L`Appel du Nord 1erOct
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L`Appel du Nord 1erOct
OÙ EST LE NORD? Ressentez le vent… cherchez le soleil… observez les étoiles… Ou alors prenez une boussole, et lorsque vous saurez dans quelle direction regarder, donnez une légère inclinaison de la tête vers l’ouest (si vous êtes en Europe) C’est là! Oui, c’est bien là où au XIXème siècle les explorateurs fanatiques et passionnés tels Parry, Franklin et Ross partaient en navire de l’Angleterre direction le Groenland. Arrivant proche de la Terre de Baffin, ils tentèrent sans répit de découvrir et conquérir le Pôle Nord et le Passage du Nord-Ouest et… au travers des années, après diverses mésaventures, succès dithyrambiques et échecs cuisants, de retrouver des camarades navals malchanceux. La plupart du temps ces aventuriers de l’Arctique restaient bloqués dans les glaces pour un, deux, trois, quatre hivers. Neuf à onze mois de suite, le bateau emprisonné par des murs glacés dans un désert blanc, gelé, hostile, tueur et pourtant puissamment et irrésistiblement attirant. Aujourd’hui, dans la région territoriale actuelle qu’est le Canada, la province située le plus au nord s’appelle depuis 1999 le Nunavut. Elle comprend toute la terre de Baffin, les îles Ellesmere, une grande partie de l’archipel arctique et un morceau des Territoires du Nord-Ouest canadien. Officiellement le Nunavut “ré appartient?”, en partie (…) à ses habitants natifs. Sur la carte ci-dessus c’est la zone violette, à gauche du Groenland, remplie d’archipels, de détroits et de péninsules. North Pole ARCTIC OC´ ÉAN Pôle nord Nunavut consists of: (a) all of Canada north of 60°N and east of the boundary line shown on this map, and which is not within Quebec or Newfoundland and Labrador; and (b) the islands in Hudson Bay, James Bay and Ungava Bay that are not w i t h i n M a n i t o b a , O n t a r i o, o r Quebec. OCEAN ARCTIQUE CANADA Ellesmere Island l Alert ˆ Ile d’Ellesmere Nunavut comprend : (a) la partie du Canada située au nord du 60°N et à l’est de la limite indiquée sur cette carte, à l’exclusion des régions appartenant au Québec ou à Terre-Neuve -et-Labrador; et (b) les îles de la baie d’Hudson, de la baie James et de la baie d’Ungava, à l’exclusion de celles qui appartiennent au Manitoba, l’Ontario ou au Québec. N Grise Fiord l Baffin Bay KALAALLIT NUNAAT (GRØNLAND) (Denmark / Danemark) Devon I Baie de Baffin Resolute l Victoria Island Ce Arc tic rcl Cir e Arc cle tiq ue Kugluktuk l Arctic Pond Bay Inlet l ll Nanisivik NUNAVUT Cambridge Bay l Gjoa Haven l Taloyoak l Igloolik l l Pelly Bay l Umingmaktok River Back NORTHWEST TERRITORIES TERRITOIRES DU NORD-OUEST Da Clyde D vi s ét River St ro l ra it it de Da Baffin vi s Island Qikiqtarjuaq l Iqaluit ¢ Coral Harbour l Rankin Inlet l l Chesterfield Inlet Whale Cove l Territorial capital / ¢ Capitale territoriale Arviat l Pangnirtung Repulse Bay l Baker Lake l LEGEND / LÉGENDE ˆ Ile de Baffin lHall Beach l Cape l Kimmirut Dorset n dso Hudson Str NF ait Détr oit d’ Hu L T- D & Net- LAB LA B QUEBEC l Baie d’Ungava International boundary / Frontière internationale Provincial boundary / Limite provinciale Hudson Bay Baie d’Hudson MANITOBA Sanikiluaq Dividing line / Ligne de séparation (Canada and/et Kalaallit Nunaat) ONTARIO Scale / Échelle km © 2006. Ungava Bay QUÉBEC Other populated places / l Autres lieux habités 200 0 200 400 Her Majesty the Queen in Right of Canada, Natural Resources Canada. Sa Majesté la Reine du chef du Canada, Ressources naturelles Canada. 600 km l James Bay Baie James www.atlas.gc.ca En Inuktitut, langue des Inuit, les habitants natifs: Nuna = terre Vut = notre Un homme est un Inuk Des hommes sont des Inuit Pas plus compliqué que cela. Et dans ce vaste Nunavut, au-dessus du cercle polaire, au nord-ouest de la terre de Baffin, se trouve la communauté d’Iglulik. Cherchez-la sur la carte ci-dessus… Iglu = maison Lik : le lieu 69° 22′ 34″ Nord 81° 47′ 58″ Ouest Ma première expérience arctique fut en novembre 2007 lorsque la Compagnie Artcirq créée par mon cher ami et collègue circassien Guillaume Saladin m’invita à venir donner des cours de cirque et yoga chez eux. J’avais été complètement époustouflée par ce nouveau monde et à l’époque je n’avais absolument pas réussi à mettre en mots ce que j’avais découvert, appris, ressenti, tout ce qui m’avait surprise, confrontée et émerveillée. Quatre ans plus tard le choc est moins violent, mon entendement est autre. Il y a du recul. Aussi, entre 2007 et 2011 j’ai eu à plusieurs reprises l’occasion de rencontrer à nouveau les membres d’Artcirq à travers le monde. Ce deuxième voyage nordique devenait la continuation d’une relation humaine, circassienne et la poursuite de ma fascination pour d’autres cultures, traditions et idiomes. Cette fois-ci l’aventure dans l’Arctique avec certains membres d’Artcirq et d’autres habitants d’Iglulik, est celle de partir en expédition: à pied, sac à dos et tente, à l’ancienne. Pour reconnecter avec la Nature. Se rappeler ce qu’on a oublié. Partager des approches de la vie radicalement différentes, dans l’action, la marche, la survie et le danger, tout cela dans ces vastes espaces déroutants. Poursuivre la tradition des grands parents, abruptement interrompue par l’arrivée de sauveurs-bienfaiteurs du sud. C’est-à-dire la colonisation canadienne du XXème siècle, pour motifs de contrôles territoriaux et souveraineté face à la Russie et aux USA, avec pour prétexte d’offrir un merveilleux bien-être aux sauvages, grâce à de multiples religions et éducations… et en passant s’approprier des terres potentiellement avantageuses… Passons. J’arrive le 5 août. 3 avions. Un arrêt à Kuujjuak (Nunavik, nord du Québec), puis une nuit à Iqaluit (capitale du Nunavut, sud de la terre de Baffin). Le lendemain un petit arrêt à Hall Beach (ancienne base américaine de la DEW line) et enfin Iglulik. MOMENT MUSICAL Avant de poursuivre cette lecture, c’est bien le moment d’ouvrir le lien musical ci dessous: http://www.youtube.com/watch?v=wQb2HiXsLi0 (Il est aussi en attaché dans le email). Naneruaq est un groupe groenlandais – leur Inuktitut ressemble beaucoup à celui d’Iglulik et cette chanson est hyper populaire ces-jours ci dans la communauté, du coup elle fait partie de ce voyage. Vous entendrez qu’ils ont un son autre que le notre, qui ressemble à un zozotement… ce son est typique de l’Inuktitut du Groenland et de celui de la région d’Iglulik. Bien que ces deux langues inuit aient ce son unique commun, elles restent deux dialectes distincts. Premiers jours dans le village, préparatifs et organisation: Nous trouverons de l’eau potable dans les rivières et lacs, nous pêcherons et chasserons et si cela n’est pas suffisant, nous avons de la nourriture déshydratée, du thé, café et biscuits secs appelés Pilot biscuits! Nunaqpa 2011 check list! What you need to find R What we find for you Sleeping bag (light & warm) Tent Fork, knife, spoon Tarp Cup Matress Plate Candle light + candle Water bottle Stove Soap, tooth brush Duck tape Lighter Dry bag Blanket Dry food and GoRP! Towel First aid kit R Sunglasses Tea pot Camera, battery Pot Baby stuff (if you need) Kitchen tools Walking boots Cords, rope *Clothes (for day and night) Fishing rod, gun, bullets Rain coat and pants Solar pannel Warm parka (boating and night) and boots Gloves, hat, scarf Foil Sewing kit Socks : wool or synthetic Food **Running shoes ***Back pack Toilet paper Scrubbing sponge Pen, paper Garbage bags Junk food! Fuel Flashlight *What we suggest about clothing : Night clothes : always dry in the dry bag with the sleeping bag and a warm pair of socks. Day clothes : synthetic fabrics and wool socks are the best because in case of rain they dry faster. Have also a rain coat **Shoes : During the day wearing walking boots with good support for the ankles, and at night light and confortable shoes so your feet can rest! *** About the back pack : The heaviest stuff should be as close as possible from your back, in the middle of the bag Everything should be inside the bag (nothing hanging on the sides) 90% of the weight should be support by your hip by the belt (not your shoulders!) Your bag should not be heavier than 1/3 of your own weight GoRP = good old raisins and peanuts C’est l’été. Non. Il ne fait pas froid. J’ai même été en t-shirt. Il a fait de 5 à 20 degrés. Non. Il n’y avait pas de neige. Elle fond en juin et recommence à tomber fin septembre. Oui. Il fait presque constamment jour. À mon arrivée le 5 août 2011, entre minuit et trois heures du matin il faisait un peu plus obscur, comme un jour orageux, mais il ne faisait pas nuit noire! Oui. C’est extraordinairement magique. Combien de fois pensais-je qu’il était 18h et surprise! Il était 1h du matin… Les Inuit parlent peu. Le secret est d’embrasser le silence. Si tu arrives à être avec l’un d’eux sans paroles, simplement en présence, sans tenter de remplir le vide en parlant ou bougeant, soudain un autre espace-temps pourra prendre sa place, et un autre type de conversation en découlera. Les réponses aux questions pratiques sont souvent évasives, les plus communes étant: maybe / maybe not : peut-être / peut-être pas. Comme le climat, cela dépend, on ne peut pas tout prévoir à la lettre et à la minute, comme on fait chez nous “dans le sud”*; si demain vent ou blizzard il y a nous n’irons pas pêcher ou chasser, ça dépend. Tout dépend, toujours, rien n’est certain. Ils n’ont pas tort… *Pour eux nous venons tous « du sud »! Le oui s’articule par un lever des sourcils, le non par une petite grimace. Sans son. De mes humbles expériences, quand tu es dans le Nord, si tu souhaites véritablement pouvoir communiquer avec ses habitants et si tu es sincèrement ouvert à l’Autre, la première chose à faire, bien dure pour nous – en tout cas pour moi jeune occidentale intrépide et impatiente – est de lâcher prise (comme ils disent dans les livres de new-age, bouddhisme et psychologie des magazines chez le dentiste). Ne pas vouloir contrôler, ni maximiser son temps, avoir des horaires ou des résultats. À ma première fois, en novembre 2007 je l’ai rapidement découvert et j’ai dû apprendre. Ce ne fut pas facile, ce fut même une belle claque. En plus à cette époque il faisait nuit et noir tout le temps, 23h/24h, extrêmement froid; confrontée j’avais été, à une nature surpuissante et sans merci, à un autre rythme de vie, à des codes sociaux surprenants pour nous, mais surtout, confrontée à moi-même. Nous appelons cette expédition Nunaqpa Littéralement cela signifie marcher d’un lieu à un autre à pied, en campant, chassant et pêchant puis revenir au lieu de départ avec de la nourriture fraîche. Ce voyage aurait dû, aurait pu s’appeler Ittikaq: marcher d’un lieu à un autre en traversant des eaux (mer, détroit, rivière, lac). 14 adultes, le chien Kayu pour gardien et 7 enfants, à pied et portés. Vous n’en comptez que 5? Devinez où se cachent les deux plus petits bébés…? (réponse plus bas dans le récit!) Uviasuqtunga Je suis heureuse Au retour de cette semaine hallucinante, pleine d’énergie et d’acharnement je décide d’écrire un petit texte résumant l’épopée. Terry, ami et collègue parmi les huit chasseurs me la traduit à l’Inuitstyle et un dimanche matin à 8h je frappe à la porte de la radio communautaire… Dans chaque maison d’Iglulik, la radio est toujours allumée. Ainsi c’était une manière pour nous de partager cette semaine on the land (sur la terre – car Iglulik est une île) avec les personnes âgées du village. Je m’étais entrainée la veille avec la grand-mère d’une amie, Reena… je crois qu’elle avait tout compris, en tout cas elle avait bien rigolé! MOMENT RADIOPHONIQUE Ouvrez le fichier Radio que je vous ai envoyé avec ce document et c’est parti. L’entrevue dure 3 minutes. Voici ce que j’ai dit avec un accent bizarre pour eux! (Traduction littérale) ATIRA JESSICA Mon nom est Jessica INNULAUQTUNGA BRAZILMIT SWITZERLANDMILLU PIRUQ&TUNGA Je suis née au Brésil et ai grandi en Suisse AARCIRQ KUNNI PISUQATAULAUQTUNGA Avec Artcirq je travaille/je marche BICIKUKUT KUNGIAQTAUSUUNGUJUNGA Je fais un spectacle avec une bicyclette (bicyclette spectacle regarder je fais) ITTIKARIALAURATA ISUQTUURMIT IQIMUT Nous avons traversé d’une eau à l’autre de Isutuurmit à Iqimut La distance d’Iglulik à Isutuurmit est de 250 kms. Sur le chemin aller nous avons pris 12 heures! Mais on ne sentait pas la longueur, c’était si splendide. Grandiose. Envoûtant. Je demandai l’heure en m’attendant, comme réponse à 16heures… rebelotte… 23heures en fait… Nous avions définitivement quitté le monde connu. Rien n’est prévisible. Certaines glaces, après arrêt sur la 1ère petite île (voir carte) s’étaient déjà formées – ou n’avaient pas vraiment fondu cette année (au grand bonheur de morses et phoques annelés). En effet, dans cette région du monde, la glace qui recouvre les eaux peu profondes, tels lacs et péninsules, peut fondre vers le mois de juin; il recommence à neiger en septembre et les glaces se reforment en octobre-novembre. Quand il y a glace sur les eaux: On se déplace traîneau à chiens ou ski-doo (moto de neige) et quand eau il y a: kayak ou bateau à moteur. Du coup, lors de la fonte ou la restructuration de ces immenses étendues de glace, l’île d’Iglulik se retrouve isolée véritablement des autres terres. Pour une autre carte cherchez sur: Google map Iglulik Retour à l’aventure : un peu coincés dans ce mirage nous l’avons été, à notre grand délice!! C’est tellement Autre, ce paysage, ces couleurs, les sons. De loin les glaces, à cause du reflet, semblent former un gigantesque et interminable mur infranchissable. Je me sentais si fragile. Vulnérable. Démunie. Seule je serais morte de suite. L’eau est foudroyante de froid. Je ne sais pas chasser. Je ne comprends pas comment la nature fonctionne là-haut, je ne la connais pas. Mais j’avais totale confiance en les personnes qui étaient là. Les chasseurs inuit qui nous accompagnaient et conduisaient les bateaux, ces hommes qui ont reçu de leurs parents et familles la connaissance de ce monde nordique. Nous étions en sécurité. Je n’avais pas peur. Aucune. Nous étions si loin de tout. Presque à l’extrémité du monde, si carrée notre terre avait été. Les paysages sont si magnifiques, je ne trouverai jamais assez d’adjectifs pour décrire ces beautés honorablement. C’est un sentiment qui n’a pas de mot. C’est. Outre ces splendeurs visuelles quasi métaphysiques, le plus important pour moi fut et est le rapport humain : La continuation d’une rencontre qui fut encore plus intense, réelle, dans ce contexte. Nous ne parlons pas la même langue, nous ne nous ressemblons pas, tout nous sépare, et pourtant nous sommes humains et vivons les mêmes émotions. Ça semble cucul la praline mais c’est vrai et c’est important de se le rappeler. De ne jamais l’oublier. Une chose est sure: nous étions tous sincèrement heureux de partager ces lieux, ces souvenirs, cet héritage ensemble – et chacun était intéressé par l’Autre: dans ses arts, idiome, histoires. Eux comme moi, s’intéressent à ce que je fais d’où je viens, comment je vis. On échange. C’est ça la vie. NUNANGA PIUJUMARIALUQ AMMALU INUUSIRMUT PIKUNAQ&UNNI La terre là-bas est très agréable/belle et pour la vie très joyeuse (comme le sentiment d’attraper une première baleine) INGIRATIDLUDA TAKULAUQTUGUT AIVIRNIT NATTIRNIT UKJUQNIT AMMALU SIKUMARIALUNIT Sur le chemin (mouvement) nous avons vu des morses, phoques annelés, barbus et beaucoup de glace NUNAMI TUKTU TUMMINGINNI KAAJUURNIQ MITTIRNIQ AMMALU KANGURNIQ Sur la terre il y avait des traces de caribous, des faucons, des canards eider et des oies blanches. PISUINAQ&UTA TAKANAQLAURALUAQ&UNI KISIANI ALIANAI&UNI Nous avons continué de marcher. C’était fatiguant mais heureux nous étions. Voilà où se cachent les bébés, de quelques jours à plusieurs années… dans l’amauti Veste chaude de femme à double poche, une dans le dos pour le corps de l’enfant, plus un gros capuchon pour protéger les têtes de la mère et de l’enfant du vent, du froid et des engelures. En hiver les amautis sont doubles et anciennement faits en peau de caribou ou de phoque… en été ils sont actuellement aussi faits en coton. Lorsque je pris cette photo je me sentais dans le film « Le Seigneur des Anneaux »… Mais en encore plus sensationnel! Enivrant. Émouvant. IQALUGAQNIQ NIRIT&ALAUQPUGUT. KANGURTUQ&UTALU Petits poissons nous avons mangés. Oies blanches nous avons eues (mangées) Poisson: iqalu Le plus commun est l’omble de l’arctique, un type de saumon qui peut atteindre des tailles impressionnantes. Je n’oublierai jamais, dans mes premiers jours à Iglulik, mon initiation au sashimi à l’inuit. Partis pêcher avec une famille, et hop! un poisson de pris, le père entaille le ventre d’un coup propre et en une fois, d’une poignée de main vide les tripes et tout l’intérieur, puis va le rincer dans l’eau. Dans ma petite tête je me dis, bon et bien il va le ramener pour le manger chez lui avec les siens. Mais non, il le pose près de nous au bord de l’eau. Alors je me dis - bon on va faire un feu et le préparer. Mais il n’y a pas de bois par ici… ni de buisson... juste de la roche à perte de vue… Et à ce moment là, il le découpe et pour la joie de mon être et de mes papilles nous l’avons mangé ensemble à cet instant-même, cru, frais, froid de l’eau, chaud de son vivant et chaque bouchée augmentait la circulation de mon sang et de ma lymphe, je mangeais véritablement de la vitalité, de la vie. Ces poissons ci-dessus sont plus petits, d’eau douce, appelés iqalugaq. On trouve aussi des poissons ressemblant à des dinosaures, les kanayuk : chaboisseau de l’arctique. Les Inuit ne les aiment pas du tout et les rejettent dans l’eau avec dégoût de peur d’attraper des verrues! J’avoue qu’ils ne sont pas très sexy. QIJURTARNIK IGLIQAQPAK&UTA Qijurtak lits nous avons faits plusieurs fois Le qijurtak = fougères, bruyères de l’arctique utilisées pour faire des sous-lits, du feu et de la cuisine. Cela faisait partie de notre rituel. À chaque camp chacun posait son sac et ou son enfant et partait ramasser bruyères pour créer un matelas ergonomique naturel! Le qiyurtaq nous a aussi mitonné de délicieux repas de poisson, comme combustible et comme épice. Je n’ai pas de photos de cette plante. Ci-dessous vous trouverez Riley, Wesley et Bryana (ou Magpi). Elle a quatre ans et a marché tout le long, les deux autres étaient cachés quelque part dans le dos d’une maman. PAUNGAQTAQ&UTALU Bleuets nous avons ramassés en mangeant. Partout! Petits et goûteux. Nous avons eu de la chance car la migration des oies blanches commençait, et une semaine plus tard c’était la razzia des myrtilles de l’arctique! On y trouve aussi un type de baie encore plus petite, noire et plus amère – que je n’avais jamais vue ni mangée auparavant. La camarine. Les Inuit – en tout cas de cette région – ne mangent quasiment pas de fruits ou de légumes. Il n’y en a pas, la seule saison propice à quelques plantes basses ou terreuses serait entre juillet et septembre. Outre ces baies, on retrouve certaines racines comestibles et autres petites plantes sauvages. Mais rien ne peut vraiment pousser profondément à cause du permafrost et ce qui pousse vers le haut n’a pas de grandes chances avec la présence quasi constante de neige, glace, vent. Pas d’arbres, et les buissons les plus gros atteignent une hauteur maximale de 10 centimètres! KUNGULIQTUQPAK&UTALUULAUQTUQ Rhubarbe sauvage nous avons ramassée et mangée. Miam. QILAMIULAUQUUJIGALUAQ&UNNI Court ça a semblé KISIANI AJJIUNGNIITUMIK ATULAUQPUGUT Mais quelque chose de différent/unique nous avons utilisé/vécu AJJIGIINGITUNIK UQAUSIQAQ&UTA NUNAALU KAJJAQNAMARIALUK&UNI Différents (référant à plusieurs) notre langage - la terre là-bas très beau paysage Uqaa = langue (organe) / uqausuq = le langage, idiome Les missionnaires chrétiens de tous types ont vraiment frappé fort au XXème siècle – on dénombre quatre églises de foi différentes dans le seul petit village d’Iglulik… Je peux vous assurer que Jésus, bien que courageux et vaillant, n’aurait jamais survécu au froid et dangers de ce monde-ci. Le barbu n’a jamais existé là-haut (les Inuit ne sont pas très poilus). Le shamanisme a tout son sens, la relation intime avec la nature et les animaux est indispensable et unique source de survie spirituelle dans un lieu comme celui-ci (selon moi). Mais aujourd’hui on l’a diabolisé. Merci aux religions. QUJANNAMIK PIVIQAQTITAULAURATTA Merci on nous a donné cette chance Piviq = la chance Qujannamik prononcé: krouyane namik Qanogli: qu’est ce qui se passe?/ça va?: prononcé kranougli Et la réponse n’est jamais oui ou non, on répond par le sentiment: je me sens heureux, fatigué, fâché. Ou alors on répond: Qanuingi – ça va bien: kranouinngi INUKTITURIUQSARAMA J’apprends l’inuktitut Atii: c’est parti, on y va Atataa: c’est chaud (pour la nourriture ou l’eau) Taima: ça suffit, assez, basta (prononcé téma) Ataata : papa Anaana : maman Maana : maintenant Qaigi : viens - prononcé kraïgui Aamai : je ne sais pas Kaupattau : à demain Ukausiqsairujuu : je n’ai plus de mots – prononcé oukaousikrsaïrouyou KUTAUJARALUAQ&UNGA Je n’arrive pas encore à tout prononcer juste Alianait !!: joie !! - aliyanaït Qakuruttau: à une prochaine L’équipe du Nunaqpa 2011 Daisy Irqqarqsaq & Jimmy Qamukaq & Riley & Sheldon Solomon Uyarasuk Guillaume Ittuksarjuat Saladin & Annie Desilets Jacky Qrunnut & Blake & Jude Nikita Ungalaq Catherine Rannou Jessica Arpin Joey Ammaq & Jenny Attagutsiak & Bryana Magpi &Wesley Karina Bleau & Félix Boisvert & Eliam Damien Tulugarjuk Les Chasseurs : Terry Uyarak Wayne & Tyson Chris & Amy Apayata Simon Voici encore quelques photos, vous pouvez les accompagner de cette chanson de Sigur Ros, Samskeyti : http://www.youtube.com/watch?v=K1cqn3UDmp4 Elle est aussi en attaché mp3 Kanguujat : coton arctique ou linaigrette : Un peu de botanique que j’ai trouvé sur internet : Le coton pousse dans les zones marécageuses et humides. Il existe environ 100 espèces dans les Territoires du NordOuest. La tête de cette plante est une étrange fleur avec des pétales constituée de mèches blanches et soyeuses qui se dispersent au gré du vent. C’est beau! Le coton arctique peut former des touffes d’herbes afin d’emmagasiner de l’humidité. Ces touffes sont plus résistantes, notamment au feu. Il était aussi traditionnellement utilisé par les inuit comme mèches pour les qulliq (lampes à huile), pour bourrer les matelas et servir comme amadou pour démarrer le feu. On est dans la toundra: en Arctique de l’est, on ne compte qu’une moyenne de 40 jours sans gel, ne permettant pas au pergélisol de dégeler. La flore de la toundra arctique (environ 200 espèces de fleurs et un très grand nombre de lichen et de mousse) a su s’adapter au climat et aux étés courts grâce aux longues heures d’ensoleillement. La plupart germent ainsi à partir des tiges et des racines existantes. Le vent, la neige et la température excessivement basse ont conditionné la flore à croître souvent en un tapis bas et touffu ce qui lui permet de se protéger. L’air est également plus chaud au ras du sol ce qui permet une meilleure croissance. Certaines se servent aussi d’une pigmentation foncée pour absorber la chaleur du soleil. Les racines sont également plus courtes car seuls 5 à 50 centimètres du sol réussissent à dégeler. La flore est aussi la base de la nourriture des herbivores qui peuplent la toundra, comme le caribou ou le lièvre arctique. Les Inuit consomment essentiellement les baies qui sont nombreuses… et délicieuses! Voici la qulliq : anciennement fait en pierre stéatite sculptée, elle servait de lampe ou petit poêle. Celle-ci est faite d’une vieille casserole! La qulliq brûle du gras de phoque à titre de combustible (blubber en anglais – mot rigolo). De nos jours ils utilisent de la Crisco ou huile quelconque. Pour les ancêtres des Inuit, la qulliq était la seule source de lumière et de chaleur. Elle humidifiait les parois internes de l’igloo qui regelaient et de ce fait rendait l’igloo plus épais donc plus imperméable et chaleureux. Elle servait aussi à : Transformer la neige en eau potable Préparer du thé (cadeau des baleiniers groenlandais du XIXème siècle contre peaux et nourriture) Bouillir de la viande Cuire la bannique : palaugaaq (Mamqtuq ! = délicieux.) Si on se croise je vous en cuisinerai! Cette photo pourrait nous illustrer la la présence des Tuniit, (les premiers habitants), des hommes puissants et gigantesques qui peuplaient le nord avant les Inuit. Selon la légende, les premiers habitants étaient des géants, des êtres plus grands et forts que les Inuit, mais qui avaient vite peur et s’enfuyaient. Voici une autre chanson très écoutée par les jeunes d’Iglulik, pour accompagner ces images différemment. Autre style : Uneqinak par le groupe Groenlandais Feat http://www.youtube.com/watch?v=Aoj4bmi5VSI Le gésier d’oie cru est fort goûteux. Je me suis étonnée, je n’aurais jamais imaginé qu’un jour on m’offrirait ce délice, mais un jour ce moment arriva et je ne regrette pas. A l’époque le régime inuit consistait de mammifères marins, terrestres, poissons et oiseaux et leurs oeufs. Crus, encore chauds, congelés, bouillis, faisandés. Quelques baies et racines en été. Pas de sel ni de sucre, pas d’épices. Glace fondue pour eau. Dans les années 50 le gouvernement a voulu éduquer les enfants en les enlevant et les plaçant dans des écoles religieuses du sud. Je me rappellerai toujours le chasseur John, aujourd’hui une 60aine d’années, traumatisé à vie parce qu’ils leur obligeaient (entre autres) à manger des légumes. L’obligeant ainsi à renier ses modes de vie pour adopter les manières des hommes blancs. Ils avaient leur « apport journalier conseillé » de vitamines et minéraux! L’animal sauvage chassé ou pêché était sain et vigoureux, et les inuit mangeaient chaque partie du corps, intestins compris, donc algues ou herbes en digestion. Les explorateurs anglais se sont longtemps entêtés à manger de la viande salée ou en conserve, et tous finissaient par mourir du scorbut : manque de vitamine C Il aurait suffit de manger de la viande cru ou le fameux blubber, le gras de phoque, antiscorbutiques arctiques! Ci-dessous un harpon, la ficelle est en peau de phoque barbu. Ça c’est de la récup! Quelques liens : www.isuma.tv www.artcirq.org www.globaia.org En Brésilien il existe le mot saudade qui signifie un mélange de nostalgie d’un lieu ou d’une personne, teinté de blues et de spleen. C’est ce que je ressens du Grand-Nord car là-bas existent encore les sentiments d’immensité, de danger et de liberté, difficilement reconnaissables “dans le sud”.
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