chapitre 4

Transcription

chapitre 4
1.
LE FRACTIONNEMENT DE REMUNERATION : ATTENTION AUX ASPECTS
FISCAUX ET SOCIAUX !
Institut des Experts-comptables et des Conseils fiscaux
5 décembre 2008
Nicolas de Limbourg / Sara Ribeiro da Silva
PricewaterhouseCoopers
INTRODUCTION
Etant donné le caractère international des échanges commerciaux, les différents pays industrialisés
se doivent de faciliter la mobilité des travailleurs. Les différences existant entre les législations
fiscales internes des divers partenaires économiques peuvent constituer un frein à cette mobilité.
De nombreux pays ont conclu de manière bilatérale des conventions préventives de la double
imposition. De manière individuelle, certains pays ont développé des systèmes avantageux pour les
travailleurs étrangers afin de favoriser l’implémentation d’entreprises multinationales.
Cet exposé est consacré à la description et à l’étude des dispositions existantes facilitant
l’expatriation des cadres. Il analysera tout d’abord les critères d’imposition en Belgique selon le
droit fiscal belge. Ensuite, les dispositions relatives aux travailleurs salariés, contenues dans les
conventions préventives de la double imposition conclues par la Belgique, seront décrites. Enfin, le
régime du fractionnement de la rémunération permettant de réduire la charge fiscale sera également
analysé.
2.
CHAPITRE 1
CRITERES D’IMPOSITION
I. INTRODUCTION
En Belgique, comme dans beaucoup de pays industrialisés, le droit interne prévoit une imposition
tant pour le sujet de droit fiscal que pour la matière imposable. Il s’agit respectivement du principe
de la territorialité de la résidence et du principe de la territorialité de la source.
La territorialité de la résidence prévoit pour les personnes physiques ou morales, qui résident en
Belgique, l’assujettissement à l’impôt sur le revenu mondial (revenu d’origine belge ou étrangère).
On parle dès lors d’assujettissement fiscal illimité.
La territorialité de la source prévoit l’imposition des revenus produits ou recueillis en Belgique par
des non-résidents. Il s’agit ici d’un assujettissement fiscal limité dans la mesure où l’Etat belge ne
peut imposer les revenus des non-résidents qui ne trouvent pas leur origine en Belgique.
II. RESIDENCE FISCALE
Le critère de résidence fiscale est prédominant, car il permet de déterminer si une personne est
soumise à l’impôt des personnes physiques sur son revenu mondial ou à l’impôt des non-résidents
sur ses revenus de source belge.
La notion de résidence fiscale est définie par le droit interne belge. Afin d’éviter qu’un individu ne
soit considéré comme résident fiscal de plusieurs pays, en application du droit interne de différents
pays, les conventions préventives de la double imposition, qui suivent généralement le modèle
préconisé par l’OCDE, définissent également la notion de résidence. Ces conventions conclues par
la Belgique prévalent sur le droit interne belge.
A. LE DROIT INTERNE BELGE
En droit fiscal belge, la notion de résidence se traduit par la notion d’ « habitant du Royaume » qui
implique l’assujettissement à l’impôt des personnes physiques.
Conformément à l’article 2, § 1er, 1°, du Code des impôts sur les revenus 1992 (« CIR 92 »), les
habitants du Royaume sont notamment les personnes physiques qui ont établi leur domicile ou le
siège de leur fortune en Belgique. Ces deux critères sont alternatifs et chacun d’eux peut être
considéré comme critère principal afin de déterminer la qualité d’habitant du Royaume.
1. Le domicile fiscal et le siège de la fortune
Le terme domicile contenu dans le CIR 92 ne correspond pas exactement à la notion du domicile
contenue dans le droit civil. Le domicile fiscal s’établit sur base de faits concrets en fonction des
circonstances. Ainsi, il s’agit au premier abord de l’endroit effectif où une personne physique vit et
3.
exerce son activité professionnelle. Cependant, ce critère n’est pas le seul à prendre en
considération puisque, comme l’énonce l’article 2 CIR 92, « l’établissement en Belgique du
domicile ou du siège de la fortune s’apprécie en fonction des éléments de fait ».
Il arrive en effet que le travail soit presté dans un autre pays que celui où se trouve le foyer familial
ou le centre des intérêts vitaux (telles que les relations sociales, les activités culturelles ou
politiques). Dans de telles circonstances, il convient évidemment de considérer l’ensemble des
différents critères. D’autres éléments tels que la durée du séjour ou la nationalité peuvent eux aussi
avoir une influence sur la détermination de la résidence fiscale sans pour autant avoir un rôle
décisif.
Le concept de siège de la fortune se définit comme le lieu d’où les occupations et le patrimoine
sont gérés. Le siège de la fortune n’est donc pas déterminé par le lieu où se situent les biens en
question, mais bien par l’endroit à partir duquel ils sont administrés.
2. Les présomptions légales
Le droit fiscal belge contient en outre deux présomptions légales permettant d’établir la qualité
d’habitant du Royaume.
La première présomption légale établit que pour les personnes mariées le domicile fiscal se situe à
l’endroit où le ménage est établi (art. 2, § 1er, 1°, CIR 92). Cette première présomption est
irréfragable.
Ce même article énonce par ailleurs que « sont présumés avoir établi en Belgique leur domicile ou
le siège de leur fortune, les personnes physiques qui sont inscrites au registre national des
personnes physiques ».
Cette deuxième présomption légale est réfragable, elle peut donc être renversée. Ainsi toute
personne qui, bien qu’inscrite au registre national des personnes physiques, conteste être un
habitant du Royaume peut démontrer que ni son domicile réel ni le siège de sa fortune ne sont
établis en Belgique. Dans le même ordre d’idée, l’Administration peut essayer de démontrer que le
domicile fiscal d’une personne physique est en Belgique, et ce bien que celle-ci ne soit pas inscrite
au registre national.
C. LE DROIT CONVENTIONNEL
Afin d’éviter une double imposition comme résident, les conventions préventives de la double
imposition prévoient en général quatre critères successifs en vue de déterminer le domicile fiscal
qui devra être pris en compte pour l’application des conventions :
–
–
–
le foyer d’habitation permanent ;
le centre des intérêts vitaux ;
le séjour habituel ;
4.
–
la nationalité.
La résidence fiscale doit d’abord être déterminée sur base du premier critère. Si la résidence ne
peut être établie sur base de ce critère, il faut alors appliquer successivement les autres critères.
1. Le foyer d’habitation permanent
Ce critère fait référence à l’endroit où le contribuable vit habituellement, éventuellement avec sa
femme et ses enfants.
2. Centre des intérêts vitaux
Ce critère renvoie au pays avec lequel les liens économiques et personnels sont les plus étroits. Ces
liens sont définis par un ensemble de faits (par exemple, les relations familiales ou sociales, les
loisirs, les activités culturelles et politiques, le siège des affaires, la principale source de revenus,
l’endroit d’où les biens sont administrés, etc.).
3. Le séjour habituel
Le pays où un individu séjourne habituellement sera déterminé en prenant en considération tous les
séjours dans les pays concernés. Il est donc fait référence aux moments passés dans le foyer
d’habitation, mais aussi aux autres séjours effectués dans le pays en question.
4. La nationalité
Lorsque les trois premiers critères ne permettent pas de déterminer la résidence fiscale d’un
individu, celle-ci se trouvera dans le pays dont il a la nationalité.
5. Concertation entre les autorités compétentes
Si les critères précités ne permettent pas de définir la résidence fiscale, les autorités fiscales
concernées sont tenues de se mettre d’accord et de déterminer la résidence fiscale du contribuable.
5.
CHAPITRE 2
COMMENT EVITER LA DOUBLE IMPOSITION ?
I. INTRODUCTION
L’application de la territorialité de la source et de la territorialité de la résidence entraîne une
double imposition s'il y a cumul entre :
–
–
–
le principe de résidence fiscale dans un pays et le principe de la source dans un autre pays ;
le principe de la résidence dans un pays et le même principe dans un autre pays ;
le principe de la source dans un pays et le même principe dans un autre pays.
Il y a donc double imposition lorsque deux pays imposent simultanément le même revenu dans le
chef d’un même contribuable (double imposition économique) ou à charge de contribuables
différents (double imposition juridique).
Afin d’éviter la double imposition, des mesures unilatérales ou bilatérales peuvent être prises par
les différents pays concernés. Les mesures unilatérales sont déterminées par chaque pays de
manière individuelle et peuvent être modifiées par celui-ci sans aucune convention avec ses
partenaires commerciaux. Il est question de mesures bilatérales lorsqu’une convention est établie
suite à un accord entre deux pays. Dans cette optique, l’OCDE a mis au point un modèle de
convention duquel celles établies par la Belgique s’inspirent très largement.
II. RESIDENTS BELGES TRAVAILLANT DANS UN PAYS AVEC LEQUEL LA
BELGIQUE A CONCLU UNE CONVENTION PREVENTIVE DE LA DOUBLE
IMPOSITION
A. PRINCIPE
Le droit fiscal conventionnel prévoit que le revenu du travail est imposé dans le pays où l’activité
professionnelle est exercée. Ainsi, un résident belge qui exerce une activité professionnelle dans un
autre pays pourra être imposé dans cet autre pays. D’autre part, les personnes physiques résidentes
de la Belgique sont assujetties à l’impôt sur leur revenu mondial, comme c’est le cas dans d’autres
pays. Un résident belge qui exerce une activité professionnelle dans un autre pays et qui en retire
des revenus professionnels sera donc imposé deux fois sur les mêmes revenus. Afin d’éviter une
double imposition, les conventions préventives de la double imposition prévoient que les revenus
professionnels sont imposés dans l’Etat où la prestation est exécutée.
En vertu de l’article 15 des modèles OCDE de conventions, le pouvoir d’imposition est dévolu à
l’Etat où l’activité professionnelle est exercée. Ainsi, si l’activité professionnelle d’un résident
belge est exercée dans un pays avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de la
double imposition, la Belgique est tenue, en tant qu’Etat de résidence, d’exempter les revenus
provenant de cette activité, qu’ils soient ou non imposés dans l’autre Etat. Toutefois, la Belgique
peut exiger que les revenus soient réellement imposés dans l’Etat où les prestations sont effectuées,
si cet Etat applique la méthode d’imputation. La Belgique a déjà fait usage de cette possibilité dans
6.
les conventions avec les Etats-Unis, le Japon, la Malaisie, la nouvelle convention avec les Pays-Bas
ainsi que dans les dernières conventions conclues par la Belgique.
L’exemption d’impôt accordée par la Belgique en tant qu’Etat de résidence n’est pas absolue. Les
revenus professionnels relatifs aux activités prestées à l’étranger, diminués des impôts étrangers et
des cotisations de sécurité sociale, sont pris en considération pour déterminer le taux d’impôt
applicable aux autres revenus du résident concerné (art. 155 CIR 92). Cette méthode d’exemption
est connue sous le nom d’exemption avec réserve de progressivité.
Afin d’appliquer l’exemption avec réserve de progressivité, il arrive en pratique que
l’Administration belge requière la preuve que les revenus étrangers ont été effectivement imposés à
l’étranger. Dans la mesure où le résident concerné et les personnes qui constituent son ménage
n’ont pas d’autres revenus imposables globalement, la réserve de progressivité n’a aucun impact.
B. EXCEPTIONS
Le principe selon lequel les revenus professionnels sont imposés dans le pays où l’activité
professionnelle est exercée connaît deux exceptions : les travailleurs frontaliers et la « règle des
183 jours ».
1. Travailleurs frontaliers
Ce régime, prévu au départ dans les conventions conclues par la Belgique avec certains pays
limitrophes, à savoir l’Allemagne, la France et les Pays-Bas, stipule que les revenus professionnels
des travailleurs qui habitent dans la zone frontalière d’un pays et travaillent dans la zone frontalière
de l’autre pays, sont imposés dans le pays de résidence. Afin de déterminer le lieu de travail, le lieu
de travail effectif doit être pris en considération et non le lieu où l’employeur est établi.
Le régime spécial des travailleurs frontaliers est un régime en voie de disparition puisqu’il a déjà
été supprimé dans la nouvelle convention préventive de la double imposition conclue entre la
Belgique et les Pays-Bas (applicable depuis le 1er janvier 2003). Ce régime frontalier a également
été supprimé avec l’Allemagne, et ce depuis le 1er janvier 2004. Seul reste dès lors applicable le
régime frontalier franco-belge.
Ce régime frontalier franco-belge connaît d’ailleurs une évolution récente car la France et la
Belgique ont signé le 22 janvier 2008 le nouveau protocole visant à abolir ce régime frontalier. Il
faut cependant noter que, jusqu’à ce jour, le nouveau protocole n’est pas encore entré en vigueur.
I. France (jusqu’à l’entrée en vigueur du nouveau protocole)
·
Travailleur frontalier et zone frontalière franco-belge
Un travailleur frontalier, quelle que soit sa nationalité, est un travailleur habitant dans la zone
frontalière d’un pays et exerçant sa profession dans la zone frontalière de l’autre pays tout en
retournant, en principe quotidiennement, dans son Etat de résidence. Il est dès lors important de
savoir ce que l’on entend par « zone frontalière ». La zone frontalière franco-belge est déterminée
en traçant une ligne imaginaire le long des deux côtés de la frontière commune à une distance de 20
km de la frontière. Les communes qui sont traversées par cette ligne imaginaire font partie de la
7.
zone frontalière. Sont par exemple concernées les communes de Lille et Valenciennes pour la zone
frontalière française et les communes de Tournai et Mons pour la zone frontalière belge.
·
Imposition de ces travailleurs frontaliers
Pour rappel, la convention préventive de la double imposition conclue entre la France et la
Belgique prévoit des dispositions particulières concernant les travailleurs frontaliers. En effet, il est
stipulé à l’article 11, § 2, c, de la convention que « les traitements, salaires et autres rémunérations
analogues reçus par un résident d'un Etat contractant qui exerce son activité dans la zone frontalière
de l'autre Etat contractant et qui a son foyer d'habitation permanent dans la zone frontalière du
premier Etat ne sont imposables que dans cet Etat ». Le régime des travailleurs frontaliers constitue
dès lors une dérogation au principe selon lequel la rémunération d’un travail est imposée dans
l’Etat d’exercice de l’activité. Ce régime prévoit dès lors que les revenus du travail frontalier ne
sont pas imposés dans le pays limitrophe où le travail est effectué mais dans l’État du domicile. En
ce qui concerne la zone frontalière franco-belge, il est également important de souligner que depuis
l’année de revenus 1999, ce régime est obligatoire (auparavant, il était optionnel).
·
Cas des travailleurs frontaliers belges travaillant en France
Conformément aux principes énoncés ci-avant, un travailleur résident, par exemple, à Arlon (zone
frontalière belge) et travaillant exclusivement à Valenciennes (zone frontalière française) sera
imposable en Belgique. La situation financière de ce travailleur frontalier belge n’est pas
particulièrement enviable puisque celui-ci paie ses impôts en Belgique (plus élevés qu’en France)
et ses cotisations de sécurité sociale en France (plus élevées qu’en Belgique). Ces travailleurs
frontaliers belges ont malgré tout droit à une indemnité, déterminée sur base du salaire mensuel
brut, à titre de compensation pour la perte de revenus subie.
·
Cas des travailleurs frontaliers français travaillant en Belgique
Un travailleur résident, par exemple, à Lille (zone frontalière française) et travaillant exclusivement
à Mons (zone frontalière belge) sera imposable en France. Par contre, si ce même travailleur exerce
une partie de son activité à Mons et l’autre partie à Bruxelles, en dehors de la zone frontalière
belge, la totalité de sa rémunération de source belge sera imposable en Belgique. Il est également
important de souligner que dans les deux cas de figure, ce travailleur sera soumis aux cotisations de
sécurité sociale en Belgique, cotisations moins élevées que les cotisations de sécurité sociale en
France. La situation financière d’un travailleur frontalier français est dès lors assez confortable
puisque celui-ci paie ses impôts en France (moins élevés qu’en Belgique) et ses cotisations de
sécurité sociale en Belgique (moins élevées qu’en France). Le salaire net proposé à ces travailleurs
est dès lors particulièrement compétitif.
·
Circulaire administrative (Circulaire n° Ci.R.9.F/554.009 (AFER 3/2004) dd. 14.01.2004)
Le 14 janvier 2004, l’Administration publia une nouvelle circulaire visant à actualiser la liste des
communes comprises dans les zones frontalières belge et française. Cette circulaire rappelle
également quelques principes d’application du régime.
– Pour ce qui concerne les intérimaires, la localisation de l’agence d’intérim dans la zone
frontalière n’est pas à elle seule suffisante pour que la condition relative au « lieu d’activité »
8.
puisse être considérée comme rencontrée. En effet, le travailleur intérimaire est mis à la
disposition du cocontractant de la société d’intérim et le lieu où l’activité est réellement exercée
peut être situé en dehors de la zone frontalière. Il convient dès lors de vérifier le lieu où
l’activité est réellement exercée. Un travailleur résidant à Valenciennes (zone frontalière
française), employé par une société d'intérim localisée à Arlon (zone frontalière belge) et qui
exerce son activité salariée à Liège (en dehors de la zone frontalière belge), ne peut dès lors
revendiquer le statut de travailleur frontalier, de sorte que ses rémunérations seront imposables
en Belgique.
– Pour ce qui concerne les professions « mobiles » (chauffeurs de taxi, représentants de
commerce, cheminots en trafic national, …), la circulaire recommande aux fonctionnaires d’être
particulièrement vigilants aux « sorties » hors de la zone frontalière, lesquelles entraînent la
perte du statut de travailleur frontalier. Il convient dès lors aux travailleurs frontaliers français
de bien respecter ces conditions afin de pouvoir bénéficier des avantages de ce régime.
– Cette circulaire prévoit enfin une extension de la zone frontalière française aux communes de
Strazeele et Cappelle-en-Pévèle. L’omission de ces deux communes résultait d’une erreur
administrative lors de l’établissement de la liste initiale. La liste mise à jour des communes
comprises dans les zones frontalières respectivement belge et française figure en annexe de cette
circulaire qui peut être consultée sur le site www.fisconet.fgov.be.
·
Règle des 45 jours ?
Il peut, par ailleurs, paraître assez étonnant qu'il ne soit pas fait référence dans cette circulaire à la
fameuse règle des 45 jours, règle qui traite de la problématique des travailleurs belges qui ont été
occupés plus de 45 jours par leurs employeurs français en dehors de la zone frontalière française.
S’il n'existe pas, à proprement parler, de « règle de 45 jours » officiellement convenue entre les
administrations belge et française, l’Administration belge considérait unilatéralement que si, au
cours d'une année déterminée, un travailleur belge occupé en France était effectivement mis au
travail plus de 45 jours en dehors de la zone frontalière de ce pays, il n'y avait pas lieu en principe
de soumettre ce travailleur au régime frontalier. Cette position fut confirmée dans une réponse à
une question parlementaire en 1998 (Question parlementaire n° 1460 du représentant Leterme en
date du 17.08.1998). Après avoir pris contact avec l’Administration belge, il apparaît cependant
que désormais, il n'y a plus lieu de se référer au contenu de la réponse à la question parlementaire
visée ci-dessus (et ce, même pour les résidents français travaillant dans la zone frontalière belge).
Pour rappel, en effet, un avenant à la convention franco-belge daté du 8 février 1999 (soit une date
postérieure à la question parlementaire susvisée) avait entre autres pour but essentiel de redéfinir le
régime frontalier. Selon l’Administration, à défaut pour les négociateurs d'avoir saisi l'opportunité
de cet avenant pour introduire une règle des « 45 jours », il convient d'en déduire que la volonté des
Etats n'était pas de prévoir une extension du régime frontalier. Dès lors, selon l’Administration, à
compter du 1er janvier 1999, date d'entrée en vigueur du volet « frontalier » de l'avenant (article 3,
2, a), le régime applicable aux revenus des travailleurs salariés est par conséquent de stricte
application.
II. France (à partir de l’entrée en vigueur du nouveau protocole)
.
Cas des travailleurs frontaliers belges travaillant en France
9.
Conformément au nouveau protocole signé le 22 janvier 2008, les travailleurs frontaliers belges
travaillant dans la zone frontière française seront taxés en France sur leur rémunération, et ce à
partir du 1er janvier 2007.
Cependant, à partir du 1er janvier 2009, ces travailleurs frontaliers seront toujours soumis aux
additionnels communaux en Belgique, et ce comme le sont les travailleurs belges travaillant en
Allemagne et aux Pays-Bas.
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Cas des travailleurs frontaliers français travaillant en Belgique
A partir du 1er janvier 2009 et pendant une période de 25 ans, les travailleurs frontaliers français,
travaillant dans la zone frontalière belge, continueront à être imposés en France sur leurs
rémunérations. Il en va de même pour les nouveaux travailleurs frontaliers recrutés jusqu’au 31
décembre 2009 selon le Premier ministre Verhofstadt.
La France versera une compensation pour couvrir le manque à gagner de la Belgique résultant de
l’application de cette disposition.
.
Règle des 30 jours
Dès l’entrée en vigueur du nouveau protocole, les travailleurs frontaliers français auront la
possibilité de travailler 30 jours maximum par année civile en dehors de la zone frontalière belge
sans perdre leur statut, mettant fin de cette façon aux questions relatives à la précédente « règle »
des 45 jours.
2. Règle des 183 jours
Cette règle, introduite par l’article 15 des modèles OCDE, prévoit que les rémunérations provenant
d’activités temporaires soient exemptées dans le pays où les activités sont exercées, mais soient
imposables dans l’Etat de résidence si les trois conditions suivantes sont simultanément remplies :
a) le bénéficiaire des rémunérations séjourne dans le pays où l’activité professionnelle est exercée
maximum 183 jours au cours d’une période imposable ;
b) les rémunérations sont payées par un employeur ou pour le compte d’un employeur qui n’est
pas un résident du pays où l’activité professionnelle est exercée ;
c) la charge des rémunérations n’est pas supportée par un établissement stable ou une base fixe que
l’employeur a dans le pays où l’activité professionnelle est exercée.
La règle des 183 jours peut également être utilisée afin d’assurer l’imposition de rémunérations
dans le pays où les activités sont exercées et de réaliser une économie d’impôt résultant de la
progressivité des taux d’imposition nationaux dans la mesure où une des conditions précitées n’est
pas remplie.
Le pouvoir d’imposition revient donc à la Belgique (en tant qu’Etat de résidence) moyennant le
respect des conditions suivantes :
10.
1re condition : séjour de moins de 183 jours
L’ensemble des jours passés à l’étranger en raison de l’exercice de l’activité de travailleur doit être
pris en considération afin de déterminer si la période de 183 jours est dépassée, nonobstant le fait
que le séjour à l’étranger soit interrompu ou que l’activité soit exercée pour des employeurs
distincts.
La période de référence pendant laquelle le séjour de 183 jours doit être calculé, varie en fonction
des différentes conventions conclues avec la Belgique. Ainsi, certaines conventions stipulent que la
période de référence est la période imposable qui correspond à l’année civile (exemple : la France).
D’autres conventions précisent que la période de référence est une période de 12 mois (exemple : la
Grande-Bretagne, l’Indonésie, le Sri Lanka, Hong-Kong). Par conséquent, on se réfère à une
période flottante qui peut chevaucher deux années civiles successives. Ainsi, toute période
successive de travail de plus de 183 jours implique dès lors toujours la taxation dans l’Etat de la
source.
Le comité des affaires fiscales de l’OCDE fait actuellement référence à « une période quelconque
de 12 mois » au lieu de « l’année civile considérée ».
Selon les conventions, les termes « séjour » ou « activité » sont employés lorsqu’il est fait mention
de la période des 183 jours. En pratique, l’Administration fiscale belge prend, et ce en vertu de la
circulaire administrative AAF du 25 mai 2005, en considération le nombre de jours de présence
physique du travailleur sur le territoire de l’Etat d’activité. Pour le calcul de la durée du séjour hors
du pays de résidence, il convient d’inclure les interruptions normales de travail, telles que les weekends, les jours fériés, les congés, etc., à condition que ces jours aient été passés dans le pays de
l’activité (Circ., point 4.1.3). Il est donc primordial que le travailleur se trouve dans le pays où il
travaille lors de ces jours d’interruption, afin que ceux-ci soient assimilés à des jours d’activité dans
le pays d’activité.
Suite au rapport du comité des affaires fiscales du 24 janvier 1991, le Conseil de l’OCDE
préconisait, en effet, de prendre en compte les « jours de présence physique » à l’étranger pour
déterminer la période de 183 jours, plutôt que la « période d’activité ». Selon la méthode de la
présence physique, tous les jours passés dans le pays dans lequel l’activité professionnelle est
exercée sont pris en compte pour calculer si la limite de 183 jours est dépassée. La méthode de la
période d’activité est plus difficile à appliquer étant donnée qu’il est assez compliqué de déterminer
quand l’expatriation commence ou se termine et quels sont les jours où l’activité est exercée. Pour
le calcul de la durée du séjour hors du pays de résidence selon la méthode de la présence physique,
il convient d’inclure les interruptions normales de travail telles que les week-ends, les jours fériés,
les jours de maladie et les congés. Sont également inclus dans la durée du séjour à l’étranger, les
fractions de journées et les jours de départ et d’arrivée. Toutefois, les jours de transit dans le pays
d’activité au cours d’un trajet entre deux points extérieurs à ce pays et les jours de vacances passés
dans un autre pays que celui de l’activité professionnelle ne sont pas pris en considération pour
déterminer la période de 183 jours. En ce qui concerne les jours de vacances passés dans le pays où
l’activité professionnelle est exercée, une certaine flexibilité est acceptée si le contribuable peut
démontrer que les vacances sont ou non liées à l’activité exercée dans le pays en question
(« Modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune » du comité des affaires fiscales
de l’OCDE, commentaires art. 15, paragraphe 5).
11.
Certaines divergences existaient entre les principes d’interprétation préconisés par l’OCDE et ceux
utilisés par l’Administration belge dans ses commentaires jusqu’à l’avènement de la circulaire du
25 mai 2005. La principale pierre d’achoppement résidait dans le problème des week-ends, jours
fériés, congés passés hors du territoire de l’Etat d’activité. L’Administration belge, appuyée par la
jurisprudence, semblait vouloir inclure ces jours dans le comptage des jours. A l’inverse, on peut
déduire des commentaires OCDE qu’il convient d’exclure ces jours.
La position belge était donc, dans le passé, plus favorable aux résidents belges voulant être imposés
à l’étranger sur la base d’un séjour de plus de 183 jours.
Rompant avec son ancienne interprétation, l’Administration belge applique, depuis mai 2005, la
méthode des « jours de présence physique » préconisée par l’OCDE.
La position des autorités fiscales des différents pays avec lesquels la Belgique a conclu des
conventions, quant à l’interprétation de la période des 183 jours, est également incertaine dans de
nombreux pays, bien que certains tendent vers une application de la méthode des jours de présence.
Dans la mesure où un travailleur veut éviter une imposition dans le pays d’activité en y séjournant
moins de 183 jours, il est impératif d’analyser l’interprétation correcte qui est faite de la période de
183 jours par les autorités fiscales du pays concerné.
2e condition : rémunérations payées ou supportées par un non-résident du pays d’activité
Les rémunérations doivent être payées par un employeur ou une personne, ou au nom d’un
employeur ou d’une personne qui n’est pas résident du pays où l’emploi est exercé, si l’imposition
dans le pays de l’activité veut être évitée. Il suffit donc que l’employeur ait son domicile fiscal dans
un pays tiers qui ne doit pas nécessairement être le pays où le travailleur a lui-même son domicile
fiscal.
Cependant, les conventions conclues avec la France, Singapour et la Thaïlande prévoient que
l’employeur doit être un résident de l’Etat dont le travailleur est lui-même un résident.
Ainsi, la rémunération d’un employé résident français, travaillant moins de 183 jours en Belgique,
supportée par une succursale française d’une société étrangère, ne sera pas imposable en France. La
succursale française n’ayant pas de personnalité juridique, la rémunération n’est pas supportée par
un employeur établi en France. Le droit d’imposition revient donc à la Belgique, pays où l’activité
est exercée, et le droit interne belge déterminera si la rémunération est imposable en Belgique.
Les termes « par un employeur ou au nom d’un employeur » peuvent poser certains problèmes
d’interprétation.
Tout d’abord, la notion d’employeur doit être définie. En effet, il ne suffit pas que le salaire soit
payé ou supporté par une entreprise résidente du pays de l’activité pour qu’il soit imposé dans ce
pays. La société qui paie ou supporte le salaire doit être considérée comme l’employeur de la
personne concernée. Des éléments tels que les liens de subordination qui existent entre l’entreprise
et l’employé, la responsabilité et les risques qui en découlent, etc. permettent de déterminer si
l’entreprise peut être considérée comme l’employeur de la personne concernée (voir, en ce sens, le
12.
récent ruling sur la notion d’ « employeur » au sein de la convention préventive de la double
imposition Belgique-Pays-Bas).
Des problèmes d’interprétation peuvent également se poser en cas de refacturation des
rémunérations qui ont trait à l’activité exercée. Les commentaires administratifs analysent la
situation d’un employé étranger, qui travaille en Belgique et est payé par une société étrangère qui
refacture les coûts salariaux à une entreprise belge. Dans cette hypothèse, l’employé est imposable
en Belgique. On peut en déduire que les autorités fiscales belges prennent en considération
l’employeur qui supporte réellement les coûts de la rémunération plutôt que celui qui effectue
simplement le paiement. Toutefois, dans la situation inverse où un travailleur belge est payé par une
entreprise belge qui refacture les coûts salariaux à une société étrangère, l’Administration ne suit
pas toujours le même raisonnement et prétend imposer le salaire en Belgique.
La convention conclue avec la France diffère sur un deuxième point avec la convention modèle
OCDE en ce sens qu’elle ne prévoit pas que la rémunération doit être payée « par ou au nom de »
un employeur qui n’est pas résident de l’Etat de résidence mais bien que la « charge » de la
rémunération doit être « supportée » par l’employeur dans l’Etat de résidence. Dans les
conventions qui utilisent les termes « à charge », la majorité de la doctrine conclut qu’il est fait
référence à l’entité qui a supporté la charge économique de la rémunération.
3e condition : rémunérations non supportées par un établissement stable ou une base fixe que
l’employeur a dans le pays d’activité
Cette dernière condition doit être interprétée au sens fiscal du terme. Les rémunérations d’un
travailleur seront donc uniquement taxables dans le pays de résidence, même lorsqu’il preste des
activités à l’étranger, si le coût de ses rémunérations ne viennent pas en déduction des bénéfices
d’un établissement stable ou des revenus d’une base fixe dans le pays de l’activité professionnelle
pour autant que les deux autres conditions de la règle des 183 jours soient remplies.
Pour que cette condition soit considérée comme n’étant pas remplie, il faut donc que la prise en
charge du salaire apparaisse en tant que telle dans les comptes de l’établissement stable ou la base
fixe, que se soit par une diminution des revenus à titre de coût salarial ou par une refacturation
directe de ces coûts salariaux par le siège central. Par contre, lorsque la prise en charge se fait au
moyen d’une facture générale de « management fee », le salaire ne sera pas considéré comme pris
en charge par l’établissement stable.
III. RESIDENTS BELGES TRAVAILLANT DANS UN PAYS AVEC LEQUEL LA
BELGIQUE N’A PAS CONCLU UNE CONVENTION PREVENTIVE DE LA DOUBLE
IMPOSITION
Pour les résidents belges travaillant dans un pays avec lequel la Belgique n’a pas conclu de
convention, et pour lesquels une double imposition se produit, la Belgique octroie, sur la base de
l’article 156 CIR 92, une réduction d’impôt. Cette mesure unilatérale prévoit que la quotité d’impôt
afférente à certains revenus étrangers non exonérés d’impôt en Belgique soit réduite de moitié. La
réduction n’est consentie qu’à la condition que le contribuable puisse fournir la preuve que les
revenus professionnels ont été réalisés et imposés à l’étranger. Les revenus professionnels sont
« réalisés » à l’étranger lorsqu’ils résultent d’une activité professionnelle exercée à l’étranger. Les
revenus professionnels sont « imposés » à l’étranger lorsqu’ils ont subi le régime fiscal qui leur est
13.
normalement applicable dans le pays d’origine. Le fait que certains éléments de ces revenus
(imposables en Belgique) ne soient pas imposables dans le pays d’origine est sans incidence.
Cependant, un résident belge envoyé dans un pays où l’impôt sur le revenu n’existe pas, n’aura pas
droit à une réduction d’impôt en Belgique étant donné qu’il n’a pas été imposé à l’étranger.
Le texte légal fait référence à des « revenus professionnels réalisés et imposés à l’étranger ». Il
n’est pas précisé dans quel pays ils doivent être réalisés et imposés. Dès lors, on pourrait envisager
une situation où un employé exerce son activité professionnelle dans un certain pays avec lequel la
Belgique n’a pas conclu de convention et est rémunéré par une société établie dans un pays tiers où
il subit une imposition limitée. Dans cette hypothèse, le contribuable concerné aurait droit à une
réduction d’impôt en Belgique en vertu de l’article 156 CIR 92 étant donné que les revenus
professionnels ont été réalisés et imposés à l’étranger.
14.
CHAPITRE 3
FRACTIONNEMENT DE LA REMUNERATION
I. INTRODUCTION
Le principe contenu dans les conventions préventives de la double imposition qui prévoit que le
salaire est taxable dans le pays où l’activité professionnelle est exercée, va permettre aux
travailleurs qui travaillent dans plusieurs pays de voir leur rémunération imposée pour une partie
dans chacun des différents pays, moyennant le respect de certaines conditions.
Le fractionnement de la rémunération entraînera une réduction d’impôt résultant de la progressivité
des taux d’imposition nationaux, chaque partie de revenu étant imposée à un taux distinct qui est
normalement inférieur au taux qui serait applicable si le même revenu était taxé dans un seul pays.
II. PRINCIPE
L’article 15 des conventions qui prévoit que les rémunérations soient imposées dans le pays de
l’activité connaît une exception. Les rémunérations obtenues à l’étranger par un salarié résident
belge seront malgré tout taxables en Belgique si les trois conditions suivantes sont simultanément
remplies :
1° l’employé exerce son activité professionnelle dans l’Etat de source pendant une période
n’excédant pas 183 jours de la période imposable considérée ;
2° la rémunération est payée par ou pour le compte d’un employeur ne résidant pas dans l’Etat de
source ;
3° la rémunération n’est pas à charge d’un établissement stable ou d’une base fixe de l’employeur
dans l’Etat de source.
Le non-respect d’une de ces conditions permettra donc à l’employé, exerçant son activité
professionnelle en Belgique et à l’étranger, d’être imposé à l’étranger sur la partie de sa
rémunération relative à son activité exercée à l’étranger.
Toutefois, la mise en place d’un fractionnement de la rémunération n’est réalisable que si le pays de
résidence exonère (du moins partiellement) la rémunération imposée à l’étranger.
Afin d’éviter la double imposition, deux méthodes sont contenues dans les conventions : la
méthode d’imputation et la méthode d’exemption.
1. La méthode d’imputation
En vertu de cette méthode, l’Etat de résidence accorde, sur l’impôt qu’il établit sur les revenus
recueillis par le résident concerné dans l’Etat de source, une déduction égale au montant de l’impôt
perçu dans l’Etat de source (conformément à la convention). Ce système, appelé aussi crédit
d’impôt, est généralement appliqué dans les pays anglo-saxons. Lorsqu’un tel système est utilisé, le
fractionnement de la rémunération perd son avantage pécuniaire puisque la charge fiscale totale
15.
équivaut de toute manière à celle qui aurait été supportée si l’ensemble des revenus avaient été
perçus dans le pays de résidence.
2. La méthode d’exemption
La Belgique a opté pour cette méthode que l’on retrouve dans l’article 23 A de la convention
modèle OCDE de 1992 libellé comme suit :
1. Lorsqu'un résident d'un Etat contractant reçoit des revenus ou possède de la fortune qui,
conformément aux dispositions de la présente Convention, sont imposables dans l’autre Etat
contractant, le premier Etat exempte de l’impôt ces revenus ou cette fortune, sous réserve des
dispositions des paragraphes 2 et 3.
(...)
3. Lorsque, conformément à une disposition quelconque de la Convention, les revenus qu’un
résident d'un Etat contractant reçoit ou la fortune qu'il possède sont exempts d'impôt dans cet Etat,
celui-ci peut néanmoins, pour calculer le montant de l'impôt sur le reste des revenus ou de la
fortune de ce résident, tenir compte des revenus ou de la fortune exemptés.
Cette méthode d’exemption sous réserve de progressivité exempte les revenus d’origine étrangère,
mais prend néanmoins ces revenus en considération afin de déterminer le taux moyen d’imposition
qui sera applicable aux autres revenus taxables dans l’Etat de résidence.
Cette disposition a été transposée en droit belge par l’article 155 CIR 92. Celui-ci prévoit que « les
revenus exonérés en vertu des conventions internationales préventives de la double imposition sont
pris en considération pour la détermination de l’impôt, mais celui-ci est réduit proportionnellement
à la partie des revenus exonérés dans le total de revenus ».
Le revenu étranger exonéré doit donc malgré tout être déclaré par le contribuable afin que
l’Administration fiscale puisse tenir compte de la progressivité des taux d’imposition à appliquer
sur les autres revenus. Le revenu qui doit être déclaré est le « revenu net frontière », qui équivaut
au revenu étranger brut diminué des cotisations sociales étrangères, de l’impôt étranger et des
charges afférentes à ce revenu étranger.
III. MISE EN OEUVRE D’UN FRACTIONNEMENT DE REMUNERATION
D’un point de vue pratique, un fractionnement de rémunération au sein d’un groupe de sociétés
belges et étrangères sera réalisable si les conditions suivantes sont remplies :
– l’employé, résident belge, conclut des contrats d’emploi distincts avec la société belge et avec la
société étrangère. A défaut, une déclaration de détachement dans le pays concerné sera annexée
au contrat de travail principal ;
– les activités exercées par l’employé à l’étranger le sont pour le compte de la société étrangère
qui supporte le coût salarial correspondant. A cet égard, l’inscription sur deux payrolls distincts
est préférable à un système de refacturation de la part de la société belge à la société étrangère ;
16.
– la proportion de rémunération attribuée par la société étrangère correspond à la proportion de
services prestés pour le compte de cette société (sauf si les fonctions diffèrent, de par le degré de
responsabilité, du niveau de difficulté, etc.). L’employé doit être physiquement présent dans les
différents pays où il reçoit une rémunération en contrepartie de ses services. Il convient dès lors
d’être en mesure de prouver, par le biais d’un certain nombre de documents, que le travailleur a
réellement fourni des prestations à l’étranger. La preuve des séjours hors du pays de résidence
peut être fournie au moyen de tout document nominatif, tel que des comptes rendus de réunions,
des notes d’hôtel, des tickets d’embarquement, des reçus de paiement par carte de crédit, des
notes de frais étayées par des preuves de paiement...
IV. EFFETS SECONDAIRES D’UN FRACTIONNEMENT DE REMUNERATION
Un système de fractionnement de rémunération peut avoir une influence sur le traitement fiscal de
différents avantages qui font partie intégrante de la rémunération gagnée en Belgique jusque là.
1. Primes excessives au regard de la règle des 80 %
Si le règlement de l’assurance-groupe prévoit que les primes sont calculées sur base du salaire total
(salaire belge + salaire étranger), la déductibilité fiscale des primes peut être limitée. En effet, les
primes d’assurance-groupe versées par l’employeur donnent droit à une réduction d’impôt dans la
mesure où les sommes versées au moment de la retraite au titre de pension légale et extralégale ne
dépassent pas 80 % de la dernière rémunération annuelle brute normale et tiennent compte d’une
durée normale d’activité professionnelle.
En cas de fractionnement de rémunération, l’Administration fiscale belge calculera la limite des
80 % en ne prenant que la rémunération belge en considération. La société ne sera autorisée à
déduire les primes payées par elle (tenant compte de la limite des 80 %) qu’en proportion de la
rémunération belge. Les primes de l’employeur se rapportant à la rémunération étrangère seront
rejetées en tant que dépenses non admises.
2. Remboursement forfaitaire des frais de représentation
Il est possible que l’Administration fiscale belge rejette les montants forfaitaires attribués aux
employés pour frais de représentation, comme avant le fractionnement de rémunération, puisqu’à
partir de ce moment une partie de l’activité professionnelle sera exercée à l’étranger. Dans ce cas,
une répartition de ces frais, pays par pays, serait plus appropriée. Cela posera néanmoins la
question du traitement fiscal de ces remboursements à l’étranger.
3. Voiture de société
La libre disposition d’une voiture de société à des fins privées est considérée en Belgique, et à
l’étranger, comme un avantage en nature. Le fractionnement de la rémunération peut poser des
problèmes à cet égard, étant donné que les méthodes d’évaluation diffèrent d’un pays à l’autre. Il
n’est pas impossible que le système applicable à l’étranger soit notablement moins avantageux que
celui généralement accepté en Belgique. Le maintien du coût en Belgique pourrait donc éliminer ce
problème, bien que l’Administration fiscale belge puisse exiger une refacturation sur base du
pourcentage de fractionnement.