Gérard Paley: une figure de l`immobilier genevois

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Gérard Paley: une figure de l`immobilier genevois
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• HOMMAGE
Gérard Paley: une figure de
l'immobilier genevois
Avec Gérard Paley, c'est une figure de l'immobilier genevois qui disparaît. A travers son agence
immobilière ouverte en 1976 et grâce à un travail acharné, cet homme à l'énergie indomptable a vendu
quelque 500 villas neuves dans le canton. Très introduit dans le milieu des célébrités, il donnait luimême des concerts de jazz.
Il connaissait la
musique...
Des noms? Son fils Philippe
n’en dira pas plus, discrétion
oblige. Par contre, il évoque
le partenariat de son père
avec Edmond Breccolini, un
promoteur très actif dans le
domaine de la villa: «Ils ont
travaillé vingt-cinq ans ensemble et édifié quelque 500
villas, que mon père vendait»,
résume Philippe Paley. Parallèlement, le patriarche avait
une activité intense sur le
marché du courtage de biens
anciens: «C’était un merveilleux vendeur», se souvient
son fils cadet qui a lui-même
GROS PLAN
O
riginal, le parcours
de Gérard Paley, tel
qu’évoqué par son fils
Philippe qui a repris progressivement l’agence immobilière
Gérard Paley & Fils, à partir
de 2010, lui qui y était entré
en 1994. Son père avait créé
l’entreprise en 1976, après
une période où il avait été
très actif au Canada, dans la
vente de villas et de centres
d’achats à des investisseurs
suisses. Dans les années
1950 déjà, ce Genevois de
Chêne-Bougeries né en 1931
avait été en Angleterre et en
Allemagne pour apprendre
les langues de ces pays, à
une époque où cela se faisait
très peu. L’anglais en particulier allait lui être très utile
sur un marché genevois de la
villa très prisé des célébrités.
Il avait un imposant carnet
d’adresses, nourri de coordonnées de stars du showbusiness et d’industriels.
deux frères, Pierre, architecte
et Jacques, pédiatre.
Gérard Paley était connu
pour son franc-parler: «S’il
avait quelque chose à dire, il
le disait», mais il n’a jamais
été en procès car c’était un
homme intègre. Un artiste
aussi: amateur de jazz, il avait
créé son premier orchestre
à l’âge de seize ans, donc en
1947. Il lui arrivait de donner
des concerts dans des cafés
ou des salles de spectacle. Il
s’intéressait aussi beaucoup
au sport, notamment au football en tant que supporter,
mais aussi à l’occasion de
sponsor, du Servette.
Entré avec enthousiasme sur
le marché immobilier genevois
à une époque de crise - le milieu des années 1970 -, Gérard
Paley aura connu trois crises,
même si la plus récente,
celle qui a débuté en 2013,
semble plutôt une correction qu’une véritable crise. Il
était toujours optimiste, souligne Philippe Paley: «Il faut
être patient et attendre. Cela
va remonter», aimait à dire
son père, dont les obsèques
ont eu lieu jeudi au temple
de Veyrier. Mais le souvenir
subsiste et avec lui un demimillier de villas sur le sol de
cette Genève qui était sa ville:
«Il n’aurait jamais voulu vivre
ailleurs». n
Mohammad Farrokh
TOUT L’IMMOBILIER • NO 791 • 30 NOVEMBRE 2015
L’empreinte de GP
Gérard Paley était un ami de Tout
l’Immobilier, depuis le début. Un ami
exigeant et volontiers caustique. Il
me souvient d’un appel de Gérard
Paley, arrivé sur ma ligne directe
(il ne passait jamais par aucun
standard téléphonique): «Monsieur
Oppikofer! C’est inadmissible! Mon
annonce absolument-hors-de-prix
ne m’a rapporté qu’un coup de fil.
Bon, d’accord, j’ai vendu la villa à 3
millions, mais tout de même: un seul
coup de fil! Faudra me faire un prix
la fois prochaine!».
On ne rencontrait jamais Gérard
Paley dans les associations professionnelles, ni dans les séminaires. Il
préférait profiter de ce temps pour
repérer jusqu’à la moindre opportunité de vendre, de construire, d’avancer. D’un souverain mépris pour les
multiples petits journaux immobiliers «imprimés en Europe» que de
malheureux courtiers en annonces
tentaient de lui placer (la plupart
sont aujourd’hui neurasthéniques),
il aimait bien notre hebdomadaire et
son petit frère Prestige Immobilier.
Autrefois, les Genevois évoquaient
le Grand Passage, dans les RuesBasses, comme le «GP». Chez nous,
GP reste le sigle des annonces de
Gérard Paley & Fils.
Ses confrères et concurrents admiraient sa combativité et le contrôle
quasi soviétique qu’il exerçait sur
son fief de Veyrier, Troinex ou
Chêne, où peu de mutations lui
échappaient. Ce grand professionnel
semblait savoir d’avance si, quand et
comment un bien immobilier allait se
libérer, un terrain devenir disponible,
une opportunité se présenter. Un
jour, subodorant le mariage imminent
d’un grand acteur de l’immobilier, il
lui proposa de lui vendre une villa;
c’est à peine si le jeune homme avait
déjà demandé la main de sa fiancée!
Très fier de travailler avec deux de
ses fils, le pater familias Gérard
Paley leur a transmis davantage
qu’une agence immobilière et la
passion de construire: un exemple et
une inspiration.
Thierry Oppikofer
Rédacteur en chef