Rhumatologie
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Rhumatologie
Pratique clinique en Homéopathie Rhumatologie Dr Firdaws KANOUN BEJAR Pratique clinique en homéopathie Rhumatologie Dr Firdaws KANOUN-BEJAR Préface du Dr Antoine Demonceaux CEDH Introduction L’homéopathie touche à de nombreuses spécialités médicales, plus un médecin homéopathe a d’expérience dans une spécialité donnée, plus il en maîtrise les indications. À mes débuts, je n’imaginais pas mettre en place une méthode publiable. Mon seul but était d’avoir un raisonnement logique. J’ai de nature un esprit scientifique et je vis dans un milieu imprégné de sciences (mon mari est professeur-chercheur en biotechnologie). Il fallait que je me prouve la fiabilité d’une indication, d’une donnée. La méthode présentée dans ce livre est le résultat d’un long travail de synthèse. Le but est de simplifier l’utilisation de l’homéopathie en rhumatologie. Cette méthode applique les bases de l’homéopathie d’une manière différente, peut-être innovante. Elle attribue une valeur importante aux traitements symptomatiques dans la prise en charge et le suivi des pathologies chroniques. Voici des années que j’utilise l’homéopathie de manière exclusive en rhumatologie, avec des résultats au moins égaux aux thérapeutiques classiques. Nous verrons tout cela avec les cas cliniques. Ces derniers démontrent l’application de la méthode. J’ai détaillé l’évolution en temps réel pour montrer comment s’adapter aux situations cliniques. Il est possible de comprendre et d’appliquer la méthode, sans approfondissement (dans certains cas les résultats peuvent être longs). Je tiens à préciser que je n’ai pas la prétention de donner de cours théoriques de rhumatologie : ce n’est pas ma spécialité, mais ce que j’arrive à faire est la substitution des traitements anti-inflammatoires et antalgiques par un traitement homéopathique pur, efficace, simple et facilement reproductible, et traiter par homéopathie la majorité des pathologies citées ci-après. Note sur des abus de langage • Il existe un abus de langage utilisé dans ce livre (et par les médecins homéopathes en général), consistant à lier un médicament homéopathique à la pathologie qu’il traite (exemple : la douleur de Colocynthis), ou alors de parler d’un médicament comme d’un malade (exemple : Arsenicum album est très méticuleux, il présente un eczéma…). C’est probablement dû au principe homéopathique de globalité : un même médicament peut couvrir l’ensemble des signes psychiques et pathologiques que présente (ou a présenté) un malade, c’est comme si nous parlions d’une personne. • Un autre abus de langage est possible : « je n’ai pas retrouvé tel horaire ou telle modalité pour ce médicament » veut dire que, chez mes malades, l’indication décrite dans la littérature n’a pas été constante, contrairement à d’autres modalités décrites. 13 Sommaire Préface p. 7 Témoignage p. 9 Avant-propos p. 11 Introduction p. 13 1/Description de la méthode personnelle p. 19 A) Mise en place de la méthode p. 21 1) L’initiation p. 21 2) Intérêts de la méthode p. 21 3) Notion de symptôme dominant p. 23 4) La méthode de suivi rapproché p. 24 5) Notion d’évolutivité du tableau clinique p. 26 6) Remarques sur la conduite du traitement p. 27 - Le déroulement de la consultation p. 27 - Le choix des médicaments p. 27 - La durée du traitement p. 28 7) Les dilutions utilisées p. 28 2/Application de la méthode en rhumatologie p. 29 Limites et conduite p. 30 I. Les pathologies de la colonne cervicale p. 31 A) Les cervicalgies aiguës p. 31 1) Les torticolis p. 31 14 Sommaire 2) Les névralgies cervico-brachiales p. 32 3) Les traumatismes en aigu (et les traumatismes en général) p. 34 B) Les cervicalgies chroniques p. 35 1) Les cervicalgies chroniques isolées p. 35 2) Les névralgies cervico-brachiales chroniques p. 36 3) Cas cliniques p. 36 4) Le syndrome subjectif des traumatisés crâniens p. 39 II. Les pathologies des membres supérieurs p. 42 A) Les pathologies des épaules p. 42 B) Les pathologies des coudes p. 46 C) Les pathologies des mains p. 48 III. Les dorsalgies p. 50 IV. Les pathologies de la colonne lombaire p. 51 A) Les lombalgies p. 51 B) Les sciatiques p. 57 C) Traitements homéopathiques des coccodynies p. 62 V. Les pathologies des membres inférieurs p. 63 A) Les traitements des coxarthroses p. 63 B) Les traitements des gonarthroses p. 64 C) Les pathologies rhumatismales des pieds p. 68 15 Sommaire VI. Les rhumatismes inflammatoires p. 71 1) Les limites de la méthode p. 71 2) Les médicaments de polyarthrite p. 71 3) La polyarthrite rhumatoïde p. 72 4) Cas cliniques de polyarthrites p. 73 3/Dictionnaire des médicaments homéopathiques les plus utilisés en rhumatologie p. 79 A) Les médicaments symptomatiques p. 80 B) Les médicaments de fond p. 90 4/Cas cliniques délicats p. 93 1) Une coxarthrose, une sciatique et une gonarthrose p. 96 2) Une arthrose avancée de l’épaule droite et du genou gauche p. 97 3) Une gonarthrose avancée p. 100 4) Une gonarthrose ancienne p. 100 5/Réflexions et récapitulations p. 107 I. Réflexions p. 108 1) Méthode personnelle non limitative p. 108 2) Des possibilités multiples p. 108 16 Sommaire II. Tableau récapitulatif p. 108 III. Effet placebo et homéopathie p. 111 Conclusion p. 112 Bibliographie p. 114 17 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE tion et écourter la durée du traitement. • Dulcamara : c’est un médicament étiologique pour un torticolis apparu après une exposition à l’humidité. Cette humidité peut être qualifiée de « mouillée » par la présence d’eau (sueurs, pluie, douche, baignade…) ; c’est le symptôme dominant retenu. Posologie : en 9 CH, 5 granules matin et soir ou 10 granules matin et soir pendant trois jours, souvent avec Bryonia alba. • Aconitum napellus : il est prescrit si des douleurs névralgiques sont apparues après une exposition à un coup de froid (symptôme dominant) qui peut entraîner un frisson. Généralement, c’est une exposition à un coup de froid sec. La pratique montre que ce médicament a également une action sur les coups de froid la nuit, malgré la présence d’une humidité atmosphérique. La notion de coup de froid sec est une indication plus franche : la paralysie faciale a frigore (qui peut arriver par un courant d’air sec). Posologie : en 9 ou 15 CH, 10 granules matin et soir pendant deux ou trois jours. • Arnica montana : il est indiqué si l’apparition de la symptomatologie est secondaire à un effort musculaire ou à un traumatisme (symptôme dominant). Posologie : en 9 CH, 5 granules cinq fois par jour, à espacer selon l’amélioration de la douleur. • Rhus toxicodendron : si le torticolis s’accompagne d’une raideur et d’une douleur aggravée surtout au lever le matin, en début de mouvement, et qu’elle s’estompe avec le mouvement continu. Posologie : en 15 CH, 5 granules le matin avant de se lever et deux fois dans la journée. 2 Les névralgies cervico-brachiales C’est une pathologie aiguë ou chronique ; les traitements sont identiques dans les deux cas. Les douleurs suivent ou intéressent le territoire d’un ou, parfois, de plusieurs nerfs. Elles peuvent être lancinantes, brûlantes ou comme des décharges électriques, plus ou moins accompagnées de paresthésies ou de fourmillements. Nous pouvons retrouver l’indication des médicaments homéopathiques suivants. • Hypericum perforatum : c’est un médicament de douleurs lancinantes le long du trajet, du territoire d’un nerf (symptôme dominant). La douleur peut être linéaire. C’est un médicament de traumatismes au niveau des nerfs (ici entraînés par les lésions arthrosiques). La douleur est centripète selon certains auteurs (de la périphérie vers le centre nerveux ou la colonne cervicale). Posologie : en 15 CH, 5 granules quatre fois par jour ou au rythme des douleurs. • Kalmia latifolia : médicament de douleurs névralgiques en éclair, fulgurantes, suivant le trajet nerveux par voie centrifuge : la douleur part de la colonne vers la périphérie. Posologie : en 15 CH, 5 granules quatre fois par jour ou au rythme des douleurs. Note sur Hypericum perforatum et Kalmia latifolia : à mes débuts, je faisais spécifier par les malades si la douleur était centripète ou centrifuge. Puis j’ai remarqué que les malades revenaient pour des douleurs de sens opposés. Pour couvrir l’atteinte du nerf, 32 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE j’ai pris l’habitude d’associer les deux médicaments, j’ai pu ainsi obtenir une potentialisation de l’action et une couverture des douleurs névralgiques (linéaires, intéressant le trajet d’un nerf) ; c’est le symptôme dominant de l’association. Posologie : Kalmia latifolia en 15 CH et Hypericum perforatum en 15 CH, 4 granules de chaque au rythme des douleurs radiculaires. • Magnesia phosphorica : médicament de douleurs névralgiques soudaines et fugaces ; il y a une sensation de courant électrique. Le symptôme dominant retenu est la douleur comme une décharge électrique. Posologie : en 15 CH, 5 granules au rythme des douleurs ou quatre fois par jour selon l’association de médicaments nécessaire. • Magnesia carbonica : médicament de névralgies à type d’élancements fulgurants suivant le trajet nerveux, accompagnés d’une sensation d’engourdissement, voire même de faiblesse paralytique. Amélioration par la flexion. C’est un médicament que j’ai utilisé en seconde intention, pour les rares fois où je n’ai pas eu d’amélioration avec Magnesia phosphorica . Posologie : en 15 CH, 5 granules au rythme des douleurs. • Aconitum napellus : c’est un médicament de névralgies provoquées par un coup de froid sec. Posologie : en 15 CH, 10 granules deux fois par jour. • Radium bromatum : ce médicament est indiqué pour des douleurs aggravées la nuit, par le mouvement et soulagées par la continuation de celui-ci. Pour ce médicament, les malades présentent une agitation douloureuse nocturne du membre supérieur, à la recherche d’une position de repos non retrouvée (symptôme dominant, voir explications dans le chapitre « Dictionnaire des médicaments »). L’action sur la raideur matinale n’est pas franche ; seul, il n’est pas aussi actif que Rhus toxicodendron. Posologie : en 9 CH, 5 granules au coucher (il n’existe pas de 15 CH en Tunisie, il s’est avéré efficace en 9 CH). • Dulcamara : comme on l’a vu, c’est un médicament de la névralgie déclenchée par un coup de froid sur un état humide « mouillé » ; avec Natrum sulfuricum, ce sont les deux médicaments les plus efficaces pour cette étiologie. Rhus toxicodendron a cette indication, mais je pense que c’est plus une cause de déclenchement de pathologies (après avoir été mouillé) ; ce n’est pas un traitement étiologique à proprement dit. Posologie : en 9 CH, 5 granules matin et soir, ou 10 granules le soir ou bien 10 granules à la demande en préventif ou curatif (lorsque sueurs, pluie…). • Arsenicum album : ce médicament est indiqué pour une sensation de brûlure améliorée par la chaleur (symptôme dominant), quelle que soit la pathologie (ici, une névralgie). Posologie : en tant que traitement symptomatique simple en 9 CH : 5 granules à la demande si le malade présente cette douleur. Ce peut être un médicament de fond (associé à une dose hebdomadaire). • Chamomilla vulgaris : médicament indiqué lorsque la douleur est ressentie de manière excessive par rapport à ce qu’elle devrait (c’est le ressenti qui est différent), contrairement à Ignatia amara, qui n’a aucune douleur dès qu’il a une distraction. Je ne pense pas que ces malades « font exprès », puisqu’ils sont rapidement améliorés par la prise de ce médicament, ils sont même très reconnaissants. 33 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE • Ranunculosis bulbosis : c’est un médicament à action musculaire cervicale, et surtout dorsale (symptôme dominant). Les douleurs sont à type d’élancement, aggravées par le toucher, la rotation, et sont diurnes et nocturnes (à comparer avec Nux vomica pour des douleurs à type de spasmes ou contracture, aggravées la nuit, de toute la colonne vertébrale, surtout de la colonne lombaire avec une difficulté pour se retourner dans le lit). Posologie : en 9 CH, 5 granules deux fois par jour. • Natrum sulfuricum : médicament d’aggravation par temps humide ; selon les habitudes des homéopathes, il peut remplacer Dulcamara (tous deux sont actifs). Dans ma pratique, j’ai adopté Dulcamara pour l’aggravation par l’humidité. J’ai gardé Natrum sulfuricum pour les malades sensibles aux changements de temps, ceux qu’on appelle « sujets baromètres » (symptôme dominant). Posologie : en 9 CH, 5 granules matin et soir ou 10 granules le soir. Il peut être un médicament de fond (voir chapitre) ; dans ce cas, il faut associer des doses hebdomadaires en 15 CH. • Arnica montana : médicament qui traite les pathologies déclenchées par un effort ou un traumatisme (symptôme dominant), que ce soit une douleur ou une névralgie. Posologie : en 9 CH, 5 granules quatre ou cinq fois par jour ou 10 granules matin et soir. • Ignatia amara : médicament de pathologies déclenchées par la contrariété ; le malade soupire facilement et a une sensation de boule dans la gorge, divers spasmes et il peut présenter une symptomatologie paradoxale. Ce peut être une douleur aiguë ou chronique ou une névralgie ; un signe est constant : « tout disparaît avec la distraction » (symptôme dominant). Il agit sur la cause (la contrariété) : c’est un médicament étiologique. Posologie : en 15 CH, 5 granules matin et soir. 2 Les névralgies cervico-brachiales chroniques Traitements identiques en aigu et en chronique, voir chapitre « Névralgies cervico-brachiales aiguës ». 3 Cas cliniques Premier cas clinique : une cervicalgie Mme Kawthar, comptable, consulte le 2 mai 2008 pour des douleurs cervicales et tout le long de la colonne avec une irradiation au niveau des membres supérieurs et le long des côtes. Son état s’est aggravé par des soucis, elle est améliorée par la distraction. À l’examen, il y a présence d’une douleur à la pression des vertèbres cervicales basses et d’une contracture musculaire le long de la colonne vertébrale. 36 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE Traitement : • Actea racemosa 9 CH : 5 granules matin et soir, • Hypericum perforatum 15 CH et Kalmia latifolia 15 CH : 4 granules de chaque au rythme des douleurs, • Ignatia amara 15 CH : 5 granules matin et soir, • Une pommade décontracturante. Commentaire : Actea racemosa : c’est un médicament fiable de cervicalgie basse et de dorsalgie haute (symptôme dominant). Hypericum perforatum et Kalmia latifolia : comme nous l’avons vu, médicaments de douleurs névralgiques radiculaires. Ignatia amara pour l’apparition et l’aggravation des symptômes par des soucis et l’amélioration par la distraction. On pourrait penser qu’Ignatia amara seul peut être efficace ; c’est possible. Pour moi, la présence de douleurs radiculaires et de douleurs à la pression des épineuses chez une comptable mérite l’association. Pour l’indication d’Ignatia amara dans le sens psychosomatique de ce médicament, la malade aurait donné une symptomatologie non systématisée, arbitraire. On pourrait aussi penser à Nux vomica s’il n’y a pas d’amélioration pour ce spasme le long de la colonne. Évolution : malade revue pour une autre consultation, elle fut rapidement améliorée. Deuxième cas clinique : névralgie à indication chirurgicale Le 4 décembre 2009, Mme Salma, 37 ans, vient en consultation. Elle présente une névralgie cervico-brachiale résistante à différents traitements et pour laquelle une date de chirurgie est déjà fixée (trois semaines après). Historique : en 2005, apparition d’une névralgie cervico-brachiale. Fin 2009, la douleur de l’épaule gauche est devenue invalidante. Une IRM est pratiquée (et montre la présence d’une discarthrose au niveau de C4-C5 et C5-C6, d’un rétrécissement du trou de conjugaison gauche en C4-C5 et d’une saillie discale paramédiane et foraminale), l’électromyographie montre la présence de signes électriques de C5-C6 gauche et des signes neurogènes dans le territoire moteur correspondant. À l’examen, elle présente une douleur punctiforme (provoquée par un appui d’une pulpe de doigt) au niveau de la face externe à l’épaule gauche irradiant vers le pouce et une douleur de la face antérieure du membre supérieur gauche. Parfois, elle ne peut pas faire d’effort (même prendre une bouteille), et peut faire tomber ce qu’elle prend avec sa main gauche. Elle présente également une douleur interscapulaire aggravée par l’effort. Elle est sous anti-inflammatoire ; sans ce traitement, elle a une douleur qui entraîne une agi- 37 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE tation du membre sans aucune position antalgique retrouvée. Elle présente une raideur matinale au niveau de toute la colonne. Le froid aggrave beaucoup ses douleurs. Traitement pour quinze jours : • Rhus toxicodendron 15 CH : 5 granules le matin au lever, • Kalium bichromicum 15 CH : 5 granules quatre fois par jour, • Hypericum perforarum 15 CH : 10 granules trois fois par jour, • Aconitum napellus 15 CH : 10 granules en cas d’exposition au froid, • Tuberculinum residuum 15 CH : 1 dose le vendredi, • Calcarea fluorica 15 CH : 1 dose le dimanche. Le traitement anti-inflammatoire sera arrêté progressivement. Commentaire : Rhus toxicodendron est indiqué pour le dérouillage matinal et la raideur en début de mouvement, Kalium bichromicum l’est pour la douleur punctiforme (douleur que l’on peut provoquer par l’appui d’une pulpe de doigt) ; ici, en plus, elle irradie à type de névralgie vers le pouce. Hypericum perforarum est indiqué pour les douleurs radiculaires et pour le traumatisme des nerfs (la posologie est ici plus importante que d’habitude, 10 granules trois fois par jour, vu la chirurgie programmée ; c’est un médicament de traumatisme des nerfs, je voulais avoir une efficacité rapide). Aconitum napellus est un médicament étiologique ; il trouve son indication car la malade est très aggravée par les coups de froid. Calcarea fluorica et Tuberculinum residuum sont prescrits comme traitements de fond de l’arthrose (en se basant sur la physiopathologie, ils ont une action sur l’arthrose). Deux autres médicaments pouvaient être prescrits, Arnica montana (pour l’aggravation par l’effort) et Actea racemosa (typique de la localisation), mais la malade voulait un minimum de médicaments. Évolution : Mme Salma a été hospitalisée à la date prévue ; avant de l’opérer, le chirurgien a voulu refaire le point : devant la disparition des douleurs, il a annulé l’opération. Consultation le 29 octobre 2010 (dix mois après) : Amélioration depuis la dernière consultation. Elle a pratiqué des séances de rééducations, les douleurs sont non gênantes depuis la consultation précédente. Depuis l’apparition de la pluie (ce mois-ci), elle présente une contracture des muscles postérieurs du cou, avec irradiation vers les épaules, et un dérouillage matinal. La nuit, elle présente une douleur sans aucune position antalgique retrouvée. Traitement : • Rhus toxicodendron 15 CH : 10 granules le matin avant de se lever, • Actea racemosa 15 CH : 5 granules matin et soir, • Causticum 15 CH : 5 granules matin et soir, • Dulcamara 15 CH : 10 granules le soir, • Hypericum perforatum 15 CH et Kalmia latifolia 15 CH : 4 granules de chaque au rythme des douleurs, 38 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE • Radium bromatum 9 CH : 5 granules au coucher. S’il n’y a pas d’amélioration, penser à Natrum sulfuricum et Cuprum metallicum. Commentaire : Actea racemosa est indiqué pour la douleur interscapulaire avec contracture, Causticum est indiqué pour la sensation de tendons trop courts, Dulcamara l’est pour l’aggravation par l’humidité (la pluie), Hypericum perforatum et Kalmia latifolia pour les douleurs de névralgies linéaires et Radium bromatum pour la douleur nocturne avec agitation sans position antalgique retrouvée (voir chapitre « Dictionnaire »). Discussion : Dans ce cas, l’indication chirurgicale était posée (à juste titre) pour des signes paralysants, des douleurs invalidantes résistantes aux traitements classiques, concordant avec les signes de l’IRM et les signes électriques. L’homéopathie, en appliquant ses principes, s’est avérée efficace sur les douleurs, même sur les signes de début de paralysie du nerf, et la chirurgie a pu être annulée. Une notion importante est à prendre en compte, c’est qu’il est rare qu’un cas clinique donne une réponse directe en une consultation. La devise à retenir est que l’homéopathie mérite d’être essayée dans les névralgies à indication chirurgicale, même dans des cas théoriquement voués à l’échec, puisqu’elle n’expose pas à un risque. Cependant, le résultat n’est aucunement garanti (pas systématique). 4 Le syndrome subjectif des traumatisés crâniens C’est un syndrome qui apparaît après un important traumatisme crânien (ou de la colonne cervicale), sans lésions anatomiques décelables. C’est un syndrome bien répertorié et sans traitement possible en allopathie. Les malades présentent une sensation de pseudo-vertige, de céphalées, parfois une insomnie et une asthénie (le bilan est négatif). Ce protocole est donné par le Dr Jacques Jouanny (Notions essentielles de matière médicale homéopathique). Il préconise : Arnica montana 30 CH : 1 dose par semaine en alternance avec Natrum sulfuricum 30 CH et Hypericum perforatum 30 CH. Dans ma pratique, j’ai juste adapté le protocole. En aigu : pour prévenir la survenue de ce syndrome, je prescris 1 dose par jour des trois médicaments, pendant trois jours ; c’est simple et mérite l’indication. En chronique : lorsque c’est un traumatisme ancien, j’ajoute à la prescription hebdomadaire 5 granules journaliers à la même dilution, ou bien je double le nombre de doses par semaine. C’est une méthode qui permet d’écourter la durée du traitement, d’obtenir des résultats plus rapides. Cas cliniques Premier cas clinique : un traumatisme ancien de la colonne Le 28 avril 1998, Mme Emna, 42 ans, consulte pour une douleur du dos et de l’hémi- 39 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE 3 La polyarthrite rhumatoïde Penser à une polyarthrite rhumatoïde s’il existe une raideur matinale d’une durée supérieure à 30 minutes, une présence d’arthrite de trois articulations au moins, touchant les poignets ou les métacarpophalangiennes et les interphalangiennes proximales des mains, avec une douleur à la pression des métatarsophalangiennes et une atteinte symétrique avec une évolution des symptômes de plus de six semaines. Dans ces cas, il faut un bilan biologique (facteur rhumatoïde Ig M, anticorps anti-CCP, vitesse de sédimentation, protéine C réactive) et un bilan radiologique. J’ai peu d’expérience dans la polyarthrite rhumatoïde (moins fréquente en Tunisie ?). Le traitement homéopathique est associé aux traitements classiques dans le but d’améliorer le confort du malade, et l’homéopathie pourra prendre la place d’un traitement antiinflammatoire. Selon la symptomatologie, nous pouvons prescrire les médicaments de polyarthrites cités, Rhus toxicodendron, Calcarea fluorica et Tuberculinum residuum. Voici quelques médicaments qui ont dans leurs indications la polyarthrite rhumatoïde : • Fluoricum acidum : médicament d’arthralgies dans la polyarthrite rhumatoïde. Améliorée par le froid, les applications froides et par le mouvement prolongé, la symptomatologie est aggravée par la chaleur et l’immobilité. Il y a production d’hyperostose, d’exostose, d’ostéophytose. Posologie : en 15 ou 30 CH, 5 granules par jour. • Polygonum aviculaire : médicament d’arthrose interphalangienne distale, avec déformation ; ce peut être un médicament de polyarthrite rhumatoïde. Posologie : en 4 ou 5 CH, 5 granules matin et soir. • Actea spicata : médicament ayant une action élective sur les articulations du poignet et les articulations interphalangiennes proximales des doigts. Médicament de polyarthrite rhumatoïde. Les articulations sont rouges avec un œdème chaud. Il y a des déformations articulaires avec l’évolution. Les douleurs sont aggravées par la moindre pression (peut entraîner des cris), le mouvement, les changements de temps, l’humidité. Posologie : en 4 ou 5 CH, 5 granules deux à trois fois par jour. • Medorrhinum : médicament de rhumatisme dégénératif ou inflammatoire des grosses articulations, amélioré en bord de mer, par le mouvement continu et par temps humide. Arthrose située au niveau des grosses articulations (genoux, hanches, épaules, le rachis lombaire et les sacro-iliaques). Posologie : 1 dose en 15 CH par semaine. • Sulfur : médicament d’arthrites inflammatoires quelles que soient les articulations atteintes, principalement l’épaule, le poignet, la métacarpophalangienne du pouce, le genou. Classiquement dans les rhumatismes évoluant des extrémités vers les racines. Il existe une périodicité plus ou moins régulière et/ou une alternance des manifestations pathologiques. 72 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE Posologie : en 9 CH, 5 granules par jour ou tous les deux jours, en observant des fenêtres thérapeutiques, espacer les prises en se basant sur les rechutes, selon l’amélioration. Et/ou en doses, 1 dose en 9 ou 15 CH par semaine. 4 Cas cliniques de polyarthrites Premier cas clinique : une polyarthrite Le 21 septembre 1998, Sofiane, 27 ans, consulte pour une polyarthrite évoluant depuis un an, il est sous anti-inflammatoires lors des poussées. Les poussées sont invalidantes avec œdèmes migrant au niveau des articulations des mains, des coudes, des épaules et des genoux, il n’a pas les résultats de ses explorations. Interrogatoire : les poussées sont cycliques et migrantes. Lors des poussées, il a une impotence fonctionnelle ; les douleurs et l’œdème l’empêchent de travailler. Il est venu essayer un traitement par homéopathie. L’examen clinique retrouve un œdème au niveau de quelques articulations interphalangiennes, le malade se plaint de sensations de brûlures nettement améliorées par les applications froides. L’œdème est aggravé la nuit (sans horaires précisés), et par le moindre travail physique. Il signale être très méticuleux et avoir tendance à la suppuration. Traitement pour un mois : • Apis mellifica 9 CH et Bryonia alba 15 CH : 4 granules de chaque au rythme des douleurs, • Sulfur iodatum 9 CH : 5 granules matin et soir. Et arrêter toute prise systématique d’anti-inflammatoire et antalgique, sauf ponctuellement s’il y a persistance de douleurs ou de la gêne (noter le nombre de prises). Commentaire : Premier cas de polyarthrite, la technique n’est pas maîtrisée (un suivi plus rapproché aurait donné de meilleurs résultats). La plus grande gêne est due à l’œdème d’où association d’Apis mellifica pour l’œdème avec sensation de brûlure améliorée par le froid et Bryonia alba pour l’œdème avec sensation de douleur aggravée par le moindre mouvement, Sulfur iodatum : c’est un médicament également anti-inflammatoire, pour les poussées inflammatoires arthrosiques, donné en granules deux fois par jour pour une action plus rapide (j’aurais dû associer des doses en traitement de fond). Dans cette prescription, le but n’est pas de donner la majorité des antiœdémateux, chaque médicament a son indication et est prescrit pour la présence de ses propres modalités. J’ai choisi de ne donner qu’un traitement symptomatique, le soulager d’abord, puis je passerai au traitement de fond. Le 18 novembre 1998 (deux mois après), il note peu d’amélioration, traitement arrêté il y a au moins un mois. Il a un peu moins d’œdème et n’a plus la douleur au moindre mouvement. Il y a une aggravation à l’effort, s’il s’énerve et par l’humidité. Il signale un dérouil- 73 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE lage matinal (ce sont des symptômes nouveaux : c’est l’évolutivité de la symptomatologie). La prise, ou pas, d’anti-inflammatoires n’est pas précisée. Il signale qu’en fait il n’est ni frileux ni méticuleux : les malades qui ne sont pas habitués à l’interrogatoire homéopathique peuvent donner des réponses sans réfléchir. D’ailleurs, je leur demande de rectifier leurs réponses s’ils se sont trompés à la consultation suivante (il faut dire que nous leur posons des questions inhabituelles !). Il préfère le salé, est aggravé au bord de la mer (il n’est pas bien), a un herpès récidivant et il est aggravé par la consolation. Traitement pour un mois : • Arnica montana 9 CH et Apis mellifica 9 CH : 4 granules de chaque quatre ou cinq fois par jour s’il y a un œdème, • Rhus toxicodendron 15 CH : 5 granules trois fois par jour, • Natrum sulfuricum 15 CH : 5 granules le soir, • Natrum muriaticum 15 CH : 1 dose par semaine. Commentaire : Arnica montana pour l’aggravation par l’effort et l’œdème occasionné par l’effort. Bryonia alba a été arrêté car il n’y a plus d’aggravation par le moindre mouvement. Rhus toxicodendron pour le dérouillage, Natrum sulfuricum comme Dulcamara : traitement préventif et curatif pour la sensibilité à l’humidité. Natrum muriaticum : traitement de fond de ce malade. Les signes qui orientent vers ce médicament sont la périodicité des manifestations, l’aggravation au bord de la mer, l’herpès récidivant et l’aggravation par la consolation. La prise de ce médicament entraînera parallèlement la disparition de l’herpès. Note : on pourrait penser à Ignatia amara pour l’aggravation lorsqu’il est énervé. Le 3 décembre 1998 (quinze jours après), il y a une amélioration de l’œdème ; il signale une douleur la nuit avec agitation et impossibilité de trouver une position antalgique. Traitement pour deux mois : • Radium bromatum 9 CH : 5 granules au coucher, • Rhus toxicodendron 15 CH : 5 granules trois fois par jour, • Arnica montana 9 CH et Apis mellifica 9 CH : 4 granules de chaque si œdème, • Natrum muriaticum 15 CH : 1 dose par semaine. Commentaire : Radium bromatum pour cette douleur nocturne avec agitation à la recherche d’une position antalgique non retrouvée ; Arnica montana et Apis mellifica uniquement si apparition de l’œdème ; Rhus toxicodendron est continué pour son action au niveau des tissus périarticulaires qui nécessite un traitement plus prolongé. Natrum muriaticum est le traitement de fond, à continuer pour éviter les récidives. Le 27 mars 2002 (après trois ans et trois mois) : le traitement a été pris pendant deux mois, il y a eu une rémission pendant neuf mois, puis reprise des poussées de douleurs et de l’œdème, des poignet et des doigts, des épaules et des genoux (il n’a pas pris Arnica montana et Apis mellifica). Il note parfois un dérobement des genoux, décrit une sensation de brûlure améliorée par la glace, n’a plus de dérouillage ; il a une limitation des mouvements et une douleur toute la journée en poussée. 74 PRATIQUE CLINIQUE EN HOMÉOPATHIE : LA RHUMATOLOGIE Traitement pour deux mois : • Arnica montana 9 CH et Apis mellifica 9 CH : 4 granules de chaque si douleur, • Kalium carbonicum 9 CH : 5 granules deux fois par jour, • Sulfur iodatum 9 CH : 5 granules par jour, • Natrum muriaticum 15 CH : 1 dose par semaine. Commentaire : Arnica montana et Apis mellifica idem ; Kalium carbonicum : pour la sensation de dérobement des genoux. Sulfur iodatum en granules pour une efficacité plus rapide (j’aurais dû associer les doses). Un médicament a sa place, avec l’expérience que j’ai acquise après, pour sensation de brûlure améliorée par la glace : c’est Ledum palustre (je l’avais pourtant noté sur la fiche). Suivi : octobre 2007, des nouvelles par sa femme ; son mari est guéri depuis le dernier traitement et ils sont reconnaissants à l’homéopathie. Deuxième cas de polyarthrite Mme Nedra, née en 1947, consulte le 19 janvier 2010 pour une arthrose évoluant depuis vingt ans avec migration articulaire. Elle a eu plusieurs infiltrations à différentes articulations. Elle présente une épicondylite au niveau du coude droit. Les articulations sont douloureuses. Actuellement, elle a un œdème de la cheville. Son père présentait le même type de rhumatisme migratoire. Cette polyarthrite n’est pas étiquetée, les bilans effectués sont négatifs (son fils, professeur de médecine, me l’a amenée pour une solution homéopathique). Elle présente une douleur du dos irradiant vers les membres inférieurs surtout le gauche. Elle ne peut se retourner dans son lit sans s’asseoir auparavant. Elle a une douleur de l’épaule droite. Elle présente, la nuit, une douleur avec agitation sans position antalgique retrouvée, une douleur d’épicondylite provoquée par l’appui d’une pulpe de doigt. Elle se plaint d’un dérouillage matinal. Elle a une douleur interscapulaire « comme si un poulpe y était accroché » dessus. Elle ne peut dormir sur le côté gauche car cette position entraîne une sensation de brûlure et une sensation d’être piquée par une perceuse. Elle est aggravée par l’effort et lorsqu’elle s’énerve et là, elle soupire. En poussée, elle présente des douleurs aggravées par le moindre mouvement au niveau du dos. Elle a les pieds très chauds et doit les sortir de sous les couvertures en plein hiver. Elle préfère la solitude, pleure facilement, et a une tendance dépressive. Par ailleurs, elle est très méticuleuse, avec un horaire d’aggravation des douleurs entre minuit et 1 heure. Elle présente des verrues plantaires qui la gênent, et elle a une tendance obsessionnelle. Elle n’a pas de troubles de transit. Elle n’aime pas les aliments acidulés, n’est pas autoritaire. Elle n’a pas tendance à la suppuration. Elle est sous anti-inflammatoires, antalgiques et anxiolytiques ; malgré ce traitement, elle fait des poussées et a les douleurs décrites. À l’examen, il y a un œdème du genou et de la cheville gauches. Le mouvement de flexion du genou gauche est limité à 70°. Au niveau de l’épaule droite, il y a limitation de l’antéversion et de la rétroversion. 75 Pratique clinique en Homéopathie Rhumatologie Les douleurs rhumatismales sont très courantes dans la pratique médicale quotidienne. Leur prise en charge par l’homéopathie devient simple en suivant les conseils donnés par cet ouvrage. À mettre dans toutes les mains et à utiliser sans modération. » Dr Antoine Demonceaux Ni schématique ni élitiste ou encyclopédique, cette collection propose à chacun de découvrir comment une pratique clinique rigoureuse et attentive alliée à une bonne connaissance de la matière médicale peut permettre d’atteindre de bons résultats. Ce premier livre sur la rhumatologie est une parfaite illustration de cet objectif et il faut remercier le Dr kanoun pour la clarté et l’enthousiasme de son exposé Dr Jacques Boulet L’auteur : Dr Kanoun Bejar Firdaws, diplômée de la faculté de Toulouse (1989), médecin homéopathe depuis 1992 à Sfax, Tunisie. 24 € ISBN : 978-2-915668-65-0 Code article : K03 CEDH l’enseignement de l’homéopathie clinique
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