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Thème 3 « La France au XIXème siècle » Cette fiche reprend le plan de la séquence et propose un éclairage sur l’histoire des femmes, réalisée essentiellement à partir de l’ouvrage coordonnée par G DERMENJIAN, (2010) La place des femmes dans l’histoire. Une histoire mixte, édition Belin, 416 pages Introduction : « Les héritages de la Révolution et de l’ère napoléonienne » Si les femmes ont joué un rôle important au début de la Révolution française, si l’Assemblée législative a légalisé le divorce en 1792 et leur a accordé des droits juridiques, elles ont aussi rapidement perdu ces droits et ont été exclues de la vie politique. Dès 1791, elles ont été « rangées » dans la catégorie des citoyens passifs. En 1793, elles ont été exclues de l’armée, du suffrage universel, au prétexte de leur « faiblesse naturelle ». Elles ont dû fermer leurs clubs et leurs sociétés. La guillotine n’a épargné ni Marie-Antoinette « mauvaise mère, épouse débauchée, immorale… » (Le Moniteur universel), ni Olympe de Gouges « qui a voulu être homme d’Etat », ni Manon Roland « dépourvue des vertus qui conviennent à son sexe ». En 1795, elles ont été exclues des tribunes de toutes les assemblées politiques et on leur a interdit de se réunir à plus de cinq dans la rue. En 1804, le Code civil en a fait des mineures juridiques, privées de droits politiques. L’article 213, en vigueur jusqu’aux années 1960, précise que « la femme doit obéissance à son mari ». Son devoir est de faire et d’élever des enfants. Le divorce est interdit par la Restauration en 1816 puis rétablit par la Troisième République en 1884. Durant tout le XIXème siècle, les femmes sont exclues de la vie politique, sous l’effet conjuguée des normes juridiques et des représentations sociales, culturelles et religieuses. Le sexe féminin étant considéré comme fragile et instable par nature, on lui interdit d’exercer des fonctions politiques et de gouverner la France. La femme est avant tout vue comme une mère, qui doit engendrer des forces vives, se consacrer à l’entretien de son foyer et se cantonner à la sphère privée, sans intervenir dans la sphère publique, exclusivement masculine. « Les transformations induites par la « révolution industrielle » » Les femmes ont toujours travaillé et participent massivement à l’industrialisation. Elles sont présentes dans tous les secteurs, plus particulièrement dans l’industrie textile et l’habillement, mais aussi dans les mines. De 1806 à 1856, la part des actives dans l’industrie française passe ainsi de 18,1 à 26,6 %. Elles partagent avec les hommes la dureté du travail, sont systématiquement sous leur tutelle au sein des ateliers et des usines, sont sous-payées et souffrent de nombreuses brimades et vexations. Leur emploi est cependant considéré comme un « problème » pour et par les hommes du XIXème siècle. Ils dénoncent la concurrence de salariées, payées moitié moins qu’eux et considèrent que les femmes ne sont concevables qu’en tant que mères au foyer et épouses. Pour Jules Simon, un temps Président du conseil, « l’ouvrière n’est pas une femme » et pour le socialiste Proudhon, la femme ne doit être que « ménagère ou courtisane ». Presque toujours, les femmes ont soutenu les hommes dans les mouvements ouvriers du siècle, mais la réciproque n’a pas souvent été le cas. Ainsi Flora Tristan (1803-1844) fait figure d’exception, parmi les personnalités du mouvement ouvrier naissant, en se préoccupant de l’amélioration du sort des ouvrières et de l’émancipation des femmes. Malgré sa popularité, ses revendications trouvent peu d’écho et les premières grèves de femmes se font sans le soutien des hommes. I) Le temps des monarchies censitaires Le rétablissement de la monarchie en 1814, accentue la séparation entre la sphère publique (masculine) et la sphère privée (féminine). Cependant, au lendemain de la Révolution de Juillet, des partisans d’une société nouvelle, plus harmonieuse, s’intéressent à la question féminine. Il s’agit, entre autres, des saint-simoniens qui vont attirer dans leurs rangs de nombreuses femmes. Les saint-simoniennes et leurs revendications S. Delvallez, N. Edelman, A.Primi, Dossier 2 « l’émancipation des femmes dans les années 1830 » du chapitre 15 de La place des femmes dans l’histoire, Une histoire mixte . Ouvrage cité plus haut. II) L’installation du suffrage Universel Exclues du corps électoral par le gouvernement provisoire de Février 1848, les femmes continuent de se dire citoyennes et les suffragistes demandent des droits civiques pour les femmes, à travers pétitions, journaux et clubs. Les suffragettes utilisent des actions violentes dans le même but, mais seule George Sand réussit véritablement à se faire entendre. Le 10 mars 1848, Eugénie Niboyet fait paraître le premier numéro de La Voix des femmes « journal socialiste et politique » qui soutient les travailleuses et lutte pour que la devise « Liberté, Egalité, Fraternité » devienne une réalité. Elle dénonce également la dérive autoritaire du régime républicain, dont la constitution, votée en novembre 1848, proclame qu’il a pour base « la Famille, le Travail, la Propriété, l’Ordre public ». En avril 1849, Jeanne Deroin tente de se présenter aux élections législatives comme candidate des démocrates socialistes, mais c’est un échec. Emprisonnée de mai 1850 à juillet 1851, pour subversion politique, elle continuera cependant à défendre les droits des femmes, alors que les « saucialistes » deviennent le sujet de pièces comiques, de journaux satiriques et de caricatures, dont celles de Daumier. La répression engagée dès le 2 Décembre 1852 réduit les femmes au silence. L’ordre moral en rigueur fait que l’instruction et l’éducation des filles passe presque exclusivement sous le contrôle des congrégations religieuses, qui préparent les élèves à devenir de bonnes épouses et de bonnes mères. La libéralisation du régime dans les années 1860 permet, malgré tout, aux femmes de s’exprimer à nouveau. III) La victoire de la IIIème République La naissance des féminismes Le néologisme « féminisme » est d’origine française et a été forgé dans les années 1870. D’abord utilisé en médecine pour qualifier des hommes représentant des signes de féminité, c’est Hubertine Aubert qui en 1882, l’assimile pour la première fois à la lutte pour l’amélioration de la condition féminine. La diversité du mouvement féministe dans le temps, dans l’espace et dans les formes, fait qu’on peut parler de « féminismes ». Cependant, les premiers féminismes ont des caractéristiques communes : ils sont tous nés dans des pays industrialisés, dénoncent la condition infériorisée des femmes, l’andocentrisme des sociétés et revendiquent l’égalité. L’engagement concerne surtout des femmes issues de la bourgeoisie. Il se concrétise par la création d’associations, comme la ligue française pour le droit des femmes (fondée en 1882 par Léon Richer et dont Victor Hugo est le président d’honneur), l’Internationale des femmes socialistes (à l’origine en 1910 de la journée internationale des femmes), qui se dotent d’organes de presse et font des campagnes de sensibilisation auprès de l’opinion publique. Les principales revendications portent sur la réforme de l’institution du mariage, l’amélioration de l’éducation des filles et le droit des femmes au travail; peu concernent la politique. Elles se concrétiseront par le vote de différentes lois à la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle, dont la possibilité de disposer librement de son salaire à partir de 1907. Après l’échec sanglant de la Commune, et la présidence d’ A. Thiers, Mac Mahon forme un gouvernement « d’ordre moral ». En 1875, les lois constitutionnelles excluent les femmes du pouvoir politique, même si le pouvoir est déclaré universel. Le code civil n’est pas modifié. Sous la présidence de Jules Grévy, une politique libérale promouvant des valeurs « d’ordre et de progrès » est mise en place. Le combat des femmes pour leur émancipation resurgit et se développe autour d’associations féministes. Les plus nombreuses cherchent à modifier le statut juridique des femmes en réformant le Code civil alors qu’une minorité milite pour une égalité complète entre les sexes et le droit de vote. En 1878, le premier Congrès international du droit des femmes qui se tient à Paris, cherche à croiser tous les aspects de l’oppression des femmes, sans toutefois aborder le droit de vote. Au tournant des années 1880, les libertés fondamentales voient leur exercice garanti par différentes lois, mais les femmes mariées restent soumises à la tutelle maritale pour la profession, la disposition du salaire, le compte bancaire, la syndicalisation … Les mères n’ont pas l’autorité parentale et ne peuvent pas gérer leurs biens. Cependant l’importance accordée à l’instruction va entraîner des changements. L’enseignement élémentaire des citoyens et de leurs mères est la première préoccupation des Républicains. A partir des lois Jules Ferry, les « hussards noirs » dispensent dans des écoles souvent séparées, des contenus identiques, structurées autour d’une morale de la nation, de la patrie, du travail et du mérite. La plupart des écoles se trouvant dans les mairies, la devise républicaine entre également dans les esprits. Certaines institutrices, fortes de leur autonomie et de leur légitimation professionnelle s’engagent dans des associations féministes. L’enseignement secondaire se développe dans une moindre mesure et la loi de Camille Sée de 1880 permet la création des lycées féminins qui sont payants comme ceux des garçons. Lors de l’affaire Dreyfus, qui remet en cause les valeurs républicaines, le journal féministe La Fronde (18971903) prend parti pour Dreyfus. En janvier 1898, Maria Pognon y déclare « si nous ne demandons pas justice pour un condamné que nous avons lieu de croire innocent, nous n’avons pas le droit de réclamer justice pour nous ». Au contraire, beaucoup de femmes, entretenant des liens forts avec le clergé, s’affichent ouvertement antidreyfusardes. Les lois de 1901 et de 1905, consécutives à l’affaire Dreyfus, consolident le socle républicain mais vont susciter une forte résistance féminine conservatrice. En effet, en excluant les congrégations de la loi très libérale sur les associations de 1901, les Républicains déclenchent un important mouvement de résistance féminin catholique. Pétitions et manifestations tentent de s’opposer au vote de la loi, mais en vain. Entre Août 1901 et Mai 1902, des ligues se forment, dont la Ligue des femmes françaises, pour peser sur les élections de 1902 et faire barrage au parti radical. Elles rassemblent plus de 500 000 ligueuses et adhèrent à une image de la femme soumise et cantonnée dans la sphère privée. Elles se mobiliseront à nouveau, lors de la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat de 1905. Parallèlement les féministes continuent à réclamer le droit de vote. Lors des élections de 1910, une vingtaine de candidates se présentent alors qu’elles sont inéligibles, cela attire l’attention et marque un tournant dans leurs revendications. Mais pendant « la Belle Epoque » ce sont les luttes sociales qui occupent le devant de la scène. Les ouvrières mènent quelques actions spectaculaires contre leur surexploitation, mais elles sont peu soutenues par les syndicats, qui restent marqués par Proudhon et ne défendent pas l’égalité des salaires. L’Etat finit par interdire le travail de nuit des femmes et limiter leur journée de travail en 1882, et au début du XXème siècle, une politique de protection de la maternité voit le jour. Le « siècle » se clôt par une grande manifestation réclamant le suffrage féminin en Juillet 1914. Stéphanie Barthélémy – [email protected]