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Date : 28 AOUT/03 SEPT 15
Page de l'article : p.92
Journaliste : Périco Légasse
Pays : France
Périodicité : Hebdomadaire Paris
OJD : 155538
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Par Périco Légasse
MOULIN DU ROC A CHAMPAGNAC-DE-BELAIR
[EDEN PERIGOURD^ D'ALAIN GARDILLOU
Au cœur du Périgord vert, cet hôtel-restaurant au charme irrésistible se distingue par une cuisine vouée à
la consécration du produit. Elégante simplicité et talent artisan en font l'une des meilleures tables de France.
I
l y a deux moyens pour le gastronome pessimiste de s'accrocher
aux branches de l'espoir : s'en
tenir strictement à l'inventaire
certifié des bonnes adresses perpétuant les valeurs de la cuisine
française ou se lancer à l'aventure
dans les profondeurs géographiques
du fourneau national. Si l'on opte
pour la seconde, la belle saison
aidant, la chance éclaire parfois la
boussole du goût juste pourvu que
l'on daigne aller fouiner par-delà
les tracés autoroutiers. Evitant les
déserts alimentaires globalisés et
contournant les zones à gargotes
touristiques, tous deux en pleine
croissance depuis que le rata mercantile massifié s'empare chaque
jour un peu plus de nos assiettes,
il convient d'explorer des contrées
aux noms sauvages et parfois
oubliés comme Quercy ou Vivarais,
Rouergue ou Lauragais,Gévaudan ou
Bourbonnais - notre pays en recèle
quelques-unes toujours pourvoies
de leur patrimoine -, pour découvrir ici et là quèlques joyaux encore
épargnes par les affres d'une ragougnassemédiatiqueprodiguéepardes
programmes aussi avilissants que
« Top chef» ou feu •« MastcrChef ».
Telle est l'heureuse issue pour
ceux qui ont F audace de pousser
jusqu'à Champagnac de Eclair, au
coeur du Périgord vert, du côté de
Brantôme, en ce pays de Dronne et
Belle où, entre manoirs fortifiés et
châteaux historiques, la légende gastronomique s'inscrit dans le paysage
à coups de canards gras, de noyers
verdoyants et de cochons culottes.
Coïncidant pour une fois avec fe
Guide Michelin, qui accorde à cet
établissement les honneurs qu'il
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mérite, nous avons été subjugués
par le Moulin du roc.
Sous la férule d'Alain Gardillou,
qui cut la bonne idée dc mettre ses
couteaux dans le droit-fil de ceux
de sa mère, émérite cuisinière périgourdine ayant transmis asa progéniture le culte de l'endroit et de la
saison, cette maison est le modèle
exemplaire de l'auberge porteuse
d'enseignements. Le premier
étant que la pérennité familiale
reste l'une des garanties les plus
solides de l'humanisme hôtelier, le
second, que, lorsque les lieux sont
aussi sublimes, il appartient au cuisinier de les respecter en n'allant
pas chercher minuit à 24 heures
au fond de sa marmite par des élu-
LE CHEF ALAIN GARDILLOU est plus attaché à la précision sensorielle
d'une denrée qu'aux prouesses techniques dont il pourrait tirer gloire,
line cuisine exquise, comme en atteste cet émincé de bœuf de Coutancie
en salade de haricots verts (ci-dessus).
DORDOGNE 5487005400502
Date : 28 AOUT/03 SEPT 15
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Journaliste : Périco Légasse
Pays : France
Périodicité : Hebdomadaire Paris
OJD : 155538
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CAVE DANS LE ROC
UN BERGERAC
AU NEZ TONITRUANT
cubrations qui gâchent le festin, et
le dernier, que la simplicité bien
conçue et bien tenue, propice à la
vraie élégance, est l'apanage des
aubergistes nobles.
Aussitôt posé au milieu de ce
petit bout d'tden vibrionnant,
qu'une rivière de Cocagne arrose
d'un dédale de filaments aquatiques
aux berges fleuries ou surmontées
de terrasses, le visiteur est envoûté
par le charme de ce moulin du
XVIIe siècle aménage en hôtel-restaurant par les parents Gardillou
en 1969. C'est en contemplant le
site depuis les chambres ouvrant
sur ce panorama pittoresque et en
savourant les douceurs d'un repas
servi à ciel déployé ou à l'ombre de
ces vieux murs que l'on réalise à quel
point une maison peut avoir une
âme. Le Moulin du roc en a bien une,
enracinée, qui s'exprime par la configuration des lieux, avec ce mécanisme minotier encore visible, par
l'esprit qui règne dans cette demeure
vibrant encore de son passé rural et
par la ferveur d'une cuisine entièrement vouée à la consécration du
produit dans ce qu'il peut avoir de
plus légitime, son origine. Plus attaché à la précision sensorielle d'une
denrée qu'aux prouesses techniques
dont il pourrait tirer gloire, Alain
Gardillou valorise d'abord le travail du producteur en recherchant
l'intelligence des accords. Pour lui,
l'artiste, c'est l'éleveur, le pêcheur ou
le maraîcher, mais aussi le boucher,
le fromager et le boulanger qui se
dorment tant de mal pour nous faire
tant de bien. Sûr de son fait, le chef
s'en tient au rôle d'artisan cuisinier,
apothéose du métier.
PALMARÈS DE DÉLICES
En atteste son exquise tranche de
foie gras du Périgord rôti en cocotte,
juste relevé d'une pincée de poivre
et de sel, pour laisser le mets dans
sa vertu. En atteste le blanc de turbot grillé, bouillon de coquillages et
légumes d'été parfumé à la citronnelle, au fumet bouleversant. En
atteste la tourtière de ris de veau au
foie gras et truffe noire du Périgord
sur sa réduction de jus de porto à
la truffe... Magistrale démonstration d'une école classique adaptée
à l'humeur du temps. En atteste,
clou du répertoire culinaire local, la
poitrine de cochon cul-noir du pays
confite, purée de patates douces et
croquants de betterave rose. Assortis
à ce palmarès de délices pensés et
ciselés dans le terroir, la carte des vins
(lire ci-contre) et la prévenance d'un
service tout en sourire animé avec
une pointe d'accent colombien par
Shirley Gardillou se posent comme
deux cerises sur ce gâteau de rêve
dont il faut considérer qu'il est l'une
des meilleures tables de France. •
Moulin du Roc, Châteaux hôtels Collection,
24530 Champagnac-de-Belair Tél 05 53 02 86 00
Chambres de 146 à 230 Ê Menus à 79 et 115 E,
carte 85 8 Fermeture de novembre à mars
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C
hef sommelier
au Moulin du roc et
partenaire avisé des
tables prêtes à déguster
cru par-dessus tête, Fabien
Bruguera connaît non
seulement son Périgord
viticole comme le fond
de sa cave mais
aussi les nuances
organoleptiques
idéales gué certaines
cuvées dispensent au
moment de coexister
avec la cuisine
d'Alain Cavillon.
Et s'il dispose
sur sa carte
de guelgues
prestigieux
flacons intitulés
château-latour
1988, châteaulafite-rothschild
1989 ou châteaumargaux 1959,
c'est d'abord
sur les coteaux
de la Dordogne
gué ce palais
malin aime à
s'aventurer
pour régaler
les amateurs
de synergies
sensorielles
territoriales. Bergerac,
Monbazillac, Pécharmant,
Montravel, ces appellations
n'ont plus guère de secret
pour lui et, lorsqu'il
s'agit de trouver le juste
accord entre un plat du
chef et le jus de la vigne
locale, il a l'étiguette
sur le bout de la langue.
Lors de notre passage, lui
lançant un gage certain,
puisqu'une omelette
aux premiers cèpes de
la saison non prévue au
menu fut demandée au
chef, c'est un montrevel
blanc en sauvignon du
moulin-caresse qui releva
le défi avec brio. Plus tard,
considérant que l'entrecôte
de bceuf de Coutancie
appelait un raisin de
proximité pour révéler ses
charmes carnés, jamais à
cours d'instinct, Fabien
Bruguera suggéra un
côtes-de-bergerac
rouge, cuvée « La
Gloire de mon père »
2011, du châteautour-des-gendres,
qui fit mieux que
merveille. Fleuron
de l'illustre
domaine Conti,
à Ribagnac, issu
P du cabernetsauvignon et
du malbec,
avec 25 % de
merlot et 5 %
de cabernet
franc plantes sur
des sols argilocalcaires marnes
de Castillon, ce
rouge profond
et charnu, au
fruit ample et
généreux, offre
un nez donnant
la plus tonitruante
des répliques au bceuf de
Coutancie. La tirade fut
éloquente, l'union de la
chair et du vin formant une
péninsule de plaisir sur
laquelle se posa, comme
un hanap, la faconde
d'un érudit initié à l'art
de transformer une table
en scène de théâtre
bachique. De la
sommellerie de talent ! •
Château-tour-des-gendres,
domaine de Conti, 24240 Ribagnac
Tél 05 53 5712 43 Cuvée
« La Gloire de mon père » 2011 15 Ê
Expédition
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