L`absence d`enfant
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L`absence d`enfant
ENFANCE Labsence denfant Un choix plus ou moins délibéré dans le parcours dhommes et de femmes Pascale Donati * Si l’expérience de la parentalité est aujourd’hui fortement valorisée, certain(e)s font le choix de ne pas s’y engager et d’autres, bien que l’ayant souhaitée, ne la connaîtront jamais. L’analyse des parcours biographiques ayant conduit à l’absence d’enfant, souhaitée ou non, montre la complexité des déterminants sociaux des désirs et des refus d’enfants des hommes et des femmes. Le choix volontaire et positif de ne pas avoir d’enfant répond à des aspirations et des modes de vie différents pour les hommes et les femmes ; le choix négatif, quant à lui, se fonde sur la peur d’investir le rôle de père ou de mère dans sa dimension relationnelle et affective. Entre choix positif et choix négatif, l’absence d’enfant dans les autres parcours résulte des aléas de la vie sentimentale et du décalage entre le vécu du temps biographique et les contraintes du temps socialement prescrit pour la procréation, qui touchent davantage les femmes. omme le souligne Catherine Rollet, nos sociétés contemporaines se caractérisent par le paradoxe suivant : « d’un côté, le désir d’enfant paraît ne jamais avoir été aussi fort, de l’autre, le nombre d’enfants procréés chaque année n’a jamais été aussi bas » (Rollet, 1991). Avec peu d’enfants mais des enfants désirés (1), la procréation – à travers l’adoption et le développement du recours aux procréations médicalement assistées et, plus largement – l’expérience de la parentalité, constitue toujours un phénomène attractif pour la majorité des individus. C * Doctorante en sociologie à l’université de Versailles – Saint-Quentin-enYvelines, rattachée au laboratoire Printemps (Professions, institutions et temporalités). (1) La diminution de la fécondité, dans les années soixante, est essentiellement due à la diminution des naissances mal programmées et non désirées (Léridon et Toulemon, 1990). L’attrait qu’exerce l’enfant se lit aussi par la faible proportion de femmes restant sans enfant en France. Seule une femme sur dix était concernée parmi celles nées en 1955, soit moins qu’au début de ce siècle où la proportion était alors d’une sur quatre (Prioux, 1994). Cette baisse de l’infécondité au cours du siècle provient en partie des variations de célibat des hommes et des femmes, mais surtout de la raréfaction des couples sans enfant (Toulemon, 1995). En France, linfécondité est modérée Aujourd’hui, une grande majorité des hommes et des femmes ne conçoivent pas de rester sans enfant et actualisent leurs projets en ce domaine. Mais depuis quelque temps, il semble qu’un peu partout en Europe se dessinent de nouveaux contours dans le cadre de l’infécondité dite « volontaire ». Elle semble prendre le pas sur l’infécondité « involontaire », induite par une stérilité définitive (Johnson et alii, 1987). En France, pour la génération des femmes nées entre 1930 et 1950, les estimations de Laurent Toulemon 43 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 (2) Concernant les Allemandes qui « ne font plus d’enfant », Christiane Dienel souligne l’échec de la politique familiale allemande dans le domaine de la conciliation entre vie professionnelle et vie familiale, notant que « La naissance du premier enfant est retardée du fait que sa présence signifie systématiquement l’abandon de la carrière professionnelle » (1996). (3) Cet article repose sur une étude financée par la CNAF, rapport de recherche, mars 2000, qui se prolonge actuellement dans le cadre d’une thèse sous la direction de Mme Catherine Rollet, Laboratoire Printemps, Versailles – St-Quentin-en-Yvelines. (1995) montrent qu’environ 4 % des couples n’ont jamais pu avoir d’enfant – cette donnée est une constante en Europe – et que la même proportion n’en ont jamais voulu. de femmes et d’hommes, potentiellement fertiles et qui, aujourd’hui, ont tout juste dépassé cette période de la vie qu’on appelle reproductive (3). Cette infécondité demeure modérée comparée à celle d’autres pays européens. L’Allemagne arrive en première place pour l’infécondité en Europe (2), suivie par la Finlande et l’Angleterre. La France se partage la dernière place avec le Portugal, avec une très légère supériorité sur ce dernier. Comparativement à leurs voisines européennes, les Françaises restent beaucoup plus rarement sans enfant. Elles ne représentent que 8,3 % des femmes nées en 1955, alors que c’est le cas pour 13 % des Italiennes et 20,3 % pour les femmes ouest-allemandes (Léridon et Toulemon, 1993). Cette perspective biographique inscrit la question de l’enfant dans la dynamique temporelle des parcours sentimentaux et professionnels et dans leur étroite intrication. Elle ouvre aussi sur l’histoire de l’enfance dont les psychologues et psychanalystes soulignent l’importance dans le rapport futur au désir d’enfant (Marcos, 1976 ; Poussin, 1993). De même que la famille d’origine influe sur la fécondité selon la taille de la fratrie (Deville, 1979) ou à travers la tendance des filles à reproduire l’âge d’entrée dans la maternité de leur mère (Langevin, 1981), les valeurs et modèles qu’elle propose peuvent être déterminants dans la définition des aspirations au moment de l’entrée dans la vie adulte. Selon L. Toulemon, avec le temps, on peut s’attendre à voir augmenter l’infécondité « volontaire » en raison de « l’émergence de la possibilité pour certains couples de n’avoir aucun enfant » (1995). Les jeunes femmes sont ainsi de plus en plus nombreuses à déclarer qu’elles prévoient de rester sans enfant, même si elles demeurent très minoritaires et si les intentions exprimées sont rarement en concordance avec les comportements futurs. Cette infécondité « volontaire » s’accompagnera, dans une proportion sans doute assez similaire, de celle « involontaire » des jeunes générations qui reportent toujours plus leurs projets d’enfants. Il y aura ainsi de plus en plus de couples « confrontés à des difficultés biologiques du fait qu’ils ont trop attendu » (Toulemon, 1995). La non-procréation : expression du non-désir denfant et de projets incertains ? La non-procréation chez des hommes et des femmes qui auraient pu devenir parents peut être l’expression de leur non-désir d’enfant, mais aussi, et peut-être plus souvent, la nonactualisation de souhaits trop incertains et hésitants ou de projets formalisés et jamais aboutis. C’est ce double parcours aboutissant à l’absence d’enfant que cette approche sociologique tente d’explorer. Elle le fait à travers l’analyse des choix plus ou moins délibérés 44 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 Ces transmissions familiales ont ainsi été explorées, tout particulièrement dans la manière dont elles ont pu inciter les femmes à privilégier un projet professionnel aux dépens d’un projet familial. Si la prolongation de la scolarisation conduit à reporter l’entrée dans la maternité, la liaison positive entre le niveau de diplôme et le choix de ne pas avoir d’enfant est régulièrement soulignée dans les études nord-américaines sur les « childless by choice » (Desplanques, 1993 ; Veevers, 1979). Doit-on penser alors que les femmes qui refuseraient l’expérience de la maternité seraient celles dont l’investissement professionnel serait prioritaire et suffisant pour leur réalisation personnelle ? Certains travaux invitent à nuancer cette hypothèse : des femmes peu scolarisées et ayant un emploi manuel peuvent également avoir fait le choix de ne pas avoir d’enfant (Baum et Cope, 1980 ; Kenkel,1985). La hiérarchisation entre ces deux priorités, famille et vie professionnelle, procède d’un agencement qui se modifie sans cesse au cours du cycle de vie (Ferrand, 1998). Cet agencement ne se réduit pas au primat d’un pôle (l’investissement professionnel) aux dépens de l’autre (l’entrée dans la maternité). La conjugalité – sous toutes ses formes – constitue le troisième pôle dans une relation trian- ENFANCE gulaire où chacun des axes est en tension, définissant des orientations et des enjeux différents selon les moments de la vie. En définitive, cette approche vise à appréhender la complexité des déterminants participant à la construction des choix et des contraintes conduisant à l’absence d’enfant. Aussi, les hommes, si souvent oubliés dans les études de fécondité, ne peuvent en être exclus. C’est aussi dans le but de la plus grande hétérogénéité possible des parcours de vie qu’une diversification sociale est recherchée (voir la liste des entretiens effectués en encadré p. 47). Du choix volontaire à labsence de choix parcours de choix (positif et négatif), les mieux identifiables du point de vue de l’intentionnalité, sont relativement peu nombreux. Ils concernent un tiers de la population d’étude. Les récits féminins dans lesquels l’absence d’enfant est associée à un choix positif sont ceux où l’aspiration à l’autonomie s’affirme avec clarté : « Je crois que ça, c’est un fil qui a dirigé un peu ma vie, cette quête d’autonomie, d’indépendance » (Delphine). La dynamique de la trajectoire à l’entrée dans la vie adulte est marquée par une volonté précoce d’indépendance matérielle, par rapport à la famille mais aussi et surtout par rapport aux hommes : « Je ne souhaitais absolument pas dépendre d’un autre. J’avais envie d’avoir un travail qui me donne cette liberté économique, et d’un travail qui me permette de me réaliser » (Céline). Au-delà de la singularité de chaque parcours conduisant à l’absence d’enfant, il est possible de les situer les uns par rapport aux autres selon un continuum allant du choix volontaire à l’absence de choix. Toutefois, à l’intérieur du même parcours, les positionnements par rapport à la question de l’enfant ne sont pas statiques dans le temps ; ils varient selon le moment du cycle de vie et le vécu de l’histoire sentimentale. Ainsi, rares sont ceux et celles qui n’ont pas été, à un moment donné de leur vie, directement confrontés à la question de l’enfant, soit par la demande d’enfant du ou de la partenaire, soit par la survenue d’une grossesse imprévue. Ce dernier cas de figure se rencontre dans un peu moins d’un parcours sur trois, un peu plus souvent chez les femmes. Au moment où elles entraient dans la vie active, ces femmes n’avaient pas nécessairement un bagage scolaire important. L’intérêt qu’elles ont rapidement porté à leur travail les ont conduites à suivre des formations professionnelles qui leur ont ensuite permis d’avoir des postes avec des initiatives et des responsabilités. Toutefois, le choix entre travail et maternité ne s’est jamais posé à elles comme une alternative : « C’est vrai que j’aime bien mon travail, mais c’est pas ça qui m’a empêchée d’avoir un enfant, à aucun moment » (Marie). Ces trajectoires types se construisent à partir de celles où l’absence d’enfant est posée comme un choix – de sens différent pour les hommes et les femmes – et de celles mettant en avant l’enfance dans l’explication d’un rapport problématique au désir d’enfant – de manière similaire pour les hommes et les femmes concernés. Les traits mis en exergue dans ces trajectoires de choix positif et négatif se retrouvent aussi dans les autres parcours conduisant à une non-procréation non choisie, mais ils y apparaissent de manière plus nuancée et différemment articulés dans le déroulement du parcours de la vie. Ces Les souvenirs de l’entrée dans la vie sentimentale sont associés au mouvement de contestation des normes et du modèle du mariage des années soixante-dix. La critique des liens institutionnels est soutenue par une volonté d’invention, au nom de l’authenticité des relations et des sentiments : « Les gens mariés, tout ça, moi ça ne me donnait pas envie. Je voulais autre chose, une autre image justement, je voulais créer un petit peu quelque chose d’autre » (Valérie). La dimension novatrice de nouveaux comportements comme la mise en couple sans mariage échappait en partie à la conscience de ces femmes au moment où elles Entre travail et maternité : une alternative ? 45 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 s’y engageaient. Comme l’explique Eliane : « J’ai su après que ça avait jasé dans toute la ville [...]. Et moi vraiment, j’ai fait une espèce de petite révolution sans le savoir. Je croyais que j’étais banale, classique, que j’allais me marier, avoir des enfants. Et finalement, j’ai rien fait de si classique que ça. Mais pour moi, je me vivais comme ça, je n’étais ni une aventurière ni une originale ». L’arrivée de la pilule (4) est décrite comme un événement majeur dont les femmes mesuraient la portée libératrice. Elles se savaient en être les premières bénéficiaires et parfois les actrices : « Je peux vous dire que je suis une pionnière de la chose. A 16 ans, donc en 1969, j’ai commencé à prendre ces machins qui étaient des marteaux pilons chimiques qui venaient de Suisse, en fraude bien sûr, puisque c’était interdit, qu’une copine arrivait à faire passer par des militants du Planning familial » (Florence). Toutefois, la participation active aux mouvements de lutte pour la libération des femmes n’a concerné que quelques femmes, dont une explique qu’elle s’est rapidement distanciée des groupes féministes à tendance radicale : « Dans ces groupes de femmes, la maternité se posait par rapport au refus des hommes, du père. J’ai même connu des femmes qui étaient enceintes d’un petit garçon, et qui l’ont refusé. C’était contre le pouvoir des hommes, il ne fallait pas contribuer à reproduire ce pouvoir. Moi j’ai quitté à ce moment-là, ça me paraissait tout à fait extrême » (Claudine). (4) La pilule a été légalisée par la loi Neuwirth du 28 décembre 1967, mais cette loi contenait des dispositions qui en réduisaient l’efficacité, comme par exemple, l’obligation du consentement écrit des parents pour les mineures (la majorité était alors à 21 ans). Il faudra attendre deux autres lois, en 1973 et 1974, pour que la libéralisation de la contraception devienne effective (Ferrand et Jaspard, 1987). Limage positive dune mère active Une constante de ces récits est l’image positive d’une mère active qui a fortement incité ses filles à faire des études, parfois plus que leurs frères : « On n’était pas du tout poussées vers le mariage, pas du tout. Il n’y avait vraiment pas de pression à ce niveau-là mais une pression dans l’autre sens, c’est vrai. Surtout nous, les filles » (Valérie). La socialisation d’Agnès et les normes familiales transmises inscrivaient le mariage et la maternité comme un programme crédible et valorisé pour les filles, mais il n’a pas été perçu comme le seul possible : « J’ai été élevée dans cette idée qu’une jeune femme, elle est faite pour se marier, avoir 46 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 des enfants, à la maison. [...] Mais il y a certainement des choses inconsciemment qui se passaient parce que maman a toujours tenu à travailler en même temps qu’élever ses enfants [...], et donc je sentais bien qu’une femme s’épanouissait dans sa vie professionnelle, c’était clair ». La force de la transmission, plus ou moins implicite, de ce modèle valorisant de mère active et désireuse de l’être semble s’exercer, quels que soient le milieu d’origine, les valeurs et les systèmes de référence transmis par ailleurs. De même, la manière dont les mères de ces femmes ont vécu leur propre maternité paraît avoir considérablement déterminé les attentes et les aspirations de ces dernières vis-à-vis du couple et de la famille. Ainsi, celle de Valérie « aurait sûrement aimé ne pas avoir tous ses enfants. Et elle a toujours eu ce discours qu’avoir des enfants, c’était un frein, puis c’était ingrat. Dès qu’on a des enfants, on a des soucis. Et peut-être que c’est à moi qu’elle s’est le plus adressée... mais je ne l’ai jamais entendu parler d’un côté positif ». Lautonomie nest pas synonyme de célibat L’autonomie pour ces femmes n’est pas synonyme de célibat, au sens d’une vie solitaire. Au contraire, la vie amoureuse est une des composantes centrales de ces trajectoires au sein desquelles la présence de l’homme et les sentiments à son égard sont très investis : « Je ne me suis jamais vraiment trouvée ce qu’on appelle seule, parce que j’ai toujours eu une relation, même que je ne voyais pas forcément tout le temps... mais qui était quand même affective. Enfin une relation amoureuse » (Valérie). La grande différence avec les autres femmes dont l’autonomie est moins revendiquée est qu’ici le couple n’existe pas. La vie à deux non seulement n’est pas attractive mais elle est perçue comme incompatible avec l’image de soi : « Je ne suis pas faite pour la vie de couple. Mon espace, c’est pas ça », et l’indépendance résidentielle apparaît comme un principe de base, presque de l’ordre de l’évidence identitaire : « J’ai horreur de cohabiter moi, je cohabite pas, je ne suis pas une femme qui cohabite ». La vie à deux est réfutée au nom du maintien ENFANCE Les personnes interviewées Les femmes Les hommes Agnès, 43 ans, éducatrice chef, en couple Adrien, 49 ans, musicien professionnel, en couple Aleth, 48 ans, directrice administrative service social, Bruno, 54 ans, chauffagiste, vit seul vit seule Didier, 51 ans, professeur de sport, vit seul Amélie, 40 ans, esthéticienne, vit seule Enzo, 51 ans, cinéaste, en couple Armelle, 43 ans, inspecteur du travail, vit seule Etienne, 52 ans, employé RATP, vit seul Angèle, 47 ans, animatrice M.J.C. (chômage), vit seule Florent, 53 ans, technicien arts graphiques, vit seul Céline, 46 ans, directrice d’école, vit seule Francis, 51 ans, rédacteur d’assurance, vit seul Chantal, 40 ans, éducatrice, vit seule Gérard, 51 ans, photograveur, vit seul Christelle, 46 ans, secrétaire de direction, vit seule Henri, 54 ans, exploitant agricole, vit seul Claudine, 50 ans, économiste, vit seule. Jacques, 45 ans, chauffeur livreur, en couple Danielle, 43 ans, psychomotricienne, en couple Jean-Marc, 49 ans, expert-comptable, vit seul Delphine, 50 ans, documentaliste, en couple Jérôme, 51 ans, cadre financier, vit seul Edwige, 43 ans, secrétaire, en couple Julien, 49 ans, technicien des Ponts et Chaussées, Eliane, 47 ans, assistante technique dans une banque, vit seul en couple Luc, 54 ans, viticulteur, vit seul Florence, 46 ans, éditrice, vit seule Lucien, 50 ans, maraîcher, vit seul Francine, 44 ans, institutrice, vit seule Marc, 46 ans, pigiste, en couple Geneviève, 45 ans, ergothérapeute, en couple Marcel, 49 ans, informaticien, en couple Laure, 45 ans, cadre dans la formation, en couple Mathieu, 53 ans, agent commercial (RMI), en couple Léa, 40 ans, directrice d’une association d’insertion, Michel Yves, 54 ans, magistrat, vit seul en couple Norbert, 46 ans, océanographe, en couple Lucie, 40 ans, infirmière psychiatrique, en couple Olivier, 55 ans, coiffeur styliste, vit seul Lydie, 41 ans, architecte, vit seule Patrice, 50 ans, agent d’entretien, en couple Marie, 49 ans, technicienne de labo, vit seule Philibert, 50 ans, courtier, en couple Mathilde, 50 ans, directrice des ressources humaines, Pierre, 51 ans, ouvrier du bâtiment, en couple en couple Rémi, 52 ans, gérant d’un magasin (préretraite), Monique, 49 ans, cuisinière en collectivité, vit seule en couple Myriam, 44 ans, opératrice de saisie, vit seule Roger, 45 ans, soudeur (RMI), vit seul Nicole, 49 ans, institutrice, vit seule Serge, 49 ans, biophysicien, en couple Paula, 43 ans, maître auxiliaire, vit seule Simon, 54 ans, artisan encadreur, vit seul Susie, 47 ans, agent d’assurance, en couple Stéphan, 45 ans, ouvrier de l’impression, vit seul Sylvie, 41 ans, chauffeuse de taxi, vit seule Thomas, 52 ans, technicien du son (chômage), Valérie, 48 ans, diététicienne, vit seule en couple Virginie, 43 ans, assistante sociale, vit seule L’étude repose sur l’analyse d’entretiens biographiques de trente femmes (de 40-50 ans) et de trente hommes (de 45-55 ans). Hormis l’âge, on a primé dans la constitution de l’échantillon des personnes interviewées le critère d’une diversification maximale du point de vue socioprofessionnel, du milieu de résidence (rural, urbain) et de la situation matrimoniale (en couple ou non). Les entretiens visaient à saisir la manière dont s’est posée la question de l’enfant dans le parcours des personnes, à travers l’histoire familiale (vécu de l’enfance et socialisation), le parcours et les investissements scolaires, professionnels et sentimentaux. Ils abordaient la question de la perception de soi en tant que parent potentiel, le vécu de l’absence d’enfant et le regard des autres en tant que non-parent. 47 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 de l’indépendance mais aussi parce qu’elle est perçue comme le plus grand danger qui guette la relation : « la routine, le train-train, puis la perte du désir de l’autre... ». La vie sentimentale de ces femmes n’est pas uniforme au sein du même parcours et entre les parcours eux-mêmes. Certaines optent pour des « histoires passionnelles mais qui durent » avec des hommes mariés : « Je crois que je me sens mieux dans la peau justement d’une maîtresse que dans la peau d’une femme [...] parce que j’arrive mieux à me protéger et à préserver mon indépendance, tout simplement » (Christelle). Pour d’autres, les investissements amoureux défient d’autres normes comme le choix de partenaires beaucoup plus jeunes : « Moi, je ne suis pas attirée par les hommes de 55 ans, je ne les trouve pas beaux et puis macho [...]. Alors pourquoi faudrait-il qu’on prenne les plus vieux, les plus vilains, les plus grincheux [...]. Moi, tous ceux que j’ai aimés et qui m’ont aimée, c’était des plus jeunes. Alors les femmes ont peur de vieillir, forcément, si la seule perspective c’est de n’être aimée que par des vieux ! » (Valérie). Au quotidien, la maternité implique davantage les femmes L’élan porteur de la vie sentimentale pour ces femmes leur fait-il oublier la question de l’enfant ? Il est clair que celle-ci n’était pas à l’ordre du jour au moment où elles se sont engagées dans la recherche de leur indépendance financière ni même après, une fois installées dans leur mode de vie. En réalité, les parcours féminins dans lesquels le choix positif de ne pas avoir d’enfant est posé précocement et maintenu dans le temps sont rares. Seules deux femmes se souviennent d’avoir fait ce choix depuis leur adolescence. Ainsi, pour l’une d’elles : « J’ai su très tôt que je ne voulais pas d’enfant, et c’est quelque chose qui a très peu bougé en fait. Il y a eu effectivement des moments dans ma vie où je me suis reposé la question et où la réponse a été toujours la même : non » (Léa). Si le désir d’enfant a pu ponctuellement émerger dans le parcours de Léa, il n’avait rien de celui classiquement inscrit dans un projet de couple : « C’est vrai que cet homme en avait envie, mais c’était au moment où ma 48 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 grand-mère était mal et j’ai eu le sentiment, à ce moment-là, que si je faisais un gamin, peut-être qu’elle vivrait jusqu’au bout de ma grossesse, pour le voir. Là effectivement, ça a été une grosse tentation ». Et Léa poursuit : « Bon c’était aussi une très très mauvaise raison de faire un gamin ! ». Pour la plupart des femmes, l’idée de la maternité faisait partie de l’héritage familial transmis et était de l’ordre des possibles mais elles ont repoussé toujours plus loin cette pensée. Ces choix ou ces reports ont tous la même explication : le refus d’une maternité dont l’engagement au quotidien les impliquerait bien davantage que leur conjoint. Et même si elles reconnaissent la richesse de cette expérience au niveau personnel, elles ne sont pas prêtes à en payer le prix, sauf dans l’espoir, « utopique » selon Céline, de voir un jour les rôles s’inverser entre les hommes et les femmes. « Si un conjoint m’avait dit : "écoute, pour notre histoire, c’est important qu’on conçoive un enfant", je pense que j’aurais été capable de faire ce cadeau-là sans problème. Mais à condition que, derrière, je sente qu’il y avait quelqu’un qui avait la capacité de prendre en charge en longue durée. Que moi, je sois quelqu’un de moins permanent dans le rapport à l’enfant. C’est-à-dire que les rôles soient un peu inversés, pour que je puisse basculer » (Céline). Chez les hommes, un maître mot : liberté Les trajectoires masculines de refus d’enfant par choix délibéré se déclinent sous le maître mot de « liberté » : « Moi c’est ma liberté, c’est rien d’autre que ça ». Cette liberté revendiquée est celle du refus des contraintes associées aux responsabilités de la vie de famille, à l’attachement territorial, à la disponibilité temporelle et la charge mentale que celle-ci exige : « Moi, dès le départ, j’ai toujours voulu faire ce que j’avais envie. [...]. Disons qu’avoir une vie à deux ou des enfants, pour moi, c’est un manque de liberté, principalement » (Stéphan). Pour ces hommes, la quête de liberté s’affirme souvent depuis l’adolescence : « A 14 ans déjà, je ne supportais pas les contraintes, c’est dans mon caractère ». Parfois, comme pour Patrice, elle passe par des conflits avec le père où les rap- ENFANCE ports de force s’illustrent par une démonstration virile, signifiant que la période de la soumission à la toute-puissance paternelle est terminée. L’âge symbolique de la majorité concrétise cet élan vers la liberté : « Moi, je n’attendais qu’une chose, c’était pouvoir me barrer à 21 ans ». Pour d’autres, la contestation est dans l’air du temps et participe au mouvement collectif de Mai 68 : « C’est vrai que les pavés contre les CRS, ça, j’étais pas le dernier non plus. Je m’en rappelle comme si c’était hier ! ». La conscience de la force collective de ce mouvement qui rejaillit au niveau individuel apparaît dans le récit de Stéphan comme la clé d’explication centrale de son choix de ne pas avoir d’enfant : « Ça m’est jamais venu à l’idée de vouloir me marier, avoir des gamins [...]. Ça vient peut-être aussi de l’époque, des années soixante-dix, y a ça qui a fait aussi. Moi je pense que ça viendrait plutôt de là [...]. C’était une certaine liberté, tout le monde revendiquait à droite, à gauche. C’était plus ou moins être contre la famille, contre la société ». La définition de soi comme individu libre Dans ces récits, les identités masculines se construisent dans la définition de soi comme individu libre, défiant l’obligation de se soumettre à un ordre social, de se plier à certaines formes de servitude comme celles de la hiérarchie au travail ou de la stabilité du cadre professionnel. Le souci de préserver la possibilité d’une mobilité physique et géographique est une constante dans tous ces entretiens : « Je voulais pouvoir bouger [...], c’est pour ça que je suis allé bosser sur contrats à l’étranger » (Patrice). Pour ces hommes, le service militaire – rite de passage traditionnel dans la vie adulte – a été le moment où s’est affirmée de manière décisive l’orientation d’une trajectoire différente de celle des « copains d’armée » : « Moi, mes copains de l’armée m’ont invité à leur mariage et tout. Je voyais bien qu’il y avait une différence. Mais pour moi, cette voie-là ne m’intéressait pas » (Stéphan). Les univers qui dominent ces parcours d’« hommes libres » sont ceux des amis, dont la fidélité inconditionnelle ne s’affaiblit que lorsque l’un d’eux cède à la tentation du retour à la « norme » par les voies du couple et de la création d’une famille. Dans les paroles de Jacques, on peut déceler le danger qu’aurait pu constituer l’arrivée d’un enfant pour le maintien de ces liens amicaux : « A 25 ans, j’avais une copine qui voulait un enfant. Moi, je ne me voyais vraiment pas, ça m’aurait cassé mon élan. Non, je ne voulais pas me faire piéger avec ça, et toujours pas d’ailleurs [...]. Non. Puis, enfin, je ne sais pas si t’as peur ou... Tu te dis, les copains, ça va plus être pareil. D’ailleurs, ça se voit bien après, quand t’as des copains qu’ont des mômes, on ne les voit plus. C’est triste, c’est dommage ». La vie amicale : lieu central dinvestissement identitaire L’intensité de cette sociabilité masculine est pour certains telle qu’elle semble remplir la totalité du temps hors travail. Ce dernier n’est pas désinvesti mais se réduit à sa stricte fonction de nécessité : « Le travail, c’est une chose, mais bon, sorti du travail, ça me prend plus la tête ». L’incitation aux études longues ne fait pas partie du schéma familial dans lequel le père occupe souvent un emploi manuel : « Moi je sais qu’étant l’aîné, j’ai tout de suite opté pour un CAP. Etant d’un milieu modeste, ce que je voulais, c’était gagner ma vie le plus tôt possible. Et puis être déjà indépendant de mes parents » (Stéphan). Cette vie amicale ne consiste pas seulement en des occasions de sorties et de plaisirs hédonistes. Elle est, au contraire, un lieu central d’investissement identitaire. Au même titre que la famille est le lieu de la reconnaissance de soi par les proches, les amis sont ici les « autrui significatifs » permettant la construction d’une identité « pour soi » positive, cohérente avec l’exigence individuelle de liberté. De la même manière, les investissements sportifs, souvent très engageants, ne sont pas seulement des loisirs mais des formes de réalisation personnelle qui, tout comme la vie centrée sur les sorties entre amis, est incompatible avec une conjugalité au quotidien. Stéphan, qui a toujours refusé la cohabitation, est conscient que sa conception de l’indépendance a pu être à l’origine de la rupture avec sa dernière compagne qu’il 49 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 regrette : « Il fallait toujours que je bouge, les week-ends à la montagne et tout [...]. Elle, ça ne l’intéressait peut-être pas que je ne sois jamais là [...]. C’est vrai que j’étais un peu égoïste à ce sujetlà ». Une vie à deux possible mais dans un quotidien « partiel » dessinent dans leurs parcours, l’une qui est restée dans l’ombre jusqu’à ce qu’un événement déclenche le processus de « révélation », ouvrant sur une autre vie dont la lumière éclaire d’un jour nouveau le passé et le présent. Ce nouveau regard sur soi et sur sa vie constitue une rupture dans la biographie subjective et procède d’une véritable transformation identitaire. On l’aura compris, toute idée d’enfermement ou même d’« attache » est rejetée par ces hommes. Et la vie amoureuse, si elle n’est pas exclue, doit rester dans le cadre léger des aventures, au moins pour un temps, qui peut s’éterniser pour certains : « Non, c’est vrai que jusqu’à 35-40 ans, j’avais des copines [...]. Mais je ne pensais pas du tout fonder un foyer ». Les modalités de vie sentimentale répondent à cette règle prioritaire du refus des contraintes. La cohabitation n’est possible que dans le cadre limité d’un quotidien « partiel » ou définitivement rejetée. Sans ce « travail » d’élaboration subjective et de retour sur l’enfance, le désir d’enfant peut être marqué par un interdit : la peur de reproduire des mécanismes de violence vécus avec la mère. C’est le cas, par exemple, pour Chantal : « Je ne supporte pas d’entendre des gamins crier. Je me bloque. Je ressens la violence. J’ai énormément de violence. Ma réaction, ce serait de taper, ça je le sais. Et il me faut une énergie absolument extraordinaire pour me retenir ! [...]. Donc il y a cet aspect, peur de reconduire la violence, de pas être capable d’aimer les enfants ». Dès que la relation s’installe dans la durée, que la vie conjugale a pu s’établir, certes sous le mode du compromis (vie à deux sauf le weekend, une semaine sur deux...), la question de l’enfant est alors clairement annoncée : « Ah moi, j’ai été franco dès le départ. Je lui ai dit : "pas de mariage, pas de gamin !". Maintenant, elle fait ce qu’elle veut, c’est à elle de décider... Mais bon, apparemment, ça ne doit pas trop la travailler parce que ça fait quatre ans que ça dure » (Jacques). Le vécu envahissant dune relation maternelle Avec l’avancement dans le parcours de vie, de nouvelles formes d’attachement sentimental se dessinent dans le sens d’une plus grande stabilité et longévité des relations. Toutefois, elles doivent rester compatibles avec les aspirations à la liberté qui se sont inscrites avec le temps dans un mode de vie dominé par le sentiment d’une libre appartenance. Un troisième type de trajectoire dont les contours se dessinent avec netteté est celui où la question de l’absence d’enfant est présentée comme intrinsèquement liée à la problématique familiale et à l’enfance. Pour ces hommes et ces femmes, la reconstruction de soi, au sens psychologique, était une nécessité pour accéder au désir d’enfant. Ainsi, deux vies se 50 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 Pour d’autres, le vécu envahissant d’une relation maternelle semble avoir rendu impossible toute construction d’un soi autonome, comme si le développement personnel s’était figé précocement dans la dépendance initiale à la mère : « J’ai eu une mère très possessive, castratrice, étouffante [...]. J’avais besoin de naître, donc c’était pas possible de faire naître quelqu’un ! » (Lucie). Contrairement à tous les autres récits, la place de la question de l’enfant dans ces parcours est longtemps statique, comme enfermée dans une double temporalité : celle, indépassable, de l’enfance et celle du parcours et des mouvements de la vie dans lesquels elles ne s’intègre pas. La vie amoureuse est peu habitée par la question de l’enfant qui s’y maintient en arrière-plan, masquée par la problématique personnelle. L’ouverture se dessine quand le retour réflexif sur l’enfance permet de comprendre après coup les chaînes de causalité qui relient entre elles toutes les expériences vécues ensuite. Cette élaboration qui reconstruit la cohérence interne du parcours en même temps que la reconstruction identitaire se ENFANCE réalise demande du temps : « Tout ça est très long, et ce n’est que récemment que je commence à comprendre ». La question de l’enfant est alors une parmi d’autres, relatives à l’identité, qui accède progressivement à une certaine visibilité pour la personne : « Je crois qu’avant d’en arriver là, ce que j’ai vécu jusqu’à maintenant, c’était toujours l’enfant qui essayait de sortir du giron de la mère. Donc si je suis enfant, je ne peux pas imaginer avoir un enfant. Enfin ça ne s’explique pas, mais je crois que psychologiquement j’en étais là [...]. J’avais ce mal-être intérieur à résoudre d’abord. La question de l’enfant, c’était pas ma question [...]. Et je sens bien que maintenant, l’ouverture s’est faite » (Lucie). Une « renaissance » peut déboucher sur un avenir fermé Mais le moment de cette « renaissance », qui s’ouvre parfois sur la conscience d’un désir d’enfant, peut déboucher sur un avenir fermé : le temps est passé pour espérer le voir se concrétiser. Le parcours de Danielle en est l’illustration : lorsqu’elle découvre (à la fin d’une longue psychanalyse) qu’elle pourrait désirer être mère, cette éventualité ne peut se réaliser qu’à travers l’adoption ou l’accueil d’un enfant. En effet, l’homme que Danielle a épousé a 70 ans aujourd’hui. Selon elle, le choix de ce conjoint beaucoup plus âgé n’est pas neutre. Il renvoie à la seule figure masculine positive qu’elle ait eue : celle de son grand-père. Aussi explique-t-elle : « Pour moi l’enfance, c’est de la souffrance […]. Donc pour pouvoir réussir l’alchimie de faire un bébé, il fallait forcément le magicien qui croyait à la beauté de l’enfance […]. Je me suis choisi un magicien sans baguette ! ». Dans d’autres parcours, quand l’âge psychologique est enfin arrivé – ou le sentiment d’une maturité psychique – pour penser à être mère ou père, le décalage avec l’âge physiologique ou social était parfois trop important pour envisager l’idée de l’enfant à peine émergée. Restent alors toutes les autres formes d’épanouissement de soi auxquelles « cette renaissance » permet également d’accéder, telle qu’une activité artistique ou un investissement associatif. A l’opposé des trajectoires de choix positif et négatif, se trouvent celles, peu nombreuses dans l’étude, où l’absence d’enfant renvoie à une absence totale de choix : celles où le souhait d’enfant s’est heurté au célibat non choisi et à l’absence de rencontres amoureuses. « J’aurais bien voulu, oui. C’est parce que je n’ai pas trouvé l’âme soeur, c’est tout » (Lucien). Mais qu’en est-il de ces parcours biographiques où l’absence d’enfant ne peut se définir ni véritablement sur le mode du choix volontaire ni totalement sur le mode du choix subi, basculant parfois de l’un à l’autre ? La réalité se situe dans l’entre-deux, dans cet espace mouvant où se mêlent intentionnalité et déterminations, choix et hasards de la vie. Ces femmes et ces hommes n’ont ni choisi de ne pas avoir d’enfant ni décidé d’en faire un. Certains à un moment donné l’ont souhaité, d’autres n’y ont jamais vraiment songé, c’est le cas de nombreux hommes : « J’ai pas un rejet particulier, c’est un concours de circonstances, ça se fait ou ça se fait pas. Il n’y a pas une volonté de ne pas en avoir [...]. Donc le choix fondamental, c’est qu’en fait je suis assez indifférent à ce problème. Avoir un enfant ne m’aurait pas déplu. Ne pas en avoir ne me gêne pas [...]. Bon maintenant, on ne peut jamais dire, si demain l’occasion se présentait... » (Enzo). Le jeu des « circonstances de la vie » Ni « désireux » ni « refusants », ces hommes se seraient laissé volontiers entraîner dans la parentalité si leur conjointe leur en avait fait la demande, passant de « distants » à « consentants » potentiels : « Si j’avais eu une femme qui exerce à mon égard une pression, même modérée, pour qu’on fasse un enfant ensemble, je suis persuadé qu’on l’aurait fait. Mais je n’ai jamais eu cette demande de la part des femmes que j’ai rencontrées » (Serge). Pour ces hommes projetés dans le mouvement de la vie, la question de l’enfant a pu d’abord passer au second plan puis s’effacer progressivement ou refaire surface de temps à autre, sans jamais s’ancrer dans un projet ou que ce dernier se concrétise. Le jeu des « circonstances de la vie » (les ruptures d’union, le désaccord sur la question 51 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 de l’enfant dans le couple...), les options qui ont engagé, parfois malgré soi, dans d’autres voies que celles de la maternité et de la paternité apparaissent comme autant d’impondérables biographiques qui ne relèvent réellement ni de stratégies rationnelles ni d’un déterminisme absolu. soi et de sa vie, mettent aussi hors d’actualité la question de l’enfant : « Après mon premier couple de dix ans là, il m’a fallu, oh oui, au moins cinq ans pour faire le deuil, le deuil de cet homme, de tout. C’est après, à 35 ans que j’ai rencontré cet homme, et là je savais dès le départ que pour lui il était pas question de faire des enfants » (Eliane). La fragilité du lien amoureux, élément déterminant Les débuts d’une nouvelle union ne sont pas davantage propices à l’idée de l’enfant. Comme l’explique cet homme, la relation de couple a besoin de temps pour se construire et ce n’est que secondairement que l’idée de la venue d’un enfant peut prendre forme : « Je me suis tout de suite engagé dans une nouvelle relation. Mais le temps de cette relation, il y a une période qui est une perte de temps par rapport à avoir un enfant ou pas. Le temps que cette relation s’organise, le temps a passé... » (Michel Yves). La fragilité du lien amoureux est, dans l’ensemble de ces récits, l’élément le plus déterminant conduisant à la non-procréation. Nombreuses sont les trajectoires sentimentales qui auraient potentiellement pu conduire au projet d’enfant si une rupture précoce n’était pas survenue. La non-concrétisation de cette éventualité se transforme souvent en une mise à distance de la question de l’enfant, définitivement oubliée quand l’engagement dans le reste du parcours s’oriente dans une vie sentimentale sans quotidien partagé ou vers un célibat durable. Pour Julien, ne pas avoir d’enfant n’est pas un choix mais la résultante indirecte d’une première expérience amoureuse douloureuse, au moment où il débutait sa vie sentimentale : « Moi je crois... j’ai eu une déception quand j’avais 24 ans et puis... après, j’étais un petit peu aigri. Ça a même tourné plus ou moins un petit peu à la boisson. J’ai fait la fête avec les copains, ça a duré un certain temps. Puis les copains se sont mariés. Ils ont eu eux des enfants, et je me suis retrouvé un peu seul, relativement âgé, et plus très envie de sortir. C’est un petit peu ça, je pense, le fait que je n’ai pas eu d’enfant, c’est plutôt un truc comme ça ». Pour Julien, cette première expérience est décisive dans la mesure où elle correspond à la fin de sa vie sentimentale : Julien a 50 ans aujourd’hui et n’a pas connu d’autres femmes depuis. Dans la plupart des parcours sentimentaux aboutissant à une absence d’enfant, ni choisie ni subie, les parenthèses de temps, parfois assez longues, qui suivent une séparation sont autant d’années de moins dans le temps potentiellement ouvert à la procréation. Ces moments de deuils d’une relation, s’ils peuvent être l’occasion d’une reconstruction de 52 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 La qualité de la relation : une condition du désir denfant Quand la question de l’enfant s’est posée dans le cadre d’une relation de couple instaurée, le refus du conjoint a conduit à la reporter jusqu’à ce que survienne la rupture. Les femmes, dans cette étude, sont davantage en situation d’attente de confirmation d’un désir partagé par l’autre que les hommes. Le simple sentiment d’un décalage en leur défaveur a parfois suffi pour mettre à distance leur désir qu’elles ne se sont pas autorisées à revendiquer ni même parfois à exprimer : « J’ai pas cherché à imposer mon désir d’enfant ». Ainsi, les désirs d’enfants qui ont pu émerger à un moment donné de ces parcours sont parfois restés dans le domaine de l’implicite, hors de la sphère de la négociation conjugale. Pour certains, la question de l’enfant est restée longtemps en arrière-plan, se rattachant au désir plus fort de l’autre : « Je n’ai jamais refusé de faire un enfant. J’avais une vitesse un peu en retard par rapport à elle, c’est vrai que je précipitais moins la chose, je faisais moins systématiquement ce qu’il fallait pour être sûr d’en avoir. Et peutêtre qu’elle le sentait ». L’importance accordée à la qualité de la relation comme condition du désir d’enfant est ENFANCE partagée par tous et toutes. Les réticences masculines renvoient à l’affaiblissement du sentiment amoureux dans le processus de durée du couple : « C’est sûrement que je devais pas être très amoureux ». Pour les femmes, les exigences du lien amoureux se conjuguent avec des attentes en termes de fiabilité de l’engagement du partenaire dans le temps long et dans ses responsabilités de père potentiel. Nombreuses sont celles, comme Sylvie, à dire qu’elles n’ont « jamais trouvé le père qu’il fallait », et, précise-t-elle : « Je ne les sentais peutêtre pas vraiment sûrs, donc je me suis dit "je vais me retrouver seule avec un gamin, puis dans trois ans, je serai toute seule" » (Sylvie). Ces attentes révèlent la conscience des enjeux plus lourds pour elles des risques de rupture du couple. Davantage masculines, les préoccupations d’ordre matériel et économique ont pu jouer dans le sens du report de l’idée d’enfant, mais rarement comme un empêchement à la réalisation d’un projet bien formalisé. Pour Roger, la mémoire de l’enfance est celle du manque absolu, des crédits chez l’épicière, de l’attente des allocations familiales ; il est aussi le seul pour qui l’insuffisance des conditions matérielles a déterminé son refus d’entrer dans la paternité, au début de sa première vie conjugale. Pour lui, la paternité signifiait avant tout un devoir de responsabilité majeur : être en mesure de garantir un quotidien « correct ». « Moi je voulais pouvoir assurer le beefsteak tous les jours [...]. Elle, elle voulait des enfants, moi je lui ai dit d’attendre un peu, qu’il y ait tout ce qu’il fallait à la maison et que je puisse assurer. Une fois, elle a été enceinte et puis, elle l’a fait passer. Pour elle, cela n’a pas été une décision trop facile, mais moi je lui disais "attends là, attends un peu !" ». Limportance dune stabilité professionnelle « C’est le temps qui a passé » est une des phrases qui revient le plus souvent dans ces récits. Outre les temps « creux » pour la question de l’enfant, ceux des deuils d’une relation où elle est exclue, les moments où elle est reportée peuvent être déterminants dans la suite du parcours. Pour les hommes, l’importance d’une stabilité professionnelle avant tout projet de mise en couple a différé la question de l’enfant bien au-delà des débuts de la vie adulte : « Moi je ne concevais pas de fonder un foyer si je n’avais pas une situation stable. Parce que c’est vrai que la femme, à cette époque-là, elle ne travaillait pas beaucoup encore » (Bruno). Les temps très denses de l’investissement professionnel, dans un « métier passionnant », ou l’entraînement dans une trajectoire d’ascension sociale sont présentés comme l’explication centrale de la mise à distance de la paternité : « La période dans laquelle j’aurais pu me marier était tellement intense, j’avais une vie tellement trépidante, et je pensais gravir un petit peu les échelons dans la société parce que le boulot que j’effectuais ne me convenait pas. Donc il fallait que je travaille. J’ai passé des concours jusqu’à l’âge de 30-35 ans [...].Dans une période assez longue, j’ai toujours eu des choses à passer qui ont fait que je n’envisageais pas de construire une vie familiale. Et puis, tout allait trop vite » (Didier). Lambition remet à plus tard la question des enfants Parmi les quelques femmes de l’étude qui ont connu une trajectoire fortement ascendante, Aleth est la seule à considérer qu’elle « a tout sacrifié » à sa vie professionnelle. La brillante carrière qu’elle a menée relève d’un défi personnel et d’une très forte motivation compte tenu de son origine ouvrière : « Jusqu’à ce que je satisfasse cette ambition professionnelle – 35 ans – la question d’avoir des enfants était remise à plus tard, parce que l’objectif était, venant d’un milieu socialement défavorisé, une sorte de revanche à prendre ». C’est aussi l’investissement pour sa réussite professionnelle qui a détourné Aleth des possibilités de rencontrer un homme avec qui elle aurait « aimé fonder une famille ». Les partenaires qu’elles a rencontrés par la suite étaient, en effet, déjà engagés dans une vie familiale. Pour l’un d’eux, ce n’était pas un obstacle pour envisager une seconde famille avec Aleth : « Lui il se voyait bien un peu… avoir une double vie. Moi faire un enfant avec un homme marié qui a une famille, c’était absolument exclu. On ne détruit pas une famille comme ça, c’était contre mes valeurs ». 53 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 La norme des bons âges pour la procréation, avec une limite au-delà de laquelle il n’est plus raisonnable de faire un enfant, a pu peser lourdement sur ces parcours conduisant à l’absence d’enfant, surtout ceux des femmes, et parmi elles, les moins scolarisées : « A 35 ans, c’était trop tard. De toutes façons, je ne voulais pas faire un enfant à cet âge-là » (Monique). Au demeurant, les hommes ont aussi intériorisé les bons âges pour être père. Pour la plupart, l’accès à la paternité au-delà de 45 ans relève de « l’égoïsme », du « manque de sérieux » et « tourne au ridicule » : « Ce serait vraiment le grand-père qui irait chercher ses petits-enfants à l’école... ». Une norme de la fin du bon âge de la maternité Seuls quelques hommes, artistes, plus distants des normes usuelles et des modèles dominants, critiquent la rigidité de ces prescriptions sociales. Ainsi Enzo, qui au cours de sa vie n’a « jamais trop pensé » à la question de l’enfant, se plaît à rêver d’une paternité à l’âge de la retraite. Olivier est le seul qui, n’ayant pu réaliser son projet d’enfant dans son premier couple, l’envisage sérieusement dans un avenir proche : « Il ne faut pas attendre 70 ans. Il ne faut pas non plus exagérer. Mais là j’en ai 55. Dans les trois ans à venir, il faut que ça se fasse ». La compagne qu’Olivier a choisie a 15 ans de moins que lui. Pour les femmes, les critères médicaux et l’intérêt de l’enfant – qui ne doit pas être « un enfant de vieux » – fondent la norme de la fin du bon âge de la maternité, situé par la plupart autour de 40 ans. D’ailleurs, les médecins apparaissent dans certains récits, rappelant aux femmes qu’elles ne doivent pas oublier de penser à la question de l’enfant : « Déjà mon généraliste, c’était : "alors quand est-ce que vous nous le faites ce petit ?". Et ma gynéco, elle aussi. Comme si, là encore, cette sorte de pression c’est : "vous n’êtes pas bancale, vous vivez en couple, qu’est-ce que vous faites tous les deux sans... sans faire d’enfant ?". Encore, quand on vous pose la question : "est-ce que vous avez des enfants ?", c’est un peu de curiosité parce que c’est souvent un sujet de conversation. Mais quand on passe au stade d’après : "mais pourquoi ?", alors moi, je le sens comme une intrusion dans la vie intime ». 54 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 Le temps limité de la procréation à la barrière physiologique de la ménopause est une donne intériorisée qui constitue une sorte de repère temporel pour les femmes, qu’elles aient ou non souhaité un enfant au cours de leur vie. Ce seuil correspond à une potentialité qui disparaît, une liberté de choix de vie qui s’efface pour les femmes – et à l’ancrage du regret pour celles qui avaient encore de l’espoir – alors que l’avenir reste ouvert pour les hommes. La fermeture subjective que ce seuil impose apparaît dans de nombreux récits de femmes, y compris celles comme Francine qui n’ont jamais cherché à être mère : « J’ai 44 ans. Honnêtement, c’est fini maintenant pour moi. Mais en même temps, je me dis "ça alors c’est injuste par rapport aux hommes parce que eux, jusqu’à ce que mort s’en suive quasiment, ils peuvent faire des enfants". Et là je me dis que nous les femmes, mises au pied du mur comme ça, on ne peut plus... Non pas pour se dire "je le ferai cet enfant, mais j’ai la possibilité toujours de dire non, de dire oui ou non" ». Absence denfant : le temps des regrets na pas sa place Pour les hommes qui, sans l’avoir refusée, n’ont jamais trop pensé à la paternité, l’idée qu’ils resteront sans enfant s’est construite progressivement, sans même qu’ils n’y prennent garde. En témoignent les hésitations de Didier à situer le début de ce processus : « Je ne sais pas, depuis... je dirais environ une dizaine d’années... non, moins que ça… enfin, je ne sais pas. Les choses se sont faites comme ça sans que... ». La différence est que pour eux, tout n’est pas joué, l’espace des possibles reste ouvert et, avec lui, la possibilité du choix, la liberté de modifier le cours de sa vie. Ainsi Didier poursuit : « Mais je ne sais pas ce que l’avenir me réserve, tout peut arriver et c’est tant mieux... ». Le temps des regrets n’a pas sa place dans les parcours de ceux et celles qui ont fait le choix positif de ne pas avoir d’enfant. Les regrets n’habitent pas non plus ceux qui ont fait ce choix par crainte de « transmettre des choses négatives » à l’enfant : « Il n’y a pas de manque, c’est même un soulagement. J’ai souffert enfant, et je pense que je n’avais rien de bon à trans- ENFANCE mettre à un enfant » (Simon). En revanche, les regrets ont pu s’installer quand la maternité et la paternité n’ont été ni refusées ni décidées, dans un parcours à la fois choisi et subi. (5) Pour Odile Bourguignon (1987), il est « probable que les femmes qui ne veulent pas avoir d’enfant auront bientôt l’autorisation culturelle de ne plus en faire, abandonnant la maternité à celles-là seules qui la souhaitent. Participant du même mouvement culturel, les hommes sont corrélativement contraints de s’adapter, bon gré mal gré, à cette nouvelle définition ». (6) C’est aussi ce que montre une étude anglaise récente (McAllister et Clarke, 1998) ayant une approche assez ouverte de « l’infécondité volontaire », c’est-àdire non exclusivement centrée sur des personnes ayant fourni la preuve de leur choix (personnes stérilisées et militant dans une association de non-parents...). Ainsi aux Etats-Unis, les membres de la National Organization of NonParents, fondée en 1972 et militant pour la reconnaissance sociale des personnes refusant la parentalité, ont été régulièrement enquêtés. Quand à 30 ans, Marcel rencontre sa compagne actuelle, le fait qu’elle ait neuf ans de plus que lui et trois grands enfants « n’était pas un problème. De toute façon, on ne sait jamais si ça va durer au début ». Aujourd’hui, Marcel a 49 ans et regrette de ne pas avoir d’enfant. Il sait qu’il ne pourra pas réaliser ce souhait, sa compagne ayant déjà quelques petits-enfants... Il a vécu chacune de leur naissance comme « une épreuve », d’autant plus qu’il sait s’être volontairement détourné de la possibilité de connaître l’expérience de la paternité : l’IVG que sa compagne et lui ont décidée peu après leur rencontre est un souvenir qui ravive son regret actuel. A travers la diversité des causalités en jeu dans la non-procréation, un constat s’impose : les cadres sont trop étroits et la frontière trop rigide entre les catégories de « l’infécondité volontaire » et de « l’infécondité involontaire ». Leur limite tient au peu de place laissé au jeu des passages et des inversions entre choix et non-choix dans la dynamique temporelle, ainsi qu’à l’incertitude et à l’indécision. Mais elle tient surtout au présupposé de l’intention décisionnelle comme étant au principe de la venue des enfants, de leur retard et de leur absence définitive. Or la procréation ne semble pas toujours s’inscrire dans l’espace de la rationalité individuelle. Restées en filigrane tout au long de cette étude, certaines questions prennent, au terme de cette présentation, des contours plus précis. La première concerne la validité de l’idée dominante selon laquelle les femmes, en maîtrisant la contraception, maîtriseraient aussi la procréation. Si la plupart des enfants qui naissent aujourd’hui ont été désirés, ces parcours biographiques montrent que bien des désirs d’enfant n’ont pu être réalisés. La seconde vise à nuancer la thèse (5) selon laquelle les femmes, en refusant la maternité, entraîneraient les hommes dans leur choix, ces derniers ayant perdu leur pouvoir décisionnel sur la procréation avec l’arrivée de la pilule. Les hommes aussi font le choix de ne pas avoir d’enfant et le font beaucoup plus souvent que les femmes (6). L’accent porté sur les différences de genre – sans doute aux dépens des différences de classe dans cette approche – fait apparaître des choix de non-procréation sexuellement différenciés. Le choix de ne pas avoir d’enfant au masculin comme condition de la garantie d’une liberté sans contrainte se fonde sur l’incompatibilité de la coexistence de l’engagement privé et d’une vie extérieure et renforce le clivage du féminin et du masculin et le primat de ce dernier dans la sphère publique. La dynamique féminine du choix de ne pas avoir d’enfant, quant à elle, questionne les rapports sociaux de sexe à travers l’accès à l’autonomie et la recherche d’une réalisation personnelle tant dans la sphère professionnelle que privée. La priorité donnée par les femmes à d’autres investissements sur l’engagement maternel renvoie au coût plus important de ce dernier pour elles, dans le contexte actuel des rapports entre les hommes et les femmes. Une nouvelle conception de la parentalité Les trajectoires de reconstruction psychologique de soi sont une des expressions de l’importance accordée aujourd’hui à l’identité individuelle. Certes, l’attraction pour les sciences de l’introspection comme la psychologie et la psychanalyse n’est pas partagée par tous, quel que soit le milieu d’origine et le sexe. Elle suppose déjà que les contraintes environnementales n’occupent pas la première place dans l’ordre des difficultés existentielles. Mais on peut penser qu’avec la diffusion de plus en plus large de la culture psychologique qui accompagne, en le renforçant, le processus d’individualisation, la remise en cause personnelle de ses propres compétences à la maternité et à la paternité sera de plus en plus légitime. Affaiblissant l’évidence du désir d’enfant, ces questionnements correspondent à l’envers de la médaille de la nouvelle conception de la parentalité comme une source d’épanouissement personnel, fondée sur la qualité des relations interindividuelles. 55 RECHERCHES ET PRÉVISIONS N° 62 - 2000 Références bibliographiques Attias-Donfut C., Générations et âges de la vie, Paris, PUF, collection Que sais-je ?, 1991. Battagliola F., Le temps des insertions. Itinéraires féminins et histoires familiales, Annales de Vaucresson, 1987/1, n° 26. Baum F. et Cope D.-R., Some characteristics of intentionally childless wives in Britain, J. Biosoc. Sci., 1980, n° 12. 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