La Société Côte d`Ivoire TELECOM

Transcription

La Société Côte d`Ivoire TELECOM
REPUBLIQUE DE CÔTE
D’IVOIRE
--------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
-------------------TRIBUNAL DE COMMERCE
D’ABIDJAN
-------------------RG N° 2891/2014
---------------ORDONNANCE DU
JUGE DE L’EXECUTION
AUDIENCE PUBLIQUE DU 24 OCTOBRE 2014
L’an deux mil quatorze ;
Et le vingt-quatre octobre ;
Nous, FIAN A. ROSINE MOTCHIAN, Vice-Président délégué dans
les fonctions de Président du Tribunal de Commerce d’Abidjan,
statuant en matière d’exécution en notre Cabinet sis à Cocody les
Deux-Plateaux ;
Assisté de Maître BAH STEPHANIE, Greffier ;
Avons rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
du 24/10/2014
Par exploit d’huissier du 10 octobre 2014, la Société Côte d’Ivoire
TELECOM a fait servir assignation à monsieur GRAH KPLE Blaise
Affaire :
d’avoir à comparaitre le 17 octobre 2014 devant la juridiction de ce
La Société Côte d’Ivoire
siège statuant en matière d’exécution en mainlevée de saisie
TELECOM
attribution de créances.
(Maître COULIBALY Tiémogo)
----------------
Contre
1/ Monsieur GRAH KPLE
Blaise
(Cabinet ATTOH BI)
2) La BICICI
La demanderesse expose à l’appui de son action que par exploit de
saisie attribution de créances en date du 21 août 2014, le défendeur
a fait pratiquer saisie attribution de créances sur ses comptes
ouverts dans les livres de la BICICI pour avoir paiement de sommes
d’argent, saisie qui lui a été dénoncée le 22 Août par exploit
d’huissier ;
---------------DECISION
CONTRADICTOIRE
Déclarons La Société Côte
d’Ivoire TELECOM recevable
en son action ;
Elle soutient que cette saisie est irrégulière et sans fondement et lui
cause un préjudice irréparable ;
Elle fait valoir que ladite saisie attribution a été pratiquée le 21 août
2014 alors même que le défendeur avait déjà pratiqué une saisie
attribution, le 11 août 2014 qui est toujours pendante puisque
mainlevée n’en a pas été donnée;
L’y disons bien fondée ;
Déclarons nul l’exploit de
dénonciation de la saisie
critiquée en date du 22 août
2014 ;
En conséquence disons que la
saisie
du
21
août
2014 pratiquée sur les compte
de la Société Côte d’Ivoire
TELECOM ouverts à la BICICI
est caduque ;
Elle prétend qu’il s’agit de manœuvre frauduleuse tendant à
s’approprier des sommes issues de la saisie ; que c’est pourquoi, elle
a, dans un acte antérieur, dénoncé cette première saisie qui fait
l’objet d’une contestation devant le tribunal de première instance
d’Abidjan ;
Elle souligne que la saisie attribution du 21 août 2014 est irrégulière
pour non respect des dispositions de l’article 157 de l’Acte Uniforme
Portant Organisation des Procédures Simplifiées de Créances et des
Voies d’Exécution selon lequel « L’acte de saisie contient à peine de
nullité…le décompte distinct des sommes réclamées en principal,
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Ordonnons la main levée de
ladite saisie ;
Mettons les dépens à la charge
Monsieur GRAH KPLE Blaise.
frais et intérêts échus majorés d’une provision pour les intérêts à
échoir dans le délai d’un mois prévu pour élever une
contestation. » ;
Que le procès-verbal de saisie attribution fait état de sommes dont le
justificatif n’est pas rapporté ;
Qu’il est réclamé au titre des frais de greffe la somme de
2.446.275FCFA qui représenterait le coût de la grosse alors
qu’aucune grosse du jugement n°07 du 27/07/2010 ne lui a été
signifié ;
En outre, la demanderesse souligne que conformément à l’article 47
de l’acte uniforme précité, « les frais de l’exécution forcée sont à la
charge du débiteur sauf s’il est manifeste qu’ils n’étaient pas
nécessaires au moment où ils étaient exposés » alors que les frais
réclamés par monsieur GRAH KPLE Blaise en l’espèce résultent de
toutes les saisies dont la main levée a été judiciairement ou
amiablement obtenue de sorte qu’ils ne lui sont pas imputables ;
Elle ajoute que l’acte de dénonciation du 22 août 2014 a indiqué par
erreur que la date d’expiration du délai pour élever des contestations
relativement à la saisie attribution du 21 août 2014 est le 24
septembre 2014 alors que c’est le 22 septembre 2014 qui est la date
utile; Qu’ainsi, cet acte viole l’article 160 de l’acte uniforme précité
et encourt nullité en ce qu’une telle indication équivaut à une
absence de la date d’expiration ;
Elle estime que n’ayant pas corrigé cette indication erronée de la
date dans le délai de huit jours prescrit, la saisie critiquée est
devenue caduque ;
Elle conclut qu’en raison de toutes ces irrégularités, elle sollicite que
la juridiction de céans annule l’exploit de saisie attribution du 22
août 2014 ainsi que l’acte de dénonciation du 22 aout 2014 et
conséquemment, dise que la saisie est caduque et en ordonne la
mainlevée;
Le défendeur s’oppose à cette demande et soutient que les
prétentions de la demanderesse ne sont pas fondées;
Il fait observer que la saisie critiquée a été pratiquée le 21 août 2014
en vertu d’un arrêt de la cour suprême condamnant la Société Côte
d’Ivoire TELECOM à lui payer une somme d’argent et celle-ci avait
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un mois à compter de la date de dénonciation de ladite saisie soit du
22 août 2014 au 24 septembre pour élever des contestations;
Il estime que les délais prévus par l’acte uniforme précité étant des
délais francs, la date d’expiration du délai pour élever des
contestations à la saisie critiquée est le 24 septembre 2014 à
compter de la dénonciation faite le 22 août 2014 et qu’en tout état de
cause, selon lui, la demanderesse n’ayant saisie la juridiction de
céans en contestation que le 10 octobre 2014, son action doit être
déclarée irrecevable;
Il indique subsidiairement au fond que mainlevée de la saisie du 11
août 2014 a été faite ; que la demande de la Société Côte d’Ivoire
TELECOM doit être déclarée mal fondée et rejetée ;
SUR CE
EN LA FORME
Sur le caractère de la décision
Monsieur GRAH KPLE Blaise a comparu et a même fait valoir ses
moyens de défense ; il y a lieu de statuer par décision contradictoire ;
Sur l’irrecevabilité de l’action
Monsieur GRAH KPLE Blaise soutient que la saisie critiquée
pratiquée le 21 août 2014 et dénoncée le 22 août 2014, la Société
Côte d’Ivoire TELECOM disposait d’un délai d’un mois à compter de
la date de dénonciation de ladite saisie soit du 22 août au 24
septembre 2014 pour élever des contestations;
Il prétend que n’ayant saisie la juridiction de céans en contestation
que le 10 octobre 2014, son action doit être déclarée irrecevable ;
Aux termes de l’article 170 alinéa 1 de l’Acte Uniforme portant
Organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des
voies d’exécution « A peine d’irrecevabilité, les contestations sont
portées, devant la juridiction compétente, par voie d’assignation,
dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au
débiteur. »
Il résulte de l’examen de ce texte qu’il ne prescrit l’irrecevabilité de
l’action en contestation du débiteur saisi que pour le cas
d’inobservation du délai d’un mois pour intenter cette action devant
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la juridiction compétente pour recevoir ladite contestation ;
Ce qui suppose une indication par le créancier saisissant, dans l’acte
de dénonciation de la saisie, de la juridiction effectivement
compétente devant laquelle les contestations doivent être portées ;
En l’espèce, il est constant que monsieur GRAH KPLE Blaise a
indiqué dans l’acte de dénonciation de la saisie critiquée en date du
22 août 2014, le Tribunal de Première Instance d’Abidjan comme
celle compétente pour statuer sur les contestations à ladite saisie de
sorte que c’est devant cette juridiction que la Société Côte d’Ivoire
TELECOM a élevé sa contestation le 18 septembre 2014 ;
Il est également constant que cette juridiction s’est déclarée à juste
titre incompétente à connaître de la contestation puisque la Société
Côte d’Ivoire TELECOM qui a initiée l’action est une société
commerciale qui ne peut saisir que le Tribunal de commerce
d’Abidjan ;
Or, il est avéré que cette contestation avait été introduite dans le
délai d’un mois prescrit ;
Dans ces conditions, l’instance peut se poursuivre devant la
juridiction compétente indiquée par Tribunal de Première Instance
d’Abidjan sans que le délai d’un mois ait pu courir ;
Il s’ensuit que l’action de la Société Côte d’Ivoire TELECOM a été
initiée dans le respect des exigences légales de forme et de délai ;
Il y a lieu de la déclarer recevable ;
Sur le bien-fondé de la demande de mainlevée
La Société Côte d’Ivoire TELECOM sollicite la mainlevée de la saisie
pratiquée par monsieur GRAH KPLE sur ses comptes bancaires
logés dans les livres de la BICICI au motif que l’acte de dénonciation
du 22 août 2014 contient une indication erronée du délai de
contestation et de la juridiction compétente devant laquelle doivent
être portées les contestations ;
Aux termes des dispositions de l’article 160-2 de l’Acte Uniforme
portant Organisation des procédures simplifiées de recouvrement et
des voies d’exécution : « Dans un délai de huit jours, à peine de
caducité, la saisie est dénoncée au débiteur par acte d’huissier ou
d’agent d’exécution.
Cet acte contient à peine de nullité :
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1)Une copie de l’acte de saisie ;
2)en caractères très apparents, l’indication que les contestations
doivent être soulevées, à peine d’irrecevabilité, dans un délai d’un
mois qui suit la signification de l’acte et la date à laquelle expire ce
délai ainsi que la désignation de la juridiction devant laquelle les
contestations pourront être portées.
Si l’acte est délivré à personne, ces indications doivent être
également portées verbalement à la connaissance du débiteur. La
mention de cette déclaration verbale figure sur l’acte de
dénonciation.
L’acte rappelle au débiteur qu’il peut autoriser, par écrit, le
défendeur créancier à se faire remettre sans délai par le tiers
saisi, les sommes ou partie des sommes qui lui sont dues»;
Il résulte de ce texte que l’acte de dénonciation de la saisie doit
contenir mention non seulement du délai d’un mois dont dispose le
débiteur saisi pour élever contestations à la saisie mais également de
la juridiction devant connaître de ces contestations et le défaut
desdites mentions entraine sa nullité ;
En l’espèce, il est constant comme provenant des pièces du dossier
que l’acte de dénonciation du 22 août 2014 contient une indication
erronée de la juridiction compétente devant laquelle doivent être
portées les contestations puisqu’il y est mentionné que la juridiction
compétente pour connaître des contestations de la saisie attribution
critiquée est le Tribunal de Première Instance d’Abidjan ;
Or, en réalité, la juridiction compétente est la juridiction de céans ;
Il s’ensuit qu’en l’espèce, cet exploit de dénonciation contient une
mention erronée de la juridiction compétente devant laquelle
doivent être portées les contestations qui équivaut à une absence
d’indication de cette juridiction;
Dans ces conditions, il convient de dire que l’exploit de dénonciation
du 22 août 2014 encourt nullité de sorte que la mainlevée de la
saisie-attribution de créances critiquée doit être ordonnée;
Sur les dépens ;
Monsieur GRAH KPLE Blaise succombant, il doit être condamné
aux dépens de l’instance ;
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PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière d’exécution
et en premier ressort ;
Déclarons La Société Côte d’Ivoire TELECOM recevable en son
action ;
L’y disons bien fondée ;
Déclarons nul l’exploit de dénonciation de la saisie critiquée en date
du 22 août 2014 ;
En conséquence disons que la saisie du 21 août 2014 pratiquée sur
les compte de la Société Côte d’Ivoire TELECOM ouverts à la BICICI
est caduque;
Ordonnons la main levée de ladite saisie;
Mettons les dépens à la charge Monsieur GRAH KPLE Blaise;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jours, mois et an que
dessus.
Et avons signé avec le greffier. / .
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Sur la compétence
Aux termes de l’article 7 de la loi N°2014-424 du 14 juillet 2014
portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de
commerce « Les tribunaux de commerce connaissent :
- des contestations relatives aux engagements et transactions entre
commerçant au sens de l’Acte Uniforme relatif au Droit commercial
général ;
- des contestations entre associés d’une société commerciale ou d’un
groupement d’intérêt économique ;
- des contestations, entre toutes personnes, relatives aux actes de
commerce général. Toutefois, dans les actes mixtes, la partie non
commerçante demanderesse peut saisie les tribunaux de droit
commun ;
- des procédures collectives d’apurement du passif ;
- plus généralement des contestations relatives aux actes de
commerce accomplis par les commerçants à l’occasion de leur
commerce et de l’ensemble de leurs contestations commerciales
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comportant même un objet civil ;
- des contestations et oppositions relatives aux décisions prises par
les Tribunaux de Commerce » ;
Il est établi en l’espèce que la créance à la base de la décision dont
l’exécution est entreprise, trouve son origine dans un contrat de
travail ;
Elle n’a donc pas un caractère commercial si bien qu’elle ne rentre
pas dans les critères énoncés par l’article 7 précité ;
La compétence du Président de Tribunal étant liée à celle du
Tribunal de Commerce, il convient dès lors de dire que les litiges
relatifs à l’exécution de cette décision ne sont pas de la compétence
du Président du Tribunal de Commerce d’Abidjan telle que prévue
par l’article 49 de l’Acte Uniforme Portant Organisation des
Procédures Simplifiées de Créances et des Voies d’Exécution;
Dès lors il convient de se déclarer incompétent au profit du Juge de
l’exécution du Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau ;
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