Douleur abdominale et lombaire aiguë de l`adulte
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Douleur abdominale et lombaire aiguë de l`adulte
DOULEURS ABDOMINALES ET LOMBAIRES AIGUES DE L'ADULTE. Item 195 B. Pradère, N. Carrère, M. Tubéry Les douleurs abdominales et lombaires aiguës chez l'adulte constituent un des problèmes les plus difficiles à résoudre en matière d'urgence, à la fois par le nombre de cas référés (environ 5 à 10 % des urgences) et par la très grande difficulté à différencier les urgences vraies qui engagent à court terme le pronostic vital de toute une série de symptômes entrant dans le cadre de la pathologie fonctionnelle, extrêmement fournie dans ce domaine. Devant ce problème, il ne faut pas négliger des actions qui pourraient paraître obsolètes, comme l'interrogatoire et l'examen clinique qui constituent les "fondamentaux" de la pratique médicale d'urgence, sans lesquels il est, même à notre époque, quasiment impossible d'arriver à un diagnostic précis, seul capable d'aboutir à la mise en œuvre de traitements adaptés et efficaces. Toutefois, il apparaît comme indispensable, à l'heure actuelle, de mettre en exergue le rôle déterminant de la tomodensitométrie qui devient, comme l'échographie en son temps, le prolongement de l'examen clinique. Ainsi, il semble de plus en plus difficile de faire fonctionner une unité d'accueil des urgences sans que le plateau technique ne dispose d'un scanner performant. I. EPIDEMIOLOGIE. Les douleurs abdominales et lombaires représentent environ 4 à 10 % des admissions dans les S.A.U. Selon les données recueillies pour la région Midi-Pyrénées (ORUMIP, Rapport 2001), elles représentent le second motif de recours aux services d'urgences, après les traumatismes et sans doute le premier motif d'hospitalisation. Pour le CHU de Toulouse, le taux d'urgences digestives représente plus de 10% des admissions. Le pourcentage d'hospitalisations faisant suite à une admission pour douleurs abdominales ou lombaires est de l'ordre de 30 à 40 %, ce qui témoigne de la difficulté à TRIER ces urgences et à s'assurer de leur bénignité. Il faut toutefois garder en mémoire le fait que près de 50 % de ces patients sortent de l'hôpital ou de la clinique sans qu'aucun diagnostic étiologique n'ait été porté ; on parle alors de douleurs abdominales aiguës non spécifiées (D.A.N.S.). 1 II. OBJECTIFS En face d'une douleur abdomino-lombaire aiguë, les objectifs de la prise en charge médicale sont de trois ordres : Rechercher des critères de gravité Définir des critères d'intervention chirurgicale Rechercher une étiologie. 1. Recherche des critères de gravité : -Critères de gravité immédiats (souvent évidents). Un patient admis avec des signes de défaillance hémodynamique aiguë parfois même en état de choc avéré est une urgence absolue qui requiert des soins immédiats. Le pronostic vital est en jeu de façon très imminente et il est indispensable de corriger ces déséquilibres en urgence avant même de réfléchir à une cause ; en particulier dans ces cas dramatiques, il faut s'abstenir d'adresser le patient au service de radiologie sans que l'hémodynamique ne soit rétablie, sans quoi on prend le risque d'assister à une décompensation brutale aboutissant dans la majorité des cas au décès. Ces évolutions dramatiques se voient surtout en cas de pathologies hyperseptiques (péritonites, syndromes occlusifs, pancréatites aiguës), de déglobulisations massives ou d'ischémies intestinales. L'objectif est ici de faire la différence entre douleur abdominale organique et fonctionnelle. C'est un objectif très difficile. Les difficultés proviennent de la grande diversité des douleurs abdomino-lombaires, de leur perception très variable d'un patient à l'autre, de l'age du sujet et de leur retentissement "général". Il faut cependant garder en mémoire, pour différencier ces deux types de douleurs, que : 2 Les douleurs fonctionnelles, très fréquentes en pathologie abdominale (syndrome du colon irritable en particulier) ont une intensité le plus souvent modérée, varient dans leur topographie et donnent au malade de longues périodes d'accalmie. En revanche, les douleurs d'origine organique sont le plus souvent très intenses, du type paroxystique sans rémission, évoluent depuis plusieurs heures et sont plutôt fixes dans leur topographie. Toutefois ces critères restent d'interprétation souvent délicate. -Critères de gravité liés au terrain. Le sujet agé : il est bien connu que les signes de gravité s'estompent avec l'age et que la fiabilité diagnostique diminue chez les sujets agés, passant en dessous de la barre des 30 % après 80 ans. Il faut garder en mémoire que la mortalité globale chez les patients agés de plus de 80 ans admis aux Urgences est au moins 10 fois supérieure à celle des patients de moins de 30 ans admis pour un motif similaire. Plus le patient est agé, plus le temps presse… Les trois diagnostics les plus fréquents sont l'infarctus du myocarde, la rupture d'anévrysme aortique et l'ischémie intestinale (infarctus entéro-mésentérique). La femme jeune : dans ce cadre particulier, les causes gynéco-obstétricales dominent et 10 à 15 % de ces patientes admises aux Urgences pour douleurs abdominales sont enceintes avec souvent méconnaissance du diagnostic. La grossesse extra-utérine doit donc être éliminée en premier lieu avant même d'évoquer des diagnostics aussi banals que l'infection urinaire ou la salpyngite…Quant au diagnostic d'appendicite aiguë, il reste très difficile à affirmer.sur ce terrain. 2. Recherche des critères chirurgicaux. C'est une étape essentielle devant un tableau de douleurs abdominales aiguës. Le but est de savoir si le ou la patiente requiert une intervention chirurgicale et dans quels délais. Il faut là encore savoir qu'environ 15 à 20 % des patients admis en urgence pour ce symptôme vont être opérés! Il est donc fondamental de "trier" le plus vite possible ce type de malades pour éviter tout retard à la mise en œuvre d'un traitement adapté. 3 Il n'existe pas de critère absolu d'indication opératoire (ce serait trop facile) mais tout un faisceau d'arguments doit pouvoir aider à prendre cette décision difficile. D'abord les critères d'organicité de la douleur, décrits plus haut, même si leur valeur sémiologique n'est pas absolue constituent un bon élément d'orientation. L'hyperthermie et le retentissement sur l'état général sont de bons critères, ainsi que l'âge des patients. L'examen clinique certes toujours contestable reste malgré tout un excellent argument devant la constatation d'une réaction pariétale abdominale à type de défense ou de contracture. Enfin, les explorations extra cliniques, biologiques et surtout radiologiques (échographie et avant tout scanner) permetront d'obtenir le plus souvent une assez grande fiabilité dans la pose des indications opératoires. 3. Recherche d'une étiologie. Ce n'est jamais facile mais on doit garder en mémoire que 10 diagnostics représentent à eux seuls 90 % des cas!. Il s'agit, par ordre décroissant de : Etiologie % D.A.N.S 34 Appendicite 28 Cholécystite 9,5 Occlusion du grêle 4,1 Urgences gynécologiques 4 Pancréatite aiguë 2,9 Coliques nephrétiques 2,9 Ulcère perforé 2,5 Cancer (complications) 1,5 Diverticules 1,5 Nous ne dresserons pas ici la liste exhaustive des étiologies des douleurs abdominales ou lombaires aiguës de l'adulte qui fait l'objet d'un chapître spécifique ci dessous. 4 III. INSTRUMENTS DU DIAGNOSTIC. Tout a été dit sur l'intérêt ou l'obsolescence de telle ou telle partie de la relation entre le patient et son "soignant", qu'il s'agisse de l'interrogatoire ou de l'examen clinique. Toutefois, il nous semble utile de rappeler ici quelques vérités toujours au goût du jour. 1. L'interrogatoire. Tout le monde s'accorde pour dire qu'il est fondamental, essentiel…et c'est vrai! Même sans envisager des suites médico-légales (de plus en plus fréquentes) au cours desquelles il est toujours reproché au médecin une insuffisance de recueil des données, il apparaît comme un temps indispensable dans la prise en charge de ces patients. Caractères de la douleur, siège, mode de début, type, facteurs déclenchants, présence de signes d'accompagnement, traitements suivis sont autant d'arguments qu'il ne faut absolument pas négliger. 2. L'examen clinique. Problématique différente, l'examen clinique est lui aussi un élément fondamental du diagnostic même si sa pertinence est directement proportionnelle à la qualité de l'examen et si des données récentes remettent en cause la valeur diagnostique des signes dits "classiques". Signe clinique Rentabilité Douleur à la décompression et Syndrome Se = 63 %, Spé = 69 % péritonéal Performance amoindrie chez le sujet âgé Signe de Murphy Se = 97 %, VPN = 93 % Performance amoindrie chez le sujet âgé Psoïtis et Syndrome appendiculaire Se = 16 %, Spé = 95 % T.R. et Syndrome appendiculaire N'apporte rien qui n'ait été découvert par l'examen clinique ? Examen gynécologique Indications larges. Se : sensibilité, Spé : spécificité, VPN : valeur prédictive négative. 5 Quels que soient la "qualité" et le rendement de l'examen clinique initial, il est fondamental de le répéter après quelques heures de surveillance. 3. Les examens biologiques. Que peut-on en attendre? Il faut savoir que le recours à des examens complémentaires (biologiques ou d'imagerie) va entrainer en général un doublement du temps de passage aux urgences… Ne gardent donc leur intérêt que les examens disponibles très rapidement : NFS, Amylasémie et lipasémie, CRP, ECBU, BES et dosage des ß-HCG. 4. L'E.C.G. garde toute sa valeur dans le cadre de douleurs abdominales aiguës (nécrose myocardique à expression abdominale). 5. L'imagerie +++ En matière de douleurs abdomino-lombaires ou pelviennes, l'examen le plus souvent demandé reste l'abdomen sans préparation (A.S.P.). Sa rentabilité reste faible, mais sa sensibilité est élevée en matière de : Recherche de niveaux hydro-aériques (occlusion, iléus), Recherche d'un pneumopéritoine (croissant gazeux sous phrénique), Recherche d'un corps étranger. L'échographie est considérée depuis longtemps comme un prolongement direct de l'examen clinique et de nombreux services d'urgence en disposent sur site. Les meilleurs résultats sont obtenus en cas de lésion des viscères "pleins" mais elle garde une grande utilité en pathologie biliaire et en cas d'épanchement intra péritonéal. La tomodensitométrie prend actuellement le pas sur les examens précédents et voit son champ d'application très élargi dans le cadre des urgences abdominales comme les abcès intra- 6 péritonéaux (secondaires à une infection viscérale), les syndromes occlusifs (détermination du niveau de l'occlusion), l'ischémie mésentérique et la pathologie excrétice rénale. IV. LES GRANDES ETIOLOGIES L'objectif n'est pas d'avoir en mémoire la liste des étiologies des syndromes douloureux abdomino-pelviens…mais de pouvoir reconnaître assez vite les cas où le pronostic vital est en jeu et les candidats à une intervention chirurgicale à ne pas différer. 1. Les étiologies digestives -Œsophage : rarement en cause (achalasie, perforation) -Estomac, duodénum : ulcères, gastrites, dilatation aiguë de l'estomac (post-opératoire, post-traumatique…), tumeurs (rare). -Grêle : plutôt rare (tumeurs bénignes ou malignes), sténoses (Crohn), diverticule de Meckel. -Appendice : appendicites aiguës, rarement tumeurs (tumeur endocrine type carcinoïde appendiculaire) -Colon : Syndrome du colon irritable ou colopathie fonctionnelle, première "maladie" du tube digestif. Ne pas oublier les colites (Crohn, RCH), les diverticules (diverticulites, abcès diverticulaire, péritonites), le volvulus (sigmoïde) et les tumeurs (rarement douloureuses). -Foie et voies biliaires : colique hépatique (+++), cholécystites, angiocholites, toutes les hépatites, les tumeurs du foie compliquées (hémorragies), les abcès hépatiques. La périhépatite à Chlamidiæ (syndrome de Fitz-Hugh-Curtis) est à l'origine une infection gynécologique à expression purement abdominale dans l'hypochondre droit.. On peut y ajouter le syndrome de Budd-Chiari aigu (thrombose des veines sus hépatiques) et la thrombose portale (pyléphlébite), sans oublier les hépatalgies du foie cardiaque. 7 -Pancréas : pancréatite aiguë (++), pancréatite chronique, rarement tumeurs pancréatiques. -Rate : infactus splénique, survenant le plus souvent dans le cadre d'une hémopathie (splénomégalie), d'une cardiopathie emboligène (troubles du rythme?) ou d'une drépanocytose (cf infra). -Mésentère : "mésentère commun et autres anomalies de rotation de l'anse intestinale primitive, tumeurs du mésentère (ex : tumeurs desmoides du syndrome de Gardner au cours des polyposes familiales), lymphangiome kystique. -Péritoine : tuberculose péritonéale, adhérences et brides post-opératoires (syndrome occlusif),hernies internes (para-duodénales, trans-mésentériques), infarctus épiploÎques et tumeurs bénignes (ascite gélatineuse due à une mucocèle appendiculaire) ou malignes (mésothéliomes). -Ganglions mésentériques et rétro-péritonéaux : lymphomes, adénolymphite mésentériaque (enfant et adolescent) ganglions sattelites des tumeurs abdominales ou pelviennes). -Ombilic : canal omphalo-mésentérique persistant et kystes de l'ouraque. 2. Les étiologies gynécologiques (4 % des syndromes abdominaux aigus). -Salpyngites : fréquence très élevée, véritable problème de Santé Publique. Le dilemme est de ne pas la confondre avec une affection chirurgicale aiguë (appendicite) et de ne pas la négliger car les conséquences (stérilité, GEU) sont gravissimes chez la femme jeune. Il faut savoir que la cœlioscopie apporte, à l'heure actuelle un élément fondamental dans leur prise en charge diagnostique. -Grossesse extra-utérine : ce diagnostic doit être évoué en premier lieu chez une femme jeune souffrant de douleurs abdominales++++++. Facile en cas de rupture avec état de choc, il impose une sanction chirurgicale immédiate. Beaucoup plus difficile devant des 8 métrorragies douloureuses avec retard de règles. Le dosage immédiat des ß-HCG est primordial. -Kystes de l'ovaire : il faut connaître les ruptures de kystes ovariens fonctionnels en période post-ovulatoire ; l'échographie pelvienne fait le diagnostic. Les torsions de kystes ovariens seeront soupçonnés par l'examen clinique (touchers pelviens), fortement évoqués par l'échographie et définitivement affirmés par la cœlioscopie. -Autres étiologies gynécologiques : Endométrites Endométriose Avortements spontanés Fibro-myomes utérins (nécrobiose aseptique) 3. Les étiologies vasculaires -Anévrysmes de l'aorte abdominale : sauf en cas de rupture où le temps est compté, les anévrysmes de l'aorte abdominale en cours de fissuration se déclarent par des douleurs lombaires aiguës très intenses (lombalgies d'origine aortique+++). Il faut savoir évoquer ce diagnostic et l'affirmer par le scanner. -Anévrysmes des artères digestives (rares) : Les deux tiers siègent sur l'artère splénique, et 20 % sont hépatiques. Leur rupture peut se faire dans le péritoine ou dans le tube digestif (hémorragie digestive). -Dissection aortique : avec une mortalité très lourde, cette affection débute en général par des douleurs thoraciques suivies de douleurs abdominales et lombaires très violentes en rapport avec l'hématome rétropéritonéal. -Ischémie intestinale : ◊ Elle peut être artérielle (embol ou athérome des artères digestives) ou veineuse (thrombose de la veine.mésentérique.supérieure ou de la veine Porte). Il est indispensable de faire le 9 diagnostic au plus tôt sans quoi on découvre lors de la laparotomie un intestin nécrosé qu'il faut réséquer, surtout s'il s'agit d'une cause artérielle. Les ischémies non occlusives liées à un choc non contrôlé (patients très graves, en réanimation le plus souvent) sont de plus en plus rares. ◊ Les vascularites : il s'agit de lésions de la micro-circulation (ischémie, infarctus artériel ou veineux) liées à des maladies entrant dans le cadre des collagénoses. Le plus souvent existent des lésions pluriviscérales (peau, rein, articulations). On retrouve des signes généraux (fièvre, amaigrissement), un syndrome inflammatoire et souvent une hyper éosinophilie. Ces maladies peuvent entrainer la survenue de pancréatites, de perforations du grêle ou du colon, de syndromes occlusifs, d'ischémie intestinale… Toutes les collagénoses peuvent en être responsables : -P.A.N. La douleur abdominale, volontiers aiguë ou subaiguë, est inaugurale dans plus de 10 % des cas et émaille l’évolution dans 40 %. Elle est associée à un pronostic plus sévère. Le diagnostic repose sur son association aux autres critères de la maladie : fièvre au long cours, amaigrissement, multinévrite, atteinte cutanée avec purpura vasculaire nécrotique, atteinte rénale, syndrome inflammatoire biologique. La biopsie d’une lésion (cutanée, nerveuse, etc.) le confirmera. Les complications peuvent nécessiter une intervention chirurgicale (perforation, cholécystite). La corticothérapie a un effet antalgique rapide dans tous les autres cas. -Purpura rhumatoïde La douleur abdominale aiguë fait partie du tableau avec les arthralgies-arthrites et le purpura vasculaire. Si elle les précède, le diagnostic est difficile … -L.E.A.D. -Angeïte de Churg et Strauss -Maladie de Horton -Maladie de Behcet -Cryoglobulinémie 10 4. Les étiologies urologiques Coliques néphrétiques Lésions du haut appareil : pyélo-néphrite aiguë, abcès du rein, pyonéphrose. Lésions du abs appareil : cystites, rétention aigue^, prostatite. 5. Les étiologies pariétales. Hernies et éventrations. Hématomes des droits : traumatiques ou liés aux traitements anti-coagulants Syndrome de Cyriax +++ : subluxation le plus souvent traumatique des articulations chondrocostales entrainant des douleurs épigastriques liées à l'irritation des 8ème, 9ème et 10ème nerfs intercostaux.. La douleur est déclenchée par la palpation+++. Syndrome de Tietze (xiphodynie) : douleurs au niveau de l'appendice xyphoïde, d'origine cartilagineuse. Les douleurs pariètales à substratum neurologique : Zona, compréssions radiculaires d'origine rachidienne. 6. Les étiologies endocriniennes. a. Insuffisance surrénalienne aiguë +++ : pronostic vital en jeu. Les douleurs abdominales sont associées à des vomissements,une diarrhée, une asthénie aiguë, parfois à de la fièvre. Elles peuvent être très intenses, le tableau digestif est au premier plan. L’hypotension est la règle, voire un collapsus par hypovolémie. Ce tableau inqiétant en impose souvent pour une urgence chirurgicale. Le diagnostic est vite évoqué quand le terrain d’insuffisance surrénalienne est connu. Sinon, il est trompeur : 11 risque d’attribuer aux pertes digestives les signes d’hypovolémie ou à une urgence chirurgicale abdominale le tableau de collapsus. Toutefois, le simple B.E.S. doit attirer l'attention en montrant une HYPONATREMIE MAJEURE. Un autre bon signe biologique est la persistance d’une natriurèse non verrouillée voire très élevée, qui signe la perte rénale de sel("Diabète sodé"). Dans tous les cas, le remplissage volémique avec du soluté salé et surtout l’hydrocortisone améliorent le tableau. Il faut savoir faire prélever en urgence une cortisolémie, dont on n’attendra pas le résultat pour débuter le traitement, mais qui pourra confirmer le diagnostic a posteriori. b. Hypercalcémie. Les signes digestifs sont polymorphes et peu spécifiques : de la constipation inhabituelle avec anorexie jusqu’au tableau pseudo-occlusif avec vomissements profus et douleurs abdominales diffuses intenses. Des douleurs ulcéreuses ou de pancréatite aiguë, compliquant l’hypercalcémie, peuvent être présentes ou intriquées. Ils sont associés à des signes neurologiques : ralentissement idéomoteur, tableau pseudodépressif, céphalées, torpeur jusqu’au coma, syndrome confusionnel fréquent. Au pire, en général au-delà de 3,5 mmol/l, un tableau d’encéphalopathie aigu domine la scène. La tachycardie et la poussé hypertensive sont des signes de gravité de l’hypercalcémie. Le bilan biologique fait le diagnostic et précise s’il existe une atteinte rénale. c. Hypokaliémie. d. Diabète surtout en cas d'acido-cétose. 6. Les étiologies toxiques : a. Plomb : l'intoxication aiguë est rare mais la forme chronique (Saturnisme) est beaucoup plus répandue. "coliques de plomb". Le diagnostic est fondé sur quelques signes cliniques (liseré gingival grisatre de Burton, paralysie radiale) et sur le dosage de la plombémie, très élevée. b. Mercure 12 c. Fer d. Intoxication alcoolique aiguë : "gastrite aiguë", vomissements. e. Intoxication par les plantes et les champignons. Retenir la toxicité hépatique majeure de certains champignons : amanites phalloïdes responsables d'hépatites fulminantes nécessitant souvent le recours à la greffe hépatique en "super-urgence". f. Syndrome de sevrage aux opiacés : surtout dû à l'utilisation de l'héroïne, il survient dans les 24 heures suivant la dernière injection et s'accompagne de crampes abdominales de vomissements, de tachycardie. Il faut rechercher les traces des points d'injectin, un larmoiement, une mydriase++. 7. Les étiologies neurologiques. Epilepsie à forme abdominale : exceptionnelle. Migraine abdominale : les douleurs abdominales sont constamment associées à des céphalées. Hystérie V. LES AUTRES CAUSES RARES A CONNAITRE +++. 1. La porphyrie hépatique Enzymopathie héréditaire, en général autosomique dominante, responsable de surproduction de porphyrines et de leurs précurseurs. Seules les porphyries hépatiques peuvent être responsables de douleurs abdominales ; Evolution par poussées, pouvant associer : - un syndrome abdominal de survenue brutale, intense, avec un aspect pseudo occlusif. Pas de fièvre, de niveau hydro-aérique à l’ASP, de défense. - Des atteintes neurologiques périphériques (paralysies flasques en quelques jours) ou plus rarement de type Guillain Barré 13 - Des troubles psychiques fréquents : hallucinations, confusion, syndrome dépressif - Des signes cutanés : lésions bulleuses du dos de la main ou du visage - Les urines sont de couleur porto, parfois claires à l’émission mais fonçant ensuite à la lumière. Diagnostic : anamnèse, histoire familiale, dosages des porphyrines et de leurs précurseurs. 2. La drépanocytose et les syndromes d'hémolyse - La drépanocytose : Elle est responsable de crises douloureuses abdominales pouvant nécessiter le recours aux antalgiques morphiniques et relevant en principe de phénomènes de thromboses veineuses. Le traitement comprend, outre l’expansion volémique (per os ou IV), l’oxygénothérapie et la recherche systématique d’un foyer infectieux, qui peut avoir déclenché la crise. Ces douleurs surviennent le plus souvent chez un malade dont le terrain drépanocytaire est connu. - Les grandes hémolyses intra-vasculaires. Douleurs et vomissements sont au second plan après le syndrome anémique aigu. 3. La maladie périodique. Elle atteint les sujets de l’Est méditerranéen et se révèle le plus souvent avant 20 ans. Elle évolue par crises de 1 à 3 jours comportant de la fièvre et une polysérite (épanchements sérofibrineux péritonéaux, pleuraux, péricardiques). Fièvre de survenue brutale avec frissons, à 39°-40, pseudo palustre Crises douloureuses abdominales, quasi-constantes au cours de l’évolution, représentant le mode de début dans 60 % des cas. Douleur d’installation brutale, intense, parfois localisée au début puis diffuse, possible défense à l’examen ou niveaux hydroaériques à l’ASP. Elle simule parfaitement une urgence chirurgicale et est souvent responsable d’une laparotomie inutile. Elle disparaît en 1 à 3 jours. Crises douloureuses thoraciques (40 %) et articulaires (30 %) évoluent sur le même mode. Diagnostic : anamnèse, antécédents familiaux, maintenant recherche d’un terrain génétique, et surtout réponse à la colchicine, qui suspend la survenue des accès ; Le traitement fait appel à la colchicine et aux antipyrétiques. 14 4. Les souffrances musculaires a. Les acidoses Quelle que soit la cause, métabolique ou respiratoire, l’acidose s’accompagne de signes de souffrance musculaire réalisant un tableau de myalgies diffuses. La palpation des masses musculaires est douloureuse et peut concerner la région abdominale, ce qui risque de faire évoquer une pathologie abdominale autonome. Lors de l’acidocétose diabétique, des vomissements profus sont présents, ce qui peut encore plus faire égarer le diagnostic. Deux signes importants : la diffusion des douleurs aux membres et au thorax La sévérité de l’acidose. On estime que l’acidose métabolique peut déclencher des douleurs lorsque la réserve alcaline est au-dessous de 10 mEq/l. de même l’hypoxie doit être inférieure à 50 mmHg de PaO2. La correction de l’acidose est le geste thérapeutique le plus urgent, la rétrocession complète des douleurs prouvant alors leur étiologie. Si elles persistent, on réexaminera le malade pour rechercher une pathologie sous-jacente. b Les rhabdomyolyses aiguës non traumatiques D’étiologie variée : après effort musculaire intense, au cours d’une myosite virale ou parasitaire (coxsackie, trichine), intoxication médicamenteuse ou toxique. Les facteurs favorisants sont l’hypokaliémie, la présence d’une maladie musculaire préexistante, une drépanocytose. Le tableau est celui de douleurs diffuses des muscles et de la sangle abdominale. Biologiquement, il existe un syndrome de myolyse avec élévation de la CK, TGO, LDH. Le risque principal est celui d’une atteinte rénale par tubulopathie aiguë, d’évolution en général favorable sous hydratation IV. 5. Les hypertriglycéridémies On distingue deux tableaux 15 - la pancréatite aiguë : on admet que le risque est important pour les hypertriglycéridémies au-delà de 10 g/l. Diagnostic : tableau de pancréatite aiguë typique, sérum lactescent, xanthomatose éruptive. - Le syndrome de Zieve : chez l’alcoolique chronique, il associe stéatose hépatique aiguë avec ictère, anémie hémolytique, fièvre et hypertriglycéridémie majeure. Si le sevrage est obtenu, l’évolution est favorable. Bibliographie : Rousset H. et Clavreul G. - Douleurs abdominales de diagnostic difficile, in Diagnostics difficiles en Médecine Interne, sous la direction de Rousset H. et Vital-Durand D, Maloine éditeur, 1995 16 Gastrointestinales Crise ulcéreuse Gastrite aiguë Gastroplégie Gastro-entérite Ectasie colique Adénolymphite mésentérique Colite amibienne Maladie de Crohn Ascaridiose Anisakiase Oxyurose Colite bilharzienne Colite pseudomembraneuse Hématome intramural AFFECTIONS ABDOMINALES Hépatobiliaires Vasculaires Péritonéales Gynécologiques Rétropéritonéales et pancréatiques Colique Ischémie Périhépatite Syndrome Colique hépatique mésentérique aiguë Pancréatite aiguë Hépatite aiguë Péritonite Pyléphlébite virale, tuberculeuse médicamenteuse, alcoolique Amibiase Abdomen préhépatique ascitique Cancer du foie Stéatose aiguë Foie cardiaque Budd-Chiari prémenstruel Endométriose Infection annexielle Torsion annexielle Grossesse extra-utérine néphrétique Bilharziose urinaire Pyélonéphrite Hydronéphrose Cancer du rein Infarctus rénal Thrombose de veine rénale Hématome rétropéritonéal Anévrysme aortique compliqué (compression, fissuration) AFFECTIONS EXTRA-ABDOMINALES Cardio-vasculaires Pleuro-pulmonaires Pariétales Syndromes radiculaires Infarctus du myocarde Pleurésie Hématome des grands Traumatisme Dissection aortique Pneumonie droits Lésions vertébrales Péricardite Syndrome de Cyriax Zona (pré-éruptif) Souffrance musculaire pariétale 17 Toxiques et infectieuses Salmonellose Shigellose Choléra Toxi-infection alimentaire staphylo. Paludisme de primo-invasion Saturnisme Intoxication au mercure, thallium, arsenic AFFECTIONS GÉNÉRALES Métaboliques et Hématologiques Neurologiques Collagénoses endocriniennes et vascularites Porphyries hépatiques Insuffisance surrénale Œdème angioneurotique Hyperlipémie Acidocétose diabétique Hémochromatose Hypercalcémie Hypokaliémie Hypoglycémie Acidose et hypoxie Syndrome néphrotique Phéochromocytome Maladie périodique Crise Tabès hémolytique Épilepsie digestive Drépanocytose MarchiafavaMicheli Hypertension intracrânienne Atteinte médullaire aiguë Périartérite noueuse Purpura rhumatoïde Forte participation psychogène Troubles fonctionnels digestifs ou «intestin irritable » Lupus érythémateux disséminé Cryoglobulinémie Polyarthrite rhumatoïde Maladie d’Osler 18