Indications des explorations fonctionnelles de

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Indications des explorations fonctionnelles de
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES
DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
La qualité première d’un examen “complémentaire” est de le
re ster. I l de vient superf lu dè s lors que l’ inf orm a tion qu’ il
apporte peut être obtenue par la clinique. Or, trop souvent,
un examen urodynamique est prescrit dans le seul but de
confirmer un diagnostic clinique, d’affirmer, par exemple, que
la vessie est instable ou que le sym ptôme e st d’origine
neurologique. La symptomatologie fonctionnelle relative aux
troubles de la continence et de la m iction e st d’ une trè s
gra nde riche sse pour pe u qu’ on sa che bie n pose r le s
questions et bien interpréter les réponses. (Note 22)
L e s e xa m e ns urodyna m ique s a na lyse nt un é quilib re
fonctionnel. Prenons un premier exemple : une femme perd
s es urines lors d’ un bes oin im pé rieux ; ce sym ptôm e
clinique suf fit pour affirm er qu’ elle a une incontinence pa r
impé riosité . Mais l’ exam en urodynam ique e st né ce ssa ire
pour préciser si la fuite relève d’une contraction vésicale trop
puissante ou d’une réponse sphinctérienne trop faible (voir
Figure 81). Au même symptôme peuvent donc correspondre
d es é quilib re s urodyna m iq ues diff é re nts. L’ inverse e st
p oss ible : le m ê m e é q uilib re uro dyna m iq ue p e ut
caractériser des entités cliniques diamétralement opposées.
Pre nons un se cond e xe mple : tout sé pa re l’incontinence
d’ une je une fille a tteinte d’un syndrom e de la que ue de
cheva l et celle d’une grand mère âgée : l’â ge, la parité, le
c onte xte ne urologique. Pourta nt, elles partagent le mê me
é quilibre urodyna mique cara ctérisé par une a contractilité
vésicale et une hypotonie sphinctérienne, conséquences de
l’a tteinte neurologique chez la je une fille, de l’â ge e t de s
maternités chez la grand mère.
Cet équilibre fonctionnel repose sur des forces antagonistes,
qui s e ré sum ent, com m e nous l’ a vons vu a u c ha pitre
physiologique, à 4 principaux paramètres :
• pendant le remplissage :
- la pression vésicale (compliance)
- la pression uréthrale maximum (tonus sphinctérien)
• pendant la miction :
- la pression vésicale mictionnelle (contractilité)
- la résistance uréthrale.
Ce rte s, à chacun de ces param è tre s corresponde nt de s
valeurs normales et anormales. Mais un équilibre se définit
non par la normalité de chacun de ces composants, mais
par la normalité du résultat (Note 23) . Prenons un troisième
e xe mple : deux fem me s sont contine ntes ; la pre miè re à
une c om plia nc e norm a le , une c ontra c tilité f a ible , une
pression uréthrale élevée et une résistance uréthrale basse ;
la se conde à une c om plia nce norm ale , une contra ctilité
f orte , une pre ssion uré thra le ba ss e e t une ré sista nc e
uré thra le é le vé e . V ous d e vin e z q ue la pre m iè re e s t
“sponta ném e nt” c ontine nte , a lors que la se conde l’ es t
redeve nue a près une inte rvention de colpope xie dont l’un
de s m é c a nism e s d’ a c tio n e st l’ a ug m e nta tio n de la
résistance uréthrale (voir note 40).
Fina le m e nt, le but de s e xa m e ns urodyna m ique s e s t
d’expertiser la qualité fonctionnelle de la voie excrétrice, c’est
à dire le conf ort et la sécurité. Ce tte a pproc he analytique
n’est pas un mode de raisonnement habituel en médecine ;
au c ontra ire, le futur m édec in est entra îné à se servir du
symptôme uniquement comme moyen d’aller au diagnostic
NOTE n° 22 :
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C5
PETIT LEXIQUE DES TROUBLES DE LA CONTINENCE
ET DE LA MICTION.
• Brûlu re s m ictionne lle s : doule ur à type de c uisson, irradiant le long de
l’ urèt hre surve nant pe ndant et s urtout e n fin de mic tion, e t se poursuivant
parfois quelques minutes après celle-ci.
• Dysurie (
= difficilement,
= uriner) : Ethymologiquement “gène à la
miction” : terme réservé, en France, aux mictions difficiles, lentes à démarrer et à
se tarir, avec un jet faible, nécessitant ou non la poussée abdominale.
• Enuré sie (
= urine r sur s oi) : miction c omplè te e t involonta ire . Par
h abitude , le t erme dé finit unique ment le s mictions surve na nt pe ndan t le
sommeil.
• Im pér iosité (impe rium = commandement) : besoin soudain (non progress if,
d’emblée urgent), et non inhibable (ne disparaissant pas momentanément après
un effort de retenue).
• Inc on ti ne n c e (inc ont ine ntia = imposs ibilité de re te nir) : Pe rte d’ urine
involonta ire , pa r dys fonct ion neme nt de la ve ssie e t/ou de se s sphinc te rs,
entraînant une gène dans la vie courante.
• Inc ontinenc e à l’e ffort : fuite s en je t, sans bes oin préa la ble, survena nt très
exactement au moment d’un effort qui augmente la pression abdominale (toux,
éternuement, rire, marche, course, passage en orthostatisme, port de charges...).
S urvie nne nt ha bitue lle me nt le jou r e t e n pos ition de bou t (in con tine nc e
orthostatique).
• In co ntin e nc e par im pé rios ité : fuite d’urine surve nant lors d’ un bes oin
impérieux et malgré une contraction sphinctérienne volontaire.
• Inc ontine nc e post-mic tio nne lle : é mission après la mic tion de quelques
millilitres d’urines en jet ou “goutte à goutte” (“dribbling”).
• Inc ontine nce r éfle xe (re fle cte re = ré flé chir) : fuite e n jet, provoqué e par un
réflexe mic tionnel non contrôlé, non pré cédé ni acc ompa gné d’un be soin. On
l’observe essentiellement chez le neurologique.
• Inc ontine nce par r e gorge me nt : fuite par dé bordement (é coule me nt) d’une
vessie en rétention chronique.
• Pollakiurie (
= s ouvent ,
= urine ) : augme nta tion de la
fréquence des mictions qui s’effectuent avec de petits volumes. Par extension on
pe ut aus si pa rle r de pollakiurie pour une augme ntation de la fré que nce des
besoins.
• Té ne sm e vé sic al (
permanente d’uriner.
= te nsion) : se nsa tion douloure use d’e nvie
• Urination (
= uriner) : miction active, complè te, chez un sujet éve illé,
c on sc ie nt , ma is inc a pabl e d’e nd igue r le flo t d’ urine . Elle pe ut s urve nir
s pontané me nt ou à l’oc ca sion de paroxysmes émotionne ls (fra yeur, c olère,
orgasme, fou-rire).
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CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 23 :
INITIATION AUX ANALYSES MULTIFACTORIELLES.
Lorsqu’ un phé nomène , comme la c ontine nc e , rés ulte d’u n é qu ilibre en tre
plusieurs pa ramè tre s, il e st préfé rable de c ara ct érise r ce t é quilibre pa r une
ana lyse multifa ctorie lle , plutôt que de séle ctionner a rbitraire ment un ou de ux
para mè tre s. Le s mé thode s multifac torie lle s s ont des mé thode s d’ obse rvation
mathématiques qui mettent en évidence les tendances existant entres différentes
varia ble s, et qui, surt out, en donne nt de s repré se ntations sc hématique s dont
l’interprétation est souvent simple. Parmi ces méthodes, l’analyse en composantes
principales est utilisée pour les variables quantitatives.
Da ns une é tude porta nt sur deux varia ble s x et y, chaque pa tie nt peut ê tre
représenté par un point sur le plan formé par les deux axes x et y. L’ensemble
des points forme alors un nuage dans un espace à deux dimensions. Si l’étude
porte simultanéme nt sur n va ria ble s, chaque patient pe ut a lors être re pré senté
par un point dans un espac e à n dime nsions . L’e nsemble des points -pat ie nts
forme alors un nuage qu’il n ’e st pa s pos sible de re pré se nte r direc te ment .
L’a nalyse en c omposante s principale s perme t d’obt enir une projec tion de ce
nuage de points sur le plan qui résume au mieux sa forme initiale. Pour cela, une
partie du travail mathématique consiste à déterminer la plus grande dimension
du nuage c’est-à-dire l’axe pour lequel la projection des points montre la plus
gra nde dis persion (varianc e la plus éle vé e ), c e qui re pré se nte la pre miè re
Composante Principale. La deuxième Composante Principale est représentée par
le plus grand des axes orthogonaux au premier. Ainsi, le nuage de points initial
es t proje té sur un pla n formé pa r les axe s de s deux pre miè res Composante s
Principales. Chaque patient e st toujours identifié pa r un point dont la position
dépend toujours des valeurs qu’il prenait pour les variables initiales.
Da ns notre e xemple de de ux femme s cont ine nte s, mais a ve c de s é quilibre s
diffé re nts , une an alyse e n compos ante s prin cipale s, e ffe ctué e à pa rtir de 4
variables (compliance et contraction vésicales, pression et résistance uréthrales),
aboutit au schéma suivant sur lequel la différence des équilibre se traduit par un
positionnement différent des patientes 1 et 2.
d’une maladie à laquelle s’applique un traitement spécifique.
Notre dé m a rche e st inverse : ana lyse r le s f a cte urs d u
déséquilibre qui génère le symptôme, puis le s corrige r, un
par un, pour obtenir un équilibre plus confortable et moins
dange re ux. I l f audra vous habituer à raisonner a insi ; le
me ille ur m oyen d’y pa rvenir e st de vous conf ronter à des
situations cliniques concrètes.
A - LA DYSURIE
A - PHYSIO-PATHOLOGIE.
1 - Le concept clinique
La dysurie est un symptôme clinique, caractérisé par un jet
sans force, long à apparaître et à se tarir avec parfois des
goutte s reta rdataires, la néce ssité de pousser, l’im pression
d’une vessie non complètement vide en fin de miction. Un
mauvais débit a la même signification. Il apporte seulement
une conf irm ation objec tive , e t pré cise l’ im porta nce d u
symptôme (Note 24).
L’examen de la vessie peut révéler qu’elle est :
- normale et qu’elle se vide complètement,
- é paissie , trabé culée, diverticulaire , et qu’ elle se vide
plus ou moins complètement,
- distendue et rétentionniste.
Ce s s ig ne s sont le s c ritè re s sur le squ e ls on é va lue
cla ssiqueme nt l’ ancienne té et la gra vité de la dysurie. On
a dm e t une ce rta ine f ilia tion
a ve c u n st a de d e
“c om p en sa tion” ( ves sie d e lutte ) suivi d ’ un s ta de d e
“décompensation” (vessie distendue).
2 - Le concept urodynamique
La miction normale doit être rapide, complète et aisée. Il y a
dysurie lorsque une ou plusie urs de ce s qua lités sont
absentes du fait d’un déséquilibre entre les deux forces en
présence pendant la miction : la contraction vésicale et la
résista nc e uréthrale . Ce ci pe rm et de distinguer, sché matiquement, 3 situations différentes :
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- l’ obstruction pa r a ug m e nta tion de la ré sista nc e
uréthrale
- l’hypocontractilité vésicale
- l’hypercontractilité vésicale.
LA DYSURIE
L ’aug mentation de la résis tanc e uréthrale p eut ê tre
se conda ire à de s obstac le s a natomiques (hypertrophie
prostatique , ré tré cisse m ent uréthra l... ) ou f onctionne ls
( hype rtonie ou dyss yne rgie sphincté rienne ) , pa r divers
mécanismes (Note 25)
être primitive (mégavessie) ou secondaire à l’âge, l’infection
et l’obstruction.
Le s c onsé quence s de l’obstruc tion sur le dé trusor sont
variable s : ce rtaine s vessie s vont lutter, s’hypertrophie r, se
trabéculer, se diverticuliser, alors que d’autres vont se laisser
pa ssive me nt distendre. La notion classique d’ une ve ssie
“compensée” puis “décompensée”, doit être remplacée par
c elle de c om porte m ents réa ctionne ls dif f ére nts, ce qui
e xplique que bon nom bre de gra ndes ve ssies diste ndue s
ne portent pa s le s stigm a tes d’une vessie de lutte . Il est
maintenant démontré que l’épaississement du détrusor est
m oins le f a it d’ une hyp ertrophie musc ula ire q ue d’ une
surcharge collagène, conséquence de l’obstruction, qui peut
ê tre rep rod uite e xpé rim e nta le m e nt c he z l’ a n im a l. La
dilatation du haut appareil urinaire est rarement en rapport
a ve c un ref lux. L’ épa ississe me nt de la paroi du dé trusor
accroît la résistance dans la portion intra-murale de l’uretère.
Mais c’est probablement le défaut de compliance qui a la
plus grande part de responsabilité (1) .
• La dénervation vésicale (ou plus exactement la décentralisation), est observée dans les lésions radiculaires (fractures
lombo-sacrées, hernies discales...), tronculaires et plexuelles
(chirurgie pelvienne élargie), ainsi que dans les lésions plus
dif fuse s e t plus inc om plè tes des ne uropa thies périphériques, en particulier du diabète.
L e s con sé que n ce s urodyna m ique s d’ une ré sista nc e
uré thra le ac crue sont une augm entation de la pre ssion
vésicale mictionnelle et une diminution du débit ; ces deux
p hénom è ne s ca ra c téris ent le “syndrom e obs truc tif ” (2).
L’augmentation de la pression vésicale mictionnelle ne doit
pa s être considérée se ulem ent comm e la conséquence
d’une augmentation de la puissance du détrusor. C’est aussi
un phénom ène passif, se conda ire à l’ac croisse ment de la
ré sista nce uréthra le, conform ém ent à la rela tion pression
/débit (voir figure 49)
L ’hypo ou l’ac ontrac tilité vésicales. Si l’a contractilité est
toujours pa thologique , l’ hypoc ontra ctilité n e l’ e st que
lorsqu'e lle em pêc he la ve ssie de se vider ra pide me nt e t
complètement. Sinon, elle traduit seulement une résistance
uréthrale faible. L’insuffisance de contraction peut être due à
une déficience du muscle ou de son innervation.
L’insuffisance musculaire apparaît le plus souvent comme la
conséquence d’une surcharge en collagène dans l’espace
e xtra -c e llula ire . C e tte “c olla gé nose ” , q ui m odif ie le s
propriétés visco-élastiques et contractiles du détrusor, peut
Les troubles de l’innervation vésicale correspondent à des
phénomènes de dénervation et d’inhibition.
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• L’inhibition vésicale peut être réflexe ou psychologique :
- l’inhibition réflexe est observée dans les hyperfonctionnem e nts sym pa thique s e t som atique s. Ce f ait, bien
connu dans les vessies neurologiques, existe probablement en dehors de ce contexte chaque fois qu’il existe
NOTE n° 24 :
POUR OU CONTRE LA DEBITMETRIE ?
U ne pol é mi que s ’ e st i ns ta uré e e ntre le s “ dé bit mé trist e s ” e t le s “ no n
débitmétristes” qui prétendent que l’interrogatoire et l’observation suffisent pour
reconnaître les dysuriques. Ils n’ont pas totalement tort, sauf quand ils prétendent
ê tre a ins i le s s euls à faire “de la bonne c linique” . Il n’y pas d’antinomie , a u
c ontraire, entre bie n examine r et rec ourir à un exame n complémentaire . Ce tte
querelle entre les “partisans” et les “opposants” de l’urodynamique, a détourné
l es urologu e s de s vé rita ble s problè me s. Il e s t t out au ss i ridi cule d’ê tre
inconditionnelleme nt pour, que d’ être systé matique me nt contre. N’a ye z pas de
complexe à avouer que vous faites de l’urodynamique...mais faites la bien. Quels
sont les avantages et les inconvénients de la débitmétrie ?
• Les inconvénients :
- les appareils sont chers, trop chers pour ce qu’ils sont.
- le débit maximum n’est pas une valeur absolument répétitive : les blocages
ps ycholo giqu es , le s ve ss ies trop ou trop pe u re mplie s, s ont de s ca us es
fréquentes d’erreur.
• Les avantages :
- la débitmétrie est plus fiable que l’interrogatoire (deux tiers des hommes se
méprennent sur leur débit) et plus discrète que l’observation clinique.
- elle permet de dépister des dysuries méconnues, non avouées, quand elle est
faite systématiquement ; elle n’est pas plus réservée aux seuls dysuriques, que
la prise de la tension artérielle ne l’est aux hypertendus.
- elle peut être répétée et permet des comparaisons sur des valeurs chiffrées et
non sur des impressions.
(1) Ce tte no tion e st co ntes tée . Che z le p ro statiq ue, u ne re la tion en tre la dis ten s io n du h aut ap pa reil u rinaire e t u ne hyp erp res s ion intravés ic ale a été
retrouvée par certains auteurs et non par d’autres. Par contre, il a été démontré par mesure de la pression pyélique et par scintigraphie, que, dans une
vessie hypocompliante, une variation minime du volume vésical en fin de remplissage, peut entraîner une modification importante de la pression pyélique.
(2) Quand votre voiture est puissante et qu’elle n’avance pas, c’est probablement parce que vous avez oublié de desserrer le frein.
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CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 25 :
HYDRODYNAMIQUE DES SYNDROME OBSTRUCTIFS
Nous avons vu au chapitre 2 qu’on pouvait, par des formules issues de l’équation de Bernoulli, calculer la répartition des coefficients de perte de charge le long de l’urèthre.
Nous l’avons fait pour un urèthre normal (voir note 11). La même méthode peut être appliquée aux rétrécissements de l’urèthre et à l’hypertrophie bénigne de la prostate.
Les rétrécissement uréthraux.
- Les rétrécissements en diaphragme, c’est à dire courts, semblent être tolérés jusqu’à des diamètres très faibles, de l’ordre de 1,5 à 2 mm. La dilatation d’amont, en revanche,
majore le retentissement hydraulique car le rapport de la section dilatée à la section rétrécie augmente.
- Les rétrécissements longs (à partir de 1 cm) sont responsables d’importantes perte de charge par frottement.
(P. Glémain et coll. - Retentissement urodynamique d'un rétrécissement uréthral. Étude hydrodynamique d'un modèle théorique. J. Urol. (Paris), 1990, 96,5)
En c as d’h ype r trophie bé nigne de pr ostate plusie urs modifica tions sont susc eptible s de c oûte r de l’é nergie , princ ipale me nt la diminution du diamè tre hydra ulique (ou
fonctionnel) de l’urèthre prostatique, quelle qu’en soient les causes (compression, hypertonie, réduction anatomique du calibre).
- Le défaut d’infundibulisation et, d’une façon générale, la forme du col, ne semble pas être une cause de perte de charge aussi importante qu’on le prétend. Ce phénomène est,
au plan hydrodynamique, différent de la difficulté à l’ouverture de l’orifice cervical, qui est responsable d’une majoration du travail vésical en augmentant la pression d’ouverture,
mais qui ne représente pas un travail mictionnel.
- Dans l’urèthre prostatique, la présence de l’adénome peut multiplier par 10 le coefficient de perte de charge du fait de l’augmentation des forces de frottement dans un canal
allongé et comprimé (aspect en “lame de sabre”).
- D’autres modifications sont associées. Un col et/ou un urèthre prostatique qui restent mal ouverts font que le méat uréthral n’est plus le facteur limitant du débit. Il n’y a donc
plus de mise en pression du flux dans l’urèthre d’amont ce qui entraîne une perte de la stabilité et de la vitesse du flux à sa sortie. Un flux qui s’accélère afin de maintenir
constant le débit dans une zone rétrécie, voit sa pression interne chuter de manière importante en dépit d’une augmentation de la pression en amont du rétrécissement.
- Dans l’urèthre bulbaire, il peut exister une accentuation de l’effet de divergence ; mais la majoration du coefficient de perte de charge reste minime.
(P. Glémain et coll. - New Urodynamic Model to explain Micturition disorders in Benign Prostatic Hypertrophy Patients, Eur. Urol., 1993, 24, Suppl. 1, 12-17)
(P. Glémain et coll. - Incidence de la forme et du calibre dans la résistance uréthrale. Évaluation pour un urèthre masculin normal et en cas d'obstruction par hypertrophie
prostatique, Progrès en Urologie, 1993, 3, 5)
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LA DYSURIE
une hypertonie sphinctérienne . Ce rtaines réte ntions
p euve nt ê tre provoqué e s pa r de s ré f le xe s visc érovisc é ra ux inhibiteu rs (d iste nsion a na le , f éc a lom e ,
érection… ).
- l’ inhibition psychologique e st le m é ca nism e de la
rétention de l’hystérique qui, contrairement au simulateur,
ne retient pas ou ne dissimule pas sa miction, mais est
incapable de libérer sa contraction vésicale.
La consé quence directe d’une acontractilité vésica le e st la
né c es sité d’ utilise r la poussé e a bdom ina le. L’ a bse nce
d’ infundibulisa tion de la base vésic ale, a ugm e nte l’ ef fort
nécessaire pour forcer le col. Le résultat est très variable :
ce rtaines vessies se vident c om plè tem ent, d’a utre s restent
rétentionnistes. Ces vessies acontractiles sont généralement
bien tolérées par le haut appareil urinaire, en l’absence de
défaut de compliance. Cependant, l’élongation passive des
f ibres musculaire s du trigone pa r la diste nsion vé sica le ,
pourrait expliquer des distensions à basse pression et leur
régression par le drainage vésical.
L ’hyperc ontrac tilité vésicale est généralem ent la conséquence d’une obstruc tion. Cependa nt certa ine s instabilité s
vésicales de l’enfant ou de l’adulte peuvent aboutir à cette
situation, non pas en raison d’un obstacle mictionnel, mais
du fait des efforts de retenue répétés. La miction, lorsqu’elle
e st autorisé e, s’ e ffe ctue a ve c un débit exce lle nt, souvent
“explosif”, et de manière complète, ce qui n’empêche pas le
développem ent de déform ations vé sic ales c aractéristique s
de la vessie de lutte. Ce risque est d’autant plus grand que
les contra ctions s ont p lus f ortes, p lus dura ble s e t plus
fréquentes. C’est notamment le cas chez l’enfant et chez le
neurologique.
II - INDICATIONS DES EXPLORATIONS
FONCTIONNELLES DE LA V.E.I. POUR LE
DIAGNOSTIC ET LE TRAITEMENT DES DYSURIES.
Il faut bien distinguer l’obstacle et l’obstruction. L’obstacle est
une ré a lité a na tom ique ( un a d én om e pros ta tiq ue, un
ré tré cis sem e nt uréthra l… ). L’ obstruc tion es t un conce pt
urodynam ique, un déséquilibre fonctionnel caractérisé pa r
une a ugm enta tion de la ré sistanc e uréthra le. T ous le s
obs tac le s ne s ont p as né c e ssa ire m e nt obs truc tif s, e t
l'obstruc tion n’e st pas néce ssa ire ment proportionnelle à la
taille de l'obstacle.
La dé couve rte d’ un obs ta cle ne doit rie n a ux e xa m ens
urod yna m iq ues ; e lle re pos e sur le touc he r rec ta l, le
cathétérisme explorateur, l’uréthrographie et l’endoscopie...Ce
que l’on c he rche à explorer par l’urodyna mique , c’ est le
nouvel équilibre (ou déséquilibre) créé par cet obstacle. Par
exemple deux sujets ayant le m ême adénome prostatique
n’ont pas nécessairement le même équilibre c’est à dire la
même résistance uréthrale, la même contractilité vésicale, la
mê me qua lité sphincté rienne … Il fa ut bien se pénétre r de
ce tte idé e, qu'a ve c l'urodynam ique , on ne che rche pas à
faire le diagnostic d’une maladie, mais à faire l’expertise d’un
équilibre fonctionnel.
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Dès lors, puisque la nature des renseignements recherchés
est différente, toute dysurie devrait, en théorie, bénéficier d’un
exame n urodynamique , perme ttant de la catégoriser parm i
les obstructions, les hypo ou les hypercontractilités vésicales.
En pratique, les choses se passent différemment selon qu’il
existe ou non un obstacle évident.
1 - Les dysuries par obstacle uréthroprostatique
L’examen urodynamique, hormis la débitmétrie, est superflu
quand on retrouve un obstacle franc comm e un ré trécisse m ent uré thra l ou une va lve de l’ urè thre postérie ur (3).
L’indica tion peut, pa r contre, se poser dans l’ hypertrophie
prostatique et la maladie du col.
Hypertrophie bénigne de la prostate
Il existe une relation entre la longueur du plateau prostatique
e t le poid s de le prosta te. Ma is le p rofil de pres sion
uré thrale n’e st ce rta ine me nt pas le m eilleur exam en pour
faire cette évaluation. En fait, ce n’est pas dans le domaine
du diagnostic que l’exploration urodynamique peut avoir son
inté rêt, m a is plutôt pour pré ve nir ou pour explique r les
échecs de la chirurgie.
(3) Bien que, dans les valves de l'urèthre postérieur, la cystomanométrie soit souvent utile pour évaluer la responsabilité d’un défaut de compliance dans le
mécanisme d’une distension de la voie excrétrice supérieure.
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CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
• Ava nt l’ inte rve ntion, la valeur pronostique des e xa me ns
urodynamiques repose, à priori , sur l’évaluation de la stabilité vésicale et de l’équilibre urodynamique.
- L’ instabilité vé sicale , cystom a nom étrique me nt prouvée ,
serait statistiquement un peu plus fréquente chez les hommes porteurs d’un adénome que chez ceux, du même âge,
qui n’ en ont pas. Ce tte insta bilité est e lle e n me sure de
m odif ier le résultat post-opératoire a u point de justifier sa
recherche systématique avant l’intervention ? La réponse est
non pour plusieurs raisons :
- la première est qu’il existe une assez bonne corrélation
e ntre le s signe s fonctionne ls irritatifs et les donnée s
c ystom anom étrique s, plus pe ut ê tre pour l’ impé riosité
que pour la pollakiurie,
- la se conde ra ison est que , da ns deux tiers des ca s
e nviron, cette insta bilité va dispara ître da ns le s m ois
suivant l’ intervention, sans qu’il soit possible de prévoir
dans quels cas elle va persister. On a essayé de distinguer les instabilités liées à l’hypertrophie prostatique, de
ce lles en rapport a vec un défa ut d’inhibition d’origine
c é ré bra le , p a r un t e st a ne s thé s ique d e c on ta c t,
discutable dans son principe (4) et pe u f iable dans se s
résultats.
- L’équilibre urodynamique a-t-il une valeur pronostique ? On
peut suppose r que tous les homm es ne sont pa s égaux
f ac e à l’a dénom e ctom ie , qu’ ils sont plus e xposés à une
dysurie résiduelle lorsque la vessie est acontractile ou à une
inc ontinence séquellaire qua nd le sphincte r est f aible. 3
p aram è tre s p euve nt ê tre a na lysé s qua nt à le ur vale ur
prédictive : la résistance uréthrale, la contractilité vésicale et
la pression uréthrale maximum.
La plupart des séries confirment de meilleurs résultats de la
chirurgie lorsque la réa lité de l’obstruc tion est urodyna miqueme nt confirm ée (5). L’ hype rcontractilité vésicale e t l’ augm e nta tion d e la ré sista nce uré thrale sont le s m e ille urs
témoins de l’obstruction né cessitant, toutefois, le recours à
u ne é tud e pre ss io n/ dé b it, re la tive m e n t inva sive . La
d éb itm é trie se ule e xclut l’ obstruc tion lorsque le dé bit
m aximum est supérieur à 15 m l/s ; ce pe ndant, da ns 10%
des cas, un tel débit est compatible avec une authentique
obstruction “masquée” par une hypercontractilité vésicale. La
valeur pronostique de la débitmétrie seule est assez proche
de ce lle d’ une étude pre ssion/ débit. Pour JENSEN, une
sélection par une étude pression/débit fait passer le taux de
succès de 77,8% à 93,1% , et, par la débitmétrie seule de
70,6% à 91,6% selon que le débit maximum est supérieur
ou inférieur à 15 ml/s.
Une a contrac tilité ou une hypocontrac tilité vé sic ale es t
retrouvée chez 10 à 20% des hommes dysuriques porteurs
d’un adé nom e prostatique. Seule s la cystom anomé trie e t
l’ étude pression/débit peuvent l’af firme r ; la débitm étrie en
e st inca pa ble . Le risque de dysurie post opé ra toire es t
nettem ent plus im porta nt en c as d’a contra ctilité : 33% a u
lie u de 10%. Ma is c e la ne c ha nge rie n à l’ ind ic a tion
d’enlever l’a dé nome pour a ba isser la résista nce uréthrale ;
c’ est la solution logique , m êm e si on doit s’ attendre à un
résultat moins bon quand le détrusor se contracte mal.
Le profil uré thral a , chez le prostatique , un aspe ct bien
particulier caractérisé par un plateau dont la longueur est en
relation a vec le poids de la gla nde ( figure 71). Ce plateau
dispara ît après adé nome ctom ie , ma is le pic de pre ssion
ma xim um en regard du sphincter strié ne devrait pas ê tre
modifié, et, par conséquent pourrait être un indice du risque
d’incontinence post-opé ra toire . Malheure usem ent, la ré alité
e st dif fé rente ca r le ré sulta t fonctionnel post opéra toire ,
dépend d’un nouvel é quilibre qui ne pe ut être re prése nté
que par une analyse multifactorielle (Note 26).
Finaleme nt, l’ indication d’un bilan urodyna mique che z un
hom m e porte ur d ’ un a dé nom e pros ta tique p e ut ê tre
schématisée ainsi :
• la débitmétrie pré-opératoire n’a qu’une contre indication...
la rétention complète. Son innocuité en fait un excellent test
de dépistage et de surveillance, car le risque de voir le haut
appareil urinaire se dégrader sans aggravation du débit, est
très faible.
• une cystom anom étrie et une é tude pression/débit sont
justifiées dans certains cas sélectionnés.
- le plus important e st l’ a bsence d’ obstac le évide nt,
cliniquement, radiologiquement ou endoscopiquement ,
chez un suje t qui urine m al. On peut a lors différencier
une obstruction d’une hypocontractilité vésicale.
(4) Le blocage des contractions vésicales réflexes par une substance anesthésique placée au contact des muqueuses vésicale et uréthrale, est un test
u tilisé d ep uis lo ng temp s d ans le s ves sie s ne uro log iqu es c en trales hype rré flectiq ue s. Sa po s itivité n e p erme t do nc pa s d ’affirmer la res p on s abilité d e
l’hypertrophie prostatique dans l’instabilité vésicale.
98
(5) Cette opinion n’est pas admise par tous. BRUSKEWITZ n’a trouvé aucune différence dans les résultats post-opératoires selon les valeurs préopératoires
de la débitmétrie et de la résistance uréthrale.
LA DYSURIE
- la deuxiè me indica tion, e st l’ existence d’ une sym ptom atologie insolite, com me la préé minence des signe s
irritatifs (pollakiurie, impériosité) sur les signes obstructifs,
en l’absence d’infection urinaire et de troubles neurologiques.
vé s ic a l m ou e t ind ole nt. S i e lle s e c onf irm e sur la
cystomanométrie, il faut laisser la sonde à demeure pendant
3 ou 4 semaines, et éventuellement apprendre au patient, s’il
le peut (6), à utiliser eff icac em ent sa poussée a bdominale
comme on le ferait pour un patient neurologique.
- la troisièm e indication est l’a ssociation de plusieurs
pathologies : une hypertrophie prostatique, une maladie
de Pa rkinson tra itée , un diabète…, moins dans le but
d’attribuer la responsabilité des troubles à l’une ou l’autre
de ces m ala dies, que dans celui d’ expe rtiser globalem ent l’ équilibre ( ou plutôt le déséquilibre) fonc tionne l,
a fin d’ ajuster le traiteme nt. L’a ttitude théra pe utique sera
différente selon qu’il existe une acontractilité vésicale ou
un syndrome obstructif, quelles qu’en soient les causes.
La “maladie du col”
Marion qui déc rivit la m aladie , en fa isa it un dia gnostic
d’exclusion quand il parlait de “prostatisme sans prostate” ni
troubles neurologiques. Cette notion doit être gardée ; mais il
faut éviter de parler de maladie du col chaque fois qu’une
dysurie reste inexpliquée.
Après l’interve ntion, la débitmé trie doit f aire systém atique ment partie du contrôle postopératoire ; elle conduit à plus
de m odestie dans l’ évalua tion des résultats. L’ indic ation
d’une exploration plus complète est pleinement justifiée en
ca s de c om plications ou d’ échecs com me la persistance
d’une dysurie ou la survenue d’une incontinence dont nous
parlerons plus loin. La dysurie peut apparaître plus ou moins
longtemps après la chirurgie. Un délai de plusieurs années
suggère une récidive de l’a dé nome ou le développe ment
d’ un c a nce r. Un déla i d e quelques jours ou se m aine s
évoque un rétrécissement uréthral, notamment au niveau du
col vésica l, de l’a pe x prostatique e t surtout de la fossette
naviculaire . Une dysurie ou une ré te ntion imm édia te s, a u
re tra it de la sonde, pe uvent ê tre pa ssagè res ; m ais le ur
persista nce suggè re une acontra ctilité vésica le qu’on peut
soupçonne r cliniquem ent sur la consta tation d’ un globe
P2
C5
Le mécanisme de la dysurie est un défaut d’infundibulisation
de la base vésic ale e t/ ou d’ouve rture du col. Ce trouble
dynamique pe ut, lui-m êm e, être secondaire à des ca uses
dive rses : une fibrose du col, une hypertrophie adénom ate use de la lèvre postérieure , une hypertonie du sphincter
lisse...
Le d ia gnos tic e st é voqué c he z un hom m e d ys urique ,
générale ment jeune ( 30 à 50 a ns) n’ ayant ni hype rtrophie
prosta tique , ni ré tré ciss e m e nt uré thra l. L e s é lé m e nts
c la ss iq ues du diag nostic sont tiré s de la ra dio e t d e
l’endoscopie.
- La cysto-uré thrographie m ictionnelle, si possible avec
enregistrement magnétoscopique, montre une ouverture
imparfaite du col, avec, en général, l’éperon d’une lèvre
posté rieure qui rompt l’a lignem ent de la f ilière trigonocervico-uréthrale (figure 72).
Figure 71 - Le PPU a, chez le prostatique, un aspect particulier, caractérisé par un plateau dont la longueur est corrélée au poids de la glande, suivi
d’un pic de pression correspondant au sphincter strié. Après adénomectomie, le plateau disparaît, mais le pic reste.
(6) Il le peut rarement, car ces grandes vessies distendues appartiennent généralement à de grands vieillards peu rééducables.
99
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 26 :
POUR EN SAVOIR UN PEU PLUS SUR LES ANALYSES MULTIFACTORIELLES.
Vous savez tout sur l’analyse en composantes principales (voir Note 23) qui permet une
re prés e nta tion s c héma tique de s re lat ions u niss ant un gran d nombre de va ria ble s
quantitatives. En voici un exemple authentique.
Ch ez 115 pa tie nt s porte urs d’ un a dé nome prost at ique, nou s a vons mes uré, a va nt
l’inte rve ntion, le s paramè tres suivants : la longueur prostat ique (LP), l’a ire du pla te au
prostatique (AP), la hauteur de ce plateau (HP), la pression de clôture maximum en regard
du sphincte r st rié (PC ma x), l’a mplitude de la c ontraction vé sicale (ACT ), la compliance
(CPL), la capacité vésicale (CVF), et la pression prémictionnelle de fin de remplissage (TON).
Da ns un pre mier te mps l’a xe de la premiè re Compos ante Princ ipa le a é té dé te rminé ;
rappelons que cet axe est celui sur lequel la projection de toutes ces valeurs recueillies
chez l’ensemble des 115 patients, montre la plus grande dispersion. Il se trouve que cet axe
(F1) est déterminé par les paramètres en relation avec le syndrome obstructif (taille de la
prostate (LP, AP et HP), amplitude de la contraction vésicale (ACT), et avec la pression de
clôt ure (PC). L ’a xe de la 2e c ompos an te (F2) a pparaît plutôt lié a ux paramèt re s de
remplissage vésical (CPL et CVF), opposés au tonus uréthral (TON). La dispersion des points
montre la diversité des équilibres urodynamiques chez ces patients qui partagent tous la
même condition clinique : la dysurie (Fig A).
Ces 115 patients ont tous été opérés, 92 par résection et 23 par voie haute. Au 2e mois
post opératoire 73 (63%) ont un résultat parfait, 16 (14%) sont encore dysuriques avec un
débit infé rie ur à 15 ml/s, 9 (8%) ont que lque s fuites à l’e ffort, 9 (8%) ont des mictions
impérieuses, 8 (7%) sont décédés ou perdus de vue. Il s’agissait de mettre en relation les
résultats du bilan urodynamique pré-opératoire avec le résultat fonctionnel post-opératoire.
Pour ce la un e aut re mé thode d’ a na lyse multifac torie lle a é té utili sé e : l’analyse
discriminante, don t le but e st de re che rc he r da ns que lle me s ure un e nse mble de
paramètres quantitatifs (par exemple urodynamiques) est lié à un ensemble de données
qualitatives (par exemple les résultats cliniques post-opératoires). Des axes discriminants
permettent, comme en analyse en composantes principales, d’obtenir une projection d’un
espace à n dimensions sur un plan. Mais ces axes sont différents car ils sont calculés pour
séparer le plus possible les patients dont les conditions cliniques sont différentes et pour
re groupe r c eux dont le s c onditions clinique s sont ide ntique s. Pour ce la, une fonction
dis criminante e st c alculée e n ré alisant une combinaison de s va riables urodynamique s
initiales de sorte que la somme des variances intra-classes (groupes cliniques) soit la plus
faible, et la somme des variances inter-classes soit la plus élevée. L’établissement de cette
fonction discriminante (analyse discriminante linéaire) est une application de la technique
de calcul des régressions multiples. L’analyse discriminante, dite aussi analyse canonique,
e st une gé né ra lis ation de la fonct ion dis criminant e e t aboutit à une re pré se nta tion
schématique plus facile à interpréter. Chaque patient est représenté par un point qui est
pla cé dans le systè me d’axes disc riminants en fonc tion de s va le urs qu’il pre nait pour
chac un de s paramètre s quantitatifs (urodynamique s pré-opéra toire s). Le s points peuve nt
ensuite être identifiés par une couleur représentant leur résultat post-opératoire, dans le
but de mie ux montre r les re groupe me nts : ve rt pour un bon ré sultat, ja une pour une
incontine nce , rouge pour une impé riosité, ble u pour une dysurie pe rsista nte. On pe ut
constater que les bons résultas se retrouvent dispersés dans n’importe quelle région du
schéma, (ce qui signifie que des conditions urodynamiques très différentes peuvent aboutir
au même résultat), et que les mauvais résultats (incontinence, impériosité, dysurie) sont un
peu mieux regroupés (figure B).
Bien qu ’il e xiste a u s e in d’u n mê me grou pe de s va ria tion s individue lles , o n pe ut
re pré se nter c haque groupe par son c entre de gra vité (fig C) ce qui permet de dégage r
certaines tendances. Ainsi :
- les dysuries post-opératoires se recrutent surtout parmi les sujets ayant une contraction
vésicale faible, une grande capacité vésicale et une compliance élevée,
- les impériosités correspondent plutôt à des contractions vésicales fortes,
- les points représentant les pertes d’urine se regroupent plutôt au centre du schéma, ce
qui signifie qu’ils correspondent dans l’ensemble à des valeurs moyennes, et que le bilan
urodynamique n’est pas en mesure de les prédire.
Ce ci confirme bie n le fa it qu’une condition clinique e st le ré sulta t d’un équilibre entre
plusieurs paramètres et qu’à la même condition peuvent correspondre des équilibres très
différents. Mé fie z vous de ce ux qui préte nde nt avoir trouvé “le pa ramè tre ”, “l’indice ”, “ le
coefficient” qui caractérise cette condition ou qui permet, à coup sûr, de prévoir l’issu d’un
traitement.
100
(P. Glé main e t c oll. - É tude multifactorielle de s équilibres urodyna mique s che z 115 patients
dysuriques porteurs d'un hypertrophie bénigne de la prostate. Progrès en Urologie, 1992, 2, 363-371)
LA DYSURIE
dysuriques , dont la signific ation et les ra pports ave c la
maladie du col restent à préciser.
- le te st au x alpha-b lo quants pe ut êt re indiqué pour
distinguer une hypertonie d’une fibrose du col, en particulier
quand la pression uréthrale est excessivement élevée ; l’effet
peut être jugé sur le profil uréthral, la débitmétrie ou la radio.
Mais il ne se m ble pa s a voir une va le ur p réd ic tive sur
l’ efficacité d’ un traitem ent per os, les bons ré ponde urs a u
test n’é ta nt pa s né ce ssa irem e nt le s bons ré pondeurs au
traitem e nt. Au test IV , il fa ut donc pré fé rer un test thé ra—
peutique d’une quinzaine de jours, sachant que l’indication
d’un traitement alpha-bloquant au long cours ne sera justifié
que chez de s sujets trè s dysurique s ne souhaita nt pas
prendre le risque d’une éjaculation rétrograde après incision
du col.
Figure 72 - Cysto-uréthrographie mictionnelle pour maladie du col :
l’e nto nn oir vé sic al est peu o u ve rt, la pe n te an té rie ure du co l e st
no rmale, mais la paro i po stérie ure e st déprimée par u ne en co che
profonde correspondant à la saillie de la lèvre postérieure.
- L’endoscopie montre une saillie de la lèvre antérieure
e t, plus souvent encore , de la lèvre postérieure du col,
qui surplom be le trigone et ma sque le s orifices uré téra ux. Le m eilleur argum ent e n f ave ur du diagnostic
de m a la die du col est f ourni, a posté riori, en c ours
d’intervention, par son ouverture franche sous l’électrode
tranchante.
Les e xam ens urodynamique s sont indispensables, dans le
but, ici, de confirmer le diagnostic.
P2
C5
Les obstructions chez la femme.
La dysurie est classiquement rare chez la femme qui, plus
so uve nt e nc ore qu e l’ hom m e , né glige c e s ym ptô m e
gé nérale me nt pe u g êna nt. Plusie urs type s d’ obstac le s
peuvent ê tre e n cause , souve nt associés à une hypocon—
tractilité vésicale. (Note 27). Les tumeurs pelviennes (fibrome
du c orps e t surtout d u col uté rin, tum e urs ova rienne s
prolabée s da ns le Douglas) sont de s ca use s classiques
NOTE n° 27 :
LA DYSURIE DE LA FEMME
Souvent une affaire de vessie.
120 dossiers de femmes dont le débit maximum était 15 ml/s et/ou le résidu
100 ml, ont ét é ret enus , a prè s e xc lusion des ve ssie s ne urologiques e t des
int erve ntions ré ce nte s pour incon tinen ce . U ne fe mme sur de ux s eule ment
c on su lta it pour dys urie . Un e fois su r de ux l’ e xa me n c lin ique , inc lua nt
l’endoscopie, découvrait un obstacle pouvant l’expliquer :
- 36 cas de prolapsus utérins extériorisés (30%)
- 12 urèthres ou méats rétrécis (10%)
- la dé bitm é trie , e n de hors de la fa ible sse du jet, pe ut
m ontre r un allonge m e nt du te m ps de d ébit m a xim um
traduisa nt la le nteur d’ouverture du dispositif sphinctérien.
C’est un signe évocateur mais non pathognomonique.
- l’ augm entation de la résistance uréthrale, à une étude
pression/débit, est une donnée indispensable, sans laquelle
on ne doit pas porter le diagnostic de maladie du col.
- l’hyperpression dans l’urèthre postérieur n’est ni constante
( on ne l’ observe qu’ en cas d’ hypertonie sphinctérienne ), ni
caractéristique, puisqu’elle concerne habituellement la zone
du sphincter strié, dont elle exprime le tonus au repos et non
p e nda nt la p ha se m ic tion ne lle . C ’ e st c e pe nda nt une
c onsta ta tion asse z f réquente che z des hom m es jeune s
- 12 cols endoscopiquement saillants , fibreux, “évocateurs” d’une maladie du col.
Une hypo ou une acontractilité vésicale est trouvée dans deux tiers des cas ; sa
fréquence est de 58% quand il existe un obstacle et de 78% quand il n’en existe
pa s. Contra ireme nt à c e que l’on pourrait pe nser, l’â ge n’ es t pas un fact eur
déterminant de l’hypocontractilité qui se répartit équitablement dans toutes les
tranches d’âges.
(D. Philippot et coll. - Dysurie de la femme et hypocontractilité vésicale, J. Urol.
(Paris), 1988, 94, 19)
Syndrome obstructif
Hypo ou acontractilité
Population totale (N = 120)
38 (32%)
82 (68%)
Obstacle cervico-uréthral (N = 60)
25 (42%)
35 (58%)
Pas d'obstacle (N = 60)
13 (22%)
47 (78%)
101
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
mais finalement assez rares. Les obstructions iatrogènes, en
pa rticulie r a près chirurgie de l’ incontinenc e , sont plus
f ré que n te s. Trois a f f e c tion s m é rite nt un plus lon g
développement :
Les prolapsus et cystocèles sont des causes fréquentes de
dysurie che z la fe mme , qu’ils protège nt parfois de l’incon—
tine nc e . La dysurie survie nt lors que le prola p sus e st
extériorisé c’est à dire, plus volontiers, en fin d’après-midi.
Les sténoses méatiques et rétro-méatiques sont reconnues
par l’explorateur à boule qui rencontre une résistance à son
re trait. Il f aut cependant se souve nir que cette portion de
l’urèthre est, naturellement, la zone la plus étroite et la moins
distensible. Seuls les rétrécissements très serrés, n’autorisant
pas l’introduction d’une sonde 10ch. peuvent être tenus pour
res ponsa ble s d’ une dysurie . Pa rle r de s ténos e qua nd
l’ explora teur 16Ch accroche au pa ssa ge du méa t, e st un
abus de langage.
- éc arte r les a contrac tilités pas sagè re s lié es à une
distension aigüe de la vessie,
- ne p arler d’ a contrac tilité que dans le s c onditions
isométriques, c’est à dire lors d’un stop test.
L’ inté rêt du bila n urodyna mique , une f ois l’ ac ontractilité
a ff irm é e, e st d’ e n pré ciser le m é ca nism e : insuf fisanc e
m usculaire ou trouble de l’ innervation vésic ale . L’ exa men
clinique , et plus pa rticulière ment l’e xa me n neuro-psychia—
trique, fournit souvent des re nseignem ents suf fisants e t le
“bon se ns clinique ” décidera de la ré elle né ce ssité d’ un
examen complémentaire.
L’hypertonie uréthrale n’est pas une cause classique car elle
e st rarem ent re che rc hée . On la retrouve ce pe ndant assez
souve nt, notam me nt c he z le s fe mm es se pla ignant d’un
syndrome uréthral, ou d’une instabilité vésicale ancienne. Il
e st possible que c ette hypertonie soit se conda ire à la
douleur ou a ux eff orts de re tenue . Pa rfois ce tte hypertonie
sphincté rienne est associé e à une a contractilité vésica le
qu’on est tenté d’a ttribuer, sans pre uve, à un phé nomène
d’inhibition réflexe du détrusor.
Ac ontra c tilité pa r dé ne rva tion vé sica le... ou plutôt pa r
décentralisation, car la présence de neurones courts dans la
paroi m êm e de la vessie , em pêche la dénerva tion, m ais
rend la vessie aréflectique par interruption de l’arc réflexe. Le
diagnostic ne pose problème qu’ en dehors d’un conte xte
évident comme un syndrome de la queue de cheval. C’est
le ca s d es dé ne rva tions vé géta tive s succ é dant à une
chirurgie pe lvienne éla rgie ou à une neuropa thie périphé—
rique c om me ce lle du diabè te . Nous disp os ons d e 3
examens pour affirmer la dénervation vésicale :
2 - Les dysuries sans obstacle
- le te st de Lapides explore spé cif iquem ent l’ inne rva tion
végétative. La positivité du test signe une lésion du neurone
m oteur périphérique , complè te ma is pas né cessairem ent
dé f initive . C ette positivation ne se prod uit que 3 à 4
sema ine s aprè s la dénervation et l’ intensité de la réponse
est proportionnelle à l’intensité de la dénervation autonome.
Constamment positif dans les dénervations après chirurgie
pe lvienne éla rgie , il l’ e st exc e ptionne lle m ent d ans le s
ne uropa thie s p ériphé riques c omm e c e lles du d ia bè te
(Note 28).
...ou plus précisément, sans obstacle organique évident, car
il peut exister un obstacle fonctionnel. Entrent dans ce cadre,
les a contractilité s vésica les, les m éga ve ssies e t les dys—
synergie s vésic o-sphincté riennes. Da ns tous le s c as, un
e xa me n urodyna mique, en particulier une é tude pression
/ débit, interviendra à un mome nt donné de la dém arche
diagnostique.
Les acontractilités vésicales
On ne peut affirmer l’acontractilité que dans des conditions
bien précises. Il faut :
- re mplir la ve ssie jusqu’ à la perception d’un vé ritable
besoin et non arrêter la cystomanométrie à un volume
arbitraire,
102
- re connaître les inhibitions psychogè ne s transitoire s,
liée s a ux conditions de l’ e xa m en ; l’obtention, dans
l’ intimité de s toilette s, d’une courbe de débit ré gulière ,
monophasique, permet de conclure à l’existence d’une
contraction vésicale,
- L’électromyographie explore l’innervation somatique. De ce
fait ses résultats ne sont pas toujours corrélés à ceux du test
de La p ide s. P a r c on tre e lle pe rm e t le d é pist a ge d e
déne rva tions incom plète s. En cas de dé nervation aigüe ,
l’ é lec trom yogra phie ana lytique e nregistre , au re pos, des
potentiels spontanés dits “de dénervation” ; lors de l’effort de
contraction les tracés sont appauvris, tandis que des PUM
de ré innerva tion, géné ralem e nt polypha sique s, pe uve nt
apparaître. En cas de dénervation c hronique , il n’y a plus
LA DYSURIE
d’ activité sponta né e de dénerva tion au repos ; lors de la
c ontrac tion les tracé s restent appa uvris m ais com pe nsé s
par une hypertrophie des PUM restants qui atteignent une
grande amplitude et accélèrent leur fréquence, les rendant
pa rtic ulière me nt a udibles. Les potentiels évoqués sacré s
sont allongés au-delà de 42 ms.
- La cystomanométrie rapide décrite par J. Susset montre, en
c as de dénervation, de s onde s le ntes de type “A” sur la
pa rtie de sc e ndante d e la c ourbe de stre ss-rela xation.
(Note 29)
Acontra ctilité par inhibition vésicale réfle xe ou psychogè ne
L’ inhibition ré fle xe doit ê tre é voquée cha que f ois que
l’ a contra ctilité vé sic a le e st a ss ocié e à une hypertonie
s phinc té rie nne ave c une pre ssion uré thrale m a xim um
souvent comprise entre 150 et 200 cm d’eau. La certitude de
ce dia gnostic e st f ournie par le test aux alpha-bloquants.
L’ injec tion intra-veineuse d’ un alpha -bloquant e st suivie
imm é diate me nt d’ une c hute de la pression uré thrale et,
da ns les 48 he ure s, d’ une réa ppa rition de contrac tions
vésicales pa r levée de l’ inhibition. Ce test a d’ abord été
d éc rit c he z le ble ssé m éd ulla ire dont la ve ss ie re ste
acontractile passée la phase de choc spinal ; mais il peut
l’ être égale ment da ns les lésions ne urologiques frustes et,
peut être même, en l’absence de tout contexte neurologique.
L’ inhibition psychogène est le méc anisme de la rétention
chez l’hystérique ; elle est plus fréquente chez la femme que
chez l’ homm e. Il e st diff icile de savoir, uniquem ent sur ce
contexte psychiatrique, si la réte ntion est liée aux trouble s
m e nta ux, a ux ne urole ptiques ou à une hypoc ontrac tilité
a ntérieure à la m aladie psychia trique . Ce rta ins aute urs
proposent de ré veille r la contra ction vésicale pa r l’injection
d’eau glacée. En bloquant l’inhibition psychologique par une
a n e sthé s ie gé n é ra le n e m od if ia nt pa s la ré f le c tivité
m édullaire (protoxyde d’ azote) , on voit parfois réa ppara ître
des contractions vésicales.
NOTE n° 28 :
LE TEST DE LAPIDES - Un test fiable, mais peu utile.
La fiabilité du test à reconnaître la dénervation a été contestée. On a prétendu
qu’il pouvait être positif dans les troubles de la sensibilité et dans les lésions du
ne urone mote ur ce ntral. Rappelons que c’e st l’ augmentation de la pre ssion de
remplissage, et non l’apparition d’une contraction vésicale (nécessitant l’intégrité
d’un arc réflexe) qui définit sa positivité (voir figure 67). Sur 80 examens, ce test
nous e st a ppa ru fiable ma is de pe u d’inté rê t ca r il confirme le s déne rva tions
c linique me nt éviden te s, et re st e néga tif da ns les dé ne rva tions fru ste s ou
incomplètes qui, seules, posent un problème diagnostique.
- Sur 39 ne urove ss ie s pé riphérique s, 30 fois le tes t e st positif (77%) ; ce tte
positivité est constante dans 6 cas d’amputation abdomino-périnéale du rectum ;
inversement la quasi totalité des réponses négatives concerne des syndromes de
la queue de cheval incomplets (4 cas) ou des neuropathies périphériques (4 cas).
P2
C5
- D ans le s lés ions centrales ou mixte s, s ur 24 te sts 13 sont néga tifs, 5 s ont
positifs et 6 sont des faux positifs. Parmi les résultats positifs, 2 correspondent à
des lésions bifocales, centro-périphériques et 3 à des SEP qui peuvent avoir des
localisations périphériques. Sur les 6 faux positifs, 4 concernent des lésions du
cône terminal qui ont évolué comme des lésions centrales.
- Enfin su r 17 a cont ra ct ilit é s vé s ica le s non ne urogè ne s, nous noton s 15
réponses négatives et 2 faux positifs.
(J.M. Buzelin et coll. - Comment explorer une vessie acontractile. J. Urol. (Paris),
1987, 93, 485.)
Nb cas Nb tests Positifs Négatifs Faux +
Lésions traumatiques,
médicale ou congénitales
de la queue de cheval
• complètes
• incomplètes
Amputation A.P. du rectum
Neuropathies périphériques
23
15
9
5
17
11
6
5
16
7
6
1
1
4
0
4
0
0
0
0
Lésions du cône terminal
SEP
Lésions médullaires centrales
6
6
13
6
6
12
0
3
2*
2
2
9
4
1
1
Mégavessies
Obstructions
Rétentions psychogènes
Rétentions médicamenteuses
Divers
11
14
7
2
9
7
0
5
0
5
0
0
0
0
0
7
0
5
0
3
0
0
0
0
2
* Ces deux tes ts pos iti fs ont permi s de déc ouvrir l es l és ions périphéri ques
associées à une lésion centrale qui dominait la symptomatologie clinique.
L e s a con tra c tilité s pa r insuf f isa nc e m u sc ula ire so nt,
f inaleme nt, un diagnostic d’ élimination, car il n’ y a pas de
test f iable, autre que la m esure directe du collagène dans
des échantillons de vessie. Kondo et Susset ont développé
e t appliqué à l’ a nima l puis à l’homm e une m éthode de
c ystoma nom étrie ra pide perm ettant d’ évalue r le taux de
collagène. Ce test, intéressant dans son principe, n’a jamais
vraiment été appliqué en clinique humaine. (Note 29)
103
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 29 :
LA CYSTOMETRIE RAPIDE - Un test clinique pour explorer les propriétés visco-élastiques de la vessie et reconaitre les dysfonctionnements
neurologiques.
Rappelez vous la figure 6 et en particulier le dernier schéma en bas et à droite qui exprime
la re lation tension-temps d’ un maté riau visc o-é lastique . C’est ainsi que se comporte la
vessie quand on la remplit massivement, en injectant 100 ml en 3 secondes par une sonde
de Foley N° 16. Les injections peuvent être répétées plusieurs fois de suite, en ménageant
entre chaque injection un intervalle de 3 à 4 minutes pour que la relaxation soit complète.
Deux types d’informations pourraient être dérivées de la courbe.
Analyse des c om po sante s vis qu eus e s et é las tique s. L’ élas tic ité e st dé finie par le s
valeurs maximum (PM) et minimum (Pm) de la pression vésicale. La viscosité, représentée
par la pente de la courbe de relaxation, est exprimée par le temps de demi-décroissance
(half-decay-time). Il est de l’ordre de 4 à 5 secondes chez l’homme. La cystomanométrie
rapide a été utilisée expérimentalement chez l’animal comme un moyen d’évaluer le taux
de colla gèn e da ns la ves sie . L es co effic ie nts d’ éla st icité e t de vis cos ité ét ant plus
importants da ns le tissu collagè ne que da ns le tis su musc ula ire , la c ourbe de stre ssrelaxation atteint un pic plus élevé et décroît plus lentement. Malheureusement ce test est
sans valeur chez le malade en sonde à demeure et sa réponse ne dépend pas que des
seules propriétés visco-élastiques mais également de l’activité tonique .
Analyse des contractions induites par la distension brutale. Trois types de contractions
peuvent apparaître sur la pente de relaxation :
- Type A : contractions de basse amplitude (5 à 15 cm d’eau) de courte durée (10 à 25
secondes), et d’apparition précoce (1,58 +/- 0,77 s). Elles sont caractéristiques des vessies
décentralisées.
- Type B : amplitude plus élevée (57 +/- 30 cm), durée plus longue (81 +/- 26 secondes) et d’apparition plus tardive (9 +/- 8 s). On les observe dans les vessies normales.
- Type C : contractions polyphasiques faites d’une succession d’ondes apparaissant immédiatement après l’injection rapide. Elles sont évocatrices d’une vessie neurologique
centrale.
104
LA DYSURIE
Les mégavessies
La mégavessie est une entité difficile à définir et à cerner ;
a uc un c ritè re volum étrique , sym ptoma tologique , urodynamique ne la caractérise. Arbitrairement on peut qualifier de
m égavessie une vessie hype rcom pliante dont la capacité
e st supérieure au litre, qui se vide plus ou m oins com plètement, avec un débit variable. Elle n’est en relation ni avec
une obstruction, ni avec une atteinte neurologique. On peut
en distinguer une forme de l’enfant et une forme de l’adulte.
La m é gavessie de l’ enfa nt, qui touc he e xclusive me nt le
ga rçon, s ’ intè gre gé nérale m e nt da ns le c onte xte d’ un
syndrome mégavessie-mégauretères, ou d’un syndrome de
Prune Belly.
- dans le syndrome de Prune Belly l’association mégau re tè re , m é ga ve s sie , e st a ttribué e à un a rrê t d u
dé ve loppem e nt du m é sode rme à pa rtir de la 6ièm e
semaine ; outre les altérations de la musculature de la
ve ssie et de l’ ure tère qui est dissoc ié e par du tissu
collagène , on constate une a pla sie des muscle s de la
pa roi a bdom ina le e t une hypoplasie de s é lém e nts
é pithé lia ux de la prosta te qui e xplique ra it le mé gaurèthre.
- dans le syndrome mé gavessie , m éga-uretère, un rôle
pathogénique im porta nt est attribué a ux ref lux vé sicourétéraux massifs ; la vessie qui se viderait plus dans les
uretères que dans l’urèthre devrait s’adapter à un volume
d’urine excessif ; la m égave ssie ne serait alors qu’une
forme d’adaptation à ces conditions particulières.
Les circonstances du diagnostique sont celles d’une uropathie obstructive (échographie anténatale, insuffisance rénale
né ona ta le ). Le p re m ie r obje c tif d u bila n e st d ’ aille urs
d’ élimine r une obstruction sous-vé sica le (notam me nt de s
valves de l’urèthre postérieur), et de reche rc he r un reflux,
présent dans 80 % des syndromes de Prune Belly. Comme
da ns les m égavessie s de l’a dulte, le bila n urodyna mique
m ontre a va nt tout une hype rc om plia nc e vé sica le . On
retrouve, par ailleurs, des valeurs variables de la contraction
vésica le et du dé bit, m ais qui ne traduise nt ja ma is une
a ugm e nta tion de la ré sis tanc e uré thra le. Le pronostic
dépe nd du degré d’insuf fisance ré nale responsable d’ une
mortalité estimée à 50% avant 2 ans. Elle semble essentiellement due à la dysplasie rénale associée, et son évolutivité
reste faible, ce qui rend la dérivation urinaire supra-vésicale
le plus souvent injustifiée.
La mégavessie de l’adulte est isolée, avec un haut appareil
norm a l, tra duisa nt la bonne tolé ra nce d e ce s ve s sie s
hype rcom pliante s, ma lgré de s ré sidus pa rf ois im pre ssionnants.
L’ étio-pathogé nie re ste m ysté rieuse. La c arac té ristique la
plus constante est une hypercompliance. La mégavessie est
donc une pathologie de la phase de remplissage traduisant
une altération des propriété s visco-élastiques de la vessie
dont l’ origine n’ est pas cla ire : trouble de la perception du
be soin, c ollag énos e vés ic a le idiopa th ique , m a uva ise s
habitudes mictionnelles avec des mictions trop espacées…
La dysurie est rarement le signe d’appel ; elle est d’ailleurs
inconstante e t peu gênante . La mé ga ve ssie est une des
rares conditions pathologiques où un résidu important peut
coexister avec un débit e xce llent ce qui rend ce t exa men
inadapté à son dépistage et à sa surveillance. L’exploration
urodynamique retrouve des valeurs très variables du débit et
de la pre ssion vé sica le m ictionnelle , ma is qui n’ e ntre nt
jamais dans la catégorie des obstructions (Note 30). Lorsque
l’a mplitude de la contraction vésicale et le débit maximum
sont norma ux, on pe ut pe nser que le ré sidu est la conséque nc e d’ une contra ction trop brève pour le volum e à
évacuer.
P2
C5
L’indication thérapeutique doit tenir compte du fa it que le
haut appareil urinaire n’est pas menacé ; le seul problème
est ce lui du résidu et de son é ve ntue lle surinfe ction. Les
m éga vessies bie n c om pe nsée s, a ve c un ré sidu nul ou
faible, (moins de 200 ml) ne justifient qu’une simple surveilla nce dans l’ignorance où l’ on est de le ur avenir ; cette
surveillance doit être faite par une échographie bi-annuelle
et non par une dé bitmé trie. C’e st principale ment l’infection
urinaire récidivante qui justifie une thérapeutique active. Les
cholinergiques n’ont pas d’effet. La rééducation mérite d’être
essayée en premier, mais sans grande illusion car la poussée abdominale est généralement inefficace, et le sondage
intermittent est rapidement abandonné. La chirurgie consiste
soit à ré duire la vessie par une large cystectomie pa rtielle ,
soit à ouvrir le col par une plastie YV, soit à associer les deux
gestes. Les risques d’incontinence chez la femme, après une
pla stie YV pe uvent être pre ss entis sur la va le ur de la
pression uréthrale maximum ; au-dessus de 50 cm d’eau, le
risque est faible.
105
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 30 :
LA MEGAVESSIE DE L’ADULTE
Des équilibres urodynamiques variables.
21 dossiers de mégavessies de l’adulte ont été revus (11 hommes et 10 femmes),
répartis dans toutes les tranches d’âge. Le résidu est constant à une exception
près. La débitmétrie est supérieure à 20 ml/mn chez 8 patients, malgré un résidu
de plus d’un de mi lit re. L’UIV e st toujours normale . Le s é tude s pre ssion/débit
montre nt une gra nde dis pe rs ion de s va le urs, qui s e situe nt hors de la zone
obstructive. Schématiquement on peut individualiser 2 groupes :
- Le premier groupe (8 cas) est caractérisé par :
- des contractions vésicales puissantes dont l’amplitude se situe entre 60 et
100 cm d’eau ( moyenne 75) et la durée entre 30 et 70 secondes ( moyenne
43).
- des dé bits maximums supérie urs à 20 ml/s , ave c une courbe réguliè re ,
monophasique pour des volumes urinés compris entre 400 et 1700 ml.
- Le second groupe (13 cas) caractérisé par :
- des contractions vésicales plus faibles, comprises entre 0 et 40 cm d’eau
(en moyenne 28 cm d’eau) d’une durée comprise entre 20 et 100 secondes
(en moyenne 45 secondes) pour les vessies contractiles.
- un dé bit maximum inférie ur à 12 ml/s pour de s volumes mictionne ls
compris e ntre 400 e t 800 ml e t une courbe polypha sique t rahis sant la
poussée abdominale. Les résidus sont importants, compris entre 700 ml et
2 litres.
(O. Bouchot et coll. - Les mégavessies primitives de l’adulte. J. Urol. (Paris), 1987,
93, 501)
106
La dyssynergie vésico-sphinctérienne est définie comme
la persistance ou l’ acc entuation de l’ ac tivité du sphincter
strié pendant la miction. Elle implique donc un trouble de la
coordination résultant, par définition, d’un dysfonctionnement
neurologique. L’ e xiste nce d’ une dyssyne rgie hors de c e
contexte est, à notre avis, très improbable si l’on exclut les
fausses dyssynergies crées par les conditions de l’examen.
C’e st e n effe t un diagnostic qu’ il f aut a vance r ave c bea ucoup de prudence tant le s c ause s d’ erre urs sont nom—
breuses ; il faut préférer les méthodes les moins invasives,
e n p a rtic ulier c he z l’ en f a nt. On pe ut sou pç onne r c e
diagnostic sur le tra cé de la débitmé trie lorsque le je t
apparaît saccadé ; mais c’est surtout l’électromyographie de
contact associée à la dé bitm étrie qui perme t de l’ affirm er
(figure 59).
LES POLLAKIURIES ET INSTABILITES VESICALES
B - LES POLLAKIURIES ET INSTABILITES
VESICALES
L’augmentation de la fréquence des mictions (ou seulement
de s be soins) est un sym ptôme banal, toujours gê na nt, et
dé routant c ar il pe ut aussi bien e xprime r une ma uva ise
habitude qu’un cancer de vessie. L’urologue est quotidien—
neme nt confronté à ce problè me qu’il doit résoudre par la
rigueur de sa démarche diagnostique.
On peut distinguer la pollakiurie-symptome de la pollakiuriemaladie. Dans la première, la pollakiurie n’est qu’un symp—
tôme , pa rmi d’ autre s, d’ une a ffe ction loc ale ou régionale .
Da ns la se conde , la p olla kiurie ré sum e à elle s eule la
maladie.
I - LA POLLAKIURIE - SYMPTOME
De nom bre use s a ffe ctions loca les, régionale s e t ne urologiques peuvent s’exprimer par une pollakiurie. Elles doivent
ê tre recherchée s en prem ier pa r l’ exam en urologique qui
pré cè de l’ inve stiga tion urodynam ique . I l e st ra re que la
polla kiurie soit isolée ; elle est, le plus souvent associée à
d’autres symptômes fonctionnels ou à une modification de
l’aspect des urines.
1 - To utes les affectio ns vésicales et urét h rales pe uve nt ê tre c ité es ic i : tum e urs , lith ia s e s,
inflam m ations… L’ une d’ entre e lles mé rite une a tte ntion
particulière : la cystite inte rstitie lle. D’origine obscure , cette
maladie touche essentiellement la femme et se caractérise
pa r une perte de la com pliance vésica le . Le sym ptôm e
majeur est la pollakiurie intense (20 mictions ou plus) diurne
et nocturne, souvent associée à une douleur hypogastrique
à vessie pleine. Cette douleur à la distension est provoquée
par la cystoscopie qui peut entraîner un saignement capillaire diffus. Ce sont les symptômes les plus caracté—ristiques
sur lesquels on fonde le diagnostic, car les lésions anatomopa thologique s de la vess ie m anquent de spéc if icité . La
cystomanométrie peut aider lorsqu’elle montre un défaut de
compliance, parfois masqué par une instabilité vésicale.
2 - La resp on sabilité des affection s régionales est plus discutable. Une pa thologie infla mm atoire
( digestive ou a nnexie lle ), un ca lcul bloqué dans l’ uretère
pelvien, sont de s ca uses c lassiques de pollakiurie, géné —
ra lem e nt a ssoc ié e à d’ a utres sym ptôm e s f onctionnels,
douloureux notamment.
La pollakiurie, associée à la dysurie, fait partie du tableau de
“prostatism e”. On connaît ma l les liens entre l’hypertrophie
prostatique et la pollakiurie qui disparaît 2 fois sur 3 quand
on e nlève l’ adénome : une mauvaise com plia nce vésicale ,
un résidu post-mictionnel, la présence même de l’adénome,
le vieillissem ent cé ré bral sont des fa cteurs possibles. Mais
c’est l’obstruction elle-même qui est probablement en cause
par l’hypercontractilité qu’elle induit.
La pollakiurie, associée à un fibrome, un prolapsus utérin ou
à une cystocèle, est souvent attribuée à la compression de
la vessie par ces organes. L’image d’un utérus qui “appuie”
sur la ve ssie s’ im pose comm e une explic ation simple e t
rationnelle, à l’esprit des patientes et souvent aussi de leurs
mé de cins. En fa it, c’ est la gène pe lvie nne, l’impre ssion de
pesanteur, qui conduit ces femmes à uriner souvent comme
elle s se racle ra ient la gorge . Le méc anism e de c es polla—
kiuries rejoint en cela celui des pollakiuries psychogènes.
P2
C5
3 - Les affections neurolo giques, cérébrales
et méd u llaires , co m porte nt gé né ra le m e nt un e
polla kiurie p armi le urs s ym ptôm e s. I l en es t a insi de s
accidents vasculaires cérébraux, de la sclérose cérébrale, de
la m a la die de Pa rkinson, et, à l’ é tage m é dulla ire , de la
sclé rose en pla ques qui aff ecte plus volontie rs la fe mm e
jeune. Les troubles mictionnels peuvent être révélateurs de la
maladie. Il faut y penser, même en l’absence de symptômes
neurologiques, quand la polla kiurie et l’ impériosité , pa rf ois
responsable de fuite s, sont accompa gnée s de dysurie e t
plus précisément d’un blocage mictionnel.
II - LES POLLAKIURIES - MALADIES
La ma ladie se résume a u fait d’ urine r souvent. L’ exam en
clinique ne dé cè le auc une ca use loc a le , ré giona le ou
neurologique pouvant expliquer le symptôme.
1 - Classifications physio-pathologiques et
cliniques
Nous avons vu que le contrôle neurologique de la vessie est
schématiquement organisé à deux niveaux :
- un contrôle ré fle xe da ns les centres m édullaire s e t
pontiques qui a ssure la périodicité des mictions e t la
coordination vésico-sphinctérienne.
107
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
- un contrôle volonta ire ou instinc tif q ui pe rm e t à
l’ hom m e, et a ussi à l’ anim al, de com ma nde r ou de
re fuse r leur m iction e t, donc, de s’e n servir autrem ent
que pour des nécessités strictement physiologiques.
Une altéra tion des m éc anisme s inhibiteurs à l'un de ce s
deux niveaux conduit respectivement à une hyperréflectivité
et à une désinhibition psychogène.
L’hyperréflectivité est physiologique chez le nouvea u-né
( voir ontogé nè se ). C hez lui, com m e che z l’ anim al, une
m iction réf lexe pe ut ê tre déc lenchée par une stim ulation
périnéale , par exe mple. Ces réfle xes archaïques, pure ment
m é dulla ire s ( voir fig ure 41) , dis pa ra isse nt a ve c le
développement des centres du tronc cérébral. Mais il arrive
qu’ ils pe rsistent ou qu’ ils réa ppa raisse nt à l’occ asion de
lésions médullaires. Il y a donc des hyperréflectivités :
- acquises : ce sont toutes les lésions du neurone moteur centra l d’origine tra um atique , tum orale , vasculaire,
dégénérative…
- constitutionnelles : ce sont des souvenirs de jeunesse
qui peuve nt se réve ille r à l’occa sion d’ une pa thologie
ré gionale joua nt le rôle d’é pine irritative, une chirurgie
pelvienne par exemple. Il est clair que ces conditions ne
c ré e nt pa s ma is d ém a sq uent une hyp erré fle ctivité
latente.
L es désinhibitions psychogènes très fréque ntes, sont la
rançon de cette “corticalisa tion” de la fonction vésicale. Le
terme “psychogènes” est trop souvent employé, sans discernement; pour qualifier des conditions diverses dont l’analyse
est essentiellement du ressort de l’interrogatoire.
108
font certainement intervenir les structures limbiques dont on
conna ît le rôle im portant dans la genèse des comporte—
ments instinctifs et émotionnels. Parfois la situation émotive
a été oubliée ou son lien avec la fuite urinaire n’a pas été
établi ; telle femme s’est trouvée inondée en entendant un
coup de frein brutal, telle autre en voyant arriver le train qui
amenait des amis longtemps perdus de vue… Il ne subsiste
a lors que le s ouve nir hum ilia nt de c ette inond ation e t
l’angoisse qu’elle puisse un jour se reproduire.
Les véritables instabilités psychogènes empruntent plus ou
m oins c onscie mm ent le s mé ca nism es de la m iction par
raison (ou volontaire) ; elles regroupent en fait des conditions
variées :
- Parfois le besoin d’uriner est l’expression d’une certaine
anxiété , d’ une appré he nsion phobique d’ avoir à uriner
ou, à plus forte raison, de pe rdre ses urines dans une
situa tion e m ba rra ssa nte . Lors que le s c onditions se
ré pè tent dans la vie quotidie nne, l’ inq uié tude pe ut
devenir une véritable névrose d’angoisse. Ainsi certaines
f em m e s c raignent d e devoir urine r e n f a isa nt leurs
course s et jalonnent le ur itiné ra ire de sta tions où elles
pourront se soulager. C’ est le cas a ussi de l’ institutrice
avant d’entrer en classe ou du P.D.G. avant la réunion de
son conseil d’administration. Contrairement à l’instabilité
é motionne lle l’é vénem e nt ne surprend pa s l’individu
mais est attendu de lui et provoqué par lui.
Les instabilités sensorielles sont caractérisées par la survenue d’un besoin d’uriner, soudain et urgent, au conta ct de
l’e au, à l’ audition d’un robinet, à l’ exposition a u froid. Ce
genre d’instabilité correspond à ce que l’on pourrait appeler
un “ré f le xe co rtic a l” a ve c une a ff é re nc e se ns itive ou
se nsorie lle qui se proje tte sur le c ortex pa riéta l et une
e ffé re nc e m otrice qui pa rt du cortex f ronta l. Le fa it que le
stimulus dé clencha nt ait quelque chose à voir ave c l’ eau,
traduit tout de même une certaine “intellectualisation” de ce
réflexe.
- Le second aspect réa lise un vérita ble ré flexe conditionné . C om m e pré cé d e m m en t le be so in d’ urine r
survient dans des situations répétitives mais qui ne sont
pas anxiogènes. Par exemple, certaines personnes sont
prises d’ une violente envie d’ uriner en ouvrant la porte
de leur domicile et plus précisément en introduisant la
clef da ns la serrure . Il y a d’ autre s e xem ple s de c e
réfle xe conditionné : en entrant da ns un re staura nt ou
dans un ca fé , certa ines pe rsonnes vont, d’ em blée e t
systématiquement, visiter les toilettes ; d’autres éprouvent
régulièrement un besoin en décrochant le téléphone ou
en allum ant le téléviseur... Nous somm es ici dans la
situation du chien de Pavlov dont l’estomac secrète au
son de la cloche parce que, inc onscie mm ent, il fa it la
rela tion e ntre le son et le plat qu’on lui présentait a u
début de l’expérience.
Les instabilités émotionnelles réalisent une urination, c’est à
dire une m iction complè te , incontrôla ble, à l’ occasion de
paroxysm es ém otionne ls : la peur, la fraye ur, l’a ngoisse, la
c olè re. L’incontine nce a u f ou-rire et à l’ orgasm e sont de s
e xem ples bien connus de c es mic tions incontrôlables qui
- Le troisièm e a spe c t e nf in re lè ve de s ha bitude s ,
acquises sans raison ou pour des raisons précises. Ainsi
ce rta ine s fe m me s incontinente s urine nt souve nt pour
prévenir la fuite ; la femme porteuse d’un prolapsus fait
de m êm e pour se dé barra sse r d’ une im pression de
LES POLLAKIURIES ET INSTABILITES VESICALES
pe sa nte ur périnéa le . Ce s pollakiuries “par habitude ”
de viennent alors des tic s, de s a utom atism es insc rits
dans le rituel quotidien.
La plupa rt de ces pollakiuries psychogè ne s ne tra duisent
p as un trouble ps ychia trique . S i ce rtaine s pe rso nne s
extériorisent leurs émotions, leurs angoisses, leurs habitudes
e n soulagea nt souve nt leur vessie, d’ autre s le f ont, avec
infiniment plus de risques, par le tabac ou l’alcool. Le rôle du
m édecin se ra très souvent de dédram atiser la situation en
e xpliquant qu’ elle ne ref lète ni une ma la die ( gra ve ) de la
ve ssie , ni un trouble ( inquié tant) du c omporte m ent. On
prétend que la femme est plus souvent atteinte parce qu’on
la croit psychologiquement plus fragile. En fait l’homme n’est
pas épargné, mais il a un (faux) alibi : sa prostate.
2 - Instabilités vésicales et uréthrales - Place
des examens urodynamiques.
La notion d’instabilité vésicale a été introduite, il y a un peu
plus de 20 ans par les auteurs anglo-saxons, lorsque Paul
Hodkinson proposa d’ agrém enter la cystom anom étrie de
“te sts de stim ula tion” pour provoque r de s contra ctions
vé sica les désinhibé es qu’ il qua lifia de “dyssynergique s”. Le
terme “instabilité vésicale” imaginé plus tard a fait fortune et
l’International Continence Society l’a consacré, en précisant
qu’ il fa llait que les contractions vé sicales aient une a mplitude d’au moins 15 cm d’eau (figure 73) . Quelques années
plus ta rd, on e nre gistra c he z ce rta ine s pe rsonne s d es
chutes brutales de la pression dans l’urèthre qu’on attribua à
une re la xa tion s phinc térie nne . Ainsi naquit le conc ep t
d’ instabilité uré thra le . L’ Inte rna tiona l Contine nc e Socie ty
décida qu’il fallait que la chute de pression dans l’urèthre
soit d’au moins 15 cm d’eau et qu’elle survienne à distance
de la capacité vésicale (figure 74)
P2
C5
Figure 73 - Instabilité vésicale
Figure 74 - Instabilité uréthrale
109
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
L es conc epts d’instabilités vésicale et uréthrale s ont
discutables. Sans mettre en doute la réalité de telles instabilités, il faut dénoncer à leur égard, l’abus qu’on en a fait :
- L e ré f le xe m ic tion ne l é ta nt ca ra ct é risé pa r une
contraction vésica le et/ ou une rela xa tion uré thra le, le s
insta bilité s vé sic ale e t uré thra le ne s ont que de ux
e xpre ssions différentes d’une mê me instabilité miction—
nelle. Au plan physio-pathologique, il n’y a pas lieu d’en
faire deux entités différentes.
- La vessie est un organe très corticalisé et l’urèthre une
zone très réfle xogène. Tous deux sont donc particulièrem ent sensible s aux c onditions da ns le squelle s sont
ré alisé s le s exam ens m anom étrique s. Ce s conditions
n ’ é ta nt pa s s ta nda rd is a ble s, u ne ve ss ie qua lifié e
d’instable ici, peut se révéler stable ailleurs.
- L’instabilité peut être une condition temporaire, qui va
de 0 à l’infini. Il n’est pas réaliste de diviser formellement
e t déf initivem ent l’ espè ce hum aine en deux ca tégorie s
selon la stabilité de la vessie ; nous pouvons tous avoir,
à des de gré s dive rs, e t da ns certaines c irconsta nc es,
une vessie instable.
- Une contraction vésicale et/ou une relaxation sphincté rie nn e, s’ ils p e uve nt e xplique r le sym ptô m e, ne
définissent pas la mala die… comm e la crise de tachy—
cardie explique le malaise perçu, mais relève de causes
m ultiple s y compris ém otionnelles. Or trop souve nt, on
se satisfait du diagnostic d’instabilité et on met en route
un traitement symptomatique, sans chercher à aller audelà du symptôme.
Les relations entre la pollakiurie et l’instabilité sont ceux
d’un symptôme clinique à un symptôme manométrique.
I l n’y a pas né cessa irem ent de superposition. Seule s le s
hyperré flectivités s’e xpriment par des contractions vésicale s
non inhibée s, a lors que le tra cé cystom anomé trique e st
norm al dans les polla kiurie s psychogènes. L’impé riosité
devrait être m ie ux corré lée à la prése nce de contra ctions
d é sinh ib é e s puis que 1/ 4 de s f e m m e s c linique m e nt
im périeuses et 1/10 des fe mm es clinique ment non impérieuses ont une vessie instable (Note 31). La supériorité de la
c ystom anom étrie sur l’ inte rrogatoire n’ est pas prouvé tant
qu’ il s’ agit se ule m e nt d’ ide ntif ie r le trouble . P ar contre ,
c om m e nous le reverrons a u cha pitre suiva nt, l’ exa me n
urodyna mique est indispensable pour é value r, de rrière le
symptômes, les forces en présence c’est à dire l’amplitude
d e la c ontra ction vé sica le et la q ualité de la ré ponse
sphinctérienne.
110
La cystom anomé trie fait partie du bilan d’une pollakiurie, y
compris, et peut être surtout, quand l’interrogatoire fournit la
conviction qu’il s’agit d’une pollakiurie psychogène. Le but
n’est pas de vérifier la normalité du tracé mais de s’en servir
comme d’un document objectif pour démontrer à la patiente
que sa vessie a une bonne capacité.
3 - Les indications thérapeutiques
Une polla kiurie, sa ns inc ontine nc e, ne justif ie pa s un
tra ite m e nt b ie n sé vè re . L a p lup a rt d’ e nt re e lle s son t
psychogènes e t s’ am éliore nt a vec un sim ple déconditionnem ent. Trop d’uté rus ont fait, abusive me nt, les frais d’ un
raisonnement hâtif ou mal éclairé.
En cas d’hyperréf lectivité, il fa ut d’a bord re che rc her, et si
possible tra iter, une é pine irrita tive, e n sa chant qu’ il e st
toujours dif ficile d’ éta blir un lie n d e ca usa lité e ntre le
sym ptôme e t c e que l’ on c roit en être s a ca use ; une
hystérectomie et une cure de cystocèle ne doivent pas être
indiquées pour ce seul motif.
Le traitement médical est essentiellement représenté par les
anticholinergiques, généralement très efficaces mais au prix
d’e ffe ts sec ondaires gê na nts comm e la séchere sse de la
bouche. Le ur me illeure indic ation est l’ insta bilité vé sicale
cystom anom étriquem ent confirmé e, ave c des contractions
de grande amplitude.
Dans les pollakiuries psychogènes, les anticholinergiques
n’ont que le rôle d’appoint d’un traitement placebo destiné à
tra nquillise r la pa tie nte . Le “dé c ond itionne m e nt” e st le
vérita ble tra ite m e nt. Il doit com m e nce r par la p rise de
conscience que le symptôme n’est pas en relation avec une
m a la die de la ve s sie . C ’ e st p our ce la q u’ un e xam en
urologique soigneux est indispensable , mê me si l’ on e st
c onva incu, à l’ a va nce , de sa norm alité. Il f a ut e nsuite
expliquer le mé canism e de la m iction par ra ison e t fa ire
admettre à la patiente que ses fréquents besoins d’uriner ne
lui sont pas imposés par sa vessie. Très peu de gens sont
consc ients qu’ ils peuve nt volontaire me nt dé cle nc he r le ur
m ic tion. P our le s en conva inc re, on pe ut inte rpré te r le
scénario suivant :
Acte 1 “Madame, avez-vous envie d’uriner” ?
“ Non docteur, je l’ai fait il y a peu de temps”
“ Voulez vous essayer à nouveau” ?
LES POLLAKIURIES ET INSTABILITES VESICALES
Acte 2
(au retour des toilettes)
“Docteur, je n’ai pas fait grand chose”
“Pouvez-vous décrire ce que vous avez ressenti” ?
“ Rien de particulier. J’ai attendu quelques secondes
avant d’avoir envie, puis c’est venu naturellement."
Cette démonstration, quand elle est concluante, est souvent
p our la pa tien te la ré vé la tion qu’ e lle e st ca p a ble de
commander à sa vessie. Il faut lui expliquer qu’elle peut s’en
servir pour se débarrasser de ses symptômes :
- lorsque le besoin se fait sentir, résister à la tentation de
s e pré cipite r aux toile tte s, m a is a tte ndre q uelque s
m inute s en re spirant profondé m e nt, que le be soin
disparaisse. Tenir à sa vessie un langage de fermeté et
non de soumission,
NOTE n° 31 :
IMPERIOSITE ET INSTABILITE VESICALES
Deux symptômes différents.
Chez 408 femme s incontinente s nous avons comparé le symptôme c linique,
l’impériosité, au symptôme cystomanométrique, l’instabilité. A la question : “quand
vous resse ntez une envie d’uriner, de ve z-vous vous pré cipiter aux toilette s ou
pouvez vous attendre 5 minutes ?, une femme sur deux accusait une impériosité
et la moitié d’entre elles perdaient éventuellement leurs urines en cours de route,
a lors que, pour l’e sse ntiel, le ur incontinence survena it à l’e ffort puisqu’on ne
retrouva it que 7% d’ incontinence e xclusivement par impé riosité . Le nombre de
vessies réellement instables en cystomanométrie n’était que de 16%. Finalement
la corré la tion e ntre le s donnée s cliniques et ma nométriques indiquait que 1/4
de s fe mme s c linique me nt impérie use s e t 1/10 de s femme s clinique me nt non
impérieuses avaient une vessie cystomanométriquement instable. Par conséquent
la cystomanométrie récuse beaucoup plus d’instabilité qu’elle n’en découvre.
P2
C5
(J.M. Buzelin et coll. - L’exploration urodynamique des incontinences urinaires de
la femme. Pour quoi faire. J. Urol. (Paris), 1987, 93, 541)
- réduire de jour en jour le nom bre des mic tions, e n
s ’a ida nt d’ un c a le ndrie r m ictionne l pour juge r de s
progrès accomplis.
Ce tte sim ple discipline est géné rale me nt suff isante pour
obtenir en une quinzaine de jours, une amélioration franche,
ou une disparition totale du symptôme.
111
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
C - LES INCONTINENCES URINAIRES
L’ incontine nce urina ire peut être déf inie comm e la perte
involonta ire d’ urine par l’ urè thre due à l’incompé te nce du
système sphinctérien vis à vis des pressions engendrées ou
t ra ns m ise s p a r la ve ss ie . C e tte dé f inition e xc lut le s
c om m unic a tions a n orm a le s de s voie s u rina ire s
( c on gé nita le s ou a c q uise s ) , e t l’ inc on tine nc e p a r
regorgement qui n’est qu’un symptôme tardif d’une dysurie
négligée.
I - L'INCONTINENCE URINAIRE CHEZ LA FEMME
Une femme sur deux a, de temps en temps, de petites fuites.
Une fe m m e sur 10 s e trouve ha ndica pé e da ns s a vie
quotidienne (Note 32)
1 - Physio-pathologie
La f uite urinaire survient lorsque le s f orc es d’ expulsion,
résulta nt de la poussée a bdominale ou de la contraction
détrusorienne, débordent les forces de retenue exercées par
l’urèthre (figure 75).
Les f orces de retenue sont la pre ssion et la ré sista nc e
uréthrales.
La pre ssion uréthrale e st m aintenue pa r l’ activité tonique
des fibres musculaires lisses et striées qui forment, autour du
col et de l’urèthre, le dispositif sphinctérien de la vessie. Elle
se renf orc e lors de la re tenue volonta ire e t s’ e f fondre
quelques se condes a va nt la c ontra ction détrusorie nne ,
assura nt ainsi la contine nce sans la dysurie. Elle diminue
régulièrement avec l’âge, notamment après la ménopause.
La “ré sistance uréthrale ”, es t une f orce pe rma ne nte qui
s’oppose à l’ écoulem ent de l’ urine, aussi bien pendant le
Figure 75 - Ce schéma complète le schéma 38, en montrant les conséquences de la toux et d’une contraction vésicale retenue, deux situations qui
peuvent provoquer une fuite d’urine.
- A la toux, on enregistre un pic de pression dans la vessie qui dépasse communément 100 cm d’eau. Le gradient de pression uréthro-vésical est
maintenu grâce à un pic de pression uréthral synchrone et de même amplitude.
- Lors d’une contraction vésicale, la base s’infundibulise, le col s’ouvre et l’urine pénètre dans l’urèthre postérieur. La contraction du sphincter strié
permet de gagner les quelques centimètres d’eau nécessaires pour éviter la fuite. Cela serait insuffisant, s’il ne se produisait en quelques secondes
une inhibition réflexe de la contraction vésicale.
(d’après J.M. Buzelin, Urodynamique Bas appareil urinaire, Masson édit.)
112
LES INCONTINENCES URINAIRES
re m pliss a ge q ue pe n da nt la vid a nge vé s ica le s . Elle
contribue donc à la continence. C’est le cas notamment de
la cystocèle : en comprimant l’urèthre (effet pelote) et en
fermant l’angle uréthro-vésical, elle entraîne une obstruction
qui, chez la femme âgée, au tonus sphinctérien effondré,
peut être un mécanisme providentiel de continence.
Les forces d’expulsion sont l’hyperpression abdominale et
la contrac tion vé sica le , de ux situations critiques où le
gradient de pression uréthro-vésical risque de s’inverser . A
la pre m iè re corre spond l’ inc ontinenc e à l’ e ff ort ( “stres s
incontinence”), à la sec onde l’incontine nce pa r impériosité
(“urge incontinence”).
P2
C5
L’ hyperpre ssion abdominale est le mé canism e de “l’ inc ontine nce à l’ e ff ort”. L a toux, l’ éte rnue m ent pe uve nt éleve r
brutalem ent la pre ssion vésica le à plus de 100 cm d’ eau.
L’intervention de certains mécanismes permettent d’éviter la
fuite (figure 76) :
- la fe rm e ture de l’ a ngle uréthro-vé sica l posté rie ur
im plique que le col re ste f ixe pe nda nt la toux ; ce
m é ca n is m e , pro ba ble m e n t a c c e ss oire d a ns le s
c onditions norm a le s, de vie nt imp orta nt e n ca s de
cystocèle isolée et après chirurgie de l’incontinence.
- la tra nsm is sion de s pres sions a bdom inale s à la
portion initia le de l’ urè thre , e st un m é c anism e qui
s’ accorde bie n ave c l’ enregistre me nt dans ce dernier,
lors d’un effort de toux, d’un pic de pression, synchrone
e t de mê me a mplitude que celui enre gistré da ns la
ve s sie . C e tte c ons ta ta tion e s t e xp liq ué e de p uis
ENHORNING par la théor ie de l’enc einte manom étrique : la
ve ssie e t la partie initia le de l’urè thre é ta nt situé e s
dans la même enceinte abdominale fermée en bas par
le plancher pelvien, toute augmentation de la pression
a bdom ina le le ur e st inté gra le m ent tra nsmise . Ce tte
“tra nsm is sio n” ne s e produit plus lors que la ba se
vésicale passe sous le pla n de s re leveurs à la faveur
d’un prolapsus antérieur (Note 33).
La contraction vésicale est le mécanisme de l’incontinence
par impériosité . Nous avons dé jà vu pourquoi une vessie
pe ut être insta ble ; il s’a git d’ un problè m e ne urophysiologique. Il faut maintenant expliquer pourquoi cette instabilité
peut entraîner une fuite… car il nous arrive à tous d’avoir un
besoin pressant, urgent et, le cas éché ant désinhibé, sans
pour autant perdre nos urines. La fuite par impériosité est un
problème urodynamique, c’est à dire un déséquilibre entre
deux forces en présence, l’une qui veut expulser, l’autre qui
c he rche à re te nir. La f igure 75 m ontre ce qui se pa sse
Figure 76 - Les mécanismes de la continence à la toux : fermeture
de l’an gle u réthro -vésical po stérie ur et transmissio n de s pression s
abdominales à l’urèthre initial.
norm alem e nt. La contra ction vé sic a le e st pré cé dé e ou
ac com pagnée d’une re laxation uré thrale réf lexe, de sorte
que le gradient de pression uréthro-vésical, largement positif
quand la vessie se remplit, tend à s’inverser. La contraction
volonta ire d u s phinc te r s trié a ug m e nte de que lque s
ce ntim è tre s d’e a u la pre ssion da ns l’ urè thre , e t surtout
entraîne une inhibition réflexe du détrusor, sa ns la quelle il
serait im possible de retenir durablem ent les urine s car le
sphincter strié, comme tout muscle strié, est fatigable et ne
peut maintenir longtemps sa contraction.
La fuite d’urine peut survenir dans des conditions urodynamiquement différentes :
- Exceptionnelle ment, le sphincter strié de vie nt incontrôla ble ; la m iction réf lexe, “l’ urination” a boutissent à
l’évacuation complète du contenu vésical. C’est ce que
l’on observe par exemple dans les instabilités émotionnelles (fou-rire, orgasme... ).
- Rarement les contractions vésicales ont une amplitude
et une durée telles qu’aucun sphincter, même le mieux
entraîné, ne peut leur résister. Cette éventualité est celle
que l’ on trouve chez l’ enfant et le ne urologique, m ais
rarement chez la femme.
113
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 32 :
LA FEMME, INNOCENTE VICTIME D’UNE NATURE IMPREVOYANTE.
Un urèthre ridiculement court, une musculature périnéale malmenée par les enfants et les accoucheurs, un système hormonal qui se dérègle à la ménopause et enfin le passage
à la bipédie, valent à la femme d’être une proie toute désignée pour l’incontinence urinaire.
La fréquence de l’incontinence urinaire chez la femme est difficile à déterminer ne serait ce qu’en raison de l’imprécision même de sa définition. Les études épidémiologiques
connaissent de nombreux problèmes qui tiennent aux types d’enquêtes (questionnaire ou consultation), à la formulation des questions, à la pudeur des femmes interrogées, au
niveau socio-économique du pays...La prévalence et l’incidence ont une signification différente : la prévalence est la probabilité d’être incontinente au sein d’une communauté
donnée et l’incidence est la probabilité de devenir incontinente sur une période de temps définie. Globalement, 50 % des femmes ont des pertes d’urine, mais 10% seulement ont
une incontinence “gênante”. Les “fuites occasionnelles” sont aussi fréquentes chez la jeune fille, mais la fréquence des incontinences “gênantes” augmente avec l’âge. Une
célèbre enquête menée en 1954 par Nemir et Middleton auprès de 4211 étudiantes des universités américaines a révélé que 52% d’entre elles avaient des fuites d’urine, dont un
tiers quotidiennement.
Les facteurs de risque sont mieux connus, ce qui permet d’espérer une prévention grâce à leur dépistage.
• Les facteurs constitutionnels.
Les femmes de race noire, dont le périnée est réputé solide, font moins d’incontinence.
Une prédisposition héréditaire est peu probable ; mais il existe indiscutablement chez la jeune fille, avant tout accouchement, des différences de qualité périnéo-sphinctérienne.
Bien que rare, l’incontinence urinaire d’effort existe chez elle, en particulier chez les jeunes sportives qui développent plus leur musculature abdominale que périnéale. Souvent
pudiquement ca chée , ce tte incontine nce de vrait ê tre dé pistée ave c le concours de s e ntraîne urs, e t être ré éduqué e par de s tec hnique s dyna miques comme le s cône intra vaginaux.
L’obésité qui altère la qualité tissulaire est un facteur de risque et de morbididé opératoire ; mais l’amaigrissement brutal peut démasquer une incontinence par la perte de masse
maigre (notamment musculaire) qui accompagne la perte de poids.
• Les épisodes de la vie génitale.
La première grossesse et le premier accouchement sont déterminants. Ensuite le taux d’incontinence ne progresse pas significativement avec le nombre d’accouchements. Ainsi
pour Minaire et Jacquetin, la prévalence de l’incontinence est de :
- 26% chez les nullipares
- 41% chez des femmes ayant eu au moins un enfant :
- 35 % chez les primipares
- 44 % chez les deuxièmes ou troisièmes pares
- 38 %, au delà de 3 accouchements.
Il faut dépister les femmes à risque lors de la surveillance de la grossesse : celles qui perdent un peu à la toux, dont la musculature périnéale est faible, qui prennent trop de
poids, qui ont une pathologie gravidique altérant la qualité musculaire (diabète, toxémie...). Certaines pratiques obstétricales sont réputées incontinentogènes : la vessie pleine
avant l’expulsion, les efforts expulsifs avant la dilatation complète, l’expression abdominale musclée, la déchirure périnéale ou l’épisiotomie trop tardive. 30% des femmes qui
viennent d’a ccoucher ont une inc ontinenc e qui pe rsis te dans un tiers de s c as. M ême tra ns itoire, l’ incontinence du post partum semble un é léme nt de ma uvais pronostic,
justifiant une rééducation préventive.
La cinquantaine est l’âge à partir duquel la fréquence de l’incontinence augmente significativement. Bien que son rôle n’ai jamais été statistiquement démontré, la ménopause
rassemble un maximum de facteurs de risques. La carence hormonale vient en effet potentialiser les effets du vieillissement tissulaire avec diminution de la vascularisation périuréthrale, raréfaction des récepteurs adrénergiques, atrophie de la muqueuse uréthrale, altération de la trophicité vaginale et de la musculature périnéale.
• La poussée abdominale et la constipation terminale sévère.
Les auteurs anglais ont démontré une filiation entre l’accouchement d’une part, la constipation terminale sévère du sujet jeune d’autre part, et l’incontinence fécale “idiopathique”
du s uje t âgé. Dans le s deux c as, le s efforts de poussée abdominale et la distension pe lvie nne de l’a ccouche ment e ntraînent des étirements ne rveux, au nivea u de s nerfs
pudendal (probablement au contact des ligaments sacro-épineux et sacro-tubéral), réalisant des neuropathies périnéales d’étirement.
Il en est probablement de même sur le plan urinaire. La neuropathie d’étirement expliquerait la fréquence des incontinences du post-partum, survenant en dehors de toute
déchirure périnéale, dont l'évolution est souvent favorable dans les mois qui suivent (comme dans les lésions plexiques traumatiques du membre supérieur), et défavorable à
long terme par altération de la musculature sphinctérienne (comme pour tout muscle partiellement dénervé).
L’hyperpression abdominale est toujours nocive en favorisant le prolapus et en générant ce type de neuropathie. La constipation terminale peut être le fait d’une assynergie
abdomino-périnéale accessible à une rééducation spécifique. Elle peut être également d’origine mécanique secondaire à un prolapsus rectal ou à une rectocèle dont l’évolution
est précipitée par les efforts de poussée, installant ainsi un cercle vicieux prolapsus poussée excessive prolapsus.
114
LES INCONTINENCES URINAIRES
- Plus souve nt les c ontra ctions vé s ic a le s ont une
a mplitude modérée ou m êm e f aible, m ais la réponse
sphinctérienne est insuffisante car trop tardive, trop faible
ou trop brève . Ainsi la plupa rt des incontinences dite s
“par impériosité” chez la femme relèvent avant tout d’une
incompétence sphinctérienne.
- A l’extrême il n’y a plus de contraction vésicale ma is
une re la xation sphinc té rienne ca ra cté ristique d ’une
incontinence par instabilité uréthrale.
2 - L’examen d’une femme incontinente
uniquem ent par impériosité. Mais la fem me qui perd ses
urine s qua nd e lle tousse , ép rouve souve nt a ussi de s
dif f ic ulté s à le s re te nir lors qu’ e lle pe rç oit un be s oin .
L’ interrogatoire et l’ exa me n clinique ne doive nt pas être
conduits a ve c l’a rriè re pensé e de cla sse r dans un type
d’incontinence , m ais d’a nalyse r chez une pa tiente donnée ,
les multiples facteurs d’un symptôme complexe.
L’interrogatoire précise d’abord l’ancienneté du symptôme,
son é volution, le s diff érents tra ite me nts e ssa yé s. I l fa ut
égale ment fouille r les a ntécédents gynécologique s, obstétricaux et urologiques. Après cette enquête anamnestique, il
faut faire porter l’interrogatoire sur l’abondance des fuites, les
circonstances qui les provoquent, les symptômes associés.
P2
C5
S’ il e xiste bien deux m éc anism e s diffé re nts de la perte
d’ urine , il e st exa gé ré d’oppose r ca tégorique m ent deux
populations de f emm es incontinentes. Certes, bon nom bre
de f em me s ne perde nt qu’ à l’ ef fort et, bea uc oup m oins,
NOTE n° 33 :
ENHORNING CONTESTE
Evidemment, même si elle s’accorde quelques libertés avec la réalité anatomique, la théorie de l’enceinte manométrique est bien séduisante. Elle justifie cette croyance populaire
(mais probablement fausse), que l’incontinence est secondaire à la “descente d’organe”. Cette croyance est si forte que beaucoup de femmes consultant pour une incontinence
urinaire, prétendent venir pour une “descente de vessie”.
Quand, pour la première fois, on eût la curiosité de faire une exploration urodynamique aux femmes opérées d’incontinence, on ne retrouva que cette seule explication au fait
qu’elles étaient guéries : le coefficient de transmission était amélioré, alors que tous les autres paramètres de la continence, notamment la pression de clôture uréthrale, restaient
inchangés. Enhorning triomphait...même si, à long terme, la continence se confirmant, on constatait que le “coefficient de transmission” avait tendance à retrouver sa valeur
d’origine. En fait, le repositionnement de la vessie dans l’enceinte de pression abdominale devrait allonger la portion de l’urèthre sur laquelle s’exerce la transmission et non
accroître son amplitude.
D ans une série personne lle de 408 femme s inc ont ine ntes,
nous n’avons pas retrouvé de corrélation entre l’importance
de la c ystocè le et le pourc enta ge de “t rans mission” (J.M.
Buze lin e t coll.- L’e xploration u rodynamique de s inc ont ine nce s urinaire s de la fe mme. Pour quoi fa ire ? J. Urol.,
(Paris), 1987, 93, 541.
L’existence d’un pic de pression dans l’urèthre, au moment
de la toux, e st un fait incontes table puisqu’on l’ enre gist re.
O n ne pe u t pa s nie r que c e phé nomè ne pa rt ic ipe a u
maintien du gradient de pression uréthro-vésical, donc à la
c on tine nc e . C’ e st l’e xplic a tion du phé n omè n e qui e st
c ontesté , c ar d’a utre s mé ca nismes pe uvent être é voqué s :
contraction réflexe du strié, télescopage de la base vésicale
s ur le pé riné e ...Ce c i e xplique que l’ amplit ude du pic de
pression dans l’urèthre puisse être supérieure à l’amplitude
du pic de pression dans la vessie...ce que certains appellent
des “hypertransmissions...”
L’histoire de la théorie d’Enhorning e st l’illustra tion mê me d’une hypothè se, sans doute fa us se, mais jama is remis e e n cause , e t à pa rtir de laquelle se bâtissent d’a utres
hypothèses. Ainsi a-t-on défini un type particulier d’incontinence par “défaut de transmission” justiciable d’un type particulier d’opération, replaçant la vessie dans l’enceinte de
pression abdominale...etc.
115
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
L’abondance des fuites est une notion très subjective, qu’on
peut essayer de préciser par les questions suivantes :
- De manière habituelle, devez-vous porter une protection , et
de quelle nature (garniture, protège slip).
- La portez-vous e n pe rma ne nce ou occa sionne llem ent ?
Plutôt par précaution ou plutôt par nécessité ?
- De ve z-vous la change r plusie urs f ois pa r jour ? Est e lle
seulement humide ou franchement mouillée ?
Les circonstances qui provoquent la fuite orientent vers le
mécanisme de l’incontinence.
Le s fuites à l’e ffort surviennent inopiném ent, sa ns besoin
préalable lors des efforts qui augmentent la pression abdominale : toux, rire, marche rapide ou course, port de charges,
passage en orthostatisme . Elle s ne se produisent habituellement que le jour, bien que certaines “tousseuses” puissent
aussi perdre la nuit.
La fuite par impériosité est caractérisée par l’impossibilité de
retenir les urines lors d’un besoin urgent, malgré la contraction volontaire du sphincter strié. La question : “Devez-vous
vous pré cipite r a ux toile ttes lorsque vous re sse nte z un
b es oin,”, e st une que stion sim ple, gé né ra le m e nt bie n
c om prise, m ais qui ne perm et pas d’a ffirm er l’impé riosité
quand la réponse est affirmative. La course vers les toilettes
trad uit plus souve nt un se ntim e nt d ’ insé c urité qu’ une
véritable impé riosité que c ara cté risent la souda ineté du
be soin, e t l’ impos sibilité de l’ inhibe r pa r la c ontra c tion
volontaire du périnée. Pour retrouver ces deux caractères il
fa ut com plé ter la question précé de nte par deux autres qui
d oive nt souve nt êt re ré p é tée s a ve c de s f orm ula tion s
différentes pour être bien comprises : “Votre besoin d’uriner
e st il progre ssif ou d’e m blée très urge nt ? Si vous vous
retenez, le besoin d’uriner peut il céder quelques instants ?”.
L es ins ta bilités “c ortic ale s” ( é m otionne lles , pa r “ré f le xe
conditionné”... ) réalisent souvent des besoins très soudains
et très urgents.
116
Le s m ic tions réfle xes ne sont pa s une sim ple fuite m al
c onte nue , ma is une vérita ble m iction, active, complète, à
laquelle le sujet assiste, impuissant ; c’est la définition même
de “l’é nurésie”. On pa rle a ussi pa rfois “d’ urination”, surtout
lorsque l’incapacité d’endiguer le flot d’urine s’accompagne
d’ un ce rtain désinté resse m ent à l’é gard de l’ événe m ent
suggérant un comporte ment “frontal”. Ce s mictions ré flexe s
lorsqu’ elles surviennent régulièrem ent doivent fa ire rechercher un trouble ne urologique mé dulla ire ou enc épha lique
(E.E.G, sca nner crâ nie n). Mais d’ une f açon be aucoup plus
banale , c’e st c e type d’incontinence qui accompa gne les
paroxysm es ém otionnels, te ls que la fraye ur, l’a ngoisse , la
colè re , e t surtout chez la fe mme , le fou-rire (quand elle est
jeune fille), et l’orgasme (quand elle ne l’est plus).
Les pertes d’urine s permanente s, ré alisant un é coulem ent
indépendant de tout besoin, de tout e ffort, surve nant aussi
bien la nuit que le jour, évoquent avant tout une fistule urovaginale ou une affection neurologique. Mais, en dehors de
c e c onte xte , ce rta ine s ins uf f is a nc e s s phinc té rie nne s
majeures peuvent se présenter ainsi.
Les sym ptôme s fonctionnels a ssociés ont leur importa nce ,
notamment la pollakiurie, la dysurie et les brulûres mictionnelles.
La pollakiurie e st é va lué e sur le nom bre de m ic tions
nocturnes (plus de 1) et la fréquence des mictions diurnes
( m oins de 3 he ure s) . Elle pe ut ê tre l’ e xpre ss ion d’ une
instabilité vésicale qui s’inscrira sur la cystomanométrie sous
form e de contra ctions désinhibée s. Plus so uven t che z la
femme incontinente, la pollakiurie est de nature psychogène :
ha bitude prise pou r prévenir la fuite, parfo is ob session nelle ,
certa ines femm es alla nt jusqu’ à choisir le urs com merçants
en fonction des “commodités” qu’ils leurs offrent.
La dysurie est un symptôme rarement avoué spontanément
car il est peu gênant ; il faut donc interroger la femme sur
ce sujet en sachant trouver les bonnes questions : “Devez
vous attendre et pousser pour uriner ? Le jet est il puissant,
soutenu, ou se pré sente -t-il comm e un é coule me nt sa ns
force ? A quel m om e nt de la journé e ê tes vous le plus
gênée ?…” L’aggravation de la dysurie en fin d’après-midi et
sa dispa rition a près le re pos suggè rent le rôle d’ un pro—
la psus. Certa ines fe mm es qui ont pris l’ ha bitude d’ uriner
souvent, pour éviter la fuite, ont du mal à le faire autrement
qu’en poussant ; elles prétendent uriner difficilement et avoir
l’impression de ne pas vider leur vessie ; il faut les questionner sur le ur prem ière m iction ma tinale , généraleme nt plus
facile car la vessie est mieux remplie.
Les brûlure s mictionne lle s, le s épisodes de cystite ou de
cystalgie récents ou anciens, les impressions permanentes
de prurit ou de brûlures vulvaires, doivent être précisés par
l’interrogatoire.
LES INCONTINENCES URINAIRES
L’examen clinique.
L’observation des fuites n’est possible qu’à vessie pleine, la
patiente étant en position gynécologique ou debout, jambes
écartées. On lui demande de tousser, de manière répétitive,
car ce n’est parfois qu’après plusieurs toux qu’on voit jaillir
du méa t uré thra l un jet plus ou moins puissa nt. Rarement
ce jet se prolonge en une véritable petite miction évoquant
une c ontrac tion vé sica le induite par la toux. P lusie urs
manœuvres ont été décrites pour étudier l’effet du “ repositionnement “ du col vésical dans l’enceinte abdominale. La
plus connue est la manœuvre de Bonney qui reproduit en
quelque sorte l’ eff et de la colpopexie, fa isa nt présager de
son e fficacité lorsqu’elle est positive c’ est à dire lorsqu’ elle
supprime les fuites à la toux (figure 77) .
L’e xam en de la vulve et du pé rinée, perme t de note r, dès
l’ inspection l’aspec t de la vulve, f ermé e ou spontaném ent
bé ante, e t la trophic ité de la m uqueuse vulvo-va gina le .
L’ef fort de poussée pe ut faire appa ra ître le s élém ents d’un
prolapsus pelvien antérieur, postérieur ou mixte qu’il faudra
analyser et quantifier (figure 78). Sa présence peut empêcher
l’extériorisation des fuites urinaires qu’il faut donc rechercher
à nouveau, en faisant tousser la patiente, après réintégration
du prola psus. Ce s incontinence s ma squé es, particuliè rement fréquentes chez la femme âgée, doivent être dépistées
avant tout traitement du prolapsus.
P2
C5
Par le toucher vaginal on apprécie la sensibilité de l’urèthre,
l’état de la cavité vaginale, de l’utérus et des annexes et la
qualité de la m uscula ture pé rinéa le (figure 79) . Ce te sting
m us c ula ire e st c ôté de 0 à 5, de p uis l’ a bs e nc e d e
contrac tion perce ptible jusqu’ à la contraction vigoure use ,
soute nue, e t plusieurs fois ré pété e. I l n’ e st pa s ra re de
constater une “inversion de la com mande motrice”, c’est à
dire une contraction des abdominaux, des adducteurs, mais
non de s re le veurs. Parfois m êm e la patiente re tie nt sa
respiration ; son visage traduit une profonde concentration...
m ais le pé rinée re ste m ou. Il n’e xiste cepe ndant pa s, à
l’échelon individuel, de relation entre le testing musculaire et
la valeur de la pression uréthrale maximum (Note 34)
Le reste de l’examen clinique, doit explorer, comme au cours
de toute consultation uro-gynécologique :
- le mé at uréthral e t l’urèthre, par l’ explora teur à boule ,
surtout en cas de cystites ou de dysurie,
- la sensibilité périnéa le e t le s ré flexes (a nal, clitoridoa nal, a chilé e n), si l’ on a un doute sur une a tteinte
neurologique,
Figure 77 - La manœuvre de Bonney consiste à remonter le cul de
sa c va gin a l a n té rie u r a u mo y e n de 2 d o igts vag in a u x , sa n s
comprimer l’urèthre ni le col. On dit que le test est positif lorsqu’il
empêche la survenue de fuites à la toux.
- la cavité vaginale si on soupçonne une fistule… sans
te nir c om pte a ve uglé m e nt de s co nc lus ions d’ un
précédent examinateur.
117
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
Figure 78 - Différentes variétés de prolapsus :
1 - Cystocèle
2 - Hystérocèle
3 - Elytrocèle
4 - Rectocèle
F igure 79 - Te sting des rele ve urs. De u x do igts in tra -va gin au x
re c o u rbé s e n c roc h e ts pre n n en t co n ta ct a ve c la s an gle de s
releveurs. On demande à la patiente de faire un effort de retenue, en
imagina nt par exe mple qu’ elle se retie nt d’u rine r o u de lâ che r un
gaz.
118
LES INCONTINENCES URINAIRES
NOTE n° 34 :
LE TESTING MUSCULAIRE - Il explore le périnée… pas le sphincter.
Le testing des muscles périnéaux, plus souvent appelé testing des releveurs, est un temps important de l’examen d’une femme incontinente ; c’est aussi un moyen simple de
contrôler les résultats de la rééducation et d’en faire prendre conscience à la patiente. Mais existe-t-il une relation entre la qualité de la musculature périnéale et celle des
sphincters uréthraux ?
Chez 100 femmes consultant pour une incontinence urinaire non neurologique, la valeur de la PC max a été mise en relation avec les résultats du testing, toujours réalisé par le
même examinateur, en distinguant 3 types de réponses : nulle (cotation 0), faible (cotations 1 ou 2) et bonne (cotations 3 à 5).
Il a été trouvé une corrélation positive entre le testing des releveurs et la pression de clôture maximum mesurée au repos ; elle est encore plus significative avec la pression en
retenue. Mais il faut se garder d’extrapoler aux sphincters uréthraux les résultats du testing. Ainsi, dans notre série, un testing côté 0 est compatible avec une pression de
clôture supérieure à 60 cm d’eau chez 30% des femmes sur le profil au repos et 18% des femmes sur le profil en retenue. Inversement un testing coté 3 ou 4 est compatible avec
une pression de clôture inférieure à 60 cm d’eau chez 43% des femmes sur le profil en repos et chez 26% des femmes sur le profil en retenue.
P2
C5
Une relation stat istique e ntre de ux paramè tre s ne pe rme t pas d’é tablir de re lation fiable à l’éc helle individuelle c ar le plus souvent les varia nc es sont élevée s. L’ analyse
multifactorielle montre l’existence de nombreuses corrélations internes. Une relation entre ces deux paramètres peut s’établir non pas directement mais par l’intermédiaire d’un
ou de plusieurs autres paramètres et dépendre d’un phénomène différent de celui initialement étudié ou même être fortuite. Nous pouvons seulement émettre l’hypothèse selon
laquelle les corrélations observées sont le reflet de la qualité du terrain tant clinique qu’urodynamique. Il est même possible de nier toute relation directe entre le testing et la
pression de clôture maximum, et de penser que notre corrélation est du même ordre que celle observée entre les quantités de choux et de carottes dans le panier de la
ménagère. Celle-ci dépend plutôt du prix des deux légumes qui varie dans le même sens, en fonction de la récolte, de la saison, ou des habitudes gastronomiques d’une
région...Le testing musculaire ne donne donc pas d’indication précise sur la qualité des sphincters uréthraux, et ne peut donc prétendre remplacer le profil de pression uréthrale.
Cela a-t-il vraiment de l’importance ?
- non, si on se décide à traiter l’incontinence par une rééducation dite “périnéo-sphinctérienne”, dont on ne contrôle que les effets périnéaux.
- oui, si on opte pour la chirurgie, car c’est la valeur des sphincters et non celle des muscles périnéaux qui conditionne la réussite.
(P. Glémain et coll. - Le testing des muscles périnéaux renseigne-t-il sur la qualité des sphincters uréthraux de la femme ? J. Urol. (Paris), 1989, 95, 259)
Les examens complémentaires, radiologiques et urodynamiques visent à analyser et à quantifier les mécanismes de
l’ incontine nce ; ils ne re mpla cent pa s la clinique , ma is la
complètent.
Le s e xam e ns radiologiques explore nt le s a nom alie s de
positionnement de la vessie et de l’urèthre, qui sont encore,
pour bea ucoup d’a ute urs, le s m éca nisme s esse ntie ls de
l’incontinence. Ces explorations radiologiques ont perdu un
pe u de le ur intérêt a ve c le développe me nt des exam ens
urodynamiques. Elles ont pourtant été une étape importante
dans cette recherche d’une me illeure c om préhension des
m é ca nis me s de l’incontine nce , a vec l’ inc onvé nient de
le s a voir ré sum és aux se ule s a noma lies de la sta tique
pelvienne.
L’uréthrographie mictionnelle, en dehors du fait qu’elle révèle
pa rf ois une pa tho log ie a s soc ié e (d ive rtic ule, sté nos e
uréthrale) peut, comme l’uréthrographie à chaînette montrer
c erta ins a s pec ts qu’ on a pu considé re r, ab us ive m e nt,
comme spécifiques (figure 80) :
Figure 80 - Les “sign es ra dio lo giqu e s” de l’in co n tin e n c e (d’ a prè s J. M. Bu z e lin , Uro dy n a miqu e Ba s
appareil urinaire, Masson édit.)
A - effacement de l’angle uréthro-vésical postérieur au
de là de 110° e t ou ve rtu re de l’ an gle d’in clin aison de
l’urèthre au-delà de 45°
B - vésicalisation de l’urèthre proximal au repos et à la
toux
C - abaisseme nt de la jon ctio n ce rvico -u ré th rale au dessous de la symphyse pubienne.
119
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
Le colpocystogramm e, im aginé par Bethoux, distingue le s
a ltéra tions parfois associé es des systè mes de suspension
posté rie urs ( liga me nts uté ro-sacré s) e t anté rie urs ( portion
élévatrice du releveur), du bloc viscéral pelvien.
faibles avec un sphincter épuisé (figure 81). Dans le premier
cas c’ est le détrusor qui est pathologique , dans le second
cas c’est le sphincter ; les indications thérapeutiques seront
fatalement différentes.
Les examens urodynamiques sont plus utiles pour expertiser
l’équilibre vésico-sphinctérien, dont dépend le pronostic, que
pour confirmer un concept clinique d’ incontinence à l’e ffort
ou par impériosité.
L’ a na lyse de l’é quilibre vé s ic o-sphinc térie n, s ur nos 4
paramètres (pressions vésicales de remplissage et miction—
nelle , pre ssion e t résista nc e uréthra les), f ait re ssortir de ux
notions importantes :
La distinction entre l’ incontine nce à l’ effort e t l’ incontine nce
pa r im périosité e st, d’ abord, clinique . Nous avons vu le s
rapports entre le symptôme clinique (pollakiurie, impériosité)
e t le sym ptôm e urod yna m ique ( ins tab ilité vé sica le ou
uréthra le) (Note 31) . En c as de discordance , on ac corde
logiquement plus de confiance au second, qui n’est pourtant
pas inf aillible . Mais, lorsque la cystomanométrie ré vèle ou
confirme une instabilité vésicale, l’important est de mesurer
le s rap ports d e f orce q ui exp lique nt la fuite . T ous le s
inte rm é diaires existent entre des c ontractions a mples e t
puissantes avec un sphincter excellent, et des contractions
1 - Il n’y a pas d’équilibre urodynamique caractéristique de
l’ incontine nce à l’ef fort et de l’ incontine nce par im pé riosité .
(Note 35)
2 - L’hypotonie sphinctérienne est, à l’égard de la chirurgie, le
facteur pronostique le plus péjoratif (Note 36). C’est logique,
si on considère que les forces de retenue sont la somme de
la pression uréthrale (qui n’est pas modifiée par la chirurgie)
e t de la ré sista nc e uréthrale (qui est a ugm entée pa r la
chirurgie). Une bonne contractilité vésicale et un bon tonus
sphinc térien perme ttront à l’opé ré e de surmonte r la phase
Figure 81 - Deux cas d’incontinence urinaire par contractions désinhibées du détrusor ; en haut, les contractions atteignent presque les 100 cm
d’eau et le sphincter est excellent ; en bas les contractions ont une amplitude beaucoup plus modeste, mais le sphincter est également beaucoup
plus médiocre. Au même symptôme correspondent des conditions urodynamiquement différentes.
120
LES INCONTINENCES URINAIRES
de dysurie et de connaître pendant de nombreuses années
une situation d’ équilibre entre la dysurie et l’incontinenc e ;
inve rse m ent e n cas de contra ction vé sica le f aible et de
tonus uréthral ef fondré (une condition f ré que nte chez le s
f emm es âgées) cet é quilibre ne sera jam ais durablem ent
a tte int e t l’incontinence s uc cé dera im mé dia tem e nt à la
dysurie . Mais, la continence éta nt le ré sultat d’un équilibre,
un se ul f a cteur ne pe ut préte ndre la ca rac té rise r. Aussi
im p ort a nte que soit la va le ur p ron ost iq ue du tonu s
sphinctérie n, il y a des fe mm es continentes d’ em blé e e t
d’autres qui le redeviennent après chirurgie, en dépit d’une
hypotonie sphinctérienne majeure.
Les traitements sont pha rm acologiques, kinésithérapique s
et chirurgicaux.
L e s tra it e m e nts p ha rm a co lo gique s a giss e nt soit e n
renforçant le tonus uréthral, soit en diminuant la contractilité
vésicale.
Les alpha-stimulants, (comme les béta-bloquants) augmentent le tonus uréthral de 30 % environ ; ils ne seront donc
e ffica ces que da ns le s hypotonies m odé ré es, non lié es à
une sclérose uréthrale . Le s effe ts secondaires, hype rtensif s
nota mm ent, lim itent les indications d’un traitem ent qu’on
peut difficilement administrer au long cours, surtout chez les
f em m es jeunes. Le s œstrogè nes, e n plus de leur a ction
trophiq ue sur la m uqueuse uré thrale , pote ntia lisent le s
alpha-stimulants ; cette association peut être recommandée
chez la femme ménopausée.
Le s antic holinergiques et le s antispasm odique s ont, pa r
c on tre , une trè s la rge pla c e d a ns le t ra ite m e nt d e s
inc on tine nc e s pa r im pé rios it é , m a lgré le urs e ff e t s
s e cond aire s ( hyposia lorrhé e n ota m m ent) . Le ur ac tion
principale étant un écrêtement des contractions vésicales, ils
seront d’autant plus efficaces que l’hypercontractilité apparaît
c om m e le f a c te ur d om ina nt da n s le m é c a nism e de
l’incontinence. La Probanthine ® a été pendant longtemps le
m é d ic a m e nt d e ré f é re nc e ; a c tue llem en t le Chlorure
d ’ Oxybutinine (Ditropa n ® ) s’ im pose c om m e l’ a nticholinergique-antispasmodique le plus efficace sur la vessie.
La rééducation périnéo-sphinc térie nne a é té introduite , e n
France e ssentiellement, il y a quelques années. Le but est
m oins de dé ve lop pe r la m us c ula ture p é riné a le q ue
d’ apprendre à s’en se rvir ( Note 37) . Elle doit toujours ê tre
te nté e en prem ie r, sa m eille ure indic ation é tant l’incontinence m odé ré e de la fem me je une ave c une hypotonie
s phinc té rie nne m odé ré e . I l fa ut l’ é te ndre a ux f e m m e s
enceintes à risque, notamment dans le post-partum, après la
visite post-natale. Il ne faut pas exclure les personnes âgées
qui pe uve nt e n tire r un bé né f ic e ine s pé ré ( Note 38) .
L’incontinence par impériosité, lorsqu’elle relève d’une insuf—
fisa nce sphinctérie nne plutôt que d’ une hyperc ontra ctilité
détrusorienne, fait partie des indications de la rééducation ;
l’acquisition d’un meilleur contrôle sphinctérien peut suffire à
faire disparaître les symptômes. Les résultats, non prévisibles
sur les données urodynamiques, peuvent être évalués à un
tiers de guérison, un tiers d’amélioration et un tiers d’échec.
La chirurgie s’a dresse a ux échecs de la réé ducation ; e lle
pe ut ê tre toute fo is indiqué e d’ e m blé e lorsque c e tte
rééducation est irréalisable ou non désirée de la patiente. Le
choix d’ une tec hnique est af faire d’habitude ou de pré fé—
re nc e personnelle ca r, à l’e xce ption de l’ inje ction sousce rvica le de téf lon, il n’ y en a pas une qui se dém arque
réellement par la qualité de ses résultats, ni même par ses
mécanismes d’action (Note 39). On évalue entre 80 et 90%
le ta ux de succès, le s récidive s se produisant m ajorita irement dans le courant de la première année (et même les 6
premiers mois). Le taux de récidives progresse ensuite de 1
à 2 % e nviron par a n. L’ échec se mble plus dé pe ndre du
te rra in que de la technique utilisé e, l’ instabilité vésicale e t
l’ hypotonie sphinc té rien ne é ta nt les f a cte urs le s p lus
péjoratifs
Le but du traitement est de restaurer un confort, une “qualité
de vie”. La satisfaction de la patiente n’est pas forcément en
rapport ave c le ré sulta t objec tif. T elle pe rsonne âgé e se
contente ra d’une continenc e préc aire lui perm e tta nt de
rencontrer ses amies autour d’une tasse de thé ; telle femme
jeune exigera une parfaite sécurité pour pouvoir continuer
son jogging. Ceci doit inciter à la modestie dans l’évaluation
de s ré sulta t s e t a u bo n s e ns da ns le s in dic a tions
thérapeutiques.
P2
C5
121
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 35 :
EXLORATION URODYNAMQIUE DE L’INCONTINENCE DE LA FEMME
Il n’y a pas d’équilibre spécifique de l’incontinence à l’effort et par impériosité.
Chez des femmes consultant pour incontinence urinaire, deux groupes ont été individualisés, répondant aux critères cliniques et urodynamiques de l’incontinence à l’effort (115
cas), et de l’incontinence par impériosité (41 cas). Quatre paramètres urodynamiques ont été étudiés chez chacune d’entre elles : la capacité vésicale, l’amplitude de la contraction
vésicale mictionnelle, la pression de clôture maximum et le coefficient de transmission.
On peut d’abord constater, dans les deux groupes, une grande dispersion des valeurs, ce qui souligne encore le fait que la condition “incontinence” est la conséquence de
dé sé quilibres divers. La comparaison entre les de ux groupe s, ne montre pas de différe nce significa tive de c ha cun des para mèt res, ni dans sa valeur moye nne, ni dans sa
distribution sur l’histogramme. La seule différence significative est la capacité vésicale (434 +/- 130 cc contre 270 +/- 110 cc). L’amplitude de la contraction vésicale n’est pas très
différente (25+/-12 cm d’eau contre 32+/-21 cm d’eau) et les caractéristiques du profil uréthral le sont encore moins : (52+/-22 cm d’eau contre 47+/-23 cm d’eau pour la pression
de clôture maximum, 16 contre 18 cm d’eau pour le gain en effort de retenue). On peut en conclure que les femmes dont l’incontinence survient exclusivement par impériosité
mictionnelle, ont effectivement une capacité vésicale moindre mais qu’elles ont un moteur vésical et des freins ni meilleurs ni pire que les femmes souffrant d’une incontinence
d’effort pure.
J.M. Buzelin et coll. - L’exploration urodynamique des incontinences urinaires de la femme. Pour quoi faire. J. Urol., 1987, 93, 541
122
LES INCONTINENCES URINAIRES
NOTE n° 36 :
LE TONUS SPHINCTERIEN
Un indicateur du risque d’échec chirurgical.
NOTE n° 37 :
LA REEDUCATION PERINEO-SPHINCTERIENNE.
Trois techniques sont utilisées en rééducation périnéo-sphinctérienne :
Toutes les femmes qui perdent leurs urines à l’effort ne sont pas égales face à la
chirurgie. Celles dont la pression de clôture est inférieure à 30 cm d’eau, ont un
handicap certain. Dans notre expérience :
- La kinésithérapie a pour but de remuscler le périnée au moyen d’exercices
statiques du périnée, dans diverses positions. L’interruption du jet mictionnel est
le premier exercice de ce type.
- La valeur moyenne, pré-opératoire, de la pression de clôture est de :
55 ± 24 cm d’eau pour les succès,
29 ± 12 cm d’eau pour les échecs,
En d’autres termes, le risque d’échec est de 6% lorsque la pression de clôture est
supérieure à 50 cm d’eau et de 70% lorsqu’elle est inférieure à 30 cm d’eau. 60%
de s fe mme s qui ré c idive nt une inc ontine nc e ont une pres sion de c lô ture
inférieure à 40 cm d’eau.
- Ce n’est pas la chirurgie qui altère la pression de clôture, c’est l’hypotonie
sphinctérienne qui altère les résultats de la chirurgie. Dans une série de 221
incontinences urinaires récidivées, la valeur moyenne de la PC avant la première
intervention, c’est à dire avant toute récidive, est de 45 cm d’eau. Elle est de 44
cm d’eau après la première intervention et de 47 cm d’eau après la seconde. Ceci
ve ut dire que le c hiffre de la P.C. ma x. retrouvé aprè s l’intervention est asse z
fidèlement représentatif de ce qu’il était avant l’intervention. Si donc on retrouve
une hypotonie sphinctérienne chez une femme qui récidive une incontinence, il
y a tout lie u de pe ns er que l’ hypotonie es t la c au se de l’ éc he c e t non la
conséquence de la chirurgie.
NOTE n° 38 :
- Le biofeedback (ou rétro-action sensorielle) consiste à acquérir la maîtrise du
fonctionnement d’un organe ou d’un muscle, par la prise de conscience objective
de son fonc tionne me nt. Ainsi pe ut on a pprendre à inhibe r de s contrac tions
vésica le s en le s concré tis ant par un signa l visue l ou s onore . Surtout, on pe ut
objectiver les progrès accomplis sur la musculature périnéale en enregistrant la
p re s s ion e n do- va gin a le à l’ ai de d’ un p é rin é omè tre , ou l ’a c ti vit é
électromyographique au moyen d’électrodes de contact placées sur une bougie.
Une fois que la femme sait reconnaître et utiliser son périnée, il faut lui apprendre
à prévenir la fuite en prenant l’habitude de le contracter automatiquement dans
les mouvements impliquant simultanément la contraction du diaphragme et des
abdominaux. Les résultats dépendent en grande partie de son aptitude à intégrer
et à automatiser ces exercices dans tous les actes de la vie quotidienne.
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- L a s tim u latio n é l e ctr ique e ndo -vag inale es t de st inée à fa ire pren dre
conscience à la patiente de son périnée et à le faire travailler passivement. C’est
u ne t ec hnique complé ment aire de s préc é de nt es surt out lors qu e le te st ing
musculaire est médiocre.
L’INCONTINENCE URINAIRE DES PERSONNES AGEES - Un traitement symptomatique pour un handicap mutifactoriel.
L’appareil urinaire vieillit : le détrusor devient moins puissant et moins compliant ; le sphincter s’affaiblit ; l’urèthre féminin, privé de stimulation hormonale, perd de sa souplesse ;
les systèmes d’amarrage des viscères pelviens se relâchent chez la femme. L’incontinence, la dysurie, l’infection urinaire sont souvent associées. Des facteurs non spécifiquement
urinaires s’ajoutent aux précédents :
- le vieillissement cérébral altère les capacités d’inhibition, émousse la perception du besoin, fait oublier les contraintes sociales et le chemin des toilettes.
- la dégradation motrice, les troubles de la marche, la lenteur du déshabillage ne permettent plus de résister bien longtemps aux besoins impérieux.
- de multiple s tra ite me nts pe uvent influe ncer le comportement vé sico-s phinctérie n : diuré tique s, anti-hypert enseurs ou vasodilatate urs (alpha-bloquants nota mme nt),
antidépresseurs tricycliques...
- le rythme de la diurèse s’inverse avec une polyurie nocturne qui explique la nycturie et les fuites par impériosité au lever.
La prise en charge thérapeutique n’a rien de spécifique chez le sujet autonome et coopérant ; elle fait appel à la pharmacologie, la rééducation et la chirurgie. Chez le sujet
dépendant, elle doit tenir compte des multiples facteurs étiologiques, notamment de l’environnement matériel et familial :
- l’aménagement de l’environnement vise à faciliter l’accessibilité aux toilettes et le déshabillage par le port de vêtements adaptés. Comme pour l’enfant énurétique, il faut
éliminer progressivement les couches et garnitures qui sont une incitation à l’incontinence.
- la rééducation comportementale consiste à tenir un calendrier mictionnel où doivent être notés les heures, les volumes, la fréquence des mictions, les fuites, les apports
hydriques. Les mictions sont programmées à heures fixes progressivement espacées. Ce conditionnement doit être d’autant plus rigide que la détérioration intellectuelle
est plus sévère. Il en est de même de la défécation qui peut être déclenchée quotidiennement avec un suppositoire d’Eductyl.
- la polyurie nocturne est réduite par une meilleure répartition des apports hydriques, l’élimination des facteurs diurétiques au repas du soir, le repos couché en début
d’après midi.
- des exercices simples peuvent être conseillés : poussée abdominale pour vider le résidu en fin de miction, “stop pipi”, contractions répétées des releveurs sans poussée
abdominale.
Une fois sur deux ces mesures non spécifiques améliorent grandement la situation, même chez des sujets très séniles.
123
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 39 :
MECANISMES D’ACTION DE LA CHIRURGIE
DE L’INCONTINENCE URINAIRE
Le s mé ca nis me s d’ac tion pe uvent être a ctue lle me nt ana lys és d’une ma niè re
fiable et objective en comparant les paramètres urodynamiques et radiologiques
avant et après l’intervention.
- Les variations de la PCmax sont de l'ordre de ± 10% par rapport à la valeur
préopératoire. La chirurgie n'amé liore donc pa s la qua lité sphinctérie nne ; mais
elle ne l'aggrave pas non plus.
- Beaucoup considèrent que le gain de transmission est la clé de la réussite
chirurgicale, prouvant la reposition du col vésical dans l’enceinte manométrique
abdominale. Leurs résultats semblent le prouver ; toutefois la “transmission” ne
ré sist e pas à l’épre uve du temps ; aprè s 5 ans, le ga in de vie nt néglige able e t
indépendant du résultat clinique.
- La fermeture de l’angle uréthro-vésical et surtout la création d’un point fixe sur
lequel le col peut venir s’écraser au cours des efforts de toux est un mécanisme
important comme semblent le montrer les études radiologiques.
- L’ augme ntat ion de la ré s is ta nce uré th rale e st re sponsa ble d’ une dysurie
gênante dans un tiers des cas, et d’une obstruction “urodynamique” dans deux
tiers des cas. Elle est réputée plus fréquente après suspension aponévrotique du
col qu’après colposuspension. Ses conséquences fonctionnelles s’atténuent avec
le temps, surtout en raison du développement de la contractilité vésicale. Ainsi
les vessies acontractiles sont condamnées à devenir et à rester dysuriques. Mais
l’hypocontractilité, qui traduit simplement une résistance uré thrale bass e avant
l’intervention, peut évoluer de manière imprévisible en post-opératoire. D'un point
de vue pronostique, on peut donc seulement opposer les vessies contractiles et
acontractiles.
II - L’INCONTINENCE URINAIRE CHEZ L’HOMME.
L’ inc ontine nce urina ire non ne urologique e st ra re che z
l’ hom me , qui l’ ac cepte psychologique me nt très ma l. Elle
succède le plus souvent à un chirurgie de la prostate ou un
remplacement de vessie. La fréquence, les mécanismes, la
symptom a tologie e t le traite me nt des diff ére nte s form es
d’incontinence n’ont aucun point commun, ce qui justifie de
les étudier séparément.
1 - Les incontinences non iatrogènes.
L’ inc ontinence “s ponta née ”, indépe ndante de tout ac te
chirurgic al, peut se pré se nter che z l’ homm e comm e une
incontinence par re gorgem ent ou une incontine nce post
mictionnelle.
L’incontinenc e par regorgement réalise un é coule me nt
d’ abord nocturne a va nt d’ être perm a ne nt. L e diagnostic
repose sur la constatation d’un globe vésical chronique ,
parfois a ssoc ié à une distension du haut a ppareil urina ire .
Le bilan est celui d’une dysurie.
L’incontinence post-mictionnelle se traduit par l’é mission,
aprè s la miction, de que lque s m illilitre s d’ urine mouilla nt
le slip. L’ é coule m e nt pe ut se produire goutte à goutte
(“dribbling”) ou en jet. L’accumulation d’urine dans un diverticule uréthral ou en amont d’une sténose de l’urèthre, sont
des mé canism es fa ciles à com prendre et à objectiver par
une uréthrogra phie rétrogra de et m ictionnelle. Le m éc anisme de s goutte s reta rda ta ire s chez le prosta tique non
opéré est moins clair ; on évoque une distension de l’urèthre
bulbaire sous l’effet de l’accélération du jet au passage de la
filière prostatique (“effet jet”).
2 - L’incontinence après chirurgie
de la prostate.
Sa fréquence est évaluée à 1% après RTU ou énucléation
d’ un a dé nome , 5% a prè s prosta te c tom ie ra dic ale , soit
e nviron 1000 nouvea ux cas en France pa r a n, pour les
80.000 RTU pour adénome et les 2000 prostatectomies pour
cancer réalisées annuellement.
L ’étend ue d e l’ exérès e e xp lique c e tte dif fé re nce d e
fréquence.
124
Aprè s adénome ctomie , la loge se rétracte plus ou m oins
com plè tem ent et s’épithélia lise en 2 à 3 mois à partir des
LES INCONTINENCES URINAIRES
m uqueuse s vésica le e t uré thrale ; m a is le nouvea u col
vésical reste béant permettant le passage de l’urine dans la
loge prosta tique. La continence est conf iée a u “sphinc te r
distal”, c’est à dire au sphincter strié, habituellement respecté
car protégé par la coque prostatique. S’il peut être lésé au
c ours d’ une ré se c tion, on im a g in e plus dif f icile m e nt
c om me nt, sauf m alveillance ou m ala dresse pa rticuliè re, il
pourrait ê tre arraché au cours d’ une énucléation pa r voie
haute. Un autre mécanisme intervient donc : la sclérose de
la loge prosta tique , depuis le c ol vés ica l jusqu’ à l’ ape x
prostatique : elle infiltre le sphincter e t, de toute maniè re ,
l’empêche d’agir.
La prostatectomie radicale, enlevant toute la prostate, il n’y a
pas d’é pithé lialisation de la loge mais une cicatrisa tion de
l’a nastom ose vé sico-uréthra le qui pe ut d’ a illeurs se fa ire
avec un certain degré de fibrose. Mais le sphincter strié est
beaucoup plus directement menacé.
Dans les deux cas, le traumatisme porte sur la portion “parauréthrale” du sphincter strié, qui, normalement contribue à la
continence passive, en maintenant une contraction tonique.
La portion “péri-uré thrale ”, dépenda nte de s re leveurs, qui
intervie nt dans la contraction volontaire , est gé né ralem ent
re spe cté e, c e qui explique qu’une inc ontinence d ’e ff ort
m ajeure soit com patible avec la possibilité de retenir un
besoin ou d’interrompre le jet en cours.
La symptomatologie de l’incontinence urinaire varie dans le
temps.
De s f uites sont f ré que nte s a u re tra it de la sonde a prè s
prostatectomie et même après RTU. La plupart surviennent à
l’effort ; mais il existe souvent au départ une certaine irritation
de la vessie par la sonde, avec de s besoins f ré quents et
parfois urgents. Cette incontinence précoce disparaît, le plus
souvent e n 48 heures, ma is pe ut se prolonger quelque s
se ma ines e n s’ atté nuant progre ssive me nt. L’ incontinence
massive, totale (c’est à dire sans miction) est plus rare et plus
inquiétante, car souvent définitive. Paradoxalement le patient
signale parfois spontanément qu’il peut retenir un besoin ou
interrompre son jet.
Le bilan de l’incontinence n’est justifié qu’après le 2e mois,
lorsque l’ incontinence persiste sa ns te nda nc e à l’ am élioration. Il comporte :
• un interrogatoire et un e xam en clinique pour pré ciser le
caractère et l’importance des fuites, explorer le méat uréthral
e t la coque prosta tique, é limine r un globe vésic al et une
a ffection neurologique fruste. Dans la grande m ajorité de s
c as, il s’a git d’une inc ontine nce à l’e ffort, essentiellem ent
diurne et orthostatique.
• une uré throcystographie pour a ppré cier le volum e e t
l’e xpansion de la vessie , la béance du “néo col” e t surtout
l’aspect de la loge prostatique : sa taille, la régularité de ses
parois, l’ existence d’ un ré tré cisse me nt ou d’ ima ges lacunaires trahissant des lobules adénomateux résiduels.
• une uré throcystosc opie visualise l’ a spe ct de la zone
sphincté rienne, son de gré d’occlusion et de souple sse , la
présence du véru montanum, l’existence de nodules adénom a te ux qu’ on a c c use cla s sique m e n t ( e t s a ns dou te
a bus ivem e nt) de c ontribuer à l’ inc ontinenc e en gê na nt
l’occlusion du col et de la loge prostatique.
P2
C5
• l’e xam e n urodynam ique vérif ie l’a bsence d’ obstruc tion
( débitm étrie) , e t doit surtout pré ciser le m é ca nism e de
l’incontinence :
- un dé faut de compliance est exceptionnelleme nt en
cause en dehors d’un contexte neurologique.
- l’ insta bilité vésicale est re trouvée ave c une fré quence
trè s varia ble d’ une sé rie à l’ autre. En réalité si elle e st
assez fréquente dans les suites immédiates, elle devient
rare quelque s sema ine s plus tard et sa re sponsabilité
dans l’ inc ontinence est assez sec ondaire, ca r elle e st
toujours associée à une insuffisance sphinctérienne.
- l’insuffisance sphinctérienne est en effet le mécanisme
essentiel, due à un traumatisme opératoire directe ou à
une sclérose cicatricielle de la portion para-uréthrale du
sphincter strié. Le profil uréthral montre la disparition du
plateau prostatique et une pression uréthrale maximum
eff ondré e. L’ intégrité du sphincter péri-uréthral explique
que la pression en effort de retenue puisse atteindre des
valeurs normales.
Le traitement de l’incontinence fait appel à la rééducation
et à la chirurgie. Sa uf insta bilité vésicale manifeste, il n’y a
pas place pour les traitements pharmacologiques.
• La rééducation doit être commencée tôt par des exercices
d’interruption volontaire du jet. Il faut ensuite la confier à un
kiné sithérapeute qualif ié. C’est un traite me nt eff icace , m ais
qui a git surtout en accé lérant une évolution sponta ném ent
f avora ble . Entre prise ta rdive me nt sur une inc ontinenc e
stabilisée, ses résultats sont moins bons.
• La chirurgie, longtemps limitée à quelques techniques aux
résulta ts m édiocres, a f ait de très grands progrè s avec le
sphincter artif iciel, simple à poser et effic ace dans plus de
90% des cas (Note 40).
125
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
3 - L’incontinence après remplacement
vésical
La c yste ctom ie totale a vec rem pla ce m ent pa r une né ovessie intestinale anastomosée à l’urèthre n’est actuellement
réalisée que chez l’homme qui, seul, possède un dispositif
sphinctérien distal capable de lui procure r une contine nce
acceptable.
On adme t qu’a prè s ce type de chirurgie, la fréque nc e de
l’incontinence est de 5% dans la journée et 50% pendant le
sommeil. En effet le mécanisme des fuites n’est pas tant une
insuffisance sphinctérienne (dont l’incidence est comparable
NOTE n° 40 :
à celle qu’on observe après prostatec tomie radica le), que
l’ activité propre de l’ anse intestina le dont le s contractions
pe u ve nt dé ve lop pe r ré guliè re m e nt de s pre ss ions
supérieures à 50 cm d’eau. La détubulisation de l’intestin, en
transforma nt un conduit e n une sphère, diminue significa—
tivement l’amplitude de ces contractions, et la fréquence de
l’incontinence.
Les anticholinergiques et surtout l’acquisition d’un nouveau
rythme de sommeil avec 2 ou 3 réveils pour vider la vessie,
résument le traitement.
LE SPHINCTER URINAIRE ARTIFICIEL
C’est en 1973 qu’un chirurgien de la Mayo Clinique, SCOTT, conçut, avec une équipe d’ingénieurs, le premier sphincter hydraulique. L’idée était originale, mais les applications
cliniques ne connurent pas, au début, le succès escompté. Parmi les complications, l’érosion de l’urèthre était la plus fréquente et la plus redoutable car elle oblige à explanter
tout le matériel. La fréquence de cet incident diminua très sensiblement le jour où l’implantation fut faite en 2 temps : tous les éléments étaient d’abord mis en place puis
connectés quelques semaines plus tard, afin que le sphincter, non activé, ait le temps "de se faire accepter "avant d’exercer sa compression. Actuellement, un petit bouton permet
d’effectuer les manœuvres d’activation et de désactivation, simplement à travers la peau. Plusieurs prototypes se sont succédés avant le modèle actuel AMS 800 représenté sur le
schéma.
Le sphincter artificiel agit donc bien comme un authentique sphincter, assurant la continence sans la dysurie, comme on peut le vérifier par le profil de pression uréthrale postopératoire qui montre une différence significative de la pression de clôture selon que le sphincter est ouvert ou fermé.
Plusieurs conditions doive nt être ré unie s pour impla nte r un sphinc ter artific ie l : une ves sie qui se vide c omplè teme nt e t se remplit à bass e pre ssion, un pa tie nt ca pa ble
manuellement et intellectuellement de bien utiliser son sphincter. Les autres considérations (espérance de survie, infection urinaire temporaire, état du haut appareil urinaire...)
interviennent au coup par coup dans la discussion opératoire. Les 3 principales indications sont :
- l’incontinence urinaire masculine après chirurgie de la prostate. C’est actuellement le seul procédé a peu près efficace à 100%
- l’incontinence urinaire féminine récidivée à pression de clôture basse.
- les incontinences neurologiques, congénitales notamment, avec des résultats moins constants du fait de l’altération de la compliance vésicale.
126
1-
Manchette gonflable, placée autour du col de la vessie ou autour de
l'urèthre bulbaire. La taille varie de 4,5 à 11 cm.
2-
Ballon de régulation réglant la pression dans le système (50 à 80 cm
d'eau). C'est sa taille qui détermine la pression.
3-
Pompe placée dans la grande lèvre ou dans le scrotum. La compressio n de sa partie in fé rieu re en traî n e u n tran sfert du liqu ide de la
man ch ette ve rs le ballo n : le sphin cter se dé gon fle . Il se re go nfle
automatiquement en 3 à 5 minutes par transfert spontané du liquide
dans l'autre sens. On peut empêcher qu'il se regonfle en appuyant sur
le bouton de désactivation.
LES INCONTINENCES URINAIRES
III - L’INCONTINENCE URINAIRE CHEZ L’ENFANT.
Si on exce pte les a bouc hem ents ectopique s d’un uretère
(qui ne réalisent pas d’incontinence à proprement parler), et
le s neuro-vessie s congénita les ( dont il sera question plus
loin) l’incontinence urinaire de l’enfant relève d’une perturbation dans les mécanismes d’acquisition de la propreté. Cela
veux dire qu’elle disparaîtra le plus souvent spontanément.
1 - Physio-pathologie.
Rappelez vous les étapes de l’ontogénèse dont nous avons
parlé au troisième cha pitre. L’appre ntissa ge de la propre té
fait donc intervenir l’éducation, mais aussi des phénomènes
d e m a tura tion physiologiq ue com m e la m yé linisa tion
neurona le, l'accroissem ent de la capacité vésicale, l’ acquisition d’ un ré fle xe d’inhibition du détrusor pa r le développem ent de la musculature pé rinéale du f ait du passage à
l’orthostatism e. On adme t com munéme nt que la propre té
doit être acquise au plus tard vers 4 ans.
L’énurésie touche moins de 10% des enfants de plus de 5
a ns dans la proportion de 2 ga rçons pour une fille. Se s
facteurs étio-pathogéniques sont mal connus :
Les conditions d’apprentissage de la propreté ne sont pas
dé term ina nte s ; le s é tudes fa ites dans les crè che s de s
kibboutzim où tous les enfants sont éduqués de la même
f açon, m ontre nt qu’il y a la m êm e proportion que partout
ailleurs d’enfants énurétiques et non énurétiques. L’éducation
mictionnelle est certainement plus efficace pour l’acquisition
de la propreté diurne que noc turne . L a pré va lenc e de
l’é nuré sie est signific ativem ent plus importa nte da ns le s
pays sous-développés et chez les enfants de race noir.
L es te sts p syc hologique s e t l’ e xam e n ne urologique ne
révèlent pas d’anomalies particulières.
Beaucoup d’énurétiques ont un sommeil profond ; mais les
e nre gistre m e nts é le c tro-e ncé pha log ra phique s ré alisé s
p enda nt le som m e il ont montré que l’ org anisa tion du
s omm e il éta it norm a l che z ce s e nf a nts. Le s é pis ode s
énurétiques surviennent surtout dans la première partie de la
nuit. Ils commencent le plus souvent en phase de sommeil
le nt e t s’ a c co m pa gne nt toujours d’ un a llé ge m e nt du
som m eil. L a fuite nocturne pourra it être im putée à une
altération du seuil d’éveil, qui serait plus élevé chez l’enfant
énurétique. Ce seuil fluctue normalement au cours de la nuit,
le sommeil étant plus léger en fin de nuit, ce qui expliquerait
la survenue préférentielle des fuites en début de nuit.
Une prédisposition génétique e st proba ble : Des anté céde nts fa m ilia ux d’ é nuré sie (pa re nts e t colla téra ux) sont
re trouvé s da ns 44% des ca s et le risque d’é nuré sie e st
multiplié par 5 quand l’un des parents a été énurétique. On
peut objecter que l’hérédité est la même pour toute la fratrie
et qu’il n’y a pas de raison que “à parents égaux” certains
enfants soient énurétiques e t d’ autre s pas. T outefois, il y a
sur le plan de la propreté, plus de ressemblance entre des
jumeaux homozygotes, qu’avec le reste de la fratrie .
Les facteurs psychologiques d’immaturité sont déterminants ;
l’ en fan t qui est (o u qu i se croit) victime d’ un e ca ren ce a ffe ctive o u a u co n tra ire d’ u n e su rprote ctio n , tro uve dan s
l’énurésie une façon inconsciente de marquer son appartenance au monde des petits. Le comportement de l’enfant vis
à vis de ce problè me est très va ria ble : e ntre ceux qui se
complaisent dans cet état et ceux qui ont décidé d’en sortir,
la ma jorité des e nfa nts espèrent e n être dé ba rra ssé , m ais
pensent que c’est l’affaire des parents ou des médicaments.
Ce tte cons tata tion vaut auss i bie n p our les é nuré sie s
primaires que secondaires.
P2
C5
L ’im ma turit é vésic a le e st la pe rs ista nc e à l’ â ge d e
l’ ac quisition de la propreté, de la ve ssie hyperréf le ctique ,
physiologique chez le nouve au-né. L’enfant qui a pprend à
être propre ne dispose que de la contraction énergique de
son sphinc te r strié. Ce s contra ctions vé sica le s dése spérément contenues peuvent avoir plusieurs conséquences :
- des troubles fonctionnels urinaires caractérisés par des
besoins fréquents et urgents, parfois des pertes d’urine
da ns la journé e et s ouve nt auss i la nuit. Che z c es
enfants, la relation entre l’immaturité vésicale et l’énurésie
n’est pas nécessairement une relation de cause a effet. Il
vaut mieux parler d’é nurésie che z un enfa nt aya nt une
vessie immature que d’énurésie par immaturité vésicale.
- des déf orm ations vé sic ales ca ra ctéristique s d’ une
ve ssie de lutte (f igure 82) alors mê me que la miction,
lorsqu’ elle e st autorisé e, e st norm ale , a ve c un débit
souvent explosif. L’enfant est dysurique, non parce qu’il
urine mal, mais parce qu’il cherche à éviter la fuite.
- des infec tions urinaire s ré cidivante s, parfois de petits
reflux inte rmitte nts qui s’e xpliquent pa r le dysfonctionnement de la vessie.
127
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
2 - L’examen clinique et les examens
complémentaires
L e m ot if de la c ons ulta tion e st gé né ra le m e n t un e
incontinence. La symptoma tologie pe rmet dans la grande
majorité des cas de classer le trouble fonctionnel dans une
des 3 catégories précédentes. D’un point de vue pratique, il
faut distinguer 2 situations se lon que les sym ptôme s sont
cara cté ristique s d’une énuré sie ou d’une im ma turité vési—
ca le ba na le, ou qu’ il existe une sym ptoma tologie insolite
é voq uant une ma lforma tion ou un dys fonc tionne m e nt
neurologique.
L’énurésie et l’immaturité vésicale.
L’interroga toire de l’e nf ant et de se s pare nts (7) préc ise la
na ture des sym ptôm es, le ur é volution, le s traiteme nts dé jà
essayés.
Figure 82 - Cystographie d’ u ne fille tte de 8 an s, pré sen tan t les
symptô mes d’u ne immaturité vésic ale : pe tit re flux stade 1, fin es
trabéculations vésicales et spasme du sphincter strié.
(d’a près J.M. Bu ze lin , Urodyn amiqu e Bas appareil u rin aire, Masson
édit.)
L es “neuro-ves sies non neurogènes ” (“non ne urogenic
neurogenic bladder”) réalisent des tableaux fonctionnels tout
à fait comparables à ceux des neuro-vessies congénitales, y
c om pris les consé que nces sur le ha ut appa re il urinaire ,
mais sans qu’il soit possible de les rattacher à une quelconque affection neurologique. Une telle ressemblance suggère
l’e xistence d’ un trouble ne urologique inf ra -clinique , pa r
e xe mple un reta rd de myélinisation des fibres sensitives ;
c’ est l’hypothè se avancée pa r ceux qui parlent de “ne urove ssie occ ulte”. Ma is la survenue des troubles dans la
se conde enfa nce e t la possibilité de les corrige r par la
rééducation, plaident en faveur d’une pathologie acquise qui
n’ est peut être que le prolongem ent de cette im m aturité
vésica le où une dyssyne rgie suc cè de à une hype rtonie
sphincté rie nne. Ce rta ins aute urs, souligna nt la fréquence
des troubles caractériels, en font une maladie de l’éducation
plutôt que de la maturation vésicale. L’incontinence urinaire
e t fé c a le , la d ysurie e n ra p port a ve c un m a u va is
relâ che ment sphincté rie n se ra ient l’ expression d’un trouble
grave de la personnalité s’intégrant dans un climat familial
conflictuel.
128
- l’ é nuré sie c a ra c té ris e un iq ue m e nt le s m ic tions
involontaires pendant le sommeil (c’est le “bed wetting”
des anglo-saxons).
- les pertes d’urine dans la journée se présentent le plus
souvent c omm e de s be soins im pé rie ux surpre na nt
l’ enfant dans son a ctivité, ce qui fait dire aux pa rents
“qu’il est trop occupé à jouer et qu’il attend la dernière
m inute pour aller a ux toile ttes”. L’ enfant se retient en
serrant les genoux, les poings enfoncés sous le pubis,
ou e n s’ accroupissant (“squa tting”). A l’ école il ne peut
attendre la récréation, et quand il ne dispose pas d’une
maîtresse compréhensive, il revient le soir avec la culotte
mouillée.
L’ exam e n clinique e st a vant tout un exam en urologique
standard ( palpe r les re ins e t l’ hypoga stre , rec he rcher un
phim osis e t une e ctopie te stic ula ire sa ns ra pport a ve c
l’ é nurés ie ). I l est intére ssa nt, lorsque c ela e st possible ,
d’ a ss is te r à u ne m ic tion : la p os sibilité d ’ urin e r sur
commande, avec un bon jet non seulement rassure sur une
é ve ntue lle dysurie , m a is perm e t d’ af f irm e r l’ inté grité d u
c ontrôle ne urologique de la m iction. Il f a ut, e n outre ,
examiner les pieds et la région sacrée à la recherche de
pieds creux ou plats, d’une fossette coccygienne ou d’une
touffe de poils traduisant une malformation du cône terminal
(figure 83).
(7) Il vaut mieux les interroger séparément du moins sur certains points. Avec l’enfant il est préférable de ne pas aborder d’emblée son problème, mais
bavarder avec lui pour le mettre en confiance, ce qui permettra de noter un retard de langage, une succion du pouce, des tics, des phobies, un rejet de
l’école...On lui demande ensuite s’il sait la raison de sa visite et s’il est d’accord pour coopérer. Aux parents il faut demander des précisions sur la nature
des fuites urinaires, l’évolution et les traitements suivis, les antécédents familiaux d’énurésie...
LES INCONTINENCES URINAIRES
tion ou une encoprésie, une dysurie avec un jet fa ible ou
saccadé, un globe vésical, sont des symptômes inhabituels,
de mê me que la c onstatation à l’e xa me n clinique d’une
ém ission d’ urine à la pression de l’hypogastre, d’une anomalie cutanée de la base du dos, d’un signe neurologique...
Le s pa thologie s e n c ause peuvent ê tre m alform a tives
(abouchement ectopique d’un uretère, épispade incontinent,
valve s uréthra le s, hypospa de f é minin) ou f onc tionne lles
( ne uro-vess ie s c ongé nita le s pa r m a lf orma tion ve rtébromédullaire ou neuro-vessies non neurogènes).
Figu re 8 3 - Lipo me so u s -cu ta n é de la rég io n s ac ré e, pa rtie
apparente d’une malformation vertébro-médullaire sous-jacente.
P2
C5
Il e st é vident que la suite à donner à ce premie r exa men
clinique dépend de l’orientation diagnostique. Da ns le cas
pa rtic ulie r de s trouble s fonc tionne ls , la RMN du c ône
terminal est actuellement l’examen le plus performant pour
rechercher une lésion des racines et de la moelle terminale.
Au terme de cet exam en, le dia gnostic est gé né ralem ent
fortement orienté. La suite des explorations va en dépendre :
3 - Les traitements
I l s’a git d’ une énuré sie sim ple, sans trouble s fonc tionnels
dans la journée, sa ns infections urinaires, sa ns dysurie. En
l’a bsence d’ a utre s symptôme s urina ires , il n’ y a auc une
ra ison de faire une UIV ou une é chographie, un exame n
cyto-bactériologique des urines et encore moins une exploration urodynamique.
I l s’ agit d’une im ma turité vésica le, a ssocia nt des trouble s
f onctionnels diurne s et souve nt (m ais non toujours) une
énurésie. Il n’y a pas de dysurie ; la miction est au contraire
souve nt “explosive” ; mais il n’est pas rare que l’ enfant ait
d éjà f ait de s inf e ctions urina ires dont c e rtains ont pu
s’ accom pa gner de fièvre . Le bila n urodyna mique pe ut se
lim ite r à un e sim p le dé b itm é trie a f in d’ é lim ine r une
obstruction f onctionnelle e n rela tion avec une hypertonie
sphincté rienne “d’e ntra îne ment”. La constata tion d’ un débit
f a ib le ou inte rm itte nt, vé rifié à plusie urs rep ris es pe ut
indiquer un complément d’examen. En tout cas la cystomanom étrie n’ a pa s d’ intérêt ; e lle ne f era it que c onf irm e r
l’existence de contractions vésicales non inhibées, évidentes
c liniquem ent. Pa r contre, un e xa me n cyto-bac tériologique
de s urine s, une éc hogra phie ré nale peuvent c ompléte r
utile m ent le bilan standa rd si l’ enfa nt fa it des infe ctions
urinaires. L’indication d’ une UIV et d’une cystographie sera
ensuite discutée.
Des symptômes insolites peuvent révéler une pathologie
malformative ou un dysfonctionnement plus complexe.
Une inc ontinence à l’e ffort ou un é coule me nt perma ne nt,
indépendant de tout effort et de tout besoin, une constipa-
Enurésie simple et immaturité vésicale
La “guérison” passe par la volonté de l’enfant de prendre en
charge son problème. Il faut le responsabiliser non pour le
brimer ou le punir, mais pour le valoriser. Les réveils nocturne s et la re striction liquidie nne le soir sont plus épuisants
qu’efficaces, sauf s’ils sont le fait d’une discipline librement
consentie. Tout cela doit s’intégrer dans un contexte éducatif
qui vise, en conf iant à l’ enf ant de menue s responsa bilités
quotidiennes, à l’introduire dans le “monde des grands”.
Les traiteme nts m édicamen teu x doivent être perso nn alisés,
écrits à la main, et différents pour deux enfants d’une même
fratrie. L’e ffet pla cébo est en e ffet importan t et il fau t s’a voir
s’en servir. 3 types de médicaments sont prescrits en priorité :
L’imipramine (Tofranil ®) e t la clomipramine (Anafranil ® )
a gissent de ma niè re c omple xe, m ais principale m ent en
m odif iant le som m eil. De ux inconvénie nts e n lim itent les
indications dans le domaine de l’énurésie :
- une sens ibilité très varia ble d’ un enf a nt à l’ a utre ,
nécessitant d’adapter la posologie.
- une tolérance médiocre a vec de s eff ets indésirables
(a nxiété , insom nie, modif ications du ca ractè re et de la
personnalité) et de s com plications cardiaques sé vères
(troubles du rythm e et de la c onduction) en c as de
surdosage. Ces dangers menacent également les frères
ou les sœurs de l’ enfant énuré tique qui pe uvent être
tentés de “goûter” à ces petites pilules.
129
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
Le chlorure d’ oxybutinine (Ditropan®) a, sur la contractilité
vésica le, un ef fet spec tac ula ire. C’ est donc e xc lusivem ent
dans les énurésies accompagnant une immaturité vésicale
que le m édic am ent doit être presc rit, a ve c des ré sulta ts
presque constants sur les troubles diurnes, plus inconstants
sur l’énurésie. Il y a deux explications à cela :
Les c ures thermales. L’é loignem ent ( te mpora ire) du m ilieu
familial est probablement une des raisons du succès de la
cure thermale à Lons le Saunier dans le Jura. La vie collective est le prétexte à des a ctivité s de stinées à développer
chez l’enfant la maitrise de son corps et à trouver sa juste
place au sein de la collectivité.
- la brève durée d’action du produit (4h) qui peut ne pas
couvrir toute la période du sommeil,
La rééducation, la plus é lém enta ire, consiste à fac iliter le
développement des mécanismes inhibiteurs de la vessie en
conseillant à l’enfant de se retenir 3 à 5 minutes chaque fois
qu’il perçoit, dans la journée, un besoin. Certains préconisent
l’ usa ge d’ un sa blie r a uque l il fa ut pré f ére r c e lui, p lus
va lorisant, d’une a uthentique petite montre qui néce ssite
d’ apprendre à lire l’ heure. La ré éduca tion dirigée par un
kinésithérapeute fait appel aux méthodes de bio-feedback ;
celle s-ci sont particulièrement adaptées à certa ins troubles
m ic tio nne ls de l’ e nf a nt c a ra c té ris é s p a r u n m a uva is
relâchement sphinctérien, où le rétro-contrôle est facilement
enregistrable au moyen d’une électrode d’électromyographie
de surfac e. En m atière de vessies non inhibé es, c’e st la
contraction vésicale, enregistrée par la cystomanométrie, qui
devrait normalem ent servir a u rétro-contrôle . Ceci n’ est pas
concevable, en routine, chez l’enfant énurétique.
- l’ hypot hè se s e lon laq ue lle le s c ontra c tions non
inhibée s de l’ imm aturité vé sica le ne sont pa s né ce ssa ire me nt la c ause de l’é nuré sie dont la pa thogénie
peut être différente.
L’hormone anti-diurétique ( Desmopressine - Minirin®) réduit
la diurè se nocturne qui, selon de s travaux danois, sera it
deux fois plus importante chez les enfants énurétiques que
chez les a utres. Il s’a git d’un a nalogue de la vasopre ssine,
utilisé depuis une dizaine d’ année s dans le traiteme nt du
diabète insipide d’origine centrale. Il agit comme l’hormone
antidiurétique hypophysaire, en se fixant directement sur les
réce pteurs des ce llule s tubulaires rénales. Il e st adm inistré
par voie pe rnasa le, de préf érence en pulvérisation ( spray).
C’est cette seconde forme qui est recommandée à raison de
1 µg/Kg/j, soit 1 à 4 pulvérisations en une seule prise après
la dernière miction du soir. L’action antidiurétique du produit
e st ma ximum à la prem ière heure et s’ étend sur 7 à 12
heures, c’est à dire une nuit de sommeil. Il est possible de le
prescrire pour de trè s brèves durées, par exemple lorsque
l’enfant doit coucher une ou deux nuits, en dehors de chez
lui.
Le s infe c tions urin aire s , q ui c om p liq ue nt be a uc ou p
d’im maturité s vésicale s, justifient un traite ment a ntise ptique.
Lorsqu’e lle s survie nne nt f réquem m ent il fa ut c onseille r à
l’ e nf a nt ( a ve c l’ a cc ord de sa m a ître s se ) d’ a lle r u rine r
imm é diate me nt lorsque le be soin se fa it se ntir, et ( avec
l’ ac cord de son m é dec in) de lim ite r les boiss ons pour
réduire la diurèse.
Le s autres m éthodes, agissent de ma niè re diffé re nte a vec
plus ou moins de succès :
Le “pipi-stop” est un appareil comprenant un capteur d’humidité placé au voisinage du méat uréthral et un haut-parleur
miniaturisé collé sur le pyjama de l’enfant au voisinage de
son ore ille. Le princ ipe n’e st pa s se ulem e nt de ré ve ille r
l’enfant, mais d’installer un véritable réflexe conditionné.
130
Neuro-vessies non neurogènes
La gravité des symptôme s et de leur retentisse ment sur le
haut appareil urinaire, justifie de les traiter comme d’authentiques vessies neurologiques. Cependant, les partisans de la
théorie psychogène insiste nt bea ucoup sur les méthodes
rééducatives qui s’exercent à 2 niveaux :
- apprendre à l’enfant à uriner par la relaxation périnéale
e t non pa r la pous sé e ab dom ina le , a u b es oin pa r
l’utilisation de méthodes de bio-feedback .
- résoudre les problèmes psychologiques de l’enfant et
de son entourage , ce qui implique que cette réhabilitation s e f a ss e da n s un c lim a t de c onf ia nc e e t d e
coopération entre l’enfant, ses parents et leur médecin.
Une surveillance régulière et prolongé e e st une condition
essentielle au succès car les récidives sont fréquentes.
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
D - LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICOSPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES.
La fonction vésico-sphincté rienne est très dé pe nda nte de
son innervation, depuis le neurone enfoui dans la paroi de
l’organe jusqu’aux centres du cortex cérébral. Elle est donc
pa rtic ulièrem ent exposé e aux atte inte s neurologiques de
toutes sortes.
Les lé sions incom plè te s. corre spondent à divers type s de
m yé lite s dont le s conséque nces sur la f onc tion vé sicosphinctérienne dépendent de la structure médullaire lésée,
la plus importante étant les cordons latéraux dans lesquels
passent les voies végétatives associatives. (Figure 85)
P2
C5
I - PHYSIO-PATHOLOGIE DES
DYSFONCTIONNEMENTS
VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES.
1 - Classification des dysfonctionnements
vésico-sphinctériens neurologiques
L es lésions du c ortex c éréb ral ( hém ip lé gie , tume urs)
e t ce lles de s noya ux gris ce ntra ux ( synd rom e s e xtra
pyramidaux) (Note 41) affectent la commande volontaire de
la m iction, ré a lisa nt le plus souve nt de s ve ssie s m a l
inhibée s. Ma is, elle s ne perturbent pas l’ autom atisme ni la
c oordination vé sic o-s phinctériens et, c om m e elle s sont
incomplètes, elles peuvent récupérer.
L es lésio ns m édu llaires pe uve nt ê tre c om plè te s ou
incomplètes.
Les lé sions com plè tes succ ède nt gé néralem e nt à de s
traum atisme s ra chidiens sus ja cents à D12, e n ra ison du
dé ca la ge entre le s se gme nts m édullaires et les piè ce s
vertébrales (figure 84). Elles évoluent en 2 phases :
- une pha s e de c hoc spina l ca ra c té risé e p ar une
a ré f le xie vé s ica le due à l’ in te rrupt io n d u ré f le xe
mictionnel passant par le tronc cérébral,
- une pha se de réc upé ra tion d’une spastic ité souslé sionne lle qui est exploité e pa r le neurologique pour
dé c le nche r s a m ic tion ( pe rcussion). La contra c tion
vésicale réflexe réapparaît après des délais variables de
quelques heures à plusieurs mois, généralement 2 à 3
mois. (Note 42)
Figure 84 - Correspondance entre les segments médullaires et les
pièces osseuses.
(d’ après J. M. Bu ze lin , Urodyn amiqu e Ba s appa reil u rina ire, Masso n
édit.)
131
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 41 :
LA MALADIE DE PARKINSON : Trop d’acétylcholine par manque de dopamine.
Une ville de 100 000 habitants compte 100 à 150 parkinsonniens, autant d’hommes que de femmes. Ils avaient en moyenne 55 ans (30 à 85 ans) quand leur maladie s’est
déclarée, et ils mourront avec elle, en moyenne, 18 ans plus tard.
La lé sion re sponsa ble es t une dé gé néresc enc e du locus niger, situé da ns la partie haute du tronc cé ré bral, dont les ne urones dopamine rgique s inhibe nt les ne urones
cholinergique s du noyau c audé e t du putamen (ou striatum). Da ns la ma la die de Pa rkinson l’ altéra tion des pre miers entraîne une libération a ccrue d’ acé tylcholine par les
seconds. Quand apparaissent les premiers signes de la maladie, il existe déjà une baisse de 80% de la dopamine nigro-striatale. En réalité, les lésions sont plus diffuses, touchant
le locus cœ rule us (rôle dans la ré gula tion de la T A e t de la fré que nce ca rdiaque), le noyau dors al du vague (motric ité diges tive et vésic o-s phinct érie nne, saliva tion),
l’hypothalamus (température, poids), les ganglions sympathiques. En microscopie électronique, les neurones lésés contiennent des inclusions spécifiques (corps de Lewy), de
nature inconnue (particule virale, accumulation d’un toxique, réaction immunitaire ?)
L’origine est mystérieuse. Il ne s’agit pas d’un phénomène de vieillissement prématuré ; il n’existe pas de prédisposition génétique. Au début du siècle, ont pensait à une cause
virale en relation avec l’encéphalopathie de Von Economo. Actuellement les facteurs environnementaux sont mis en cause. On accuse les radicaux libres ; il s’agit de facteurs
cytotoxiques produits en excès par la dégradation de la dopamine, justifiant, au plan thérapeutique, l’utilisation d’agonistes de la dopamine qui freinent le turn over de ce
neurotransmetteur. En 1982, une épidémie de syndromes parkinsonniens sur la cote ouest des Etats Unis, permit de découvrir la toxicité sur les neurones dopaminergiques d’un
médicament, le MPTP, qui sert actuellement à obtenir des modèles expérimentaux. La fréquence de la maladie dans les mines de manganèse suggère la responsabilité de cet
élément. D’autres substances, comme le glutamate, ont été soupçonnées.
La maladie débute insidieusement, souvent de façon unilatérale, par un tremblement, une raideur (hypertonie extrapyramidale) ou un ralentissement moteur (akinésie). Les autres
signes n’en sont que les conséquences (troubles de l’équilibre, de l’écriture et de la parole, perte de la dextérité et du balancement d’un bras, faciès figé, douleurs et crampes
musculaires, fatigue générale). Une dépression est fréquente. La dysautonomie s’exprime par une hypersalivation, une hypotension orthostatique, une dysérection et des troubles
vé sic o-sphinc térie ns varia bles . Da ns trois quart de s c as, la s ymptoma tologie e st ce lle d’une désinhibition qu’on attribue à la ca renc e dopa minergique , améliorable par le
traitement antiparkinsonien, ou par des anticholinergiques prudemment prescrits. La dysurie par acontractilité vésicale est plus rare et peut même faire douter du diagnostic de
maladie de Parkinson. Quelle qu’elle soit, cette symptomatologie pose, chez l’homme vieillissant, un problème diagnostique avec l’hypertrophie prostatique souvent associée.
Pendant 7 à 10 ans, les symptômes sont bien compensés par le traitement dopaminergique. Puis, après la “lune de miel” survient le “déclin” où la maladie échappe à son
traite ment a vec de s période s de bloc age, de s mouvements a normaux par surdosa ge de dopa mine , des c hute s de plus en plus fréquentes et, finaleme nt, une dé térioration
intellectuelle.
Les traitements médicaux agissent de plusieurs manières :
- la L .D opa , t ra ite me nt de ba se de la mala die , e st un préc urse ur de la dopa mine ,
gé néralement a ssocié à un inhibite ur de la L.D opa déc arboxylase dans le s spé cialités
pharmaceutiques (Modopar ®, Sinemet ® ).
- le s a goniste s dopamine rgique s s timulent le s ré ce pte urs post syna ptiques : piribedil
(Trivastal ® ), bromocriptine (Parlodel ® ), lisuride (Dopergine ® ).
- les IMAO B, comme la sélégiline (Déprényl ® ) diminuent la dégradation de la dopamine.
- les anticholinergiques, qui s’opposent aux effets de l’excès de production d’acétylcho line, doivent être prescrits prudemment chez les personnes âgées du fait d’un risque de
syndrome confusionnel.
- l’apomorphine est un agoniste dopaminergique très actif, d’action rapide, utilisé par voie
parentérale, éventuellement comme test.
- les antidépresseurs tricycliques peuvent être indiqués en cas de dépression, mais non les
neuroleptiques qui peuvent induire des syndromes extra-pyramidaux.
Les stimulations du thalamus par électrodes implantées peuvent être indiquées dans les
tremblements particulièrement invalidants et rebelles. Les greffes de tissu dopaminergique,
utilisant des cellules fœtales, sont encore du domaine expérimental.
132
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
NOTE n° 42 :
EVOLUTION DE LA CONTRACTILITE VESICALE A LA SORTIE DU CHOC SPINAL.
Dans les lésions médullaires centrales, passée la phase du choc spinal, la vessie
re trouve une activité c ontractile pe rme ttant, avec plus ou moins d’e ffic acité , la
re prise de s mict ions s ur u n mo de ré fle xe . Ce tt e évolution ne se fa it pa s
brut ale men t, ma is pa sse pa r des pha se s int ermédia ire s qu i tra duise nt un
processus de réorganisation de la contractilité.
374 cys toma nomé tri es ont é té ré alis é e s a u c ours de l’ é volu tion de 147
paraplégies de divers niveaux. 5 types de tracés peuvent être décrits :
P2
- type A : inactivité ou hypoactivité majeure avec des contractions vésicales ne
dépassant pas 5 cm d’eau
C5
- type B : activité contractile d’aspect ondulatoire, de faible amplitude (<10 cm
d’eau)
- Type C : contraction vésicale isolée, brève, d’amplitude modérée
- Type D : contraction vésicale ample et prolongée en un plateau souvent hérissé
de petites contractions rythmiques.
- Type E : contraction phasique d’apparence normale.
L’évolution morphologique de la contraction, depuis la phase de choc spinal, se
fait toujours dans le mê me s ens de A vers E. Cepe ndant a ucun s tade n’e st
obligatoire et leur durée est très variable. Les contractions de types D et E sont
e n rè gle définit ive s ; les cont ra ctions de type A, B e t C son t des st ade s
intermédiaires d’une contraction en voie d’organisation.
Globalement, sur 147 patients, 112 (76%) ont retrouvé une contraction organisée
à 1 a n e t 124 (84%) à d eu x an s. La ra pidité de c e tt e é vo lutio n dé pe nd
essentiellement du caractère complet ou incomplet de la lésion : à 6 mois une
contraction organisée est notée dans 60 % des lésions incomplètes et 40 % des
lé sion s c omplè te s ; c e tt e diffé re nce e s t pa rtic uliè re me nt ne tt e che z le s
tétraplégiques (70% contre 30%).
Ce tte chronologie n’e st sans doute pa s le fa it du has ard. Le s c ont rac tions
rythmiques , c omparable s à ce lle s que l’on obse rve da ns le s ne uro-ve ssie s
congénitales, suggèrent que l’organisation de la contraction passe par les étapes
de l’ontogé nèse , utilisa nt d’abord de s circ uits réflexes c ourts dans le s yst ème
nerveux intrinsèque, avant les circuits médullaires. L’efficacité de la contraction,
jugé e sur le résidu, s’a méliore au fur e t à mesure qu’elle s ’organise. 90% de s
contractions efficaces, sans résidu, appartiennent aux types D et E. Cependant,
ce s c ontra ctions puissa nte s e t soute nue s sont souve nt inca pa bles de vide r
complète me nt la ve ssie du fa it d’une dyss yne rgie vésico-sphinc térie nne pour
laquelle une sphinctérotomie peut être indiquée. L’attitude classique est de ne la
réaliser qu’après 1 an d’évolution. Cette attente n’a jamais été récompensée et, si
la sphinctérotomie est indiquée, il faut la réaliser tôt, dès que la contraction est
organisée.
E. Coute au e t c oll. - Evolution de la c ontra ct ilité vés ic ale da ns le s lé sions
médullaires centrales. J. Urol. (Paris), 1989; 95, 347
133
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
F igure 85 - L es lésion s ne u ro lo giqu es in co mplè te s. Le s vo ie s
a sso cia tive s du sy stème e x tra-py ra midal oc cu pe nt le s c o rdo n s
latéra ux ; les cen tre s végétatifs son t dan s les c orn es la térales. Ce
sont donc les lésions siégeant à ces niveaux qui peuvent entraîner
des dysfonctions vésico-sphinctériennes.
A - le syndrome d’hémisection de la moelle (Brown Sequard) affecte
peu le co ntrôle vésico-sph inctérien e n raison de l’u nilatéralité de s
lésions,
B - le s sy n drome s mé du llaires ce ntra ux (syringo myé lie, hé mato my élie ) n e pertu rben t le fon ction ne men t vé sic o-sphin cté rie n que
lorsque les lésions débordent sur la substance blanche,
C - le syndrome de l’artère spinale antérieure touche les cornes et
les cordons ventraux et latéraux de la moelle, et donne un syndrome
sous-lésionnel caractérisé par une spasticité vésico-sphinctérienne.
D - le s lésio n s dé gé né ratives, co mme la sc léro se e n pla que s,
touchent les cordons antéro-latéraux et dorsaux de la moelle. Il est
rare que les troubles urinaires soient absents du tableau clinique à
un moment quelconque de l’évolution de la maladie. (Note 43)
E - Le s lésio n s pé riph é riqu e s tou c ha nt la co rn e ve ntrale de la
moelle sacrée (poliomyélite) sont sans conséquence sur la vessie ;
par co ntre, c elles qui affecten t le s rac in es e t le s co rdon s dorsau x
(ta bè s, n eu ro path ies dia bétiqu es) o nt le s même s c on séqu en ce s
qu’une lésion du neurone moteur périphérique.
(d’ a prè s J. M. Buze lin, Ne uro -Uro lo gie, Ex pan s io n Sc ie n tifiqu e
Française édit.)
Les lésions périphériques
- Les lésions complètes sont typiquement celles qu’on peut
rencontrer dans les syndrome s de la queue de cheval ou
dans les lésions des plexus périphériques après intervention
pelvienne élargie. Elles sont caractérisées par la disparition
de toute activité réfle xe obligeant les pa tie nts à utilise r la
poussé e a bdom ina le pour déclencher le ur mic tion. On a
c onsta té un dé ve loppem e nt de ne urone s courts et une
modification de la sensibilité des récepteurs adrénergiques
qui de viennent de type alpha ; a utrem e nt dit, la ves sie
décentralisée retrouve un mode de fonctionnement fœtal.
134
- Les lésions incomplètes touchent certaines zones de l’arc
ré flexe : cornes ve ntrales ou dorsa le s, ra cines ou tronc
nerve ux… ( tabè s, he rnie disca le , névrite s e t polyné vrites
diabétiques ou alcooliques).
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
Les neuro-vessies congénitales.
Les causes les plus fréquentes sont les myéloméningocèles,
le s agéné sie s sacrée, les m oelle s fixé es, en pa rticulie r pa r
un lipome (Note 44). On peut aussi décrire, en fonction du
nivea u lésionne l, des lésions ce ntrale s ou pé riphériques.
Mais il e xiste 3 dif fé rence s e ssentie lle s a ve c les neurovessies acquises :
- les lé sions, touchant habituelleme nt la moelle terminale et les racines, sont mixtes, centro-périphériques,
- l’anomalie survient au stade fœtal du développement,
a vant l’ organisation de ré flexe s m é dullaire s, ce qui
e xplique la persista nce d’une a ctivité rythm ique , autonome, de forte amplitude,
- l’enfant atteint par cette malformation, n’aura jamais su
ce qu’est un fonctionnement vésico-sphinctérien normal.
2 - Modifications de l’équilibre vésicosphinctérien.
Un nouvel équilibre vésico-sphinctérien s’instaure, différent
selon le niveau lésionnel, central ou périphérique (figure 86).
De plus, la neuro-vessie peut être incomplète ( c’est à dire
que des neurones ont été préservés), ou mixte (c’est à dire
c e nt ro-pé riphé rique , a ve c pa r e xe m p le u n dé truso r
spastique et un sphincter fla sque ou l’ inve rse). Ce type de
c lassif ica tion “neurologique” a prévalu pe nda nt de nom —
breuses années. Mais s’il permettait de comprendre le mode
de f onctionne m ent e t, da ns une ce rtaine m esure , d’ e n
prévoir les conséquences, il ne fournissait pas une indica tion précise et “personnalisée” de l’équilibre urodynamique.
NOTE n° 43 :
LA SCLEROSE EN PLAQUES : Une symptomatologie
urinaire protéiforme et difficile à contrôler.
Les symptômes urinaires, souvent présents dès le début de la maladie, associent
à de s degrés divers l'impé riosité , la polla kiurie , l'incontine nce , l'é nuré sie , la
dysurie ave c une difficulté à déc le nche r une miction souvent inte rrompue et
i nc ompl è te . Ce po lymorph isme c linique trouve son e xp lica t ion da ns la
distribution multifocale des plaques de démyélinisation et dans l'évolution de la
maladie, pa r pous sée s plus ou moins régressive s. L 'instabilité de la c ondition
ne urologique entra îne l'ins tabilité de la condition urodynamique , justifiant une
surveillance continuelle.
L'acquisition d'un équilibre vésico-sphinctérien obéit aux principes du traitement
de s ne uro-ves sie s, visant le c onfort et la sé c urité , a ve c tout efois que lques
différences qui tiennent aux particularités, notamment évolutives, de la maladie :
P2
C5
- Il faut attendre (au besoin par la sonde à demeure), la fin de la poussée aiguë,
pour entreprendre de rééquilibrer la vessie, pour un temps limité, en évitant donc
les solutions thérapeutiques définitives qui engagent un avenir incertain.
- Les localisations cervicales, en altérant la dextérité, compromettent le succès de
l'auto-sondage. Les localisations encéphaliques entraînent souvent dans les SEP
évoluées, des troubles du comportement expliquant le manque de coopération
dans la prise en charge thérapeutique.
- L'association fréquente d'impériosité et de dysurie ne facilite pas l'emploi des
traitements médicaux. Les anticholinergiques n'augmentent généralement pas le
ré sidu se con da ire à la dys syne rgie ; la ve ss ie s e vide complè te ment si le
s phinc te r " dé c ide " de s'ouvrir, quelle que s oit l'a mplitude de la contrac tion
détrusorienne. L'effic ac ité des alpha -bloqua nts e t de s antis pa stique s s ur la
dyssynergie est malheureusement assez limitée.
- Le dé cle nche me nt de la miction e st rare me nt poss ible sur c ommande , e n
de ho rs d'u n be soin. D an s le s ve ss ie s ré fle ct ique s, les s timu lat ions sous
lé s ionne lles co mme la pe rc uss ion ne s ont e ffic ac e s que dan s le s fo rmes
pa raplé giques ave c dé ficit se nsitivo-mote ur comple t ou pre sque ; les stimuli
s ensorie ls pe uvent a ide r da ns les forme s incomplè tes : a udition de l'ea u du
robinet, immersion des mains dans l'eau froide… Les vessies inactives se vident
mal par poussée abdominale ou expression manuelle ; l'autosondage, quand il
e st ma nuelle me nt possible, donne de me illeurs ré sulta ts. En fait, la mic tion
nécessite d'abord une bonne relaxation tant périnéale que générale, qui peut être
a cquise pa r de s te chnique s de biofe e dba ck pé riné al, qua nd il pe rs iste une
possibilité de contrôle volontaire du périnée. Il s'agit donc d'un biofeedback de
relaxation ; tout travail visant à renforcer les releveurs est contre-indiqué car il
majore la spasticité, donc la dyssynergie.
Pour toute s ce s ra isons l'é quilibre idé al e st ra rement obte nu. Il faut sa voir se
satisfaire de compromis qui seront d'autant mieux acceptés du patient qu'il en
tirera un meilleur confort.
Prenons un exemple : un homme de 60 ans et son épouse
du même âge sont victimes d’un accident de voiture et se
trouvent tous deux avec une paraplégie dorsale de niveau
D6. Ce m ê m e nive a u lé sion ne l fa it q u’ ils ont d e s
dysfonc tionnem ents “qua lita tive me nt” com para bles, m ais
a vec de s é quilibre s urodynam ique s diff é rents. En ef fe t,
l’ adé nom e prosta tique de m onsieur, le s m a ternités de
m a da m e ont cré é d es diff é re nc es da ns la ré sis tanc e
uréthra le, en conséquence de quoi la contra ctilité vésicale
va évoluer différemment, puis le compliance etc, etc…
Nous devons donc explorer ces dysfonctionnements vésicosphinc té riens, non pa s e n ne urologue mais en urologue ,
exactement, comme nous l’avons fait jusqu’ici, en analysant
les forces en présence.
135
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 44 :
LE SYNDROME DE LA MOELLE ATTACHEE.
La croissance du rachis étant plus rapide que celle de la moelle, le cône terminal effectue une ascension qui l’amène de l’extrémité caudale du rachis au 3e mois de la vie intrautérine, au niveau des vertèbres L1-L2 chez le nouveau-né de 2 mois. Plusieurs anomalies embryonnaires peuvent entraver cette ascension :
- des bandes fibreuses, des adhérences, des racines aberrantes
- un dysraphisme spinal : spina bifida occulta ou aperta, agénésie plus ou moins complète du sacrum, diastématomyélie, sinus dermique communiquant ou non avec les espaces
sous-arachnoïdiens.
- lipome intra ou extradural fixant ou comprimant la moelle et les racines auxquelles il adhère plus ou moins intimement.
Quatre grandes variétés anatomiques peuvent être individualisées :
1 - les très rares moelles fixées en position haute,
2 - les moelles fixées (ou attachées) en position basse, appelées aussi “syndrome du filum terminal”,
3 - les spina-lipomes,
4 - les lipomyéloméningocèles (classiques spina bifida paralytiques associés à un lipome).
Elles ont en commun de fixer le cône terminal qui sera donc soumis à des tractions au cours de la croissance ou lors des mouvements répétitifs du rachis. Il en résulte des
troubles orthopédiques (pieds surtout), vésico-sphinctériens et ano-rectaux, susceptibles de s’aggraver du fait de la survenue de phénomènes ischémiques dans le cône terminal.
C’est en période néonatale que le diagnostic doit être évoqué sur la constatation d’anomalies cutanées de la région lombo-sacrée, lipome sous-cutané surtout (figure 83). Mais
l’anoma lie peut pas ser ina perç ue e t se ré vé le r à l’âge adulte par des trouble s vé sic o-sphincté rie ns , orthopédique s ou neurologique s (troubles de la ma rche , sc iatalgie).
L’association de ces signes doit inciter à regarder attentivement les clichés du rachis lombaire et du sacrum qui ne sont normaux que dans 10% des cas. L’IRM du cône terminal
est l’examen nécessaire et suffisant pour reconnaître la malformation et en préciser la variété anatomique.
L’attitude thérapeutique est discutée. La chirurgie, quasi systématique chez le tout petit, est indiquée en cas de progression des symptômes chez l’adolescent et chez l’adulte.
136
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
II - LES PROBLEMES DIAGNOSTIQUES.
Ils se situent à deux niveaux :
- reconnaître l’origine “neurologique ” d’ un trouble de la
continence ou de la miction
- expertiser l’équilibre vésico-sphinctérien.
1 - Le diagnostic de “vessie neurologique”
P2
C5
I l arrive pa rf ois que le pa tie nt q ui cons ulte pour une
polla kiurie, une incontine nce, une dysurie… ne soit pas en
fauteuil roulant. Comment dépister la maladie neurologique,
derrière le symptôme urinaire banal qu’il décrit ?
Il n’y a pas de symptôme f onctionnel spécifique d’un
dysfonc tionnement neurologique. On pe ut voir tous les
type s d’ inc ontine nce , de polla kiurie , d ’ im p érios ité , d e
dysurie... Seuls sont évocatrices :
- la dispa rition du be soin d’ urine r, rarem ent a voué e
spontanément, car le patient n’y prête pas attention,
Figure 86 - L’ équ ilibre vé sico -sphin ctérien dan s le s dysfo n ctio n —
nements neurogènes. (à comparer à la figure 38)
A - Dans les neuro-vessies centrales, l’arc réflexe passant par le tronc
cérébral est interrompu, mais les réflexes médullaires présents chez
le nouveau-né, réapparaissent quelques semaines après le traumatisme. La ve ssie peu t fo n ctio nn er sur u n mo de a utomatique e t se
contracter en réponse à une stimulation sous-lésionnelle comme la
percu ssio n sus pu bien n e. La co n trac tio n vé sic ale e n traî n e u ne
in fu n dibu lisa tion de la base ; mais la se ctio n mé du llaire ay a n t
inte rro mpu le s circu its de la c oo rdinatio n vé sic o-sph in cté rien ne , le
sph inc ter e st dy ssy ne rgique . Ce tte dy ssyn e rgie est le prin c ipal
mécanisme de l’obstruction des neuro-vessies centrales.
B - Dans les neuro-vessies périphériques, l’évacuation de la vessie
né ce ssite l’ interve n tio n de force s e xtérieu re s c omme la pou ssée
abdomina le. Le co l s’ ou vre mal e t la base vésica le a ten da nc e à
bascule r ve rs l’ arrière du fait de la faiblesse du plan ch er périn éa l.
C’ e st u n de s mé c a n is me s de la d y su rie de s n e u ro -ve ss ie s
périphériques.
- la c oe xiste nce d e trouble s urina ire s, s exue ls ou
rectaux.
L’examen clinique recherche un syndrome de la queue de
cheval ou un syndrome pyramidal, par l’examen de la sensibilité péri-anale et des réflexes du cône terminal (figure 87) :
ac hilé en ( S1), m édio-planta ire (S2), bulbo-caverne ux ( S3) ,
anal (S4).
Les examens urodynamiques, sont une a ide lim itée , ca r,
contraire me nt à ce que be aucoup pe nse nt, ils sont plus
utiles à l’expertise fonctionnelle qu’a u diagnostic de vessie
neurologique (Note 45).
Il n’y a pas de “symptômes cystomanométriques” pathognom oniques d’ une atte inte neurologique. Mais pour un œ il
habitué, quelques tracés sont évocateurs :
- une vessie acontractile ou animée de petites contractions autonomes,
- un défaut de compliance (exceptionnel en dehors des
vessie s ne urologique s e t des cystite s inte rstitielle s)
(Note 46),
- une hypercontractilité faite de contractions non seulement amples, mais anormalement prolongées.
137
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
Deux tests urodynamiques peuvent contribuer à reconnaître
l’origine neurologique d’un trouble mictionnel :
2 - Expertise d’un dysfonctionnement vésicosphinctérien neurologique.
- L e te st d e La p id e s q ui, m a lhe ure use m e nt, n’ e st
f ranche me nt positif que dans les lésions c om plè te s,
souvent évidentes cliniquement (voir note 28).
Cette dé marche n’e st pas fondam entaleme nt différente de
ce lle appliquée au suje t non ne urologique . Elle revient à
analyser les forces en présence.
- L’électromyographie analytique des muscles périnéaux
e t surtout l’ é le ctrom yogra phie de stim ulo-déte c tion
(potentiels évoqués sacrés et somesthésiques).
La contractilité vésicale est toujours le témoin indirect de la
ré sista nce uré thra le. Ainsi de s c ontra ctions a m ple s e t
prolongées traduisent en général une obstruction organique
ou fonctionnelle (dyssynergie). Les contractions sont respon—
sable s des déform ations vésicales ca rac té ristiques de la
vessie de lutte (figure 88).
Figure 87 - L’examen neurologique...en urologie (d’après J.M. Buzelin, F. Richard, J. Susset, Physiologie et Pathologie de la Dynamique des Voies
Urinaires, S. Khoury, FIIS édit.)
- les territoires de la sensibilité
- signes de Barré (1), Babinski (2) Rossolimo (3)
- Réflexes rotulien (4a), achiléen (4b), médioplantaire (4c), bulbo-caverneux (4d) et anal (4e).
138
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
NOTE n° 45 :
QUE PEUT ON ESPERER DES EXAMENS COMPLEMENTAIRES NEUROLOGIQUES EN UROLOGIE ?
Nous l’avons dit (…et redit) , le but principal des examens urodynamiques n’est pas de faire ou de défaire un diagnostic, mais d’expertiser un équilibre fonctionnel. Cependant, il
est des situations où la symptomatologie fonctionnelle urinaire suggère une lésion nerveuse et où les explorations urodynamiques et neurologiques peuvent avoir un intérêt
diagnostique.
Lésions périphériques
Lésions centrales
P2
Signes cliniques
- Hypoesthésie périnéale
- Hypotonie ou béance anale
- Abolition des réflexes du cône
- Réflexes des membres inférieurs vifs, diffusés, polycinétiques
- Signe de Babinski, manœuvre de la jambe
- Niveau sensitif abdominal, thoracique ou cervical
Cystomanométrie
- Vessie flasque, acontractile
- Test de Lapides +
- Contractions non inhibées
- Dyssynergie vésico-sphinctérienne
Electromyographie
- EMG des muscles périnéaux
- Potentiels évoqués somesthésiques corticaux explorant
les cordons postérieurs
- Potentiels évoqués visuels, auditifs recherchant des lésions
neurologiques multifocales évocatrices d’une SEP
- Latence du réflexe bulbo-caverneux
Radiographies
NOTE n° 46 :
- Radio simple du rachis lombo-sacré
- Scanner du rachis lombo-sacré recherchant une hernie
discale, un canal lombaire étroit, une tumeur de la queue
de cheval ou du sacrum
- Rarement une IRM
C5
- IRM médullaire recherchant une compression tumorale.
- IRM encéphalique visualisant les hypersignaux de la substance
blanche évocatrices des plaques de démyélinisation d’une SEP.
LE DEFAUT DE COMPLIANCE - Un facteur de mauvais pronostic qui n’épargne pas les vessies aréflectiques.
La conséquence immédiate de l’interruption des voies périphériques est l’abolition du réflexe mictionnel. La vessie “aréflectique” n’est pas pour autant “acontractile”. Alors que
les te rminaisons c holinergique s se ra réfient, on c ons tate , che z l’animal c omme chez l’homme, une prolifé ration de s ne urone s c ourts adré ne rgique s. Le s ré ce pteurs a lpha
adrénergiques remplacent les récepteurs béta-adrénergiques. La vessie retrouve ainsi son activité autonome, rythmique, du stade fœtal.
La décentralisation entraîne aussi, expérimentalement, une prolifération du collagène à partir de la sous-muqueuse, et une augmentation importante du rapport collagène/muscle
qui serait plutôt la conséquence de la distension que de la dénervation elle-même. Cette modification des propriétés visco-élastiques explique le défaut de compliance que l’on
observe chez l’homme comme chez l’animal ; mais il y a aussi plusieurs raisons de voir se constituer une hypertonie :
- le développement de l’activité autonome qui entraîne un travail minime mais incessant de la vessie,
- la suppression de l’influence myorelaxante du système nerveux sympathique sur le tonus vésical, dans les lésions touchant le plexus hypogastrique inférieur,
- enfin l’hypersensibilité des récepteurs aux neuro-médiateurs circulants endogènes.
Ceci explique que le défaut de compliance soit d’autant plus fréquent que la dénervation est plus distale et plus complète ; elle est supérieure à 50 dans 66% (10/15) des
dénervations sacrée s inc omplè tes pa r lésion intra cana la ire, 43% (10/23) de s déne rvations sac rée s complète s par lé sions intra -c analaire s, 22% (2/9) de s dé nervations après
chirurgie pelvienne élargie.
La signification pronostique d’un défaut de compliance est illustrée par cette étude rétrospective portant sur 200 enfants atteints d’un spina bifida qui ont pu être suivis sur une
période moyenne de 9 ans, dont 73 depuis leur naissance jusqu’à l’âge de 13 ans avec des contrôles radiologiques et urodynamiques très réguliers. Les deux notions principales
qui s’en dégagent sont les suivantes :
- la radio n’a aucune valeur prédictive : il y a autant de hauts appareils normaux à la naissance qui se dilatent au cours de l’évolution (43%) que de hauts appareils
initiale ment dilatés qui s’a méliorent (42%). Il y a plus de re flux qui disparaissent s pontané me nt ou a près c hirurgie (57%) que de reflux qui a pparaissent a u cours de
l’évolution (27%)
- par contre, la pression vésicale en fin de remplissage a une très forte valeur prédictive : le risque de détérioration du haut appareil urinaire, sur un suivi de 12 ans, n’est
que de 14% si la pression est inférieure à 40 cm d’eau, et de 80% si elle est supérieure à 40 cm d’eau.
J.M. Buzelin et coll. - Comment explorer une vessie acontractile. J. Urol. (Paris), 1987, 93, 485
O. Bouchot et coll. - Les facteurs du pronostic urinaire des myélo-méningocèles. J. Urol. (Paris), 1988, 94, 145
139
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
Figure 88 - Quelques modifications de la paroi vésicale :
A) Epaississement caractérisé par l’élargissement de la distance uretère-vessie.
B) Trabéculations et diverticules réalisant le classique aspect “en sapin de Noël”.
C) Expansion réalisant un aspect pseudo-diverticulaire, mais correspondant en fait à une “soufflure” de toute l’épaisseur de la paroi et non à une
hernie de la muqueuse à travers un collet musculaire.
(d’après J.M. Buzelin, Neuro-Urologie, Expansion Scientifique Française édit.)
La compliance vésicale, est le facteur pronostique le plus
important : une pression supérieure de 40 cm d’eau représe nte, pour l’ uretère, un obsta cle fonctionnel qu’il ne peut
vaincre (Note 46). L’altération de la compliance vésicale est
due à de m ultiple s c ause s, m usculaires (â ge , inf ec tion
chronique, obstruction…) et neurologiques. L’hypercontractilité
des neuro-vessies centrales et l’hypertrophie musculaire qui
en résulte, altèrent la compliance. Mais ce risque est encore
plus gra nd dans le s ne uro-vessies pé riphérique s, d’ autant
plus que la dénervation est plus distale.
La résistance uréthro-sphinctérienne peut être accrue de 2
manières :
- par le développement d’un obstacle : un adénome de
la prostate, un rétrécisseme nt de l’urèthre , une bascule
vésicale (figure 89).
- ou, plus spécifiquement, par un mauvais relâchement
s phinc té rie n corre s pond a nt à diff é re nts type s de
dyssynergies, du col ( dyssyne rgie sympathique) ou du
sphincter strié (dyssynergie somatique).(figure 90)
140
L’évaluation urodynamique de la résistance uréthrale ne se
fait pas, chez le neurologique, sur les paramètres habituels.
La débitm étrie, la re lation pression/débit et le résidu n’ ont
pas de valeur car ils varient d’une miction à l’autre au hasard
d’une dyssynergie sphinctérienne ou selon la vigueur de la
pous sée a bdom ina le . Le ré sidu n’ a plus la significa tion
péjorative qu’on lui attribuait autrefois, depuis la pratique des
autosondages. En fa it, chez le neurologique , la notion de
dysurie doit être remplacée par celle de travail vésical. Il n’y a
pas actuellement de moyen simple et fiable de le “mesurer”.
On se fonde sur l’ am plitude, la duré e, la fré que nce des
contra ctions. Des contra ctions rythm iques de faible am pli—
tude, mais très régulières peuvent réaliser un travail “cumulé”
plus im porta nt que de gra nde s contrac tions phasiques
espacées, et conduire plus sûrement à une altération de la
compliance.
La dyssyne rgie vé sic o-sphincté rie nne e st re connue par
l’enregistrement couplé de la pression vésicale et de l’EMG
du sphincter strié uréthral plutôt qu’anal ou périnéal, car chez
le neurologique, une dissociation entre ces différents tracés
existe dans un tiers de s c as. On peut s’interroger sur la
néc essité d’ un te l exam e n pour le dia gnostic “qua lita tif”
d’une dyssynergie qui est potentie llem ent consta nte c he z
tous le s pa tients ne urologiques, s’ e xprim ant ou non au
hasard des mictions. Ce qui compte pour le pronostic, c’est
le phénom ène “qua ntita tif”, c ’e st à dire l’ im porta nce des
forces en présence (figure 91).
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
P2
C5
Figure 89 - Le s bascu les vé sicale s so nt o bse rvée s u niqu emen t dan s les ve ssies a co ntrac tile s don t la vidan ge est obten ue par la pou ssée
abdominale ou l’expression manuelle. Les bascules postérieures sont les plus fréquentes, favorisées par la faiblesse d’un plancher périnéal paralysé.
Il peut s’agir d’une cystocèle avec une bascule isolée de la base vésicale qui ferme l’angle uréthro-vésical postérieur (A), ou d’une uréthro-cystoptose
avec ho rizo ntalisatio n de l’ urè thre prostatiqu e e t plicature de l’ urèth re membrane ux fixé par l’apon évro se moy en ne du pé riné e (B). Les bascu le s
antérieures, dans l’espace de Retzius, nécessitent pour se produire une laxité des attaches antérieures du bloc vésico-prostatique ; elles réalisent
selon les cas, soit une fermeture de l’angle uréthro-vésical antérieur (C), soit une angulation au niveau de l’urèthre membraneux. Chez les sujets
obèses, la vessie peut basculer en avant de la symphyse pubienne (D).
(d’après J.M. Buzelin, Neuro-Urologie, Expansion Scientifique Française édit.)
Figure 90 - Cysto-uréthrographie mictionnelles (d’après J.M. Buzelin, Neuro-Urologie, Expansion Scientifique Française édit.)
A - Dyssynergie cervicale, avec saillie des lèvres antérieure et postérieure du col, surplombant l’urèthre prostatique.
B - Dyssynergie du sphincter strié avec reflux séminal et urétéral. La spasticité ou la sclérose du sphincter strié se traduisent par une encoche de
l’u rè th re membran eu x surmo n tée d’ un e dilatata tio n de l’ urèth re su s-mon ta nal. Un ré tré cissemen t pro gressif e st évoc ate ur d’u ne spastic ité, u n
décrochage franc d’une sclérose.
141
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
Figure 91 - Deux cas de dyssynergies vésico-sphinctériennes. En haut, probablement en raison de l’hypertonie sphinctérienne, la vessie développe
des c on trac tio ns ample s (>100 cm d’ ea u) e t du ra ble s (>10 mn). En bas, pro bablemen t en raiso n de l’h ypo to nie sph inc térien ne , le détru sor
dévelo ppe des co n traction s faible s e t brè ve s. Il e st é vide nt qu e le pro n ostic de ce s deu x dy ssyn e rgies n ’e st pas le mê me, ni l’in dica tio n
thérapeutique qui doit être une sphinctérotomie uniquement pour le patient du haut. D’ailleurs le tracé du bas pourrait être celui du patient du haut…
après la sphinctérotomie.
III - LES INDICATIONS THERAPEUTIQUES.
C om m e toujours, l’ obje c tif thé ra pe utique doit ê tre de
retrouver une situation c onfortable e t sa ns danger pour le
haut appareil urinaire.
142
- L e c onfort, che z le neurologique, c’ est l’ autonomie ,
plutôt que la continence. Cette notion varie d’un patient
à l’a utre , selon son a ctivité . Pa r exe mple un homm e
jeune et qui travaille préf ére ra pe ut être une incontinence totale bien appareillée avec un collecteur pénien,
à de s a utosondage s interm ittents. Une fe m me à un
stad e avanc é de sa sclérose e n plaque s verra son
conf ort tra nsf orm é pa r une dériva tion urina ire exte rne .
Seul le patient pe ut choisir parmi toutes les solutions
qu’on lui propose, celle qui correspond le mieux à son
mode de vie.
- L a protec tio n du haut ap pa reil urinaire , e st , au
contraire, un problème qui concerne le médecin, car le
patient n’est pas conscient des risques qu’il encourt.
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
1 - Les traitements sont axés sur 2 grandes
options.
L a rééduc at ion c on vention nelle a pour ob je c tif une
vida nge complète de la vessie par des m oye ns “na turels”,
c’est à dire la poussée abdominale ou l’expression manuelle
pour le s neuro-vessie s périphé riques, la stim ula tion souslésionnelle comm e la pe rcussion sus pubie nne pour le s
neuro-vessies centrale s (Note 47). L’équilibre idé al pour ce
t ype de ré é d uc a tion e st c a ra cté risé pa r de s f orc e s
d’expulsion efficaces et des forces de résistance faibles.
L ’autosondage intermittent propre et non stérile a été
proposé in y a une vingtaine d’années. Il est efficace et bien
toléré , en pa rticulier chez la f em me ca r che z l’ hom me il
comporte pour l’urèthre des risques à long terme (Note 48).
L’ équilibre idé al e st ca ra cté risé par des forces d’e xpulsion
faibles et des forces de résistance puissantes.
L’électrostimulation, a ba nd onné e pe nda nt plus ie urs
années, revient actuellement dans des indications précises.
(Note 49)
2 - Le choix dépend de l’équilibre vésicosphinctérien :
Une vessie qui peut se vider complètem e nt bé néf iciera
d’ une ré é duc a tion conve ntionne lle . Une gra nde vess ie
f lasque, rétentionniste , sera mie ux traité e pa r le sondage
intermittent. Cet équilibre peut exister spontanément ; sinon,
il peut être acquis en agissant spécifiquement sur le tonus
e t la contra ctilité vésic ale s, le tonus et la résistance uré —
thrales. Il ne faut pas avoir la prétention de régler définitive—
ment les problèmes : l’équilibre vésico-sphinctérien évoluant
da ns le tem ps, on résous m om enta né me nt une situa tion
donnée, toujours avec cet objectif de la rendre confortable et
sans danger.
Réduire la spasticité ou améliorer la compliance vésicale
NOTE n° 47 :
POUSSER ou PERCUTER…
Pas n’importe qui ni n’importe comment.
1 - L e s te c hnique s d’h ype rpr e ss ion abdom inale sont indiqué e s dans les
vessies inactives, aréflectiques qu’elles soient d’origine neurologique (syndrome
d e la que ue d e ch e va l, s pina bifida pa ra lyt ique ) ou n on n e urologi que
(mé gave ss ies idiopa thiqu es , iat rogè nes , ve ss ies “diste ndue s”). L’a bse nce de
réflexe mictionnel ne permet pas l’ouverture du col ni celle du strié.
La poussée abdominale :
• Elle nécessite l’intégrité de la musculature abdominale. Elle doit être évitée dans
le s syndromes du cône termina l où la ve ssie e st inactive , ma is le s sphinc ters
hypertonique s, e t che z la femme ayant un prola ps us gé nital ou rec tal mê me
minime.
P2
C5
• La miction est obtenue pa r contrac tion des muscles a bdominaux, respiration
bloquée, ventre rentré. La position assise, penchée en avant, en accroît l’efficacité
et évite les conséquences d’une émission de selles. Elle nécessite parfois une
musculation abdominale préalable.
L’expression manuelle ou manœuvre de Crédé.
• Elle doit ê tre préfé rée quan d le s abdomina ux sont ins uffisa nts, dans les
pa raplé gie s do rsa le s flas que s, par e xe mple . C’e st sou ve nt aus si le mode
mictionnne l du pe tit e nfant s pina bifida, ré alisée 3 à 4 fois pa r jour par les
parents. Le risque d’hyperpression abdominale trop élevée, lui fait actuellement
préférer l’autosondage.
• L e pa tie nt doit ê tre ass is, penc hé e n avant. Il utilise se s deux ma ins pour
e xprime r la ve ss ie de ha ut e n bas , tout en maint ena nt s imulta némen t une
poussée abdominale.
2 - L es te c hnique s de s tim ulation ré fle xe utilisent le s ré fle xe s mic tionne ls
archaïques d’origine nociceptive, inhibés chez l’adulte sain, exaltés chez le blessé
médullaire (voir figure 41). Elles nécessitent l’intégrité d’un arc réflexe médullaire,
c’est à dire une lésion médullaire complète avec spasticité sous-lésionnelle.
• La miction est provoquée soit sur perception d’un équivalent de besoin, soit à
un rythme va riable se lon la diurès e, que le pa tient aura appris à dé finir. La
pe rcus sion c onsist e à frappe r la ré gion s us-pubie nne du bout de s doigts
recourbés en crochet, le geste étant réalisé par le poignet, comme pour donner
un coup de marteau. Les tétraplégiques, qui ne peuvent maintenir leurs doigts en
crochet, se percutent du tranchant de la main. Le rythme est d’une percussion
t oute s les secondes ou toute s les de ux se conde s, jusqu’ à l’obt ention d’un jet
urinaire qui survient lorsque la vessie est contractée et le sphincter relâché. A ce
mome nt, il fa ut a rrê te r de percute r, éve ntue llement ac cé lérer le je t par une
poussée ou une pression abdominale, puis reprendre la percussion quand le jet
se tarit. La vessie peut être ainsi vidée complètement en quelques minutes.
• Si la percussion est le stimulus le plus utilisé, d’autres méthodes sont possibles,
comme le massage sus-pubien, la traction sur les poils pubiens, le frottement de
la face interne de la cuisse, la masturbation et le toucher rectal qui génère moins
de contractures et de dyssynergie sphinctérienne.
Les anticholine rgique s sont trè s effica ces chez le neurologique, aussi bien sur le s contractions vésicales que sur le
défaut de compliance quand il dépend d’une hypertonie et
non d’une sclérose . Ce tte ef ficacité doit être contrôlée pa r
une cystomanométrie en cours de traitement.
Les dénervations chirurgicales ont été à la mode dans les
a nné e s 60, a va nt l’ utilisa tion de s a ntic holine rgique s :
c on e ct om ie s, a lc oolisa t io n ou phé n olis a tion s ousa ra chnoïd ie nne s, radicotom ie s m ultiple s, s élec tives ou
143
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
hype rséle ctive s, ne urotom ie s des ne rfs é recteurs, alc oolisation rétro-trigonale etc… L’inconvénient de telles méthodes
est l’absence d’effets durables car le réseau multisynaptique
du systè me ne rveux végé ta tif pe rme t la réinne rvation de
l’organe . Plus la dé nervation est proxim ale, plus e lle e st
dé finitive , ma is m oins e lle e st spé cifique, e ntra înant de s
c onsé que nce s sur le s f onc tions re cta les e t se xue lle s.
L’alcoolisation des racines sacrées (S3 en particulier) reste la
se ule te chnique couram m ent utilisé e, c ar inoff ensive e t
NOTE n° 48 :
éventue lle me nt re nouve la ble qua nd se s e ffe ts s’é puise nt
(voir figure 65).
L’agrandissement vésical, en particulier par la technique du
patch intestinal (“Cla ms”) est une e xcellente m éthode pour
traiter la spasticité et surtout le défaut de compliance de la
vessie, après échec du traitement pharmacologique. Le seul
inconvénient est la production de mucus. (Note 50)
L’AUTOSONDAGE INTERMITTENT : “I have never seen more gratefull people”.
C’est ainsi que Jack Lapides concluait, en 1972, son article dans lequel, pour la première fois, on osait parler de sondage propre, non stérile, intermittent chez des femmes
atteintes de sclérose en plaques. Depuis, la méthode a été étendue à d’autres indications. L’absence d’asepsie n’est pas une provocation ; c’est la condition pour que le patient
puisse se sonder simplement, avec un minimum de moyens, là où il se trouve… bref pour qu’il respecte la règle N° 1 : la répétition régulière des sondages. L’introduction de
germes dans la vessie est inéluctable ; mais la prolifération microbienne ne devient pathogène qu’au delà d’une certaine concentration qui est atteinte en 4 heures. Ainsi, à
condition de ne pas excéder ce délai, le sondage intermittent réalise une véritable clairance bactérienne qui stérilise les urines plus qu’elle ne les infecte.
Qui peut en bénéficier ?
La rétention vésicale est, naturellement, l’indication, en particulier quand le détrusor est flasque, surtout chez la femme qui s’expose, en poussant sur un périnée dénervé, à
générer des troubles de la statique pelvienne ou un syndrome du “périnée descendant”. Mais les vessies réflectiques et rétentionnistes ne doivent pas être exclues, quitte à
atténuer la spasticité médicalement (anticholinergiques) ou chirurgicalement (cystoplastie d’agrandissement). L’essentiel est que la méthode atteigne l’objectif visé : améliorer le
confort et/ou la sécurité.
- l’amélioration du confort est la première condition du succès de la méthode. C’est ainsi que le patient non neurologique, qui la subit généralement comme une contrainte,
arrête de se sonde r dès qu’il est c apable de vider, même trè s incomplè te ment, s a ve ssie. L e patient ne urologique, doit y gagner e n contine nce et e n autonomie ; la
persistance de fuites urinaires, la nécessité d’une tierce personne pour réaliser le sondage doivent être considérées comme des échecs relatifs.
- la protection du haut appareil urinaire (préventivement ou curativement) peut être le but recherché. Cependant, s’il résous le problème du résidu, le sondage intermittent
ne protège pas des pressions vésicales excessives pendant la phase de remplissage. Une hypercontractilité et, surtout, un défaut de compliance, justifient toujours une
surveillance étroite et un traitement spécifique.
Chez le blessé médullaire, à la phase initiale du choc spinal, pendant son hospitalisation en réanimation ou en neuro-chirurgie, le drainage continu des urines par sonde
uréthrale ou cathéter sus-pubien, ne doit être maintenu que pendant la phase polyurique, c’est à dire quelques jours. Puis le sondage intermittent est effectué, stérilement, par le
personnel soignant. Dès l’admission en service de rééducation, le sondage intermittent propre peut être commencé, d’abord par l’infirmière puis par le patient lui même quand il
est physiquement apte à le réaliser, c’est à dire rapidement si le rachis a été ostéosynthésé. La technique apprise, le paraplégique n’est plus dépendant du milieu hospitalier et sa
première sortie de week end peut être autorisée précocement. L’autosondage intermittent ne modifie pas l’évolution de la réflectivité médullaire. Il permet d’en mieux percevoir
les premiers signes (notamment la survenue de fuites entre les sondages), et de contrôler l’efficacité de la rééducation par percussion ou poussée abdominale, en mesurant le
résidu. Par la suite, selon l’efficacité de la rééducation et le désir du patient, l’autosondage peut être abandonné ou maintenu comme mode de vidange vésicale.
Comment le réaliser ?
La technique est, en général, rapidement maîtrisée, en 24 heures. L’utilisation d’un miroir peut aider, au début, chez la femme. Mais le repérage visuel n’est pas plus nécessaire au
sondage urinaire qu’il ne l’est à la prise de la température rectale. La sonde, vaselinée, est conduite prudemment dans l’urèthre, en évitant toute manœuvre brutale et en prenant
soin de ne pas introduire de poils. La vidange vésicale doit être complète. L’asepsie n’est pas nécessaire : ni champs, ni gants, mais une simple toilette des mains à l’eau et au
savon avant chaque sondage. Après celui-ci, la sonde est rincée à l’eau, secouée et gardée au sec dans un étui, pour être réutilisée tant que son état le permet. 6 à 7 sondages
sont réalisés chaque jour, pour une diurèse qui doit être de l’ordre de 2 litres.
Comment le surveiller ?
L’asepsie des urines devient souvent pour le patient et le médecin traitant une préoccupation obsessionnelle dont il faut les affranchir. Les examens cyto-bactériologiques
systématiques sont inutiles. Il suffit d’habituer le patient à vérifier la limpidité de ses urines et de lui conseiller, lorsqu’elles sont un peu troubles, de boire plus, de se sonder plus
souvent e t, au be soin, de pre ndre l’a ntise ptique urinaire dont il a l’habitude. L’e xamen cyto-ba cté riologique, l’a ntibiogra mme et l’a ntibiothé rapie a da pté e sont rése rvé s aux
infections urinaires symptomatiques, notamment fébriles. Les urines peuvent se maintenir stériles ou même se stériliser sous auto-sondage, du moins tant que l’infection n’est
pas entretenue pas des altérations définitives de la voie excrétrice : trabéculations, diverticules vésicaux, prostatite chronique, reflux vésico-urétéral (qui n’est d’ailleurs pas une
contre -indication à l’a uto-s ondage ). La pe rsista nce d’une bacté riurie ne doit pa s être c ons idé rée comme un é che c, c ar, mê me da ns ce ca s, il est ha bitue l d’ obse rve r e n
cystoscopie une disparition des lésions inflammatoires de la muqueuse vésicale.
La tolérance uréthrale doit être soigneusement surveillée chez l’homme ; une uréthrite, une uréthrorragie sont les signes d’une mauvaise tolérance pouvant conduire à l’abandon
de la méthode. 5% environ des hommes développent une sténose ou plus précisément une rigidité uréthrale qui se traduit par une difficulté à l’introduction ou au retrait de la
sonde, avec une sensation de “sonde captive”. Le traitement par dilatation ou uréthrotomie interne ne met pas à l’abri d’une récidive justifiant de changer de mode de drainage
vésical.
144
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
NOTE n° 49 :
L’ELECTROSTIMULATION
Une méthode ancienne qui revient à la mode.
Entre 1950 e t 1970, l’é le ct rost imula tion a susc ité un imme nse e spoir puis
bea ucoup de dé sillusions. Ave c l’e xpé rienc e de s st imula te urs c ardiaques , on
savait comment transporter à travers la peau l’énergie fournie par un émetteur de
haute fré que nce , à un ré ce pteur qui la t ransformait e n un courant fa radique
ca pable de s timule r le mus cle ou le n erf. On pe ut obte nir une cont rac tion
vésicale par électrostimulation du détrusor ou des nerfs qui s’y rendent.
A parti r de 1963, c ’e s t ve rs la myos timul at ion dire c t e du dé t ru sor que
s’orientè rent la plupart des études expé rimenta le s aux U.S.A. L a problé matique
était la suivante : lorsque le muscle est dénervé, le seuil d’excitabilité élevé et la
conductibilité médiocre obligent à recourir à un courant de stimulation de haute
intensité qui devient douloureux dans les dénervations incomplètes. Lorsque le
muscle est encore innervé, la stimulation est plus efficace, mais elle entraîne des
contractions réflexes du plancher périnéal qui nécessite une sphinctérotomie ou
une dé nervation du strié . Quelques urologue s fure nt tenté s d’a pplique r c ette
tec hnique e n pa thologie humaine ; ma is le s sé ries très c ourtes a ttes tent bie n
d’un certain désenchantement quant à son efficacité et à la stabilité des résultats.
Beaucoup de stimulateurs ne fonctionnèrent que quelques mois.
L’ éle c tros timula tion de s rac ine s sa cré es an té rie ure s, grâ ce a ux t ra va ux de
Schmidt et Tanagho aux USA, de Brindley en Angleterre, est une technique plus
prometteuse. Elle nécessite un centre mictionnel intact, c’est à dire une lésion
mé dulla ire supra-sac rée . La conserva tion d’une a ctivité ré fle xe sous-lésionne lle
permet , avec une st imula tion de faible inte nsité, l’obt ention des contra ctions
puis sante s de la ves sie, ma is auss i du s phinc ter. Cett e dyssyne rgie vé sicosphinctérienne était initialement prévenue par dénervation chirurgicale puis par
sphinctérotomie. On chercha ensuite à l’éviter par une meilleur sélection du site
d’implant ation e t du c ourant de s timulation. Un stimulus de faible inte nsité
provoque la contraction du sphincter strié ; il faut un stimulus plus puissant pour
déc lenc he r, en plus, ce lle du dé trusor. Ma is le sphinc ter se re lâ cha nt plus
ra pide me nt que le dét rusor, il arrive un mome nt où le détrusor e st s eul e n
contraction, permettant la vidange vésicale. Cette situation idéale est entretenue
par l’utilisation de stimulations discontinues. Une radicotomie sacrée postérieure
pe ut ê tre as so cié e ; e lle ré a lise u ne dé s affé re n ta tion qui s upprime le s
cont ra ctions vé sic ale s dé sinhibé es , a mé liore la c omplia nce , ré du it l’hype rréflectivité autonome et la dyssynergie vésico-sphinctérienne, mais abolit aussi
l’érection et l’éjaculation réflexes.
En 1969, Giles Ske y Brindle y, phys iologiste londonien, direc teur du Mé dic al
Research Council, étudiait , chez le babouin, les effets de l’électrostimulation des
racines sacrées, dans le but de permettre une récupération de la marche chez le
paraplégique. Ses travaux s’orientèrent ensuite vers l’appareil vésico-sphinctérien,
avec l’espoir d’améliorer la continence puis de permettre la miction. La première
implantation, en juillet 1976, chez une jeune femme de 24 ans, atteinte d’une SEP
fut un échec. D’autres implantations suivirent avec des résultats de plus en plus
fiables. Trois programmes pemettent au patient de sélectionner la stimulation lui
pe rme tta nt de vide r s a ve ssie , d’a lle r à la se lle ou d’ avoir des é re c tions .
Actuellement, la technique de Brindley est celle qui bénéficie de la plus grande
e xpé rie nce e t de s me ille urs ré sult ats dans des indic at ions sé le ct ion née s :
té t ra plé g ie ou p ara plé gie c e nt ra le a ve c une in co nti ne nc e ré fle xe , n on
appare illable (nota mme nt che z la femme) e t/ou une miction non décle nc hable
par les moyens habituels.
Augmenter la contractilité vésicale est un objectif rarement
recherché, car il peut aller à l’encontre de la sécurité pour les
reins. Le s cholinergique s ont, sur les ve ssies dénervée s,
l’effet du test de Lapides, c’est à dire une augmentation de
la pression de re mplissage, ce qui, e n gé néral, n’a méliore
pas la vidange vésicale, mais représente un risque pour le
ha ut a pp a re il urina ire . Da ns le s ve s sie s ré f le xe s, ils
augmentent l’amplitude des contractions de la vessie, mais
aussi celles du sphincter strié (8), en aggravant les risques de
dyssynergie vésico-sphinctérienne . Il faut alors a ssocier un
traitement alpha-bloquant.
P2
C5
Diminuer les résistances uréthrales.
Le s a lpha-bloquants, le s m yore la xants a gisse nt spéc if iquement sur le tonus sphinctérien.
• Les alpha-bloquants abaissent le tonus sympathique ;
mais ils ont aussi une action sur la commande centrale du
sphincte r strié, ce qui e xpliq ue le ur e f f ic ac ité da ns la
dyssynergie vésico-sphinctérienne.
• Les myorelaxants du sphincter strié sont le dantrolen
(Dantrium® ) qui agit en périphérie sur la plaque motrice, le
baclofen (Liorésal®) qui est un inhibiteur mono et polysyna ptique, le diaze pam ( Va lium ®) qui est un m yore la xa nt à
a c tions c e ntra le e t pé riphé rique . Ce s m é dic a m e nts
re lâ c hent le sphincte r s trié , e t, à un m oindre de gré le
dé trus or. Ils sont indiqués da ns la dyssynergie vésicosphinctérienne, ma is le ur manie ment délic at, l’im portance
des e ffets seconda ires, et l’inconstance des ré sultats, le ur
font préférer les alpha-bloquants ou la sphinctérotomie.
L’incision du col, la sphinc térotom ie, l’incontine ntation, sont
des techniques toujours actuelles et d’une grande efficacité.
La ré section du col, introduite dés 1945 dans la pra tique
ne uro-uro lo giqu e , a ré su m é pe n da nt longt e m ps le
tra item e nt de la dysurie . Ac tue lle me nt on lui pré f ère la
ce rvicotom ie qui consiste à incise r profondé me nt le col
dans l’axe orifice urétéral - veru montanum, d’un seul ou des
deux côtés.
En 1958, Ross décrivait la technique de sphinctérotomie par
voie end oscop ique (9). L e s a va nta ge s re spe c tif s d’ une
incision m éd ia ne ( 12h) ou p aram é dia ne (11h) ont é té
beaucoup discutés du point de vue des risques d’hémor—
(8) La neuromédiation au niveau de la plaque motrice fait aussi intervenir l’acétylcholine.
(9) On peut aussi pratiquer une sphinctérotomie ou plutôt une résection partielle du sphincter strié par voie sous-pubienne après désinsertion de la verge
par section des ligaments suspenseurs. Mais la technique, plus compliquée et moins efficace, a été abandonnée.
145
CHAPITRE 5 - INDICATIONS DES EXPLORATIONS FONCTIONNELLES DE LA VOIE EXCRETRICE INFERIEURE
NOTE n° 50 :
CLAM CYSTOPLASTY
Remplacer une vessie spastique ou scléreuse par un réservoir intestinal souple est une idée séduisante. Vers les années 1960, quelques courtes séries firent état de résultats
immédiatement encourageants chez le neurologique. Malheureusement, à long terme l’expérience ne tint pas ses promesses, en grande partie parce que ces néo-vessies étaient
rétentionnistes, qu’elles sécrétaient du mucus et facilitaient ainsi le développement de calculs. Puis vint l’auto-sondage, qui, évitant ces inconvénients, permit de réhabiliter ces
techniques sous une forme simplifiée, car il ne s’agit plus de remplacer la vessie mais de l’agrandir, de la “diverticuliser”, avec un patch intestinal. Cette technique a été imaginée
pour la première fois en 1982 par Bramble pour traiter certaines énurésie et instabilités vésicales rebelles. Il la baptisa “Clam Cystoplasty”, ce qui fut traduit littéralement par
“cystoplastie en coquille de praire”, en “moule” ou plus simplement “en bivalve”, terme discutable puisqu’il décrit la façon dont est ouverte la vessie plutôt que la manière dont
elle est agrandie. Quoiqu’il en soit, ce procédé simple à réaliser, s’est révélé efficace, peut être plus pour traiter les vessies hypocompliantes que les vessies instables.
La technique chirurgicale consiste à fendre le dôme vésical recouvert de son péritoine, saggitalement et à interposer un segment d’intestin grêle disposé en losange pour avoir
une meilleure congruence entre les bords du patch et ceux de la vessie.
L’agrandissement vésical n’est parfois qu’une partie d’un programme chirurgical plus complexe visant à modifier l’équilibre vésico-sphinctérien. On peut, par exemple, réduire la
résistance uréthrale en pratiquant une incision du col ou une uréthrotomie ou l’augmenter dans le but d’accroître l’efficacité du sondage intermittent, par une colpopexie ou un
allongement de l’urèthre selon KROPP. Il est alors logique d’associer ces interventions dans le même temps opératoire. Par contre, on peut discuter l’indication de réaliser
simultanément l’implantation d’un sphincter artificiel. Il est bien connu actuellement que cette implantation, chez un enfant porteur d’une neuro-vessie congénitale, entraîne en
quelques mois une altération de la compliance vésicale. Le problème d’associer l’entérocystoplastie et l’implantation du sphincter se pose donc différemment selon que le but
premier de l’intervention est d’agrandir la vessie ou d’implanter un sphincter.
- quand on décide de réaliser une entérocystoplastie d’agrandissement pour un défaut de compliance majeur chez un enfant incontinent, il ne semble pas raisonnable d’indiquer
dans le même temps l’implantation d’un sphincter artificiel, car l’entérocystoplastie seule peut réaliser des conditions permettant d’être sec avec ou sans autosondage.
- quand on décide d’implanter un sphincter artificiel pour traiter l’incontinence d’un enfant dont la compliance vésicale est bonne, l’indication d’agrandir simultanément la vessie
peut être justifiée, surtout lorsque la cystomanométrie montre de faibles contractions rythmiques. Certes le traitement anticholinergique parvient à contrôler certains défauts de
compliance apparus secondairement, mais la fréquence d’une telle évolution et l’efficacité de l’entéroplastie sont tels que l’association des deux gestes dans le même temps
opératoire est tout à fait licite.
(d’après B. Lobel et F. Guille - Entérocystoplastie d’agrandissement., Encycl. Med. Chir. (Paris, France)
Techniques chirurgicales, Urologie-Gynécologie, 41207, 6-1989, 10p
146
LES DYSFONCTIONNEMENTS VESICO-SPHINCTERIENS NEUROLOGIQUES
ragie et d’ impuissance. L’im portant est de sectionner toute
l’é paisse ur du m usc le ; on peut le vérif ier à distance de
l’intervention par le profil uréthral qui doit être pratiquement
plat lorsque la sphinctérotomie a été complète.
L’association d’une incision du col, d’une sphinctérotomie, et
éventuellement d’une résection de prostate aboutit logique—
ment , mais non constamment à une incontinentation.
Augmenter les résistances uréthrales.
La ré tention pe ut être un objectif délibéréme nt choisi pour
accroître l’efficacité de l’autosondage. On peut le faire chez la
f emm e pa r de s interve ntions de c olpopexie dire cte ou de
f rondes sous-ce rvicales. L’allongem ent de l’urèthre se lon la
technique de Kropp est préféré chez la fillette.
L e sphincte r a rtific ie l vise un obje c tif plus a m bitie ux :
res taure r la continenc e sa ns la d ys urie . C ’ es t da ns le
dom a ine de s ve ssies ne urologique s, c e lle s de l’ e nfa nt
notamm ent, qu’il a trouvé ses pre mières a pplications. Ma is
c’ est aussi sur ce terrain que les ré sultats sont le s moins
c ons ta nts, du f a it, nota m m e nt d’ un e a lté ra tion q ua si
constante de la compliance vésicale.
La dérivation de sécurité, pour traiter ou prévenir une dégradation du ha ut a ppare il urinaire doit être indiquée a ve c
discernement.
Il e xiste m a intena nt de s m oyens e ff ic ace s d’ é vite r c ette
é volution lorsqu’ e lle p ara it p roba ble (hypoc om plia nc e
vés ic ale notam m e nt) : le s a nticholine rgiq ue s, le pa tch
d’a grandisse me nt vé sical et, chez le petit enf ant, la cystostomie temporaire.
Lorsque la dilatation existe il faut être sûr que la dérivation
est indispensable et qu’elle sera efficace. En effet, elle n’est
pas toujours nécessaire car le problème peut être souvent
ré solu e n a m éliora nt l’ é quilibre vé sic o-sphincté rie n ; le
sim ple draina ge de s urine s vés ica le s pa r une sonde à
dem eure perm et de s’ en a ssurer. Elle n’est pas non plus
toujours efficace, car l’altération fonctionnelle rénale peut ne
plus être réversible ; le drainage des urines rénales par une
néphrostomie percutanée permet de le savoir.
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La dérivation urinaire externe éta it c onsidéré e il y a une
tre ntaine d’a nnées a ux USA com me la solution obligatoire
des neuro-ve ssies congénita les. Ne pa s dé river systém atiquem ent e t pré coce me nt é tait une a ttitude étra nge sinon
c oupab le . Le s p rogrè s e t les m odes ont cha ngé c ette
opinion, et c’est des USA qu’est venue la nouvelle mode des
“dé-dé riva tions”. Nous ne disc uterons pa s des diffé rente s
tec hnique s de dérivations e xternes, continentes ou non ;
chacun peut a voir se s préfé re nces. Les indications doivent
être discutées en fonction des objectifs recherchés.
La dé rivation de confort, a vec un haut appareil norm al, est
tout à fait justifiée, notamment dans certaines neuro-vessies
congénita les ma l équilibrée s, ou dans des SEP très invalidantes. Une stomie cutanée bien appareillée est beaucoup
plus confortable qu’ une incontine nce non appa reilla ble .
Nom bre de pa tients e t surtout de pa tie nte s a qui ce tte
intervention a été réalisée après de multiples essais infructue ux visant à corrige r le ur incontinence, regrette nt de ne
pas l’avoir acceptée plus tôt.
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