Télécharger le projet pédagogique théâtrale de l`Art Semeur
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1 Ce projet s’adresse à tous ceux qui souhaitent donner un enseignement plus riche et plus ludique à nos enfants. Le théâtre est un outil d’apprentissage exceptionnel pour les enfants pourtant encore très peu proposé. Cet art nécessite peu de moyens : le musicien a besoin de son instrument, le comédien a besoin de son corps. Il permet d’acquérir au rythme de chacun une grande confiance en soi, un épanouissement individuel, une maîtrise de ses émotions et enfin le respect . Ma passion pour le théâtre et mon plaisir d’être avec les enfants m’ont dès 1996 amené à lier l’un à l’autre d’abord en centre aéré puis en école primaire. Cette dernière expérience m’a confirmé l’intérêt que les enfants portent au théâtre et le plaisir que je trouve à exercer cette activité. Faire du théâtre à l’école, c’est vraiment transformer auprès de l’enfant l’image qu’il a de l’école, et lui ouvrir les portes de son imagination. C’est aider l’enfant à grandir car il ne faut jamais oublier la difficulté de grandir ; c’est soutenir sa croissance tout en l’encourageant vers son autonomie ; c’est l’accompagner dans sa construction tant physique que psychologique. Je souhaiterai par ce projet proposer l’art que j’exerce depuis 26 ans aux enfants. Ce projet vise toutes les structures accueillant un jeune public de 4 à 12 ans et principalement les écoles, les centres aérés et les hôpitaux. Il me semble en effet essentiel de soutenir l’enfant dans la maladie et la pratique du théâtre a probablement de grandes vertus thérapeutiques, puisque le psychisme retient souvent un malade dans sa maladie. Les séances pourront se dérouler idéalement le matin, en petits groupes de 7 à 15 enfants. L’atelier pourra durer selon l’âge des enfants de 30 minutes à 1 heure et avoir lieu 1 à 2 fois par semaine. Quoiqu’il en soit, ceci sera discuté avec le professionnel s’occupant des enfants. Lors de la 1ère séance, je me présente et j’aborde la notion de théâtre. « Qu’est-ce que le théâtre ? ». Certains enfants du groupe ont parfois une réponse plus ou moins précise. « Le théâtre, c’est comme un pestacle », rétorquent les plus jeunes. Avec ces derniers, le cirque ou les marionnettes leur permettent une première approche de l’art dramatique. Avec les enfants plus grands, je définis le théâtre par le biais du cinéma et des vedettes du moment. Enfin, j’explique le déroulement de chaque atelier de théâtre, les règles à respecter et les objectifs de cette activité, j’insiste alors sur le but premier qui est le plaisir de jouer ensemble. 2 Le plan que j’ai choisi n’est pas du tout formel. On peut utiliser des exercices de la 2ème partie dans le cadre d’ateliers sans spectacle à l’issue ; on peut aussi, en accord avec l’enseignant ou l’animateur faire l’atelier « à la carte » en optant pour le travail de telle ou telle notion. SOMMAIRE 1ère PARTIE : DU JEU AU THEATRE : L’OPTION ATELIERS SIMPLES Relaxation et échauffement ……………………………………………… Espace scénique et présentation ………………………………… Respiration ………………………………………………………………… Diction et voix ……………………………………………………………… Confiance et respect……………………………………………………… Imitation …………………………………………………………………… Immobilité et déplacement ………………………………………………… Emotion ……………………………………………………………………… Imagination et persuasion………………………………………………… Improvisation………………………………………………………………… Masques…………………………………………………………………… page page page page page page page page page page page 4 5 5 6 7 8 8 8 9 9 10 2ème PARTIE : DU THEATRE A LA SCENE : L’OPTION SPECTACLE A L’ISSUE Création de textes…………………………………………………………… Textes supports……………………………………………………………… Choix et distribution……………………………………………………… Mise en scène………………………………………………………………… Préparation…………………………………………………………………… Spectacle ……………………………………………………………………... page page page page page page 11 12 14 15 15 16 3 DU JEU AU THEATRE : L’OPTION ATELIERS SIMPLES L’option ateliers simples est une approche du théâtre relativement approfondie mais qui exclut l’objectif d’un spectacle. Les ateliers se déclinent sous forme de jeux énumérés et développés les uns après les autres. Selon les souhaits des professionnels concernés, on pourra aborder avec les enfants soit tous les jeux soit certains plus précisément. 1)Relaxation et échauffement La relaxation sera un rituel à chaque début de séance. Même si elle ne dure que 5 minutes, elle est essentielle et nécessite des tapis de sol. Les enfants s’allongent sur le dos, jambes allongées, bras le long du corps, yeux fermés. Le but n’est pas de « dormir » comme certains protestent parfois mais à chaque séance de leur expliquer que c’est un instant de détente, de bien-être, de repos, de vide intérieur ; c’est un moment de silence où l’on essaie au maximum de relâcher ses muscles et d’évacuer toutes les tensions intérieures afin d’aborder la séance de théâtre le plus disponible possible. L’expérience m’a permis de vérifier l’efficacité de cette méthode : les enfants sont au théâtre et non ailleurs, ils sont beaucoup plus attentifs. Après ces 5 à 10 minutes , on abordera tous les exercices sous forme de jeux. Les jeux d’échauffement du corps se déroulent en tout début de séance et doivent se pratiquer en douceur. Certains permettent de dégourdir les muscles, ils prolongent la relaxation et rendent le corps plus « malléable ». Ex : * gesticuler souplement les doigts, puis les poignets, puis les avant-bras, puis les bras. * tourner la tête très doucement de façon à faire comme un cercle complet (avant, droite, arrière, gauche ) dans un sens, puis dans l’autre. L’équilibre permet d’acquérir une plus grande souplesse et de découvrir les aptitudes du corps à être « déformé ». Ex : sur un pied, se recroqueviller sur soi même puis s’ouvrir lentement comme une fleur jusqu’à acquérir une grande ampleur. 4 D’autres ont pour but de stimuler des parties précises du corps et de n’utiliser que le muscle nécessaire au geste demandé. Cela permet de ne pas gaspiller inutilement son énergie et de cibler l’énergie dans le geste précis que l’on effectue. Ex : la marionnette coupée : deux par deux, un des enfants (assis ) est la marionnette, l’autre (debout ) est le marionnettiste, tire les ficelles imaginaires du nez, de la tête, des bras, des doigts, puis les coupe et recommence. 2)Espace scénique et présentation La présentation de chacun des membres du groupe est indispensable dès la 1ère ou 2ème séance pour les enfants mais aussi pour moi. Ex : On s’assoit en ronde, le 1er enfant doit répéter 3 fois « citron » de façon audible, articulée et rapide ; avant que le 3ème « citron » ne soit émis, l’enfant suivant doit dire son prénom, et ainsi de suite. La plupart des jeux de présentation mettent en œuvre la délimitation de l’espace scénique. Avant tout autre travail de théâtre, ces jeux sont la base de l’apprentissage théâtral. Ils aident à repérer les coulisses, la scène, le public. La scène peut être délimitée par des chaises ou du scotch de couleur au sol. Je signale alors et montre aux enfants qu’en coulisse, je suis moi, le pied sur scène, je suis un(e) autre. En imposant une entrée, un parcours et une sortie à respecter lors de jeux, les enfants seront plus précis par la suite lors d’indications de mise en scène. Ex : l’enfant vient se présenter (nom, âge) sur scène avec un déplacement précis à respecter. J’utilise souvent un exercice qui permet aussi de montrer à l’enfant que la scène est un lieu de don. On offre par plaisir un cadeau aux spectateurs. Ex : l’enfant entre sur scène, emprunte le chemin précis indiqué et nous chante une chanson de son choix ou nous dit une poésie, puis il suit le chemin précis de retour. Ce type de jeu est parfois difficile pour certains. 3)Respiration Il est important d’apprendre à respirer correctement afin de ne pas « se casser la voix » d’optimiser son souffle sans effort d’avoir une présence sur scène meilleure et plus efficace. Je mets en œuvre la technique de la respiration ventrale ou abdominale qui, comme son nom l’indique, fait participer l’abdomen par contraction et décontraction. Cette 5 respiration est pratiquée par bon nombre de chanteurs, acteurs mais aussi dans des domaines très divers tels qu’en sophrologie, yoga, danse, … Nous connaissons tous cette méthode puisque c’est la respiration naturelle du nouveau-né et c’est celle qui prend le relais à la respiration pulmonaire lorsque nous nous endormons. Elle est aussi très utile à la relaxation. J’utilise cette technique à partir de 7 ans (CE1) pour deux raisons : les enfants de moins de 7 ans sont beaucoup plus dans le présent et dans le jeu ; ils ne verront pas l’intérêt à terme de ce travail ; ils n’auront jamais de très longs textes à apprendre, ils n’auront pas besoin d’économiser leur souffle. Enfin, lors de cet exercice, les enfants sont allongés au sol par sécurité. En effet, on inspire plus profondément donc on inhale plus d’ oxygène, ce qui peut provoquer chez certains individus au bout de plusieurs respirations des maux de tête. C’est pourquoi j’insiste auprès des enfants pour que chacun fasse à son rythme et s’arrête s’il commence à sentir un début d’étourdissement. Cependant, lors de mon expérience, jamais ce problème n’est survenu. La respiration abdominale a toujours été très efficace pour les enfants. Tout avis contraire de l’enseignant ou du responsable doit être communiqué et sera bien évidemment respecté. Une fois la respiration maîtrisée, on peut faire quelques exercices sur les expirations. Ex : dire une phrase de différentes façons et / ou en boucle prononcer toutes les consonnes et voyelles de l’alphabet émettre un son sur toute l’expiration 4)Diction et voix On travaille ici tout autant la prononciation et l’articulation que le rythme de la phrase et son volume. L’enseignement que j’ai eu m’a rendue très rigoureuse en matière de diction. Il s’agit d’apprendre à parler correctement et à gommer certains accents le temps de la scène. On redécouvre les sons qui ont tendance à se perdre au fil des siècles et qui nous échappent dans le parlé courant. Ex : on dit « une baignoire » et non « une bainoire » on dit « je m’excuse » et non « je m’escuse » On redécouvre le « o » ouvert [ ], le « o » fermé [ o ], le « e » ouvert [ ], le « e » fermé [ ], le « é » simple [ ], le « è » appuyé [ ] et certains autres sons 6 souvent mal prononcés ou mélangés comme le « on » [ « in » [ ], le « an » [ ] et le « un » [ ]. ], le L’articulation est très importante pour la bonne compréhension du texte et donc de l’histoire par les spectateurs. Il y a pour cela toutes sortes de jeux et aussi des phrases à répéter en boucle. Il faut ici ouvrir correctement les mâchoires et s’efforcer de détacher chaque syllabe de façon à ce que la phrase soit compréhensible. Ex : « Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes ?» Le téléphone arabe non parlé est un jeu où l’on lit sur les lèvres de son voisin la phrase qu’il articule lentement et que l’on doit répéter de la même manière au suivant. Pour ce qui est du rythme de la phrase ou du texte, il s’agit de montrer aux enfants qu’au théâtre, une phrase peut se dire autrement que grammaticalement. On peut la dire lentement ou rapidement ou de façon linéaire. Prononcer une phrase de façon neutre, c’est à dire dénuée de tout sens, vidée de son essence, permet de redécouvrir les mots les uns après les autres et retrouver leur sens originel. C’est ainsi que l’on trouve son « médium ». Le médium est la voix juste, là ou elle ne force pas, où elle est claire et nette. Après avoir chuchoté plusieurs fois une phrase en ayant pris soin de l’articuler afin qu’elle reste distincte, la phrase dite à voix haute devient nette, la bouche et le diaphragme ayant acquis une grande ampleur. On dit que l’on a trouvé son médium. La respiration ventrale fait alors résonner le son et on perçoit alors des vibrations dans tout le corps. Par ces variations de volume, on apprend à placer sa voix à différents niveaux sans se faire mal. Un personnage peut chuchoter sur scène, tous les spectateurs doivent avoir clairement entendu. 5)Confiance et respect Les relations de confiance doivent être instaurées dans le groupe. Cela permet, quand on est sur scène, de s’entraider si l’un ou l’autre semble en péril. Ex : le jeu de l’aveugle : j’installe dans l’espace quelques obstacles ; les enfants sont deux par deux, l’un est l’aveugle, l’autre le guide ; ce dernier doit rassurer l’infirme, le faire marcher, lui faire franchir les obstacles sans le mettre à aucun moment en danger. 7 Le respect au théâtre c’est écouter les autres, se taire quand chacun passe sur scène. Il est aussi sur scène, on respecte celui qui est en difficulté ou intimidé, on parle une fois que l’autre a fini sa réplique, on ne se moque pas. 6)Imitation Cela permet à l’enfant de développer de la rigueur et de l’exigence envers soi-même. Trois sortes de jeux sont possibles, à partir de ceux-ci on peut en créer de nouveaux ou les dévier. Le mime L’enfant choisit un animal, le mime de façon muette puis peut imiter ensuite le bruit. le miroir Un enfant est le miroir, l’autre est face au miroir. Chaque geste de l’enfant, qui doit être effectuer avec lenteur, est reproduit avec précision par l’enfant – miroir La pose Un enfant prend une pose de son choix avec une expression sur le visage et s’immobilise dans un coin retranché (ex : derrière un paravent ) ; l’enfant suivant observe la pose et l’expression et les reproduit de la façon la plus identique possible et ainsi de suite. Au dernier enfant, on demande au premier de reprendre sa position initiale et on constate le résultat. 7)Immobilité et déplacement Ces jeux permettent une maîtrise du corps et de l’équilibre. Ils seront utiles ensuite pour des mises en scène. Pour le déplacement, l’enfant apprend différents rythmes et crée différentes démarches. Ex : la statue : les enfants marchent dans la salle et s’immobilisent à mon signal. la course au ralenti : les enfants se disposent sur la ligne de départ indiquée et doivent marcher, tout en décomposant leur mouvement, le plus lentement possible. Le dernier arrivé ayant bien respecté la consigne a gagné. 8) Emotion Il s’agit là de travailler sur de nombreux sentiments mais aussi de savoir les nommer. Les jeux d’émotions permettent à l’enfant de faire vivre le personnage qu’il joue. Les enfants sont souvent très riches d’émotions mais ils ne savent pas comment elles s’appellent ni comment différencier celles qui sont proches. Qu’est-ce que la déception ou 8 l’orgueil ? Leur vocabulaire s’enrichit et leur sera très utile tout au long de leur vie afin de savoir parler de leur sentiment, ce qui évitera un repli sur soi. Au début, je donne une explication très simple à l’émotion demandée en leur donnant pour appui une situation de fait. Ex : Les enfants marchent dans la salle et je leur dis « vous êtes énervés car votre petit frère vous a cassé un jouet. » ou « vous êtes angoissés car vous êtes seuls et vous entendez des portes grincer et le plancher craquer. ». Entre chaque émotion, les enfants reprennent une marche neutre. Au fur et à mesure de l’évolution du groupe dans ce genre d’exercices, j’en arriverai à juste citer un état et euxmêmes devront trouver une situation X qui correspond au sentiment ( ex : « affolé » ). Les plus jeunes apprécient un jeu qui associent un signal donné (taper des mains 1 fois, 2 fois, 3 fois, etc) à un son ou une parole, à une attitude du corps, à une situation et à un sentiment. Une fois que chacun a bien saisi quel signal correspond à quelle attitude, je donne les signaux dans le désordre. 9)Imagination et persuasion Ces jeux développent et conservent l’imaginaire des enfants. On peut ainsi inventer une histoire tous ensemble. Ex : L’histoire commence par « Il était une fois » et chaque enfant à tour de rôle invente un « bout » d’histoire. Les objets transformables est un jeu où je dispose plusieurs objets ; un enfant en choisit un et selon sa forme, sa couleur, sa texture, l’objet n’est plus ce qu’il est mais devient quelque chose d’autre (ex : un rouleau de scotch devient une roue de voiture d’enfant). Quant aux jeux de persuasion, ils développent l’assise, la confiance en soi – même de l’enfant et nécessitent une grande concentration. Ex : le vendeur ou la pub : un enfant choisit un objet et sur scène doit le vendre au public donc en vanter tous les mérites et le rendre unique et indispensable. 10) Improvisation Il existe différents types d’improvisations. Pour l’improvisation guidée, je donne une situation de départ. Lorsque les situations de départ et de fin sont indiquées, c’est une improvisation très guidée. L’improvisation libre laisse libre choix aux enfants de leurs situations de départ et de fin. L’improvisation thématique doit être réalisée à 9 partir d’un thème donné. Enfin, l’improvisation muette est souvent pratiquée avec les masques neutres. D’autre part, l’improvisation peut être soit individuelle, soit collective. Individuelle, elle permet à l’enfant de se retrouver seul avec lui – même ; il ne peut pas compter sur les autres. L’enfant invente alors un personnage qui a une démarche, un caractère, une silhouette propres, qui peut se parler à soi – même ou dans une langue inventée. Les accessoires (chapeau, lunettes, châle, parapluie, …) peuvent aider l’enfant dans sa recherche. Collective, l’improvisation permet de faire travailler plusieurs enfants ensemble, l’objectif étant de trouver sa place dans le groupe et de nouer des relations avec chaque personnage. Ex : l’ascenseur bloqué : plusieurs personnes se retrouvent bloquées dans un ascenseur, comment réagissent-elles ? Chaque enfant aura préalablement réfléchi à son personnage (âge, métier, …). 11 ) Masques J’utilise ici des masques blancs dits « neutres » car l’on est parfois mieux caché pour montrer ses émotions. Seuls le regard et le corps s’expriment. Aborder le masque avec les enfants, c’est découvrir la commedia dell’arte et tous ses personnages célèbres : Arlequin, Pantalon, Colombine, Pierrot, Polichinelle. Ce théâtre là est à la portée des enfants car il est très simple. Il est alors préférable de débuter par des jeux muets (il y a très peu de dialogues dans la commedia italienne) puis plus tard d’y greffer la voix. Le masque oblige l’enfant à redoubler son articulation et son volume sonore. L’exercice que je donne pour exemple a été effectué à plusieurs reprises avec des enfants de CM1 et CM2 et a eu un franc succès. Cela peut faire l’objet d’un spectacle. Ex : Deux enfants sont sur scène, masques sur le visage ; ces personnages ne se connaissent pas. On assiste à leur rencontre muette. L’enfant qui sera le premier à s’exprimer est choisi avant de commencer. Lorsqu’un personnage s’exprime par son corps, ses déplacements, son regard, l’autre est immobile, regarde et écoute celui qui s’exprime. Quand celui – ci a terminé, il s’immobilise et fixe son partenaire qui sort alors de son immobilité pour répondre à la proposition de son camarade et ainsi de suite. Il s’instaure ainsi un véritable dialogue « en différé » entre ces deux personnages. Les enfants s’arrêtent à mon signal 10 « merci ». Il en ressort des histoires très émouvantes et parfois hilarantes. Le clown est aussi un bon outil de travail car il est rare qu’un enfant n’ait jamais vu un spectacle de cirques ou de guignols. Le nez rouge et la perruque sont ainsi de bons accessoires pour accéder aux émotions très marquées du clown. Je peux proposer aussi la création de masques, en binôme. Avec des bandes de plâtres, nous pouvons, dès l'âge de 8/9ans, créer son propre masque, le faire sécher et le décorer. DU THEATRE A LA SCENE : L’OPTION SPECTACLE A L’ISSUE L’option spectacle à l’issue est une approche du théâtre plus complète puisqu’elle inclut la présentation d’un spectacle, qui est l’aboutissement d’un travail mené sur de nombreuses séances. Les enfants débuteront par différents jeux de théâtre et en feront application avec un texte. Le spectacle est alors l’objectif à atteindre. 1)Création de textes Il s’agit soit d’inventer une histoire qui sera la pièce de théâtre proposé par les enfants, soit de créer plusieurs saynètes autour d’un thème. Comment inventer une histoire ? Rien de plus simple pour les enfants ! Ils aiment beaucoup faire cela. Pour les plus jeunes enfants, on peut se baser sur le jeu d’imagination : on commence par « il était une fois… » et on invente l’histoire en créant les personnages et en les faisant parler. Pour les enfants plus grands, on détermine le temps, le lieu, les personnages (leur métier) et le message à faire passer puis on invente l’histoire. Mon rôle est d’orienter parfois le récit afin qu’il soit plausible, que le message à faire passer ne soit ni oublié ni contredit, de traduire éventuellement les phrases dans un français adapté à l’époque de l’histoire et de rédiger si besoin est. Chaque enfant choisit et crée son personnage. Ex : en 1999, une classe de CP et moi-même avions réalisé deux spectacles de marionnettes : les enfants avaient 11 inventé l’histoire, créé leur personnage et fabriqué leurs marionnettes. En 2013/14, avec le groupe d'adolescents de Carnoules, nous travaillons sur la création d'un spectacle, par le biais de plusieurs improvisations. En général, il est très pédagogique, et notamment pour les plus grands, de traiter d’un thème d’actualité (ex : lutte contre la pollution ou le tabagisme ) et de travailler ce thème en amont en classe ou lors d’une autre activité. On peut même rédiger des saynètes dans le cadre d’une expression écrite. Ce type de travail est très porteur car tout en faisant du théâtre, la curiosité de l’enfant s’éveille et il apprend dans le plaisir. Cela peut toucher toutes les matières telles que la géographie, l’histoire, les mathématiques, le français et toutes les disciplines artistiques comme la peinture ou la musique. On crée ainsi plusieurs saynètes de 2, 3 ou 4 personnages. A partir du thème, on s’interroge sur les situations pouvant illustrer correctement le sujet. On encadre ensuite ces situations d’une entrée en la matière et d’une sortie. Ex : Une classe de CE2 avait inventé sur le thème de la préservation de l’environnement différentes scènes et notamment une nouvelle aventure d’Achille Talon. 2)Textes supports Parmi les textes supports à la présentation d’un spectacle de théâtre, je distingue les pièces « classiques » de théâtre des textes de théâtre pour enfants qui se trouvent en librairie depuis plusieurs années. Les textes « classiques » de théâtre Les enfants découvrent ici un auteur de théâtre renommé et une petite partie de l’Histoire du Théâtre. J’en profite un peu pour le situer dans son époque, dans son style et dans sa vie. Ce sont des pièces tout à fait abordables pour des enfants dont les auteurs sont soient classiques : Molière, Rostand, Goldoni, Corneille, Marivaux, La Fontaine (ses fables); soient contemporains : Courteline, Romains, Pagnol, Prévert. Dans ces derniers, les « Exercices de style » de Raymond Queneau sont très intéressants à travailler. Ils peuvent rester au stade de jeux ou bien faire l’objet d’un spectacle : dire un texte très simple de 99 façons différentes. Pour certains textes, on peut travailler l’alexandrin car dire un texte en alexandrins s’apprend. Il y a certaines 12 règles à respecter, savoir y poser sa respiration et faire sonner les vers. La règle suprême des 12 pieds est à respecter scrupuleusement. L’alexandrin demande souvent une traduction afin que l’enfant comprenne ce qu’il dit. C’est toute une mélodie et cela éveille les enfants à la poésie et à l’écoute. Ce travail a bien réussi auprès d’enfants de 10/11 ans. Les textes de théâtre pour enfants Ces textes permettent de faire un spectacle avec plusieurs petites saynètes adaptées à l’âge des enfants ou avec une pièce qui englobe tous les enfants du groupe. La plupart des livres supports sont publiés aux éditions Retz. Tous les livres cités ci-dessous font partie de ma bibliothèque théâtrale. Christian Lamblin : Pièces policières 7/11 ans tome 1 et 2, 20 pièces à jouer 7/13 ans, Petites comédies pour les enfants 7/11 ans ; François Fontaine : Pièces historiques 9/11 ans, Des sketches à lire et à jouer 5/8 ans, Saynètes pour apprentis comédiens 5/8 ans ; Denise Chauvel : Des spectacles pour les enfants ; Guide des pièces de théâtre à faire jouer aux enfants 7/13 ans (Evelyne Leducq & Alain Cardinand) ; Apprenez à relaxer vos enfants 2/7 ans (Denise Chauvel & Christiane Noret) ; Mille ans de contes Théâtre Tomes 1 et 2 représente près de 400 pages par tome d’extraits de pièces pour les enfants ; Théâtre et histoires en dialogues : 18 sketches pour 5/13 ans (Blanchette Marcorelles) ; Une sorcière belle comme le jour et 13 autres pièces pour 7/10 ans (Ann Rocard) ; 2 classeurs aux éditions Scolavox écrits par Ann Rocard « Le théâtre à l’affiche » pour Grande Section, CP, CE1 (16 pièces) et pour CE2, CM1, CM2 (9 pièces); Clowns, Pitreries et farceurs en scène : divers auteurs; Sketches et contes à mimer(Brigitte Saussard); Pièces pour monstres et sorcières; et de nombreuses autres recueils et pièces pour enfants; la bibliothèque de théâtre Armand Gatti, maintenant située à La Seyne sur Mer, où je me ressource et reste informée de l'actualité théâtrale pour la jeunesse. 13 3) Choix et distribution Dans un premier temps, les ateliers sont consacrés aux jeux et à une approche sympathique du théâtre. Le choix du texte ou de la création est déterminé individuellement, mais toujours en symbiose avec les élèves ou en collaboration avec l’enseignant (ou le responsable). Selon le niveau des enfants que j’aurai pu évaluer tout au long de la première phase, je présélectionne différentes saynètes ou pièces ; ce choix est ensuite soumis aux élèves ou à l'enseignant qui statuera en dernier ressort, approuvera ou désapprouvera, me demandera éventuellement une nouvelle proposition. Il pourra aussi choisir de lui-même un texte. Dans le cas d’une création, le thème sera choisi et les textes écrit, soit en atelier de théâtre, soit lors d’une autre activité. Les textes sont ensuite photocopiés pour chaque enfant. Les enfants sont alors très enthousiastes. Une séance est consacrée à la lecture du texte et à l’explication éventuelle de vocabulaire ou de sens. La distribution (définitive) des rôles m’amène à faire bien remarquer que les 1ers rôles nécessitent un peu plus de travail et surtout une bonne mémoire et que les petits rôles ou les rôles muets prennent une place non négligeable. De plus, chaque enfant s’engage à aller jusqu’au bout de l’aventure, c’est à dire jusqu’au spectacle sauf cas exceptionnel (ex : déménagement). En principe, chaque enfant choisit son rôle ; en cas de convoitise d’un même rôle, un tirage au sort a lieu. Malgré ces petits soucis, chacun revient en général ravi de son choix. Selon les personnalités, certains se dirigeront vers des personnages plus en retrait, d’autres vers des personnages à caractère plus forts. Comme je commence à connaître les enfants, j’oriente parfois les choix difficiles. Enfin, pour les plus petits, je surligne leur rôle ; je conseille vivement aux plus grands de le faire chez eux ; cela les aide ainsi à apprendre leur rôle. Quand arrive ce moment-là, l’enthousiasme se fane un peu ; pourtant mieux vaut se débarrasser de son texte pour jouer « les mains libres ». J’ai même tendance à débuter la mise en scène une fois le texte su car il est quasiment impossible d’indiquer à un enfant ce qu’il doit faire alors qu’il ne sait pas quoi dire. Cette contrainte leur permet d’apprendre rapidement leur texte car ils ont souvent hâte de jouer. Il faut aussi savoir après qui l’on parle et à qui : est-ce une réponse ou une réflexion personnelle ou un aparté ? 14 Pour les plus petits, les phrases sont en général courtes, je leur dis alors et ils répètent après moi. Le choix du texte est adapté à l'âge de l'enfant. 4)Mise en scène Le travail de mise en scène m’appartient : j’indique aux enfants les déplacements, positions, gestes, intonations. Cependant, et autant que peut se faire, je leur réclame beaucoup d’initiatives personnelles et très souvent les uns et les autres ont des idées très justes et très originales que l’on applique. Lorsqu’on travaille le texte, le rituel de la relaxation a toujours lieu et si le temps nous le permet, un jeu de théâtre n’est pas à exclure. L’approche du spectacle implique de plus en plus de répétitions. Les enfants doivent être très rigoureux par rapport aux indications de mise en scène. Je conseille souvent de noter ces indications ou en tout cas de bien les retenir afin qu’on ne perde pas de temps à répéter les mêmes choses constamment. Une musique ou des bruitages sont parfois intéressants à intégrer pour soutenir la mise en scène. 5) Préparation A l’approche du spectacle, vient alors la réflexion collective sur les costumes, accessoires et le décor. Je peux également proposer une bande son, si besoin. Les enfants se sentent d’autant plus impliqués quand ils doivent réaliser un masque, apporter un accessoire, ou encore peindre un décor. J’ai de nombreux costumes, accessoires, tissus qui sont à la disposition des enfants. J’insiste aussi beaucoup auprès des enfants pour ne pas qu’ils achètent un costume ou un accessoire « spécialement » pour le théâtre. En discutant ensemble, souvent un élève a et propose de prêter à son camarade. Cela renforce la confiance et la solidarité que je cherche à développer par les jeux tout le long de l’année. Parfois il manque un objet indispensable. Si ledit objet est cher ou encombrant, on trouve une solution. Ex : 2/3 chaises, des coussins et un grand tissu, suffisent à créer un canapé. On peut aussi utiliser la symbolique pour suggérer au spectateur un décor. Pour certains spectacles, on peut prévoir d’un commun accord avec le responsable des enfants un budget, lequel permettra une utilisation immédiate et future en vue d’autres années ou d’autres spectacles. 15 6) Spectacle Une fois la date de représentation fixée, les enfants invitent leur parent et leur famille. Je propose souvent à l’enseignant d’inclure au spectacle chansons , poèmes ou danses travaillés au cours de l’année. Cela aboutit à un spectacle plus complet, plus varié et très valorisant pour l’enfant. Le déroulement du spectacle est ensuite fixé selon les rôles des uns et des autres (certains enfants ont parfois deux rôles) en essayant d’alterner chants, danses, poèmes et saynètes. On peut aussi inclure un ou plusieurs présentateurs. L’italienne, terme théâtral, est la répétition rapide et non jouée (pas d’intonations) du texte. C’est une remise en mémoire des répliques et de leur déroulement. Avant le spectacle, il est vivement conseillé tout en se préparant en coulisses ( habillage, maquillage ) de faire une ou plusieurs italiennes. Deux ou trois répétitions réunissant les groupes dans les conditions de représentation sont nécessaires. Les enfants doivent respecter le silence dans les coulisses. Avant de jouer devant les parents, on peut faire une représentation pour d’autres enfants. Quand l’heure du spectacle va sonner, mon rôle est de gérer le trac et l’excitation, d’encourager les enfants, de faire quelques minutes de relaxation / décontraction, de se transmettre le « fluide », c’est à dire l’énergie pour être les meilleurs possibles. C’est un cadeau que l’on offre au public et l’aboutissement d’un travail commun. C’est un moment très riche en émotions. L’option « spectacle à l’issue » apporte donc à l’enfant une expérience inoubliable et donne aux parents un excellent souvenir. Je souhaite que ce projet ait le mérite d’aboutir, car c’est pour moi un métier à part entière et j’espère qu’il sera reconnu comme tel auprès de mes lecteurs. 16