Les cadres dirigeants territoriaux français au coeur du nouveau

Transcription

Les cadres dirigeants territoriaux français au coeur du nouveau
Les cadres dirigeants territoriaux
français au cœur du Nouveau
Management Territorial
VIème SYMPOSIUM INTERNATIONAL
Regards croisés sur les transformations de la gestion et
des organisations publiques :
le gestionnaire public en question ;
la difficile conciliation des logiques bureaucratiques et
managériales
Montréal, 27 et 28 mars 2014
Jérôme DUPUIS
IAE / LEM Univ.LILLE 1
e-mail : [email protected]
1
INTRODUCTION : CONTEXTE
Les collectivités locales en France ont connu, depuis les années 80,
plusieurs mouvements introduisant gestion et management au centre de
leurs stratégies et préoccupations
Le premier, datant des municipales de 1983 = ère du mimétisme (Trosa,
1993 ; Carles, 1996 ; Kieffer, 1996) à travers l’introduction d’outils venant
du secteur privé
Le second, datant des années 1995 = ère de « l’hybridation » selon le
terme d’Emery (2010), combinant logiques et méthodes du secteur
public (processus administratifs garants de l’égalité et de l’intérêt
général) et de l’économie des services marchands (qualité, relation
« client », marketing)
Le troisième, que l’on peut dater de 2007 = ère de la performance sous
ses différentes formes : soutenabilité financière, agilité
organisationnelle et qualité de vie au travail, valeur des interventions
publiques et qualité des services rendus, compétitivité et cohésion
territoriales (Carassus et Gardey, 2009 ; Mazouz , 2008)
Pas de « Nouvelle gestion publique » mais plutôt « managérialisation
douce » (Courpasson, 2000)
2
Désormais, entrée dans la nouvelle gouvernance publique (Osborne,
2006) ou « l’après nouvelle gestion publique » (Emery, 2010) que nous
qualifierons de Nouveau Management Territorial adossé aux logiques
de gouvernance territoriale (Leroux,2006 ; Chatelin-Ertur et Nicolas,
2007 ; Carles, 2007) et interterritoriale (Vanier et Lorens, 2011 ; Dupuis,
2014).
Dans la réalité de chacune des collectivités = superposition, imbrication
et métissage de ces différentes couches de « management postbureaucratique » (Trosa, 2007) plutôt que mouvements successifs
3
Dans ce contexte, le rôle des cadres dirigeants
territoriaux largement questionné
1. Mimétisme = Gestionnaire de ressources et manager
de l’organisation
2. Hybridation = Gestionnaire de processus et manager
de programmes publics
3. Performances = Gestionnaire de performances et
manager de projets territoriaux
4. Gouvernance = Gestionnaire de partenariats et
manager de réseaux
4
INTRODUCTION : PROBLÉMATIQUE
Quelles sont les tensions pouvant naître entre ces registres ?
Quelles sont les modalités de réponse apportées par les cadres
dirigeants territoriaux en fonction de trois postures exercées par
ces derniers : l’assistance à maitrise d’ouvrage dans la conception
et la mise en œuvre des politiques publiques; la représentation de
la maitrise d’ouvrage dans la conduite et la négociation des
coopérations territoriales; la maitrise d’œuvre dans le
développement et l’évolution des systèmes d’organisation ?
Quels sont les défis à relever par les cadres dirigeants territoriaux
et les exigences à considérer dans leurs décisions managériales eu
égard aux enjeux afférents à la gouvernance territoriale et
interterritoriale ?
5
INTRODUCTION : MÉTHODOLOGIE
MOBILISÉE
Deux séries d’enquêtes menées en 2012 et 2014 auprès d’un panel de
cadres dirigeants territoriaux .
Définition retenue de ce terme = « partie prenante dans la conception,
le pilotage, l’expertise et l’évaluation des politiques publiques supposant
pluridisciplinarité, mixité des métiers, diversité des techniques maîtrisées
et plurifonctionnalité » (rapport Laurent,2009; p.8 et 9).
Choix du panel fondé sur un équilibre des situations de direction (6
DGS/DGA issus des régions, 21 DGS/DGA/Directeurs des
départements, 38 DGS/DGA Directeurs de pôles des blocs communesintercommunalités de plus de 75000 habitants) sans viser la
représentativité
Synthèse interprétative sans prétendre inférer une quelconque
taxinomie
6
Objet du questionnement 2012 = regard porté par 65 cadres
dirigeants (sur 100 sollicités) sur 10 ans (2003 - 2012) d’évolutions
managériales après le déploiement de l’acte 2 de la décentralisation et
la mise en place de la réforme territoriale de 2010
20 questions regroupées en 6 thèmes : les spécificités du management
territorial ; les évolutions institutionnelles et sociétales impactant le
management territorial ; les réponses stratégiques, organisationnelles
et managériales apportées à l‘évolution des territoires, des politiques
publiques et des organisations ; les rôles exercés et principes d’action
développés au regard des mutations identifiées
Objet du questionnement 2014 pour le même panel (62 réponses sur
les 65 initiales) = identification des inflexions aux réponses apportées
deux ans auparavant suite aux modifications du contexte institutionnel
(loi MATPAM et projet clarifiant l’Organisation Territoriale de la
République, 2014) et au « nouveau » contexte financier + appréciation
de la façon dont les défis de la gouvernance territoriale viennent
(ré)interroger les valeurs sous-tendant la conduite des affaires
publiques locales.
7
SOMMAIRE
I. L’émergence du Nouveau Management Territorial
II. Le rôle des cadres dirigeants territoriaux et leur
gestion des exigences managériales
8
SOMMAIRE
I. L’émergence du Nouveau Management Territorial
I.1. La perception des évolutions de univers territorial
I.2. Les visions des caractéristiques actuelles du
management territorial
I.3. Les défis et enjeux à relever pour les cadres dirigeants
territoriaux
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I.1. La perception des évolutions de l’univers territorial
Les aspects communs (Bourgault et alii UQAM / ENAP, 2003,
2008)
– L’ère du changement multi facettes (économique, social,
technologique…)
– Un monde secoué par les crises et scandales financiers et économiques
dans lequel la place de l’Homme, des hommes et des femmes est peu
consacrée ou alors appréhendée comme une variable d’ajustement ou
résultant de la prise en considération d’autres intérêts la dépassant
– La complexité de la gestion publique (ressources, rôle de la puissance
publique et des institutions, attentes et comportements des équipes et
personnels…)
– Des dirigeants politiques peu enclins ou en difficulté pour arrêter des
stratégies ou passer des accords socio-économiques et sociétaux utiles
au bien collectif, au bien commun
10
Les aspects spécifiques au monde territorial (Enquêtes J.
Dupuis 2012, 2014)
– Des valeurs « humaines » évoquées voire revendiquées comme des
boucliers protecteurs face aux excès de ce qui est perçu comme un
paradigme de la logique managériale imposée à l’action publique : la
performance
– Des « vertus » du local et du territorial (proximité, coopération,
régulation…) appelées au chevet de la redéfinition des règles du jeu aux
niveaux institutionnel, politique mais aussi managérial
– Des principes éthiques du service public (neutralité, intérêt général,
équité, solidarité…) (re)interrogés par les réformes administratives
fondées sur la culture du(des) résultat(s) et les impératifs de la gestion
11
Vers de nouvelles pratiques jugées légitimes (Alter, 1996),
comprises voire acceptées par toutes les parties prenantes.
« Dans ce contexte, le management est soucieux de
conserver ou de rétablir des routines, donc des règles du
jeu légitimes susceptibles de permettre une coordination,
si possible prévisible, des acteurs productifs et par
conséquent capables de recevoir les acteurs sur la base de
buts communs qui transcendent les différents intérêts
individuels » (D. Giauque, 2003, p 33)
12
I.2. Les visions des caractéristiques actuelles du management
territorial (Enquêtes J. Dupuis 2012, 2014)
Ses spécificités au regard du management des organisations marchandes
- Des considérations proches : qualité des prestations, adaptabilité aux attentes et
besoins
- Des particularités : solidarité des territoires, des populations et des générations,
création des conditions du « bien vivre ensemble »
Ses spécificités au regard du management public
- Des finalités identiques : intérêt général, processus de régulation et de
coopération
- Des particularités : approche citoyenne et de proximité, interaction entre les élus
/ cadres et agents territoriaux, usagers, habitants et citoyens
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Les valeurs de l’action publique locale
- Égalité et équité d’accès aux services
- Solidarité territoriale (cohésions sociale et territoriale)
- Innovation et partage
-…
Les valeurs du service public local
- Éthique et esprit de justice (règles de vie en commun, exemplarité,
intégrité)
- Respect et altérité (écoute, considération, bienveillance)
- Responsabilité et initiative (droit à l’erreur, reconnaissance)
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Recomposition –
Représentant Maître
d’ouvrage
Management
des territoires
Restructuration –
Maitre d’œuvre
Refonte et
redimensionnementAMO
MANAGEMENT
TERRITORIAL
Management
des
organisations
Management
des politiques
publiques
15
∆ Sens et portée du management des territoires
– Un projet de territoire multi acteurs et multi niveaux (sens, subsidiarité et
partage) prenant en compte les différentes façons de vivre et les
temporalités des habitants
– Une clarification des vocations des acteurs et niveaux territoriaux en
fonction des spécificités locales (et des jeux locaux) combinant allerretour entre espaces de réflexion larges et espaces infra d’action
permettant de nourrir la réflexion stratégique
Ne pas enfermer le citoyen sur un territoire (assignation identitaire,
méconnaissance des interactions avec d’autres territoires) ;
Nouer de nombreux partenariats et intervenir à diverses échelles ;
Confronter des visions techniques et politiques ;
Être en mesure d’articuler développements exogène et endogène;
Confronter des visions techniques et politiques .
16
∆ Sens et portée du management des politiques publiques locales
– Une réponse en termes de clarification des compétences perçue
comme un leurre voire un « impossible ».
Souplesse et plasticité pour s’adapter aux territoires et aux contenus
des politiques publiques
– Une différenciation entre la responsabilité politique et les conditions
administratives et managériales de la mise en œuvre :
- Maîtrise d’ouvrage : sens à donner à l’action en traçant une feuille
de route aux différents partenaires et en s’assurant de son respect
- Maîtrise d’œuvre : voies et moyens pour répondre aux objectifs en
assemblant les différentes ressources (ingénierie, finances,
coopérations techniques…) voire en les mutualisant
Laisser l’intelligence collective émerger et décider quoi ; du
partenariat financier, de l’expertise technique ou de l’ingénierie ; sera
le mode le mieux approprié pour mettre en œuvre le projet de
politique publique territoriale
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∆ Sens et portée du management des organisations territoriales
– Des organisations plus à l’écoute des besoins des agents, en
réflexion permanente du décryptage des attentes de la population
Un regard croisé sur la qualité du service rendu entre les
professionnels et les usagers
– Enrichissement du mode organisationnel hiérarchique par le mode
organisationnel transversal et coopératif
Mettre les cadres en capacité de se placer en permanence sur
plusieurs niveaux de compréhension des problèmes à résoudre,
d’avoir une analyse multi dimensionnelle, d’opérer des choix non
seulement techniques découlant de procédures bureaucratiques,
mais aussi en faisant appel à l’initiative et à la responsabilité
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I.3. Les défis et enjeux à relever pour les cadres dirigeants
territoriaux
Les aspects communs (Lynn, Heinrich, et Hill, 2000 ; Agranoff
et Mc Guire, 2003 ; Hill et Lynn, 2001,2004,2005 ; Lawler, 2008;
Frederickson,2004 ; Maltais et alii,2007)
Prendre la mesure :
- Des différentes touches du clavier de la gouvernance vue
comme modèle logique pour améliorer la ou les performances
(« O = f[E,C,T,S,M] )
- Des complémentarités entre gouvernance et gouvernement où
les éléments caractéristiques du gouvernement (hiérarchie,
ordre, stabilité…) constituent les conditions d’exercice de la
gouvernance
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- Des nécessités managériales du temps présent:
. Comprendre les mutations et faire agir dans des
environnements complexes et incertains
. Savoir agir en assurant la traduction opérationnelle d’une
vision
. Etre en capacité de décoder les attentes de ses équipes,
savoir innover dans les façons de faire afin de faciliter
l’adaptation de son organisation à ces environnements
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Les aspects spécifiques apportés par les DG territoriaux (dans
les enquêtes susmentionnées):
Prendre la mesure :
Des effets d’échelle ou de focale où traditionnellement les
organisations ou plutôt les institutions marquaient leurs
territoires en référence à des secteurs d’intervention pour
passer progressivement à des notions d’interorganisations,
d’interterritorialités…
le sens = horizontalité et complémentarité ;
les valeurs de référence = solidarité et cohésion
21
– Des effets de déplacement avec des outils, dispositifs et systèmes de
gestion et de management adoptés, adaptés puis appropriés aux
intérêts à agir des différentes parties prenantes (Scott et Lane, 2000)
le sens = adaptation à géométrie variable à différents titres
(territoires, politiques publiques, organisations) et affirmation
de l’identité (ou des identités multiples de par l’affiliation à
divers réseaux) de chaque partie prenante à travers la légitimité
ou non des pratiques (Rowley et Moldoveanu, 2008) ;
les valeurs de référence = respect et reconnaissance.
22
– Des effets de renversement ou de débordement où les anciennes
clarifications des rôles (individus et groupes, objectifs, contrats…)
dans une logique transactionnelle sont mises à mal par des postures
plus floues et incertaines (actions collectives, réciprocité et échanges,
conventions…) dans une logique relationnelle (Macneil, 1980)
le sens = développement de la cohérence entre le dire et le
faire, gage de durabilité des relations ;
les valeurs de référence = intégrité (connaissance et
compréhension mutuelle),
bienveillance et réciprocité
(confiance réciproque)
23
SOMMAIRE
I. L’émergence du Nouveau Management Territorial
II. Le rôle des cadres dirigeants territoriaux et leur
gestion des exigences managériales
24
SOMMAIRE
II. Le rôle des cadres dirigeants territoriaux et leur gestion des
exigences managériales
II.1. Le rôle des cadres dirigeants et la qualification de leurs
positionnements privilégiés
II.2. La compréhension (identification) des postures managériales
des cadres dirigeants territoriaux
II.3. L’émergence et la cristallisation des tensions entre valeurs et
principes d’actions à l’ère des gouvernances territoriale et
interterritoriale
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II.1. Le rôle des cadres dirigeants et la
qualification de leurs positionnements privilégiés
Les aspects communs aux managers publics (Emery, 2009)
Une conduite stratégique des affaires publiques qui prend de l’ampleur et dans
laquelle la contribution des dirigeants est cruciale (Forbes et Lynn 2005)
- MAIS un contrôle des « opérations » menées qui tend à leur échapper
favorisant la prise en compte accrue des attentes et objectifs d’autres acteurs
(Peters 2009)
Coproduction des politiques publiques (Brudney et England 1983)
– Intégration des savoirs faires et expériences du passé (continuité ≠
accélération des changements « change and turn »; Bourgault et Savoie,
2009)
– Anticipation stratégique et prospective mettant en exergue les possibles en
tenant compte des enjeux socio- économiques, politiques et des risques
– Prise en considération des acteurs de l’environnement et des parties
prenantes (Mettban, Hazlatt et alii 2005)
– Capacité à transformer les objectifs en résultats, les intentions en actions
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Les aspects spécifiques aux dirigeants territoriaux (dans les enquêtes susmentionnées)
Politiques publiques
Compétences
Vocation
Espace public
Urbanisme réglementaire –
Voirie – Espaces Verts / Nature
/ Paysages – Domaine public…
Faire
Réseaux de Services Publics
Transport / Stationnement /
Mobilités – Eau / Assainissement
– TIC...
Faire-Faire
Cadre de vie
Vie sociale et citoyenne
Urbanisme opérationnel –
Environnement – Habitat –
Logement – Cohésion sociale –
Santé – Sécurité…
Faire avec
Accès aux savoirs
Epanouissement personnel
Animation
Education – Formation - Sport –
Culture – Loisirs…
Faire pour
Aménagement
Développement
Urbanisme prévisionnel
Economie (marchande et
plurielle) – Tourisme –
Enseignement supérieur –
Recherche – Innovation…
Aider à faire
27
Vocation
Faire
FaireFaire
Faire
avec
Faire
pour
Aider à
faire
Objectifs
Optimisation des
ressources et
création de valeurs
environnementale,
paysagère et
territoriale
Optimisation et
fructification des
ressources et
création de valeurs
sociale et
territoriale
Fructification des
ressources et
création de valeurs
économique et
territoriale
Dynamiques
Finalités
Valeurs
de l’action
publique
Identité
Mutualisation
Accessibilité
Continuité
territoriale
Fédération
Accroître la
qualité de vie
Cohésion
Solidarité
Métropolisation
Coopération
territoriale
Attirer – Créer –
Développer
Rayonnement
Attractivité
Equilibre
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- Une conduite stratégique de la gestion publique locale selon trois rôles
Faire Faire + Aider à faire
Dirigeants territoriaux =
Représentant Maître d’ouvrage
Management
des territoires
Faire + Faire pour
Dirigeants territoriaux =
Maitre d’œuvre
« A force de sacrifier
l’essentiel par l’urgence, on
finit par oublier l’urgence de
l’essentiel »
Edgar MORIN
« Il faut donc déterminer en soi-même,
sans précipitation et sans négligence, ce
qui en nous constitue le bien-vivre et ce
sans quoi les hommes ne sauraient y
accéder »
ARISTOTE
Faire avec + Faire pour
Dirigeants territoriaux =
AMO
MANAGEMENT
TERRITORIAL
Management
des
organisations
Management
des politiques
publiques
« Il faut d’abord savoir ce que
l’on veut, il faut ensuite avoir
le courage de le dire, il faut
enfin l’énergie de le faire. »
Georges CLEMENCEAU
29
- Un positionnement stratégique (Townley, 2002; Bourgault et Savoie,
2009) particulier
Politique publique /
vocation
Espace public / Faire
Elus
Maître d’ouvrage
Dirigeants
territoriaux
Services
Ingénierie de projets et gestion
technique
Traduction
Réseaux SP / Faire faire
Maître d’ouvrage
Ingénierie technico-économique et
conduite d’opérations
Médiation
Cadre de vie - vie sociale /
Faire avec
Articulation
organisation et
politiques publiques
Montage de projets
Innovation
Accès savoir - épanouissement
/ Faire pour
Proximité
Gestion administrative et relations
Aménagement –développement
/ Aider à faire
Articulation
territoires et
politiques publiques
Négociation de partenariats
Vision
Intelligence collective
Ancrage
Influence
Assemblage
30
Représentant Maître d’ouvrage
Faire Faire + Aider à faire
DG = Médiation / Influence
Management
des territoires
Maitre d’œuvre
Faire + Faire pour
DG = Traduction / Ancrage
AMO
Faire avec + Faire pour
DG = Innovation / Ancrage
MANAGEMENT
TERRITORIAL
Management
des
organisations
Management
des politiques
publiques
31
II.2. La compréhension (identification) des
postures managériales des cadres dirigeants
territoriaux
Les préoccupations managériales des cadres dirigeants territoriaux
– Le processus d’adaptation
à travers un double mouvement de
conformation et de résistance / subversion qui n’est pas sans rappeler le
couple assimilation / accommodation de Jean Piaget « La psychologie de
l’intelligence », A. Colin, 1967.
• Assimilation, car le dirigeant territorial tente d’intégrer la « dynamique »
dans ses schémas de savoir-faire quitte à en subvertir la forme, la
structure, les usages initialement prévus par l’initiateur, le concepteur
• Accommodation, dans la mesure où la « dynamique » est susceptible
d’ouvrir d’autre champs d’interprétation de la situation.
Ce processus se construit souvent en initiant, implantant des outils et
dispositifs de gestion et de management ; rendant possible l’action
collective de façon parfois inattendue (Weick, 1987 ) où la « qualité » d’un
outil de gestion réside peut-être moins dans sa capacité à informer la
décision qu’à impulser un engagement dans l’action.
32
Le management par les normes, les référentiels, les
résultats
Chiffres, indicateurs, ratios et procédures
Objectifs internes / externes et processus de reporting et
d’amélioration régulière
=
Approches économique, financière, organisationnelle et
managériale
33
-Le processus de recherche de l’utilité(s) en s’attachant, face aux
difficultés :
- à atteindre des objectifs tangibles et immédiats compte tenu des
mutations multiples , des incertitudes de l’environnement, des
changements de ligne directrice;
- à donner une réalité au rassemblement, au dessein, au projet en
résonance avec le processus d’élaboration du sens développé par
Weick (1979) ; qui intervient lorsque les faits sont en désaccord avec
les croyances de l’individu et/ou ses conduites (dissonance cognitive).
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Le management par les résultats, par le sens…
Objectifs internes / externes et processus de reporting et
d’amélioration continue
Sens des projets / actions et processus de mobilisation interne /
externe
= Approches organisationnelle et managériale, de la stratégie des
politiques publiques, de la stratégie territoriale
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- Le processus de cohérence de nature à éviter les tensions
centrifuges au sein de la collectivité, et d’assurer
durablement le consensus sur des règles du jeu communes.
Représentation idéalisée (en rapport avec l’idéal, les
valeurs de référence) des projets et dispositifs comme
symbole (David, 2006)
36
Le management par le sens et par les valeurs
Sens des projets / actions et processus de mobilisation
interne / externe
Intelligence territoriale (prise en compte systémique d’un
territoire par la mise en réseau de ses acteurs pour son
développement durable, l’amélioration de son attractivité humaine
ou entrepreneuriale )
= Approches organisationnelle et managériale, de la
stratégie des politiques publiques, de la stratégie
territoriale
+ Approche des gouvernances politique et administrative
37
Représentant Maître d’ouvrage
Management souple (négociation
partenariats) ou Management de
soutien (activation des
coopérations)
Valeurs du SP =
Imagination et
Anticipation
Management
des territoires
Maitre d’œuvre
Management maximal
(arbitrage) ou
Management partagé
(négociation
objectifs/moyens –
activités/ressources)
Valeurs du SP =
Autonomie et
Responsabilité
AMO
Management directif
(détermination du niveau
de service rendu) ou
Management résolu
(détermination des voies
et moyens)
MANAGEMENT
TERRITORIAL
Management
des
organisations
Management
des politiques
publiques
Valeurs du SP =
Equité et
Transparence
38
II.3. L’émergence et la cristallisation des tensions
entre valeurs et principes d’actions à l’ère des
gouvernances territoriale et interterritoriale
L’ère des gouvernances territoriale et interterritoriale
caractérisée par :
– Un système d’organisation fondé sur les influences réciproques
entre acteurs et un leadership à géométrie variable en fonction des
domaines et des temporalités
– Des espaces et des temps valorisant les contributions réciproques
entre niveaux institutionnels et échelles territoriales sur le plan
vertical (nature différente) et sur le plan horizontal) (nature
identique) conduisant à des formes de coordination et
d’agencement multi niveaux et multi acteurs.
39
Les tensions entre gestion et management comme principes
d’action :
Celles entre gestion des ressources et management des
organisations
fructification des ressources, réduction des coûts et marge
de manœuvre ≠ compréhension et partage des enjeux par
les équipes aux différents niveaux organisationnels
stratégie de réponse managériale : défense de la
situation actuelle
Celles entre gestion des processus et management des
programmes publics
optimisation, productivité, mutualisation, fusion ≠ qualité
du service rendu, relations usagers
stratégie de réponse managériale : recherche de pistes
de « dégagement »
40
Celles entre gestion des performances et management des
projets de territoire
résultats immédiats, efficience allocative ≠ sens de
l’action, dynamique territoriale
stratégie de réponse managériale : développement des
initiatives et innovations
Celles entre gestion des partenariats et management des
réseaux
perte d’identité, maitrise limitée et influence contrariée ≠
sens et justification de la raison d’être des coopérations et
alliances
stratégie de réponse managériale : renforcement des
spécificités et des atouts distinctifs
41
Les trois des cinq dimensions des « régulations
organisationnelles » énoncées par Giauque (2003) et les
tensions relevant de chacune d’elles :
Celles issues de la relation avec l’environnement de
l’organisation à travers la gestion des partenariats et le
management des réseaux (Boyer,1995 ; Reynaud, 1988 ;
Fulconis, 2002)
adaptabilité ≠ intérêt général et égalité de traitement
stratégie de réponse managériale : privilégier l’ouverture
Celles issues des transformations organisationnelles à
travers la gestion des ressources et processus et le
management des programmes publics et projets territoriaux
(Mintzberg 1982, Livian, 2001
efficacité et efficience ≠ responsabilité et initiative
stratégie de réponse managériale : sélectionner
quelques priorités claires et tangibles
42
Celles issues des relations de pouvoir à travers la gestion des
performances et le management des incertitudes et jeux
d’acteurs (Crozier et Friedberg, 1977. Francfort et alii, 1995 ;
Lodge, 2009
rivalité ≠ coopération
stratégie de réponse managériale : clarifier les rôles
politiques et administratifs
43
Une quatrième dimension à y ajouter : celle issue de
« l’actualisation » des valeurs publiques à travers la gestion
des performances et le management par le sens et les valeurs
(Liedtka, 1989 ; Bozeman, 2007 ; Chang, 2009 ; Dupuis et alii,
2015) et les tensions qui en découlent :
règles ≠ sens
arrangements ≠ confiance
stratégie de réponse managériale : coproduire puis faire
vivre une charte de gouvernance managériale adossée à
des valeurs partagées du service public local
44
Prévoir des moments privilégiés pour rappeler le sens et les valeurs
afin de ne pas noyer ces notions essentielles dans l’urgence du quotidien; à
n’envisager que dans un cadre institutionnel car cela deviendrait contreproductif
Se donner une feuille de route et des jalons dans le temps, pour faire
passer le message des valeurs et du sens, au bon moment et au bon
endroit; tout en étant attentif à la manière de dire les choses, parce qu’en
fonction de son auditoire, le dirigeant territorial ne le dira pas de la même
façon = mélange subtil d’intuition et de préparation
45
Développer la fonction managériale (agir avec autrui) suppose des
temps et les lieux de négociation divers mais cohérents; en identifiant des
lieux et types d’échanges où l’on s’autorise la parole, et des lieux et temps
d’arbitrage et de décision où l’on s’attache à en comprendre les attendus :
Inventer des modes d’échange, de décision, de capitalisation valorisant le
développement des compétences (stratégiques, opérationnelles,
communicationnelles) et le management à taille humaine.
Mettre en place des fonctions nouvelles de veille et de prospective interne
et externe, de pilotage et d’évaluation au service des DG, des élus et des
cadres intermédiaires et de proximité.
46
Les tensions dans la collaboration entre dirigeants politiques et cadres dirigeants
territoriaux dans ce contexte (Enquêtes J. Dupuis, 2014)
– Des élus investis désormais dans la gestion des moyens et la préservation des
ressources de leurs collectivités respectives
Des exécutifs devenant « super héros gestionnaires », argument principal devant
les électeurs
Un problème de sens
– Des DG « mis sous pression » tentés de faire des économies par le haut en
regroupant et supprimant des directions et en invitant les cadres les plus employables
à partir
Solution efficace et rapide pour retrouver des marges de manœuvre financières à
court terme
Fuite des talents et perte de motivation
– Une incitation des DG à :
Défier la pente oligarchique
Critiquer les élus quand ils se positionnent en patron et gestionnaire alors que cette
légitimité est professionnelle
47
– La crise alibi du retour des techniciens ?
La tentation est grande de voir revenir dans nos organisations les experts
censés trouver des solutions techniques à des problèmes dont la résolution
nécessite au contraire d’interroger le sens de l’action. Il est temps de
construire un nouvel imaginaire pour la société comme pour les
organisations, de créer de nouveaux possibles, de redonner aux citoyens
l’envie de se mettre en mouvement et d’accompagner les transformations
et c’est bien là la responsabilité des élus et des agents publics.
Celle-ci doit pouvoir s’exercer dans le respect des rôles dont l’équilibre,
certes fragile, évolue en fonction des protagonistes, de l’histoire, de la
culture.
« Des élus qui exercent une mission, des fonctionnaires qui exercent
un métier » (Denys Lamarzelle)
48
CONCLUSION : SYNTHÈSE
Plasticité des territoires et des organisations (prise en compte régulière
des adaptations nécessaires)
Destination clairement énoncée quitte à réviser à certains moments
Itinéraire retravaillé régulièrement suite aux retours d’expérience
Anticipation en fonction de ses enjeux et problématiques
Dynamique d’apprentissage collectif avec une création de valeurs pour
l’usager / citoyen, l’organisation, les personnels…
« The trouble with future is that is usually arrives before we’re ready
for it » - Arnold H. Glasow
49
Mais des tensions multiples
Entre rôles (maître d’œuvre, AMO, représentant Maître d’ouvrage)
Entre positionnements (traduction, médiation, innovation, ancrage,
influence)
Entre postures managériales (souplesse, soutien, directivité,
résolution, maximalisation, partage)
ET
Entre gestion et management (ressources, processus, performances,
partenariats, organisations, programmes, projets, réseaux)
Entre registres de régulation (relation à l’environnement,
transformation des organisations, relations de pouvoir, actualisation des
valeurs)
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… conduisant les dirigeants territoriaux à
– Manager dans la complexité et l’incertitude
« On mesure l’intelligence d’un individu à la quantité d’incertitudes qu’il est
capable de supporter » Emmanuel KANT
– Concilier possibles et impossibles ; faire preuve d’audace en se tenant
entre confiance et prise de risque , en évitant certitude et témérité (cf les
deux facettes de l’audace définies par les Grecs : « tolmos » ou la bonne
audace , celle qui fournit un tremplin à l’action sans verser dans l’excès de
témérité; « tharsos » ou l’audace effrénée , celle qui qui conduit à la
démesure aveugle).
« Vivre, exister, aimer, mourir, c’est sans s’en apercevoir, se créer, se
reconstruire, attribuer aux autres, transmettre autour de soi des possibles, des
impossibles. La question « dans quel monde vivons-nous ? » devient quels sont
les possibles et impossibles caractérisant notre monde » Andreu SOLE, Créateurs
de monde, nos possibles, nos impossibles
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CONCLUSION : LIMITES ET PROLONGEMENTS
Limites
• La constitution du panel de référence
• Des matériaux issus exclusivement d’enquêtes qualitatives
Prolongements
• Une enquête auprès d’un panel quantitatif à partir des items
de questions fermées mis en exergue dans ce premier travail
de recherche
• Une comparaison avec les cadres dirigeants des deux autres
fonctions publiques en France (Etat, hôpitaux) et les
dirigeants territoriaux d’autres pays (Europe et Canada)
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