Hospitalisation à la demande d`un tiers et hospitalisation d`office.

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Hospitalisation à la demande d`un tiers et hospitalisation d`office.
Item n° 9 : Hospitalisation à la demande d'un tiers et hospitalisation d'office.
Module 1 : Apprentissage de l'exercice médical
Sous module : Médecine légale, éthique et droit de la santé
Objectifs : - Argumenter les indications, les modalités d'application et les conséquences de ces procédures.
Auteur : Florent Trapé
Dernière mise à jour : septembre 2001
L'hospitalisation sans consentement
Section1 : En médecine et chirurgie
Elle n’a pas lieu d’être, le consentement éclairé du patient devant toujours être recherché et obtenu par le
praticien avant l’ hospitalisation.
Les seules exceptions à cette règle sont :
- Les cas d’urgence ou le pronostic vital est en jeu et ou le consentement ne peut être donné par le
patient. Il conviendra cependant dès la reprise de conscience de recueillir le consentement libre et
éclairé de son patient.
- En cas d’épidémie ou de danger imminent de santé publique, le préfet peut demander l’isolement
d’un ou plusieurs malades en milieu hospitalier selon l’article 17 du Code de santé Publique.
A la frontière avec la psychiatrie, se situent les patients présentant un alcoolisme ou une toxicomanie
imposant des mesures d’hospitalisation :
- Isolement et désintoxication des alcooliques dangereux dans des centres de rééducation
spécialisés selon la loi du 15 avril 1954 et des articles L. 3311-1 à L. 3311-4 du Code de santé
Publique.
- Régime de l’injonction thérapeutique concernant les toxicomanes inculpés pour délit d’usage illicite
de stupéfiants selon la loi du 31 décembre 1970 et le décret du 20 juillet 1977. le juge d’instruction
désigne alors un établissement spécialisé si l’hospitalisation est nécessaire.
Section2 : En psychiatrie
Les modalités d’hospitalisation en milieu psychiatrique datent de la loi du 30 juin 1838 modifiée par la loi
du 27 juin 1990 :
1. Historique :
1.1Loi du 30 juin 1838 :
Elle fut promulguée par Louis Philippe, roi des Français et prévoyait 2 modalités d’internement :
- Le placement volontaire qui s’appuyait sur l’entourage du malade mais ne tenait pas compte se son avis
propre.
- Le placement d’office décidé par les autorités administratives et qui ne tenait compte ni de l’avis du
patient ni de son entourage.
Cette loi obligeait également les départements à mettre en place des établissements spécialisés pour ces
patients : « les établissements d’aliénés ».
Elle fut modifiée sur la forme plus que sur le fond, l’accent étant mis sur les droits de l’Homme et sur le
maintien des libertés individuelles.
1.2 Loi du 27 juin 1990 :
C’est elle qui régit actuellement les hospitalisations en milieu psychiatrique.
Elle sépare les hospitalisations en 3 modes :
- Hospitalisation libre
- Hospitalisation sur demande d’un tiers
- Hospitalisation d’office
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Nous traiterons les hospitalisations sans le consentement ou hospitalisations sous contrainte (terme qui
remplace l’internement) que sont l’hospitalisation sur demande d’un tiers et l’hospitalisation d’office.
2 Hospitalisation sur Demande d'un Tiers ( H.D.T. ) :
2.1 Indications :
Elle concerne un malade dont les troubles mentaux rendent irrecevable son consentement à
l'hospitalisation en milieu psychiatrique. Or son état de santé impose médicalement cette hospitalisation
pour des soins immédiats avec surveillance constante en milieu hospitalier.
Elle se base sur les articles L. 3212-1 à L. 3212-12 du code de santé publique.
2.2 Documents nécessaires :
Trois pièces sont nécessaires au dossier :
- Demande d'admission
- Premier certificat médical
- Second certificat médical
2.2.1 Demande d'admission :
- Rédigée de manière manuscrite et signée par la personne qui la formule.
- Comportant les Noms, prénoms, professions, âges et domiciles de la personne qui demande
l'hospitalisation et de la personne à hospitaliser, et pour finir l'indication de la nature des relations qui
existent entre eux, et s'il y a lieu , de leur degré de parenté.
- Toute personne majeure peut signer cette demande à l'exclusion des personnels soignants de
l'établissement d'accueil.
- Vérification de l’identité du demandeur et du patient par le délégué administratif de l’établissement
d’accueil.
2.2.2 Le Premier certificat médical :
- Qui ?
Établi obligatoirement par un médecin professionnellement extérieur à l'établissement d'accueil, tout
docteur en médecine est habilité à le rédiger : médecins libéral, hospitalier, médecins de garde ou en
remplacement.
Les restrictions :
- ne sont pas habilitées les internes et faisant fonction, assistants et attachés à titre
étranger.
- Le médecin rédacteur ne peut être parent ou allié jusqu'au 4° degré avec le patient, la
tierce personne demandant le placement, le directeur de l'établissement, le second médecin certificateur.
-Comment ?
Sur papier libre ou ordonnance, manuscrit ou pré imprimé (avec signature manuscrite).
Nom, prénom et fonction du signataire, ainsi que l'identité de la personne à hospitaliser, date et
signature.
Ce rapport doit être circonstancié et descriptif, constatant l'état mental du patient, les faits et les signes
relevés, mais doit éviter tout diagnostic.
Les conclusions de ce certificat doivent être motivées par les constatations effectuées dont voici un
modèle:
" Attestant l'impossibilité pour M.X de consentir à son hospitalisation en raison de ses troubles mentaux
actuels, et ayant constaté que son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante
en établissement hospitalier habilité au titre de l'article L.3222-1 du Code de la Santé Publique ( CSP), je
conclus que les conditions médicales prévues par l'article L.3212-1 CSP sont remplies pour
l'hospitalisation de M.X, sans son consentement, à la demande d'un tiers, en établissement habilité au
titre de l'article L.3222-1 CSP, conformément aux dispositions de la loi n° 90-527 du 27 juin 1990".
- Validité : ce certificat est recevable pendant 2 semaine à partir de la date de ce dernier.
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2.2.3 Le Second certificat médical :
-Qui ?
Répond aux même autorisations et restrictions que le premier certificat, mais un médecin exerçant
dans l'établissement d'accueil peut le rédiger.
-Comment ?
Obéit aux même règles de rédaction que le premier certificat. Toutefois, le deuxième médecin n’est lié en
aucune manière aux conclusions du premier certificat, il demeure indépendant et ses conclusions
peuvent différer.
-Validité :
pendant 2 semaines à partir de la date du certificat.
Il est à noter que se second certificat est TOUJOURS indispensable ( excepté en cas de péril imminent )
et doit arriver aux mêmes conclusions que le premier, sans quoi, le directeur de l'établissement ne pourra
pas prononcer l'admission en HDT.
2.3 La situation de péril imminent :
A titre exceptionnel et en cas de péril imminent pour la santé du malade, dûment constaté et notifié par le
médecin rédacteur, un seul certificat peut suffire pour l'admission, pouvant donc être établi par un
médecin de l'établissement d'accueil.
Dans ce cas, un modèle des conclusions motivées est :
"J'atteste l'impossibilité pour M.X de consentir à son hospitalisation en raison de ses troubles mentaux
actuels, et j'ai constaté que son état impose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante
en établissement hospitalier habilité au titre de l'article L.3222-1 du Code de la Santé Publique ( CSP).
De plus, en raison de l'existence d'un péril imminent pour la santé de ce malade, je précise que, à titre
exceptionnel, les modalités de l'articles L.3222-4 CSP s'appliquent.
Je conclus que les conditions médicales prévues par l'article L.3212-1 et L.3212-3 CSP sont remplies
pour l'hospitalisation de M.X, sans son consentement, à la demande d'un tiers, en établissement habilité
au titre de l'article L.3222-1 CSP, conformément aux dispositions de la loi n° 90-527 du 27 juin 1990".
2.4 Déroulement de l'H.D.T. :
Une fois admis dans l'établissement d'accueil, de nombreux contrôles sont effectués, certificats à l'appui.
- Dans les 24 heures suivant l'admission, rédaction d'un certificat qui constate l'état mental de la
personne, et qui confirme ou infirme la nécessité du maintient de l'HDT.
Ce certificat doit être rédigé par un psychiatre, ayant un lien juridique avec l'établissement d'accueil, et
devant être différent du signataire de l'admission.
Il devra mentionner comme conclusion motivée :
" Je conclus que l'examen de l'état mental de M.X confirme ( ou infirme ) la nécessité de maintenir
l'intéressé en HDT conformément aux dispositions de la loi n° 90-527 du 27 /06/90 ".
Les destinataires de ce certificat sont, par l'intermédiaire du directeur de l'établissement, le préfet et la
Commission Départementale des Hospitalisations Psychiatriques.
ème
et le
- Des contrôles du même type, assortis de certificats équivalents, seront effectués entre le 13
ème
ème
15
jour d’hospitalisation, puis tous les mois aux dates anniversaires successives du 15
jour
d’hospitalisation.
2.5 Les modalités de sortie :
2.5.1 A la demande d’un médecin :
Il s’agit d’un certificat circonstancié mentionnant l’évolution ou la disparition des troubles qui avaient
justifié l’hospitalisation.
Il doit être rédigé par un médecin psychiatre de l’établissement d’accueil selon l’exemple suivant :
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« Je conclus que l’évolution (ou la disparition) des troubles ayant justifié l’hospitalisation permet d’affirmer
que les conditions de l’HDT ne sont plus réunies.
En conséquences, il doit être mis fin immédiatement à la mesure d’HDT prise en application de l’article L.
3222-1 CSP ou L. 3212-3 CSP, conformément aux dispositions prévues à l’article L. 3212-8 CSP et à
l’ensemble des dispositions de la loi n° 90-527 du 27 juin 1990. »
C’est le directeur de l’établissement qui informera dans les 24 heures le préfet, la CDHP, le procureur de
la république et le tiers.
2.5.2 A la demande de la famille et des tiers :
La levée d’hospitalisation peut être requise dans l’ordre suivant :
-Le curateur
- Le conjoint ou le concubin
- Les ascendants
- Les descendants majeurs
ème
- Parent jusqu’au 6
degré inclus
- Le tiers
- Personne autorisée par le conseil de famille
- La CDHP
L’ordre doit être respecté et en cas d’opposition notifiée au directeur d’établissement, c’est le conseil de
famille qui statue dans le mois.
Si le médecin est d’un avis contraire et considère que l’état du malade peut compromettre la sûreté des
personnes ou l’ordre public, il en informe le préfet qui peut mettre un sursis à la sortie pendant 15 jours,
avec ou non placement en HO à la suite ou demander une mesure d’HO immédiate.
2.5.3 La voie judiciaire :
Le malade ou toute personne susceptible d’agir dans son intérêt peuvent saisir le président du tribunal de
grande instance du lieu d’implantation de l’établissement sanitaire lequel peut ordonner la sortie
immédiate du patient.
2.5.4 La Commission Départementale des Hospitalisation Psychiatriques :
Elle reçoit les réclamations des hospitalisés et peut saisir le président du TGI, le préfet ou le procureur de
la république.
2.5.5 Le préfet :
Lors de sa visite semestrielle des établissements, il est habilité à recevoir les plaintes et à lever une HDT.
2.5.6 Sur plainte du patient lors d’une visite légale :
La CDHP effectue au minimum 2 visites annuelles, 6 autres visites semestrielles sont prévues par la loi
(préfet, président du TGI, juge du TI, maire de la commune, procureur de la république).
Au cours de ces visites, les patients peuvent formuler leurs doléances.
3 Hospitalisation d'Office :
3.1 Indications :
C’est une mesure d’hospitalisation qui concerne un malade dont les troubles mentaux compromettent
l'ordre public ou la sûreté des personnes.
Elle se base sur les articles L. 3213-1 à L. 3213-10 du CSP.
3.2 Documents nécessaires :
Deux procédures sont accessibles suivant l'urgence de la situation.
3.2.1 La procédure habituelle :
* La pièce nécessaire : LE CERTIFICAT MEDICAL
Un certificat médical circonstancié doit être rédigé.
Tout docteur en médecine y est habilité : médecins libéral, hospitalier, médecins de garde ou en
remplacement, avec comme seule restriction un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil.
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Il obéit aux même règles de rédaction que les autres certificats et il pourra comporter comme conclusion
motivée :
" Tous les éléments sus-décrits sont liés à une affection mentale dont les manifestations compromettent
l'ordre public et/ou la sûreté des personnes.
En conséquence, je conclus que M.X doit être hospitalisé d'office dans un établissement hospitalier
habilité au titre de l'article L.3222-1 CSP conformément aux dispositions de la loi n° 90-527 du 27 juin
1990 ".
* La pièce exécutoire : L'ARRETE PREFECTORAL
Le préfet prononcera l'arrêté au vu du certificat médical s'il estime que la personne concernée présente
des troubles mentaux compromettant l'ordre public ou la sûreté des personnes.
Son arrêté devra être motivé et énoncer avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation
nécessaire ainsi que les pièces sur lesquelles il s'appuie
3.2.2 La procédure de danger imminent pour la sûreté des personnes :
Dans ce cas le certificat médical est souhaitable , mais n'est plus exigé.
Peuvent suffire :
- un avis médical écrit pour les cas où le patient n’est pas accessible à un examen
médical (forcené reclus à son domicile), cette mesure provisoire est valable 48 heures,
- la notoriété publique à défaut d'un avis médical,
- un arrêté provisoire signé par un maire ou un commissaire de police à Paris qui est
valable 48 heures, le préfet pourrait dans cette période l'annuler à tout moment.
3.3 Déroulement de l'H.O.:
- Dans les 24 heures suivant l’admission, certificat d'un psychiatre de l'établissement d'accueil qui
confirme ou infirme le maintient de l'H.O. Ce dernier répond aux même règles de rédaction que l'H.D.T.,
avec la même conclusion motivée en remplaçant le terme de H.D.T par H.O.
er
ème
jour d’hospitalisation, un certificat médical circonstancié dit de quinzaine sera
- Entre le 1 et le 15
rédigé par un psychiatre de l’établissement d’accueil selon les modalités suivantes :
« J’atteste que les observations médicales actuelles concernant M. X. confirment (ou infirment) les
observations contenues dans le précédent certificat de 24 heures.
Cet examen médical permet de conclure que les caractéristiques de l’évolution (ou la disparition) des
troubles mentaux présentés justifient (ou ne justifient pas) le maintien en HO, conformément aux
dispositions de la loi n° 90-527 du 27 juin 1990. »
ème
ème
- Entre le 26
et 31
jour d’hospitalisation, un nouveau certificat médical circonstancié doit être rédigé
par un psychiatre de l’établissement d’accueil et ce tous les mois de la date anniversaire de
ème
ème
ème
l’hospitalisation jusqu’au 4
mois puis au 10 , 16
mois d’hospitalisation puis tous les 6 mois.
3.4 La levée d'H.O. :
A l’occasion d’un certificat de quinzaine ou mensuel : établi par un psychiatre de l’établissement
d’accueil.
Par certification d’un psychiatre de l’établissement
Sur demande du préfet, de la CDHP, par voie judiciaire, sur plainte du patient :
Selon les mêmes modalités que pour l’HDT.
Le certificat médical sera rédigé par un psychiatre appartenant ou non à l’établissement d’accueil.
Après saisie du préfet du département ou du préfet de police à Paris, arrêté préfectoral de levée d’HO :
L’application de la levée d’HO est immédiate.
A noter quelques particularités :
- possibilité de transformations d'H.D.T. en H.O, et inversement,
- sortie d'essai,
- possibilité de transfert dans un autre établissement d'accueil.
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4 Cas particuliers :
4.1 Le patient mineur :
Il convient de se référer à l’autorité désignée légalement comme responsable du mineur.
La procédure d’HDT n’est pas prévue par la loi.
L’hospitalisation d’office doit être réservée aux cas exceptionnels mais est prévue par la loi du 27 juin
1990.
4.2 L’irresponsabilité pénale :
Les malades ayant bénéficié de l’article 122-1 premier alinéa du nouveau code pénal ou de l’ancien
article 64 sont déclarés irresponsables.
Le préfet est saisi par l’autorité judiciaire, il prend connaissance d’un certificat médical rédigé par un
médecin n’exerçant pas dans l’établissement d’accueil et attestant que l’état du patient compromet l’ordre
public ou la sûreté des personnes.
La coordination entre autorités judiciaires et administratives permet alors au préfet d’estimer la nécessité
d’une procédure d’HO.
Il s’agit d’une HO classique dans un établissement psychiatrique, l’orientation en Unité pour malades
difficiles n’étant pas prévue par la loi.
La procédure de levée d’HO sera spécifique et nécessite 2 décisions médicales séparées et
concordantes de 2 psychiatres n’appartenant pas à l’établissement d’accueil et inscrits sur une liste
établie par le procureur de la république.
4.3. Le patient détenu :
Un patient détenu peut au même titre que la population libre bénéficier d’une hospitalisation en milieu
psychiatrique et ce de manière volontaire dans les services médico-psychologiques régionaux des
maisons d’arrêt ou des centres de détention ou de manière contrainte dans les hôpitaux psychiatriques.
Cette hospitalisation sous contrainte est prévue par la loi uniquement sous la forme de l’HO judiciaire
(l’HDT ne peut être appliquée) d’après l’article D. 398 du code pénal.
Un médecin psychiatre ou non n’appartenant pas à l’établissement d’accueil procède alors à l’examen de
la personne concernée dans les locaux pénitentiaires et rédige son certificat descriptif et circonstancié
confirmant ou infirmant la nécessité d’une hospitalisation sous contrainte.
Les suites de l’hospitalisation sont les mêmes que pour les HO courantes avec les certificats de 24
heures, de quinzaine et mensuels.
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