XVIII - DIABETE ET GROSSESSE

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XVIII - DIABETE ET GROSSESSE
XVIII - DIABETE ET GROSSESSE
1 - INTRODUCTION
Parmi les adaptations de l’organisme maternel à la grossesse, on sait qu’il se constitue
progressivement un état d'insulino-résistance en relation principalement avec la sécrétion d'hormone lactogène
placentaire mais aussi d'autres hormones (oestrogènes, progestérone, cortisol, GH, ...)
Cette insulinorésistance permet l’épargne des nutriments pour le compartiment fœtal et s’installe nettement à
partir de la 20ème semaine d’aménorrhée.
Ceci explique d’une part les augmentations de besoin en insuline considérables constatées à partir du
5ème mois de gestation chez les femmes ayant un diabète prégestationnel, et l’apparition d’un diabète gestationnel
chez celles qui auraient pour une raison quelconque (ATCD familiaux, obésité, ethnie) une insulinopénie relative
préalable.
L'hyperglycémie chronique fait de la grossesse une grossesse "à risques".
Dans le diabète gestationnel, les nouveaux nés sont exposés principalement au risque de macrosomie,
et à ses conséquences (dystocie des épaules, lésion du plexus brachial, cardiomyopathie hypertrophique).
L'objectif du traitement du diabète est donc de limiter les excursions glycémiques pourvoyeuses de macrosomie.
Dans le diabète connu avant la grossesse, il existe une incidence accrue des malformations directement
liée à un équilibre insuffisant pendant la période d’embryogénèse
Ce risque est 2 à 6 fois supérieur à celui des enfants issus de la population générale, corrélé à l’HbA1c
au moment de la conception, et à la précocité de la prise en charge.
Ce risque est évitable, et la prévention repose sur la prise en charge pré conceptionnelle soigneuse de toutes les
patientes présentant un diabète, type 1 ou type 2.
2 - DIABETE GESTATIONNEL
2-1 - DÉFINITION
Selon l’OMS, il s'agit d’un diabète diagnostiqué en cours de grossesse (le plus souvent au 6ème mois
et au delà). C’est en fait une pathologie d’ « adaptation » de la sécrétion beta langerhansienne à une demande
accrue.
L’entité de diabète gestationnel recouvre en fait plusieurs réalités :
-6% sont en fait des diabètes type 1 apparaissant pendant la grossesse, révélés par celle-ci. En ce cas,
on observe en général une rémission de quelques mois après la grossesse, puis une réapparition dans l’année
suivante. Le dépistage par la recherche de anticorps anti GAD peut permettre de repérer ces patientes, d
-il s’agit souvent (30% des cas environ) d’un mode d’entrée dans le Diabète type 2, chez des femmes
ayant des antécédents familiaux de diabète, un surpoids ou une obésité. Les glycémies peuvent se normaliser
après l’accouchement, mais redeviennent pathologiques dans les 5 ans qui suivent en l’absence de prise en
charge adaptée.
-la révélation d’un diabète type MODY (3 % environ) n’est pas exceptionnelle. Il s’agit de diabètes
modérément hyperglycémiques, non cétogènes, monogéniques, autosomiques dominant. L’histoire familiale est
assez évocatrice. En ce cas, il existe un risque de retard de croissance intra utérin si l’enfant est porteur de la
mutation, de macrosomie s’il est indemne.
-enfin, un certain nombre de femmes ne présentent pas de facteurs de risque particuliers, et
développent cette pathologie transitoire.
Comme on le voit, l’enjeu de la prise en charge des diabètes gestationnels est donc double : éviter les
complications materno-fœtales, et permettre de repérer les femmes à risque de Diabète ou présentant déjà des
troubles méconnus de la glycorégulation ( 40% environ des DG)
2-2 - DIAGNOSTIC
Concernant le dépistage systématique par des tests de charge orale en glucose, il n'existe
actuellement pas de consensus que ce soit sur le test de dépistage utilisé ou la population qui doit en bénéficier. Il
est cependant recommandé de réaliser un dépistage universel en deux temps :
-test de O’ Sullivan avec 50g de glucose, et glycémie T0 et T60’. Si la glycémie à jeun est supérieure à
1,05, ou la glycémie post charge supérieure à 2g/l, le diagnostic est posé. Normale <1,3g/l.
-HGPO 100g de glucose pour confirmer si le test de O’ Sullivan n’est pas conclusif ( glycémie à jeun
entre 0,9 et 1,05 g/l, et /ou post charge entre 1,3 et 2g/l) . Normales <0,95/1,85/1,55/1,4g/l.
Certaines équipes préfèrent utiliser un dépistage en un temps, avec une HGPO 75g (OMS). Le
problème est alors le seuil retenu. En effet, si on retient des critères stricts (moins de 1g/l à jeun et de 1,40g/l à
T120), on dépiste sans doute des patientes à tort, induisant peut-être des conduites iatrogènes. Si on s’en tient
aux chiffres retenus hors grossesse pour le diagnostic de diabète (>1,26g/l à jeun, > 2g/l en post charge), la
morbidité fœtale va être très augmentée.
Une étude récente (HAPO study) a permis de collecter les résultats de 25000 HGPO réalisées dans plusieurs
centres, et a montré que la macrosomie, le risque de césarienne, d’hypoglycémie néonatale, augmentaient de
manière linéaire avec l’augmentation des glycémies. Cette étude a également permis de savoir que dans une
population multiethnique de femmes d’âge moyen 29 ans, et d’IMC moyen de 27,4 kg/m2, seulement 11%
avaient une glycémie à jeun supérieure à 0,89g/l, et les glycémies moyennes étaient de 0,80, 1,34 et 1,11g/l à
T0 ; T60, T120.
Ces valeurs normales relativement basses confirment le fait que l’hyperinsulinisme de la grossesse aboutit à une
diminution des glycémies, et que les seuils retenus pour le diagnostic et la prise en charge du DG doivent rester
assez stricts.
2-3 - EPIDÉMIOLOGIE
La prévalence du diabète gestationnel est très variable selon les études en raison de l'hétérogénéité des
critères mais aussi selon l'origine ethnique des populations. En France, 3 à 6 % des femmes enceintes
présenteraient un diabète gestationnel, soir autour de 30 à 40000 femmes par an.
2-4 - PRONOSTIC
1 - Risques foetaux
Dans le diabète gestationnel, le risque de malformations est faible car les anomalies de la
glycorégulation sont en principe absentes au premier trimestre de la grossesse. Réserve faite des « DG »
apparaissant précocement (avant 10SA), qui sont souvent des diabètes type 2 passés inaperçus et doivent être
traités comme tels.
Une des principales conséquences de l'hyperglycémie maternelle est représentée par la macrosomie
foetale et ses répercussions obstétricales (dystocie, en particulier dystocie des épaules car la macrosomie est
dysharmonieuse, faciotronculaire). Elle est secondaire à l'hyperinsulinisme foetal stimulé par l'hyperglycémie
maternelle.
Le risque d’excès de liquide et d’hydramnios (avec comme conséquence principale un accouchement prématuré)
est augmenté en cas de mauvais équilibre glycémique.
Cet hyperinsulinisme expose également le nouveau né à un risque d'hypoglycémies sévères à la naissance
d'autant que ses réserves hépatiques en glycogène sont faibles. L'hypoglycémie survient en général dans les 12
premières heures de vie et est d'autant plus sévère que le diabète a été mal équilibré pendant la grossesse et
surtout à l'accouchement. Enfin, la cardiomyopathie hypertrophique asymétrique (épaississement du septum
interventriculaire et de la paroi postérieure du VG) est une complication fréquente des diabètes mal équilibrés.
Elle est transitoire, traitée par beta bloquants en cas d’insuffisance cardiaque.
A long terme, on sait que la macrosomie fœtale est un facteur de risque d’obésité de l’enfant.
2 - Risques maternels
A court terme, le DG est associé à une incidence augmenté de l’HTA gravidique, même après ajustement sur
l’IMC.
Les complications obstétricales peuvent laisser des séquelles, comme les déchirures périnéales, et les
césariennes, plus fréquentes en cas de DG.
A plus long terme, le DG est associé à une incidence accrue du syndrome métabolique, et du diabète type 2.
Il faut donc être particulièrement vigilant dans les situations suivantes :
DG apparu précocement (avant 10 à 15 SA)
Présence d’anticorps anti GAD
Insulinothérapie nécessaire précoce e/ou à forte dose
ATCD familiaux de diabète type 2
2-5 – TRAITEMENT DU DIABETE GESTATIONNEL
Cette pathologie de la grossesse survient souvent chez des femmes qui ne connaissaient pas le diabète.
Il va leur falloir très rapidement modifier leur mode de vie, et comprendre les enjeux de la prise en charge. Il
convient de trouver la bonne attitude entre la banalisation (« ce n’est pas grave, vous risquez seulement un gros
bébé »), et la dramatisation (parler de risque de mort in utero, par exemple, affole inutilement les femmes).
La prise en charge du diabète gestationnel implique une étroite collaboration entre l'obstétricien, le diabétologue,
les sages-femmes et les diététiciennes, et doit être rapide dès le diagnostic posé.
La période de la grossesse étant très propice à une éducation thérapeutique, étant donné l’excellente réceptivité
des futures mères aux messages favorables à la santé de leurs enfants, il est conseillé de les intégrer à des
séquences de formation sur le DG, séances multiprofessionnelles leur permettant de comprendre les mécanismes,
les enjeux, et les moyens de traitement du DG. Sont abordés également les aspects de risque ultérieur de diabète,
et d’obésité de l’enfant.
Ces séquences sont organisées selon les régions, au sein des maternités, dans le cadre de réseaux de soins, ou
autour d’équipes libérales.
a) Les objectifs
Les objectifs glycémiques sont ceux de la normoglycémie. La glycémie à jeun doit être inférieure à
0,95 g/l (5,3 mmol/l) et la glycémie post-prandiale (2heures après le début du repas) <à 1,20 g/l (6,7 mmol/l).
Certaines équipes proposent de contrôler la glycémie post-prandiale 1 heure après le repas et de tenter de la
maintenir inférieure à 1,40 g (7,8 mmol/l), ce qui est plus cohérent avec le pic de glycémie chez la femme
enceinte (repéré sur des holters glycémiques), qui est à 70 mn environ après le début du repas. L'apprentissage de
l'autosurveillance glycémique sera réalisé d'emblée, la glycémie capillaire devra être contrôlée de manière
pluriquotidienne (au moins 4 par jour).
b) Les mesures hygiéno-diététiques
Elles sont à instaurer dès le diagnostic. Elles comportent :
- une suppression des sucres rapides,
- un fractionnement alimentaire en 6 prises avec collations à 10 h, 16 h et 22 h,
- un apport calorique adapté au poids (1600 à 2000 kcalories/jour), et à l’enquête alimentaire,
- un apport en hydrates de carbone d'au moins 50 % de la ration calorique totale.
Même chez les patientes obèses, la restriction calorique n’est pas de mise (elle est cétogène), et l’amaigrissement
n’est pas recherché.
c) L'activité physique
La pratique d'une activité physique régulière adaptée à la grossesse est recommandée pour améliorer
l'équilibre glycémique (marche, natation, aquagym), en accord avec l’obstétricien.
d) L'insulinothérapie
Si les objectifs glycémiques ne sont pas atteints rapidement (8 jours) malgré les prescriptions
diététiques et d'hygiène de vie sus citées, la mise en route d'une insulinothérapie selon les résultats de
l’autosurveillance. Si les glycémies à jeun restent normales (la plupart du temps chez les femmes de poids
normal), on utilise de l’insuline rapide (les analogues de l’insuline rapide, lispro° et aspart° ont depuis 2006
l’AMM chez la femme enceinte). si les glycémies à jeun sont élevées (fréquent en cas d’obésité), il faut alors
avoir recours à de la NPH (pas d’AMM en 2008 pour les analogues lents Detemir° et Glargine°).
Les doses sont adaptées en fonction de l’autosurveillance, selon des algorithmes remis aux patientes,
pour obtenir aussi rapidement que possible une normalisation des chiffres.
e) La surveillance
Un suivi diabétologique rapproché (tous les 15 jours) dès le diagnostic posé est souhaitable
La surveillance obstétricale sera précautionneuse car il s'agit d'une grossesse à risques. Les paramètres
biologiques permettant de dépister une pré éclampsie seront surveillés : uricémie, albuminurie. La tension
artérielle sera également régulièrement contrôlée.
Un contrôle des biométries fœtales à la fin du 8ème mois est nécessaire, car il peut être nécessaire de
déclencher l’accouchement en cas de macrosomie (périmètre abdominal>360mm). Il permet également de
surveiller le bien être fœtal par le score biophysique de Manning et la quantité de liquide amniotique.
f) L'accouchement et le post-partum
L'équilibre glycémique doit être satisfaisant au moment de l'accouchement afin d'éviter la survenue
d'hypoglycémies néonatales chez l'enfant. L'insulinothérapie sera stoppée après l'accouchement mais une
surveillance glycémique immédiate et à distance sera réalisée avec cycles glycémiques en postpartum et HGPO
75g 3 mois après l’accouchement.
2-6 - CONCLUSION
Le diabète gestationnel constitue une pathologie fréquente qui doit être systématiquement dépistée et
prise en charge sur le plan thérapeutique afin de diminuer la morbidité foeto-maternelle à court terme et
d'identifier une population de femmes et d'enfants à risque de diabète et/ou d'obésité.
Les équipes obstétricale et diabétologique s'accordent sur la nécessité d'une stratégie de dépistage et de prise en
charge afin de limiter le diagnostic tardif pourvoyeur de l’essentiel des complications. .
3 - DIABETE CONNU AVANT LA GROSSESSE
3-1 - INTRODUCTION
L'incidence des cas de grossesse diabétique officiellement enregistrés en Europe varie de 4 à 15 pour 1
000 grossesses. Jusqu’aux années 2000, il s’agissait principalement de grossesses survenant chez des diabétiques
type 1, ou porteuses d’un MODY. Actuellement, du fait de l’augmentation de l’incidence de l’obésité, et de l’âge
maternel plus avancé lors des grossesses, nous suivons autant de patientes diabétiques type 2 que de type 1.
La grossesse chez la femme diabétique est une grossesse à risque dont le pronostic est lié au degré de
contrôle glycémique de la conception jusqu’à l’accouchement, à la précocité et à la qualité de la prise en charge
médicale pluridisciplinaire pendant toute la grossesse. Il est donc impératif d'informer toute patiente diabétique
en âge de procréer de la nécessité d'intensifier la prise en charge du diabète avant de débuter une éventuelle
grossesse, et d’utiliser une contraception efficace. La grossesse doit être préparée et programmée.
3.3-.LA PREPARATION PRE CONCEPTIONNELLE
a) Le bilan des complications
Il est souhaitable de réaliser un bilan rénal, ophtalmologique et cardiaque avant d'autoriser la mise en
route d'une grossesse. Si ce bilan n'a pu être réalisé avant la conception, il convient de le programmer le plus
rapidement possible au début de la gestation. A noter que la grossesse ne contre-indique absolument pas la
réalisation de l'angiographie à la fluorescéine ni une éventuelle photocoagulation. Il est tout de même préférable
de réaliser les séances laser avant le début de la grossesse. Une rétinopathie stabilisée par laser, n'est plus une
contreindication à une grossesse.
Selon l'ancienneté du diabète et les facteurs de risque vasculaire associés, un bilan cardiologique peut
être nécessaire (ECG d'effort, bilan TA, ....).
Dans le cas de diabètes multicompliqués, une réunion multidisciplinaire est organisée, et un courrier est remis au
couple, et à ses soignants, comportant l’exposé de la situation clinique, les contre indications éventuelles
(temporaires, pour une rétinopathie en cours de traitement par exemple), ou définitives (en principe, les
coronaropathies, les insuffisances rénales sévères), et les précautions à prendre, le suivi proposé détaillé.
b)L’optimisation glycémique
1. Chez une patiente diabétique de type 1
Il faut s'attacher à optimiser l'équilibre glycémique grâce la plupart du temps à une multiplication du
nombre d'injections insuliniques (6 par jour) ou mise en place d'une pompe à insuline portable. L'augmentation
de la fréquence des surveillances capillaires à 6 à 7 contrôles par jour est nécessaire. Le régime alimentaire
fractionné en 6 prises sera conseillé. Les objectifs sont : glycémie à jeun doivent <0,9 g/l et < 1,2 g/l en postprandial. L 'HbA1C doit être inférieure à 6,5 %. La contraception pourra alors être stoppée.
Dans certains cas, le « feu vert » peut être donné à un taux d’HbA1c plus élevé, lorsqu’il est très difficile
d’obtenir un équilibre parfait (diabètes anciens, neuropathies). Notons cependant qu’un point d’HbA1c
représente un doublement de l’incidence des malformations ;
2. Chez une patiente présentant un diabète de type 2
L'arrêt des médicaments antidiabétiques oraux, non indiqués actuellement et le renforcement des
mesures diététiques et de l'activité physique peuvent permettre un équilibre glycémique correct dans un Diabète
type 2 débutant. Le plus souvent, une insulinothérapie en 2 ou 3 injections sera débutée et après normalisation de
l'équilibre glycémique, la grossesse sera autorisée, selon les mêmes critères que dans le cadre d’un diabète de
type 1. Le risque d’hypoglycémie étant moins important, on peut être plus exigeant et viser une HbA1c<6% à la
conception.
Actuellement, un débat existe dans la communauté diabétologique autour des antidiabétiques oraux. Aucun n’a
actuellement d’AMM pendant la grossesse en Europe. Des études ont été menées avec le Gliburide, qui ne
franchit pas le placenta, et, dans le DG, donne de bons résultats glycémiques. La Metformine, dont l’utilisation
serait intéressante chez les patientes obèses, ayant de gros besoins en insuline, franchit le placenta, mais n’est pas
tératogène. Une récente étude montre son innocuité sur l’enfant à la naissance. Des études de suivi des enfants à
3 ans sont attendues avec impatience pour envisager une utilisation et un élargissement de l’AMM.
3-4 – LA PRISE EN CHARGE DE LA PATIENTE DIABETIQUE ENCEINTE
La normoglycémie reste l’objectif pendant toute la grossesse
Il faut cependant prendre garde aux hypoglycémies éventuellement sévères, chez les diabétiques type 1.
plusieurs raisons à cela : modification des hormones de contre régulation au premier trimestre, transfert actif vers
le compartiment fœtal, troubles digestifs, surcorrection insulinique chez une patiente mal équilibrée. Celles-ci
peuvent être limitées par l’emploi d’une pompe, qui permet, en particulier la nuit, de « coller » mieux aux
besoins physiologiques, et par des contrôles très fréquents. L’utilisation de mesure continue du glucose trouve là
sans doute une très bonne indication.
Pour les diabétiques type 1 avant la gestation, les besoins insuliniques baissent d’environ 10% au
premier trimestre pour ré-augmenter au second et être très importants au troisième trimestre (environ
1,5U/kg/jour sont nécessaires à la fin de la grossesse). En post-partum immédiat, il est nécessaire de reprendre
les doses préconceptionnelles dès l’expulsion placentaire.
Dans le diabète type 2, l’insulinorésistance caractéristique de la maladie va être aggravée par celle de
la grossesse. C’est pourquoi des doses quotidiennes de 200, voire 300 unités par jour, ne sont pas rares. Ce qui
peut poser des pro blèmes pratiques d’administration.
Pour les diabétiques non insulinotraitées bien équilibrées par le régime et l'activité physique pendant le
premier trimestre, la mise en route d'une insulinothérapie est souvent nécessaire en milieu de grossesse et jusqu'à
l'accouchement.
3-5 - SURVEILLANCE
a) Le suivi diabétologique
La consultation diabétologique doit être au moins mensuelle. Elle comporte, outre les conseils
d'adaptation des doses nécessaires au vu des résultats portés sur le carnet d'autosurveillance glycémique, un bilan
sanguin avec dosage de l’HbA1c qui reflète l'équilibre glycémique moyen sur les 2 derniers mois.
Certains utilisent le dosage de le fructosamine, qui, en raison de sa moindre inertie, semble trouver ici une
indication logique. Cependant, ce dosage est pris en défaut chez les femmes obèses, ce qui peut être le cas,
surtout en cas de diabète type 2, d’autre part, la technique de dosage de l’HbA1c est beaucoup plus standardisée.
Le dosage de la fructosamine est un recours intéressant chez les patientes ayant une anomalie de l’hémoglobine
perturbant son électrophorèse. Rappelons par contre que l’HbA1c d’une femme enceinte sans diabète est de 4,5 à
5%, inférieure donc à celle de la population générale.
Pendant la grossesse, il peut être nécessaire d’administrer des corticoïdes, pour accélérer la maturation
pulmonaire fœtale, en cas d’accouchement prématuré. Cela va déséquilibrer le diabète pendant trois jours (après
la première injection, jusqu’à 48h après la seconde , et peut entrainer une cétose, voire une acidocétose, surtout
lorsqu’on adjoint (en cas de menace d’accouchement prématuré), une tocolyse par beta mimétique). Il faut donc
adapter le traitement insulinique, éventuellement passer transitoirement à une perfusion continue intraveineuse,
pour corriger ce déséquilibre. On préfèrera si possible la tocolyse par inhibiteurs calciques, ou par antagonistes
des récepteurs de l’ocytocine.
Au moment de l'accouchement enfin, il faut s'attacher à apporter insuline et glucose chez une patiente
qui se trouve à jeun et qui devra alors bénéficier de perfusions de glucosé à raison de 150g de glucose /jour
environ. La dose d’insuline de fin de grossesse est maintenue jusqu’à la délivrance, apportée en continu (pompe
sous cutanée, seringue IV) ou bien en discontinu.
Dans tous les cas, le protocole insulinique doit être noté sur le dossier obstétrical, et connu par la patiente et les
anesthésistes qui veilleront à l’apport des solutés.
b) Le suivi obstétrical
Une échographie précoce (avant la 12ème semaine d'aménorrhée) est souvent utile pour déterminer
l'âge précis de la grossesse. Ce renseignement sera en effet très important en cours de grossesse pour évaluer la
croissance du foetus et diagnostiquer une éventuelle macrosomie ou hypotrophie. La TA, l'uricémie,
l'albuminurie et l’absence d’infection urinaire.
La surveillance échographique comportera également une échographie morphologique et une
échographie cardiaque foetale vers 26-28 SA pour dépister une malformation cardiaque, et dépister une
cardiomyopathie avec hypertrophie septale asymétrique, complication typique du diabète.
L’échographie de 32 SA permettra de contrôler les biométries, la quantité de liquide amniotique et de
dépister une macrosomie débutante (augmentation du DAT).
A partir de la 34ème semaine, l'enregistrement du coeur foetal est réalisé une fois par semaine et
jusqu'au terme de la grossesse. Certaines maternités disposent actuellement d'appareils de monitoring permettant
de surveiller le foetus alors que la patiente reste à domicile. Certaines sages-femmes se déplacent également
chez les patientes pour surveiller la grossesse "à risque". Un risque accru de prééclampsie et de retard dans la
maturation pulmonaire apparait si l'équilibre glycémique est insuffisant.
Une échographie de fin de grossesse (vers 38 SA) permet d’évaluer le poids fœtal, et d’indiquer le cas échéant,
un déclenchement ou une césarienne élective. Le déclenchement systématique de l'accouchement à la 37 ème
semaine ne se justifie plus actuellement car il comporte un risque accru de morbidité néonatale. Lorsque
l'équilibre glycémique est satisfaisant, la grossesse ira à son terme et l'accouchement par voie basse sera favorisé
3-6 - PRONOSTIC
a) Pronostic foetal, lié à la fois aux facteurs métaboliques et aux facteurs vasculaires
- Les malformations sont liées à l’effet tératogène des désordres métaboliques dominés par
l’hyperglycémie maternelle. Les nouveaux-nés de mères diabétiques qui ont programmé leur grossesse et ont
subi un contrôle pré-conceptionnel strict ne présentent pas plus de malformations congénitales que les enfants
nés de mères non diabétiques.
Si l'équilibre glycémique est insuffisant au moment de la conception et en début de grossesse, la fréquence des
malformations congénitales est en moyenne de 6 à 7%. Ces malformations entraînent 40 % des morts foetales in
utéro et 50 % environ des morts périnatales. Les malformations cardiovasculaires, du système nerveux central,
de l'appareil locomoteur et urogénital sont les plus fréquentes.
- La mortalité périnatale moyenne dans certains centres ne dépasse pas celle de la population générale
du fait du bon contrôle métabolique obtenu pendant la grossesse ainsi que des progrès de l'obstétrique, de la
surveillance prénatale et de la prise en charge néonatale.
- La souffrance foetale chronique peut être secondaire aux désordres métaboliques (hyperglycémie,
cétose ou acidocétose) ou à la prééclampsie principalement, qui est plus fréquente chez les diabétiques.
- La macrosomie, complication la plus fréquente, est surtout liée à l’hyperinsulinisme foetal
(augmentation de la glycémie postprandiale maternelle).
- L’hypotrophie est plus fréquente lorsque la mère présente des anomalies vasculaires ou une
néphropathie
- La prématurité est la source la plus importante de morbidité et dépend de l’existence d’une HTA et
de l’état vasculaire de la mère.
- Les détresses respiratoires sont vraisemblablement liées à un retard de maturation du surfactant
pulmonaire.
- Les troubles métaboliques néonataux comportent essentiellement les hypoglycémies néonatales,
l’hyperbilirubinémie, l’hypoglycémie, la polyglobulie ou une hyperviscosité sanguine.
-Certains troubles du développement psychomoteur ont été rapportés à long terme chez les enfants de
mère diabétique, surtout en cas de cétose pour la femme, mais les dernières études ne montrent pas de
différence.
-En revanche, on sait que les enfants ayant été exposés pendant leur vie intra utérine à un diabète
maternel ont un risque accru d’obésité et de diabète type 2 à l’adolescence.
b) Pronostic maternel
- Le pronostic des patientes insulinodépendantes n'ayant pas de complications n'est pas modifié de
façon sensible par la grossesse. La présence d'une coronaropathie (en raison du risque élevé de mort maternelle)
ou l'existence d'une néphropathie diabétique grave (en raison du risque d'insuffisance rénale) constituent des
contre-indications absolues à toute grossesse chez une femme diabétique. Le risque tératogène est grand
également chez ces patientes, souvent polymédiquées. Rappelons ici que les IEC, les ARA2, les statines, sont
des facteurs tératogènes reconnus. Des inconnus subsistent en ce qui concerne l’action de la Ticlodipine.
- Les bouleversements métaboliques et hormonaux pendant la grossesse sont source d’instabilité
glycémique. Le premier trimestre se caractérise par une tendance aux hypoglycémies de jeûne. Le deuxième
trimestre par une diminution de l’insulinosensibilité, et le troisième par un risque accru d’acidocétose. Les
besoins en insuline chutent d’au moins 30% lors de la délivrance.
- Les complications dégénératives, comme la rétinopathie, peuvent s’aggraver en cours de grossesse.
La néphropathie expose à l’HTA qui doit être différenciée à la toxémie gravidique, augmente le risque de prééclampsie et de césarienne.
- Les infections urinaires sont fréquentes.
3-7 - CONCLUSION
Toute femme diabétique en âge de procréer doit être informée des modalités à mettre en place avant de
débuter une grossesse et doit bénéficier d’une prise en charge adaptée multidisciplinaire.
4 - CHOIX DE LA CONTRACEPTION ET RISQUE CARDIOVASCULAIRE
4-1 – INTRODUCTION
La contraception est très importante pour toutes les femmes en page de procréer. Les patientes présentant un
diabète, une maladie chronique, une HTA, ou des facteurs de risque vasculaire, ont encore plus besoin de cette
contraception efficace, pour pouvoir planifier leurs grossesses de manière efficace.
Les stéroïdes utilisés dans les contraceptifs, qu’ils soient oraux ou utilisent une autre voie
(transcutanée, vaginale) peuvent avoir un effet délétère sur divers aspects de la maladie cardio-vasculaire : la
paroi endothéliale, la TA, les facteurs de coagulation, les lipides, l’insulinosensibilité..
Habituellement sans inconvénient chez des femmes jeunes, sans facteur de risque ni antécédents, ils
peuvent, dans certains cas, augmenter le risque de thrombophlébite veineuse, de maladie athéromateuse, d’AVC.
Il convient donc de repérer les femmes qui pourraient présenter une contre indication à ces contraceptifs, et de
leur proposer une alternative.
4-2 -EFFETS METABOLIQUES
L’éthinyloestradiol augmente l’insulino résistance, une élévation des triglycérides et peut favoriser la
prise de poids. L’effet diabétogène est dose dépendant, et n’est plus très marqué avec les dosages actuels (15à 30
gammas d’EE le plus souvent)
Les progestatifs sont neutres sur le plan glucidique. Ceux qui n’ont pas d‘affinité pour le récepteur des
androgènes ne sont pas délétères sur le plan lipidique
4-3- EFFETS SUR LA TENSION ARTERIELLE
L’éthinyl oestradiol augmente la synthèse de rénine, et d’angiotensinogène. Si les oestrogènes sont
protecteurs de la paroi vasculaire saine, ils peuvent au contraire aggraver la situation en cas de pathologie sousjacente.
Les progestatifs sont réputés neutres sur le plan tensionnel ; certains entrainent cependant une
rétention hydrosodée, qui peut majorer la TA.
4-4-EFFETS SUR LA COAGULATION
L’éthinyl oestradiol augmente la synthèse hépatique des facteurs de la coagulation. Il peut être
prothrombotique dans un contexte de prédisposition.
(déficit en protéine C, protéine S, anticoagulant circulant)
4-5- PRECAUTIONS A PRENDRE AVANT DE PRESCRIRE UNE CONTRACEPTION HORMONALE
1. S’assurer de l’absence de contre-indication
Pathologie thrombogène
Facteurs de risque associés entre eux, en particulier l’association âge>35 ans, tabagisme,
dyslipidémie
HTA
Dyslipidémie sévère
Diabète type 2
Diabète type 1 ancien et compliqué
Anomalie de la coagulation
ATCD de thrombose personnel ou familial
ATCD d’AVC
2. informer la patiente du bilan préalable : examen clinique, interrogatoire, TA, bilan lipidique et
glucidique, recherche d’anomalies de la coagulation si ATCD familiaux.
Et de la nécessité d’arrêter le tabac, et de se soumettre aux bilans annuels prescrits par le médecin.
3. choix du contraceptif :
Pas de CI :
Oestroprogestatifs minidosés (20 ou 30 gammas d’EE, plus
progestatif de 2ème ou 3ème génération), patchs contraceptifs, anneaux vaginaux
Progestatifs microdosés en continu, ou implants contraceptifs au
levonorgestrel : si CI aux oestrogènes. La tolérance gynécologique est moins bonne, mais l’efficacité est la
même
Progestatifs « macrodosés », un seul a l’AMM en contraception : le
LUTERAN° 10 mg/j, 20j/28. il peut être utilisé seul, ou associé à un gel d’oestradiol. Bien toléré sur le plan
gynécologique en général
Progestatif anti_androgénique : acétate de ciprotérone, 25 à 50mg/j,
20j/30 associé à de l’oestradiol percutané. En cas d’hyperandrogénie clinique.
4-6- LES ALTERNATIVES A LA CONTRACEPTION HORMONALE
Les dispositifs intra-utérins et les méthodes locales de contraception peuvent être
proposés sans réserve.
4-3 - CONCLUSION
Les précautions de prescription de la contraception hormonale sont plus liées au risque vasculaire qu’au
risque diabétogène et nécessitent la recherche de facteur de risque vasculaire et une surveillance régulière.
L’apparition de trouble de la glycorégulation, d’HTA, d’hypertriglycéridémie justifie l’arrêt des
estroprogestatifs. L’utilisation du dispositif intra-utérin doit être privilégiée lorsqu’elle est possible et acceptée
par la femme.