Le souvenir des enfants de troupe conservé par l`école de
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Le souvenir des enfants de troupe conservé par l`école de
Le souvenir des enfants de troupe conservé par l'école de gendarmerie de Tulle. Par décision n°33741 GEND/OE/SDOE en date du 12 avril 2012, l'écusson « École de Formation des Gendarmes Adjoints » est déclassé. Dernière école de gendarmerie à arborer cet écusson caractéristique, Tulle est l’héritière d'une longue tradition dans la formation des jeunes militaires. C'est en effet dans cette ville de garnison, qu'ont été formés des milliers de gendarmes auxiliaires, rebaptisés gendarmes adjoints volontaires avec la fin de la conscription. Plus largement, la préfecture de la Corrèze peut s'enorgueillir d'avoir accueilli des générations d'enfants de troupes. Le 6/12/1984, le CIGA (Centre d'Instruction des Gendarmes Adjoints) de Tulle est officiellement inauguré. Il prend ses quartiers, en août 1983 à la caserne MARBOT, haut lieu de formation des enfants de troupe, et qui deviendra, à partir de 1991, l'actuel siège du Conseil Général de la Corrèze. Une soixantaine d'années plus tôt, le 1er octobre 1924, l'École Militaire Préparatoire Technique de Tulle (EMPT) avait été créé. Plus précisément, il s'agissait du transfert de l'école de Montreuil-surMer qui avait été créé en 1886 en même temps que 5 autres écoles (Rambouillet, Autun, SaintHyppolite-du-Fort, Les Andélys et Billom). Par cette loi du 19 juillet 1884 (JO du 22 juillet 1884), furent donc crées 6 écoles militaires préparatoires, supprimant dans les textes, et non dans les esprits, le terme d'enfants de troupes. L'appellation au cours des siècles évoluera, de celle d'enfant de troupe, à celle aujourd'hui de « Lycées de la Défense » (Décret n° 2006-246 du 1er mars 2006), en passant par celle d'Ecole Militaire Préparatoire Technique. Si les appellations ont pu varier au cours des siècles, l’esprit, lui, est resté le même. ---------------------------------------------------------------------------------------Mais revenons sur l'historique de cette institution : En France, durant le Moyen-Age, et une grande partie de l'Ancien Régime, la situation des familles des soldats est plutôt lamentable. Obligées de suivre le père dans ses campagnes, on trouve ces pauvres familles entassées pêle-mêle dans les charrettes qui suivaient la troupe. Un enfant de troupe désignait à la base un enfant dont le père était soldat ou sous-officier (appelé bas-officier à l'époque) et qui suivait la troupe, en compagnie de sa famille. Contrairement aux enfants d'officiers qui avaient des écoles pour les former au métier des armes, ces enfants de troupe n'avaient aucun moyen d'avoir de formation militaire autre que celui de s'engager en tant que soldat. La véritable naissance de l'institution des Enfants de Troupe, débute le 1er mai 1766, quand le duc de Choiseul, alors ministre de Louis XV, propose au roi, pour réorganiser l'armée royale après la guerre de Sept Ans, de signer une ordonnance stipulant que les armées prendraient désormais quelques dispositions en faveur des fils de soldats et de « bas-officiers », dont le sort avait été jusqu’alors négligé. Acte de naissance de la future institution des enfants de troupe, l'ordonnance de 1766 en consacre simultanément trois des caractéristiques : –L'origine du recrutement, parmi les couches les plus modestes de la société militaire. –Une aide financière directe, en l'occurrence une solde. –L'obligation d'engagement à terme, pour une durée minimale de huit ans, ramenée à 5 ans à la fin du XIXème siècle, contrepartie de la gratuité de l'entretien et, par la suite, de la formation de l'enfant. Si cette ordonnance de Choisel peut être considérée comme l'acte de naissance, c'est Bonaparte, Premier Consul, qui consacre, en 1800, cette disposition en officialisant l’appellation « Enfant de Troupe ». L'image d'Épinal, encore présente dans nos esprits, est née. En échange de servir la troupe comme trompette ou tambour, les enfants de troupes pourront suivre une instruction militaire. Mais il faudra attendre la loi du 19 juillet 1884, pour que les enfants de troupe « […] reçoivent, aux frais de l'Etat, une instruction et une éducation qui les mettent à même de servir utilement leur pays dans l'armée ». A cet effet, 6 écoles sont crées afin d'accueillir la formation de ces enfants de troupe, dont celle de Montreuil-sur-Mer en 1886, qui sera transférée en 1924 à Tulle. En ce début du XXème siècle, le chef-lieu de la Corrèze, connait l'implantation de nombreux sites militaires. Pas moins de 4 casernes (La caserne du Champ de Mars, La caserne de la Botte, La caserne des Récollets et la Caserne Marbot), sont occupées successivement par le 80ème Régiment de Ligne (RL), puis le 100ème Régiment d'Infanterie (RI). Dissout en 1920, le 100ème Régiment d'Infanterie laisse place à l'École Militaire Préparatoire Technique (EMPT). Au lendemain de la guerre de 1914-1918, à la suite du développement considérable du machinisme dans l'armée, après le rôle déterminant dans la victoire jouée par les chars de combat, l'artillerie et les transmissions, il apparaît opportun de former un personnel spécialisé pour la conduite et l'entretien de ces matériels nouveaux. On songe donc à utiliser les ressources offertes par les écoles militaires préparatoires crées en 1886, dont les élèves doivent contracter un engagement à long terme dès l'âge de 18 ans. A cet effet, dès 1920, une section d'enseignement professionnel est créé pour les électriciens à Montreuil-sur-Mer. Cependant devant l'exiguïté des locaux de cette école, on décide de transférer cette école à Tulle. Cette ville est choisie, en raison non seulement de la vacance de ses quatre casernes ayant abrité le 100ème Régiment d'Infanterie, mais également de la manufacture d'armes qui doit faciliter la mise sur pied et le développement de cette future école. Après la seconde guerre mondiale, l'EMPT de Tulle dispense à la fois, un enseignement général, et un enseignement technique à environ 800 élèves. Les deux écoles de Tulle et du Mans (crée en octobre 1947), fournissent à l'armée, par la voie des grandes écoles militaires, des officiers, qui, même s'ils ne font pas carrière de technicien, sont tout de même des éléments particulièrement réceptifs à la technique, possédant d'utiles connaissances théoriques et pratiques en mécanique, électricité et technologie. Mais à Tulle, la répartition dans quatre casernes différentes, nettement séparés à travers la ville, engendre de nombreux problèmes. Les besoins de l'armée évoluant également, avec les réductions du format de l'armée de terre, les origines du recrutement des sous-officiers spécialistes également. A l'été 1967, l'EMPT de Tulle est dissoute. --------------------------------------------------------------------Sur la ville de Tulle, deux sites nous rappellent ce glorieux passé : - la caserne MARBOT, qui deviendra, à partir de 1991, l'actuel siège du Conseil Général de la Corrèze. Construit sur un éperon rocheux dominant le cœur de Tulle, complété par une chapelle, ce bâtiment, tour à tour séminaire, prison pour femmes à la Révolution, puis caserne, fut le décor du célèbre roman d'Yves Gibeau « Allons Z'Enfants », publié aux éditions Calmann-Lévy en 1952, dont Yves Boisset tira un film bouleversant en 1981 avec Jean Carmet. Dans ce roman, un jeune homme, fils d'adjudant de carrière, est forcé par son père d'entrer dans une école militaire. Profondément antimilitariste, il subit toutes les brimades de ses supérieurs. Attiré par la littérature et par le cinéma, il sera rattrapé par les débuts de la deuxième guerre mondiale..... Ce remarquable site accueillera l'EMPT jusqu'en 1967, date à laquelle lui succède dans ses murs une annexe de l'École d'Enseignement Technique de l'Armée de Terre (l'EETAT), école de formation de sous-officiers dont la portion centrale est basée à Issoire (Puy-de-Dôme). C'est en 1983 que le centre d'instruction des gendarmes auxiliaires (CIGA) s'installe au sein de la caserne Marbot. Deux compagnies sont ouvertes en août. C'est à la suite d'une procédure d'échanges compensées en 1989 et 1990 que cette caserne est achetée par le conseil général de la Corrèze qui restructure et agrandit les bâtiments pour s'y installer en 1991 avec la grande partie de ses services. –La caserne « La Bachellerie » De 1942 à 1967, une dizaine d'hectares situés sur les hauteurs de la ville, au lieu-dit « la Bachellerie », est utilisé par l'EMPT. Ce site sera par la suite occupé par l'EETAT qui deviendra l'Ecole Nationale Technique Annexe des Sous-officiers d'Active, et c'est de 1971 à 1975 que seront construits la majorité des bâtiments qui abritent l'actuelle école de gendarmerie. En 1983, l'armée de terre cède le site à la gendarmerie. C'est sur ce site qu'évoluent actuellement les 9 compagnies de l'école de gendarmerie. La salle d'honneur de l'école de gendarmerie garde le souvenir du drapeau de l'EMPT : A sa création en 1924, l'école technique de Tulle, reçoit en garde le drapeau de l'EMP de Montreuil-sur-Mer et reprend ainsi les traditions de cette école. En 1967, l'ensemble des traditions de Montreuil et de Tulle est repris par l'école du Mans, et ce jusqu'à sa fermeture en 1985. A l'heure actuelle, l'ensemble des drapeaux des écoles dissoutes d'enfants de troupe sont conservés au Musée d'Autun dans une salle qui leur est consacrée, sous la statue du célèbre enfant de troupe Pierre Bayle. Mais le 17 mai 1992, lors du congrès annuel des anciens enfants de troupe, une copie du drapeau de l'EMPT est confié, en dépôt, au Colonel, commandant le CIGA. Depuis ce jour, ce drapeau trouve sa place au milieu de la salle de tradition de l'école de gendarmerie de Tulle. Notre école, peut s'enorgueillir de conserver ce drapeau salué par des générations de jeunes hommes, et où sont épinglées les décorations prestigieuses et glorieuses : –La Croix de la Légion d'honneur. –La médaille de la Résistance avec rosette. –La Croix de guerre 39-45. –La Croix de guerre des TOE avec palme. Veillant sur le drapeau de l'EMPT, une plaque à la mémoire de Martial BRIGOULEIX. Ancien professeur de l'EMPT de Tulle, ce haut personnage de la résistance locale a été fusillé en 1943 au Mont Valérien par les Allemands. Aux jeunes stagiaires de l'Ecole de Tulle, comment ne pas les inviter à s'imprégner, à se nourrir de l'exemple des anciens enfants de troupe qui ont marqués une page de l'histoire de Tulle. Que les valeurs d'honneur, de respect de la parole donnée, de conception aigüe du devoir, de rigueur morale, de sens de la discipline et du goût de l'effort, portés par des générations d'enfant de troupe, puissent transpirer aux futures générations qui évoluent dans les mêmes infrastructures.