Le « back » au service du « front »
Transcription
Le « back » au service du « front »
Le « back » au service du « front » dans un environnement omni-canal Offrir un large choix de produits sans cesse renouvelé, informer en temps réel et optimiser la mise à disposition des produits sont trois enjeux clefs des distributeurs aujourd’hui. Pour y répondre, ils doivent mettre en œuvre des Supply Chains omni-canal rentables, ce qui suppose notamment de revoir leur back-office… a mise en œuvre de modèles Supply Chain omni-canal Une cohabitation de canaux en silos est devenue nécessaire pour répondre aux besoins au lieu de l’omni-canal des consommateurs connectés. Pour capter et fidéliser Si l’objectif est clairement d’offrir aux consommateurs les clients, les distributeurs doivent disposer d’une offre de une solution harmonisée quel que soit leur parcours d’achat, service répondant à trois exigences majeures. dans la réalité, on constate que les enseignes ont de réelles Tout d’abord, offrir un choix étendu et renouvelé de pro- difficultés à traiter les différentes combinaisons de flux duits et services on-line. Cela se caractérise par un accès d’informations et physiques caractérisant l’omni-canal. à une large gamme de produits, sur l’ensemble des canaux Dans les faits, les enseignes font bien souvent cohabiter les de vente et une adaptation rapide de l’offre aux évolu- différents canaux en silo. Certes, mutualiser les stocks, les tions de la demande par des ventes flash, des offres pro- processus de préparation, le transport ou la gestion de la motionnelles ou saisonnières. demande entre les canaux n’est pas toujours évident compte Les distributeurs doivent également fournir en temps tenu des spécificités de chaque canal mais la satisfaction réel de l’information à leurs clients. Les caractéristiques des consommateurs digitaux reste une condition sine techniques, la disponibilité du stock et la date de livrai- qua non de succès. son prévisionnelle d’un produit quel que soit le canal sont des « must ». Pouvoir compléter ses informations Trois questions clefs « génériques » par des informations « propres » aux et cinq piliers interdépendants clients (derniers achats, points cadeaux, suivi com- La réussite économique d’une Supply Chain omni-canal mandes, …) quel que soit le moyen d’interaction on-line répond à trois questions majeures : (internet, smartphone, bornes interactives…) et off-line ■ Quelle promesse client rentable ? répond aux principaux comporteIllustration 1 : Une évolution du modèle de Supply Chain ments d’achat des consommateurs (Showrooming, Research Online, Purchase Offline, Full digital). Enfin, les distributeurs doivent Optimiser le Time-To-Consumer à travers un réseau de distribution étendu offrant un large éventail de possibilités de modes de livraisons (LAD, point relais, Click to collect, lockers, au bureau…) et d’options de livraisons et retours (délais, horaires, personnalisation haut de gamme, modification de lieu de livraison…). Fabrice Dalla Muta Directeur Operations Excellence Capgemini Consulting [email protected] 108 Stephane Ghioldi Directeur Operations Excellence Capgemini Consulting [email protected] N°88 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - OCTOBRE 2014 ©CAPGEMINI CONSULTING ©CAPGEMINI CONSULTING ©CAPGEMINI CONSULTING Thierry Desnos Directeur Operations Excellence Capgemini Consulting [email protected] ©CAPGEMINI CONSULTING L ©CAPGEMINI CONSULTING Illustration 2 : Les différents flux possibles dans un schéma omni-canal ■ Quel modèle opérationnel associé ? ■ Quels outils et comment les déployer ? Pour pouvoir répondre à ces trois questions, un projet omni-canal repose sur la maîtrise de cinq piliers interdépendants : ■ Une harmonisation des front-offices pour les différents canaux de vente. Ce sujet est de mieux en mieux appréhendé par les entreprises qui ont développé une approche « désilotée », à travers notamment la mise en place d’une politique cohérente en termes de prix de vente et de promotions (publicité, e-mailing, SMS, appels téléphoniques, e-marketing). ■ La définition d’un nouveau modèle de Supply Chain back office pour réconcilier la promesse client avec les capacités offertes par la Supply Chain à moindre coût. Ce modèle s’appuie sur une nouvelle politique d’allocation des commandes avec la prise en compte simultanée des inducteurs décisionnels délais, coûts, attentes clients et une visibilité totale des stocks sur l’ensemble des canaux, le tout en interaction avec l’ensemble des partenaires (y compris les fournisseurs). Cette évolution de modèle implique une refonte totale de la politique des stocks avec notamment une relocalisation et une mutualisation des stocks sur l’ensemble de la chaîne de valeur omni-canal. Enfin, pour accompagner cette mutation de modèle, il est indispensable de se poser la question du choix des prestataires logistique et transport. Ce choix se complexifie dans une logique de développement à l’international compte-tenu de l’hétérogénéité de l’implantation et de la capacité des acteurs à fournir une prestation équivalente au niveau européen. ■ Une exploitation du « Big data » par la capacité à traiter/stocker/interpréter un volume de données reflétant le comportement des consommateurs quel que soit le canal de vente utilisé. L’équilibre coûts/service est le véritable talon d’Achille de ces nouveaux modèles. Il est donc vital de structurer à partir de ces données un suivi des coûts pour garantir la viabilité de ces nouveaux modèles. Par exemple, utiliser le taux de transformation de choix de point relais pour suggérer des zones peu attractives aux acteurs de la livraison, exploiter la connaissance des habitudes clients pour délivrer le juste niveau de service (pas de J+1 systématique si finalement la majorité des attentes sont un J+3 fiable), créer des bases de données clients pour orienter les horaires de passage dans les tournées… ■ Un système d’information capable d’assurer une réponse cohérente quel que soit le canal de demande. Pour ce faire, une architecture découplant les couches de demande, de pilotage de la Supply Chain et de l’exécution logistique soit être définie. ■ Enfin, la gestion du changement qui requiert une nécessaire évolution des organisations Supply Chains en silo vers une équipe Supply Chain omni-canal. Force est de constater qu’aujourd’hui les différentes enseignes sont organisées avec des BU et des Supply Chains par canal. Au-delà de l’organisation, une évolution des relations entre la Supply Chain et les autres fonctions de l’entreprise, notamment les équipes commerciales et marketing, devient quasi obligatoire. Les principes d’organisation de certains pure players avec des structures mixtes Supply Chain/Marketing en est un bon exemple. Le back-office reste à améliorer… Si le front office a atteint un premier niveau de maturité, le modèle Supply Chain des enseignes doit subir une profonde mutation pour garantir la rentabilité et l’efficacité des offres de service proposées. L’un des premiers chantiers est de repenser la politique des stocks dans ce nouveau schéma de distribution. Si aujourd’hui plusieurs approches peuvent être mises en œuvre, les grandes tendances sont à la mutualisation à minima des stocks entre les différents canaux et à la mise en place de stocks de proximité via les magasins et/ou des entrepôts à proximité des consommateurs. Certaines familles de produits ne seront pas stockées compte-tenu de leur faible rotation ou de leurs caractéristiques physiques (ex : les salons de jardin, piscines, etc.). Dans ce cas, un pilotage fin de l’approvisionnement avec les fournisseurs est requis puisque la livraison au consommateur s’effectuera en direct. Une fois les principes de localisation des stocks fixés, il convient de développer des systèmes et des processus pour suivre et gérer avec précision ces stocks dans le réseau (fournisseurs, entrepôts et magasins). Ces informations doivent être rigoureusement fiables et disponibles pour être partagées avec les consommateurs et garantir ainsi l’excellence du service. Plusieurs solutions peuvent améliorer cette fiabilité : l’identification des articles au travers de normes standard de codification, l’utilisation de la RFID dont les pilotes se multiplient dans le textile, l’identification des articles à la source chez les fabricants, le partenariat avec des 3PLs disposant de systèmes de Track & Trace offrant une visibilité des articles tout au long de la chaîne. … dont la gestion du dernier km et des retours Autre chantier de ce nouveau modèle, la gestion du dernier kilomètre. La multiplication des petites commandes a favorisé l’élargissement du panel de transporteurs traditionnel du BtoB. Dans un environnement omni-canal, les distributeurs doivent désormais gérer un panel de trans- OCTOBRE 2014 - SUPPLY CHAIN MAGAZINE ■ N°88 109 Comment faire évoluer le back-office La mise à niveaux des WMS est parfois nécessaire, surtout lorsqu’il est question de gérer à la fois des flux de préparation pour les consommateurs finaux et des flux de préparation de réapprovisionnement de magasins ou de distributeurs. Cependant, le point crucial se situe en amont, dans la couche qui va traiter les interactions entre la demande client et la commande prête à être exécutée par la logistique. Cette couche de gestion des commandes s’appuie sur des outils de type Order Management System (OMS) qui s’articule autour de quatre briques fonctionnelles principales : la gestion des demandes clients (exemples : demande d’information sur l’assortiment, demande de disponibilité produit, capture des commandes, ...) la gestion des ordres de réapprovisionnement des magasins de détail, la gestion du stock commercial (visibilité des stocks dans le réseau de distribution interne à l’entreprise, dans le réseau de magasins, qu’ils soient gérés en propre ou en mode franchisé, des stocks retours et calcul du disponible à la vente) et enfin l’orchestration des commandes qui fait le lien entre demande client et le processus d’exé- 110 N°88 ■ SUPPLY CHAIN MAGAZINE - OCTOBRE 2014 cution de celle-ci (réservation, préparation, expédition). Aux niveaux stratégiques et tactiques, l’orchestration permet d’aiguiller les commandes vers les bons points de livraison sur la base de critères tels que les priorités clients, les coûts de service, les contraintes de ressource en entrepôt, les caractéristiques produits et de gérer les différentes étapes de la préparation via des workflows adaptés aux types de flux. Au niveau opérationnel, l’orchestration assure une visibilité complète du cycle de vie des commandes au travers de tableaux de bord dédiés au service client et à l’équipe des logisticiens. L’orchestration optimise les activités de préparation : rétention et/ou regroupement d’ordres de préparation, regroupement d’ordres de transfert dans le réseau de distribution. La quantité de données à gérer étant importante, il est nécessaire de pouvoir traiter les commandes par exception et de s’appuyer sur des outils de simulation de scénarios. Illustration 4 : Vers un modèle d’orchestration ©CAPGEMINI CONSULTING porteurs élargi en fonction du poids, du délai de livraison et du lieu de livraison. Il n’y pas d’acteurs logistique qui puissent garantir une offre compétitive clé en main sur l’ensemble des principaux pays consommateurs en Europe. Il faudra donc en fonction de la montée en puissance des volumes et dans le cadre d’une offre de service adaptée au marché local, composer avec des infrastructures et acteurs logistiques locaux de manière la plus intégrée possible. Enfin, proposer une gestion optimale des flux retour est également une composante forte de ce nouveau modèle. Les retours représentent un véritable argument de vente de l’omni-canal qui doit être intégré dès la construction du réseau logistique. Le coût d’un retour traditionnel est estimé à trois fois le prix de la livraison. La fluidité de la gestion des retours est clé pour les clients et constitue de fait un élément à part entière de l’offre (75 % des acheteurs s’interrogent sur la politique retour avant l’achat). Plusieurs solutions existent pour optimiser les flux retours : renforcer le service après-vente pour limiter au maximum les flux retours et inciter le consommateur à privilégier les retours en magasin ou en point relais, massifier les retours depuis les magasins/points relais vers les entrepôts de traitement des retours ou faire des magasins des points de concentration (collecte) des flux retour (tri, réintégration en stock, destruction…). La structuration d’un modèle de Supply Chain omni-canal est complexe compte tenu du nombre de chantiers qu’il convient d’adresser. Pour faciliter le développement de cette transversalité les enseignes doivent faire évoluer également leurs systèmes d’information back office. ©CAPGEMINI CONSULTING Illustration 3 : Architecture de l’Order Management Des impacts majeurs à ne pas sous estimer La mise en place d’un modèle omni-canal impacte les compétences et l’organisation au sein de l’entreprise mais aussi les relations avec les partenaires. Les fonctions Supply Chain doivent être « désilotées » afin de mutualiser les leviers d’optimisation quel que soit le canal de distribution. La dichotomie traditionnelle Business-To-Business (B2B)/BusinessTo-Consumer (B2C) n’existe plus, nous sommes désormais entrés dans l’ère du B2B2C qui requiert une plus grande culture de collaboration et des acteurs qui ont la compétence et les outils pour piloter l’ensemble de la Supply Chain. ■