Marché privé de travaux à forfait : résiliation de

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Marché privé de travaux à forfait : résiliation de
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Marché privé de travaux à forfait : résiliation de plein
droit sans préavis - application norme AFNOR P 03-001
le 25 juin 2012
IMMOBILIER | Construction | Marchés de travaux
Le maître d’ouvrage peut résilier un contrat de marché de travaux, en application de l’article
22.1.2.1. de la norme AFNOR P 03-001 pour tromperie grave sur la qualité d’exécution des travaux,
dès lors que le contrat s’y référait expressément. En particulier, la défaillance totale et persistante
de l’entrepreneur à faire respecter par ses sous-traitants les prescriptions en vigueur en matière de
sécurité des ouvriers et de prévention des accidents, indispensables à la réalisation des ouvrages
dans les règles de l’art, est constitutive d’une tromperie sur la qualité d’exécution des travaux, qui
fonde le droit du maître d’ouvrage de résilier le marché de plein droit et sans préavis.
Civ. 3e, 22 mai 2012, FS-P+B, n° 11-13.011
En présence d’un marché privé de travaux dont le prix est supérieur à huit millions d’euros, la mise
en œuvre d’une clause résolutoire est lourde de conséquences pratiques. Le fondement juridique
invoqué par le maître de l’ouvrage pour mettre en œuvre sa faculté de résiliation était donc
déterminant.
La norme AFNOR P 03-001 applicable en matière de marchés privés de travaux prévoit des
hypothèses de résiliation des contrats pour différents motifs (abandon de chantier, événement de
force majeure, tromperie sur la qualité des matériaux …), encore convenait-il au préalable de
s’assurer que les parties au contrat de louage d’ouvrage – plus particulièrement un marché à
forfait, art. 1793 c. civ. – étaient contractuellement convenues de s’y référer (sur cette exigence,
V. Droit de la construction, Dalloz Action, 2011-2012, spéc. nos 400.150 à 400.170). La cour d’appel
a considéré que la norme AFNOR était applicable et le pourvoi n’a pas remis en cause cette
considération.
L’interrogation soulevée en l’espèce était celle de savoir dans quelle mesure le cas de « tromperie
grave sur la qualité d’exécution des travaux », tel que visé par l’article 22.1.2.1. de la norme NF P
03-001, était caractérisé.
La Cour de cassation, qui s’est peu prononcée sur ce point particulier, reprend les faits laissés à
l’appréciation souveraine des juges du fond : « la défaillance totale et persistante de
[l’entrepreneur] à faire respecter par ses sous-traitants les prescriptions en vigueur en matière de
sécurité des ouvriers et de prévention des accidents, indispensables à la réalisation des ouvrages
dans les règles de l’art », est constitutive d’une tromperie sur la qualité d’exécution des travaux.
Les effets juridiques produits sont ceux de la résiliation de plein droit, qui peut être mise en œuvre
sans préavis, conformément à la norme AFNOR.
ontrairement aux règles communes de résiliation du marché à forfait (C. civ., art. 1794), le maître
d’ouvrage n’est pas tenu d’indemniser l’entrepreneur lorsqu’il met en œuvre une clause résolutoire
en application de la norme AFNOR précitée car la résiliation est, dans cette hypothèse, prononcée à
ses torts. De même, le cas particulier de tromperie sur l’exécution des travaux étant le plus grave,
il n’est pas assorti d’un préavis (à l’inverse, l’hypothèse d’abandon de chantier doit être précédée
d’une mise en demeure avant résiliation – plus largement, V. Droit de la construction, préc., spéc.
n° 403.280).
Au-delà des conditions de mise en œuvre de la clause résolutoire, la difficulté se situait également
sur le terrain de la preuve de la tromperie. En l’espèce, le maître d’ouvrage avait produit plusieurs
comptes-rendus de visites faites par le coordinateur SPS (6 en 4 mois) et différents procès-verbaux
de réunions de chantiers, établis par le maître d’œuvre (6 en 3 mois), ainsi qu’un constat d’huissier.
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Tous ces éléments tendaient à faire état des manquements de l’entrepreneur quant à la mise en
place des dispositifs élémentaires de sécurité, tant individuels que collectifs. Ces divers
manquements à la sécurité constituent une tromperie sur la qualité d’exécution des travaux, qui
exposaient directement le maître d’ouvrage à un risque d’arrêt du chantier en cours depuis
plusieurs mois. La sanction du contrat par la résiliation de plein droit et sans préavis nous paraît
donc adaptée à la situation, outre la logique contractuelle de la norme NF P 03-001.
par Fanny Garcia
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