Les annonces de reprise de l’utilisation du nucléaire dans certain pays semblent accréditer cette thèse. A la fin de 2007, il y avait 439 réacteurs en service dans le monde pour une production de 350 GWh. La part du nucléaire dans la production d’électricité dans le monde est de 16%. Sa part dans la consommation totale d’énergie est de 3%. Le reste est constitué par les énergies fossiles et, à la marge, par les énergies renouvelables. Le graphe suivant fait apparaître que depuis 20 ans le nombre de centrales est sensiblement constant. La conséquence est le vieillissement du parc. 4.2 Perspectives L’âge moyen des réacteurs est de 23 ans. Compte tenu de la durée de vie estimée des réacteurs qui est de 40 ans environ, il y aurait lieu de construire 339 réacteurs d’ici 2030 pour maintenir la capacité actuelle. Le simple renouvellement des centrales se heurte à certaines difficultés : la perte de compétences dans l’ingénierie nucléaire et la faiblesse des infrastructures de production, la perte de compétence dans les centrales du fait du départ prochain à la retraite d’une part importante du personnel (40% de départs à EDF à échéance de 2015), le délaissement de ces filières dans les universités du monde occidental, le goulot d’étranglement que constitue la fabrication des cuves que seul l’entreprise Japan Steel Works est, aujourd’hui, capable de fabriquer. Par conséquent, le développement de la filière, au-delà du simple maintien de la capacité de production n’est pas crédible. 4.3 Energie nucléaire et effet de serre Le bilan carbone de la filière nucléaire, même s’il ne correspond pas à un rejet de « zéro carbone » (énergie grise de construction des centrales, processus d’exploitation du minerai et d’enrichissement, transport, démantèlement des centrales, traitement des déchets) est bien meilleur que celui des centrales à énergies fossiles. Mais la part de l’énergie nucléaire dans le bilan énergétique mondial étant si réduite et sans espoir d’augmentation il est clair qu’elle n’est pas en mesure de contribuer à la réduction de la production de gaz à effet de serre qui proviennent, pour une large part, des énergies fossiles. 4.4 Démantèlement des centrales Le démantèlement des centrales nucléaires est une opération tout sauf simple car impliquant des matériaux qu’il faut décontaminer après démontage puis stocker. Une partie importante des réacteurs, y compris le génie civil, sont radioactifs. Ces opérations de démantèlement n’avaient pas été prévues ou évaluées lors de la conception des centrales. Ces opérations devront être effectuées par des robots et des opérateurs spécialement équipés. Le coût de ces opérations ne semble pas pris en compte dans le prix de revient de l’énergie nucléaire. Le démantèlement des centrales françaises commencent seulement, l’âge de plus ancienne devant approcher 40 ans. Il est à noter que l’on essaiera de prolonger la vie des installations, ce qui ne constitue pas nécessairement une prise de risque. On peut penser que, étant donné la spécificité de cette technologie et ses dangers, la prolongation de leur durée de fonctionnement ne se fera qu’après évaluation très approfondie de leur état. On trouve ce genre de situation dans d’autres domaines techniques. 4.5 Stockage des déchets Cette filière génère de nombreux déchets dont on ne sait que faire. L’enfouissement est la solution envisagée actuellement, mais suscite l’opposition des populations concernées. En effet comment assurer la sécurité de ces sites de stockage dans le temps sachant que certains déchets ont une durée de vie de plusieurs centaines d’années voit milliers. Comment être sûr de la stabilité géologique des zones concernées ? La prise de risque concerne non pas « nous » mais les générations futures. Un problème de plus à leur charge. 4.6 Sortie du nucléaire La sortie du nucléaire a fait l’objet d’une étude de faisabilité par le « Réseau Sortir du Nucléaire » qui conclut positivement à sa possibilité en moins de 10 ans. Sans contredire ces conclusions on peut penser que, sauf incident majeur, les centrales seront exploitées jusqu’à leur fin de vie. Il est probable que, même après un accident majeur sur une centrale, l’exploitation des autres centrales continuera (cf Tchernobyl) par manque d’alternatives à court terme. Par ailleurs la transition vers l’utilisation d’autres formes d’énergie ne pourra que prendre du temps du fait de l’importance des investissements et changement dans l’organisation de la société. 4.7 Nucléaire, démocratie, transparence Transparence et communication ? Pour tout ce qui concerne le domaine du nucléaire la communication et la transparence ne sont pas les caractéristiques premières. Il s’agit d’un « domaine réservé aux experts » dont les citoyens n’ont pas à connaître. Il faut aussi se souvenir de la manière dont les conséquences pour la France de l’accident de Tchernobyl ont été traitées. Il ne fallait surtout pas effrayer la population, alors que les autres pays européens prenaient des mesures de protection. Il a fallu la création d’un organisme indépendant (la CRIIRAD – Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité) du pouvoir politique et du lobby scientifique français de l’industrie nucléaire pour finalement savoir que certaines régions françaises telles le Sud Est et la Corse avaient été fortement irradiées. Par ailleurs, la gestion des déchets résultants de l’exploitation des mines d’uranium en France a été fait dans la plus grande opacité par la COGEMA. Il a été récemment révélé que l’on a disséminé ces résidus dans diverses zones en France au mépris de la santé des habitants. Cette situation n’est pas sans rapport avec le lien historique entre le développement du nucléaire militaire (et la culture du secret qui l’entoure) et celui du nucléaire civil. Par ailleurs, un consensus sur le sujet allant de la droite à la gauche, a fait que la contestation de ces choix a toujours été marginale. A la réserve près de certains milieux écologistes, même si des voix discordantes se font aujourd’hui entendre (Partie de Gauche et EPR). Lors du Grenelle de l’environnement, cette question n’a pas été abordée. Le débat public sur le sujet est donc refusé ceci d’autant que la France produit une part très importante de son énergie électrique par cette filière et que l’expertise dans ce domaine, qui provenait dans les années 1970 des USA donne à la France une place de premier plan dans les sciences, technologies et ingénierie associés.. 5. Conclusion a) Ressource en uranium et perspective de la filière Au niveau mondial la part du nucléaire dans l’approvisionnement énergétique restera marginale et il ne faut pas compter dessus pour réduire les rejets de gaz à effet de serre et résoudre la question des dérives climatiques, Le maintien de la production dans les 20 prochaines années demandera des efforts techniques, humains et financiers très importants qui ne sont pas considérés comme atteignables, La ressource en uranium, comme toutes les autres ressources énergétiques, n’est pas assurée à terme et une pénurie est à prévoir, b) Risques associés à la filière De nombreux risques sont liés à la singularité de ce type d’énergie. La gestion des déchets est une question non résolue, Le risque d’accident (type Tchernobyl) impliquant la partie nucléaire des réacteurs ne peut être écarté – on peut imaginer les conséquences d’un accident majeur sur un réacteur nucléaire en France, Le risque sismique est affiché comme pris en compte, mais cette question reste à être soumise à évaluation contradictoire, Une attaque terroriste ou le chute d’un avion sont des évènements non ou difficilement quantifiables pour une prise en compte dans des études, Le risque de dissémination est évidemment associé au risque terroriste c) Aspects financiers Le coût réel de la filière incluant le démantèlement des centrales, le retraitement et le stockage des déchets est une question non ouverte au citoyen, L’effort financier d’investissement dans la filière devrait être mise en parallèle avec les besoins pour l’investissement dans les énergies renouvelables, la rénovation du bâti existant et la réorientation des transports vers les transports en communs qui vont nécessiter des efforts très importants. d) Citoyens et démocratie Comme dans de nombreux domaines impliquant le développement de nos sociétés de consommation hyper technologiques soumis à la multiplicité des lobbies, il serait temps que les citoyens s’impliquent dans les choix d’avenir. e) Sortie du nucléaire La sortie du nucléaire civil est possible dans les conditions suivantes : Une période de transition serait nécessaire du simple fait que l’investissement qui a été effectué dans la construction des centrales devra être amorti sur la durée de vie des installations (40 ans), Le passage à une autre forme d’énergie associé à la réduction des consommations énergétiques prendra du temps et devra être planifié au niveau national, Ce choix relève da la puissance publique et donc des citoyens, pour peu qu’ils puissent et veuillent se faire entendre. f) Déclin inéluctable Compte tenu de ces divers éléments, le déclin du nucléaire civil dans le bilan énergétique mondial des 15 à 20 ans qui viennent.semble inéluctable. Il n’en reste pas moins que certains pays vont relancer ou développer leur production électrique dans cette filière, le nucléaire étant considéré comme une source, même mineure, de production d’électricité. La France n’est pas partie pour procéder à une révision de sa politique et semble plutôt vouloir continuer dans la même voie et jouer pleinement cette carte à l’exportation que lui donne sa maîtrise de cette technologie. Sources : Energy Watch Group Réseau « Sortir du Nucléaire » Association « Global Chance » Mycle Schneider and Antony Froggatt, Consultants indépendants – Rapport commandité par le Groupe des Verts au Parlement Européen en 2008.