Les Cahiers
Transcription
Les Cahiers
LES CAHIERS Internationaux Le message d’Emmanuel Macron Ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique Success story : Bioloka à l'honneur ‘‘Investissez ’’ N° 104 ■ © P. Vedrune - PME Bercy Interview du CEO Samuel Levine-Parisi Les douanes, du contrôle au conseil Le Canada : votre relais de croissance à l'international Energie, voir plus loin que la baisse des cours La Suisse : économie solide et diversifiée La Roumanie : un pays qui conserve son attractivité SOMMAIRE GÉNÉRAL Magazine du Comité Français de la Chambre de Commerce Internationale page 2 LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Éditorial par Gérard Worms ■ Interview exclusive d'Emmanuel Macron ■ Politique générale ■ par Jeff Hardy, Louise Kantrow, Mathias Audit, Vanessa Saint-Blanquat et Catherine Cassière ■ Autorégulation par Anne-Sophie Bodin ■ Résolution des litiges par Laurent Jaeger Dossier : Les grandes mutations à l’œuvre dans l’économie mondiale ■ Points de vue ■ par Delphine Sarfati-Sobreira, Michel Oldenburg et Alice Pezard ■ Événements par Raphaël Barazza et Christine Lecuyer-Thieffry ■ Formations et séminaires Les Cahiers d’Echanges Internationaux Le sommaire détaillé de cette partie de la revue se trouve en page 33 ■ Territoires ……………………………………………………………………………………………… 36 ■ L’énergie, secteur pétrolier et gazier …………………………… 71 ■ Stratégies et marchés internationaux - Réussir au Canada ………………………… 78 ………………………………………………………… 81 - La Roumanie conserve son attractivité ……… 122 - L’Espagne vers une nouvelle croissance …………………………………………………………………………… 130 - La Suisse une économie solide et diversifiée …………………………………………………… 140 1 Magazine du Comité Français de la Chambre de Commerce Internationale L'économie mondiale évolue vers un nouveau modèle de croissance …………………………………………………………………………3 ■ Application extraterritoriale du droit américain : un enjeu pour les entreprises françaises ………………………… 10 Mathias AUDIT, Professeur agrégé des Facultés de droit, Avocat associé, Steering par Gérard WORMS, Président d’ICC France INTERVIEW EXCLUSIVE D'EMMANUEL MACRON, Ministre de l'Economie, de l'Industrie et du Numérique « Aux chefs d'entreprise, je ne dirai qu'une chose : investissez ! » …………………………………………………………………… 4 ■ Valeur en douane et prix de transfert : l’OMD intègre les propositions de l’ICC ………………………… 11 Vanessa SAINT-BLANQUAT, Directrice de mission pour les Affaires fiscales européennes et internationales au Medef, et Catherine CASSIÈRE, Directrice fiscale internationale de Alstom Power AUTORÉGULATION POLITIQUE GÉNÉRALE ■ B20 d'Ankara : 19 recommandations pour stimuler la croissance et l'emploi. ………………………… 8 Jeff HARDY, Directeur, ICC G20 Business Advisory Council ■ ODD 2030 : 17 défis et autant d'opportunités pour les entreprises ………………………………………………………… 9 Louise KANTROW, Représentante permanente de la Chambre de commerce internationale à l'ONU ■ PME : l'enjeu de la conformité Concurrence …………………………………………………………………… 12 Anne-Sophie BODIN, Directeur juridique Droit Européen et de la Concurrence du groupe Areva RÉSOLUTION DES LITIGES ■ Désignation d’arbitres : les bonnes pratiques ……………… 13 Laurent JAEGER, Avocat associé, Orrick Rambaud Martel DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE ■ Présentation du dossier ……………………………………………………………… 15 François GEORGES, Délégué général d'ICC France sous le signe de la précaution tant que nous n'aurons pas débarrassé l'économie des entreprises non compétitives » ………………………………………… 16 Hans-Werner SINN, Professeur d'économie et de finances publiques à l'Université de Munich, président de l'IFO, l'institut de conjoncture de Munich ■ «Nous allons vers un modèle où les différentes régions du monde seront moins interdépendantes» …………………… 17 Patrick ARTUS, Chief economist de Natixis et Professeur à l'Université Paris I-Panthéon-Sorbonne ………… 19 Jacques LESOURNE, Économiste, Président du Comité de direction de FutuRIS POINTS DE VUE ■ Le numérique révolutionne les Business Models et les modes de vie ……………………………………………………………………… 23 Compte-rendu de l’intervention de Maurice LEVY, Président du Directoire de Publicis Groupe à l’AG 2015 d’ICC France ■ «Les entreprises doivent penser et agir avec frugalité, c'est-à-dire créer davantage de valeur en consommant moins de ressources» ……………………………………………………………………… 24 Navi RADJOU, Conseiller en Innovation & Leadership, Co-auteur de « L'Innovation frugale, comment faire mieux avec moins » encore insuffisamment exploitées…………………………………………… 26 Albert YUMA-MULIMBI, Président de la CPCCAF, Président de la Fédération des Entreprises du Congo ÉVÉNEMENTS …………………… 27 Delphine SARFATI-SOBREIRA, Directrice générale de l’Union des Fabricants (Unifab) ■ V.I.E : la solution RH pour le développement export des PME …………………………………………………………………………………… 28 Michel OLDENBURG, Directeur du V.I.E. de Business France ■ Un atout pour l'Europe industrielle : le brevet unitaire et la juridiction unifiée ……………………………………………………………………… 29 2 21 ■ Afrique : des besoins énormes et des ressources ■ Réchauffement : qu'attendons-nous pour agir ? Alice PEZARD, Avocat et Conseiller honoraire à la Cour de Cassation ………………………………………………… Compte-rendu d’une conférence de Pascal LAMY, ancien Directeur Général de l’OMC ■ « Il n'y aura pas de nouveau cycle de croissance ■ L'Unifab a déclaré la guerre à la contrefaçon ■ Commerce mondial : un nouveau monde placé ■ Les nouvelles règles du jeu douanier en Europe ……………… 30 Raphaël BARAZZA, Avocat au barreau de Paris, Membre de la Commission Douanes d'ICC France ■ Retour sur trois années d’application du Règlement d’arbitrage de la CCI ………………………………………… 31 Christine LECUYER-THIEFFRY, Associée co-fondatrice de Thieffry et Associés et Avocate au barreau de Paris FORMATIONS ET SÉMINAIRES ■ Programme 2016 d’ICC France ……………………………………………………… 32 ECHANGES INTERNATIONAUX Magazine du Comité Français de la Chambre de Commerce Internationale Magazine du Comité Français de la Chambre de Commerce Internationale ÉDITORIAL ©DR L'économie mondiale évolue vers un nouveau modèle de croissance N°104 Éditeur : Comité Français de la Chambre de Commerce Internationale 9 rue d’Anjou - 75008 Paris Tél : 01 42 65 12 66 Fax : 01 49 24 06 39 www.icc-france.fr Directeur de la publication : Gérard WORMS Rédacteur en chef : François GEORGES Conseillère éditoriale : Marie-Paule VIRARD Régie publicitaire : Editions OPAS 41, rue Saint-Sébastien - 75011 Paris Tél. : 01 49 77 49 00 Fax : 01 49 77 49 46 Éditeur conseil : Jean-Pierre KALFON Directeur commercial : David ADAM Dépôt légal 92892 Imprimeur : PRINTCORP Comme c’est, j’en suis sûr, le cas de nos lecteurs, nos pensées vont d’abord à toutes les victimes des attentats tragiques du 13 novembre. Parmi elles, la jeunesse a payé un tribut particulièrement lourd, cette jeunesse dont certains commentateurs ont osé dire qu’elle était insouciante, sous prétexte qu’elle aime à s’attabler à la terrasse d’un café ou aller au concert. En vérité, cette génération, loin d’être insouciante, cherche quasi désespérément à concilier ce goût de vivre et ses angoisses pour l’avenir. C’est justement sur cet avenir, au moins en matière économique, que nous avons voulu nous pencher dans le dossier central de la présente livraison. Il s’agit de scruter du mieux possible les changements structurels les plus marquants qui vont affecter l’économie mondiale, de la révolution digitale si bien décrite par Maurice Lévy lors de notre Assemblée Générale à la transformation de l’Afrique, en passant par le second «rapport Stern», résumé par Jacques Lesourne, sur les conséquences macro-économiques du changement climatique, sans oublier bien sûr la mutation à l’œuvre dans les négociations commerciales internationales, que nul mieux que Pascal Lamy ne pouvait commenter. Et c’est le ministre Emmanuel Macron qui a bien voulu intervenir pour nous donner sa vision des grandes mutations économiques. Nous lui sommes vivement reconnaissants d’avoir accepté de répondre à nos questions. La Chambre de Commerce Internationale a connu par ailleurs un quadrimestre de rentrée particulièrement actif : cela a été le cas pour le B20 et le G20 tenus en Turquie, notre premier viceprésident, Sunil Mittal et Marcus Wallenberg, président de notre G20 Advisory Council, ayant tenu les premiers rôles à Antalya, face aux chefs d’État et de gouvernement. Cela a été vrai aussi aux Nations- Unies, lors de l’adoption des nouveaux objectifs du développement durable faisant suite à ceux du Millénaire, objectifs dans la mise au point desquels l’ICC s'est fortement impliquée. S’agissant de notre métier central, la régulation du commerce international, nos Comités s’activent à travers le monde pour hâter la ratification du «Trade Facilitation Agreement», dont l’OMC vient de redire que, comme nous l’avions annoncé nous-mêmes pendant sa négociation, il pourrait, une fois pleinement mis en place, entraîner un accroissement des échanges internationaux – qui en ont bien besoin – vu leur bas niveau actuel de 1 000 milliards de dollars par an. L’Union Européenne figure parmi les premiers acteurs ayant ratifié cet Accord, mais il faut arriver à 108, dans un avenir que nous espérons proche, pour qu’il entre en vigueur. Je mentionnerai enfin l’envoi à tous les membres d’ICC France d’une liste de 7 recommandations majeures pour lutter contre le réchauffement climatique, liste qui a été approuvée à l’unanimité par notre Conseil d’administration. Au-delà de la COP21, nous estimons en effet que la codification des bonnes pratiques et la supervision de leur application la plus large possible sont inscrites dans l’ADN de l’ICC, comme le montre ce que nous faisons déjà pour les Incoterms, le Trade Finance, la lutte anti-corruption ou l’usage de la publicité par exemple. Nous suivrons donc la façon dont nos recommandations seront mises en œuvre avec une attention toute particulière. Je terminerai ce « mot du Président » en vous exprimant à tous, chers lecteurs, en ces temps d’attentats, d’incertitudes mais aussi d’innovations porteuses d’avenir, mes vœux, les vœux très chaleureux d’ICC France, pour vous, les vôtres et vos entreprises. ÉCHANGES INTERNATIONAUX EST LE SEUL MAGAZINE D’INFORMATION D’ICC FRANCE, COMITÉ NATIONAL FRANÇAIS DE LA CHAMBRE DE COMMERCE INTERNATIONALE Gérard WORMS Président d’ICC France Président d’honneur de la Chambre de Commerce Internationale 3 sur et INTERVIEW EXCLUSIVE INTERVIEW EXCLUSIVE D'EMMANUEL MACRON, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DU NUMÉRIQUE « Aux chefs d'entreprise, je ne dirai qu'une chose : investissez ! » ©DR Au moment où la croissance de l'économie mondiale semble entrer dans une nouvelle phase, Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, de l'Industrie et du Numérique, réaffirme sa foi dans la capacité de la France à améliorer son potentiel de croissance et exhorte les acteurs économiques à prendre des risques, à mener la bataille de l'innovation et à investir. 4 INTERVIEW EXCLUSIVE INTERVIEW EXCLUSIVE D'EMMANUEL MACRON, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DU NUMÉRIQUE changes Internationaux. Quelle est votre analyse du ralentissement de la croissance mondiale : est-il conjoncturel ou structurel ? Emmanuel Macron. A court terme, les évolutions de la croissance mondiale sont extrêmement erratiques. Ainsi, si le FMI prévoit un ralentissement de la croissance mondiale en 2015, il table aussi sur une reprise en 2016. Difficile d’en tirer des conclusions hâtives et générales. E Il faut donc étudier le temps long. Au cours des vingt dernières années, le niveau de la croissance mondiale a été exceptionnellement élevé : l’entrée des pays communistes dans l’économie de marché, les potentiels immenses de rattrapage de certaines économies, notamment asiatiques, ainsi que l’essor des TIC ont permis un éclatement inédit des chaînes de valeur ajoutée. Aujourd’hui, un « atterrissage » paraît naturel. Selon l’OCDE, la croissance mondiale devrait s’établir en moyenne à 3 % l'an entre 2010 et 2060. C’est moins qu’entre 2001 et 2010 (3,5 %), mais cela signifie tout de même que le PIB mondial sera multiplié par 4 en cinquante ans ! ©DR Par ailleurs, il faut distinguer selon les régions, même à court terme. La croissance dans les pays développés ne ralentit pas, elle accélère ! C’est le cas aux États-Unis, où le FMI prévoit une croissance de 2,6 % en 2015, contre 2,4 % en 2014. C’est aussi le cas en zone euro, où la reprise est bien installée : 1,5 % prévu en 2015 contre 0,9 % en 2014. En revanche, la croissance ralentit dans les pays émergents : elle passe de 4,6 % en 2014 à 4 % en 2015. Pour un certain nombre de ces pays, il y a évidemment des facteurs conjoncturels, comme la baisse des prix des matières premières. Mais il y a aussi, et c’est le cas de la Chine, un ralentissement plus structurel. Nous savions depuis des années que des taux de croissance supérieurs à 10 % n’étaient pas soutenables et que son rattrapage deviendrait plus lent, comme pour tous les pays qui se rapprochent de la frontière technologique. Il est donc paradoxal de s’être inquiété hier de la croissance exceptionnellement élevée de la Chine et de s’inquiéter aujourd’hui de son ralentissement. Le modèle de croissance de ce pays se transforme. Il est de moins en moins fondé sur l’investissement et l’industrie et de plus en plus sur la consommation et les services. Les autorités chinoises le savent : elles doivent continuer à adapter leurs politiques et leurs régulations pour accompagner ce tournant structurel. A quel rythme, selon quelles modalités, avec quelles priorités ? Voilà les questions décisives qu’il leur faudra trancher. E.I. Et s’agissant du ralentissement du commerce mondial ? E.M. On peut faire la même analyse ! Le ralentissement des échanges internationaux est à la fois conjoncturel et structurel. Certes, il y a eu une chute très forte pendant la crise financière. Mais sept ans plus tard, Bio Express. Emmanuel Macron. « Le libéralisme est une valeur de gauche ». Ministre de l’Économie, de l'Industrie et du Numérique depuis le 26 août 2014, Emmanuel Macron, 37 ans (38, le 21 décembre prochain), est celui qui, au sein du gouvernement Valls, n'hésite pas à parler de tous les sujets et à bousculer les tabous qu'il s'agisse de parler des « valeurs » de la gauche, du temps de travail ou du statut des fonctionnaires. Atypique -il a débuté sa carrière comme banquier d'affaires à la Banque Rothschild et Cie avant d'en devenir associégérant de 2011 à 2012-, celui qui fut pendant deux ans l'inspirateur de la politique économique de François Hollande à l’Élysée, rêve d'incarner une gauche qui saurait réconcilier responsabilité et solidarité, égalité et liberté. ils n’ont pas retrouvé leur tendance d’avant-crise. Alors que la croissance du commerce mondial était deux fois plus élevée que celle du PIB avant 2008, elle peine aujourd'hui à la dépasser. Avons-nous basculé dans un nouveau régime ? Regardons encore du côté de la Chine : son intégration au commerce mondial a été l’un des moteurs de la croissance des échanges. Mais elle est désormais pleinement intégrée ! De même, la fragmentation du processus de production en un grand nombre de tâches effectuées dans des pays différents a joué un rôle majeur dans l'accélération du commerce mondial au cours des années 1990 et 2000. Or, on observe un ralentissement de la dynamique liée au fractionnement des chaînes de valeur mondiales. Les spécialistes d e s p ro ce ss u s d e p ro d u c t i o n considèrent qu’ils vont davantage se fonder sur des réseaux régionaux de production ou même se relocaliser. Bref, le fait que la croissance des échanges commerciaux dépasse durablement celle du revenu mondial n’a jamais rien eu de naturel. Ce que l’on constate aujourd’hui ne signifie pas donc pas la fin de la mondialisation, le retour au statu quo ante, bien au contraire. Mais nous entrons dans une phase nouvelle. E.I. Un débat se développe des deux côtés de l'Atlantique autour du thème de la « stagnation séculaire ». N'est-ce pas paradoxal au moment où la révolution numérique nourrit une grande vague d'innovations ? E.M. Le débat est vif et il n’est pas tranché. Il y a deux interprétations possibles. Certains économistes estiment que la « stagnation séculaire » se trouve du côté de l’offre avec un ralentissement durable du progrès technique. D'autres expliquent cette faible croissance par un phénomène de demande, à travers une baisse prolongée de la consommation et de l’investissement. E.I. Que pensez-vous de ces deux interprétations ? E.M. La première met en évidence un paradoxe : le déferlement de technologies disruptives ne produit pas une hausse significative des gains de 5 INTERVIEW EXCLUSIVE ©DR INTERVIEW EXCLUSIVE D'EMMANUEL MACRON, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DU NUMÉRIQUE je n’ai aucun doute sur la capacité de la France à améliorer ses gains de productivité et son potentiel de croissance. Nous avons encore du travail à faire et des opportunités à saisir pour rattraper les meilleurs élèves de la classe en la matière. productivité. Pourtant, l’attente est là : ces innovations sont valorisées à des niveaux record sur les marchés boursiers. De vraies ruptures technologiques sont à l’œuvre. La révolution numérique transforme en profondeur notre quotidien en apportant de nouveaux biens, de nouveaux services et de nouveaux usages. La portée du 6 modèle qui émerge est d’ailleurs si large et si diffuse qu’elle prend de cours les statistiques, qui ne parviennent pas toujours à l’intégrer dans le calcul du PIB : Blablacar, par exemple, qui permet une utilisation plus efficace et plus économe de la voiture, ne voit pratiquement pas son activité comptabilisée dans le PIB. Cela prouve que des gains de productivité sont là, mais que nous ne parvenons pas toujours à les mesurer. Par ailleurs, si les nouvelles technologies sont synonymes de potentiel, c’est à nous de les transformer en opportunités économiques réelles. Depuis quinze ans, c’est moins le progrès technique qui a ralenti que sa vitesse de diffusion. Il faut donc lever toutes les barrières qui la freinent. Avec la seconde interprétation, je partage l’idée que les crises financières laissent des traces persistantes. Le risque de déflation en est un. Il a bien été identifié par la BCE qui n’a pas hésité, avec son programme de Quantitative Easing, à bousculer l’orthodoxie monétaire. Mais la BCE ne peut pas tout et la reprise qui s’amorce en zone euro doit être amplifiée grâce, notamment, à l’investissement. C'est l’investissement qui nous permettra de répondre au risque de la stagnation séculaire sur les deux tableaux : celui de la demande à court terme et celui de la productivité sur le long terme. C’est pourquoi la France a activement soutenu le plan Juncker et s’est engagée à mobiliser 8 milliards d’euros de co-financements. Au-delà du débat académique, je n’ai aucun doute sur la capacité de la France à améliorer ses gains de productivité et son potentiel de croissance. INTERVIEW EXCLUSIVE INTERVIEW EXCLUSIVE D'EMMANUEL MACRON, MINISTRE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DU NUMÉRIQUE je suis favorable à la création d’un budget de la zone euro qui permettrait de stabiliser les aléas du cycle économique et de financer des investissements favorisant nos nouveaux modèles de croissance. Nous avons encore du travail à faire et des opportunités à saisir pour rattraper les meilleurs élèves de la classe en la matière. E.I. Quelles mesures faut-il mettre en œuvre afin de réduire l'insécurité économique, rendre nos modèles plus résilients et imaginer de nouveaux relais de croissance durable ? E.M. Nous devons mieux assumer les interdépendances entre nos économies et en tirer toutes les conséquences. Cela commence en zone euro. Nous avons déjà beaucoup fait pour la rendre plus résiliente aux chocs. N o u s a vo n s m i s e n p l a ce u n Mécanisme Européen de Stabilité, afin d’aider les pays en proie aux crises financières. Nous avons également instauré une Union Bancaire pour rompre le cercle vicieux entre risques souverain et bancaire. Ce sont là des progrès significatifs, mais nous devons être plus ambitieux. L’union bancaire n’est pas encore totalement achevée et nous pouvons aller plus loin avec une garantie commune des dépôts. Par ailleurs, pour accélérer la convergence des économies européennes, je suis favorable à la création d’un budget de la zone euro qui permettrait de stabiliser les aléas du cycle économique et de financer des investissements favorisant nos nouveaux modèles de croissance. E.I. La plupart des grands pays ont entrepris de faire baisser leurs monnaies, rallumant les craintes d'un retour en force du chacun pour soi dans un contexte de croissance globale modeste. E.M. Ce n’est pas le cas pour l’euro. Il faut rappeler que son existence même vise à éviter une guerre des monnaies entre pays européens. Par ailleurs, s’il est vrai que l’euro s’est déprécié cette année, c’est parce qu’il était largement surévalué. Au niveau mondial, et dans le contexte de très faible inflation dont nous avons parlé, les politiques monétaires expansionnistes permettent d’abord de soutenir le crédit et l’investissement. Toutefois, il est vrai que certains sont tentés d’utiliser la politique monétaire pour regagner en compétitivité aux dépens des autres. C’est cela que nous devons surveiller de très près. E.I. Quelles initiatives faut-il prendre rapidement pour replacer l'économie française dans la bagarre de la compétitivité au niveau mondial ? E.M. Avec le CICE et le Pacte de responsabilité, la France a déjà rétabli les conditions de sa compétitivitéprix. Le mouvement d'amaigrissement des marges que les entreprises ont subi depuis 2007 a ainsi été inversé depuis le 2ème trimestre 2014. C’était une première étape nécessaire. Maintenant, nous devons poursuivre la bataille pour la compétitivité hors coût, en particulier dans l’industrie : c’est le sens, notamment, de la sanctuarisation du CIR ou de la deuxième phase de la Nouvelle France Industrielle. Il faut également poursuivre le travail de simplification des procédures entamé dès le début du quinquennat de François Hollande. Il faut aussi accélérer la modernisation de notre marché du travail, pour le rendre plus souple, plus agile et pour donner une place plus grande au dialogue social. Il faut enfin lever les verrous réglementaires qui brident les créations d’emplois et entravent l’activité : c’est le sens de la loi pour l’activité et la croissance que je mets en œuvre. C’est l’un des objectifs de ma stratégie pour les nouvelles opportunités économiques. E.I. Dans cette optique, qu'attendez-vous des acteurs de l'économie en général, et des chefs d'entreprise en particulier, comme actions susceptibles de favoriser la création de richesses et d'emplois ? E.M. J’attends des acteurs économiques qu’ils prennent des risques, qu’ils osent et se battent pour innover. Aux chefs d’entreprise, je ne dirai qu’une chose : investissez ! Et pour ce faire, utilisez tous les mécanismes possibles. Je pense par exemple au dispositif de sur-amortissement qui permet d’amortir 140 % du montant des investissements productifs. Les dispositifs sont là et la conjoncture est plus favorable : il faut y aller ! E.I. Quelles sont les initiatives que la Chambre de Commerce Internationale devrait prendre pour favoriser une conclusion rapide des négociations relatives au Traité-Transatlantique et mener à son terme le cycle de négociations multilatérales de Doha ? E.M. Le commerce international est un moteur de la reprise. Nos exportations accélèrent. Elles enregistrent déjà un acquis de croissance de 5,8% pour cette année. Nous devons donc éviter les tentations protectionnistes. Les négociations commerciales en cours doivent permettre une ouverture concrète et réciproque des marchés. Dans la nouvelle donne de la mondialisation, ceci ne passe plus seulement par la baisse des droits de douane, mais également par une ouverture plus grande des marchés publics, la levée de barrières nontarifaires, ainsi que par des efforts de convergence réglementaire. Il ne s’agit pas d’un nivellement par le bas, mais au contraire d’un mouvement de convergence vers le haut, au bénéfice des consommateurs. Ce sont les enjeux essentiels des négociations en cours du TTIP. C’est pourquoi nous ne devons pas nous précipiter : il faut parvenir à un accord ambitieux et équilibré. La France est en première ligne pour défendre une position exigeante. J’attends des acteurs économiques qu’ils prennent des risques, qu’ils osent et se battent pour innover. Aux chefs d’entreprise, je ne dirai qu’une chose : investissez ! 7 POLITIQUE GÉNÉRALE B20 d'Ankara : 19 recommandations pour stimuler la croissance et l'emploi ©DR Jeff HARDY, directeur, ICC G20 Business Advisory Council Plus de 1 400 dirigeants et CEOs en provenance de 65 pays ainsi que les ministres des Finances du G20 se sont retrouvés en septembre à Ankara pour la Conférence 2015 du B20. Le communiqué final de la réunion des chefs d'Etat et de gouvernement du G20 d'Antalya, les 15 et 16 novembre derniers, fait largement écho à leurs recommandations. our la sixième année consécutive, les dirigeants et CEO membres de la Chambre de commerce internationale ont apporté -lors de la réunion de septembre à Ankara- leur contribution active à la formulation des recommandations du B20 destinées au G20 qui s'est tenu en novembre à Antalya, au sud de la Turquie. Pendant trois jours, Terry McGraw, le président de la Chambre de commerce internationale, a fait entendre la voix et porté les propositions de la Chambre de commerce internationale, à la tête d'une délégation de dirigeants de l'ICC G20 Advisory Group composée notamment de Marcus Wallenberg, président de SEB et de l'ICC G20 Advisory Group, et de John Danilovich, secrétaire général d'ICC. Cette année, les membres du B20 ont insisté particulièrement sur la nécessité de renouer avec une croissance robuste grâce à une action collective inspirée des trois « I » mis en avant par la présidence turque du G20 : intégration, mise en œuvre (en anglais, implementation) et investissement. Pour mettre de l'ordre dans ses propositions, le B20 d'Ankara, présidé par Rifat Hisarcikhoglu, s'est organisé en six groupes de travail : échanges, infrastructures et investissement, financement de la croissance, emploi, lutte anti-corruption et PME et entrepreneuriat. Chaque groupe a identifié un certain nombre d'obstacles à la croissance et à l'emploi et préparé une série de recommandations qui, dès lors qu'elles seraient mises en œuvre, permettraient de stimuler l'activité P 8 économique et de créer des emplois au sein des pays du G20 et au-delà. Au total, le B20 a défini 19 recommandations et chargé le président turc Erdogan de les transmettre aux leaders du G20 réunis à Antalya en novembre 2015 : - 4 actions destinées à achever la mise en œuvre des politiques concertées dans le domaine des échanges, de la régulation financière globale, de la fiscalité et de la lutte anti-corruption ; - 4 actions destinées à se donner les moyens de corriger les déséquilibres macro-économiques, notamment en améliorant l'écosystème de l'investissement international ; - 6 actions destinées à favoriser l'intégration économique et sociale, notamment à travers une réforme des marchés du travail, l'augmentation de l'emploi des jeunes et du taux de participation, sans oublier une série d'actions destinées à favoriser le développement des PME ; - 5 actions destinées à faciliter la concurrence, notamment en favorisant le développement du digital dans le cadre des procédures douanières et en digitalisant la gestion des systèmes d'approvisionnement. Lors de la conférence, les participants ont particulièrement insisté cette année sur la nécessité de faciliter le développement international des PME qui emploient plus de deux tiers des salariés du secteur privé et sont à l'origine de plus de 80 % des créations d'emplois. C'est la raison pour laquelle le B20 a milité pour la création du World SME Forum (WSF) en association avec l'Union des chambres de commerce de Turquie. Une initiative officiellement saluée par les ministres des Finances du G20 et par l'Association des banquiers centraux. La question de l'amélioration de la coopération internationale a également fait partie des sujets de fond abordés lors du B20 turc où fut créé le B20 International Business Advisory Council (IBAC), une instance présidée par Muthar Kent, CEO et président de Coca-Cola et composée de CEOs et de présidents d'association issus des pays du G20. Sa mission : améliorer le dialogue entre le monde des affaires et les gouvernements autour des décisions susceptibles de répondre concrètement aux attentes des entreprises. L'ICC se réjouit que, dans son communiqué final, le G20 d'Antalya (15 et 16 novembre) soutienne les recommandations du B20 en faveur du développement du commerce mondial, de l'investissement international et de la création d'emplois pour tous, attire l'attention sur les risques qui pèsent sur la propriété intellectuelle et approuve la création du World SME Forum. POLITIQUE GÉNÉRALE ODD 2030 : 17 défis et autant d'opportunités pour les entreprises (1) ©DR Louise KANTROW, Représentante permanente de la Chambre de commerce internationale à l'ONU Réunis à New-York en septembre dernier, les 193 pays membres de l'ONU se sont donnés une nouvelle feuille de route en matière de développement. L'agenda 2030 et ses 17 Objectifs de développement durable (ODD) ont vocation à donner un nouvel élan aux Objectifs du millénaire et placent les entreprises au cœur du dispositif. n septembre dernier, les 193 p a y s m e m b re s ré u n i s à New-York pour l'assemblée générale des Nations-Unies ont donné le coup de d'envoi d'un agenda ambitieux à l'horizon 2030. Il s'agit de 17 Objectifs de développement durable (ODD) qui doivent permettre à l'ensemble des acteurs de la communauté internationale (gouvernements, secteur privé et société civile) de prolonger les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) définis en 2000 et d'atteindre ceux qui sont encore en suspend. E Une nouvelle approche. Désormais, la pauvreté affecte essentiellement les pays à revenus moyens. Bien qu'encore pertinente, l'Aide publique au développement (APD) n'est plus suffisante pour stimuler la croissance. La révolution technologique a certes rendu le monde plus petit, mais cette convergence a aussi révélé le fossé creusé en matière d'inégalités aussi bien entre les pays qu'à l'intérieur de chaque pays, inégalités qu'il est impossible d'ignorer plus longtemps. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère marquée par la compétition pour la terre, l'eau, l'alimentation et l'énergie. Les conséquences du changement climatique sont énormes. C'est pourquoi les défis dans la définition et la mise en œuvre de l'Agenda 2030 pour le développement durable sont aujourd'hui sensiblement différents de ceux relevés en 2000 : il est, en particulier, essentiel que l'ensemble des acteurs travaillent ensemble et prennent appui sur leur complémentarité. Le rôle éminent des entreprises. L'Agenda pour le développement durable met l'accent sur le rôle du business comme élément clé de son succès. Chacun reconnaît désormais le rôle fondamental de la croissance économique, des échanges, de l'investissement, de l'entrepreneuriat, de l'innovation et de la création d'emplois durables dans le succès d'un projet global de ce type. En moyenne, les entreprises représentent 60 % du PIB, 80% des flux de capitaux et 90 % des emplois dans les pays en développement. Le succès de l'Agenda 2030 pour le développement durable dans l'ensemble des pays, quel que soit leur stade de développement, est donc étroitement lié au fait que les entreprises de toutes tailles puissent grandir et se développer dans des conditions à la fois responsables et durables afin de créer les conditions de vie et de travail décentes, et d'imaginer et de développer les nouvelles solutions susceptibles de relever les défis auxquels la communauté internationale est confrontée. La Chambre de commerce internationale, qui a coordonné les contributions des entreprises au cours des deux années de négociation, se félicite que l'ONU ait mis sur les rails cet agenda du développement. Il ouvre la voie de nouveaux partenariats entre les gouvernements, le secteur privé et la société civile. Les entreprises sont résolues à contribuer pleinement à leur succès, que ce soit en termes de ressources, d'expertise ou d'innovation technologique. Des Objectifs de développement durable en phase avec les entreprises. Les Objectifs de développement durable (ODD) font écho aux préoccupations des entreprises. 1. Ils sont opérationnels car ils sont « smart » comme disent les anglosaxons, c'est-à-dire à la fois spécifiques, mesurables, réalisables, pertinents et limités dans le temps. 2. Ils sont universels et proposent une vision globale pour éradiquer la pauvreté avec une approche intégrée : inclusion sociale, émancipation économique et gestion de l'environnement. 3. Ils prennent acte de la « finitude » de la planète avec le souci d'une gestion efficace des ressources et d'une réduction des impacts environnementaux négatifs, à commencer par le réchauffement climatique. 4. Ils s'appuient sur la qualité de la gouvernance, la lutte contre la corruption et l'économie souterraine. 5. Ils viennent en soutien des institutions afin de protéger et de promouvoir les droits de l'homme et la diversité dans toutes ses composantes. 6. Ils proposent une feuille de route opérationnelle qui s'appuie sur les partenariats et reconnaît le rôle du secteur privé à tous les niveaux, global, national, régional et local. 7. Ils privilégient la relation de confiance indispensable entre les acteurs à travers un dialogue sincère et transparent afin d'examiner les différences et de rapprocher les points de vue. 1. Cet article fait partie d'une série de contributions destinées à être publiées dans un numéro de l'OECD Development Co-operation Report 2016 consacré au rôle du business dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable (à paraître à la mi-2016). 9 POLITIQUE GÉNÉRALE Application extraterritoriale du droit américain : un enjeu pour les entreprises françaises Mathias AUDIT, Professeur agrégé des Facultés de droit, Avocat associé, Steering ©DR Les entreprises françaises font régulièrement l'objet de poursuites initiées par les autorités des États-Unis pour des faits intervenus en dehors du territoire américain. Une proposition de règlement a été rédigée à Bruxelles afin de mieux protéger les firmes européennes contre un tel risque, mais son adoption se fait toujours attendre. n certain nombre de textes de droit américain présentent une extraterritorialité très marquée, et les entreprises françaises prennent progressivement conscience de leur incidence possible sur leurs activités dans le monde. Ces textes de droit américain sont à la fois nombreux et de nature assez diverse. C’est le cas notamment des mesures d’embargo ou de gels d’avoirs adoptés par le gouvernement américain à l’encontre d’États étrangers. C'est le cas aussi de textes comme le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA), en matière de corruption d’agents publics étrangers, ou le Racketeer Influenced and Corrupt Organizations Act (RICO) qui vise notamment les opérations de blanchiment. Sans oublier, en dehors de la sphère pénale, le Dodd-Frank Act (marché financier) ou le droit antitrust. Aujourd’hui, ces textes sont susceptibles de fonder des poursuites civiles, mais aussi pénales, aux États-Unis pour des faits ne présentant que des liens très ténus avec le territoire américain. Non seulement une cotation boursière outre-Atlantique ou des liens capitalistiques avec une société américaine peuvent permettre de justifier la compétence des autorités américaines, mais aussi bien l’existence d’un virement sur un compte bancaire, ou même l’échange d’emails avec un correspondant local. Plus encore, l’utilisation du dollar dans une transaction est considérée comme un rattachement suffisant. U 10 Des transactions coûteuses. L’Office of Foreign Assets Control (OFAC) auquel est fréquemment associée la Securities and Exchange Commission (SEC), voire d’autres autorités, notamment d’États fédérés, se chargent de diligenter les poursuites. Mais, en pratique, ces actions ont la particularité de ne jamais aboutir à une condamnation en Justice, mais de faire systématiquement l’objet d’une transaction avec les autorités, laquelle s’accompagne du paiement d’une indemnité souvent très importante. C’est ainsi qu’en 2010, Alcatel Lucent a accepté de verser 137 millions de dollars pour faire cesser les poursuites fondées sur des soupçons de corruption dans divers pays d’Asie et d’Amérique centrale. Plus récemment, Alstom a réglé une somme de 772 millions de dollars pour mettre un terme à une action judiciaire associée à l’obtention d’un marché en Indonésie. Toutefois, ce sont indéniablement les 8,9 milliards de dollars que BNP Paribas a accepté de verser en 2014 aux termes d'une transaction avec les autorités américaines qui, en France, ont marqué les esprits. Si les entreprises françaises acceptent de telles transactions, c’est en raison du risque financier que fait peser sur leurs épaules l’éventualité d’une condamnation par un tribunal américain. Elles sont en outre peu familières de cette forme de justice négociée qui ne connaît pas vraiment d’équivalent en droit français. Une proposition de règlement européenne. Au reste, les accords, qui vont du Guilty Plea emportant reconnaissance d e c u l p a b i l i t é a u Differed Prosecution Agreement ou au Non Prosecution Agreement prévoyant la suspension ou l’abandon des poursuites, ne comportent pas qu’un volet financier. Ils prévoient également que l’entreprise accepte de mettre en place un programme de conformité (compliance) qui corresponde aux exigences du régulateur américain. Celui-ci court en général sur plusieurs années et doit être mis en oeuvre sous la surveillance de compliance officers dédiés. La charge acceptée par l’entreprise poursuivie est lourde, non seulement en termes financiers, mais aussi de réorganisation structurelle interne. Le risque est donc important pour les groupes français, même ceux dont la présence sur le marché américain est réduite voire inexistante. Une réaction pourrait néanmoins venir de l’Union européenne, laquelle a émis en février 2015 une proposition de règlement visant à «la protection contre les effets de l'application extraterritoriale d'une législation adoptée par un pays tiers», mais dont l’adoption définitive se fait toujours attendre. En outre, si le projet de traité transatlantique (TTIP) voit le jour, il est possible que le mécanisme d’arbitrage qu’il prévoirait puisse permettre de débattre du champ d’application extraterritorial de certaines lois américaines. POLITIQUE GÉNÉRALE Valeur en douane et prix de transfert : l’OMD intègre les propositions de l’ICC Vanessa SAINT-BLANQUAT, Directrice de mission pour les Affaires fiscales européennes et internationales au Medef, et ©DR ©DR Catherine CASSIÈRE, Directrice fiscale internationale de Alstom Power L'OMD propose un nouveau guide sur l'évaluation en douanes et les prix de transfert. Celui-ci intègre 7 propositions formulées par ICC destinées à éviter les doubles taxations parfois subies par les entreprises et invite les administrations fiscales et douanières à coopérer dans ce domaine. aleur en douane et prix de transfert... Sous cette terminologie barbare, se cache une problématique familière à bien des entreprises. Pour tout achat ou vente d’un bien entre deux sociétés liées implantées dans des États différents, le prix peut être remis en cause par les douanes du pays d’importation comme par le fisc des deux États concernés. Imaginez la société A du pays A, qui vend des biens de consommation à sa filiale, la société B, située dans le pays B, à charge pour cette dernière de distribuer ces biens dans le pays où elle est installée. Au moment de l’importation dans son pays, la société B paie des droits de douane sur la base de la valeur en douane de ces biens, qui correspond de façon simplifiée au prix d’achat. Cette valeur est examinée par les autorités douanières du pays B qui détermineront si les relations entre la société A et la société B ont influencé la valeur de la transaction, donc sa valeur en douane, et procéderont le cas échéant aux ajustements nécessaires. Si tel est le cas, le contrôle entraînera le paiement de droits et taxes complémentaires par la société B. Comme il s’agit de sociétés qui appartiennent à un même groupe, l’administration fiscale du pays B va également s’intéresser aux prix pratiqués entre elles : elle peut, toujours lors d’un contrôle fiscal, estimer que la valeur des biens est trop importante. Ainsi, en se fondant sur les dispositions relatives aux prix de transfert, elle procédera à un rehaussement de la base d’imposition, avec toutes les V conséquences que cela comporte (rectifications, ajustements, pénalités etc…). d’experts fiscaux et douaniers et présidé par Catherine Cassière, directeur fiscal d’Alstom Power. Des valorisations différentes pour un même flux. Le plus étonnant n’est pas qu’une transaction fasse l’objet de vérifications successives de son prix, mais que celui-ci soit différent selon que c’est l’autorité fiscale ou l'autorité douanière qui procède à la valorisation. L'explication d'une telle différence tient au fait que les deux administrations appliquent des règles distinctes. Ainsi, deux administrations d'un même État, parfois réunies au sein d’un seul ministère, peuvent proposer des valorisations différentes d’un même flux (le plus souvent à la hausse pour renchérir les droits de douanes et à la baisse pour augmenter la base taxable). Cette remise en cause n’est pas exclusive d’un contrôle fiscal effectué par l’administration du pays de départ qui à l’inverse pourra considérer que le prix de la transaction est insuffisant (ayant de fait une position convergente avec les douanes du pays de destination). Cette situation aberrante était d’autant plus difficile à dénouer qu’elle résulte du respect par chaque administration des principes GATT ou OCDE, internationalement admis et reconnus, et d’une absence totale de concertation entre autorités. C’est en partant de ce constat d’autant plus important que les transactions entre entreprises liées représentent 60% des transactions mondiales, que le Medef a créé dès 2007 un groupe de travail réunissant un panel Le fisc et les douanes encouragés à coopérer. Ce groupe de travail a élaboré des solutions novatrices et pragmatiques fondées sur la convergence d’interprétation des principes. Celles-ci prennent la forme de 7 propositions qui s’articulent autour de 2 axes principaux : la reconnaissance et l’utilisation des principes fiscaux à des fins douanières et la prise en compte par une administration des ajustements pratiqués par l’autre, afin d’éviter les doubles taxations subies par les entreprises. Validées au sein d’un groupe de travail de la Chambre de Commerce Internationale présidé par Vanessa de Saint-Blanquat, Directrice de mission au MEDEF, ces propositions ont été reprises dans un « Policy statement » de l’ICC en 2012 et viennent d’être intégrées par l’Organisation Mondiale des Douanes dans son guide sur l’évaluation en douane et les prix de transfert publié en juin 2015. Outre l’aspect technique du sujet, nous ne pouvons qu’être fières que notre message ait été entendu et relayé au niveau international. En effet, sur son site web, l’OMD souligne que « L’un des messages clés du Guide est que les administrations douanières et fiscales sont encouragées à coopérer et à échanger des informations et des connaissances dans ce domaine ». Il ne reste donc plus qu’à l’appliquer ! Le guide est disponible sur www.wcoomd.org 11 AUTORÉGULATION PME : l'enjeu de la conformité Concurrence ©DR Anne-Sophie BODIN, Directeur juridique Droit Européen et de la Concurrence du groupe Areva Les PME ne sont pas suffisamment armées pour faire face aux problèmes associés au droit de la concurrence. La boîte à outils d'ICC propose une panoplie d'instruments adaptée pour toutes les PME soucieuses d'améliorer leur conformité aux règles de concurrence. es PME représentent 99% des entreprises de l’Union européenne et en constituent le premier employeur. Toutefois, si elles évoluent dans un cadre juridique et réglementaire tout aussi complexe que les grandes entreprises, elles sont moins bien armées pour y faire face. Leur taille leur offre rarement la possibilité de disposer d’experts dans ces domaines, et le coût souvent élevé de conseils externes limite leurs possibilités d’être conseillées, alertées et formées. Le droit de la concurrence ne fait pas ici défaut. Quel que soit leur champ d’action, les PME sont concernées par ces règles dont les principes restent identiques pour toutes les entreprises : interdiction des ententes, interdiction des abus de position dominante (articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, articles L. 420-1, 420-2 et 420-5 du Code de commerce). Il est bien prévu que certains « petits » accords échappent à l’application des règles de concurrence, notamment s'ils n'affectent pas le marché de façon sensible (par exemple, accords « de minimis », règlements d’exemption). Mais ces exceptions restent circonscrites. Typiquement, l’exception de minimis n’a vocation à s’appliquer qu’aux seules entreprises dont la part de marché cumulée n’excède pas 10 % ou 15 % et est souvent inaccessible aux PME exerçant sur des marchés de niche (ou dans un contexte de marchés publics). Pour leur part, les règlements d’exemption ne couvrent pas les pratiques les plus sensibles telles que les ententes sur les prix. L De fait, les PME ne sont pas épargnées par le contrôle exercé par le ministère de l’Économie (pour les « micro-pratiques » impliquant des PME dont le CA cumulé n'excède pas 200 millions d'euros) ou par l’Autorité de la concurrence comme l’illustre l’amende de plusieurs millions d’euros prononcée récemment à l’encontre de coopératives laitières ayant participé à une entente (décision 15D-03 du 11 mars 2015). Elles s’exposent ainsi à des amendes pécuniaires pouvant atteindre potentiellement 10 % de leur chiffre d’affaires consolidé. Même si pour l’Autorité de la Concurrence, le fait d’être une PME peut constituer une circonstance atténuante, surtout si celle-ci est mono-produit, cette sanction sera bien souvent assise sur leur chiffre d’affaires total faute de disposer d’un large portefeuille d’activités. Cette situation est d’autant plus délicate à gérer que la plupart des PME n’ont ni les connaissances nécessaires pour défendre leurs intérêts, ni toujours les moyens d’en charger des professionnels compétents. Ceci peut même les placer dans une situation d’inégalité procédurale lorsque d’autres entreprises, plus importantes, sont parties à la procédure, notamment lorsque celle-ci exige une réaction rapide et avisée (typiquement, pour évaluer l’opportunité d’une demande de clémence)(1). Dans ce contexte, il est primordial pour les PME d’opter pour une démarche volontariste de prévention et de conformité aux règles de Concurrence en privilégiant une stratégie proactive de gestion des risques par l’adoption d’un programme de conformité. Dans la pratique, les autorités n'attendent pas des PME qu'elles mettent en place des programmes de compliance identiques à ceux des grands groupes. Mais il reste essentiel pour une PME d'identifier les risques qui découlent de son environnement concurrentiel, notamment si elle est en position de leadership (risque d'abus) ou si elle est active sur des marchés où il est usuel de travailler en partenariat avec des concurrents (situation propice à d’éventuels échanges d’informations sensibles). Par ailleurs, cette action doit se traduire par l’adoption d’une véritable «conscience concurrence» au sein de l’entreprise, facilitée par la diffusion de consignes présentant les principales règles et recommandations en droit de la concurrence. Cette sensibilisation doit concerner l’ensemble des salariés (des équipes commerciales aux dirigeants...). Une PME se protège ainsi juridiquement, et tend à minimiser son risque en limitant son exposition, voire en facilitant la détection d’éventuelles infractions qu’elle aurait pu commettre. Si celles-ci ont déjà eu lieu, il est important de savoir comment réagir rapidement, sans fermer les yeux. La boîte à outils de la Chambre de Commerce Internationale constitue une première étape dans l’adoption d’un programme de conformité. Conçue par et pour les entreprises, elle propose des outils pratiques adaptés pour toutes les PME qui souhaitent améliorer leur conformité aux règles de concurrence. [1] Ainsi, dans la décision relative au cartel des produits laitiers, Yoplait, également participant à l’entente, a été exonéré du paiement d’une amende en soumettant très rapidement une demande de clémence. 12 RÉSOLUTION DES LITIGES Désignation d’arbitres : les bonnes pratiques ©DR Laurent JAEGER, Avocat associé, Orrick Rambaud Martel Le Comité national français d'ICC est aux avant-postes sur la mise en place des bonnes pratiques en matière de désignation des arbitres. Sous l’impulsion de son président et de son secrétaire général, il a profondément réformé et structuré sa pratique depuis 2010. Coup de projecteur sur les points forts de cette réorganisation. es Comités nationaux jouent un rôle clé dans le processus de désignation des arbitres par ICC. Lorsque la Cour internationale d’arbitrage doit désigner un arbitre généralement le président d’un tribunal ou un arbitre unique - elle doit d’abord s’adresser à ces comités qui formulent des propositions (sauf cas exceptionnels). Ce système permet à la Cour de disposer de relais efficaces dans tous les pays où ces structures existent et de bénéficier de leur connaissance du terrain. Il n'est toutefois pas à l'abri de dérives lorsque le choix des arbitres manque de rigueur ou est susceptible d’être influencé. C’est pour s'assurer de la totale impartialité du processus que le Comité national français a mis en place un mode de désignation innovant. Le choix des arbitres est confié à un organe collégial, le Comité consultatif, dont la mission est de garantir le sérieux et l’objectivité des choix proposés. L Une composition collégiale La composition du Comité consultatif fait la part belle aux juristes d’entreprise qui, en leur qualité d’utilisateurs de l’arbitrage, représentent la moitié des effectifs. Elle compte également deux hauts magistrats, ce qui constitue un facteur de crédibilité supplémentaire, ainsi que deux avocats praticiens de l’arbitrage, dont l’auteur de ces lignes qui assurera la fonction de président à partir de janvier 2016. Cette composition collégiale permet d’assurer la diversité des points de vue entre professionnels issus d’horizons différents. Les membres du Comité doivent agir en toute indépendance et ne peuvent donc être proposés comme arbitre par ICC France. En outre, si un de ses membres constate qu’il a un lien quel qu'il soit avec une affaire, il doit s’abstenir de prendre part aux délibérations. Une sélection diversifiée Le choix des arbitres commence par un processus de sélection préalable. Le Comité consultatif se réunit périodiquement pour examiner les dossiers de candidature. Pour être retenus, un candidat doit, en principe, avoir déjà siégé comme arbitre dans des arbitrages ICC. En effet, le Comité ne propose pratiquement que des arbitres uniques et des présidents de tribunaux arbitraux, ce qui exige une certaine expérience. Cet impératif doit toutefois être concilié avec celui de renouveler et de rajeunir les effectifs. Il arrive donc que le Comité accepte la candidature de jeunes praticiens de l’arbitrage international, ayant une expérience significative en tant que conseil et/ou secrétaire de tribunal arbitral. De manière générale, il s’efforce de diversifier ses propositions et d’éviter que celles-ci ne se concentrent toujours sur les arbitres les plus en vue. Les propositions d’arbitres Lorsque le Comité est consulté pour proposer la nomination d’un arbitre, il se fonde sur les indications communiquées par le Secrétariat quant au profil de l’arbitre recherché (connaissances juridiques, degré d’expérience, langues…) et quant au litige (complexité, montant en jeu…). Chaque cas est considéré avec attention par le Comité qui s’assure de la disponibilité et de l'indépendance de tout arbitre pressenti. L’exigence d’un examen approfondi doit, toutefois, se combiner avec celle de la réactivité car les décisions sont prises en quelques jours. Les délibérations du Comité sont soumises à une stricte confidentialité et ses membres doivent s’abstenir d e d é v o i le r le s i n fo r m a t i o n s communiquées par le Secrétariat de la Cour sur les dossiers qui lui sont soumis. Vers un guide des bonnes pratiques ? L’expérience d’ICC France a inspiré la rédaction d’un guide des bonnes pratiques destiné à clarifier les relations entre le Secrétariat de la Cour et les Comités nationaux. Ce guide, qui n’existe encore qu’à l’état de projet, pourrait être prochainement adopté par la Cour et proposé aux Comités nationaux afin de définir des objectifs communs. Il contribuerait ainsi à améliorer le processus de désignation des arbitres d'ICC. 13 DOSSIER DOSSIER Les grandes mutations à l’œuvre dans l’économie mondiale A u tournant de l'année 2016, il nous a paru très fécond de demander à de grands spécialistes et experts de différentes nationalités et de tous horizons d'aider nos lecteurs à réfléchir sur l'évolution de l'économie mondiale. Après une année 2015 riche en événements (ralentissement chinois, baisse des prix des matières premières, diminution des échanges internationaux...), des changements structurels sont en effet à l’œuvre un peu partout dans le monde et annoncent un nouveau régime de croissance pour les décennies à venir. La Chambre de commerce internationale est particulièrement attentive à ces mutations afin de jouer le rôle central qui est le sien dans la facilitation du commerce international et d'aider ses adhérents à s'adapter aux évolutions fondamentales à travers les différentes missions qui lui sont confiées. Les analyses des experts de notre dossier éclairent les défis des prochaines décennies, notamment les enjeux des prochaines négociations internationales, à travers une série d'interviews et de contributions consacrées aux évolutions et ruptures qui se dessinent dans l'économie-monde : depuis le ralentissement annoncé de la croissance mondiale et des échanges internationaux, jusqu'à la révolution digitale, en passant par le rééquilibrage entre pays développés et pays émergents, sans oublier les conséquences macro-économiques du changement climatique, au cœur de la COP 21 qui vient de se tenir à Paris. ■ « Il n'y aura pas de nouveau cycle de croissance tant que nous n'aurons pas débarrassé l'économie des entreprises non compétitives », Interview de Hans-Werner SINN ■ « Nous allons vers un modèle où les différentes régions du monde seront moins interdépendantes », Interview de Patrick ARTUS ■ Réchauffement, qu'attendons-nous pour agir ? Jacques LESOURNE ■ Echanges internationaux : un nouveau monde placé sous le signe de la précaution, Compte-rendu d'une intervention de Pascal LAMY ■ Le numérique révolutionne les business models et les modes de vie, Compte-rendu d'une intervention de Maurice LEVY ■ « Les entreprises doivent penser et agir avec frugalité, c'est-à-dire créer davantage de valeur en consommant moins de ressources », Interview de Navi RADJOU ■ Afrique : des besoins énormes et des ressources encore insuffisamment exploitées, Albert YUMA-MULIMBI François GEORGES, Délégué général, ICC France 15 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE « Il n'y aura pas de nouveau cycle de croissance tant que nous n'aurons pas débarrassé l'économie des entreprises non compétitives » Hans-Werner SINN, professeur d'économie et de finances publiques à l'Université de Munich, président de ©DR l'IFO, l'institut de conjoncture de Munich Président de l'IFO, l'institut de conjoncture de Munich et professeur d'économie et de finances publiques à l'Université de Munich, il est l'un des économistes les plus influents d'Allemagne. Il est aussi réputé pour son franc-parler, notamment sur l'avenir de la zone euro. changes Internationaux. L'économie mondiale pourrait-elle connaître durablement un taux de croissance plus modeste ? Hans-Werner Sinn. Il semble que ce soit effectivement une possibilité pour le moment, dès lors que certains grands pays émergents, tels le Brésil, la Chine ou la Russie sont confrontés simultanément à des difficultés, pour des raisons diverses. En outre, L'Europe de l'Ouest souffre également d'un désajustement des prix relatifs associé à l'euro. La monnaie unique a favorisé la formation d'une bulle du crédit, laquelle laisse derrière elle, après explosion, des économies dont les coûts sont trop élevés et les produits non compétitifs. É E.I. A quoi pourrait ressembler le nouveau régime de croissance ? H-W. S. Il n'y aura pas de nouveau cycle de croissance tant que nous n'aurons pas débarrassé les économies des entreprises et des institutions financières non compétitives. Pour y parvenir, les banques centrales doivent revenir à un régime normal de taux d'intérêt et les États doivent absolument en finir avec la tentation de stimuler artificiellement la demande en creusant les déficits, dans la pure tradition keynésienne. E.I. Après la crise de 2008, de nombreux experts pensaient que les pays 16 émergents allaient tirer la croissance mondiale. Aujourd'hui, il semble que cela ne soit pas si simple... H-W.S. Les économies des pays émergents vont se redresser, mais il ne faut pas non plus oublier que de nouveaux pays se développent eux aussi, à commencer par l'Afrique et le Sud-Est Asiatique. Quant à l'économie chinoise, plus spécifiquement, elle va continuer de croître en dépit de la crise actuelle, même si le rythme de cette croissance sera sans doute plus modeste que dans un passé récent. E.I. Redoutez-vous les effets pervers de la politique monétaire accommodante des banques centrales sur l'économie réelle ? H-W.S. Grâce à un niveau de taux d'intérêt historiquement bas (proche de zéro), de nombreuses banques «zombies» ainsi que des entreprises non rentables sont maintenues artificiellement en vie un peu partout dans le monde tandis que l'épargne mondiale est orientée vers des investissements improductifs et/ou inefficaces. Il est grand temps que les banques centrales reviennent à des niveaux de taux d'intérêt plus normaux et laissent les marchés décider où et comment investir cette épargne. E.I. Quel avenir voyez vous à l'Europe au sein de l'économie globale ? H-W.S. De mon point de vue, nous commettons une erreur en tentant de garder tous les pays au sein de la zone euro. Les prix relatifs des pays de la zone ont besoin d'être réajustés mais la mise en œuvre de ce processus n'est pas possible dans le cadre de la zone euro. Je pense qu'il serait plus efficace que tel ou tel pays sorte temporairement, dévalue puis réintègre la zone euro plus tard sur la base d'une nouvelle parité monétaire. E.I. Quelle initiative économique le tandem franco-allemand devrait-il prendre aujourd'hui ? H-W.S. A mes yeux, la meilleure manière pour le tandem francoallemand de donner à l'Europe une nouvelle impulsion serait de favoriser le développement de l'union politique sans aller plus loin dans la mutualisation des pertes et des dettes, mutualisation qui s'accompagne toujours d'effets dévastateurs associés au phénomène d'aléa moral. Nous sommes déjà allés trop loin dans cette forme d'union. Dans la perspective d'un monde de plus en plus incertain, nous avons en revanche un besoin urgent d'une véritable union politique : il faut fusionner nos 28 armées nationales en une seule et nous donner les moyens de parler d'une seule voix en matière de politique. DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE «Nous allons vers un modèle où les différentes régions du monde seront moins interdépendantes» ©DR Patrick ARTUS, chief economist de Natixis et professeur à l'Université Paris I-Panthéon-Sorbonne Les moteurs qui ont tiré la croissance depuis plusieurs décennies sont grippés. Patrick Artus, chef économiste de la banque Natixis, analyse les grandes mutations qui sont à l’œuvre dans l'économie mondiale et leurs conséquences sur les échanges internationaux. changes Internationaux. Le modèle de croissance que nous avons connu depuis plus de vingt ans est-il à bout de souffle ? Patrick Artus. Les trois moteurs qui ont fait tourner la croissance mondiale depuis plusieurs décennies sont en panne. D'abord, celui de l'endettement. Depuis le milieu des années 1990 (et même dès la fin des années 1980 au Japon), la croissance des pays de l'OCDE a été tirée par l'endettement, ou, plus précisément, par le cycle endettement/hausse des prix d'actifs. Mais la capacité à continuer à s'endetter de manière déraisonnable touche à sa fin et les pays de l'OCDE vont s'installer sur un sentier de croissance de long terme non dopé, fruit de leurs seules capacités structurelles à créer des richesses. Ensuite, le moteur de croissance associé à la segmentation de la chaîne de valeur connaît lui aussi des ratés. Au cours des dernières décennies, les entreprises occidentales ont gardé dans l'OCDE les parties sophistiquées de leur production et transféré les parties les plus simples dans les pays émergents afin de bénéficier de coûts de production plus faibles. Mais ce processus bute aujourd'hui sur l'augmentation des salaires, donc des coûts de production, de ces pays, hausse qui ne justifie plus les délocalisations, compte tenu de la nature (bas ou moyenne gamme) de leurs productions. Bien sûr, les situations sont variables selon les pays, mais le modèle de croissance E des grands émergents -notamment la Chine ou le Brésil- est incontestablement en crise dès lors que leurs coûts de production ne sont plus compétitifs pour le type de biens produits. Enfin, autre élément fort, l'économie mondiale évolue vers une économie de services. Cette évolution, qui s'accélère depuis quinze ans, a de nombreuses conséquences, et notamment le fait qu'une économie où le poids de l'industrie diminue fortement consomme beaucoup moins de matières premières. Le troisième moteur se grippe : la baisse des prix des matières premières met en difficultés les pays dont le développement leur était étroitement lié (Algérie, Arabie Saoudite, Irak, Russie, et, dans une moindre mesure, Iran, Nigéria, Émirats Arabes Unis et Angola). E.I. A quelles conditions, peut-on espérer voir les pays émergents prendre à nouveau leur part dans la croissance mondiale ? P.A. La plupart des pays émergents sont confrontés à un problème de coûts de production, ou, pour être plus précis, de rapport entre le coût et le niveau de gamme de leurs productions. Mais ce n'est pas tout. De nombreux pays (on peut citer le Brésil, la Turquie, l'Inde, l'Afrique du Sud, etc) doivent également faire face à une défaillance de l'offre associée à celle d'un certain nombre de facteurs de production essentiels tels que l'insuffisance de main d’œuvre qualifiée, la difficulté à s'approvisionner en énergie ou l'absence d'infrastructures de transport due à un sous-investissement public chronique depuis longtemps. La situation du Brésil est, de ce point de vue, emblématique. Pour que ces pays prennent à nouveau leur part dans la croissance mondiale, il est nécessaire qu'ils se donnent les moyens de desserrer ces goulots d'étranglement en investissant massivement dans l ' é d u ca t i o n , l ' é n e rg i e e t le s infrastructures. Il est également indispensable qu'ils montent en gamme afin de produire des biens plus sophistiqués susceptibles d'être vendus à des prix permettant d'absorber leurs coûts salariaux. Il ne s'agit donc nullement, comme on l'entend parfois, d'une crise cyclique des économies émergentes mais d'une crise de leur modèle de croissance. Les économies émergentes doivent prendre leur place dans la spécialisation productive du monde par les avantages comparatifs et non plus seulement par les coûts. E.I. Quels sont les problèmes structurels auxquels sont confrontés les pays riches ? P.A. Les grandes économies développées sont chacune confrontées à des problèmes spécifiques. L'économie américaine est certes actuellement freinée par l'appréciation du dollar, la place prise par le secteur pétrolier et la faiblesse du reste de l'économie mondiale, mais elle peut compter sur sa capacité d'innovation, de créations d'emplois, d'investissement des entreprises. 17 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Les États-Unis entrent dans leur septième année d'expansion ! Pour autant, la répartition des revenus outre-Atlantique est extrêmement inégalitaire. Peut-on espérer avoir une croissance pérenne à long terme en n'augmentant jamais les revenus réels de la classe moyenne ? C'est, à mon sens, la question qu'il faut se poser si l'on réfléchit au modèle de croissance de l'Amérique pour les décennies à venir. La situation japonaise est beaucoup plus inquiétante. Dans l'Empire du soleil levant, la déformation du partage des revenus tue littéralement la croissance. Aujourd'hui, le taux d'autofinancement des entreprises est de 200 % et il continue d'augmenter rapidement tandis que les salaires progressent, eux, moins vite que la productivité. Il y a au Japon une telle déformation du partage des revenus que les entreprises ne savent plus quoi faire de leur argent. Elles placent leurs profits à 0 % dans les banques qui les prêtent à l’État, lequel creuse le déficit public (9 points de PIB) sous forme d'obligations pour compenser la défaillance de la demande des ménages ! Les banques détiennent l'équivalent de 2,5 années de PIB dans leurs bilans et toute remontée des taux d'intérêt les mettrait en danger. La banque centrale nipponne est donc condamnée à monétiser la dette publique. C'est un engrenage mortifère qui peut se terminer en crise financière. E.I. Pour sa part, la zone euro s'enlise dans un régime de croissance faible et de chômage élevé. Y-a-t-il à cela des raisons spécifiques ? P.A. La raison fondamentale de cette situation particulière est que l'Union Économique et Monétaire (UEM) n'a pas apporté aux pays de la zone les bénéfices attendus. D'abord, une UEM se caractérise par la libre circulation des biens, des capitaux et des personnes et par l'absence de risque de change susceptible de venir l'entraver. Dès lors, on s'attend à observer une croissance des échanges plus rapide entre les pays de la zone euro qu'entre ces pays et le reste du monde (compte tenu des croissances relatives des économies). Or, lorsqu'on examine les chiffres, 18 on constate exactement le contraire. Les échanges augmentent plus vite avec le reste du monde qu'entre pays de la zone. Preuve qu'il n'existe pas de grand marché unique économique et commercial dans la zone euro. Ensuite, la seconde vertu que l'on prête à une union monétaire, c'est l'allocation efficace de l'épargne. Or, si les échanges de capitaux dans la zone ont effectivement progressé entre 1999 et 2007, ce mouvement a cessé à partir de 2008, date à laquelle on commence à observer une très forte baisse des flux de capitaux à long terme, chaque pays finançant lui-même ses besoins d'investissement. La zone euro n'a plus les caractéristique d'un grand marché unique financier. Cette situation a un coût en termes de croissance (chaque pays ne peut mener la politique monétaire et de change qui lui conviendrait le mieux), sans offrir d'avantages micro-économiques. Pour en sortir, il faut absolument terminer le marché unique, c'est-à-dire avancer sur l'harmonisation des normes, des règlements financiers, de la fiscalité, de l'ouverture des marchés publics, d'un système de retraite intégré, etc. Il faut aussi réactiver la circulation des capitaux en zone euro. E.I. Quelles sont les caractéristiques du nouveau modèle de croissance qui se dessine sous nos yeux ? P.A. il faut d'abord resituer notre réflexion dans une tendance qui se dessine depuis des années, voire des décennies, celle du ralentissement structurel de la productivité, un ralentissement que l'on constate, à des degrés divers, à peu près partout dans le monde. Cette anémie du progrès technique trouve ses racines dans différents facteurs : perte d'efficacité de la R&D, amaigrissement de l'industrie où la productivité est plus élevée qu'ailleurs, insuffisant niveau de qualification de la population active, augmentation de l'intensité capitalistique, doutes sur l'impact des nouvelles technologies sur la croissance... Ensuite, l'autre caractéristique fondamentale du nouveau régime de croissance est que nous allons vers un modèle où les différentes régions du monde seront moins interdépendantes que par le passé. Pour trois raisons. D'abord, la dé-segmentat i o n d e s c h a î n e s d e v a le u r. Aujourd'hui, les entreprises ne veulent plus couper leurs chaînes de valeur en rondelles, les écarts de coûts ne le justifient plus. On assiste à un regroupement des productions sur un nombre de sites plus limité ce qui réduit les échanges. Ensuite, on constate que la préférence nationale s'impose de plus en plus : si on veut vendre des avions aux Chinois, il faut les fabriquer sur place et non plus les exporter depuis Toulouse ou Seattle. Enfin, l'avènement d'une économie de services réduit les échanges, d'autant qu'elle est moins consommatrice de matières premières. E.I. Quel sera l'impact sur le commerce mondial ? P.A. Jusqu'au début des années 2000, l'élasticité du commerce mondial au PIB mondial était de 2 (quand le PIB mondial augmentait de 1 %, le commerce mondial augmentait de 2 %). Elle est tombée à 0,5 ! Dans l'avenir, le commerce mondial devrait augmenter moins vite que le PIB et les pays dont la demande intérieure était faible et dont la croissance était tirée par les échanges vont souffrir. C'est le cas, par exemple, de la Corée du Sud ou de Taïwan, et même, potentiellement, de l'Allemagne ou du Japon. Le modèle du pays dont la demande intérieure est faible mais qui, grâce à des produits très compétitifs, exporte dans le reste du monde est fragilisé. En revanche, les pays qui bénéficient d'une demande intérieure solide -les pays d'Europe centrale, les États-Unis...- seront favorisés. Parallèlement, Le commerce international va changer de nature et prendra moins la forme d'imports/exports. D'autant que les firmes sont en train d'intégrer dans leurs comptes une véritable tarification du CO2 ce qui conforte l'idée que l'on ne pourra pas continuer à transporter des biens lourds, comme des voitures par exemple. Les entreprises vont produire de plus en plus près des consommateurs. Propos recueillis par Marie-Paule Virard DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Réchauffement : qu'attendons-nous pour agir ? Jacques LESOURNE, économiste, président du Comité de direction de FutuRIS Lanceur d'alerte dès 2006 avec son rapport sur l'économie du changement climatique, Nicholas Stern, l'économiste du climat mondialement reconnu, récidive avec un nouvel ouvrage où il pointe l'urgence d'agir et propose des solutions. Jacques Lesourne, économiste, président du Comité de direction de FutuRIS, en fait ici un compte-rendu éclairé. ncien vice-président de la Banque mondiale, conseiller du Premier ministre du RoyaumeUni Tony Blair, Nicholas Stern -qui siège désormais à la Chambre des Lords- est aujourd’hui l’économiste le plus reconnu à l’échelle mondiale en matière d’évolution du climat. Son rapport de 2006 au gouvernement britannique sur l’Économie du changement climatique avait contribué à élargir la prise de conscience de l’ampleur du problème et des moyens à mettre en œuvre pour y faire face. Aussi, doit-on attacher la plus grande importance au livre qu’il vient de publier en 2015 « Why are we waiting ? The logic, urgency and promise of tackling climate change ». Ce livre peut être abordé d’un triple point de vue : l’approche méthodologique, la discussion des politiques, Une approche aussi rationnelle que possible. Même si Nicholas Stern prend parti dans les débats, il ne part pas de grandes exhortations morales comme le font beaucoup d’écologistes politiques, mais s’appuie sur une approche méthodologique aussi rationnelle que possible. Il commence par séparer le monde en trois groupes de pays à revenus par tête faibles, moyens ou élevés. Sur la base des chiffres de 2010 à 2012, les premiers sont au nombre de 36, réunissent 900 millions de personnes, représentent 1% du produit intérieur brut mondial et sont ©DR A l’évaluation prospective des résultats. Il incite aussi à une réflexion sur les raisons qui rendent si difficiles les accords mondiaux dans ce domaine. > Lord Stern, 69 ans, a été vice-président de la Banque mondiale de 2000 à 2003. Titulaire de la chaire d’Économie et des Affaires publiques à la London School of Economics et président du Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment, il est surtout connu pour son rapport précurseur sur l’économie du changement climatique paru en 2006. Publié en mai 2015, son dernier ouvrage est un nouveau cri d'alarme sur l'urgence d'agir (MIT Press). responsables de 2% des émissions de gaz à effet de serre (GES). Les seconds, parmi lesquels figurent Brésil, Mexique, Chine, Nigeria, Inde, Pakistan, sont au nombre de 103 et comptent 4,9 milliards d’individus. Ils sont à l’origine de 31 % du PIB mondial et émettent 55 % de gaz à effet de serre. Enfin, les pays à haut revenu, au nombre de 74, avec les États-Unis, le Japon, la Corée du Sud, la Russie et les principaux pays européens représentent 1,5 milliard d’individus, 68 % du revenu mondial et 43 % des émissions de gaz à effet de serre. Si l’on complète ces chiffres par les taux de croissance très différents des trois groupes, on comprend d’emblée les énormes écarts qu’engendre le changement climatique d’un groupe de pays à l’autre, et même entre les pays dans chaque groupe. En second lieu, lorsque il aborde l’évaluation des politiques, Nicholas Stern s’efforce toujours de raisonner en termes de coûts et avantages, c’est-à-dire de calcul économique généralisé tenant compte des externalités et de la répartition dans le temps. Procéder ainsi a le mérite d’obliger à chiffrer en donnant ses sources ou en justifiant ses estimations. La transparence qui en résulte permet le débat et aide à distinguer les politiques qui permettent de réduire les émissions de GES à un coût raisonnable et celles qui sont si onéreuses qu’il vaudrait mieux économiser les dépenses correspondantes et les reporter sur d’autres actions favorisant les réductions d’émissions plus importantes. Enfin, Nicholas Stern a recours à des modèles pour évaluer les effets en termes de croissance économique des dépenses consacrées à la réduction des émissions de GES. Cette 19 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE approche que je ne peux qu’approuver, puisque je l’ai défendue pendant toute ma carrière, n’a qu’un seul défaut, celui d’être peu lisible, car la valeur des résultats dépend des hypothèses faites sur l’effet des transformations des prix relatifs. Or, il est des modèles mondiaux qui minimisent certains phénomènes ou au contraire surestiment leur influence. Dès lors, l’observateur extérieur, contraint de prendre le modèle comme une boîte noire, est contraint d’adhérer aux résultats, moins par conviction que par confiance. De ce point de vue, les travaux de Nicholas Stern méritent d’être considérés avec un préjugé favorable. 1 % de PIB mondial par an pour limiter la concentration des GES. Quant à la discussion des politiques, Nicholas Stern la mène en se concentrant sur trois espaces : les villes, l’usage des terres, l’énergie. Il les aborde ensuite de trois points de vue : l’efficacité des ressources, les investissements ou infrastructures et l’innovation, d’où, si l’on croise avec les types de pays, une grille de lecture à neuf entrées, certes réaliste mais qui fractionne le message. En effet, qu’ont de commun les problèmes des villes européennes qui s’accroissent faiblement et consomment désormais peu d’espace et les villes africaines qui explosent et s’étalent sur des superficies mal contrôlées ? L’avantage du choix de Nicholas Stern est qu’il ne s’adresse à aucun pays ou grande région géographique, prudence qu’il a héritée de sa carrière internationale, mais qui nuit peut être à la perception du message par beaucoup de lecteurs. Pour les résultats chiffrés qui résultent des modèles, je ne peux faire mieux que de citer Olivier Godard dans la critique du livre qu’il vient de publier dans Futuribles : «Un précédent rapport de Nicholas Stern montrait que les dommages climatiques à venir pourraient avoir une incidence sur le bien-être collectif de l’ordre de celle des deux guerres mondiales du XXème siècle. De façon synthétique, les bouleversements en chaîne anticipés pourraient entraîner l’équivalent d’une perte annuelle pour l’éternité de 10 à 20 % du PIB mondial. Par contre, pour un coût médian annuel se situant autour de 1 % du PIB, il serait possible à l’humanité de limiter la concentration atmosphérique des GES entre 500 et 550 ppm (1) -nous en sommes actuellement à 470 ppm et chaque année en ajoute 2 ou 3. Il serait donc avantageux et économiquement rationnel d’engager de façon immédiate des politiques vigoureuses de transformation des systèmes énergétiques vers la sobriété et l’efficacité énergétique et les solutions bas carbone »(2). Marier croissance et économie bas carbone. L’analyse de Nicholas Stern devrait déboucher alors sur la question essentielle : pourquoi est-il si difficile de faire progresser les négociations internationales sur le changement climatique ? Les résistances aux politiques climatiques ont plusieurs origines : 1) au sein de chaque pays, les résistances des groupes d’individus et de firmes impliqués dans des secteurs émetteurs de GES 2) la lutte pour la redistribution des revenus entre les pays à l’échelle internationale, cette lutte Réduire les émissions de GES de 40 % à 70 % en 2050. Les émissions de gaz à effet de serre (GES) couverts par le protocole de Kyoto ont augmenté de 80 % depuis 1970 et de 30 % depuis 1990 pour atteindre 50 Giga tonnes équivalent CO2 en 2014 avec, en tête de la production de GES, l'énergie (35 %), l'agriculture et le transport (14 % chacun) et la déforestation (10 %). Au rythme actuel des émissions mondiales (+2,2 % par an sur 2000-2010), la hausse des températures devrait être comprise entre +3,7 % et +4,8 % d'ici à 2100. Pour respecter l'objectif de +2 %, il faut réduire les émissions de GES de 40 % à 70 % en 2050 par rapport au niveau atteint en 2010 et revenir à des niveaux proches de zéro en 2100. [1] Nombre de molécules du gaz à effet de serre considéré par million de molécules d’air. [2] O. Godard, Futuribles, n° 410, (à paraître en janvier/février 2016) 20 > « Why are we waiting ? The logic, urgency and promise of tackling climate change ». qui prolonge les tensions à l’intérieur des pays développés 3) les discours extrêmes de certains milieux politiques qui transforment un problème concret dont la solution implique compromis et persévérance en une guerre idéologique sur les relations entre l’homme et la nature. Mais, plutôt que d’aborder la question de la difficulté à faire progresser les négociations internationales de front, l'auteur qui a l’expérience des dix dernières années de négociations, insiste sur la nécessité de la poursuite simultanée de la croissance et de l’évolution vers une économie bas-carbone, grâce à des politiques nationales limitant les subventions aux énergies émetteurs de GES, facilitant l’innovation dans la gestion des villes, l’utilisation des sols et la décarbonisation des systèmes énergétiques. S’il soutient la coopération internationale, une aide financière à l’investissement pour lutter contre le changement climatique, il se méfie des accords internationaux trop contraignants qui ne sont pas appliqués ou des principes généraux comme celui d’attribution à tout humain d’un stock personnel de GES. Il n’évoque pas non plus l’instauration, pour le moment hors de portée, d’un prix mondial à la tonne de carbone émise. Sur la longue marche qui nous attend, la COP 21 préparée avec soin par la France représentera sans doute un progrès. DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Commerce mondial : un nouveau monde placé sous le signe de la précaution Directeur général de l'OMC de septembre 2005 à août 2013, Pascal Lamy analyse les grandes mutations qui sont en train de bouleverser la nature des échanges internationaux(1) et éclaire les enjeux d'un nouveau rôle pour l'OMC. ous traversons actuellement une période de transition. Un ancien monde s'éloigne, caractérisé par des systèmes de production nationaux où les principaux obstacles aux échanges avaient pour objectif de protéger les producteurs domestiques de la concurrence internationale. Un nouveau monde se dessine où la production de biens et services est transnationale et où les obstacles aux échanges sont conçus pour protéger le consommateur contre les risques. Formulé autrement, nous vivons le passage d'une gestion de la protection (quotas, tarifs, subventions) à une gestion de la précaution (sécurité, santé, environnement). Une nouvelle version du vieux distinguo entre mesures tarifaires et mesures non-tarifaires. Un monde où la question de l'ouverture des échanges se posera tout à fait différemment. « Dans ce nouveau monde, a souligné Pascal Lamy lors de son intervention à l'European Centre for International Political Economy de Bruxelles, l'ouverture des échanges aura toujours pour objet de favoriser la croissance et le bien-être, à condition toutefois que nous veillions collectivement à ce que la justice sociale aille de pair avec la création de richesses. Par ailleurs, la réduction des obstacles aux échanges passera toujours par la nécessité d'égaliser les conditions de la concurrence, et de le faire de manière prévisible ». En revanche, ce qui change fondamentalement, c'est la manière d'obtenir l'uniformisation des conditions de la concurrence. « Dès lors que l'on raisonnait en termes de protection, souligne Pascal Lamy, l'horizon mental de tout négociateur se résumait à un chiffre : zéro. En N matière de précaution, les règles du jeu sont très différentes. Ce qui est évident lorsqu'on parle tarifs est inimaginable avec les normes et autres certificats de conformité. Impossible de gérer les mesures non tarifaires comme les mesures tarifaires. Ce qui importe dans la précaution n'est pas d'en finir avec une mesure, de la «tuer» en quelque sorte, mais de parvenir à réduire les écarts entre les différentes mesures, entre les systèmes de précaution». Un processus que nous avons déjà expérimenté en Europe à partir de 1985 avec le passage du marché commun au marché unique. Cette transformation va de pair avec une nouvelle équation d'économie politique. Dans l'ancien monde, tout négociateur avait les consommateurs de son côté, mais les producteurs contre lui, vent debout contre l'accroissement de la concurrence sur leur marché domestique. Dans le nouveau, le jeu se joue à front renversé. Le producteur aspire à pouvoir travailler avec la seule et unique norme qui lui permettra de réaliser des économies d'échelle. Les associations de consommateur, en revanche, montent au front pour lutter, chaque fois que nécessaire, contre ce qu'elles considérent comme une diminution des standards. «Et sur le plan du rapport de forces, ajoute encore l'ancien directeur général de l'OMC, cela change tout. Lorsque la négociation portait sur l'échange d'une mesure tarifaire sur les bicyclettes contre une autre mesure tarifaire sur la ferraille, celle-ci était peu «chargée» politiquement. En revanche, dès lors que l'on entre dans l'univers de la précaution, notamment si l'on parle de bien-être animal, de la protection des données > Pascal Lamy a été le directeur de cabinet et le sherpa de Jacques Delors à la présidence de la Commission européenne de 1985 à 1994. Après un passage à la direction générale du Crédit lyonnais, il est retourné à Bruxelles en 1999 en tant que commissaire européen au Commerce sous la présidence de Romano Prodi avant d'occuper le poste de directeur général de l'OMC de septembre 2005 à août 2013. Manuel Valls lui a confié la mission d'organiser la candidature de la France à l'Exposition universelle de 2025. personnelles ou des OGM, il en va tout autrement, car chaque risque fait référence à des valeurs, une culture, une histoire, une religion...» Dans ce nouveau monde, les acteurs aussi sont différents. Alors qu'hier les négociations sur les tarifs ou les subventions étaient du ressort des gouvernements, les groupes privés donnent le «la» dès lors que le niveau de précaution devient un élément déterminant de l'arsenal concurrentiel. «Toutes ces différences, qui sont plus que des nuances, ont et auront des conséquences majeures sur la philosophie du système d'échanges international, prédit Pascal Lamy, qu'il s'agisse des notions de préférences ou de réciprocité. Plus question désormais de trade-off, comme avec les vélos et la ferraille ou entre mes normes sur les briquets et les vôtres sur les jouets. La précaution 21 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE n'est pas une affaire de troc mais d'harmonisation». Et si la nature des obstacles aux échanges est différente, les priorités que doivent se donner les négociateurs doivent l'être aussi. «Supposons, précise Pascal Lamy, que je sois un exportateur désireux de s'implanter sur le marché mondial... Les coûts moyens auxquels je dois faire face se résument à trois chiffres : 5 % (le tarif commercial moyen pondéré dans le monde), 10 % (le coût de la gestion des flux aux frontières) et 20 % (le coût des écarts de réglementations entre les différents marchés). Ainsi, au cours d'un voyage à Minneapolis, j'ai constaté qu'un producteur d'appareils médicaux à 5 000 dollars pièce était confronté à une quarantaine de réglementations différentes sur la planète ! S'il existait un standard mondial, ses appareils seraient 30 % moins chers. Or, actuellement, les négociateurs consacrent 80 % de leur temps à ce qui ne représente pas plus de 5 % des coûts auxquels l'exportateur doit faire face (le tarif commercial moyen pondéré dans le monde) et seulement 10 % aux 20 % qui représentent le coût des écarts de réglementation, ce qui est beaucoup plus important, notamment pour les PME et les empêche souvent d'entrer dans le jeu des échanges». D'où l'urgence de revoir nos priorités. Dans le nouveau monde, l'ouverture des échanges aura également des conséquences sur la nature du mandat des institutions internationales, et en particulier de l'OMC. Hier, la démarche des négociateurs était placée sous le signe du «moins». Demain, c'est le «plus» qui fera le jeu. Avec, en avant-garde, les pays développés où PIB/tête et niveau de protection sont intimement liés. D'où, a souligné l'ancien directeur général de l'OMC, l'enjeu de la négociation du TTIP, non seulement pour les EtatsUnis et l'Europe, mais aussi pour la planète toute entière car l'accord servira de benchmark dans de nombreux secteurs des biens et services. La mission de l'OMC n'en reste pas moins essentielle, conclut Pascal Lamy. «L'organisation va continuer à administrer la zone grise entre protection et précaution. Elle devra aussi veiller à ce que le processus d'harmonisation progressive suive son cours entre les principaux paysmembres. Enfin, elle aura pour tâche de mener à bien l'ajustement de l'outil technique aux nouvelles exigences de la précaution». Compte-rendu rédigé par Marie-Paule Virard [1] Il s'agit ici du résumé d'une intervention de Pascal Lamy à l'European Centre for International Political Economy (Bruxelles), le 9 mars 2015. 22 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Le numérique révolutionne les Business Models et les modes de vie Lors de l'assemblée générale annuelle d'ICC France, Maurice Lévy, président du directoire de Publicis, a éclairé les mutations et les opportunités promises par l'économie digitale. Voici un résumé de son intervention. L > Publicis : plus de 50 % du chiffre d'affaires viennent du numérique. En rachetant au début de 2015 l'américain Sapient, spécialisé dans le marketing, la communication numérique, le commerce multicanal et le consulting, Publicis a fait un mouvement stratégique déterminant pour construire son avenir. Grâce à cette acquisition, le Français passe la barre symbolique de 50 % du chiffre d'affaires générés par les activités numériques. c'est l'irruption de modèles globaux. Google, Facebook, Youtube, Yahoo, Twitter se sont installés dans tous les foyers de la planète et sont imités un peu partout : qu'il s'agisse d'Alibaba, de Tencent ou de WeChat en Chine, de Yandex en Russie, ces firmes ont eu l'intelligence de copier les modèles américains, de les transformer, de les enrichir et de les adapter à la culture locale. Toutes ces entreprises conquièrent des parts de marché considérables, atteignent des valorisations boursières astronomiques (Google pèse 360 milliards de dollars, Facebook 200 milliards) et disposent de capacités d'investissement inconnues jusque là. Le président de Publicis a souligné également que « Le monde digital présente une autre caractéristique : avec ces nouvelles entreprises, on navigue dans ce que les Américains appellent le blur (le flou). Les frontières sont mouvantes. Et, surtout, elles ont tendance à s'effacer. Certes, Amazon fait du commerce électronique, c'est la part la plus importante de son chiffre d'affaires, mais c'est ailleurs, dans des activités moins connues du grand public, comme la vente de services aux entreprises et le cloud computing, que la firme gagne de l'argent. Google règne évidemment sur le search et a racheté You Tube au bon moment, mais c'est aussi -on le sait moins- le premier média mondial avec 50 milliards de dollars de revenus publicitaires, davantage que Time Warner !» D'une manière générale, les nouvelles technologies viennent en appui de ceux, en général de nouveaux entrants, qui veulent casser les règles, les codes, et transformer une activité jusque là banale en machine à cash. Maurice Lévy fut un des premiers à parler d'«ubérisation» du monde, à partir du mot Uber, du nom de la société californienne de VTC qui a mis les chauffeurs de taxi de la planète au bord de la crise de nerf, pour qualifier cette révolution naissante. La numérisation est en effet en passe Maurice Lévy, président de bouleverser du directoire de Publicis l'économie et... le monde. Aujourd'hui, grâce à l'imprimante 3D, il est possible de construire en Chine une maison à 1 500 euros en moins d'une semaine. Non seulement cette innovation révolutionne le métier du bâtiment, mais cela signifie que le Chinois moyen peut payer sa maison avec moins d'un an d'économies sur son salaire et devenir propriétaire. Notre monde se transforme sous nos yeux, et s'il est encore trop tôt pour mesurer toutes les conséquences de cette révolution, nous savons déjà qu'elles sont innombrables. C'est d'abord une révolution pour l'emploi. Qu'il s'agisse de la nature de tel ou tel métier ou de la manière dont on l'exercera demain. «Déjà, a commenté Maurice Lévy, certains collaborateurs de Publicis ne viennent pratiquement plus jamais au bureau. Cette nouvelle génération conçoit le travail autrement, mais sans compter ses heures. Et il y a aura de plus en plus d'entrepreneurs individuels. Il nous faut imaginer d'autres Business Models, d'autres modes de vie. C'est le moment d'avoir confiance dans le génie humain !». Compte-rendu rédigé par Marie-Paule Virard ©DR e numérique révolutionne la vie de chacun d'entre nous. On compte aujourd'hui entre dix et douze milliards d'appareils connectés dans le monde et lorsque l'internet des objets donnera sa pleine mesure, on arrivera rapidement à trente milliards. De l'automobile sans pilote au taux du cholestérol transmis directement, via une lentille oculaire, sur le smartphone, le champ semble infini. Et pas seulement dans les pays les plus avancés. «Je suis frappé de voir combien le numérique bouleverse la donne en Afrique, où il existe déjà -souvent grâce au mobile toutes sortes d'opérations qui ne nous sont pas encore familières» a commenté Maurice Lévy lors de son intervention. Il a également souligné à quel point «Le numérique révolutionne les Business Models. Ceux sur lesquels nous avons fonctionné dans le passé sont révolus. Quel que soit le secteur d'activité, il s'agit désormais d'en inventer de nouveaux, en rupture avec les précédents». Et ce qui frappe évidemment dans cette évolution, 23 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE « Les entreprises doivent penser et agir avec frugalité, c'est-à-dire créer davantage de valeur en consommant moins de ressources» Navi RADJOU, Conseiller en Innovation & Leadership, co-auteur de « L'Innovation frugale, comment faire ©DR mieux avec moins » (1) Théoricien de l'économie « frugale », Navi Radjou, un quadragénaire franco-indien installé dans la Silicon Valley, prône une nouvelle approche de l'innovation (comment faire mieux avec moins) et dessine, in fine, les contours d'un capitalisme du 21ème siècle fondé sur le partage et l'agilité. Ou quand la rareté se transforme en opportunité... changes Internationaux. Pourquoi la frugalité est-elle, selon vous, une des clés de la croissance au 21ème siècle ? Navi Radjou. Depuis la Révolution industrielle, nous avons adopté un modèle de développement économique à la fois coûteux et gourmand en ressources fondé sur le postulat que celles-ci (capital, énergie, eau) étaient illimitées. Nous avons mis en place d'énormes systèmes industriels qui consomment toujours plus afin de créer des produits de plus en plus sophistiqués et de plus en plus chers. Ce paradigme -une croissance fondée sur le «toujours plus»- est remis en cause par deux facteurs. La récession économique, qui a débuté en 2008, a rendu la classe moyenne, notamment en Occident, plus consciente de la valeur des biens. Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à préférer acheter des produits moins chers voire low-cost plutôt que des produits de marque plus chers. Par ailleurs, ils prennent aussi conscience de l'accroissement des inégalités sociales et des problématiques environnementales et sont de plus en plus nombreux à vouloir défendre des «valeurs». Pour les satisfaire, les entreprises doivent apprendre à «faire mieux avec moins» : créer et proposer des produits et services qui tiennent compte de quatre caractéristiques plébiscitées par les «consommateurs frugaux» É 24 du monde entier : abordabilité, simplicité, qualité et durabilité. Au 21ème siècle, les entreprises doivent penser et agir en «entreprises frugales», c'est-à-dire être capables de créer davantage de valeur économique et sociale en consommant moins de ressources. E.I. A quelles conditions, cette conception peut-elle être davantage qu'une manière chatoyante d'accepter l'inévitable (la rareté) ? N.R. Si la nécessité est la mère de toutes les inventions, alors la rareté en est le père ! Le premier principe du jugaad est de «se servir de ce qui est abondant pour produire ce qui est rare». Dans les pays émergents où les ressources sont contraintes, les innovateurs frugaux transcendent cette rareté afin de créer davantage de valeur à moindres coûts. Au Pérou, par exemple, un pays où le taux d'humidité atteint 95 % et qui ne reçoit que 25 mm de précipitations par an, une équipe d'ingénieurs de Lima a imaginé un panneau publicitaire géant qui absorbe l'humidité de l'air, la condense, la purifie pour produire plus de 90 litres d'eau potable par jour ! De la même manière, les Africains utilisent la densité de l'interconnectivité du réseau mobile (80 % d'entre eux possèdent un mobile) pour surmonter la pénurie de services bancaires ou énergétiques, avec des solutions comme M-PESA (transfert d'argent par téléphone mobile) et M-KOPA (système d'éclairage solaire payé au jour le jour). E.I. Nous avons tendance à voir les pays occidentaux comme les centres d'innovations et les pays émergents comme les grands marchés et/ou les ateliers du monde. Sommes nous en train de basculer dans un tout autre modèle de croissance ? N.R. La Silicon Valley n'a plus le monopole de l'innovation. Désormais, celle-ci est diffuse et «polycentrique» : une multitude de pôles se développent partout dans le monde, dont beaucoup dans l'hémisphère sud. Nous devons prendre conscience que nous sommes entrés dans l'«âge de la convergence» où nous aurons à résoudre ce que j'appelle des «problèmes sans frontières» : les questions liées à l'eau, l'énergie, la santé, l'éducation, sont désormais des problèmes globaux qui concernent plusieurs milliards d'individus, que ce soit dans les pays développés ou en développement. Les entreprises commencent à tisser des réseaux d'innovation globale qui ont vocation à combiner les talents, le capital et les idées afin de co-créer des solutions frugales dans le domaine de l'énergie ou de la santé au profit de l'humanité toute entière. Ainsi, Saint Gobain a installé en Inde son centre de R&D global sur les «solutions durables pour les régions tropicales», régions qui comptent aujourd'hui quelque 3 milliards ©DR DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE > Conseiller en innovation, Navi Radjou veut promouvoir l'innovation « Jugaad », la recette indienne de l'ingéniosité. d'habitants. De la même manière, c'est en Chine que Siemens a localisé son «hub» R&D mondial consacré aux équipements médicaux low-cost. E.I. Pouvez-vous donner d'autres exemples d'innovations «frugales» d'ores et déjà opérationnelles ? N.R. Renault vient juste de lancer la Kwid sur le marché indien. Il s'agit d'une voiture à 4 000 dollars conçue, développée et produite à 95 % en Inde. General Electric a créé une nouvelle business unit baptisée «Solutions durables pour la santé» dont la vocation est de créer des équipements médicaux à faible coût destinés aux marchés à faibles revenus en collaborant notamment avec les ONG. Mais cette démarche n'est pas réservée aux grands groupes. Mon voisin dans la Silicon Valley a créé une start-up baptisée gThrive pour fabriquer des capteurs sans fil qui ressemblent à des règles en plastique que les agriculteurs peuvent utiliser pour collecter des données sur la nature des sols, la température de l'air, le soleil, etc. Ils peuvent ainsi optimiser leur consommation d'eau et d'engrais, tout en augmentant la qualité des récoltes et leur rendement. Cette solution, rentable en moins d'un an, représente une aubaine pour la Californie, cinquième producteur de denrées alimentaires dans le monde également confrontée à une grave pénurie d'eau. E.I. Quels sont encore les principaux obstacles à lever pour que l'économie frugale devienne un véritable levier de développement ? N.R. L'économie frugale est un système économique dans lequel l'offre et la demande se rencontrent plus vite, mieux, de manière moins coûteuse et plus durable que dans un système traditionnel. Un système où la créativité individuelle est reine («small is beautiful») et où les efforts portent sur les économies de gammes afin de proposer des solutions personnalisées et durables grâce à de mini-unités de production (les fablabs) capables de fabriquer une multitude de produits personnalisés pour une multitude de micro-marchés tout en consommant peu de ressources. Pour réussir dans l'économie frugale, nos grandes entreprises doivent redimensionner à la baisse leurs chaînes de valeur en investissant dans des unités de production «agiles», capables de percevoir les besoins des consommateurs et d'y répondre rapidement. Ainsi, Novartis est en train d'investir dans une micro-usine de la taille d'un conteneur capable de produire des médicaments dix fois plus vite et dix fois moins chers et de réduire ses émissions de carbone de 90 % par rapport à un mode de production traditionnel. De même, Leroy Merlin s'est associé à TechShop, une plateforme do-it-yourself, pour ouvrir, en région parisienne, un atelier collaboratif où les consommateurs peuvent venir créer leurs propres produits en ayant accès à des outils et machines jusque là réservés aux professionnels. La devise du 20ème siècle était «je consomme, donc je suis», celle du 21ème sera «je crée, donc je suis». E.I. Quelles sont les caractéristiques de ce nouveau capitalisme ? N.R. C'est ce que j'appelle «le capitalisme frugal» ou «capitalisme décarboné». Dans mon esprit, c'est un capitalisme à valeurs humaines fortes. Un système capitaliste populaire, géré par les individus, pour eux et avec eux. Dans ce système, le coût de l'innovation et de l'échange est proche de zéro. C'est possible dans la mesure où ce capitalisme frugal repose sur deux piliers : le partage et le «faire». L'économie du partage permet aux citoyens d'échanger des biens et services sur un mode «peer to peer» en contournant les intermédiaires. Elle devrait représenter un marché de quelque 335 milliards de dollars à l'horizon 2025. De même, le «Maker Movement» (avec les fablabs et l'imprimante 3D) réduit les barrières à l'entrée pour le développement de nouveaux produits et permet à chacun de devenir un inventeur. Une start-up comme Local Motors, par exemple, vous permet désormais de fabriquer une voiture personnalisée à l'aide d'une imprimante 3D ! Ce mouvement et l'explosion de l'open source en électronique va faire éclore une nouvelle génération de start-ups capables de disrupter des secteurs traditionnels comme la santé ou l'énergie en créant des équipements à la fois plus efficaces et à des coûts jusqu'à cent fois moins importants que ceux qui existent actuellement. E.I. Quels sont les atouts d'un pays comme la France dans cette nouvelle aventure collective ? N.R. Si l'on en croit le Crédoc, près de 15 % des consommateurs français sont prêts à choisir spontanément la frugalité comme style de vie et près d'un sur deux participe déjà activement à ce que l'on appelle l'«économie du partage». De nombreux entrepreneurs et grands groupes mettent en place des business models innovants pour répondre à ces attentes. Nous avons déjà évoqué l'aventure industrielle de Renault, de la Logan à la Kwid. Je citerai aussi Qarnot Computing, une start-up qui vient de lancer un radiateur numérique. Celui-ci est branché sur une prise Internet et ses résistances sont remplacées par des microprocesseurs capables d'effectuer des calculs. La chaleur ainsi générée est utilisée pour chauffer gratuitement logements et bureaux. La France est également à la pointe de l'innovation dans le domaine de l'économie circulaire. Citons, par exemple, Tarkett, un leader mondial du revêtement de sol utilisant de nombreuses techniques de recyclage destinées à éliminer les déchets mis en décharge à l'horizon 2020. Enfin, la France fait figure de championne du «Maker Movement» avec la multiplication des fablabs et des labos communautaires qui favorisent la «bottom up» innovation et son appropriation par le plus grand nombre. Propos recueillis par Marie-Paule Virard [1] Diateino, 2015. 25 DOSSIER : LES GRANDES MUTATIONS À L’ŒUVRE DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE Afrique : des besoins énormes et des ressources encore insuffisamment exploitées ©DR Albert YUMA-MULIMBI, Président de la CPCCAF, président de la Fédération des Entreprises du Congo Albert Yuma-Mulimbi, Président de la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones et président de la Fédération des Entreprises du Congo, met ici l'accent sur les deux priorités de la CPCCAF : le développement des PME, facteur de «croissance inclusive», et la francophonie comme avantage économique à traiter au sein d'un même espace linguistique. e développement économique africain est désormais une réalité admise par tous. Continent de tous les superlatifs, il reste néanmoins largement exclu du commerce mondial : il ne contribue que pour moins de 3 % des échanges. L'Afrique constitue pourtant la zone de plus forte croissance démographique au monde, avec des projections de population de 2 milliards d’habitants au minimum en 2050, et un sous-sol qui recèle 30 % des réserves minérales mondiales tandis que ses terres arables sont les plus abondantes de la planète, avec 50 % de la totalité. La croissance du continent reste forte depuis le début des années 2000, mais elle est malheureusement trop peu inclusive car largement portée par les secteurs primaires peu pourvoyeurs d’emplois et soumis de surcroît aux retournements de conjoncture sur les marchés des matières premières. Tous les acteurs, gouvernements, partenaires techniques et financiers de l’aide au développement, corps intermédiaires, sont pourtant convaincus que le développement africain passera par le renforcement de son secteur privé, de son agriculture largement familiale, de son industrie embryonnaire, du secteur des services, qui constituera la force motrice de l'évolution économique et sociale, structurant la société, favorisant l’émergence d’une classe moyenne, permettant de poser les fondements d’une gouvernance élargie et partagée. Mais ne confondons pas les causes et les conséquences. Il nous faut tout d’abord répondre aux besoins L élémentaires de nos sociétés, en eau, en santé, en énergie, en nourriture et investir prioritairement dans leur satisfaction. Il nous faut investir dans les capacités productives, créer des emplois, former des jeunes, créer des richesses, assurer un environnement des affaires propices aux flux économiques pour permettre aux acteurs de contribuer collectivement au renforcement et au financement de nos États et de nos structures publiques. Deux paris : les PME et la francophonie économique Au sein de la Conférence permanente des chambres consulaires africaines et francophones, qui regroupe depuis 1973 les chambres consulaires de 29 pays africains et francophones, nous avons fait deux paris. Celui des PME et celui de la francophonie économique. Pourquoi les PME ? Parce qu’elles sont les principales vectrices d’emplois dans les pays de l’OCDE comme en Afrique. Dans nos pays, elles sont la courroie de transmission entre la croissance de notre continent et la plus grande redistribution des fruits de cette croissance. Elles consomment, sous-traitent, emploient et investissent localement, elles ont «la croissance inclusive» et l’inclusion est la priorité des priorités. Pourquoi la francophonie économique ? Parce qu’il est aujourd’hui largement prouvé, grâce aux théories de la gravité linguistique, qu’il y a un avantage comparatif à traiter au sein d’un espace commun linguistique. La Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi) l’a mis en évidence : on commerce mieux et plus, quand on parle la même langue. Cela peut sembler banal, mais il a fallu attendre 2013 pour que ce qui n’était qu’une intuition soit prouvé d'un point de vue économétrique. C’est pourquoi, nous agissons au quotidien, avec nos partenaires comme l’Agence française de développement (AFD)ou International Trace Center, via nos chambres de commerce, d’agriculture, des métiers et de l’artisanat, qui sont les représentants de tous les ressortissants économiques de leur territoire, en faveur de projets qui visent à favoriser l’entrepreneuriat, à accompagner le développement des entreprises existantes, à développer leurs compétences techniques et commerciales avec des partenaires francophones et à s’internationaliser pour celles qui le peuvent en s’intégrant aux chaînes de valeur mondiales. Ces projets, nourris de la solidarité francophone au sein d’un espace commun, constituent in fine une forte incitation à nouer des relations économiques entre nos différentes entreprises, objectif qui reste au cœur du projet CPCCAF tel qu'il fut dessiné par ses pères fondateurs, les présidents Senghor, Boigny et Pompidou. ©DR 26 POINT DE VUE L'Unifab a déclaré la guerre à la contrefaçon ©DR Delphine SARFATI-SOBREIRA, Directrice générale de l’Union des Fabricants (Unifab) Lutter contre la contrefaçon, défendre les intérêts des consommateurs et la réputation des entreprises et promouvoir les droits de propriété intellectuelle et industrielle... Tels sont les objectifs principaux de l’Unifab qui s'implique activement dans cette bataille, tant sur le plan juridique que sur celui de la communication et du lobbying institutionnel. ujourd'hui, la contrefaçon a pris une ampleur considérable, au risque d'entacher la créativité et d'étouffer l'innovation. Elle a en outre de nombreuses répercussions négatives, tant sur le plan économique, que sur la santé publique, la fiscalité, l’environnement et l’emploi... 8,8 millions d’articles de contrefaçon ont été saisis en 2014 par les douanes françaises. Ce chiffre en constante augmentation, traduit une réelle prise de conscience des instances tant françaises qu'européennes. D'autant que les contrefacteurs ne se limitent pas à un seul secteur d’activité, c’est toute l’industrie qui est touchée ! Cette pratique illégale, en partie dominée par l’Asie (80% des produits incriminés en proviennent), peut en effet avoir des conséquences économiques et sociales inquiétantes. Les pouvoirs publics chiffrent à 200 000 le nombre d’emplois supprimés par an dans le monde, dont 100 000 en Europe et près de 40 000 en France. A ces pertes s’ajoutent celles des entreprises (environ 10 % de leur chiffre d’affaires), les risques associés à une mise en danger du consommateur et au développement d'une délinquance économique et financière. Au service de ses 200 entreprises membres, issues de tous les secteurs d'activité, l’Union des Fabricants (Unifab), association française de lutte anti-contrefaçon, promeut et protège au niveau européen et international, le droit fondamental de la propriété intellectuelle et agit par le biais de 4 missions principales. L’Unifab s’implique activement au niveau juridique. Elle informe, accompagne et apporte un soutien à ses adhérents, composés d’entreprises et de fédérations professionnelles, dans leur lutte anti-contrefaçon. Cette action passe par le biais A d’informations sur l’actualité législative, l’organisation de commissions juridiques et techniques sur des thèmes définis, la signature de chartes ou l’élaboration de Codes de bonne conduite. .. . Elle dispose aussi d’un collège composé d’experts en matière de propriété intellectuelle en France et à l’étranger Et a ouvert des bureaux à Tokyo (Japon) et à Pékin (Chine) afin d’accroître son rayonnement et son influence à l’international pour répondre aux problématiques posées par la contrefaçon, L’association s'efforce également de sensibiliser le grand public à travers diverses actions de communication. L’objectif est notamment d'initier une prise de conscience des consommateurs quant à la dangerosité des produits de contrefaçon sur la santé ou son imbrication avec les organisations criminelles. Ainsi, l’Union des Fabricants conçoit des campagnes de communication grand public destinées à mettre en valeur l’authentique et ses nombreuses vertus. Elle est également à l’origine de la création de l’édition française de la Journée Mondiale Anti-contrefaçon, d’opérations de sensibilisation estivales du public dans le Sud de la France ou du Forum Européen de la Propriété Intellectuelle, qui réunit plus de 300 participants chaque année et se déroulera à Paris les 11 et 12 février prochains. Elle est, par ailleurs, très active sur les réseaux sociaux. A la fin de l’année, l’Indicam, l’Andema et l’Unifab lanceront de concert leur opération «AuthentiCité» destinée à la promotion des villes engagées dans la lutte anti-contrefaçon par la délivrance d’un label de propreté sous le haut parrainage de l’Office de l’Harmonisation du Marché Intérieur (OHMI). L’un de nos outils de communication privilégié reste le Musée de la Contrefaçon : seul vrai espace qui collectionne les faux, son caractère unique au monde en fait un lieu mythique et original. Rassemblées au gré des diverses saisies en douanes, les contrefaçons y sont présentées aux côtés des produits originaux et sensibilisent près de 15 000 visiteurs par an. Depuis juin dernier, Le musée dresse l' inventaire des nouveaux instruments d’authentification et de traçabilité des produits développés par les entreprises pour lutter contre ce fléau, à l'occasion d'une exposition temporaire, «SUIVEZ LE VRAI A LA TRACE…», mise en place jusqu’en juillet 2016. Si l’Unifab est impliquée dans la prise de conscience du phénomène auprès des entreprises et des particuliers, sa collaboration avec les pouvoirs publics est essentielle (formation notamment des agents opérationnels, échanges, prises de position communes avec l’INPI, implication au sein du CNAC…). Enfin, l’Unifab exerce une action de lobbying auprès d’instances internationales et européennes, telles que la Commission européenne, l’OHMI, l’OMPI ou encore Interpol, afin de protéger la propriété intellectuelle. C’est pourquoi elle a souhaité se rapprocher de la Chambre de commerce internationale (ICC), l’Organisation mondiale des entreprises, très fortement engagée au niveau mondial pour défendre les droits de la propriété intellectuelle et lutter contre la contrefaçon. C’est ainsi qu’ICC conduit depuis de nombreuses années un projet spécial, dénommé BASCAP, fer de lance des entreprises au niveau mondial dans la lutte contre le piratage et la contrefaçon. Ce rapprochement vient de se traduire par la signature récente d’un accord de coopération entre l’Unifab et ICC France. 27 POINT DE VUE V.I.E : la solution RH pour le développement export des PME ©DR Michel OLDENBURG, directeur du V.I.E. de Business France Le Volontariat International en Entreprise (V.I.E) permet aux entreprises françaises de confier à un jeune, homme ou femme, de 18 à 28 ans, une mission professionnelle à l'étranger d'une durée de 6 à 24 mois, renouvelable une fois dans cette limite de deux ans. a première contrainte à laquelle est confrontée une entreprise lorsqu’elle se lance à l’export est relative aux ressources humaines. L’international nécessite un travail préparatoire et impose, dans la plupart des cas, une présence sur place. Pour répondre de manière efficace à cette problématique, le gouvernement a créé en 2000 un statut unique au monde pour donner aux entreprises françaises les moyens humains de leur développement à l’export. Sa gestion est déléguée à Business France, l’agence nationale au service de l’internationalisation de l’économie française, mandatée à cet effet par le Secrétariat d'État chargé du Commerce extérieur, de la promotion du Tourisme et des Français de l’étranger. La formule est ouverte aux jeunes Françaises et Français ayant l’âge requis, de tous profils et niveaux de formation, en règle avec leurs obligations de service national, ainsi qu’aux jeunes ressortissants de l’Espace économique européen dans les mêmes conditions. Le statut public du volontaire exonère l’entreprise de tout lien contractuel (le contrat est passé entre Business France et le candidat) ainsi que de toutes charges sociales en France. Cette formule apporte à l’entreprise, ainsi qu’au V.I.E, un cadre protecteur et sécurisé. Ainsi déchargée des tâches de gestion du personnel, l’entreprise peut se consacrer uniquement au pilotage opérationnel de la mission du V.I.E. Depuis l’instauration du V.I.E en 2000 et le départ des premiers volontaires en 2001, plus de 54 000 jeunes ont L 28 Une formule qui vous fait bénéficier de nombreux avantages financiers. ➢ L’entreprise n’est pas assujettie aux charges sociales en France sur le V.I.E. ➢ Les indemnités (hors frais) versées aux V.I.E en poste sont déductibles du résultat de l’entreprise française avant impôt. ➢ Le budget V.I.E est intégrable dans une assurance prospection COFACE. ➢ Une part importante du coût du V.I.E est prise en charge dans certaines régions (jusqu’à 100% des indemnités du jeune sur 12 mois sur une mission commerciale). ➢ Le recours à un V.I.E ouvre droit au crédit d'impôt export, mesure destinée aux PME qui engagent des dépenses de prospection commerciale afin d'exporter. ➢ Les dépenses liées au recours à un V.I.E sont éligibles au Prêt de développement export Bpifrance. ➢ Le recours au V.I.E est intégré dans le calcul de la taxe d’apprentissage pour les entreprises de plus de 250 salariés. profité du dispositif pour le compte de plus de 5 800 entreprises. Cette opportunité n’est pas réservée aux grands groupes. Bien au contraire. En juin 2015, 1 870 entreprises, dont 67% de PME, avaient eu recours au V.I.E dans le développement de leur activité économique et 8 680 V.I.E étaient en poste dans 128 pays à travers le monde. Depuis sa mise en place, le V.I.E a rapidement trouvé sa place au sein des services RH des entreprises. Il est aujourd’hui reconnu comme une formule efficace pour le développement à l’international des entreprises et un accélérateur de professionnalisation et de carrière pour les jeunes. Il leur permet d’acquérir une vraie expérience professionnelle valorisante à l’étranger. 68 % se sont vu proposer un poste à l’issue de leur mission et, un an après la fin de leur mission, le taux d’embauche est de 97 %. Un signe fort que le Volontariat est, pour les entreprises aussi, un moyen efficace d’évaluer un jeune talent sur le terrain avant une embauche définitive éventuelle. 95 % d'entre elles considèrent le V.I.E comme un vivier de recrutement pour des salariés de valeur et 65 % considèrent que le V.I.E a eu un impact direct sur leur implantation commerciale. Le résultat est au rendez-vous : 73 % des entreprises ayant eu recours au V.I.E ont vu leur chiffre d’affaires progresser, 72 % ont bénéficié d’une hausse de notoriété et 60 % affirment avoir gagné de nouveaux clients (enquête CSA 2011 et 2014). Soulignons enfin que si l’entreprise n’a pas de bureau local, elle peut bénéficier du portage par un grand groupe français implanté dans le pays ou héberger son V.I.E au sein du bureau Business France local ou chez un de nos partenaires. Pour en savoir plus. Business France (0 810 659 659, prix d'un appel local) [email protected] POINT DE VUE Un atout pour l' Europe industrielle: le brevet unitaire et la juridiction unifiée Alice PEZARD, avocat, membre du Groupe d'experts chargé d'établir les règles de procédure de la juridiction unifiée ©DR des brevets, conseiller honoraire à la Cour de Cassation La juridiction unifiée des brevets et le brevet européen à effet unitaire constituent deux institutions essentielles à la survie de l'Europe industrielle. Il y a urgence à les mettre en œuvre après une coopération erratique de plusieurs décennies. n créant, le 19 février 2013, par voie d'Accord international, une Cour européenne des brevets, l'Europe a reconnu l'ampleur et la complexité des questions juridiques portant sur les brevets. Cette juridiction unifiée des brevets (JUB) a vocation à harmoniser la jurisprudence européenne en ce qui concerne la validité des brevets et les sanctions contre la contrefaçon, à l'instar de la mission de la Court of Appeals for the Federal Circuit américaine. Parallèlement, l'Union européenne s'est dotée -par règlement du 17 décembre 2012- d'un brevet européen à effet unitaire. E Un brevet à effet unitaire. Le brevet à effet unitaire n’est pas un nouveau titre de propriété industrielle mais le brevet européen créé par la signature de la Convention de Munich du 5 octobre 1973 (CBE). Il aura désormais un effet unique restreint aux États de l'Union ayant ratifié. Sa portée peut être demandée pour plusieurs ou l'un des États contractants de la Convention de Munich. Son entrée en vigueur est subordonnée à celle de la juridiction unifiée des brevets (la JUB) et est prévue le mois suivant le dépôt du 13ème instrument de ratification de l’Accord à condition que la Grande-Bretagne, la France et l'Allemagne aient ratifié. À ce jour, 8 États ont déjà ratifié, parmi lesquels la France, le 13 février 2014. Selon l'Accord intervenu le 24 juin dernier entre les États de l'Union européenne, à l'exception de l'Espagne, la Pologne, l'Italie et la Croatie, sur le montant des redevances qui seront dues par les titulaires, l'enregistrement de ce brevet en une seule fois coûtera moins de 5 000 euros, soit six fois moins qu'aujourd'hui. Un régime provisoire pour la langue du brevet s'impose pendant une période ne pouvant aller au-delà de douze ans : le breveté devra fournir une traduction en anglais si le brevet est en français ou en allemand, et si le brevet est en anglais, une traduction dans une autre langue de l’Union. Une juridiction unifiée Chaque État membre pourra avoir une ou plusieurs divisions locales, dans la limite maximale de quatre. Plusieurs d'entre eux pourront se regrouper pour créer une division régionale. La Division centrale ou Tribunal de première instance aura son siège à Paris, avec deux sections à Londres et à Munich et le premier président sera un magistrat français avec le greffe installé à Munich. La section de Londres traitera les nécessités courantes de la vie, dont les produits pharmaceutiques, la chimie et la métallurgie ; celle de Munich, la mécanique, l’éclairage, le chauffage, l’armement et le sautage ; la Division centrale traitera à Paris des techniques industrielles et des transports, des textiles, du papier, des constructions fixes, de la physique et de l’électricité. La Cour d'appel aura son siège et son greffe à Luxembourg. Des comités de médiation et d’arbitrage seront créés à Lisbonne et à Lubiana. La JUB sera composée d'une centaine de juges qualifiés sur le plan juridique et/ou sur le plan technique. Un centre de formation a ouvert ses portes à Budapest. La «bifurcation» allemande, qui distingue le juge de la validité du brevet et celui de la contrefaçon ayant été retenue, la division locale ou la division régionale a le pouvoir discrétionnaire de : • juger l'action en contrefaçon et la demande reconventionnelle en nullité (en s'adjoignant un juge technicien) ; • renvoyer la demande reconventionnelle en nullité devant la Division centrale et juger l'action en contrefaçon ; • avec le consentement des parties, renvoyer l’affaire devant la Division centrale. La Division centrale a pour compétence la demande en nullité des brevets. S'agissant de la contrefaçon, la Division compétente peut être celle du lieu de la contrefaçon, du domicile du défendeur ou celle choisie par les parties. L'octroi des dommages et intérêts est séparé avec une prescription quinquennale à partir de la date à laquelle le breveté a eu connaissance de la contrefaçon. La langue de la procédure devant les Divisions locales ou régionales est la langue nationale ou l’une des trois langues officielles de 1'OEB (anglais, allemand et français). La division locale française retiendra vraisemblablement à la fois le français et l'anglais. Devant la Division Centrale, comme en appel, seule la langue du brevet est applicable. La représentation est assurée par un avocat d'un État-membre ou un mandataire européen spécialisé, avec à l'audience, l'assistance facultative d'un mandataire en brevets, tous protégés par le «legal privilege». La survie de l'Europe industrielle exige une entrée en vigueur de ces institutions dans les meilleurs délais en limitant le système de l'«opt out», réversible à tout moment qui permet pendant 7 ans, renouvelable une fois, au titulaire d'un brevet européen classique de déroger à la compétence exclusive de la juridiction unifiée en contrepartie du paiement d'une taxe. 29 ÉVÉNEMENTS Les nouvelles règles du jeu douanier en Europe Le 20 octobre dernier, la commission « Politique commerciale, douanes et facilitation du commerce » d'ICC France organisait un séminaire consacré à la réforme du Code des Douanes de l’Union (CDU) réunissant des experts de la Direction Générale des Douanes (DGDDI), mais aussi de chargeurs et de commissionnaires. Au programme : les nouvelles règles du jeu douanier de l’Union. ien que le CDU soit entré en vigueur le 30 octobre 2013, i l n ’ e st p a s p o u r a u ta n t applicable. Depuis janvier 2014, la Commission, les États-Membres et les représentants du Trade ont discuté activement des dispositions d’application (désormais baptisés «Actes d’exécution» et «Actes délégués», selon la nouvelle nomenclature du Traité de Lisbonne) appelées à remplacer les actuelles Dispositions d’Application du CDC. L’ensemble de ces textes entrera en vigueur le 1er mai 2016. Afin d'en faciliter la mise en œuvre, la nouvelle réglementation comporte des dispositions transitoires jusqu’au 1er mai 2019. B Des facilités accrues sous conditions Le CDU est un projet ambitieux qui vise à la fois la modernisation et la sécurité de l’Union Douanière. L’Opérateur Économique Agréé y tient une place de choix. Si les conditions d’obtention de cette certification ne connaissent pas de changements majeurs, le CDU ambitionne en revanche d'octroyer des «avantages» effectifs aux Opérateurs économiques agréés (OEA). En matière de contrôles douaniers, le principe de l’allègement est maintenu, tandis que l’OEA se voit notamment offrir la possibilité de choisir le lieu de déroulement du contrôle. Le dédouanement centralisé communautaire, qui permet de déposer des déclarations dans un État-Membre distinct de celui de l’introduction physique des marchandises, sera réservé aux OEA-C. 30 Dans le CDU, les régimes «économiques» du CDC deviennent «particuliers». Outre cet amendement terminologique, de nombreux changements sont à noter, comme, par exemple, la disparition des régimes de l’entrepôt de type D et de la transformation sous douane, la généralisation de la taxation de la plus-value pour le perfectionnement passif, ou encore, la dématérialisation du document de transit. Un examen approfondi des dispositions transitoires s’impose pour tous les opérateurs afin d’anticiper les changements opérationnels à venir. Les règles d’assiette de la valeur en douane Sur cette question essentielle pour les chargeurs, les évolutions sont importantes. En matière de ventes successives, le CDU supprime progressivement une facilité qui permettait aux opérateurs de se référer à une vente «antérieure» pour les besoins de l’évaluation. Sous l’impulsion de l’Organisation mondiale des Douanes (OMD), la vente pour l’exportation sera désormais la dernière avant l’introduction des marchandises sur le territoire de l’UE. Très contestée par ICC, cette réforme sera mise en œuvre après une période de «grâce» prenant fin au 31 décembre 2017. En matière de redevances, la rédaction des nouveaux textes n’est pas sans susciter quelques questionnements. En effet, la «condition de la vente», autrefois requise dans des conditions strictes pour l’inclusion des redevances dans la valeur en douane, se trouve définie de façon très extensive. Toutefois, la DGDDI rappelle que l’objectif n’est pas pour autant de taxer toutes les redevances et indique que la Commission Européenne travaille à l’élaboration de règles directrices pour éclairer la portée de ces nouvelles dispositions. La représentation en douane La dualité des modes de représentation - directe et indirecte - est conservée au sein du CDU. Toutefois, la représentation directe, autrefois réservée en France aux commissionnaires en douane, sera ouverte à d’autres opérateurs, chargeurs ou transitaires non agréés. Outre cette ouverture, un opérateur pourra exercer une représentation en douane dans un État-membre autre que celui dans lequel il est établi, sous réserve d’y être enregistré. Ces changements devront se traduire d’ici la fin d’année par une nouvelle législation au plan français. La réforme du CDU représente une étape importante dans la modernisation de l’Union Douanière. Pour autant, ce processus doit faire face à des défis importants, notamment l’interopérabilité des systèmes informatiques au sein de l’UE, prévue pour fin 2020, qui conditionne l’effectivité de certaines facilités promises aux opérateurs. ©DR ©DR Raphaël BARAZZA, Avocat au barreau de Paris, membre de la Commission Politique commerciale, douanes et facilitation du commerce d'ICC France, représentant au Trade Contact Group ÉVÉNEMENTS Retour sur trois années d’application du Règlement d’arbitrage de la CCI Christine LECUYER-THIEFFRY, associée co-fondatrice de Thieffry et associés et avocate au barreau de Paris ©Gilles Dacquin Le séminaire qui s’est tenu le 23 juin 2015 au siège mondial de l'ICC, organisé par ICC France dans le cadre de l’Observatoire de pratique du Règlement d’arbitrage de l'ICC, a permis autour de trois tables rondes de faire le point et de débattre sur trois années de son application. oin de suivre un phénomène de mode, les dispositions relatives à l’arbitrage d’urgence répondent à un besoin des utilisateurs. Tel est le constat du Secrétaire général de l a C o u r , A n d ré a Carlevaris, qui a précisé que chaque affaire pose de nouvelles questions dans un contexte où le panorama législatif sur l’exécution des décisions de l’arbitre d’urgence est en évolution. L Un groupe de travail sur l'arbitre d'urgence Cela a conduit la Commission internationale de l’arbitrage à confier au groupe de travail co-présidé par Diana Paraguacuto-Maheo la mission d’étudier les retours d’expérience sur l’utilisation la procédure d’arbitre d’urgence d’ICC ainsi que sur celles d’autres institutions d’arbitrage, d’analyser les questions de procédure et de fond et d’examiner les tendances qui pourraient se dessiner. Philippe Pinsolle a, quant à lui, constaté que les dispositions nouvelles relatives aux arbitrages complexes sont parfois utilisées par les parties et leurs conseils de manière stratégique pour influer sur la constitution du tribunal arbitral ou la remettre en cause, entraînant ainsi inévitablement des délais dans la constitution du tribunal arbitral. De la bonne utilisation de la conférence sur la gestion de la procédure Yves Derains, et à ses côtés Roland Ziade et Isabelle Hautot, forts de leurs expériences respectives en tant qu’arbitre, conseil et représentant de l’entreprise, ont abordé les questions pratiques liées aux rôles respectifs des parties et du tribunal arbitral dans la conduite de la procédure. Le besoin de prévisibilité des parties et leurs conseils résultant d’une certaine standardisation de la procédure ne devrait pas faire obstacle à la flexibilité de la procédure arbitrale et devrait conduire à évoluer vers du « sur mesure ». La conférence sur la gestion de la procédure offre à l'arbitre l’occasion d’agir en pédagogue en indiquant aux parties que ce qui importe est de prouver leurs demandes et d’établir une relation directe entre leurs allégations et la preuve qu’elles rapportent. Pour cela il doit s’investir dès le début de la procédure en prenant connaissance des éléments du dossier sans hésiter à tenir d’autres conférences de la procédure à l’occasion de points d’étape après l’échange des premiers mémoires et autant que nécessaire. Vers une plus grande transparence Face à la concurrence de plus en plus vive des institutions d’arbitrage le nouveau président de la Cour, Alexis Mourre, a réaffirmé sa volonté de renforcer le caractère global et inter- national de la Cour d’arbitrage en prolongeant son ouverture vers l’Amérique Latine et en organisant des réunions ailleurs qu’à Paris. Ainsi, en 2016, une session de travail de la Cour se tiendra à New York. Dans un contexte de suspicion à l’égard de l’arbitrage d’investissement qui risque de contaminer l’arbitrage commercial, il a par ailleurs souligné que l'ICC se devait d’être exemplaire dans ses pratiques. Le débat entre le professeur Laurent Aynes et Laurence Kiffer a porté sur l’exigence de transparence de plus en plus forte de l’arbitrage qui n’est pas sans incidence sur les délais de constitution du tribunal arbitral et qui s’est traduite par une évolution de la pratique de la Cour sur la non-communication aux parties des motifs de ses décisions. Depuis le mois d’octobre, par dérogation aux dispositions du Règlement, et à la demande de toutes les parties, la Cour pourra communiquer les motifs des décisions de récusation d’un arbitre ou de son remplacement lorsque celuici intervient à l’initiative de la Cour. Cette pratique pourrait être étendue à la demande de toutes les parties aux décisions rendues sur la jonction d’arbitrages et sur la compétence prima facie. Pour en bénéficier, les parties devront en faire la demande avant que la décision de la Cour ne soit prise. La décision d’accepter ou de rejeter une telle demande reste à la discrétion de la Cour qui peut la conditionner à une augmentation des frais administratifs n’excédant pas normalement 5 000 dollars. 31 FORMATIONS ET SÉMINAIRES Programme d’ICC France au 1er semestre 2016 Notez les prochains rendez-vous sur votre agenda ! Avec son Centre de Perfectionnement au Commerce International (CPCI), ICC France répond aux besoins des entreprises françaises désireuses de former et de perfectionner leur personnel aux techniques et aux règles du commerce international. epuis sa création en 1919, la C h a m b re d e C o m m e rce Internationale s’est donnée pour mission d’élaborer des règles et des contrats-types pour faciliter les transactions commerciales internationales : Incoterms, contrats modèle … etc ; autant d'outils qui correspondent à de bonnes pratiques reconnues dans le monde entier. Ainsi, les entreprises peuvent négocier des contrats équilibrés et sécuriser leurs transactions internationales. D NOS FORMATIONS Au cours du 1er semestre 2016, les formations et séminaires portent principalement sur le Trade Finance et les modes alternatifs de règlement des litiges. Pour animer ces formations, ICC France fait appel aux meilleurs spécialistes des sujets, dotés d’une solide expérience comme formateurs. Chaque formation propose deux niveaux : initiation ou maîtrise. La priorité est donnée aux sessions d’une journée ou aux sessions fractionnées, mais rapprochées dans le temps. Le nombre de participants est volontairement limité à 12 personnes par stage, afin de faciliter le processus pédagogique et l’interaction entre participants et formateurs. Les sessions se tiennent principalement à Paris, au siège d’ICC France (9, rue d’Anjou 75008 Paris). Sur demande auprès d’ICC France, il est possible de les organiser en entreprises et partout en France. Calendrier Règlement des litiges • 14 janvier 2016 : Expertise en médiation internationale • 13, 20, 27 janvier, 3 et 10 février 2016 : Etude d’un cas d’arbitrage international Trade Finance • 9 et 10 mai 2016 : Maîtrise des garanties bancaires internationales • 12 mai 2016 : Opinions bancaires d’ICC sur les crédits documentaires • 18 au 26 mai 2016 : Formation intensive aux crédits documentaires • 2 et 3 juin 2016 : Initiation aux crédits documentaires • 16 juin 2016 : Initiation aux garanties bancaires internationales NOS SEMINAIRES Soucieux de répondre aux préoccupations des entreprises, ICC France organise chaque année des séminaires sur des thèmes économiques et juridiques d’actualité. Nous nous attachons à choisir les meilleurs experts pour intervenir dans le cadre de ces manifestations. Nous faisons appel à d’éminents professeurs de faculté, des avocats et des conseils, des magistrats, des dirigeants d’entreprises, des représentants d’organisations professionnelles pour animer ces séminaires. En général, les séminaires se déroulent soit sur une demi-journée, soit sur une journée, au siège mondial de la Chambre de Commerce Internationale 33-43 avenue du Président Wilson Paris 16ème. Calendrier SEMINAIRES PROGRAMMÉS AU COURS DU 1er SEMESTRE 2016 Ils porteront sur les thèmes suivants : - L’actualité du Trade Finance (20 janvier 2016) - Contribution de la justice transactionnelle à la lutte contre la corruption (23 février 2016) - Le droit des marques et le développement des nouvelles technologies de communication, en partenariat avec l’UNIFAB (mars). - L’application extraterritoriale des lois nationales : un obstacle pour le commerce mondial et l’investissement international ? en partenariat avec l’AFJE (mars/avril). - L’arbitrabilité des litiges liés à la corruption (mai/juin) Retrouvez le programme détaillé de nos formations et de nos séminaires sur www.icc-france.fr Pour plus d’informations et vous inscrire, contactez ICC France, au 01 42 65 12 66 ou envoyez un message à : [email protected] 32 sur et Les Cahiers Échanges Internationaux TERRITOIRES ■ La douane : accompagner les entreprises à l'international ……………………………………………………………………36 ■ Délégation aux Relations Internationales (DRI) : une coordination accrue de la politique douanière communautaire ………………………………………………38 Jean-François DUTHEIL, Chef de la DRI ■ Des entreprises plus compétitives en matière douanière ………………………………………………………………………………40 ©DR Michèle PETITGENET, présidence de l’Office de développement par l’automatisation et la simplification du commerce extérieur (ODASCE) ■ Sécuriser un contrat de partenariat ……………………………42 Éric NIGRI, avocat du Cabinet Simmons & Simmons LLP et Julien MOIROUX, avocat du Cabinet Simmons & Simmons LLP LES CAHIERS ÉCHANGES INTERNATIONAUX : ■ Assurer la visibilité internationale des French Tech ……………………………………………………………………44 ■ Accompagner les jeunes pousses innovantes ………47 • Directeur de la publication : Jean-Pierre KALFON ■ DJP Avocats l’excellence du service • Rédactrice en chef : Sophie SCHNEIDER ■ Pétrole et gaz, des énergies compétitives ………………71 • Directeur commercial : David ADAM • Rédaction : Domitille NOTTÉ • Imprimeur : PRINTCORP Régie publicitaire : OCIREP 15, rue des Voisins CP 517 CH 1211 GENÈVE 4 - Suisse Tél. : (41) 22 322 12 50 Dominique MENIGAULT, Directeur général adjoint de Pierre & Vacances Conseil Immobilier ■ Évaluer les politiques publiques …………………………48 Me. Jacques SAINT JALMES, Associé ■ La gestion de patrimoine …………………………………………………51 ………………………………55 ■ Notre métier : experts en aménagements durables ……………………………………………………………………………………57 Pascal ROUX, Président de MDP Consulting ■ Faire appel au financement participatif ……………………58 ■ Achat groupé d’énergie ……………………………………………………59 ■ Un nouveau centre à Paris XVIIe ■ Ces femmes qui réussissent …………………………………60 …………………………………………63 SUCCESS STORY, UNE BELLE RÉUSSITE ■ Au service de votre bien-être ! ……………………………………64 Samuel LEVINE-PARISI, CEO du groupe Bioloka Jonas HADDAD, Arnaud TOUATI et Harry ALLOUCHE, cofondateurs du cabinet Alto Avocats • Edtions OPAS 41, rue Saint-Sébastien 75011 PARIS Tél. : 01 49 77 49 00 Fax : 01 49 77 49 46 RCS Paris B 333 953 123 TVA intra-communautaire : FR 22 333 953 123 • Coordinatrice des dossiers : Margaret LANG ■ « Nous sommes au service de l’exploitation touristique… » …………………………………………………………………………52 TERRITOIRES ■ La banane, un des fers de lance de l’économie ultramarine ……………………………………………………………………………66 ■ La Banane Française cultivée en Guadeloupe & Martinique …………………………………………………………………………69 L’ÉNERGIE, SECTEUR PÉTROLIER ET GAZIER ■ Entrepose-Spiecapag : spécialistes des projets complexes ………………………………………………………………………………75 Jacquelin de LA PORTE DES VAUX, Directeur Commercial EPC Onshore d’Entrepose ■ Pétrole : les majors s’adaptent ……………………………………73 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX ■ AirBusiness Academy, un accompagnement sur mesure des acteurs du secteur aéronautique ………78 Michèle OBERTO, Directrice d’AirBusiness Academy* ■ Relations économiques franco-canadiennes : dynamiques et complémentarités ………………………………90 Caroline CHARETTE, Ministre Conseiller aux Affaires économiques et commerciales de l’Ambassade du Canada, Déléguée commerciale principale RÉUSSIR AU CANADA ■ Des liens franco-canadiens d'une intensité exceptionnelle ………………………………………………………………………82 S.E. Nicolas CHAPUIS, Ambassadeur de France au Canada ■ Thales Canada, modèle de la philosophie du groupe ………………………………………………………………………………………85 Mark HALINATY, Président-directeur général, Thales Canada Inc. Thales Canada as a model of the Group’s philosophy ……………………………………………………87 ■ Air Canada : la plus européenne des compagnies d’aviation américaines ………………………………………………………93 David GEGOT, Directeur Général France, Espagne et Portugal d’Air Canada ■ Un marché porteur pour les entreprises françaises …………………………………………………………………………………94 Mark HALINATY, President and CEO, Thales Canada Inc. Philippe HUBERDEAU, Chef du service économique régional au Canada *Interview réalisé en décembre 2015 avant le changement de direction. 33 Les Cahiers Échanges Internationaux ■ Le Canada, meilleur pays du G-20 où faire des affaires …………………96 Véronique LOISEAU, Directrice générale de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française au Canada ■ BCF Avocats d’affaires : audace et authenticité ……………………………………98 Gilles SEGUIN, Associé, Avocat, Vice-Président du Conseil d’Administration ■ Le Groupe Shemay : pour un accompagnement stratégique à l’international ……………………………………………………………………………………………………100 Serge HENRY, Dirigeant de Shemay International Partners® ■ Un pays à découvrir …………………………………………………………………………………………102 Alain LELLOUCHE, Président de la Section Canada des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) ■ Le Québec, destination privilégiée des investisseurs et entrepreneurs français …………………………………………………………………………………104 Marc AUDET, Président et Chef de la direction Auray Capital ■ Banque Transatlantique Gérer un patrimoine et investir en France et au Canada…………………107 David EAP, Directeur du bureau de représentation de la Banque Transatlantique et du CIC à Montréal ■ Desjardins, groupe financier de référence pour les entreprises françaises et canadiennes ……………………………………………………………………………108 Lucia BALDINO, Directrice du Bureau de représentation Desjardins (Europe) ■ Le Canada, relais de croissance à l'international ■ Développer le potentiel des entreprises françaises ……………………………………………………116 Michel PATRY, Directeur de HEC Montréal ■ L’École entrepreneuriale : une culture du risque et de la réussite …………………………………………………………………………………………………118 Rino LÉVESQUE, cofondateur de l’Organisation Internationale des Écoles Communautaires Entrepreneuriales Conscientes (OIECEC) ■ École canadienne bilingue de Paris : l'enseignement canadien rayonne ………………………………………………………………121 ■ Retour à la compétitivité …………………………………………………………………………………138 Richard GOMES, Directeur de Business France en Espagne LA SUISSE UNE ÉCONOMIE SOLIDE ET DIVERSIFIÉE ■ Priorité à l’innovation …………………………………………………………………………………………141 Florence DOBELLE, chef du service économique régional en Suisse, Ambassade de France en Suisse ■ La chambre pour le commerce et l’industrie France Suisse Partenaire de votre réussite ……………………………………………………………………………144 ■ Montreux-Riviera, dynamisme économique et qualité de vie ………146 Bernard SCHMID, Directeur de Promove - Promotion économique de la région Riviera-Lavaux ■ Platinn, plateforme de soutien aux innovations des start-ups et PME …………………………………………………………………………………………148 ■ Plateforme logicielle Semeion : passerelle vers la compétitivité 151 Jean-Christophe GODINAUD, Président du Groupe Meninx ■ Encourager l’entrepreneuriat LA ROUMANIE CONSERVE SON ATTRACTIVITÉ ■ France-Roumanie : un partenariat solide …………………………………………………124 …………………………………………………………………………152 Stéphane SCHNEIDER, Directeur de la section suisse des conseillers du commerce extérieur de la France ■ Faciliter le recrutement à l’international …………………………………………………155 Sébastien BUDZINSKI, Directeur Général de Easy Expat International ■ La gestion de patrimoine en Suisse …………………………………………………………157 Alexandre VALLADIER, Fondateur de A&M, Global Family Office SA ■ TeamWork management : l’ingénierie informatique au cœur des entreprises internationalisées ………………………………………………………………158 Hélène LEONE, directrice de l’école Philippe REY-GORREZ, Président ■ Des valeurs partagées ………………………………………………………………………………………161 Norbert FOERSTER, Directeur de l’Institut international de Lancy (IIL) et Président de la Fédération Suisse des Écoles Privées (FSEP) …………………………………………………127 ■ « Nous formons les futures personnes influentes du monde » ……164 Dana GRUIA DUFAUT, avocat à la Cour d’Appel de Paris et au Barreau de Bucarest Thomas SCHÄDLER, Directeur du Collège du Léman, à Genève L’ESPAGNE VERS UNE NOUVELLE CROISSANCE 34 …………………………136 Emmanuel MIELVAQUE, Président de la section des conseillers du commerce extérieur de la France en Espagne Christoph MEIER, Directeur de l’association Philippe de DREUZY, président directeur général de MSH INTERNATIONAL à Calgary ■ Droit et pratique du droit en Roumanie ……………………………134 Santiago MENDIOROZ, Conseiller économique et commercial en chef de l’Office économique et commercial de l’ambassade d’Espagne en France ………………………………110 ■ MSH International au Canada : ce qui se conçoit bien s’énonce clairement ……………………………………………………………………………………………113 ■ Un enseignement ouvert sur le monde ■ « La France est le premier marché de l’Espagne » ■ Institut « La Gruyère » : un projet pédagogique à vocation internationale …………………………………………………………………………………166 ■ Des échanges fructueux ……………………………………………………………………………………131 Anne BUTTY REVAZ, Directrice générale Jean-François COLLIN, Ministre conseiller pour les Affaires économiques de l’ambassade de France en Espagne ■ La Suisse, économie solide et diversifiée ………………………………………………168 ©DR Orly. Les services de la douane informent et soutiennent les opérateurs économiques dans leurs démarches tout en s'adaptant aux évolutions engendrées par le Code des Douanes de l'Union (CDU), applicable à partir du 1er mai 2016. Un délai de trois ans a été prévu pour faciliter la prise en compte des changements. a douane française est partenaire des sociétés exportatrices, notamment grâce à ses cellules d'aide et de conseil aux entreprises (CCE), situées dans les pôles d'action L économique (PAE). Les CCE les conseillent en matière d'optimisation des procédures douanières afin d'améliorer leur compétitivité à travers un gain de temps et une réduction des coûts de trésorerie, grâce à des entretiens personnalisés ainsi qu'un examen de la situation des entreprises. Le Code des Douanes de l'Union, entré en vigueur le 30 octobre 2013 Le statut d'opérateur économique agréé Des formalités douanières allégées sont appliquées aux entreprises disposant du statut d'opérateur économique agréé (OEA). Il s'agit d'un label de qualité en matière douanière pour les sociétés évoluant dans le domaine du commerce international. Les importateurs, exportateurs, transporteurs, logisticiens, entités aéroportuaires chargées de l’acheminement et du stockage temporaire de fret et commissionnaires en douane et de transport y sont éligibles. Les critères de délivrance prévus par le CDU ont pour but de « garantir le haut niveau de fiabilité des opérateurs qui bénéficieront des avantages OEA ». Les opérateurs doivent prouver qu'ils respectent les « normes pratiques en matière de compétence ou de qualification professionnelles directement liées à l'activité exercée ». Leurs antécédents en matière de réglementations douanière et fiscale sont de plus contrôlés, de même que l'absence d'infractions pénales graves effectuées dans le cadre de leur activité économique avec en outre des critères renforcés concernant leur solvabilité financière. On distingue le statut OEA-C (simplifications douanières) et OEA-S (sûreté-sécurité) et leur combinaison (OEA-Full). Le statut OEA est situé « au cœur du futur dispositif de sécurisation des marchandises » du CDU et de nouvelles facilitations douanières sont accordées. Il permet notamment un accès exclusif à l'inscription dans les écritures avec dispense de notification de présentation, au dédouanement centralisé communautaire et à l'auto-évaluation. Il permet également d'être averti au préalable d'un contrôle douanier en étant prioritaire et en choisissant son lieu. ©DR > La douane : accompagner les entreprises à l'international > 36 Port de Rouen. ©Panatfoto - Fotolia.com et applicable le 1er mai 2016, remplacera le Code des Douanes Communautaire et ses dispositions d'application. Il vise à « adapter la législation douanière européenne à plusieurs évolutions », telles que les normes SAFE adoptées en 2005 par l'Organisation mondiale des douanes afin de sécuriser les échanges commerciaux. Elles ont été révisées en 2012 à la suite des attentats du 11 septembre 2001 et ont entraîné une modification du système de contrôle des importations au sein de l'Union européenne. Avec le CDU, les procédures sont modernisées : par exemple, le dédouanement centralisé, applicable à l'échelle nationale ou européenne, permettra à un opérateur de « centraliser auprès d'un seul bureau de douane le dépôt de l'ensemble de ses déclarations d'importation et d'exportation relatives à des opérations réalisées auprès de plusieurs bureaux de douane situés soit dans un seul Etat membre (DC national) soit dans plusieurs États-membres (DC Communautaire) ». Le bureau de déclaration délivrera la mainlevée des marchandises et le bureau de présentation est chargé de leur contrôle, un système d'échanges d'informations étant prévu entre les deux entités. Par ailleurs, le nouveau Code pose le principe de la dématérialisation et du stockage électronique de l'information afin de simplifier les relations entre la douane et les entreprises. Une période transitoire a été instaurée jusqu'au 31 décembre 2020, durant laquelle les services de la douane devront mettre en conformité les systèmes d'information. En outre, le délai de stockage des marchandises est prolongé et passe à 90 jours pour tous les moyens de transport (il s'établit aujourd'hui à 45 jours pour le transport maritime et à 20 jours pour les autres modes de transport). Les renseignements contraignants sur l'origine (RCO) établissent l'origine préférentielle (taux de douane réduit ou nul) et non préférentielle (marquage de l'origine, etc.) ainsi que le classement tarifaire des marchandises afin de déterminer en particulier le montant des taxes et droits éligibles avec les renseignements tarifaires contraignants (RTC). Le nouveau texte fixe à 120 jours le délai de délivrance des RTC et des RCO, la douane française s'engageant à un délai de 70 jours, étant un organisme certifié par l'AFNOR. Ils seront par ailleurs valables durant trois ans et seront mentionnés dans les déclarations d'importation. Une garantie globale sera établie pour les régimes particuliers et le dépôt temporaire à condition que les opérateurs n'aient pas commis d'infraction grave ou répétée dans le cadre de leur activité. De plus, le CDU envisage que « les autorités douanières puissent autoriser un opérateur à réaliser certaines opérations douanières qui leur incombent », par exemple des contrôles de conformité ou encore le calcul de droits. Des expérimentations seront menées en vue de cette auto-évaluation. Enfin, certains opérateurs pourront déposer une déclaration en douane sous la forme d'une inscription dans leurs écritures à la demande des autorités douanières. Comme l'a souligné Hélène Crocquevieille, la Directrice générale des douanes et droits indirects (DGDDI), le 22 septembre 2015 à Bercy, « pour faciliter l’appréhension du nouveau code, nous avons tout d’abord beaucoup oeuvré pour que des dispositions transitoires soient mises en place. C’est ainsi qu’une transition juridique sera instituée, dès le 1er mai 2016, pour une durée de trois ans, afin de permettre l’adaptation progressive de l’ensemble des procédures mises en place sur la base du Code des douanes communautaire et de ses dispositions d’application ». Source : www.douane.gouv.fr 37 TERRITOIRES Délégation aux Relations Internationales (DRI) : une coordination accrue de la politique douanière communautaire Jean-François DUTHEIL, Chef de la DRI ©DR Créée en 2010, la Délégation aux Relations Internationales, contribue par ses politiques de coopération avec les services des autres pays, à la mutualisation et à l’harmonisation des pratiques au plan international. uelles sont les grandes missions de la Délégation aux Relations Internationales ? Créée dans un contexte de mondialisation, notre délégation s’articule autour de trois grands thèmes. Q Le premier vise à la facilitation, qu’il s’agisse d’aider les entreprises ou de fluidifier la circulation des marchandises licites. Le second concerne la lutte contre les fraudes dans lequel notre large réseau d’attachés douaniers et d’experts techniques internationaux est toujours en première ligne. Nous combattons ainsi les trafics et la criminalité de tout ordre, qu’il s’agisse des trafics illicites comme les stupéfiants, les armes, les contrefaçons, la contrebande de cigarettes, de la fraude économique et commerciale ou du terrorisme. Notre troisième thème est celui de la gouvernance. En qualité d’expert de la technique douanière, nous participons ainsi à l’organisation et à la mise en œuvre d’actions de recrutement et de formation. Nous veillons également à developper le partage et la transmission des bonnes pratiques aux agents des douanes des 38 administrations étrangères partenaires, en particulier sur le continent africain. Nous dispensons ainsi annuellement plusieurs centaines de formation. Comment évoluent les coopérations internationales, bilatérales ou multilatérales ? Elles s’envisagent sous trois axes : institutionnel, technique et opérationnel. Notre réseau est très large et les coopérations multiples, intenses et continues. Dans la seule zone Antilles-Guyane, quatre directions des douanes françaises sont établies. Nous participons bien évidemment à la Conférence Douanière Inter-caraïbe et bénéficions d’un outil formidable qu’est le Centre Interministériel de Formation Anti-Drogue (CiFAD), chargé de conduire des actions de formation et de coopération pour renforcer les capacités des administrations des États concernés. Les coopérations s’appuient également sur la présence d’attachés douaniers à Washington, Miami, Bogota, Caracas et Sao Paulo. Comment s’articule la circulation des marchandises et la lutte contre les fraudes douanières ? Notre métier de douanier est de concilier facilitation et contrôle. En étroite relation avec la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED), la DRI assure l’interface entre les services douaniers français et nos homologues étrangers. Nous avons ainsi une mission permanente de recueil de renseignements et d’assistance aux services d’enquête en vue de déceler les divers trafics illicites. Nos moyens humains, logistiques, techniques, technologiques et notre expertise nous permettent de prévenir les menaces, de distinguer en amont le fret à risque afin de fluidifier celui qui ne l’est pas. La coopération internationale facilite l’adaptation aux spécificités des pays et régions. Les différentes législations en vigueur dans les autres pays sont-elles compatibles ? Dans le cadre de l’Organisation Mondiale des douanes, elles ne diffèrent pas véritablement les unes des autres. Seule, la mise en œuvre peut s’avérer différente. C’est pourquoi, la coopération internationale est essentielle et les échanges de bonnes pratiques, de retours d’expériences indispensables. TERRITOIRES Des entreprises plus compétitives en matière douanière Michèle PETITGENET, présidence de l’Office de développement par l’automatisation et la simplification du commerce extérieur (ODASCE) ©DR L’ODASCE, véritable référence sur les aspects douaniers et fiscaux, met son expérience au service de ses adhérents et des entreprises qui souhaitent optimiser leur gestion de flux. Qu’est-ce que l’ODASCE ? L’Office de Développement par l’Automatisation et la Simplification du Commerce Extérieur (ODASCE) est une association loi 1901 créée en juillet 1972, qui met son expérience sur la matière douanière au service de ses adhérents et entreprises qui participent à ses actions. Pour ce faire, l’ODASCE effectue une veille règlementaire sur les aspects douaniers et fiscaux des relations extérieures et intérieures de l’Union européenne (UE), ce qui lui permet : • d’apporter des avantages à ses adhérents en diffusant des informations par le biais de flashs d’information ; 40 • de donner accès aux opérateurs intéressés à des réunions périodiques : - tels que le club « Clé-Douane » qui a vocation à faciliter le dialogue privé/public et la mise en réseau entre décideurs, - ou, tous les deux ans, le « Colloque douanier européen » qui permet de lancer le débat sur un sujet d’actualité, comme pour sa 13e édition sur la mise en place du Code des douanes de l’Union (CDU) ; • de concevoir, mettre en place et diffuser de la formation continue depuis 1975 sur la matière douanière et fiscale des échanges. Quels sont les changements induits par le nouveau contexte dématérialisé et sécurisé des échanges dans l’Union européenne ? Le suivi des échanges internationaux de marchandises doit s’adapter au nouveau contexte sécuritaire et à l’utilisation de systèmes d’information interopérables, ainsi l’Union européenne se dote d’un nouvel environnement réglementaire avec la mise en place à compter du 1er mai 2016 du Code des douanes de l’Union et de ses règlements délégué et d’exécution. Ce nouveau code propose des simplifications et des facilitations à des personnes ayant obtenu le statut d’Opérateur Économique Agréé (OEA). Les critères d’obtention de ce statut rappelés dans l’article 39 du CDU, ont été étoffés par rapport à l’ancienne version du Code et mettent l’accent sur le respect de normes pratiques en matière de compétence ou de qualifications professionnelles liées à l’activité exercée. Par ailleurs, la Commission a rédigé un référentiel européen des compétences qui vise à proposer des programmes fiables et accrédités de formation douanière pour les Masters, les Licences, les modules pour experts ou bien les cours de formation professionnelle. En France, la matière douanière n’est pas un sujet naturel, ce que l’on peut déplorer, notamment dans les programmes de Masters. Pour la partie formation professionnelle, l’ODASCE, de par son expertise et ses contacts réguliers avec les instances communautaires, a pu anticiper ce critère de Territoires compétence en mettant en place, en plus de ses formations, des parcours afin de valoriser la fonction douane dans les entreprises. Comment l’ODASCE a valorisé son expérience sur la formation professionnelle pour aider les entreprises à correspondre aux critères du Code des Douanes de l’Union en matière de reconnaissance de la compétence douanière ? L’ODASCE a obtenu, dès décembre 2012, la qualification ISQ-OPQF Qualification des organismes de formation dans le domaine des métiers spécifiques. Ce qui a été la première étape pour pouvoir, à partir de 2015, être habilité à délivrer des certificats professionnels CP FFP pour ses parcours « Assistant » « Gestionnaire » et « Manager » selon trois spécialités : Douane (tous secteurs d’activités), Douane spécialisé Accises (alcools et produits énergétiques), Douane spécialisé Export Control (produits stratégiques et militaires). (Plus d’information sur notre site internet : www.odasce.asso.fr). La certification de nos parcours représente un levier de reconnaissance des compétences pour les entreprises, et nous permet de nous positionner pour qu’elles puissent obtenir le statut OEAC au regard du règlement d’exécution qui vient de paraître (JOUE L343 du 29.10.2015) en son article 27 1-b) iii) : « b) Le demandeur ou la personne responsable en son nom des questions douanières a suivi avec succès une formation relative à la législation douanière ; cette formation, adaptée et correspondant à l’entendue de son implication dans les activités douanières, est dispensée par l’une des entités suivantes : i) une autorité douanière d’un État membre ; ii) un établissement d’enseignement reconnu, aux fins de la délivrance de cette qualification, par les autorités douanières ou par un organisme d’un État membre chargé de la formation professionnelle ; iii) une association professionnelle ou de commerce reconnue par les autorités douanières d’un État membre ou agréé au sein de l’Union pour délivrer cette qualification». Avez-vous déjà un résultat ? Les parcours, lancés début 2015, ont déjà permis de certifier 7 personnes qui sont dorénavant prêtes à apporter leur concours à la valorisation de la matière douanière dans ses aspects opérationnels et stratégiques. Les petits ruisseaux feront une grande rivière, et gageons que la matière douanière, qui a gagné la formation professionnelle, prendra de l’ampleur au niveau de la formation initiale. En guise de conclusion, on peut dire que de nos jours, les échanges internationaux sont monnaie courante dans nos entreprises et que pour gagner des points de compétitivité, la gestion de ces flux doit être perçue de manière globale selon une vision de porte à porte. L’environnement économique mondial change, changeons avec lui par des formations initiale et continue dynamiques, incluant les aspects réglementaires des flux d’échanges sur notre planète. L’ODASCE reste à vos côtés pour vous accompagner dans ces règles en mouvement. 41 TERRITOIRES Sécuriser un contrat de partenariat Éric NIGRI, avocat du Cabinet Simmons & Simmons LLP ©DR ©DR Julien MOIROUX, avocat du Cabinet Simmons & Simmons LLP En 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé une délibération approuvant les termes du contrat de partenariat (PPP) conclu par la Ville de Bordeaux pour la construction de sa cité municipale. Décision dont la Ville a fait appel. > Les routes et ouvrages d’art peuvent aussi être construits en contrat de partenariat public privé ; mais ici aussi, la collectivité publique qui s’engage avec un partenaire privé doit pouvoir démontrer notamment la complexité du projet pour recourir à ce mode de passation de la commande publique. ©Fotolia.com C omment analyser cette affaire sur le fond ? Elle illustre les difficultés d’appréciation de la notion de complexité, l’une des conditions nécessaires au recours par une collectivité territoriale à un PPP, désormais dénommé marché de partenariat avec l’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics. Selon l’article L.1414-2 du CGCT, dans sa rédaction en vigueur au moment des faits, le contrat de partenariat donne lieu à une évaluation préalable précisant les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif qui conduisent la personne publique à engager la procédure de passation de ce contrat. Si, au regard de cette évaluation, il apparaît notamment que « compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n’est pas objectivement en mesure de définir seule et à l’avance les moyens techniques répondant à ses besoins ou d’établir le montage financier ou juridique du projet », alors le PPP peut être envisagé. Le recours visait la délibération du conseil municipal approuvant les termes du PPP et la décision du maire de le signer. Selon le SNSO (Syndicat national du second œuvre), le choix du PPP n’était pas permis, le projet ne présentant pas une complexité suffisante1. Quels sont les principaux arguments des parties ? La commune s’était fondée exclusivement sur le critère de complexité pour recourir au PPP. Elle invoquait des difficultés à déterminer ex ante une répartition précise et fiable des risques que les opérateurs privés pouvaient supporter. La commune avançait aussi la complexité financière du projet (plus de 56 millions d’euros), ainsi que son envergure2 et les durées respectives des phases de réalisation et d’exploitation de l’ouvrage. Surtout, la commune fondait le choix du PPP sur la complexité technique du projet, novateur en ce qu’il prévoyait la construction d’un bâtiment BEPOS (bilan énergétique positif), en centre-ville à la jonction de styles d’architecture différents, dans une zone classée au titre du patrimoine mondial de l’humanité. Cet aspect de la complexité du projet a été décisif. Le SNSO (Syndicat national des entreprises du second œuvre) soutenait au contraire que les équipes de la ville pouvaient disposer d’outils pour pallier ces difficultés et qu’il n’était pas démontré que la détermination du coût global de la réalisation eut été impossible. Il avançait aussi qu’un autre BEPOS était réalisé en maîtrise d’ouvrage publique à la même période et que les retours d’expérience disponibles ne faisaient Territoires pas état d’une complexité permettant le recours au PPP. Dans quel sens le juge a-t-il tranché ? Le tribunal administratif a donné raison au Syndicat, enjoignant à la commune de résilier le PPP. Il a ainsi refusé de reconnaître la complexité intrinsèque de ce projet, précisant d’ailleurs que l’insuffisance de moyens internes à la commune n’était pas un gage de difficulté, celle-ci pouvant faire appel de manière ponctuelle à du personnel supplémentaire. La cour d’appel administrative de Bordeaux (CAA) a annulé ce jugement, sans toutefois s’écarter de sa grille de lecture. La complexité technique du projet est reconnue. Examinant le plan de charge et le profil des agents de la ville, la CAA rejette l’argument selon lequel le recrutement de personnel temporaire aurait permis de faire face aux contraintes de la maîtrise d’ouvrage du projet. Cette affaire s’inscrit-elle dans la continuité d’une jurisprudence bien établie ? Quel sera son impact sur le recours aux PPP en France ? La notion de complexité a donné lieu à un contentieux abondant conduisant parfois à la remise en cause du choix du PPP. Ainsi, pour un autre exemple récent, le Conseil d’État a invalidé le PPP relatif à la réalisation d’une cité du surf et de l’océan à Biarritz, au motif que « la seule invocation de la complexité des procédés techniques à mettre en œuvre ne peut suffire à justifier légalement le recours au contrat de partenariat, en l’absence de circonstances particulières de nature à établir qu’il était impossible à la commune de définir, seule et à l’avance, les moyens techniques propres à satisfaire ses besoins »3. Il se dessine une conception restrictive de la complexité, retenue dans Le tribunal administratif a donné raison au Syndicat, enjoignant à la commune de résilier le PPP. peu de projets : le futur TGI de Paris pour ne citer qu’un exemple. Dans l’affaire commentée, la CAA4 de Bordeaux retient la complexité du projet en raison du caractère encore expérimental des BEPOS et de la complexité du tissu urbain dans lequel la cité administrative devait s’insérer. Les nouveaux marchés de partenariat de l’ordonnance du 23 juillet 2015 doivent présenter un « bilan plus favorable » en comparaison d’autres contrats disponibles. Le projet de décret d’application vise « une plus grande efficience économique » ainsi que « la complexité de l’opération et des capacités, des compétences et des moyens dont dispose l’acheteur », éléments visés dans l’affaire jugée par la CAA de Bordeaux. Le critère de la complexité demeurerait ainsi applicable aux marchés de partenariat. La construction jurisprudentielle du « bilan plus favorable » susvisé s’inspirera vraisemblablement des décisions rendues, à l’instar de celle commentée, sous l’empire des textes antérieurs (ordonnance du 17 juin 2004 ou dispositions du CGCT). L’enseignement éclairant à retirer de cette affaire sur le recours au PPP ? Assurément, selon nous, que l’éligibilité à ce type de contrat, fondée exclusivement sur la complexité du projet public, est, en soi, un facteur d’insécurité juridique. Dit autrement, une sécurisation juridique des projets devrait passer, si possible, par la combinaison des critères permettant le recours au contrat/marché de partenariat : la complexité dans toutes ses dimensions, technique, juridique et financière mais également l’urgence, les objectifs d’efficacité énergétique ou économique du projet, les modalités de financement… En cas d’annulation d’un acte détachable et d’injonction de résilier le contrat, ou si le contrat est annulé, qu’en est-il de l’indemnisation des entreprises ? En cas d’injonction par le juge de résilier le contrat, les clauses de résiliation et indemnités associées seront appliquées par les parties. En cas d’annulation du contrat et, en l’absence de dispositif indemnitaire spécifique préalablement déterminé par les parties, tel un accord autonome, l’entreprise bénéficie de deux fondements indemnitaires. D’une part, l’action en répétition de l’indu (fondement quasi contractuel) visant la prise en charge par la personne publique des dépenses dites « utiles » ; d’autre part, l’action en réparation d’une faute (fondement quasi délictuel) commise par la partie publique5, ce qui n’offre que l’opportunité d’une indemnité complémentaire couvrant, le cas échéant, le manque à gagner6. Sur ce point, l’article 89 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 apporte un supplément de sécurité juridique en posant le principe de la divisibilité du reste du contrat des clauses d’indemnisation contenues dans un marché de partenariat si le juge décide de l’annulation, de la résolution ou de la résiliation du contrat. Dans ces cas précis, le titulaire « peut prétendre à l’indemnisation des dépenses qu’il a engagées conformément au contrat, parmi lesquelles peuvent figurer les frais financiers liés au financement mis en place dans le cadre de la mission globale confiée au titulaire, à condition qu’elles aient été utiles à l’acheteur ». Propos recueillis par Sophie Belmont 1. Cette affaire s’inscrit dans un double contexte, d’une part, d’ouverture du contentieux des contrats publics et, d’autre part, de fermeture de celui des actes détachables : V. CE, ass.,4 avril 2014, req. n°358994, Département du Tarn et Garonne. 2. 18 500 m2 de SHON destinés à accueillir plus de 800 agents municipaux ainsi que du public, tout en faisant en sorte que le bâtiment présente un bilan énergétique positif. 3. CE, 30 juill. 2014, Cne Biarritz. 4. CAA Paris, 3 avr. 2014, Assoc. La justice dans la Cité. 5. Exemple : recours au contrat/marché de partenariat alors que les conditions n’en sont pas réunies. 6. Sous réserve d’un éventuel partage de responsabilité, en cas de faute de l’entreprise. 43 TERRITOIRES Assurer la visibilité internationale des French Tech En France, fin 2015, 13 métropoles et 4 écosystèmes avaient obtenu le label French Tech1. D’autres collectivités restent candidates. Un coup de pouce à l’international C’est surtout un coup de pouce à l’international. Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique et Axelle Lemaire ont présenté le 29 janvier 2015 leur stratégie internationale, centrée sur trois volets. To u t d ’ a b o rd l’ é m e rg e n ce d e French Tech Hubs dans les grandes régions internationales : il s’agit d’accompagner le développement des start-up à l’étranger et de promouvoir l’Hexagone auprès des investisseurs et des entrepreneurs locaux. Ces hubs obtiendront un label de l’État après avoir présenté un projet répondant à un cahier des charges disponible sur le site : www.lafrenchtech.com ©Fotolia.com Ensuite, une plate-forme d’attractivité internationale doit être créée ; l’objectif est d’accompagner les initiatives des acteurs privés pour « valoriser et donner à voir l’excellence française en matière d’innovation ». omme un label, l’appellation Métropole French Tech assure aux acteurs du numérique une visibilité sur la scène mondiale. Neuf métropoles étaient déjà labellisées en novembre 2014 : AixMarseille, Lyon, Grenoble, Montpellier, Toulouse, Nantes, Bordeaux, Rennes et Lille. Quatre autres l’étaient en juin 2015 : Brest, Normandie, Nice et Lorraine ainsi que quatre écosystèmes : Alsace, Saint-Étienne, Angers et Avignon. D’autres restent candidates. C Pour Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du Numérique « l’objectif premier du label est de susciter une mobilisation collective de tous les acteurs, privés et publics, en faveur de la croissance des start-up françaises : ce pari est tenu. L’engouement a été extraordinaire. Des milliers de personnes, entrepreneurs en tête, ont construit ensemble au fil des mois des projets ambitieux pour leur territoire et leurs start-up ». Enfin, les French Tech Tickets visent à attirer des entrepreneurs étrangers grâce à la délivrance d’un titre de séjour, un lieu d’habitation dans un incubateur ainsi qu’une bourse individuelle, tout en leur proposant un accompagnement personnalisé tout au long de leur installation. L’appel à candidature, clos le 15 septembre, a retenu 50 personnes, arrivées en France en janvier 2016. 1. Nos excuses aux lecteurs qui n’aiment pas les mots anglais ; sur le sujet traité dans cet article, il est difficile de faire autrement que d’en employer. Sources : www.gouvernement.fr ; www.economie.gouv.fr 44 TERRITOIRES Accompagner les jeunes pousses innovantes Arnaud TOUATI Harry ALLOUCHE cofondateur du cabinet Alto Avocats cofondateur du cabinet Alto Avocats ©DR ©DR cofondateur du cabinet Alto Avocats ©DR Jonas HADDAD Si la France compte de nombreuses start-ups innovantes, tout l'enjeu est de les soutenir dans leur développement. Là où les cabinets d'avocats d'affaires traditionnels sont encore peu armés pour cela, certains avocats relèvent le défi avec succès. Entretien avec Jonas Haddad, Arnaud Touati, et Harry Allouche, cofondateurs du cabinet Alto Avocats, créé en 2015. es cabinets d'affaires traditionnels connaissent-ils bien les enjeux rencontrés par les dirigeants de start-ups ? Le constat que nous avions fait avant de créer Alto Avocats est que les entreprises de croissance que sont les start-ups trouvent difficilement une offre juridique répondant à leurs besoins. Elles ont des enjeux communs à toutes les entreprises en création : le choix de la forme juridique, de l'actionnariat, la recherche d'un financement, mais elles rencontrent surtout des défis spécifiques liés à leur forte croissance et à leur forte orientation technologique. Ces défis impliquent une forte réactivité dans la prise de décision et une définition précise de la stratégie, à court et moyen termes. Il faut également que les honoraires pratiqués soient supportables pour une structure de cette envergure. Cet accompagnement est un enjeu fort pour l'économie française, ce que les pouvoirs publics ont bien compris puisqu’avec les aides à l'innovation et le label French Tech, ils démontrent leur volonté d’essaimer ces jeunes sociétés pour booster une économie européenne caractérisée par son atonie. L Comment un conseil juridique peutil les accompagner efficacement, en les aidant à créer de la valeur ? LES TROIS FONDATEURS ET ASSOCIÉS D'ALTO AVOCATS Après sa formation juridique et économique à l’université (Sorbonne) et en école de commerce (ESCP Europe), Jonas Haddad a exercé comme collaborateur ministériel et responsable de la communication au sein d’une entreprise avant de reprendre la robe d’avocat. Au cabinet Alto Avocats, il est plus particulièrement chargé du contractuel et des entreprises en difficulté. Après un parcours universitaire en France (Sorbonne et Assas) et aux États-Unis (Université de Chicago), Arnaud Touati a travaillé en banque d’affaires (Oddo) puis au sein de divers cabinets d’avocats d’affaires, en France et aux États-Unis. Au cabinet Alto Avocats en 2015, il est plus particulièrement en charge du corporate et du contractuel. Membre des Barreaux du Québec et de Paris, Harry Allouche a exercé au sein des deux barreaux pour des cabinets d’avocats d’affaires, après un parcours à l’université (Paris XI et Montréal) et en école de commerce (EDHEC). Au cabinet Alto Avocats, il est plus particulièrement en charge du corporate et du contractuel. Culturellement, nous nous sentons proche de nos clients, qu'ils soient cadres expérimentés en reconversion professionnelle ou jeunes fraîchement diplômés d'une école de commerce. Grâce à notre connaissance approfondie de l'environnement dans lequel ils évoluent, nous avons créé deux types d’accompagnement. Le premier est articulé autour de la création de la structure sociale des projets d’entreprise. Le second concerne des entreprises déjà créées, pour leur apporter un appui en matière de recherche de partenaires et de financement pour leur créer un écosystème favorable. Il permet également aux dirigeants de maîtriser les enjeux en matière notamment de droit social mais aussi de saisir les enjeux juridiques de « l'ubérisation » de l'économie. Si des conseils leur sont indispensables sur le plan juridique, comment les aider à lever des financements ? Aujourd'hui, les sources de financement se multiplient. Au-delà du recours classique aux établissements bancaires, nous assistons au développement rapide du crowdfunding et de l’apport des fonds étrangers. Ces faits nouveaux font naitre un besoin de conseil particulier, notamment par l’application d’un cadre juridique particulier en matière fiscale et en matière de propriété intellectuelle. www.altoavocats.com - Twitter @altoavocats 47 ©Fotolia.com DJP Avocats l’excellence du service Me. Jacques SAINT JALMES, Associé ©DR DJP Avocats, membre de BDO international, 5ème réseau mondial d’audit, d’expertise comptable et de conseil, entretient avec lui de fortes synergies pour accompagner dirigeants et cadres mobiles à l’international. uelle est la valeur ajoutée de votre cabinet au sein du réseau BDO ? Le réseau BDO dispose de 1 400 bureaux répartis sur 156 pays, et dans 110 d’entre eux, 1 000 spécialistes sont dédiés à la mobilité internationale. Forts de ces ressources, déclinées selon une approche humaine, unitaire, globale et surmesure, les avocats placent haut la barre sur la qualité du conseil à rendre, avec réactivité et grande proximité. L’excellence du service est au cœur de l'ADN du réseau qui, pour diffuser les meilleures pratiques dans un langage commun de par le monde, réunit périodiquement les responsables les plus importants de la mobilité internationale au sein de son Centre d’excellence dédié. Q 48 Ce collège échange ainsi en permanence sur les stratégies et méthodes, en réunions et en formations communes pour nos clients. La France y tient une place de choix. Pourquoi la mobilité internationale ne peut-elle pas s’improviser ? Dans 90 % des cas, les entreprises nous sollicitent pour gérer le transfert de salariés français vers l’étranger, ou de salariés étrangers vers la France. Mais le maître-mot en ce domaine reste l’anticipation. N'oublions pas les risques que court désormais un employeur ; il peut voir sa responsabilité engagée devant les tribunaux par un salarié auquel il n’aurait pas délivré toutes les informations requises. Un arrêt du 4 février 2015 de la Cour de cassation a ainsi condamné l’un d’eux pour défaut de conseil au cours du transfert d’un salarié non avisé de ses obligations fiscales dans le pays d’accueil et qui, à défaut des déclarations requises, s’était vu taxer d’office avec pénalités. S’est aussi retourné contre son employeur un salarié transféré à l’étranger, sous contrat et régime de sécurité sociale locaux, ayant de fait perdu ses droits à retraite. Pour cadrer et coordonner les conditions d’un transfert de salarié, nous devons nous entretenir avec lui pour déterminer son statut fiscal, établir ses obligations et celles de l’employeur, notre bureau du pays concerné nous confirmant également les obligations locales. Territoires L’employeur assumant, dans le cadre de la politique d’égalisation qu’il a mise en avant pour inciter le salarié à la mobilité, les charges fiscales et sociales du transfert, il nous revient aussi d’apprécier l’allégement possible des coûts dudit transfert. Selon quelle approche parvenez-vous à anticiper cette mobilité? Notre approche globale de toutes les problématiques suppose de suivre trois étapes clé : ce qu’il est possible de faire, comment le faire et, ensuite, comment en assurer le suivi ? Sur le champ des possibles, nous traitons à la fois les questions de droit fiscal, de sécurité sociale, de droit du travail et d’immigration. En termes de modalités, nous élaborons le package de rémunération globale, préparons l’avenant au contrat de travail ou le contrat de travail local dans tous ses aspects juridiques, ainsi que le certificat de détachement dans le premier cas, et les formalités d’enregistrement dans le second. Une fois le salarié parti, nous accompagnons et suivons son transfert, dont la gestion des déclarations de revenus en France et/ou à l’étranger et d’éventuels conflits en droit du travail. Enfin, au terme de la mission, il nous revient de gérer le retour du salarié en assurant son reclassement. Telle est la gestion idéale d’un transfert, ce qui n’est pas souvent le cas en pratique. D’où notre travail de sensibilisation auprès des DRH pour leur permettre d’anticiper toutes ces questions et de solliciter notre conseil au moment opportun. L’aspect patrimonial fait-il partie intégrante de cette approche ? La mobilité internationale déplaçant hommes et femmes, leurs familles, et donc leur patrimoine, la question patrimoniale doit être abordée très en amont. Je l’ai vérifié encore récemment avec un client dirigeant d’entreprise, parti résider aux Etats-Unis avec un patrimoine constitué dans plusieurs pays et désireux de faire une donation à ses enfants. C’est pourquoi, toujours dans une logique d’approche globale, le département « Fiscalité individuelle » que je dirige au sein du cabinet est structuré sur les axes « Mobilité internationale » et « Gestion patrimoniale ». Accompagnez-vous aussi vos clients sur leurs projets entrepreneuriaux ? Nous avons développé une aide pour les professions libérales au sens large du terme ; un accompagnement dans la gestion d’entreprise à titre personnel pour opérer le meilleur choix possible des modalités d’exercice. Une activité de niche mais une assistance utile pour la pérennité de l'activité de certains de nos clients. DJP Avocats Duchemin Jouan & Partners 7 rue Auber - 75009 Paris - FRANCE Tél. : +33 (0)1 80 18 10 80 - Fax : +33 (0)1 40 07 07 08 Le Cabinet : une expertise reconnue et la force d’un réseau Correspondant du réseau international BDO, qui déploie de manière transversale les métiers du chiffre, du droit et du conseil, DJP Avocats constitue en France l’une des pierres angulaires de cette approche pluridisciplinaire. Le Cabinet, formé d’une trentaine d’avocats, partage sous l’impulsion des 5 associés qui le dirigent, la culture de ses clients axée sur l’entrepreneuriat, l’action et l’efficacité, tout en maintenant des critères d’exigence, de pragmatisme et de qualité. Formés au sein des cabinets parmi les plus prestigieux, les associés sont reconnus pour leur expertise de pointe dans leurs domaines d’intervention. La fidélité de leurs clients sur le long terme et la croissance de leurs équipes en sont la meilleure récompense. V i s i t e z n o t re s i t e : w w w. d j p - a vo c a t s - b d o . f r 49 50 ©Serg Nvns - Fotolia.com TERRITOIRES La gestion de patrimoine Les conseillers en gestion de patrimoine (CGP) ont pour mission d'accompagner leurs clients (particuliers et entreprises). Le secteur est très concurrentiel et nécessite des connaissances pluridisciplinaires. Des activités définies, depuis décembre dernier, par une norme ISO. A longueur de la crise financière, mais leur mission de conseil demeure essentielle, en raison des nombreuses problématiques à résoudre et de l'étendue des produits d'investissements accessibles aux particuliers. Dans un univers très concurrentiel, la qualité de service apparaît désormais indispensable. D'ailleurs, il apparaît que les banques n'ont pas réduit la voilure sur ce secteur d'activité, et certaines ont même baissé le seuil d'accès à leurs services de gestion de patrimoine . Les conseillers en gestion de patrimoine peuvent être salariés ou indépendants. En outre, des notaires et des experts-comptables peuvent également proposer des activités de conseil. Les salariés peuvent travailler dans des banques telles que Barclays Patrimoine, BNP Paribas Banque Privée, HSBC, LCL, etc., ainsi que dans des sociétés indépendantes, des sociétés d'assurance (Axa, Swiss Life, etc.) et des départements de gestion privées de sociétés de gestion comme Cogefi Gestion. Par ailleurs, cette activité peut également s'exercer à titre libéral au sein de cabinets de gestion de patrimoine indépendants de tout établissement promoteur de produits (il en existe entre 2 500 et 3 500 en France) qui disposent d'une part de marché d'environ 7 %, une proportion faible par rapport à leur place très importante en Grande-Bretagne. La norme ISO 22222, depuis décembre 2005, définit le processus de conseil en gestion de patrimoine et spécifie les exigences relatives au comportement éthique, aux compétences et à l'expérience requis pour exercer la profession de conseiller en gestion de patrimoine . Elle s'applique à tous les professionnels, quel que soit leur statut. ©Goodluz - Fotolia.com près avoir mené un entretien afin d’analyser la situation de leurs clients, ils dressent un bilan global de leur patrimoine avec un diagnostic et une analyse de ses forces et ses faiblesses. Une stratégie est ensuite mise en œuvre selon les projets des clients accompagnée de recommandations. Les conseillers réalisent ensuite un suivi dans le temps des dossiers en organisant des rendez-vous ponctuels. Des logiciels de calcul leur permettent d e s i m u le r l ' i m p a c t d e le u rs préconisations. Afin de proposer les stratégies et les produits les plus adaptés, ils doivent être très pointus dans de nombreux domaines tels que le droit civil, fiscal, social, international et des assurances, la gestion d'actifs ainsi que la comptabilité et la finance. Concernant l'état du marché en France, l'activité de conseil en gestion de patrimoine souffre de la TERRITOIRES « Nous sommes au service de l’exploitation touristique… » ©Groupe Pierre & Vacances Center parcs Dominique MENIGAULT, Directeur général adjoint de Pierre & Vacances Conseil Immobilier Leader dans la réalisation et la gestion de résidences de tourisme en Europe, le groupe Pierre & Vacances-Center Parcs conçoit, construit et gère des appartements, maisons et cottages, depuis sa création, en 1967. e groupe Pierre & Vacances est né en 1967, sur un nouveau concept développé avec la création de la station de ski d'Avoriaz. Comment mesurer le chemin parcouru en presque 50 ans ? L’histoire de Pierre & Vacances a commencé en 1967, lorsque Gérard Brémond, son fondateur et actuel PDG, a décidé de créer de toutes pièces la station d’Avoriaz, la première sans voiture… Une formule qui a été déclinée par la suite dans toutes nos créations. Depuis ses débuts, le groupe a évolué de deux façons : par une croissance interne, grâce à la construction et la commercialisation ©Groupe Pierre & Vacances Center parcs L > Les jardins suspendus de Villages Nature. 52 de logements auprès de particuliers ; et par une croissance externe. En premier lieu, en 2001, nous avons racheté la marque Maeva ; et en 2003, Center Parcs Europe, ce qui a permis de doubler notre chiffre d’affaires et le nombre de nos clients; puis, à la suite d’une joint-venture avec Accor, la marque Adagio a été créée ; enfin, en 2014, un concept immobilier totalement novateur a vu le jour, dans le cadre d’une jointventure avec Euro Disney S.C.A. Il s’agit du programme Villages Nature qui constituera demain l’un des sites d’hébergement touristiques les plus novateurs, aux portes de Paris. En quelques chiffres, 23 000 propriétaires possèdent environ 50 000 appartements et maisons du groupe ; 7,5 millions de clients touristes – pour moitié français, et pour moitié européens – viennent chaque année sur nos sites ; enfin, le groupe réalise 1,3 milliard d’euros de chiffre d’affaires. Plus de 23 000 propriétaires vous ont fait confiance. Quelles prestations leur proposez-vous ? Nous proposons à nos clients plusieurs types de biens immobiliers, situés dans des résidences urbaines ou touristiques de type Center Parcs. Secteur porteur, et non délocalisable, le tourisme représente aujourd’hui 7 % du PIB français. De plus, nous donnons à nos clients la possibilité d’investir dans des programmes immobiliers locatifs haut de gamme, ce qui séduit, notamment la clientèle européenne qui recherche un niveau de prestations élevé. Enfin, notre prestation comprend la gestion intégrale du patrimoine de nos clients, ce qui écarte, pour les acquéreurs, les contraintes liées à ce type d’opération. En effet, ils signent un bail d’une durée de dix ans, pendant laquelle ils touchent un loyer trimestriel garanti – de 4 % hors taxes net – quel que soit le niveau de remplissage de la résidence. Nous les accom- ©Groupe Pierre & Vacances Center parcs > Appartement P&V Flaine. pagnons également dans les démarches de réservation, de financement et de récupération de la TVA (20%) auprès des services fiscaux, que permet ce type d’investissement, ou encore pour l’entretien du bien pendant la durée du bail. Par ailleurs, lorsqu’un propriétaire veut revendre, il peut faire appel à nos équipes pour que nous lui trouvions un nouvel acquéreur. Nous réalisons plus de 300 reventes par an pour le compte de nos propriétaires. Pourquoi l’investissement en résidence de tourisme est-il aujourd’hui un placement intéressant ? Ces placements sont intéressants à plus d’un titre ! En premier lieu, parce qu’ils concernent le tourisme, secteur d’activité solide et en croissance. Ils donnent également droit à de nombreux avantages fiscaux : la récupération de la TVA, qui représente une économie majeure ; des avantages spécifiques qui couvrent l’ensemble des lois dans ce domaine : le dispositif Censi-Bouvard qui permet d’économiser 11 % du prix d’achat hors taxes, et les statuts de loueur en meublé professionnel ou non professionnel (régime BIC), grâce auxquels il ne paient pas d’impôts sur les loyers présents ou futurs perçus. Ces dispositifs sont très avantageux et notre rôle est de faire de la pédagogie auprès de nos clients, même si nous ne sommes pas des conseillers en gestion de patrimoine. Dernière remarque, le régime BIC s’applique aux biens, quelle que soit la nationalité des acheteurs : cela incite la clientèle européenne à investir, car elle est ainsi exonérée des impôts sur les loyers perçus en France. Il favorise également la revente qui en bénéficie de plein droit. Enfin, il faut rappeler qu’en matière de gestion de patrimoine, l’immobilier répond à tous les besoins : création, transmission, valorisation, perception de revenus complémentaires, économies d’impôts, etc. En ce qui concerne les résidences de tourisme, il s’agit d’un achat pour le long terme mais dont le client peut jouir immédiatement : s’il le souhaite, il bénéficie à la fois des loyers et de la possibilité d’occuper son logement. Il a même la possibilité d’échanger ce droit contre l’occupation d’autres appartements du groupe dans 300 destinations… Cet élément est déterminant car il correspond aux attentes de nombreux clients. Selon quels critères choisissez-vous les sites de vos programmes immobiliers ? Le critère déterminant est notre capacité à le remplir sur le long terme : il faut qu’il y ait un bassin d’activités touristiques et économiques suffisant pour garantir sa pérennité. C’est une stratégie fondamentale car nous sommes véritablement au service de l’exploitation touristique. Pouvez-vous nous présenter les spécificités du site Villages Nature, qui ouvrira en 2016 ? Initié par Euro Disney S.C.A. et le Groupe Pierre & Vacances-Center Parcs, ce projet, porté par son ambition de développement durable, est une nouvelle destination de vacances, de courts et moyens séjours, d’envergure européenne. Proposant une offre de loisirs innovante, dépaysante et désaisonnalisée au cœur de Paris Île-de-France, Villages Nature possède un potentiel sans équivalent auprès d’une très large clientèle touristique à la fois ouest-européenne, française et locale, pour un concept de vacances mêlant nature, loisirs, détente. Quelque 900 000 clients annuels sont attendus à Villages Nature au terme de la phase 1, qui devrait ouvrir au public début 2017. Sur les 180 hectares de superficie de la phase 1 – dont plus de 90 % seront constitués d’espaces non bâtis – Villages Nature offre, au sein d’un environnement naturel de grande qualité, 1 730 résidences de tourisme de standing dont 70 % de cottages et 30 % d’appartements, et de nombreux équipements récréatifs et de détente. L’équipement iconique de la destination est l’Aqualagon, un complexe aquatique de près de 12 000 m2, formé de l’un des plus grands parcs aquatiques couverts d’Europe et de son lagon extérieur attenant, chauffé à plus de 30°C grâce à la géothermie profonde. Ce procédé permet de satisfaire la totalité des besoins en chaleur de Villages Nature, solution inédite en matière d’exploitation touristique à une telle échelle en Europe. 53 TERRITOIRES Évaluer les politiques publiques ©Fotolia.com Les projets doivent être bien dimensionnés, et les politiques répondre aux enjeux. Il faut évaluer l’action publique. Toutes les collectivités territoriales ne le font pas encore. > Parfois confondue à tort avec le contrôle et l’audit, l’évaluation des politiques publiques est une aide à la décision et un moyen de rendre compte aux citoyens. ’évaluation des politiques publiques est une aide à la décision et un moyen de rendre compte aux citoyens. Le Cese a réalisé récemment une étude sur ce sujet1. En France, l’État a intégré cet enjeu. Le Commissariat général à la stratégie et prospective (France Stratégie), les ministères et dispositifs interministériels, des corps d’inspection à la Cour des comptes, en témoignent. 20 % des villes de plus de 50 000 habitants évaluent régulièrement leurs politiques publiques, selon la société française de l’Évaluation (SFE). Il en est de même pour 40 % des Départements – par exemple, le Gard a initié une évaluation des effets de ses consultations sur la qualité et l’utilité des politiques ou projets départementaux. Par ailleurs, 80% des Conseils régionaux l’ont intégrée. Un dernier chiffre qui traduit la contractualisation croissante des relations avec l’État et l’obligation L avec les fonds structurels européens d’évaluer les programmes contractuels. L’État a donné l’exemple Certains analystes déplorent la place, trop importante, laissée aux cabinets privés dans ce domaine, comme l’a souligné Clotilde Valter, secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification. Mais il y a eu des avancées, note-t-elle, depuis la « circulaire Rocard » de 1989 ; il faut en faire un mode normal de fonctionnement des administrations centrales, déconcentrées ou territoriales, dans le cadre de la modernisation de l’action publique. D’où le lancement, fin 2012 et fin 2013, de soixante premières évaluations, notamment sur la lutte contre le décrochage scolaire et les aides aux entreprises. Clotilde Valter a rappelé également la nouvelle série d’évaluations initiée au printemps 2015 ; elle en a annoncé cinq à sept autres. La méthode doit assurer une meilleure articulation du temps et de l’action politique, être objective, impartiale, pertinente et quantifiée, avec des indicateurs adéquats. La démarche doit gagner en crédibilité et en légitimité. Un objectif auquel le Cese et les Ceser contribueront. Le Cese entend en effet recenser dans le bilan de chaque mandature les travaux de cette nature, tout en dynamisant sa coopération avec d’autres instances d’évaluation. Il faut aussi prévoir juridiquement le temps et les moyens nécessaires à l’évaluation. Pour cela il faut assurer la présence des décideurs, agents et bénéficiaires dans les comités de pilotage, de suivi ou d’accompagnement. Il faudrait aussi conditionner la reconduction des politiques publiques à leur évaluation. Le Cese recommande de renforcer la formation, proposant à cet effet de « créer ou d’amplifier, comme c’est déjà le cas, par exemple à Sciences Po, un module d’évaluation des politiques publiques dans l’enseignement supérieur, au moins au niveau des masters en économie, gestion, gestion publique, sociologie, et dans les grandes écoles, les écoles d’ingénieurs… » mais aussi, dans les enseignements de l’Institut national des études territoriales (INET), de l’École nationale d’administration (ENA) et de l’École des hautes études en santé publique (EHESP). L’Observatoire de l’évaluation des politiques publiques, lancé le 16 octobre dernier par le SGMAP2 et la SFE, désormais première base d o c u m e n t a i re d e s p o l i t i q u e s publiques en France avec près de 17 000 références d’évaluation, devrait constituer un outil utile dans ce domaine. 1. Promouvoir une culture de l’évaluation des politiques publiques septembre 2015. 2. SGMAP Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique. 55 56 TERRITOIRES Notre métier : experts en aménagements durables Pascal ROUX, Président de MDP Consulting ©Utopik MDP Consulting dispose d’une expérience de trente ans dans la création et le développement de sites et de destinations touristiques. Elle propose également une prestation de consulting et de stratégie pour la création de projets. Pascal Roux nous détaille ces prestations. ouvez-vous nous dire quelques mots sur l’historique de la société ? MDP Consulting, qui fêtera ses trente ans cette année, était, au départ, spécialisée dans la construction de téléphériques. L’entreprise a évolué au fil des années dans le secteur l’aménagement de loisirs en montagne, puis de sites touristiques. Depuis quelques années, elle s’est également beaucoup développée à l’international, qui représente désormais 50 % du chiffre d’affaires. P Quelles sont les branches d’activités de MDP Consulting ? Nous en avons quatre. Tout d’abord, notre activité « historique », l’ingénierie du transport par câble, fondée sur des décennies d’expérience. Nous avons conçu de nombreuses remontées mécaniques en montagne, et nous sommes en mesure maintenant de montrer notre savoirfaire en milieu urbain. Le transport par câble est en effet une alternative ©DR > Transport urbain (Ankara – Turquie). intéressante pour les villes, en particulier de pays émergents, par exemple, qui se sont urbanisées rapidement, mais n’ont pas d’infrastructures de transports bien organisées. Bien moins cher que le métro ou le tram, un téléphérique peut en outre être construit en quelques années. Notre deuxième champ de compétence, c’est l’ingénierie de l’aménagement de sites, et de destinations touristiques pour des opérateurs privés ou publics. Notre troisième compétence est l’ingénierie de l’environnement : études d’impact des activités sur le milieu naturel, évaluation des risques, etc. Enfin, notre dernier type de services, sont le consulting et la stratégie appliqués aux destinations (marketing, économique, financier, développement durable, gouvernance, délégat i o n / co n ce ss i o n , co n f é re n ce s , formations, etc.). Notre atout, c’est que notre équipe, forte de plusieurs domaines d’expertise, possède une vision d’ensemble des projets. Quel est le positionnement de MDP Consulting et sa philosophie ? Nous sommes clairement dans un marché de niche, haut de gamme, où il n’y a que quelques opérateurs au niveau mondial. Nous pouvons satisfaire toutes les demandes, de la simple étude à la réalisation complète de projet. Nous travaillons en équipe, de façon transversale. Nos clients peuvent s’appuyer sur notre expertise de la conception de leur projet à sa réalisation, et même au-delà, puisque nous assurons aussi le suivi. Nous avons ainsi réussi à instaurer des relations à long terme, renforcées par la stabilité de nos équipes. Sur quels projets travaillez-vous actuellement ? Nous continuons un projet de téléphérique à Katmandu au Népal et en initions un autre à Managua au Nicaragua. D’autre part, nous avons récemment remporté un concours du gouvernement du Kosovo pour la création d’une station de ski complète ex nihilo à Brezovica. Située sur le massif de Sara, au sud du pays, cette station, qui sera exploitée toute l’année, est appelée à devenir le fleuron du tourisme des Balkans. Nous conduisons un consortium français qui va investir 409 millions dans ce projet. Situé entre 900 et 2 500 mètres d’altitude, celui-ci prévoit la construction d’environ 100 km de pistes, 20 remontées mécaniques, des infrastructures d’accueil et des services modernes, d o n t n o ta m m e n t 7 0 0 0 p l a ce s d’hébergement. Le fait d’avoir été choisis démontre l’étendue de nos savoir-faire et de notre expertise dans l’aménagement de territoire. 57 TERRITOIRES Faire appel au financement participatif ©Fotolia.com La plate-forme Collecticity, simple et sécurisée, permet aux collectivités de financer leurs projets sans passer par les banques. L effectuer des prêts avec ou sans intérêt pour une somme qui peut atteindre le million d’euros. Le dispositif est intéressant dans le contexte actuel de difficultés financières. L’Agence Standards & Poors a estimé le besoin de financement des collectivités locales françaises à 18 milliards d’euros en 2015. Or, l’épargne financière des Français dépasse 4 200 milliards d’euros. Il y a donc un réservoir potentiel. Les habitants peuvent ainsi s’impliquer dans la communauté et donner Source : Collecticity, www.collecticity.fr ©Fotolia.com e financement participatif (en anglais, crowdfunding) « récolte des fonds auprès du public ». Une solution qui ne fait pas appel aux acteurs financiers classiques, en particulier aux banques. Parmi les projets lancés grâce à cela, on peut citer la campagne présidentielle d’Obama en 2008 (il a ainsi récolté 150 millions d’euros) ou l’Oculus Rift, un casque de réalité virtuelle qui doit être commercialisé en 2016 (2,4 millions d’euros ont été apportés à ce projet sur Kickstarter). Au total, 304 millions d’euros ont été apportés ainsi en France en 2015, contre 78 millions d’euros en 2013 et 152 millions en 2014. Si le financement participatif se développe de façon dynamique, pourquoi ne pas en faire bénéficier les villes, métropoles, départements et régions ? Collecticity, la première plate-forme dédiée aux collectivités locales, a été lancée en décembre 2015. Elle permet aux institutions publiques ainsi qu’aux associations de lever des fonds auprès des citoyens pour des projets d’intérêt public. Ceux-ci peuvent faire des dons d’un montant illimité, avec ou sans contrepartie, ou du sens à leur épargne. Le dispositif renforce la solidarité et crée du lien social autour de projets d’intérêt général (crèches, centres de loisirs ou sportifs…). Concrètement, les emprunteurs font une demande de prêt sur Collecticity.fr. La plate-forme réalise son analyse ainsi que la signature des contrats avec l’accord de prêt des investisseurs. Ceux-ci déposent les fonds auprès du prestataire de services de paiements à destination des emprunteurs, qui paient les mensualités auprès du prestataire, qui les transfère ensuite auprès des investisseurs. L’outil se distingue par sa simplicité (des prêts à taux fixe avec un remboursement anticipé sans frais et une commission d’un maximum de 4 % des fonds récoltés, des profils personnalisés et des investissements contrôlés). Il apparaît fiable et sécurisé : avec surveillance de l’Autorité de contrôle prudentiel et résolution (ACPR), continuité du service même en cas de fermeture de la plate-forme, contrats de prêts stockés 10 ans à la Cour des comptes et suivi des standards de sécurité actuels et des recommandations de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). 58 L’épargne L’épargnefinancière financièredes desFrançais Françaisdépasse dépasse44200 200milliards milliardsd’euros. d’euros.IlIlyyaadonc doncun unréservoir réservoirpotentiel. potentiel. TERRITOIRES Achat groupé d’énergie La fin des tarifs réglementés de vente (TRV) dugaz et d’électricité le 31 décembre 2015 obligeles collectivités à effectuer à une mise en concurrence. Comment procéder? Un groupe de travail dédié à ce sujet a été créé au sein de la FNCCR. N ous avons beaucoup de remerciements de petites communes de notre département pour lesquelles la fin des tarifs réglementés était très compliquée. Le groupement de commande d’achat public de l’électricité mis en œuvre par notre syndicat départemental d’énergie de la Drôme (SDED) s’est avéré très utile, notamment pour elles » explique Bruno Blanchard, directeur « Concessions et performances énergétiques » de la SDED, le service public de l’énergie dans la Drôme. Pour les personnes publiques ayant des sites de puissance supérieure à 36 kVA (tarifs jaune et vert), cette ouverture à la concurrence entraîne la résiliation du contrat au tarif réglementé. En prévision de l’échéance du 31 décembre, 70 groupements de commandes ont été constitués sur la presque totalité du territoire national. Soit à l’échelle d’un département, comme pour la SDED, soit de plusieurs. Le SIPPEREC a un temps d’avance. Cet établissement public local adhérant de la FNCCR a annoncé dès avril l’attribution de marchés concernant 453 collectivités et établissements publics d’Île-de-France pour 7 400 points de livraison pour le tarif « jaune » (puissance souscrite entre 36 et 250 kVA) et « vert » (plus de 250 kVA). Avec 550 adhérents et 2 TWh de consommation annuelle totale, ce groupement de commandes est l’un des vingt plus importants acheteurs nationaux d’électricité, publics et privés. Lors de la réunion organisée à la FNCCR, en juin dernier, son coordinateur, Jean-Marc Proust, a pris en exemple les réductions obtenues, avec des gains estimés par rapport a u x c o n d i t i o n s a c t u e l le s d e 17,7 millions d’euros par an ! « Les condi-tions de marché des énergies fossiles qui sont assez basses et les surcapacités de productions en Europe jouent manifestement en faveur des acheteurs» a souligné Jean-Marc Proust. ©Fotolia.com « Meilleures offres tarifaires, sécurisation juridique Pour les syndicats d’énergie, le recensement des besoins et le recueil des données auprès des délégataires, est complexe. Au total, 430 000 sites sont concernés par cette nouvelle organisation. Une gageure que les appels d’offre groupés facilitent. Mais le risque de marché infructueux demeure. Pas de panique, expliquent plusieurs membres de ce groupe de travail. « On peut imaginer qu’il y aura une tolérance après le 31 décembre 2015, comme ce fut le cas pour le gaz» analyse JeanMarc Proust. Ce marché infructueux pourrait même être une occasion de renégocier, organisant un nouveau tour de table avec les fournisseurs. La complexité administrative se double d’une autre difficulté : la faiblesse de la concurrence. En effet, seuls trois opérateurs principaux peuvent se positionner sur l’ensemble du territoire national : EDF, l’opérateur historique qui fournissait jusqu’à présent l’électricité aux acheteurs publics selon les tarifs régulés par l’État, Direct Énergie et GDF-Suez, nouvellement Engie. D’autres interviennent mais au niveau régional. Les conditions de marché des énergies fossiles qui sont assez basses et les surcapacités de productions en Europe jouent manifestement en faveur des acheteurs… Jean-Marc PROUST, coordinateur de la FNCCR L’utilité du marché subséquent Le recours à la formule du marché « subséquent » permet de contrer la volatilité du marché de l’électricité et les primes de risque imposées par les fournisseurs. Comme l’explique Jean-Marc Proust. « Cela permet aux acheteurs publics d’acheter le gaz et l’électricité dans des délais courts, de l’ordre de deux heures après réception de l’offre des fournisseurs ». C’est cette procédure qui a par exemple été utilisée par le SIPPEREC, bénéficiant ainsi d’offres tarifaires attractives de la part d’EDF (pour 4 lots), Direct énergie (pour 2 lots), et GDF Suez (pour 2 lots). 59 TERRITOIRES Un nouveau centre à Paris XVIIe Le Syctom, l’agence métropolitaine des déchets ménagers, a lancé la réalisation d’un centre de tri de collecte sélective nouvelle génération dans l’éco-quartier de Clichy-Batignolles. Très automatisée, cette installation préparera, à partir de 2019, au recyclage des déchets pré-triés par plus de 900 000 habitants. ©Kréaction/Les Ateliers Monique Labbé, architectes REPÈRES Budget • Maître d’ouvrage : Syctom. • Conception/réalisation/exploitation : Groupement conjoint CNIM/Ateliers Monique Labbé/Urbaine de travaux/Ar-Val/INGEROP Conseil et Segic ingénierie. • Budget : 67 Ma H.T. Planning • Dialogue compétitif : lancé en juin 2013. • Attribution du marché : 29 mai 2015. • Début des études : septembre 2015. près un premier centre de tri inauguré en 2011 dans le XVe arrondissement, au sud de Paris, le Syctom a lancé la construction d’un nouveau centre de tri de collecte sélective intra-muros, dans le XVIIe arrondissement. Implantée cette fois-ci au nord de la capitale, l’installation devrait voir le jour en 2019. Le site sera en phase avec son environnement urbain : l’éco-quartier de Clichy-Batignolles, une ZAC qui accueillera autour d’un vaste parc, des logements, des équipements et des commerces. Proche du tribunal de grande instance, le centre se caractérisera par de grandes surfaces végétalisées, avec des jardins et terrasses suspendus, et par une large utilisation de matériaux renouvelables, tels que le bois. Sa façade bénéficiera aussi d’un traitement acoustique le long du périphérique. Le projet prend place au nord de l’éco-quartier, près du périphérique et d’un faisceau ferroviaire, et à côté du terminal de collecte pneumatique des déchets, le premier du genre dans la capitale. Ce mode de collecte A 60 est déjà en activité dans les immeubles livrés de la ZAC entre le parc et l’avenue de Clichy. Il permet de supprimer les bennes de ramassage et réduit considérablement le nombre de camions nécessaires à l’évacuation des déchets. Démarche environnementale Outre un bâtiment administratif et un espace d’accueil des visiteurs, le centre comprendra une halle de tri et de stockage, une aire de réception des bennes de collecte sélective, une zone de déversement des collectes et une zone de compactage des refus. Un emplacement sera dédié au procédé de tri, un autre au conditionnement et au stockage des balles. Le projet respecte les préconisations environnementales développées par Paris Batignolles aménagement, l’aménageur de la ZAC. « Le Syctom s’est engagé à maîtriser la consommation d’énergie du bâtiment, assure Fabrice Beacco, chef de projet pour le centre de tri. Il sera doté de moteurs électriques à haut rendement et d’une installation d’environ 2 000 m2 de panneaux photovoltaïques dont la production sera revendue à EDF. L’éclairage naturel et les transports doux (piétons, cyclistes, etc.) seront aussi privilégiés ». Le Syctom Il assure quotidiennement, depuis plus de 30 ans, le service public de traitement des déchets ménagers de 84 communes, soit près de 6 millions d’habitants, de l’agglomération parisienne. Pour traiter les 2,3 millions de tonnes de déchets apportées chaque année par les collectivités de son territoire, il dispose de six centres de tri de collecte sélective, d’un centre de transfert et de trois centres d’incinération avec valorisation énergétique des ordures ménagères résiduelles. Territoires ©Kréaction/Les ©Kréaction/Les Ateliers Ateliers Monique Monique Labbé, Labbé, architectes architectes La nouvelle usine valorisera les déchets de plus de 900 000 habitants. L’implantation du centre aux abords d’une plateforme logistique ferroviaire permettra en outre au Syctom d’évacuer une partie de la production des balles de matériaux triés dans le centre par voie ferrée. Paris XVII réceptionnera également les déchets recyclables du terminal de collecte pneumatique de la Mairie de Paris contiguë au centre. Implantée sur un terrain de 11 000 m2, cette installation vise à offrir un lieu de traitement de proximité pour les collectes sélectives du nord-ouest de l’agglomération parisienne, et à rapprocher les sites de traitement des lieux de production de déchets. Elle traitera en effet les collectes sélectives de plusieurs arrondissements parisiens, mais aussi de communes proches (SaintOuen, Clichy-la-Garenne…). Elle valorisera au total les déchets de plus de 900 000 habitants. Des équipements dernier cri D’une capacité proche de 40 000 tonnes/an, le centre de tri disposera d’équipements ultramodernes pour capter les différents matériaux, et anticiper l’extension prochaine des consignes de tri à l’ensemble des emballages plastiques. Fortement automatisées, les lignes de tri pourront traiter jusqu’à quinze tonnes de papiers et d’emballages recyclables par heure, tout en améliorant les conditions de travail (ergonomie du poste de travail, confort thermique, acoustique, visuel et olfactif) et la sécurité des agents. Le process intégrera les dernières technologies de tri automatique (tri optique des plastiques, tri optique des papiers, tri mécanique des différentes fractions etc.) afin de limiter le tri manuel et Paris XVII sera le premier centre du Syctom présentant le procédé Recyfilms dont Ar-Val, équipementier du groupement, a participé à la conception, la réalisation et la mise en œuvre. orienter l’activité des agents vers le contrôle qualité. Outre, un trommel, treize machines de tri optique et quatre séparateurs balistiques, Paris XVII sera le premier centre du Syctom présentant le procédé Recyfilms dont Ar-Val, équipementier du groupement, a participer à la conception, la réalisation et la mise en œuvre. Ce process automatisé servira à mieux traiter les nouveaux flux de plastiques, en particulier les films en polyéthylène. Avec ces technologies innovantes, « Nous disposerons ainsi d’un équipement adapté aux évolutions du gisement liées à l’extension des consignes de tri », souligne Fabrice Beacco. ©Kréaction/Les Ateliers Monique Labbé, architectes > Procédés de tri • Centre dimensionné pour un traitement jusqu’à 15 t/h de collecte sélective. • Fonctionnement en 2 postes. • 21 trieurs par poste. • 1 seule cabine de tri avec aménagement de l’environnement de travail conforme à la norme (récente) sur la conception des cabines de tri et aux prescriptions INRS (système de ventilation, ergonomie, rehausse trieur, siège assis debout). • Principaux équipements : 1 trommel, 4 cribles balistiques, 13 machines de tri optique, équipements de séparation (overband et courant de Foucault) pour les ferreux et les aluminiums y compris sur les refus (petite fraction de 0 à 90 mm), 1 ligne de conditionnement avec 1 presse à balles, 1 presse à paquets. Environ 230 équipements au global. • Système « Recyfilms » (dont Ar-Val, équipementier du groupement, a participé à la conception, la réalisation et la mise en œuvre) : 1 crible balistique associé à un tri optique p o u r l a s é p a ra t i o n d e s f i l m s plastiques. • Système de pesée sur différents flux (trémie d’alimentation, stockage intermédiaire et refus) permettant d’assurer le suivi automatique de la production et de piloter la ligne de conditionnement également en automatique. • Compacteurs sur les refus avec évacuation par FMA de 85 m3 d’une capacité de 16 t. • Système de dépoussiérage à la source (1 dépoussiéreur avec réseau de captation sur les principaux équipements générateurs de poussière). • Système d’aspiration centralisé pour nettoyage de l’installation. 61 TERRITOIRES Ces femmes qui réussissent L'accès des femmes aux plus hautes responsabilités progresse dans l’économie avec des beaux succès. sabelle Kocher, futur PDG d'Engie, deviendra en mai la première femme à diriger un groupe du CAC 40. La représentation des femmes dans les conseils d'administration du CAC 40 a fait l'objet d'une loi en 2011, qui imposait un minimum de 20 % à compter de 2014, et 40 % en 2017. Elles n'étaient que 7,5 % dans les comités de direction en France en 2012. Il reste donc un peu de chemin à faire, mais l'accession des femmes aux plus hauts postes est une réalité. Différentes associations accompagnent ce mouvement. En France, chaque année, les Trophées des femmes de l’industrie organisées par l'Usine Nouvelle sont l'occasion de donner un coup de projecteur sur de beaux parcours. Par exemple, en 2015, Odile Jubécourt, qui préside au développement de l’A330neo, l’un des prochains paris d'Airbus, Sophie Schmidtlin, la tête de la future plate-forme de Renault pour la Chine, Christine Desbois, qui porte le développement durable chez Bic. De son côté, Carole Malinvaud, associée de Gide et Présidente de la commission arbitrage d’ICC France a été nommée femme d’influence 2015 dans le domaine économique. Créé en 2005, le Women's Forum donne la parole aux femmes sur diverses problématiques économiques et sociales, par exemple, à travers l'organisation d'événements. Il s'agit de mettre en lumière la vision et la voix des femmes sur les principaux enjeux économiques et sociétaux de notre époque. Des hommes et des femmes, décideurs économiques et politiques, issus de la société civile ou du milieu universitaire, sont invités à présenter et partager leurs idées. Le principal temps fort annuel, le Global Meeting, se tient à Deauville. Avec à chaque fois un beau plateau. À titre d'exemple, Christine Lagarde, ancienne Ministre de l’Économie et des Finances de la France et actuelle Directrice du Fonds Monétaire ©Packshot - Fotolia.com I internationale (FMI), était l'invitée de la dixième édition en octobre 2014 qui a également compté Elizabeth Weymouth, senior associate editor au Washington Post, Connie Hedegaard, alors Commissaire européenne chargée de l'Action pour le Climat, et Ertharin Cousin, Directrice Exécutive du Programme alimentaire mondial des Nations Unies. L'édition de 2015 a réuni également des personnalités de renom. L'industrie n'est plus une chasse gardée au masculin Autre bel exemple dans le domaine économique, Clara Gaymard, présidente de General Electric France depuis avril 2009, a été nommée présidente du Forum en décembre 2014. Lors du premier déjeuner Women’s Forum / Club au Féminin RMC BFM, en mars 2015, elle a souligné que « l’idée est d’avoir des événements créés et pensés par les femmes et sur le sujet des femmes, en lien avec l’économie et la société : comment nous, les femmes, apportons un regard neuf sur l’économie, sur le monde ? » Plus ancienne, l'association Femmes chef d'entreprise (FCE) a été fondée en 1945 par Yvette Foinant, qui était maître de forge dans les Ardennes françaises. Rebaptisée Femmes d'entreprises mondiales (FCEM) pour accompagner son ouverture internationale, elle agit auprès des gouvernements et des instances internationales publiques et privées. FCEM a un statut consultatif aux Nations unies et une représentation auprès de la l'UE, du CNUCED, du PNUD, de l'ONUDI, de l'OCDE et de l'OIT. Ainsi que le souligne Laura Frati Gucci, fondatrice de Pirene Srl et présidente de FCEM, l'association « est un moteur pour encourager et apporter un soutien à entrepreneuriat féminin. Nous savons comment procéder et faire de cet objectif une priorité, offrir une feuille de route pour faciliter la constitution d’un fonds d’investissement stratégique destiné à aider les gouvernements à résoudre et porter les questions féminines. FCEM depuis 61 années coopère avec les associations nationales membres de ce réseau unique qui travaille avec passion à l’autonomisation des femmes dans le monde pour un avenir meilleur de toute la société ». Sources : www.womens-forum.com - http://fcem.org - www.usine-nouvelle.com 63 SUCCESS STORY, UNE BELLE RÉUSSITE Au service de votre bien-être ! Samuel LEVINE-PARISI, CEO du groupe Bioloka ©DR Créée en 2009, Bioloka, leader sur le marché francophone des produits de bienêtre, exporte déjà dans vingt pays. Une réussite qui repose sur un positionnement haut de gamme et un excellent service client. Samuel Levine-Parisi nous précise sa stratégie. ouvez-vous nous relater l’histoire de Bioloka ? B i o lo k a a é t é c ré é e e n 2 0 0 9 lorsqu’Alexis Martens a décidé d’investir dans la commercialisation de notre produit phare « Le champ de fleurs », un tapis d’acupression pour soulager le mal de dos. J’ai rejoint l’entreprise, en 2012. En trois ans, nous avons connu une importante hausse de nos effectifs et de notre chiffre d’affaires. Outre le monde francophone, nous sommes implantés en Allemagne, en Italie et au Royaume-Uni... Bioloka exporte dans vingt pays et, pour commercialiser ses produits, dispose de 6 sites de E-commerce(1) divers et variés. Quelle est votre philosophie et comment celle-ci a-t-elle construit votre stratégie ? Notre règle d’or, c’est le contrôle qualité rigoureux et adapté aux études de marché et cela nous a réussi, car Bioloka est l’une des seules entreprises immédiatement rentable. Après Le champ de fleurs, Bioloka a proposé d’autres produits, à chaque fois, en exclusivité européenne. Chaque nouveauté fait l’objet d’une étude de marché pour réfléchir à son positionnement. Bioloka préfère acheter en petite quantité pour une clientèle ciblée plutôt que de vendre au plus grand nombre un produit standard. Soit le produit se vend et cela continue, soit la vente cesse. Un second point, c’est la satisfaction du client que nous recherchons avant tout. Après avoir fait ma carrière dans le management, notamment à Spiral Solutions, je me suis efforcé d’amener ce service à un niveau d’excellence. Nous souhaitons avant tout offrir du bien-être à nos clients, les soulager, d’accéder à leur demande. Cela passe d’abord par une réponse très rapide : 3 minutes au téléphone pendant les jours ouvrés, et 15 minutes sur Facebook. De plus, notre service est le seul en France à rappeler tous les clients qui nous ont contactés la nuit ou le week-end. Nous sommes récompensés par le classement de Trustpilot, site totalement indépendant d’évaluation de la satisfaction client, qui nous attribue la note de 8,9 sur 10 pour 3 300 avis. Pouvez-vous nous préciser le positionnement de Bioloka par rapport à ses concurrents ? En réalité, Bioloka est seule sur le créneau haut de gamme des produits de bien-être. La qualité de sa relation au client est au centre de son positionnement. Tous nos produits (1) www.lesmauxdedos.com Samuel Levine-Parisi Autodidacte, Samuel Levine-Parisi, a acquis une solide expérience dans le management en intégrant Spiral Solutions en 2008, d’abord comme chargé de clientèle, puis comme team Leader. Il poursuit sa carrière en tant que responsable, pour l’Europe, de la vente en ligne des produits Moleac. Lorsqu’il entre à Bioloka, c’est tout d’abord comme chargé des opérations. Il va rapidement s’imposer à la tête de l’entreprise et lui permettre de décupler son chiffre d’affaires et d’être numéro 1 de son secteur dans les pays francophones. 64 ©DR P comportent la mention « satisfait ou remboursé à 30 jours », c’est très rare dans le E-commerce. Forts de ses 200 000 ventes, Bioloka est leader sur son secteur. Comment fonctionne votre réseau de distribution ? Tout ce qui concerne la vente sur Internet est traité directement par Bioloka. Nos produits, Le Champ de fleurs en tête, sont disponibles uniquement dans des boutiques spécialisées. En Suisse, pays porteur sur notre offre, deux enseignes importantes, La Boutique du dos et Le Confort du dos, sont des partenaires Success Story, une belle réussite de choix. Nous envisageons d’ouvrir prochainement un magasin à Paris dédié à nos produits. Ce sera un magasin d’un genre nouveau puisqu’il sera positionné bien-être plutôt que paramédical. Quel est votre modèle de management ? Nous avons une petite équipe, mais chacun est polyvalent et peut gérer des partenariats avec des distributeurs comme des relances commerciales. Chaque lundi, nous tenons réunion, où chacun expose ses idées, étudiées soigneusement. Puis, nous votons à main levée. À Bioloka, les collaborations sont transversales et les décisions collégiales. Qu’en est-il de votre stratégie marketing ? Nous privilégions un marketing ciblé, comme en témoigne notre partenariat avec Passeport santé pour un mois. Nous utilisons les ressources classiques du Web : retargeting, articles sponsorisés... Nous avons créé notre propre régie marketing, Strategic Media Marketing, et nous avons réuni deux sociétés Outbrain et Criteo pour l’acquisition et le retargeting. En matière de communication, nous sommes en recherche constante d’innovation. Par exemple, nous allons bientôt mettre en ligne des vidéos 3D anatomique montrant comment nos produits soulagent, puis des vidéos interactives. Mais la satisfaction des usagers est la meilleure des publicités. Le champ de fleurs fait l’objet de vidéos, de nombreux articles de blogs, de recommandations auprès de professionnels de la santé, d’avis positifs sur des forums spécialisés, etc. Enfin, nous avons noué des partenariats ; avec Daniel Narcisse, le handballeur français le plus titré, nous avons en projet un site consacré au sport. Les ingrédients du succès La société Bioloka a connu une progression rapide en s’appuyant sur trois éléments essentiels mis en place par Samuel Levine-Parisi : • un service client de très haut niveau, récompensé par un classement de 8,9/10 chez Trustpilot ; • une communication ciblée et extrêmement efficace gérée par SMMC (Strategic Media Marketing), une régie publicitaire spécialement créée à cette intention ; • des partenariats stratégiques : Criteo, Outbrain, Ligatus et Médiveille ainsi que le célèbre handballeur français Daniel Narcisse, véritable ambassadeur de la marque. La Hollande, pays très connecté, est très en avance sur la France en E-commerce. Plus tard, en 2018, nous allons nous implanter aux États-Unis, à l’aide de partenaires et d’investisseurs locaux. Sur le plan personnel, qu’est-ce qui vous motive dans cette grande aventure qu’est aujourd’hui la conduite d’une entreprise ? Ma motivation est simple : rendre la confiance que l’on m’a confiée au centuple. Il est rare, de nos jours, de donner la chance à un autodidacte et c’est un honneur pour moi de manager Bioloka vers de nouveaux sommets. À mes yeux, la conduite d’une société doit être basée sur un principe simple, mais très efficace : l’autocritique. C’est un principe essentiel de mon expérience au sein de Tsahal (Armée de défense d’Israël) que j’applique au quotidien. Il permet surtout de se rappeler qu’il est toujours possible de mieux faire, voire de changer complètement d’approche le cas échéant. Cela permet de rester alerte aux besoins existants ou futurs de la compagnie et de toujours garder la tête sur les épaules en tant que leader. La réussite qui a été là très tôt ne vous a pas rien fait perdre de votre dynamisme... Bien au contraire ! Elle nous invite à aller de l’avant. Nous savourons notre place de numéro 1, l’important, c’est de le rester. ©DR Quels sont vos axes de développement ? En 2017, notre priorité, c’est à la fois l’Allemagne et la Hollande. Notre chiffre d’affaires en Allemagne a doublé, mais c’est un marché de 80 millions de personnes dotées d’un bon pouvoir d’achat, nous avons donc une grande marge de progression. C’est un marché exigeant. TERRITOIRES La banane, un des fers de lance de l’économie ultramarine L'agriculture des départements d’Outre-mer est dominée par deux productions - la banane et la canne à sucre - principalement orientées vers l'exportation. La filière banane a vu sa production augmenter de plus de 6 % par an depuis 2007. istoriquement orientée vers l’exportation, la production agricole des départements d’Outre-mer est centrée sur la culture de la banane, de la canne, de la vanille, des plantes à parfum ou encore de l'ananas. Mais si le climat de ces régions favorise la croissance de la végétation, il constitue également la source de la multiplication d’organismes nuisibles qui nécessitent des méthodes de production et des techniques de lutte adaptées au développement durable. Ces territoires sont également soumis à des aléas climatiques parfois violents qui ont régulièrement des effets dévastateurs sur les récoltes. Parmi les autres facteurs à prendre en compte: des zones de densité de population élevée et une urbanisation croissante qui tend à réduire la surface agricole. Par ailleurs, l’analyse du secteur doit être replacée dans un contexte social spécifique aux territoires ultramarins et caractérisé par une forte croissance de la population, et surtout par un taux de chômage, en particulier des jeunes, nettement supérieur à celui observé en métropole. La préservation de l'emploi agricole constitue donc un impératif ©Frida&Diego - Fotolia.com H pour l'économie toute entière de ces départements. La filière banane Produite dans les cinq départements ultramarins, la banane constitue l'une des principales ressources économiques de la Guadeloupe et de la Martinique. Son exportation contribue à une part importante des flux commerciaux vers la partie continentale de l'Union européenne. Entre 98 et 99 % de la production de banane de Guadeloupe et de Martinique commercialisée est destinée à l’export, avec pour principaux marchés la métropole (75 % des volumes) et les autres pays européens, en particulier l’Allemagne. La filière est aujourd’hui le premier employeur privé de Guadeloupe et de Martinique. En 2012, elle a achevé sa structuration en fédérant les planteurs au sein d’une organisation de producteurs (OP) par DOM : en Guadeloupe : la SICA LPG « Les producteurs de Guadeloupe », créée en 2006 ; en Martinique : la SICA Banamart, créée en 2004, qui a intégré en son sein, à compter du 1er janvier 2012, la SICA Banalliance, DES AIDES EUROPÉENNES SPÉCIFIQUES Les DOM bénéficient d’un programme spécifique européen, le Programme d’Options Spécifiques à l’Eloignement et à l’Insularité des Départements français d’Outre-Mer (POSEIDOM), mis en oeuvre depuis 1991. Ce programme regroupe des mesures permettant d’aider à l’approvisionnement de matières premières agricoles non produites localement et de favoriser les productions agricoles locales. Plus particulièrement, le programme POSEI vise : • Par le volet Régime Spécifique d’Approvisionnement (RSA), à compenser l’éloignement géographique pour certains approvisionnements nécessaires à l’alimentation animale, aux industries agroalimentaires et à l’alimentation humaine ; • Par le volet Mesures en Faveur des Productions Agricoles locales (MFPA), à maintenir et soutenir l’agriculture locale et à aider à sa structuration et à sa diversification. o Filière animale (MFPA-A) o Filière végétale (MFPA-B) o Filière canne-sucre-rhum (MFPA-C) Concrètement, le programme POSEI France propose un dispositif d’aides financières découlant d’une adaptation de la politique agricole commune de l’Union européenne aux départements d’Outre-mer. 66 ©Fotobieshutterherb - Fotolia.com Territoires créée en 1997. Quant à la commercialisation de la production, elle e s t a s s u ré e p a r l’ U n i o n d e s Groupements de Producteurs de Bananes de Guadeloupe et de Martinique (UGPBAN), qui fédère depuis 2003 l’ensemble des organisations de producteurs de bananes des Antilles françaises. Entre 2007 et 2014, la production commercialisée a bénéficié d’une forte hausse (+ 6,4 % par an) : on peut expliquer ces résultats par l’augmentation des surfaces plantées (+ 1, 4 % par an) mais surtout par celle des rendements : globalement, le rendement moyen était de 33 t/ha planté (hors jachère), avec un record historique de 35,1 t/ha en Guadeloupe en 2014. Cette tendance s’accompagne d’une baisse du nombre des exploitations ainsi que de l’accroissement de leur taille moyenne (+ 3 % par an depuis 2007). Enfin, le développement de la cercosporiose noire, ou maladie des raies noires, détectée en 2010 en Martinique et en janvier 2012 en Guadeloupe, a nécessité la mise en place d’un dispositif de surveillance et de traitements adaptés homologués au niveau européen, qui se traduisent en particulier par l’interdiction du traitement aérien. La filière canne-sucre-rhum La filière canne constitue l’un des principaux piliers de l’économie agricole des départements d’Outre-mer (hors Mayotte) : elle est le garant du maintien de l’emploi et ses unités industrielles maillent ces territoires. Par ailleurs, elle joue un rôle crucial en matière de développement durable : les cultures de canne protègent les sols contre l’érosion ; elles préservent l’environnement grâce à un usage restreint des intrants ; enfin, elles servent d’approvisionnement pour les énergies renouvelable (bagasse pour les centrales à charbon) et les bioénergies (méthane et à terme, production directe d’électricité). La production, après une baisse continue depuis 2010, est repartie à la hausse en 2014 (+ 8,5 % par rapport à 2013) pour atteindre 2 607 451 tonnes. La production globale de sucre de 257 654 tonnes (équivalent sucre blanc), principalement basée à La Réunion (80 % de la production totale), augmente en 2014 (+ 6,0 %) mais après avoir atteint en 2013 son niveau le plus bas depuis 2006. La production totale de rhum est à la hausse mais c’est surtout la production de rhum agricole qui est en forte augmentation (+ 12,1 % par rapport à 2013) pour atteindre le niveau historique de 114 785 HAP depuis 2006. Le plan Ambition DOM 2020 Les filières banane, canne-sucrerhum, élevage et cultures de diversification ont adopté, fin 2015, leurs projets de filières à l’horizon 2020. Le plan Ambition DOM 2020 dresse un état des lieux de chaque filière, en précisant ses atouts et ses faiblesses, notamment en matière d’agro-écologie et en déterminant les enjeux partagés de l’amont à l’aval. Les projets de filières définissent des objectifs portant, en particulier, sur la compétitivité des produits des Outre-mer sur les marchés locaux et internationaux et sur la performance économique, sociale et environnementale des entreprises ultramarines. Ces projets, qui viennent consolider les ambitions du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt pour les Outre-mer, fixent des cadres d'intervention destinés à être déclinés par chaque filière et dans chaque territoire sous forme de plans d'actions. Leur suivi et leur évaluation seront effectués dans le cadre des comités sectoriels de l'Office de développement de l'économie agricole d'Outre-mer : créé en 1984, l'ODEADOM est chargé de l ' a cco m p a g n e m e n t d u m o n d e agricole ultramarin dans son développement durable, en étroite concertation avec les professionnels. L’Office est le principal organisme payeur des aides communautaires du premier pilier de la Politique agricole commune en faveur de l’agriculture des DOM. Son Conseil d’administration arrête les priorités d’action pour la mise en œuvre des projets de développement agricole visant à renforcer la structuration des filières, afin de contribuer au développement endogène des productions agricoles ultramarines. 67 TERRITOIRES La Banane Française cultivée en Guadeloupe & Martinique Les 650 producteurs de bananes de Guadeloupe et Martinique se mobilisent tout au long de l’année pour proposer un fruit unique par son terroir et son mode de production issu de l’agriculture durable. La mission principale de l’IT2 est de mettre au point, avec le CIRAD, des innovations permettant une meilleure protection des écosystèmes et une meilleure qualité visant à l’amélioration et la valorisation de la production agricole de Guadeloupe & Martinique, tant pour la banane que pour les autres filières végétales. La collaboration entre l’IT2, le CIRAD et les groupements de producteurs, au sein du Plan Banane Durable, constitue un exemple unique au monde de coopération La filière en chiffres 270 000 tonnes de bananes commercialisées dont 200 000 T sur le marché français. 650 producteurs en exploitations familiales avec des superficies moyennes de 13 hectares. 2 Groupements de producteurs assurant 100% de la production de bananes des Antilles : • Banamart en Martinique (420 producteurs) • LPG en Guadeloupe (230 producteurs) 8 500 hectares cultivés 1er employeur privé des deux îles 80 % des emplois agricoles en Martinique / 50 % en Guadeloupe. 6 000 emplois directs / 10 000 indirects 1 ligne maritime dédiée qui par l’effet du fret retour garantit à la Guadeloupe et à la Martinique un approvisionnement indispensable et régulier. La filière française de banane est la seule au monde à appliquer le droit social, économique, environnemental et sanitaire, français et européen. Ce qui implique : • Un revenu minimum pour les salariés ; • La protection sociale (Convention collective et retraites complémentaires) ; • Les droits syndicaux ; • La formation professionnelle ; • Le respect des normes sanitaires et environnementales communautaires. scientifique, sur les problématiques des cultures en zones intertropicales au niveau régional et international. Des résultats qualifiés d’exemplaires par les pouvoirs publics : en effet, la diminution de 50% de l’utilisation de ©UGPBAN Une filière durable et responsable La mise en place par la filière du Plan Banane Durable 1 (2008 – 2014), avec l’aide des pouvoirs publics, a été un véritable coup d’accélérateur pour une culture responsable de la banane. Il a considérablement renforcé la capacité d’innovation des producteurs par la création de l’IT2 (Institut Technique Tropical) et la collaboration avec le Cirad (Centre de Coopération International en Recherche Agronomique pour le Développement). produits phytosanitaires de 2006 à 2012 place la filière à l’avant-garde du plan « ECOPHYTO » du Grenelle de l’environnement, qui ne prévoit maintenant cette réduction qu’à l’horizon 2025 pour les autres cultures. Ainsi, le développement des techniques alternatives aux traitements phytosanitaires a permis de généraliser les bonnes pratiques culturales (piégeage des insectes avec des phéromones, mise en place de systèmes comme les plantes de couverture aux pieds des bananiers, rotations culturales avec la canne à sucre par exemple, jachères pour faire reposer les sols, utilisation de plants sains exempts de maladies pour les replantations). 69 ©UGPBAN TERRITOIRES • Renforcer la performance économique de la filière face au dumping social et environnemental de la concurrence internationale. • Assurer une maîtrise durable des bio-agresseurs (maladies, ravageurs) en continuant de mettre au point des méthodes alternatives à l’utilisation des pesticides, en collaboration avec le CIRAD et l’Institut Technique Tropical (IT2). ©UGPBAN Une filière organisée et innovante Depuis 2003, la filière Banane de Guadeloupe & Martinique s’est regroupée au sein de l’Union des Groupements des Producteurs de Bananes de Guadeloupe & Martinique (UGPBAN). En 2008, les producteurs de Bananes de Guadeloupe & Martinique ont 70 également racheté Fruidor, le premier réseau de mûrisseries de France, se dotant ainsi d’un outil qui leur garantit une maitrise commerciale indispensable. La filière contrôle donc l’ensemble de la chaîne : de la production à la distribution, elle est reconnue aujourd’hui, comme l’une des filières agricoles les plus innovantes et les mieux organisées d’Europe. Elle travaille aussi à la recherche variétale et avec l’IT2 et le CIRAD, elle a créé la plus grande plate-forme de sélection variétale au monde. La banane CIRAD 925, une variété développée par hybridation naturelle, plus résistante aux maladies du bananier et à la Cercosporiose noire notamment, est l’un des projets prometteurs de cette plateforme de recherche. ©UGPBAN Fort de ces avancées en matière environnementale, la filière Banane de Guadeloupe & Martinique réaffirme son engagement pour une agriculture durable en lançant en 2015, le Plan Banane Durable II. Les objectifs de ce plan, sont les suivants : ©BHT+2000 - Fotolia.com L’ÉNERGIE, SECTEUR PÉTROLIER ET GAZIER Pétrole et gaz, des énergies compétitives Tout en accroissant sa compétitivité, le secteur des énergies fossiles (pétrole et gaz) doit relever des enjeux écologiques et financiers. i nous sommes actuellement dans un contexte de baisse du cours du baril, lié à une demande atone et à la montée en puissance du gaz de schiste, les prévisions à moyen et long termes sont mieux orientées. Selon IFP Energies nouvelles (1), « le contexte énergétique à l’horizon 2030 sera marqué à la fois par une augmentation forte de la demande en produits pétroliers, due notamment à la croissance de la mobilité dans les pays émergents, et par une augmentation de la part des pétroles lourds dans l’approvisionnement en brut des raffineries. À plus court terme, l’industrie du raffinage devra être capable de produire des carburants répondant à des spécifications de plus en plus sévères, de répondre au déséquilibre gazole/essence, et faire face aux bouleversements induits par la montée en puissance du pétrole et du gaz de schiste aux États-Unis, qui pourrait à l’avenir modifier en profondeur les équilibres en termes d’importation et d’exportation de produits comme l’essence ou le gazole ». Même scénario pour le groupe Total, une des plus grandes entreprises pétrolières et gazières au niveau mondial : en 2035, la demande S énergétique dans le monde devrait être supérieure de 35 % à son niveau de l'année 2010. L'entreprise souhaite limiter l'impact de ses activités sur l'environnement, notamment en prévenant les pollutions accidentelles, en réduisant le volume des déchets et en préservant la qualité de l'air et de l'eau. En 2014, la production de gaz de Total a dépassé en volume celle de pétrole : cette énergie, qui émet deux fois moins de dioxyde de carbone que le charbon est en effet plébiscitée par le groupe dans le cadre de sa politique environnementale. En 2014, Total produisait du gaz dans 26 pays fort notamment de 6 filiales de commercialisation en Europe. Transporter le pétrole et le gaz Les origines du transport du pétrole par oléoduc ou pipeline remontent au 19ème siècle : c'est en effet en 1865, aux États-Unis, qu'une conduite pour l'évacuation de la production d'un gisement a été utilisée pour la première fois. Le pétrole est surtout acheminé par des oléoducs par voie terrestre et par des navires par voie maritime. Amené du site de production jusqu'aux raffineries afin d'être transformé, il est ensuite acheminé vers les lieux de consommation. Le pétrole circule assez lentement (environ 7 kilomètres par heure) à l'intérieur des oléoducs, composés de tronçons soudés et contrôlés par rayons gamma. Afin de préserver l'environnement, la prévention des fuites est un enjeu majeur : on peut les détecter suite à une brusque chute de pression ; il faut alors stopper le flux de pétrole dans les stations de pompage. Afin d'éviter la corrosion des tuyaux due au dioxyde de carbone et à l'hydrogène sulfuré, la maintenance des infrastructures est primordiale. C'est d'autant plus le cas en Sibérie, compte tenu du climat. Le plus long oléoduc au monde est celui de Druzhba (Amitié en Russe) avec 5327 kilomètres : il traverse huit pays : Russie, Biélorussie, Ukraine, Pologne, Allemagne, République tchèque, Hongrie et Slovaquie. Vient ensuite celui de Bakou-TbilissiCeyhan (BTC), avec environ 1700 kilomètres, entre les mers Caspienne et Méditerranée. De son côté, le trans-Alaska (TAPS), s'étend sur 1300 kilomètres du nord de l'Alaska jusqu'au port de Valdez en Alaska. 71 ©Berkut 34 - Fotolia.com L’ÉNERGIE, SECTEUR PÉTROLIER ET GAZIER Le gaz est quant à lui acheminé par des gazoducs depuis la zone d ' ex t ra c t i o n j u s q u ' a u l i e u d e consommation. Il peut atteindre jusqu'à 40 kilomètres heure. Souvent enterrés, les gazoducs peuvent également être construits sous la mer. La création du premier gazoduc date de 1891 aux États-Unis. Cette méthode de transport s'est développée à partir des années 1960 grâce à l'évolution des techniques de métallurgie. Les spécialistes estiment qu'à ce jour, un million de kilomètres de gazoducs a été mis en place sur la planète, après d'importants investissements. Une autre méthode d'acheminement est possible ; le gaz naturel liquéfié (GNL) est transporté à bord de navires méthaniers. Spiecapag est l'un des leaders mondiaux du secteur des pipelines et d'infrastructures, principalement dans le domaine du pétrole et de gaz. Parmi ses chantiers internationaux, le pipeline Angola LNG ProjectNearshore & Onshore Pipelines, a été achevé en septembre 2011. La société a également été chargée du projet de pipeline SEA Gas en Australie pour transporter du gaz des champs d’Iona et Minerva jusqu'à à Adélaïde. Les travaux ont été terminés en décembre 2003 ; le projet a reçu le prix d’Excellence en Ingénierie en 2005. Des enjeux stratégiques majeurs Si les technologies utilisées en exploration-production sont de plus en plus pointues, la recherche permet aussi de limiter l'empreinte écologique des ouvrages de transport du gaz et du pétrole. Car dans ce domaine, la pression des opinions publiques est forte. Certains projets rencontrent des obstacles politiques, à l'image de l'oléoduc Keystone XL. Il s'agissait de transporter le pétrole issu des sables bitumineux de la Province d'Alberta au Canada jusqu'aux Etats-Unis. Après le veto du président américain Barack Obama, ce projet a été abandonné en novembre 2015. Plusieurs associations écologistes avaient souligné ses risques pour l'environnement. L'approvisionnement en gaz est aussi une question stratégique : on peut évoquer ici la volonté des pays européens de réduire leur dépendance à l'égard du gaz russe. (1) C'est le nouveau nom de l'Institut Français du Pétrole (IFP) Sources : www.connaissancedesenergies.org ; Planète Energies ; Total ; Spiecapag ; IFP Energies nouvelles 72 L’énergie, secteur pétrolier et gazier Pétrole : les majors s’adaptent Acteurs incontournables de l’industrie pétrolière, les cinq « majors » figurent parmi les principales entreprises mondiales. Comment s’adaptent-elles à la chute des cours ? P LES CINQ MAJORS • Royal Dutch/Shell : compagnie anglo-néerlandaise née de la fusion entre Shell et Royal Dutch ; • Exxon Mobil : compagnie américaine issue de la fusion entre Exxon et Mobil ; • BP : compagnie britannique née de la fusion entre British Petroleum et Amoco ; • Chevron : compagnie américaine créée par fusion entre Chevron (ex-Socal) et Texaco ; • Total : compagnie française provenant de la fusion entre Total, Fina et Elf. développement des pays sous-développés. À l'origine, seuls cinq Etats étaient membres de l’Opep : l'Arabie Saoudite, l'Iran, l'Irak, le Koweït et le Venezuela. Ils furent rejoints par le Qatar, l’Indonésie, la Lybie, Abou Dabi, les Emirats Arabes Unis, l’Algérie, le Nigeria, l’Equateur, le Gabon puis l’Angola, certains d’entre eux s’étant depuis retirés. Par un effort coordonné, (système de quotas de productions) ses membres s’accordent sur la quantité de pétrole exporté, ce qui influence le prix du marché. L'Opep assure aujourd’hui un peu plus de 40 % de la production mondiale, mais elle contrôle plus de 70 % des réserves prouvées de la planète. Depuis plus d’un an, la forte augmentation de la production américaine du pétrole non conven- tionnel dit « de schiste » couplée au refus de l’Arabie Saoudite de réduire sa production, a entraîné une forte augmentation de l’offre, tandis que la demande stagnait. En 2015, le prix du baril de Brent de la Mer du Nord, qui sert de référence mondiale, a perdu 47 % par rapport à 2014. Les majors ont donc vu leurs résultats chuter. Chevron a enregistré sa première perte trimestrielle en 13 ans ; les profits d’Exxon Mobil ont été réduits de moitié ; Shell a quant à lui vu son bénéfice net divisé par plus de sept tandis que Total annonçait un résultat 2015 en repli de 20 %... Pour résister à cette crise, les majors continuent à réduire leurs dépenses, à commencer par les investissements, et à amplifier les suppressions d’emplois. ©Weerasak - Fotolia.com résentes sur tous les continents, elles ont été créées entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle. Exxon, Shell, BP, Mobil, Chevron, Gulf et Texaco se partagent alors l’exploitation des ressources pétrolières mondiales et s’organisent, dès 1928, sous la forme d’un cartel : on les nommera les « sept sœurs ». Jusque dans les années 50-70, elles auront les pleins pouvoirs sur le cours du pétrole et imposeront leurs prix aux pays producteurs. Au terme d’importantes opérations de fusion intervenues ces vingt dernières années, elles ne sont plus aujourd’hui que cinq. Née le 14 septembre 1960 lors de la Conférence de Bagdad, principalement à l’initiative de l’Iran et du Venezuela, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) - ou Organization of Petroleum Exporting Countries (Opec) - est une organisation intergouvernementale de pays créée pour permettre aux principaux pays producteurs de se regrouper afin d’influer sur le cours du pétrole ; s’appuyant sur une politique de nationalisation, cette prise de contrôle leur permit d’augmenter leurs revenus. L’idée était également de faire en sorte que les bénéfices liés au commerce réglementé du pétrole soient consacrés en majorité au L’ÉNERGIE, SECTEUR PÉTROLIER ET GAZIER Entrepose-Spiecapag : spécialistes des projets complexes ©DR Jacquelin de LA PORTE DES VAUX, Directeur Commercial EPC Onshore d’Entrepose P À travers ses deux marques Entrepose Contracting et Spiecapag, Entrepose, filiale du groupe Vinci, est un acteur mondial des infrastructures pétrolières et gazières onshore et de l’installation des pipelines terrestres en environnement difficile. Il s’appuie sur ses ressources en ingénierie, fabrication et construction, sur son expertise en management de projet et sur sa maîtrise dans le domaine de la logistique et des approvisionnements pour concevoir et réaliser clés en main les projets les plus complexes. ©DR ouvez-vous nous rappeler quel est votre cœur de métier ? L’activité EPC Onshore du Groupe Entrepose regroupe essentiellement les activités de Spiecapag et celles d’Entrepose Contracting qui représentent environ 80 % du chiffre d’affaires du groupe. Le groupe a récemment adapté son organisation afin de bénéficier au mieux des synergies entre ces deux sociétés, toutes deux acteurs majeurs dans les projets EPC du secteur Pétrole et Gaz. Spiecapag et Entrepose Contracting proposent des solutions « clés en main » incluant le management de projet, la recherche de financement, la conception et l’ingénierie, les études, les achats, la construction, la mise en service, la maintenance et l’opération des ouvrages et la formation des opérateurs ou tout simplement le "clés en main". Spécialistes des projets complexes, leurs références démontrent une expérience unique avec des projets phares du secteur et des réalisations phares dans des pays accédant à l’économie pétrole et gaz. Plus spécifiquement, Spiecapag est l’une des premières entreprises mondiales de pose de pipelines terrestres et d’infrastructures associées et réalise des projets complexes dans le secteur pétrole et gaz ainsi que des réseaux d’adduction d’eau ou de transport de minerais. Entrepose Contracting est un acteur mondial reconnu dans la réalisation clés en main d’infrastructures pétrolières et gazières terrestres. L e u r a d o s s e m e n t a u G ro u p e Entrepose et à Vinci, premier groupe mondial de concessions et de construction, leur offre non seulement une stabilité et une solidité financière mais est aussi un facteur de confiance permettant d’affronter les projets les plus ambitieux. Spiecapag se définit comme un « spécialiste des projets difficiles ». Pouvez-vous nous en donner quelques exemples ? L’histoire du Groupe Entrepose est jalonnée de grands projets « clé en main » réalisés pour les plus grands donneurs d’ordres du secteur. A ce titre deux projets récents sont emblématiques de la capacité d e S p i e c a p a g e t d ’ E n t re p o s e Contracting à réaliser des projets complexes de plusieurs centaines de millions d’euros dans des conditions extrêmes. • Livraison clés en main en 2014 d’un projet de plus d’un milliard d’euros comprenant un réseau terrestre de pipelines et infrastructures associées d'environ 465 km en Papouasie Nouvelle-Guinée pour le compte d’un Groupement piloté par ExxonMobil. Un projet dans un 75 ©DR environnement vierge sans infrastructure existantes allant des basses terres et des zones marécageuses jusqu’aux champs gaziers situés à une altitude de 2 800 m au-dessus du niveau de la mer, nécessitant la mobilisation de plus de 3 000 employés en période de pointe et un investissement de plus de 100 millions d’euros pour des équipements spécialisés. • Yamal LNG, chantier de l’extrême. En mai 2013, Entrepose Contracting et Vinci Construction Grands Projets ont remporté auprès de JSC Yamal LNG - groupement constitué de Novatek (60 %), Total (20 %) et CNPC (20 %) un contrat d’un milliard de dollars pour la réalisation de l’ingénierie, de la fourniture des équipements, de l’approvisionnement, de la construction et de la mise en service de quatre réservoirs cryogéniques à intégrité totale d’une capacité unitaire de 160 000 mètres cubes. Ces ouvrages, destinés au stockage de gaz naturel liquéfié (GNL) comportent une cuve interne en acier à 9 % Nickel et une cuve externe en béton p ré c o n t r a i n t ( p ré c o n t r a i n t e Freyssinet). Situé sur le champ gazier de South Tambey, dans la péninsule de Yamal (Fédération de Russie), une région isolée de Sibérie prisonnière des glaces neuf mois par an, le projet a nécessité la mise en place d’une organisation logistique exceptionnelle pour garantir l’acheminement des matériels et matériaux par la mer et conduit le groupement à adopter 76 des solutions techniques innovantes à l’image des fondations thermostabilisées des réservoirs spécialement conçues pour le permafrost. Les deux premiers réservoirs doivent être livrés fin 2016, le troisième en 2017 et le dernier en 2018. Quelles sont les valeurs sur lesquelles s’appuie la réussite de ces grands projets ? La première de ces valeurs est la sécurité qui se situe au cœur de toutes nos actions. Et nos résultats dans ce domaine, que nous continuons sans cesse à essayer d’améliorer, nous permettent depuis de longues années de travailler régulièrement pour les grands donneurs d’ordres du secteur pétrolier dont le niveau d’exigence en termes de sécurité fait de cette industrie l’un si ce n’est le leader dans le domaine. La réussite des grands projets nécessite évidemment la maîtrise de la sécurité, mais aussi de la qualité et de la protection de l’environnement. Nos engagements dans ces domaines sont reconnus par nos certifications ISO 9001:2008, ISO 14001:2004 et OHSAS 18001:2007 Nous adhérons à la devise du Groupe Vinci à savoir que « les vraies réussites sont celles que l’on partage ». A ce titre nous œuvrons avec une conscience forte de notre responsabilité sociétale envers tous les acteurs d’un projet et nos pratiques sont évaluées en accord avec les recommandations de l’ISO 26000. A ce titre Spiecapag a obtenu niveau « Confirmé » ou le 3ème niveau sur 4. Nos projets nous emmènent généralement dans des endroits les plus retirés du monde et nous sommes bien conscients de notre responsabilité sociétale. Fort de notre expérience acquise au fil des projets, nous savons prendre en compte les intérêts de toutes les parties prenantes, facteur essentiel de notre croissance et de notre succès durable. Pouvez-vous nous faire part de votre analyse concernant l’avenir de l’industrie pétrolière et l’adaptation de votre entreprise à ces évolutions ? La chute brutale du prix du baril de pétrole et son maintien à un niveau bas affecte l’ensemble de l’industrie P é t ro le e t G a z . M a i s m a l g ré ce contexte difficile, le groupe Entrepose maintient ses ambitions de développement. En particulier, il ajuste son organisation commerciale afin de favoriser les synergies dans le domaine des grands projets terrestres et faire bénéficier cette activité de la connaissance combinée des entités concernées – Spiecapag et Entrepose Contracting – des clients et/ou des pays suivis par le Groupe. Face à une situation compliquée, le Groupe Entrepose s’attache à renforcer ses positions dans ses zones de prédilection comme notamment l’Afrique, mais envisage également de s’implanter dans de nouveaux territoires à l’occasion de projets en cours comme au Mexique ou en Russie. STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX AirBusiness Academy, un accompagnement sur mesure des acteurs du secteur aéronautique Destinée à l’origine à former les équipes commerciales du constructeur aéronautique, AirBusiness Academy a depuis élargi son périmètre d’action. L’académie, devenue depuis filiale du Groupe Airbus, contribue au développement des acteurs impliqués dans la chaîne de valeur du groupe. Entretien avec la directrice de l’académie, Michèle Oberto. ©DR ©DR Michèle OBERTO, Directrice d’AirBusiness Academy* ée en 1992, AirBusiness Academy est devenue en 2010 une filiale du groupe Airbus. Pouvez-vous revenir sur cette belle aventure ? Créée en 1992 par les partenaires du système Airbus, l’association Euresas avait pour mission de former les équipes commerciales du GIE Airbus et de compléter par des formations « business » et « connaissance clients », les excellentes formations scientifiques reçues par les ingénieurs diplômés des grandes Ecoles. Au fil des années, cette association a évoluée pour devenir, en 2010, une filiale détenue à 100 % par Airbus Commercial et en 2015, une filiale du Groupe Airbus. Je suis N 78 pour ma part arrivée à la tête d’Air Business Academy en 2008 pour m e t t re e n œ u v re u n p l a n d e croissance reposant sur une offre de solutions d’apprentissage et d’accompagnements basés sur l’expérimentation et le partage des connaissances. De trois millions de chiffres d’affaires en 2008 nous sommes passés à un peu plus de dix-neuf millions en 2015. Des formations sont proposées aux personnels appartenant à Airbus mais aussi plus généralement à l’industrie aéronautique, des fournisseurs aux clients. Pouvez-vous nous expliquer le contenu et l’objectif poursuivi par les formateurs ? La mission d’AirBusiness Academy est de contribuer au développement des acteurs impliqués dans la totalité de la chaîne de valeur. Cela concerne les employés d’Airbus mais aussi, en amont, les employés de sociétés contribuant à la Supply Chain et, en aval, des sociétés clientes ou utilisatrices, que sont les compagnies aériennes, les MRO, les aéroports ou les autorités. Dans cet objectif, AirBusiness Academy développe et dispense des solutions apprenantes selon trois lignes de produit ayant toutes une focalisation sur le management : le management des hommes, à commencer par son propre management – formation, coaching individuel – le management des équipes et le management des relations interpersonnelles. La deuxième partie consiste dans le management des processus c’est-àdire de l’ensemble des disciplines qui concourent à l’excellence opérationnelle, la Qualité, les Achats, le management de la Supply Chain, le Lean, la Finance mais aussi le management de Projet. Enfin, la stratégie et le financement d’une compagnie aérienne, le management de la maintenance et l’engineering des produits, le management des opérations et enfin le management de la Sécurité. Notre offre est donc singulière car les compétences que nous avons développées pour accompagner la montée en compétences des salariés d’Airbus sont proposées plus largement à l’ensemble des acteurs de la chaine de ©DR Le siège de l’académie est à Blagnac, près de Toulouse, mais AirBusiness Academy travaille également avec de nombreux consultants externes et des équipes multiculturelles, est-ce là la force des solutions dispensées ? Nos consultants sont très expérimentés, capables de dispenser des actions de formations existantes (open courses) mais aussi de développer la meilleure solution pour répondre à une problématique d’un de nos clients. Si le savoir est à présent facilement accessible, sa mise en œuvre constitue l’enjeu majeur des organisations. Aussi nous proposons des approches qui permettent, sur une période très courte, de un à cinq jours, de mettre des personnes dans des conditions d’expérimentation qui facilitent et accélèrent l’appropriation de nouvelles façons de faire. Ceci permet de transformer rapidement une connaissance en une compétence éprouvée. Ces expérimentations peuvent prendre différentes formes, études de cas, simulations, jeux,…, l’enjeu étant aussi de rappeler le plaisir d’apprendre et l’envie de le faire de façon continue. Nos formations ne sont pas académiques. Concernant les lieux de formations, nous avons un peu moins de 25 % de nos formations qui sont dispensées à Blagnac, dans notre siège. Les 75 % restants sont dispensées partout sur la planète : Europe, Asie, Moyen Orient, Amérique du Nord. Les quelques cinq cent partenaires scrupuleusement sélectionnés qui délivrent nos produits sont eux aussi répartis sur l’ensemble des territoires au plus près de nos clients. Comment AirBusiness Academy voit-elle évoluer ses activités à plus ou moins long terme ? Nos services sont appréciés de notre maison-mère. Airbus nous encourage à aller proposer nos produits à l’extérieur. Nous avons donc l’intention de continuer à faire profiter nos clients de notre expertise. Ce qui nous intéresse véritablement, c’est de développer le produit adapté au besoin de notre client. Nous proposons avant tout d’aider notre client potentiel à faire lui-même l’évaluation de ses faiblesses et de ses forces. Nous sommes ainsi dans une logique d’accompagnement. Pour mener à bien ces objectifs, nous avons à l’étude au-delà de notre bureau en Chine, l’ouverture de nouveaux bureaux, en Asie Pacifique et en Amérique du Nord. *Interview réalisé en décembre 2015 avant le changement de direction. ©DR valeur. C’est ce qui fait notre spécificité. L’ensemble de ces compétences sont effectivement essentielles à la performance des manageurs du secteur. 79 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX Didier PENABAYRE, Directeur général d’AirBusiness Academy ©Airbus S.A.S. 2010 - photo by em compagny/H. Goussé Didier Penabayre a pris ses fonctions le 12 janvier 2016. Après un Diplôme Universitaire de Technologie en Gestion des Entreprises et des Administrations, obtenu à l'Université Paul Sabatier de Toulouse III, il intègre l'École Supérieure des Sciences Informatiques et Gestion d'Entreprise. Dès 1988, il rejoint le groupe Airbus, et y occupe plusieurs postes à responsabilités dans différentes directions. Management, ressources humaines et culture d'entreprise dominent. Aujourd'hui, à 49 ans, appelé à la tête d'AirBusiness Academy, il met ainsi son expérience et son expertise au service d'un groupe dont il maîtrise parfaitement l'histoire et l'évolution, les valeurs sociétales et les exigences économiques. Rattaché à Thierry BARIL, Directeur des ressources humaines de ce groupe, auquel il est lié depuis 28 années, Didier Penabayre s'est fixé un nouveau challenge, dans lequel il se lance avec l'enthousiasme et le perfectionnisme qui lui sont propres. www.airbusiness-academy.com +33 (0) 5 62 12 11 00 80 ©Rabbit75 - Fot - Fotolia.com Réussir au Canada Ottawa. Ottawa. STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Des liens franco-canadiens d'une intensité exceptionnelle S.E. Nicolas CHAPUIS, Ambassadeur de France au Canada ©DR Si les relations historiques, culturelles et politiques entre la France et le Canada sont intenses, les deux économies sont complémentaires. Le Canada exporte des matières premières, la France y développe ses offres tertiaires, ses investissements directs. e 2 avril 2015, vous évoquiez un destin commun, une prospérité partagée, des partenaires solidaires dans les épreuves entre le Canada et la France. Pouvez-vous nous en dire plus? En tant que nation co-fondatrice avec la Grande-Bretagne, la France dispose de liens d’une densité exceptionnelle avec le Canada. Depuis quatre siècles, nos histoires sont si enchevêtrées qu’elles pourraient n’en former qu’une, malgré la différence de nos institutions politiques et la disparité de nos réalités géographiques et économiques. Nul n’a oublié les sacrifices des soldats canadiens sur le sol français pendant les deux conflits mondiaux ; nul n’ignore non plus l’influence des canadiens francophones dans la vitalité de notre langue de par le monde. Nous sommes partenaires au sein du G7 et du G20, alliés au sein de l’OTAN, nous travaillons ensemble au sein des Nations Unies, avec des réalisations exemplaires : les textes sur la responsabilité de protéger, la convention de l’UNESCO sur la L 82 protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, et tout récemment l’accord de Paris sur le changement climatique dont le Canada a facilité la négociation et soutenu l’ambition. Tout ce qui concerne la sécurité internationale et le développement intéresse la coopération franco-canadienne. Cette solidarité s’est exprimée une nouvelle fois avec force lors des attentats qui ont frappé Paris à deux reprises en 2015 : massivement, les Canadiens – francophones et anglophones – nous ont témoigné leur sympathie et leur disponibilité à nous aider dans ces épreuves. Cousins par l’Histoire, nous sommes aujourd’hui plus que jamais membres d’une même famille soudée dans la fidélité à des valeurs partagées et disposée à œuvrer toujours plus de concert à la solution des défis internationaux. Vous avez aussi parlé d'un destin économique commun. Qu'en est-il des échanges commerciaux entre la France et le Canada aujourd'hui? Ces échanges ont dépassé la barre des dix milliards d’euros en 2012 et sont aujourd’hui pratiquement équilibrés entre les deux pays, avec un léger excédent en faveur de la France (+ 75 millions d'euros sur l’année 2014) ; la complémentarité de nos économies est évidente : le Canada exporte ses matières premières, nous y développons nos offres tertiaires, tout en ayant des positions affirmées dans les nouvelles technologies (numérique, santé notamment) ; nos expertises respectives dans le domaine aéronautique et des transports nous rapprochent également. La France est le 9ème investisseur étranger au Canada, son 9ème fournisseur et son 10ème client ; inversement, le Canada est le 31ème fournisseur et le 29ème client de la France. Les activités liées au tourisme affichent une croissance également dynamique, en particulier sur le plan des services (transport aérien, voyages touristiques) : en 2013, 1 million de touristes canadiens ont visité la France, et plus de 450 000 Français sont allés au Canada. La France est le troisième pays étranger visité par les Canadiens (après les Etats-Unis et le Royaume-Uni), mais le premier pour la durée du séjour (11 jours en moyenne). Le ministre des affaires étrangères a chargé M. Jean-Paul Herteman, l’ancien Président de Safran, d’être son représentant spécial auprès du Canada afin de donner, en étroite liaison avec l’ambassade et les consulats généraux, une impulsion économique aux relations économiques franco-canadiennes. Quel est spécifiquement votre rôle dans cette mission? En liaison étroite avec les administrations centrales, il me revient d’informer le représentant spécial sur l’évolution des échanges francocanadiens, de lui donner les éléments d’appréciation sur les moyens d’accomplir sa mission dans les meilleures conditions et de lui proposer les rendez-vous correspondants. Je suis secondé à cette fin par l’ensemble des acteurs de la diplomatie économique française au Canada : Canada les consuls généraux, le service économique régional, l’agence Business France, la section Canada des conseillers du commerce extérieur, et la chambre de commerce et d’industrie française au Canada. Quels en sont les trois axes prioritaires? Le ministre des affaires étrangères et du développement international a fixé les trois axes qui suivent. Il s'agit d'identifier les opportunités pour les entreprises françaises liées aux nouveaux enjeux (développement de l'Ouest et du Nord du Canada, enjeux économiques et technologiques liés au dérèglement climatique) ; il s'agit aussi de valoriser l'offre française en matière d'infrastructures et services pour le secteur minier, notamment à travers un renforcement de la visibilité de cette offre lors des grands salons professionnels du secteur ; enfin, le but est de contribuer à un renforcement des flux d'investissements industriels et financiers canadiens vers la France. Vous êtes Ambassadeur de France au Canada depuis un peu moins d'une année et vous vous êtes en outre donné pour mission d'attirer les investissements des entreprises canadiennes, en recul en France et en Europe depuis quelques années. Qu'en est-il aujourd'hui? Plus de 200 sociétés-mères canadiennes seraient présentes en France, représentant plus de 21.000 emplois. Selon les statistiques de la Banque de France relatives aux pays d’origine ultime des investissements directs étrangers en France à fin 2013, le Canada a investi 1,8 Mda en France, soit 0,3 % du stock total des IDE réalisés en France, ce qui le place au 19ème rang des investisseurs étrangers en France. Si on observe depuis cinq ans une relative faiblesse des investissements canadiens en France et en Europe, après les niveaux élevés des années 2 000 liées à des acquisitions importantes et au soutien financier apporté par les sociétés-mères à leurs filiales en difficulté pendant la crise de 2007-2008, des perspectives plus positives se dessinent en matière de nouveaux flux créateurs d’emplois, notamment dans le domaine de la construction automobile, de l’énergie et, de manière significative, dans le numérique. L’objectif est par conséquent de soutenir cette évolution, alors que les investisseurs canadiens prospectent de manière prioritaire au RoyaumeUni et en France lorsqu’ils visent les marchés européen et du MoyenOrient. Quelles actions menez-vous en ce sens ? Le Canada figure parmi les pays stratégiques pour lesquels l’agence Business France déploie un accompagnement particulier. En 2014, l’agence a accompagné à périmètre élargi 29 projets pour un millier d’emplois, un record depuis la crise de 2008-2009 ; l’effort, maintenu en 2015, sera prolongé. Je me suis rendu au cours de l’année écoulée dans quasiment toutes les provinces canadiennes hors Grand Nord pour évoquer la nouvelle économie française et les opportunités d’investissement canadien dans le numérique, la santé, et les technologies vertes. En septembre – octobre, dans le cadre du mois de l’investissement que le ministre des affaires étrangères a ouverte à New York, j’ai animé à Montréal et, avec le représentant spécial du Ministre à Toronto, des tables rondes d’entrepreneurs canadiens intéressés par la France. La conférence de Paris sur les changements climatiques a été également une occasion unique de promouvoir, au Canada comme ailleurs, l’excellence française dans les nouvelles technologies des énergies propres. Il est remarquable de relever que l’attractivité de la France a démontré sa résistance à la conjoncture, notamment au lendemain des attentats du 13 novembre : la résilience de notre pays et de ses entreprises, la qualité de nos ressources humaines, et l’attention portée par le gouvernement à la compétitivité sont aujourd’hui des fondamentaux concurrentiels que les Canadiens apprécient. En quoi l'accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne peutil être un atout pour les relations économiques franco-canadiennes? Les dispositions de l’accord eurocanadien devraient permettre une hausse substantielle des échanges, de l’ordre de 20 % ; l’ouverture des marchés publics et la facilitation de la mobilité professionnelle favoriseront l’augmentation des grands contrats d’infrastructures et une meilleure connaissance réciproque des offres de service. Les exportations agro-alimentaires devraient également bénéficier de l’augmentation des volumes des contingents et de la reconnaissance d’une liste d’indications géographiques : 42 indications géographiques françaises bénéficieront ainsi d’un haut niveau de protection sans précédent en Amérique du Nord. Dans ce nouveau cadre euro-canadien, l’offre commerciale française pourra encore mieux qu’à présent faire valoir ses atouts dans le domaine des infrastructures urbaines, de l’agroalimentaire, de la santé, des télécommunications, du tourisme et des biens culturels. Quels défis vous êtes-vous fixé ? Cinq priorités guideront l’action publique française au Canada en 2016. Dans le prolongement de l’accord de Paris sur le climat, et en appui aux initiatives canadiennes, il s'agit de rapprocher les acteurs territoriaux et les entreprises des deux pays dans l’identification de solutions énergétiques durables. Par ailleurs, en matière de diplomatie économique, l'enjeu est de centrer de manière résolue nos relations dans les secteurs innovants, riches de potentiel de croissance et de création d’emplois ; préparer la mise en œuvre de l’accord euro-canadien sur le libre-échange. En outre, dans le champ culturel et scientifique, qui a toujours constitué un élément moteur de la relation franco-canadienne, il faut favoriser une plus forte mobilité des jeunes, étudiants et professionnels, et investir dans une francophonie ouverte et coopérative entre les communautés francophones et anglophones du Canada. En matière de sécurité et de défense, le but est d'asseoir la solidarité franco-canadienne face au terrorisme sur une plus large concertation des experts et des coopérations opérationnelles. Enfin, dans le domaine de la modernisation de l’administration publique, il s'agit de tirer parti des innovations canadiennes pour soutenir notre propre effort de simplification, d’ouverture des données publiques et, de manière générale, d’amélioration du service public. 83 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Thales Canada, modèle de la philosophie du groupe Mark HALINATY, Président-directeur général, Thales Canada Inc. ©DR Les domaines d'activité du groupe Thales sont l'aéronautique, l'espace et les transports. Avec 1 800 salariés, le Canada est un pays stratégique pour Thales. Sa clientèle se compose d’avioneurs, du gouvernement canadien, d'entreprises de défense, d'autorités de transport... hales Canada emploie 1 800 personnes à Québec, Montréal, Ottawa, Toronto et Vancouver dans les domaines de la défense, de la sécurité, de l'avionique et des transports. La filiale abrite également trois centres de compétence de Thales. Pouvez-vous décrire brièvement la présence de Thales au Canada ? Thales Canada possède 3 grands domaines d'activités. Dans celui des transports, nous produisons des systèmes avancés de signalisation et de contrôle des trains pour les réseaux ferrés urbains, c'est-à-dire pour les trains de banlieue et les métros. Nous réalisons également l'ensemble du développement fondamental des logiciels et des produits sur place, au Canada, pour les exporter quasiment dans le monde entier. Nous travaillons pour le métro londonien et pour la New York City Transit, ainsi que pour le métro de Hong Kong, en Corée du Sud, en Malaisie, en Turquie et dans le monde entier. Notre deuxième domaine d'activité au Canada est l'avionique, pour lequel nous avons un marché de prédilection qui est celui des avions d'affaires et régionaux. Nous produisons les systèmes de commandes de vol électriques. Il s'agit de logiciels de haute technologie en T termes d'implémentation pour lesquels nos clients sont, par exemple, Bombardier au Canada ou Gulfstream et Cessna-Textron aux États-Unis. Notre troisième domaine d'activité au Canada est celui de la défense et de la sécurité, il s'agit d'un marché largement national où notre client est le gouvernement canadien. Nous lui fournissons différents systèmes pour l'armée, la marine et les aéroports du pays. Ce sont nos trois principaux domaines d'activité. Nous avons également un centre d'innovation mondialement connu à Québec, le Centre de Recherche et de Technologie Thales, qui est l'un de nos cinq centres de ce type dans le monde. Il réalise la Recherche et le Développement de premier niveau pour le groupe. ©Thales Comment évaluez-vous le rôle du marché canadien pour le groupe Thales ? Je pense que le marché canadien est assez attractif pour le groupe Thales pour plusieurs raisons, la première étant que le gouvernement canadien possède un certain nombre d'importants programmes de défense actuellement en cours de réalisation, dont le programme de construction de bateaux est le plus important. Son objectif est la refonte totale des forces navales et de la Garde Côtière. Pour les programmes de ce type en particulier, Ligne Jubilé, métro de Londres, dont la signalisation est réalisée par Thales. nous travaillons en partenariat avec un chantier canadien, Seaspan. Nous sommes l'intégrateur de s y s t è m e d e t o u s le s b a t e a u x d e l a G a rd e Côtière et des navires de combat canadiens pour la marine canadienne. Un programme doit voir le jour à l'avenir, le Canadian Surface Combatant, visant à renouveler toute la flotte de frégates de la marine canadienne. Nous sommes très concentrés et motivés s'agissant de notre participation à ce programme en tant qu'intégrateur de système de combat. Nous avons participé à un ensemble d'autres programmes d'approvisionnement de la défense canadienne. Les élections fédérales viennent d'avoir lieu, et le nouveau gouvernement a appuyé un investissement venant soutenir l'approvisionnement de la défense, ce qui est une bonne nouvelle pour Thales qui va pouvoir poursuivre ses activités sur ce marché. Quant à nos activités de transport, elles concernent beaucoup de villes canadiennes parmi lesquelles Toronto, Vancouver, Ottawa et Edmonton. Le gouvernement nouvellement élu a également déclaré son intention d'accroître les investissements dans les infrastructures de transports publics. Là encore, il s'agit d'une belle opportunité sur le marché intérieur canadien. A tout ceci s'ajoute le fait que nos centres de compétences nous confèrent également un bon niveau d'exportations. Le gouvernement canadien recherche des portes d'entrée pour ce qu'il nomme des positionnements uniques, et le fait que Thales soit à même de fournir le marché canadien tout en exportant nous place en bonne position sur ce marché. Quels sont vos clients et partenaires stratégiques ? Ils varient en fonction de nos domaines d'activités. Dans le secteur de la défense, notre principal client est le gouvernement canadien. De temps à autre, nous travaillons également avec des entreprises de défense 85 > 86 nous en termes de réussite et de retombées pour l'avenir. Quels sont vos projets pour l'avenir ? Le plus important de nos projets d'avenir est celui du Canadian Surface Combatant dont j'ai déjà parlé. Nous nous sommes portés candidats en tant qu'intégrateur de système de combat. Le projet consiste à fournir nos solutions aux frégates de la flotte de la marine canadienne. Il s'agirait pour nous d'un projet de transformation en terme de taille qui assoirait une nouvelle fois notre position de leader au Canada. C'est le plus important de nos projets uniques. Les autres domaines sont importants en ce qu'ils constituent u n e p e rcé e s u r ce r t a i n s d e s nouveaux marchés émergents pour ce qui concerne les villes intelligentes et l'ensemble des différentes technologies qui leur sont associées. Pour conclure, je pense que Thales Canada au sein du groupe Thales est un très bon exemple de la philosophie de Thales en termes de présence multinationale, dans le sens où nous capitalisons sur les deux tableaux : faire partie d'un grand groupe comme Thales, ce qui nous permet d'accéder aux produits plus rapidem e n t e t d e le s v e n d re d a n s notre pays et, en même temps, être capables d'exporter dans le monde entier grâce au réseau Thales. Je pense que Thales Canada a fait preuve d'une vraie réussite au cours des 35 dernières années en incarnant l'approche de Thales en termes d'affaires multinationales s'agissant de sa capacité à exporter hors de France, puis, à capitaliser et à faire revenir de nouvelles technologies au sein du groupe. Je pense que Thales Canada est un modèle que Thales s'efforce de reproduire dans le monde. ©Thales ©Thales d'autres secteurs civils comme la ville et les transports intelligents. Ce sont en tous les cas des marchés en croissance au Canada comme dans le monde, où nous pensons vraiment pouvoir capitaliser sur n o t re ex p é r i e n ce Le cockpit intuitif de nouvelle génération Avionics 2020. > comme sur notre développement soutenu par notre Centre d'innovation. Nous voyons ces co m m e G e n e r a l D y n a m i c s e t possibilités comme une opportunité Lockheed Martin. Comme je l'ai mende croissance supplémentaire. tionné, nous sommes partenaires des chantiers Seaspan pour le programQuel est le projet le plus important me naval. Du côté de l'avionique, nos que vous ayez mené jusqu'à présent ? principaux clients sont Bombardier Si je devais en choisir un, je dirais que pour le Canada et Gulfstream, et le plus important de nos projets Textron aux États-Unis. Dans le cadre jusqu'à aujourd'hui a été notre projet de notre activité de transport, nos initial pour le métro londonien, où clients sont généralement des gounous avons apporté notre technologie vernements locaux et des autorités sur la Jubilee Line et la Northern de transport du monde entier. Au Line. Ce projet a constitué un très sein de cette activité, nous travaillons grand défi puisque l'opérateur était plutôt avec des entreprises fournisdéjà bien installé et que la ville est sant le matériel roulant ferroviaire, l'une des plus importantes au monde, comme Bombardier, Alstom ou avec l'un des trafics les plus denses. des fournisseurs japonais comme Nous avons pu introduire notre techMitsubishi. Ce modèle de partenariat nologie dans le système et ce, juste avec ces fournisseurs fonctionne très avant les jeux olympiques de 2012. Il bien, nous fournissons les logiciels était très important pour nous de pour la technologie de contrôle des terminer le projet et de l'exploiter à trains tandis qu'ils apportent le matésa capacité de pointe, car l'un des riel roulant et nous réalisons une principaux avantages de notre techoffre conjointe. nologie était d'augmenter la capacité du système, ce à quoi nous sommes parvenus. Ce fut une grande réussite Pourriez-vous nous parler de votre pendant les Jeux et ces deux lignes stratégie dans le pays ? faisaient partie de celles du métro En fait, notre stratégie se compose londonien qui ont le mieux fonctionné. de plusieurs éléments. L'un des plus Cette année, nous avons remporté un évidents est, je pense, la conservaautre projet pour 4 lignes supplémention de notre position de chef de file taires du métro londonien. En tant dans le secteur des transports, que que projet unique, celui-ci était proce soit en termes de technologie bablement le plus important pour comme de parts de marché. Nous voulons aussi étendre nos activités dans les pays en développement, tout spécialement en Asie du Sud-Est et en Amérique du Sud. Au plan domestique, notre avenir est en quelque sorte lié aux grands programmes navals que j'ai mentionnés, parce qu'ils représentent d'immenses opportunités de croissance. Nous tentons également de tirer profit du travail de développement issu de notre Centre d'innovation situé à Québec. En particulier, nous voulons étendre notre expertise des domaines des transports et de la défense à Système de carte numérique montée sur un tableau écran tactile multipoint pouvant repérer les premiers intervenants et les autres actifs en temps réel, pour le partage de la connaissance de la situation et la planification des interventions. Canada Thales Canada as a model of the Group’s philosophy Mark HALINATY, President and CEO, Thales Canada Inc. ©DR Thales group's business areas are Aerospace, Space, Defence, Security, and Transportation. Canada is a strategic country for Thales, with 1800 employees. Its clients includes aircraft manufacturers, the Canadian government, defence companies, transportation authorities, ... hales in Canada has 1,800 employees in Quebec City, Montreal, Ottawa, Toronto and Vancouver working in Defence, Security, Avionics and Transportation markets. The subsidiary also hosts three of Thales’ Worldwide Centres of Competence. Could you please describe the presence of Thales in Canada in a nutshell? In Thales Canada we have 3 main business areas. In transportation we do advanced signalling and train control for urban rail, which is metro’s and subway’s systems. We also do all of the fundamental product and software development here in Canada and we export that to virtually all parts of the world. We have done work on the London underground and New York City Transit, Hong Kong metro, South Korea, Malaysia, Turkey – around the world. Our second business in Canada is in avionics, where we have a focused market that we deal with, which is T ©Thales Jubilee line, London UK, signalled by Thales. regional and business jets. We do the so-called fly-by-wire system. It is a high technology software in terms of implementation and our customers include for example Bombardier in Canada, Gulfstream and CessnaTextron in the US. Our third business area in Canada is in the defence and security business – largely it is domestic business and our customer is the government of Canada. We supply various systems to the army, navy and airports in Canada. Those are our three main business areas. We also have a world known innovation centre in Quebec City, Thales Research and Technology centre - one of five throughout the world. It serves for low-level research and development for the group. How would you estimate the role of the Canadian market for Thales Group? I think the Canadian market is quite attractive for the Thales Group because of a couple of reasons: one – the Canadian government has a number of significant defence programs on the way with the biggest being the shipbuilding programs. Its aim is to basically refit the entire Coast Guard and naval lift. At that particular sort of programs we are partners with a shipyard in Canada called Seaspan. We are the system integrator for all of the Coast Guard ships and the Joint Support Ship for the Canadian navy. In the future there is going to be a program called the Canadian Surface Combatant, which is to reset a new fleet of frigates for the Canadian navy. We are very focused and interested on competing as the combat system integrator for that program. There is a series of other procurements in Canadian defence that we have participated in. With the federal elections just this week, the new government have endorsed a support investment in defence procurement, which is a good news for Thales Canada to pursue this market. In our transportation business in turn we equip many of the cities in C a n a d a , i n c l u d i n g To r o n t o , Vancouver, Ottawa, Edmonton. The newly elected government have also stated that they are going to increase investment into public transportation infrastructure. This presents again a good opportunity in terms of market within Canada. This is all balanced by the fact that with our Centres of Competence we also have a good export business. The Canadian government is looking for forms of access for what they call a value proposition and the fact that Thales is able to not just supply to the Canadian market, but also to export, 87 ©Thales those lines were two of the best running lines on the London underground. This year we won another project for 4 more lines on the London underground. As a single project that one was probably the most significant for us in terms of achievements and leveraging for the future. Avionics 2020 intuitive new generation cockpit. puts us in a good position with respect to the Canadian market. What are your main strategic clients and partners? It varies between the different businesses. In the defence business our main customer is the Canadian government. From time to time we also work with such defence companies as General Dynamics and Lockheed Martin. As I mentioned we are partners with Seaspan Shipyards for the naval program. In the avionics business our main customers are Bombardier, here domestically, Gulfstream and Textron in the US. In our transportation business our customers are generally local governments and Transportation Authorities worldwide. Within this business we tend to work with companies that supply the rolling stock for the systems, so we would work with Bombardier, Alstom and Japanese suppliers, like Mitsubishi. This has been quite a successful model, where we made partners with those suppliers - we would supply the software in train control technology, they would supply the rolling stock and we would make a joint offer. Could you please talk about your strategy in the country? Well, our strategy has a couple of elements. I guess, a fairly obvious one is: in our transportation business we want to keep our leadership position, both in terms of technology and market share. We also want to expand into the developing countries, particularly in South-East Asia and South America. Domestically, our future is somewhat linked to the big naval programs that I have mentioned, because these are huge growth opportunities. We are also trying to capitalize on our development work coming out of our innovation centre in Quebec City. In particular, we want to expand our expertise in both transportation and defence into other civil areas, for example into smart cities or smart transportation. These are all growing markets within Canada and worldwide, where we think we can really capitalize on both our experience and our development coming out of our Innovation Centre. We see this as an additional growth opportunity. What is your most important project conducted so far? Well, if I had to pick one, I would say that the most important project we had so far was our initial project on the London underground, where we brought in our technology on the Jubilee Line and the Northern Line. It was a very challenging project, because you had a well-established operator and obviously one of the biggest and most travelled cities in the world. We were able to introduce our technology into the system and with this just prior to the 2012 Olympics. It was very significant to finish the project and have it running at peak capacity, because one of the main benefits of our technology was to increase the capacity of the system and we achieved that. It went very successfully during the Olympics and ©Thales > What are your projects scheduled for the future? The most significant one in the future is the Canadian Surface Combatant project that I mentioned earlier. We were competing as a combat system integrator. The project would lie in providing our solutions to the fleet frigates for the Canadian navy. This would be a transformational project for us in terms of the size and establishing again the leadership position within Canada. As a single project this is the biggest one. The other areas are significant in breaking into some of the new emerging markets in terms of smart cities and all of the various technologies associated with that. To conclude, I think that Thales Canada within the Thales Group is a very good example of the Thales philosophy in terms of operating multinationally in that we capitalize on both, being part of a large group like Thales, where we have access to products faster, we can sell them within our country and at the same time we have a capability to export all around the world through the Thales network. I think that Thales Canada has been a real success story over the last 35 years and exemplified the Thales approach to multinational business in being able to export out of France and then capitalize and bring new technologies back into the group. I think that Thales Canada is a model that Thales tries to replicate around the world. > Digital map-based system mounted on a multi-touch screen table capable of tracking first responders and other assets in real time. 89 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Relations économiques franco-canadiennes : dynamiques et complémentarités Caroline CHARETTE, Ministre Conseiller aux Affaires économiques et commerciales de l’Ambassade du Canada, Déléguée commerciale principale ©DR Depuis quelques années, le service commercial et économique de l’Ambassade du Canada vise à assurer une présence accrue sur l’ensemble du territoire français uelle est la nature des relations économiques entre la France et le Canada? La France et le Canada sont des partenaires privilégiés à plusieurs égards, y compris au plan économique. Les entreprises canadiennes et françaises ne sont pas seulement en situation de concurrents, voire clients et des fournisseurs les unes pour les autres, elles sont aussi souvent des partenaires dynamiques d’investissement et d’innovation. Issues de deux univers d’affaires très développés, les entreprises françaises et canadiennes possèdent des forces qui se complètent bien. Chacun des deux pays a aussi l’avantage de pouvoir servir de tête de pont Q > Place du Canada à Vancouver. pour un marché plus vaste grâce à une intégration économique poussée, au sein de l’Amérique du Nord pour le Canada, dans l’Union européenne pour la France. Les relations économiques franco-canadiennes sont donc diversifiées, tant en termes de types d’échanges, de secteurs d’activité couverts qu’en terme d’acteurs qu’elles impliquent. Si les grands groupes français et canadiens sont bien entendu présents de chaque côté de l’Atlantique, les échanges économiques entre nos deux pays intéressent un très grand nombre de petites sociétés et d’entreprises de taille intermédiaire – un avantage, entre autres, de notre proximité culturelle. Quels savoir-faire et expertises français intéressent spécifiquement le marché canadien? Le Canada est un marché de choix pour certains des produits les plus universellement associés à la France, que ce soit pour les secteurs agro-alimentaires, pour l’industrie du luxe et de la beauté, ou pour le monde culturel. Sans surprise, la France est le premier fournisseur du Canada pour les parfums et les produits de beauté, le deuxième pour les vins, et le troisième pour les livres et journaux et les fromages. Mais si, bon an, mal an, la France dégage un surplus commercial de plus d’un milliard et demi d’euros avec le Canada, c’est aussi grâce à des partenariats importants et un commerce croisé dans des secteurs de pointe. À titre d’exemple, la France est ainsi le deuxième fournisseur du Canada en avions et en hélicoptères, et elle importe une quantité similaire de pièces et d’équipements aéronautiques sur la base de partenariats et d’investissements au Canada. Ce schéma se répète, à des échelles diverses, dans les secteurs pharmaceutique, automobile, de l’ingénierie et du logiciel. ©DR Combien d'entreprises françaises sont d'ores et déjà implantées au Canada? Quels sont les atouts du Canada pour les investisseurs et entrepreneurs français? En 2013, dernière année où ces données sont disponibles, tout près de 300 groupes français contrôlaient plus de 910 filiales canadiennes, qui ©Dan Breckwoldt - Fotolia.com Canada > Vancouver. employaient presque 100 000 personnes et réalisaient un chiffre d’affaires de 27 milliards d’euros. Ces chiffres impressionnants signifient que la présence économique de la France au Canada oscille entre la deuxième et la quatrième place parmi toutes les sources d’investissements mondiaux; ils sont témoins d’une croissance constante de notre relation économique bilatérale. L’intérêt soutenu des entreprises françaises pour le Canada s’explique d’abord et avant tout parce que le Canada offre un environnement d’affaires à la fois stable et dynamique, réceptif au niveau de qualité du savoir-faire français, et ouvert sur le monde. La proximité culturelle entre le Canada et la France, surtout dans les régions francophones du Canada où près de 50 % des filiales françaises sont implantées, ne doit pas masquer l’ancrage profond du pays dans l’économie nord-américaine et sa culture d’affaires, et les liens commerciaux croissants développés avec l’Asie et l’Amérique latine. Les entreprises françaises cherchent et trouvent au Canada un relais de croissance et, souvent, un tremplin pour leur internationalisation. Comment l'Ambassade du Canada en France accompagne-t-elle ceux qui souhaitent s'implanter ou exporter au Canada ? Au sein de notre équipe, nous avons développé une expertise spécifique afin de répondre aux questions des chefs d’entreprises français intéressés par une expansion en Amérique du Nord, via la constitution d’une filiale ou l’acquisition d’une entreprise au Canada. Nos spécialistes de l’investissement rencontrent personnellement, et gratuitement, les entreprises intéressées, souvent en compagnie d’avocats d’affaires, de fiscalistes, de banquiers canadiens qui viennent régulièrement en mission en France. L’idée est d’aller à l’essentiel pour apporter des réponses concrètes aux questions les plus techniques que se posent les investisseurs français sur le Canada. En février 2015, Monsieur l'Ambassadeur Cannon a visité la région Midi-Pyrénées pour faire promotion des relations et échanges existants et possibles entre la Région et le Canada. Multipliez-vous ce type de relations de proximité? Depuis quelques années, le service commercial et économique de l’Ambassade du Canada vise à assurer une présence accrue sur l’ensemble du territoire français, afin de répondre plus efficacement aux besoins des gens d’affaires, là où ils se trouvent, en France. D’une part, l’Ambassade s’appuie sur un réseau de consuls honoraires pour optimiser son rayonnement particulièrement dans les centres économiques hors de Paris tels que Lyon, Toulouse ou Nice. Une des membres de notre équipe est aussi désormais basée à Lyon. D’autre part, l’équipe de Paris multiplie les interventions dans les différentes régions françaises, que ce soit par une participation à des conventions ou salons d’affaires ou par l’organisation d’ateliers destinés à mieux faire connaître l’économie canadienne aux milieux d’affaires français. Ainsi, en 2015, nous avons organisé des rencontres à Montpellier, Toulouse, Dijon, Strasbourg et Lyon. Finalement, comme vous le notez, les déplacements fréquents de l’Ambassadeur Cannon à travers la France, dans le cadre ou non d’activités que nous y organisons, appuient largement cette stratégie de rayonnement économique. L'accord de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne constitue-t-il selon vous un élément susceptible de développer les relations économiques franco-canadiennes? Indéniablement, la mise en œuvre prochaine de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (AECG) offrira des opportunités inédites pour un grand nombre d’acteurs des milieux d’affaires de la France et du Canada. L’ampleur de cet accord ne doit pas être sous-estimée – il s’agit d’un accord qui améliorera de façon concrète tous les aspects des relations économiques entre nos deux pays. En plus d’éliminer les droits de douane sur la presque totalité du commerce bilatéral, cet accord clarifiera et libéralisera les règles applicables aux acteurs économiques français faisant affaire avec le Canada, qu’ils soient exportateurs, prestataires de services, investisseurs, visiteurs d’affaires ou entrepreneurs désirant participer aux marchés publics canadiens. L’AECG jettera les bases d’une nouvelle ère des relations économiques franco-canadiennes dynamiques et privilégiée. 91 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Air Canada : la plus européenne des compagnies d’aviation américaines David GEGOT, Directeur Général France, Espagne et Portugal d’Air Canada La compagnie canadienne, après une période un peu délicate, avec la fusion de plusieurs compagnies locales et le rachat de Canadian Airlines, a connu des moments difficiles en 2000. Puis, une sortie de crise en 2007 avec de gros investissements lui a donné une seconde jeunesse. Air Canada compte aujourd’hui parmi les 15 plus grandes compagnies aériennes au monde. David Gegot, son Directeur Général France, Espagne et Portugal, nous présente son histoire, ses spécificités et ses perspectives de développement. Pouvons-nous évoquer son histoire ? Créée il y a 75 ans, Air Canada ne desservait que des vols intérieurs. Quinze ans plus tard, elle a commencé à se développer sur le marché francocanadien. En 1951, était inaugurée la première ligne Montréal-Paris, une histoire qui dure depuis 65 ans. Après le rachat de Canadian Airlines en 1990 avec laquelle nous partagions la desserte des côtes Est/Ouest de l’Amérique du Nord, Air Canada fut mise en faillite judiciaire en 2004 jusqu’à ce qu’un juge des faillites en reprenne le fonctionnement avec des mesures économiques drastiques, des licenciements économiques et la renégociation des conditions salariales. En 2007, elle retrouvait une seconde vie avec un nouveau logo et de nouveaux appareils. Aujourd’hui, Air Canada transporte 38 millions de passagers par an, dessert 180 destinations sur l’ensemble des continents. Cela correspond à 1500 vols par jour. Son organisation se présente sous forme de Hub, sur quatre aéroports : Toronto, Montréal, Vancouver et Calgary. 64 villes du Canada sont desservies : 52 aux USA et 78 pour le reste du monde. Quelles sont ses spécificités? Nous sommes parmi les majors sur l’Amérique du Nord et nous sommes la compagnie qui a reçu le plus de récompenses pour la qualité de ses services. Nous sommes la plus européenne des compagnies américaines. Nous avons un choix haut de gamme et des services dédiés, dit concierges, un système de fidélité de cartes personnalisées et une assistance dans tous les domaines. Notre service haut de gamme, de siège-lit, en classe affaires, a beaucoup de succès sur le continent américain et les vols à l’international. Nous avons un partenariat avec United Airlines et le premier marché pour l’accès aux Etats-Unis sur le continent Nord-Américain au départ du Canada. Notre compagnie est reconnue pour sa classe 4 étoiles, Styrax, pour la qualité et le confort du service, meilleur transporteur depuis six ans et meilleure classe affaire Nord-Américaine. Nous sommes également membre fondateur de Star Alliance, qui, à travers le monde, compte 28 compagnies et 193 pays. Depuis 2007, notre plus gros partenaire et la compagnie Lufthansa, après United Airlines sur toutes les lignes transatlantiques Quelles sont ses perspectives commerciales ? Début 2015, nous avons connu un trimestre record avec un bénéfice de 250 millions de dollars canadiens, en progression de 80% par rapport au même trimestre en 2014. Cela est du à notre développement commercial et à l’état de la croissance du transport aérien au Canada. Lors de notre réorganisation en 2007, notre comité exécutif a défini comme priorités le déploiement à l’international et un réengagement fort envers nos clients. Quel est votre engagement en matière de développement durable ? Depuis quatre ans, nous publions chaque année un rapport, avec des éléments articulés autour de quatre domaines : la sécurité des appareils, l’environnement, le bien être des employés et l’implantation d’Air Canada dans les collectivités. Nous observons déjà, concernant les arrêts de travail une chute de 12% par rapport à 2014. Un audit iata pour la sécurité a évité la consommation de 11 000 tonnes de carburant et 35 000 tonnes de CO2 grâce à des projets de finance énergétique, avec par exemple le bio fuel. Nous avons économisé 445 millions de dollars canadiens en optimisant les régimes de retraite. Nos priorités vont aussi vers une fondation caritative avec un investissement de 1,5 millions de dollars canadiens pour 2014. Concernant la sécurité des appareils, notre flotte comporte 80 Boeing 737 et une nouvelle génération de 787. Nous en recevrons 12 pour 2016, ce qui nous permettra d’économiser 20% de carburant. Quelles sont vos proposions technologiques envers vos clients et vos perspectives d’extension de dessertes à l’international? Aujourd’hui, nous employons 28 000 personnes dans le monde. Nos équipes les plus importantes se situent au Canada avec 60 personnes. Nous sommes aussi très conscients des défis technologiques et nous avons fait des investissements nécessaires pour que le passager puisse s’enregistrer sur tout support de téléphonie mobile. Avec Apple, nous avons mis en place une application spécifique. Nous avons créé Air Canada Rouge sur le trafic loisir, où chacun peut apporter sa tablette personnelle qui lui permet de se connecter avec le wifi à bord de l’appareil ou de louer un support, si nécessaire. Notre compagnie possède en flux, le marché le plus important entre l’Europe et les Etats-Unis. Pour 2016, nous avons le projet de développer de 30% le marché transatlantique. Sur le marché français, nous allons ouvrir une ligne Lyon Montréal en juin 2016 et pour l’année prochaine, nous espérons une croissance de 30% de sièges. Air Canada Rouge est aussi une compagnie loisirs, ce qui permet de desservir des marchés nouveaux, fort prometteurs. 93 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Un marché porteur pour les entreprises françaises Philippe HUBERDEAU, Chef du service économique régional au Canada Les liens économiques entre la France et le Canada sont forts, notamment grâce à des échanges commerciaux dynamiques et à la présence de sociétés françaises dans tous les domaines, particulièrement au sein des secteurs porteurs de « l'économie verte » et du numérique. ouvez-vous nous présenter les caractéristiques de l'économie canadienne ? Classé au troisième rang par l’OCDE pour sa qualité de vie, le Canada est également la dixième puissance économique mondiale. Il bénéficie d’immenses ressources naturelles, d’une main-d’œuvre qualifiée, d’un développement technologique excellent et d’un environnement politicoéconomique stable. Multiculturel par son histoire et ses immigrants, la langue française se développe vers l’Ouest du pays, traditionnellement anglophone. Comptant plus de P ménages et de la dépréciation du dollar canadien devraient commencer à se faire sentir à compter du second semestre 2015. La mise en œuvre du programme du parti Libéral, qui a remporté les élections le 19 octobre 2015, devrait en outre se traduire par d’importantes dépenses d’investissement au niveau fédéral dans le domaine des infrastructures à hauteur de 125 milliards de dollars canadiens ces 10 prochaines années, auxquels il faut ajouter les ambitieux programmes d’investissement au niveau des Provinces, notamment l’Ontario et le Québec. Quelle est la situation des échanges commerciaux bilatéraux entre la France et le Canada ? Comment ont-ils évolué au cours des dernières années ? Les échanges bilatéraux de biens et de services entre la France et le Canada s’établissent à 4,8 milliards d'euros au premier semestre 2015 (2,88 d’échanges de biens et 1,95 de services). Ils s’élevaient à 5,15 milliards d'euros à la même période en 2014 (2,97 pour les biens, 2,18 pour les services). Au premier semestre 2015, la France a exporté au Canada près de 1,53 milliard d'euros de biens et 1 milliard d'euros de services, soit un total de 2,53 milliards d'euros. Le solde commercial de la France s’établit en ce premier semestre à +241millions d'euros (+187 pour les biens et +54 pour les services), contre -273 millions d'euros un an plus tôt (-98 pour les biens et -175 pour les services). La France pourrait dégager en 2015 son plus important solde commercial depuis 2006 avec le Canada. ©Goami - Fotolia.com > 35 millions d’habitants, le Canada accueille chaque année 250 000 immigrants. L’économie canadienne a traversé un trou d’air au premier semestre 2015. Alors qu’au dernier trimestre 2014, elle progressait encore de 0,6 %, elle s’est contractée de respectivement 0,2 % puis 0,1 % au cours des deux premiers trimestres de 2015. Elle semble avoir désormais absorbé l’essentiel de l’incidence négative du recul du prix du pétrole et les effets positifs d’un prix bas de l’énergie sur l’activité au travers notamment de la baisse de la facture énergétique des Toronto. 94 ©O.Valleybol63 - Fotolia.com Canada > Ottawa. Quel est le niveau des investissements directs étrangers canadiens en France ? Environ 200 entreprises canadiennes sont présentes en France et y emploient 21 000 personnes. 22 projets canadiens créateurs d’emplois ont été mis en œuvre en France en 2014, en augmentation de 22 % par rapport à 2013 à périmètre constant (18 projets). La dynamique enclenchée en 2010 s'est poursuivie en 2014 et devrait s’intensifier dans les années à venir avec notamment un regain d’intérêt pour les PME innovantes. À noter que le Québec est la Province la plus active : en effet, il représente en moyenne un peu plus de 60 % des projets aboutis, la part de l’Ontario s’élevant à 25 % et celle de l’ouest canadien (principalement Colombie Britannique et Alberta) à environ 15 %. Dans quels secteurs porteurs les entreprises françaises sont-elles implantées au Canada ? Comme c’est la règle aujourd’hui entre deux économies fortement industrialisées, on assiste à une intégration croissante des chaînes de valeurs entre la France et le Canada. Le Canada constitue en outre pour certaines entreprises françaises un point d’entrée privilégié sur le marché nord-américain permettant de bénéficier de l’ouverture réciproque des Etats-Unis, du Mexique et du Canada dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord de Libre-Echange Nord-Américain (ALENA) adopté en 1994. Les entreprises françaises sont ainsi bien implantées dans l’ensemble des secteurs de l’économie canadienne. A l’exception du secteur automobile, dont les principaux constructeurs français sont absents, l’ensemble des entreprises du CAC 40 sont présentes au Canada. Dans la période récente on assiste en outre au développement dynamique d’un nombre croissant de PME françaises au Canada, notamment dans les deux secteurs porteurs du numérique et de l’économie verte. Quels sont les enjeux du programme de coopération renforcée, adopté en juin 2013, pour les relations économiques bilatérales ? Le plan conjoint d’action économique Canada-France 2014-2015 s’articule autour de trois objectifs principaux. Il s'agit d'appuyer les entreprises canadiennes et françaises en matière de développement des affaires, d’accès aux marchés et de promotion des investissements croisés. Il s'agit aussi de renforcer la coopération en matière de compétitivité, d’innovation, de science et de technologie, notamment par l’action ciblée d’un groupe de travail bilatéral sur l’innovation, la science et la technologie. Enfin, le troisième objectif est d'aider les entreprises à tirer pleinement profit de la relation commerciale bilatérale grâce à des activités ciblées et au partage régulier d’informations en vue de la mise en œuvre de l’Accord Economique Commercial Global entre l'Union européenne et le Canada (AECG). Ce plan d’action conjoint économique sera renouvelé et actualisé au début de l’année 2016, notamment afin de tenir compte du contexte qui découlera de la mise en œuvre prochaine de l’Accord de Paris sur les Changements Climatiques et de l’AECG. 95 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Le Canada, meilleur pays du G-20 où faire des affaires Véronique LOISEAU, Directrice générale de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française au Canada ©DR En 2016, la Chambre de Commerce et d'Industrie Française au Canada (CCIFC), a 130 ans. Elle constitue un bon observatoire de la relation bilatérale. uelles sont les missions de La Chambre de Commerce et d'Industrie Française au Canada (CCIFC) que vous dirigez? La chambre a plusieurs missions : développer des relations économiques entre la France et le Canada, accueillir des missions commerciales françaises et favoriser leurs perspectives d’affaires, initier et faciliter le réseau et le partenariat d’entreprises, informer sur les échanges et les dynamiques de marché entre la France et le Canada, animer la communauté d’affaires franco-canadienne. Q Comment accompagnez-vous les entreprises françaises qui souhaitent s'implanter ou exporter au Canada? En ce qui concerne l’implantation des entreprises françaises au Canada, nous offrons différents services. L'étude de marché est une prestation pour laquelle nous réalisons un dossier complet sur un marché, ou un secteur donné de l'économie du pays. Il s'agit d'une présentation exhaustive dans laquelle nous cherchons à mettre en avant la place réelle qu'occupe le secteur, les différents intervenants, les mécanismes principaux qui l'affectent, ainsi que l'évolution des dernières années et les perspectives d'évolution à terme. Parallèlement, nous proposons un test produit – marché, qui permet de connaître les opportunités de développement commercial sur un marché donné. Notre mission de prospection reste quant à elle, la prestation la plus prisée par les entrepreneurs français. Elle consiste à établir un planning de rendez-vous professionnels ciblés. Nous organisons le déplacement au Canada d’un entrepreneur français, afin qu’il puisse entrer en contact avec les bons partenaires et entreprendre avec succès sa démarche commerciale. Dans un autre domaine, la domiciliation virtuelle que nous proposons, permet aux entreprises françaises d’avoir une adresse commerciale au Canada. Les avantages de cette prestation sont une présence visuelle au Canada sans avoir à recruter de personnel et à moindre coût, une optimisation la relation clientèle et de la logistique de l’entreprise ainsi qu’une réelle crédibilité à long terme. De la même façon, nous proposons un hébergement, grâce au centre d’affaires de la CCIFC. Les entreprises peuvent ainsi bénéficier de bureaux ouverts ou fermés en plein centre-ville de Montréal au coeur du quartier des affaires. Elles ont à leur disposition un poste de travail entièrement équipé et fonctionnel, avec ligne téléphonique dédiée et connexion internet haut débit. Elles sont intégrées dans un environnement cordial et professionnel. Nous offrons enfin des solutions de portage salarial. Une entreprise française au Canada, n’ayant pas encore de structure fixe sur place, peut effectuer un portage salarial à la CCIFC afin d’avoir un représentant local. Quels sont les atouts offre du Canada pour ces entreprises? Selon Forbes et Bloomberg, le Canada est le meilleur pays du G-20 Québec. 96 ©Bakerjarvis - Fotolia.com La CCIFC est l'une des plus anciennes chambres de commerce françaises à l’étranger. Créée en 1886 à Montréal, association à but non lucratif, elle regroupe plus de 1 500 membres, représentants des entreprises de tous horizons : entreprises françaises implantées au Canada, entreprises canadiennes, des travailleurs indépendants ou encore des cabinets offrant divers services aux entreprises telle la fiscalité ou encore la comptabilité. Membre d'un réseau de 113 chambres de commerce françaises à l'international implantées dans plus de 80 pays, regroupant plus de 33 000 entreprises, sa force réside ainsi dans son réseau au Canada mais aussi à l’international ! Canada où faire des affaires. On citera ainsi un climat d’affaires accueillant, mais aussi une économie des plus performantes, qui classe le Canada en tête du G-7 pour la décennie (2005 à 2014) au chapitre de la croissance économique. Parallèlement, le pays bénéficie d'un accès aux marchés incomparable. Une fois que l’Accord économique et commercial global (AECG) sera en vigueur, les investisseurs étrangers au Canada bénéficieront d’un accès préférentiel garanti à l’ALENA et à l’UE, un marché dynamique avec un PIB combiné de 38 milliards de dollars américains, qui génère près de la moitié de la production mondiale des biens et services. De la même façon, le pays possède la main-d’œuvre la plus instruite des pays de l'OCDE tandis que la moitié de sa population en âge de travailler détient une formation supérieure. Concernant les coûts fiscaux globaux pour les entreprises ils sont de loin au Canada les plus bas des pays du G-7 et de 46 pour cent inférieurs à ceux des États-Unis. En outre, le Canada est le pays du G-7 offrant les plus bas coûts d’exploitation en dans les secteurs intensifs de la R-D, jusqu’à 15,8 p. 100 plus bas que ceux des États-Unis. Pour la huitième année consécutive, le Forum économique mondial (FEM) consacre le système bancaire canadien le plus solide au monde. Ce pays est endroit exceptionnel où il fait bon investir, travailler et vivre. Il est l'un des plus multiculturels du monde, avec des universités de calibre mondial, un système de soins de santé universel et des villes propres et accueillantes. Selon l'index « Vivre mieux » de l'OCDE, le Canada est le meilleur du G-7 en termes de conditions globales de vie et de la qualité de vie. À quelles difficultés majeures peuvent-elles être confrontées ? La dépendance des États-Unis, la faible productivité du travail et la pénurie de main d’œuvre qualifiée, la récurrente problématique culturelle et linguistique sont des problématiques dont il faut impérativement tenir compte. Vous êtes directrice de La Chambre de Commerce et d'Industrie Française au Canada (CCIFC) depuis 2010. La crise mondiale a-t-elle impacté les relations économiques francocanadiennes? Le Québec et le Canada n’ont pas échappé pas à l’impact des turbulences financières mondiales. Toutefois, le Québec a été relativement bien positionné pour faire face au ralentissement économique grâce aux actions prises par le gouvernement pour soutenir l’économie, et par une politique bancaire et financière particulièrement rigoureuse. Quels sont les secteurs porteurs? Je citerai en priorité les TIC, l'Aéronautique, l'énergie, l'agroalimentaire, les biotechnologies, les technologies médicales et les transports terrestres. Quels conseils donneriez-vous aux entreprises françaises qui veulent réussir au Canada? La démarche à l’export et plus précisément à destination du Québec n’est pas aussi facile que cela ne parait. Les entreprises ont tendance à choisir de s’implanter au Québec en partie en raison de la proximité de la langue parlée mais c’est malheureusement souvent un leurre. Les façons de travailler, de conclure des affaires, ainsi que les codes de communication sont très différents de ceux du vieux continent. Il est important d’être accompagnés par des personnes biculturelles qui ont une grande connaissance du terrain local afin d’éviter les écueils. Il faut se rappeler que les Québécois ne sont pas des Français qui vivent en Amérique du Nord, mais des N o rd - A m é r i c a i n s q u i p a r le n t Français, leur façon de faire des affaires est donc bien différente de ce que l’on voit en France. ©Fotolia.com BCF Avocats d’affaires : audace et authenticité ©DR Gilles SEGUIN, Associé, Avocat, Vice-Président du Conseil d’Administration C Fondé en 1995 par un noyau de neuf personnes, le cabinet BCF Avocats d’affaires a connu depuis 20 ans une croissance fulgurante et compte aujourd’hui plus de 220 avocats et autres professionnels. Basée à Montréal, BCF est une référence en droit des affaires au Québec et fait partie des 500 plus grandes entreprises de la province. Gilles Seguin, qui dirige l’équipe des valeurs mobilières chez BCF, nous présente le cabinet. omment décrire le cabinet BCF Avocats d’affaires ? Le cœur de BCF est le droit des affaires et 75 % de nos avocats sont spécialisés dans ce domaine. Les hommes et les femmes qui font appel à nous sont aux commandes d’entreprises ou d’institutions financières. Ce sont des investisseurs, des dirigeants, des propriétaires, des inventeurs ou des entrepreneurs. Mais pour nous, ce sont avant tout des visionnaires qui poursuivent des objectifs bien définis. Nous les aidons à atteindre leur but, que leur entreprise soit établie ou en croissance, qu’elle soit en période de prospérité ou qu’elle traverse des périodes plus difficiles. Nous offrons des services et des conseils juridiques à une clientèle d’environ 400 entrepreneurs, grâce à 98 nos 22 équipes stratégiques qui rassemblent nos talents multidisciplinaires. Nous traitons les questions diverses rattachées au droit des affaires, telles que les fusions et acquisitions, les valeurs mobilières, le droit de la construction, l’immigration d’affaires, la propriété intellectuelle, la fiscalité, le litige commercial et beaucoup plus. En ce qui a trait à l’équipe stratégique des valeurs mobilières, dont je suis responsable, elle s’occupe des inscriptions en bourse, du respect de la réglementation d’organisations comme l’Autorité des marchés financiers, du droit des sociétés privées cotées en bourse et des relations commerciales entre les pays étrangers et le Canada. À ce titre, nous sommes devenus une référence pour les sociétés françaises qui veulent s’installer dans notre pays. Depuis deux ans, nous avons aidé un nombre exponentiel d’entreprises françaises à ouvrir leurs horizons au Canada et au Québec. Que proposez-vous principalement aux entreprises étrangères qui vous sollicitent ? Une expérience sur le terrain et des connaissances juridiques approfondies du Québec, du Canada et de l’Amérique du Nord. Il faut savoir que le Québec, c’est un peu comme New York qui parle français. Pour une société qui veut s’installer chez nous, le faux réflexe est de penser que le Québec fonctionne comme l’Europe étant donné que le français en est la langue officielle. Or, la culture au Québec est nord-américaine. Nous avons déjà vu des situations loufoques où des entrepreneurs français Canada débarquaient au Québec avec un statut de touriste en vue de s’y installer! Nous proposons donc une expertise de premier plan pour aider une société à s’implanter chez nous. Nous avons des équipes spécialisées dans la fiscalité propre à notre continent, notre pays et notre province. Nous maîtrisons le droit de l’emploi et le droit du travail, des secteurs qu’il faut connaitre lorsqu’on décide de traverser l’océan. Nous avons l’expérience pour conseiller une entreprise à propos des valeurs mobilières, des fusions et acquisitions et de l’immobilier. Au Québec et au Canada, ces coutumes commerciales et juridiques doivent être considérées avec attention et notre expertise permet à une entreprise étrangère de s’implanter dans un cadre structuré. Qu’est-ce qui distingue les avocats de BCF ? Nous sommes des avocats qui avons une grande proximité avec notre clientèle d’entreprises. Nous aimons le franc-parler, l’humilité, la générosité et l’innovation. Nos équipes sont multidisciplinaires, polyglottes et elles apportent à leurs clients une approche personnalisée. Nous tenons à ce que les entreprises se sentent guidées et accompagnées et nous leur proposons nos compétences et notre expertise en ce sens. Dans le domaine du conseil juridique, la concurrence est forte, mais notre succès repose sur cette capacité à tisser un lien étroit avec notre client et à bien cerner ses besoins en affaires. Notre cabinet cherche à secouer les conventions et à faire évoluer le droit des affaires, c’est pourquoi notre devise est « Pratiquer autrement ». Qui sont vos clients et quelles sont vos alliances à l’international? Nos clients sont essentiellement des PME qui ont un chiffre d’affaires de 5 à 500 millions de dollars canadiens. De grandes multinationales nous sollicitent aussi lorsqu’elles ont besoin d’une intervention ciblée afin de réaliser promptement des transactions. Notre clientèle se compose aussi d’entreprises en croissance, appelées à se développer, dans les domaines technologique, informatique et biomédical. Nos alliances à l’international sont principalement tissées avec les États-Unis et le reste du Canada. Nous avons aussi établi un réseau de contacts qui s’étend jusqu’en Amérique du Sud, au Maghreb, en Europe de l’Ouest, en Afrique subsaharienne et quelques pays de l’Afrique Centrale. Finalement, nous faisons également partie du réseau Méritas, un regroupement de cabinets indépendants qui compte 7000 personnes et 172 cabinets répartis dans plus de 60 pays autour du monde. Cette structure de partenariats que nous avons établie nous permet d’être proactifs et efficaces à l’échelle internationale. 99 Le Groupe Shemay : pour un accompagnement stratégique à l’international Serge HENRY, Dirigeant de Shemay International Partners® Grâce à son réseau de correspondants, le Groupe Shemay œuvre à l’internationalisation des entreprises. Prochainement présente à Montréal, l’entité française a pour objectif de favoriser les relations bilatérales entre la France et le Canada mais aussi d’œuvrer à la réussite des accords de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada. cteur depuis plus de 10 ans auprès de grandes sociétés françaises et étrangères, Shemay accompagne les dirigeants d’entreprises à l’international. Quelles sont les solutions d’accompagnement proposées ? Shemay intervient selon plusieurs modes d’accompagnement avec une A 100 implication croissante. Spécialiste du management de transition, nous effectuons ainsi des audits fonctionnels qui permettent d’évaluer le niveau de maturité de l’entreprise et de ses dirigeants, à entamer une démarche à l’export. Nous évaluons également à ce niveau l’impact d’une telle démarche sur le fonctionnement au jour le jour de l’entreprise. Des analyses « produits et services » sont également proposées, accompagnées d’une éventuelle étude de marché pour évaluer les chances de succès, à court et moyen termes, de la démarche. Shemay s’implique aussi par le biais de mandats de prospection afin de tester les solutions à l’export et enregistrer des pré-ventes, ou encore de mandats de recherche d’agents ou de distributeurs pour créer un réseau de commercialisation offshore. Un accompagnement au long cours est également possible si l’entreprise souhaite s’implanter sur le territoire. Nous les aidons à évaluer les avantages, les risques juridiques, sociaux, financiers, normatifs, nous recherchons des sites d’accueil, créons l’entité, recrutons les premiers salariés et participons au lancement de l’activité. Plus loin encore dans le processus, Shemay peut proposer un contrat de distribut i o n , e xc l u s i f o u n o n , s i l’entreprise souhaite nous confier la représentation de ses produits. Enfin, un co-investissement est parfois possible si le client de Shemay accepte ce type de collaboration. Grâce à son réseau étendu de consultants, Shemay est en mesure de couvrir de nombreux pays comme l’Espagne, l’Angleterre, le Brésil ou encore le Canada. Quelles sont les particularités de ce marché OutreAtlantique ? Il ne faut pas voir le marché outreAtlantique comme monobloc : même si le Canada et les Etats-Unis présentent sûrement de fortes similitudes. Le Canada sera néanmoins plus enclin à accueillir les savoir-faire français mais ne nous y trompons pas, la langue française parlée dans la Province de Québec ne changera pas le fondement des échanges qui reste avant tout marqué par la mentalité nord-américaine. Une fois la confiance établie, les échanges peuvent être rapides, constructifs et lucratifs si l’entreprise s’y est bien préparée au préalable (affectation des ressources humaines, normalisation des produits). Plus loin, plus chaud, le Brésil… Pays très hétéroclite qui n’est et n’a jamais été un Eldorado. Il faudra du temps, de la présence régulière, investir sur le long terme, comprendre la complexité des démarches administratives, fiscales et douanières. Mais une fois établi, le marché y est grand, la consommation augmentant en même temps qu’une classe moyenne en forte expansion. L’Etat est un accélérateur, parfois un frein très fort pour le développement économique des entreprises étrangères. 2016 est une année charnière pour le Brésil avec en apothéose les jeux Olympiques de Rio en Juillet prochain. Partenaire dès les premiers pas à l’export des sociétés jusqu’à leur représentation officielle, quels sont les outils dont dispose Shemay ? Tout d’abord notre réseau : nos correspondants, nos consultants, sont des personnes originaires ou établis dans ces pays depuis de nombreuses années. Ils vivent les particularités de chaque pays et sont à même d’offrir une image instantanée fiable du pays d’approche. Ensuite, nos réalisations passées qui nous permettent de gagner en efficacité pour l’ensemble des démarches légales. Enfin, nos actions en cours : Shemay International Partners® étant partenaire voire même investisseur dans certaines sociétés pour ces pays, cela représente aussi des points d’ancrage dont nous pouvons faire profiter nos nouveaux clients en recherche de soutien sur place. Quelles sont les perspectives de Shemay au Canada à moyen et long termes ? Shemay participera cette année encore au colloque Canada – France qui se tiendra à Montréal les 21 et 22 mars prochain. Nous y lancerons une nouvelle entité française présente dans la simulation numérique et qui a signé un contrat avec une société canadienne après un accompagnement de Shemay pendant plusieurs mois. Nous ouvrirons un bureau permanent à Montréal afin de lancer une collaboration forte entre le Québec et la France, le Canada et l’Europe, et offrir ainsi un service identique à des sociétés canadiennes désireuses de prospecter elles aussi de l’autre côté de l’Atlantique. A long terme nous travaillons pour que Shemay International Partners® intègre des programmes de collaboration institutionnelle entre ces deux pays et œuvre à la réussite des accords de libreéchange entre le Canada et l’UE (ALE) augurant un potentiel phénoménal de partage et de développement pour nos entreprises. 101 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Un pays à découvrir ©DR Alain LELLOUCHE, Président de la Section Canada des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) P Au-delà des similitudes avec la France - dont la francophonie à Québec - le Canada présente des spécificités dans sa culture et son organisation économique et sociale qui nécessitent, outre une étude de marché, l'appui de partenaires et de conseils pour s'y implanter. Mais il est bon aussi avant de faire le saut d'y séjourner un hiver... car ils y sont rudes ! ©Bakerjarvis - Fotolia.com ouvons-nous présenter la section Canada des CCEF ? Elle couvre le Canada d'Est en Ouest, forte de 30 membres, représentant des grands groupes, des PME et entrepreneurs français indépendants établis dans le pays. Ils confrontent ainsi leurs expertises dans des secteurs extrêmement variés, qu'il s ' a g i ss e d e l a b a n q u e e t d e l'assurance, de l’aéronautique, de l’automobile, du BTP, de la défense, de l’énergie , de l’environnement, de la grande distribution, de l’agroalimentaire, de la culture. Nous nous rencontrons dans le cadre de réunions diplomatiques ou spécifiques, remplissons notre mission de support à l'administration en relation avec l'ambassade, le consulat, les chambres de commerces, l'ensemble des acteurs de ce que nous appelons « La Maison France ». Canada Si nos liens et échanges ont une portée économique, ils procèdent aussi de relations humaines entre personnes animées par une même dynamique : défendre l'attractivité de la France. Justin Trudeau, accède au pouvoir. Il est prématuré de savoir quels changements interviendront de ce fait dans l'économie. Cependant, certaines évolutions pourront avoir lieu. Quelle est votre analyse de la conjoncture actuelle au Canada ? La valeur du dollar canadien est un peu trop basse. De plus, le pays est le deuxième producteur de pétrole. La chute du cours du baril en dessous de la barre des 40 dollars a une incidence sur l'économie. Le climat est un peu morose. Cependant, si l'heure n'est pas à l'euphorie, nous sommes moins pessimistes qu'en France. Au niveau politique, à l'issue des élections législatives, nous entrons dans une nouvelle ère. Après une décennie de gouvernement conservateur, un premier ministre libéral Pouvez-vous présenter des succès récents d’entreprises françaises dans le pays ? Si de grands groupes de l'Hexagone sont implantés au Canada, de nombreuses PME françaises et notamment spécialisées dans les TIC y ont un bel avenir. Le marché canadien leur est très ouvert. Apprivoiser ainsi l'Amérique du Nord est un beau défi ! Quels conseils donner à une entreprise française cherchant à s’implanter au Canada ? L première étape est une sérieuse étude de marché. Parallèlement, il est important que l'entreprise trouve un partenaire canadien, qui connaisse parfaitement la réalité commerciale du pays. Il sera à même de la guider, de lui apporter son expertise, lui apprendre les écueils à éviter. L'entreprise gagnera du temps, avec, en amont, les garanties nécessaires à son implantation. Autre conseil important, j'invite les entrepreneurs qui forment le vœu de s'implanter au Canada de le découvrir l’hiver. Ce détail n'est pas insignifiant. Depuis plus de 115 ans, dans 146 pays, les CCEF forment un réseau actif de plus de 4 300 membres, mettent bénévolement leur expérience au service de la présence économique française dans le monde. Québec. ©Fotolia.com Le Québec, destination privilégiée des investisseurs et entrepreneurs français Marc AUDET, Président et Chef de la direction Auray Capital ©DR De plus en plus de Français choisissent le Québec pour y faire affaires et/ou s’y installer. Près de 120.000 d’entre eux sont établis dans ‘’La Belle Province’’. Le Québec, c’est pour eux l’Amérique en français mais aussi un eldorado pour entrepreneurs et investisseurs. n effet, destination convoitée pour son cadre de vie, le Québec l’est aussi pour son environnement d’affaires. Car, en plus de la qualité de vie exceptionnelle et sécurisée qu’elle offre à moindre coût, la Province dispose d’un environnement d’affaires solide et dynamique. Proche des grandes métropoles américaines, sa position stratégique et son accès à un marché de plus de 460 millions de consommateurs constituent des atouts de premier plan, auxquels s’ajoutent une main-d’œuvre instruite, créative et accessible en termes de coûts, des espaces locatifs disponibles à des coûts très compétitifs, des tarifs énergétiques parmi les plus bas du monde et, enfin, un taux d’imposition des plus concurrentiels en Amérique du Nord. E Accéder aux programmes d’immigration d’affaires Les profils et motivations des immigrants d’affaires, investisseurs 104 comme entrepreneurs, sont variés. Pour certains, l’objectif est de relocaliser leurs opérations, de prendre de l’expansion en développant leurs affaires en Amérique ou de se lancer en affaires. D’autres, proches de la retraite, souhaitent maintenir leur « standard de vie », en fonction de leur patrimoine et des charges fiscales afférentes. La motivation des plus jeunes est leur futur, et celui de leurs enfants, les études, un emploi, ou simplement le bien-être. Tous se retrouvent sur un point : il fait bon vivre au Québec, hiver comme été ! Pour les aider à réaliser des affaires et à s’installer, le gouvernement du Québec propose un Programme Immigrants Investisseurs et un Programme Immigrants Entrepreneurs, programmes dont les contingents limités ne s’appliquent pas aux candidats immigrants francophones, le gouvernement souhaitant les attirer en plus grand nombre en traitant leurs demandes en priorité. Intégrer le Programme Immigrants Investisseurs suppose des candidats qu’ils attestent d’une expérience gestion de deux années au moins sur les cinq dernières années, disposent d'un avoir net d'au moins 1 600 000 dollars canadiens (1,1 million d’euros) et réalisent auprès du gouvernement du Québec un placement sur cinq ans de 800 000 dollars canadiens (520 000 euros) garanti par la Province du Québec. Sur ce dernier point, l’apport de fonds propres exigés peut être réduit par un plan de financement de ±75 % du montant de placement réglementaire. Le Programme Entrepreneur, lui, est ouvert aux candidats qui, forts d’une expérience d’exploitation d’entreprise d’au moins deux ans sur les cinq dernières années, disposent d’un avoir net minimal de 300 000 dollars canadiens (200 000 euros) et Canada projettent, soit de créer une entreprise dont ils détiendront 25 % des capitaux propres (au moins 100 000 dollars canadiens soit 66 000 euros), soit d’acquérir pour un même montant au moins 25 % des capitaux propres d’une entreprise au Québec. Réussir l’investissement en s’appuyant sur les synergies d’un réseau d’experts Le courtier en placement Auray Capital Canada inc.1, membre de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières, s’est spécialisé dans les programmes d’immigration d’affaires au Canada, fort de l’agrément du Ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion du Québec et d’Investissement Québec, pour opérer à titre d’intermédiaire financier dans le cadre du Programme Immigrants Investisseurs du Québec. Son accompagnement est d’autant plus performant que l’entreprise est une filiale de Raymond Chabot Grant Thornton2, premier cabinet comptable au Québec figurant parmi les chefs de file en certification, fiscalité et services-conseils. Un membre, qui plus est, du réseau Grant Thornton International3, un des groupes leader d'audit, d'expertise conseil et de conseil fiscal. Le cabinet a ainsi toute capacité pour accompagner les démarches à l’international sur un large spectre de services complémentaires, fort d’une équipe de près de 2 400 personnes réparties dans plus de cent bureaux au Québec, dans l’est de l’Ontario et au NouveauBrunswick. En plus de la certification et de l’audit, le cabinet assure non seulement la planification - fiscale dans le cadre de processus d’immigration et d’émigration ou pour les achats/ventes d’entreprises - mais aussi les évaluations d’entreprises, les vérifications diligentes et la minimisation des incidences fiscales des activités transfrontalières, sans oublier le conseil immobilier et l’analyse des structures de financement. Aussi, avec déjà plus de 20 000 immigrants d’affaires à son actif au cours des vingt dernières années, l’équipe d’experts en immigration d’affaires d’Auray Capital Canada est opérationnelle sur toutes les étapes du processus, en collaboration avec son réseau mondial d’agents et d’avocats spécialisés en immigration. Et, pour faciliter l’accès aux différents produits et services financiers dont auront besoin les clients investisseurs et entrepreneurs, Auray Capital Canada a conclu un partenariat stratégique avec le Mouvement Desjardins 4, première institution financière au Québec disposant notamment d’un bureau de représentation à Paris. 1. www.auraycapital.com 2. www.rcgt.com 3. www.gti.org 4. www.desjardins.com 105 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Banque Transatlantique Gérer un patrimoine et investir en France et au Canada ©DR David EAP, Directeur du bureau de représentation de la Banque Transatlantique et du CIC à Montréal Sur un marché canadien dynamique, avec près de 120 000 Français expatriés sur Montréal, les entreprises et leur top-management ont besoin de conseils, d’un suivi et d’une gamme complète de services. Groupe bancaire français le plus solide en 2015*, le Crédit Mutuel-CIC a noué un partenariat avec le Mouvement Desjardins en 2011. La banque CIC accompagne les entreprises françaises à l’international. Sa filiale, la Banque Transatlantique a développé une activité dédiée aux Français expatriés. ouvez-vous nous rappeler les champs d’activité respectifs du CIC et de la Banque Transatlantique au Québec ? Dans le cadre de nos activités gestion p r i vé e a u s e i n d e l a B a n q u e Transatlantique, nous conseillons les Français expatriés au Canada, ou qui résident en France et investissent au Canada, ainsi que les Canadiens expatriés en France, et ceux qui possèdent un patrimoine dans les deux pays. En parallèle, côté CIC, notre activité est d’accompagner le développement des entreprises françaises au Canada, ainsi que l’expansion des entreprises canadiennes sur le sol français. Ma double casquette me permet d’être l’interlocuteur privilégié de ces entreprises et de leurs cadres. P Quels sont précisément les services proposés à votre clientèle de particuliers ? Nous accompagnons les particuliers, surtout les cadres expatriés et dirigeants d’entreprises, dans l’organisation et la gestion de leur patrimoine privé. Notre expertise est reconnue sur l’optimisation des avantages liés au salariat de l'encadrement supérieur, en particulier sur les plans de stockoptions et d’attribution d’actions gratuites. Nous conseillons nos clients dans la structuration de leurs projets dans un contexte franco-canadien maîtrisé, notamment dans ses aspects fiscaux et conformité. Notre bureau suit les évolutions des règles fiscales applicables entre le NOS IMPLANTATIONS Québec et la France, et entre le Canada et la France. Sur ces deux pays, nos clients bénéficient de conseils en investissements, de prêts immobiliers à garantie mixte, de transferts à moindre coût d’une devise à l’autre, gestion du change entre monnaies canadienne et européenne. Qu’en est-il pour votre clientèle d’entreprises ? Nos clients entreprises, filiales et bureaux de représentation, bénéficient dans les deux pays de nombreux services : facilitation pour l’ouverture de comptes, financement pour leur développement, optimisation de leur trésorerie, moyens de paiement adaptés, sans oublier des garanties internationales et des solutions d’épargne. Grâce à quels atouts concurrentiels vous démarquez-vous ? Nous restons un des rares groupes bancaires français à offrir aux entreprises et aux particuliers cet a cco m p a g n e m e n t p a t r i m o n i a l transatlantique. Nous offrons la possibilité à nos clients d’investir en euros au Canada et de disposer d’une reprise de l’historique des crédits et des assurances. Toujours grâce à notre partenaire Desjardins, la gestion financière de comptes à distance entre les deux pays est simplifiée : les titulaires de cartes bancaires Banque Transatlantique et CIC ne subissent par exemple aucun frais lors de retraits d’argent auprès de guichets Desjardins sur le sol canadien. (* : Global Finance, mars 2015) 107 ©DR Desjardins, groupe financier de référence pour les entreprises françaises et canadiennes Lucia BALDINO, Directrice du Bureau de représentation Desjardins (Europe) ©DR Acteur financier de premier plan au Canada, le groupe coopératif Desjardins est très impliqué dans la coopération entre PME françaises et canadiennes grâce à un bureau ouvert à Paris en 2012. Sa Directrice principale, Lucia Baldino, revient sur les missions et les actions menées par le groupe au Canada et en France. vec un réseau de près de 400 caisses au Québec et en Ontario, Desjardins est le premier groupe financier coopératif du Canada. Pouvez-vous revenir sur les missions du groupe ? Nous sommes effectivement le premier groupe coopératif financier au Canada et le cinquième dans le monde. Ce terme « coopératif » est très important, nous sommes plus qu’une banque, la mission du groupe étant de contribuer au mieux-être économique et social à la fois des personnes mais aussi des collectivités. Notre mission est duale. Tout d’abord, nous développons un réseau coopératif intégré de services financiers sécuritaires et rentables, sur une base permanente, propriété des membres et administrés par eux, et un réseau d’entreprises financières A 108 complémentaires, à rendement concurrentiel et contrôlé par eux. Notre deuxième mission concerne l’éducation : à la démocratie, à l’économie, à la solidarité et à la responsabilité individuelle et collective, particulièrement auprès de nos membres, de nos dirigeants et de nos employés. Desjardins a contribué en 2014, à hauteur de 82,3 millions de dollars canadiens, au développement économique régional et des connaissances, par le biais de dons et de commandites. En Europe, notre mission est d’accompagner à la fois les entreprises et les particuliers qui souhaitent mener des projets transatlantiques. Pour accompagner nos clients canadiens, nous avons établis plusieurs relations bancaires sur l’ensemble de l’Europe. En France, les sociétés françaises souhaitant faire des affaires au Canada pourront accéder et entamer leurs démarches en besoin bancaire depuis la France. Nous avons mis en place notamment un partenariat avec le groupe Crédit Mutuel CIC, qui leur permet d’accéder à de nombreux services bancaires. Nous leur offrons aussi notre connaissance du marché, nos carnets d’adresses. Très appréciées de nos membres, nous avons également organisé des missions d’affaires, avec une première édition lancée en 2013 et une seconde qui a eu lieu fin 2015. La prochaine est prévue pour 2017. Acteur clé des relations d’affaires entre le Canada et la France, le groupe Desjardins participe à une meilleure coopération entre PME françaises et canadiennes. Vous êtes directrice du ©DR bureau européen, situé à Paris. Comment participez-vous à cette coopération ? Nous organisons de nombreux ateliers, à la fois au Canada et en Europe et notamment en France. Ces ateliers permettent de répondre aux problématiques, telles que « comment faire des affaires en France ou au Canada ? ». Dans l’hexagone, ces ateliers se tiennent auprès de différentes régions et communautés d’affaires. L’objectif est de donner un aperçu de ce qui se passe sur ces marchés, les éléments juridiques et bancaires dont il faut tenir compte. Nous venons également de lancer le premier guide « Entreprendre et conquérir le marché canadien », qui est destiné aux sociétés françaises qui souhaitent entreprendre au Canada. Depuis quatre ans, le bureau de Paris a accompagné plus de sept cent entreprises de chaque côté de l’Atlantique. Des sociétés de toute taille, allant de la TPE à la très grande e n t re p r i s e co m m e l a s o c i é t é Derichebourg, côté au CAC 40. En quoi le marché canadien est-il porteur pour le PME françaises ? Quels conseils pourriez-vous leur donner ? L’Economist Intelligence Unit a placé le Canada au premier rang des pays du G7, et au quatrième rang mondial des pays où il fait bon y faire des affaires, pour la période allant de 2012 à 2016. Le marché canadien est ainsi reconnu pour bénéficier d’une stabilité économique, l’OCDE a ainsi prévu une croissance du marché de 2% par année pour les vingt prochaines années. C’est un pays qui propose un cadre rassurant, toujours en développement et qui permet d’accéder à un marché important, grâce aux accords économiques de libre-échange conclu entre le Canada, les Etats-Unis et le Mexique notamment. Nous pensons également que l’accord économique commercial et global entre l’union européenne et le Canada va finir par aboutir et qu’il sera porteur pour nos membres et nos clients et plus largement l’ensemble de la communauté d’affaires en Europe et au Canada. N’oublions pas que ce marché regroupe tout de même 600 millions de consommateurs. 109 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA Le Canada, relais de croissance à l'international Dixième puissance économique du monde, septième pays d'accueil des investissements directs à l'étranger en 2014 , 7e investisseur mondial en 2012 , le Canada attire les entrepreneurs et investisseurs étrangers, notamment français. n 2012, selon le magazine Forbes c'était le meilleur pays du G-20 où faire des affaires. A partir du début des années 90, il a connu la croissance la plus élevée des pays du G7. Son secteur financier a bien résisté à la crise mondiale de 2008 et la reprise est intervenue dès la fin 2009 ; l'économie canadienne a retrouvé rapidement ses indicateurs initiaux, qu'il s'agisse du taux de croissance, des revenus moyens ou du ratio de la dette par rapport au produit intérieur brut. La croissance s’est établie à 2,5 % en 2014, restant dans l'ensemble bien orientée pour 2015 (1,4 % de prévisions selon la Coface). Ed Fast, Ministre du Commerce international dans l'édition 20132014 du Rapport Phare - Investir au Canada, soulignait ainsi les atouts du pays : « un secteur bancaire solide et stable, de faibles taux d’imposition, l’un des niveaux de vie les plus élevés parmi les pays du G-20, un cadre propice aux entreprises, des villes de classe mondiale, des paysages naturels spectaculaires et une main-d’œuvre novatrice, instruite et multiculturelle, le Canada est une destination privilégiée pour les investissements mondiaux ». Sa démographie, qui bénéficie d'un accroissement migratoire, assure le renouvellement du marché du travail. Comme le souligne Business France, ses ressources énergétiques sont abondantes et diversifiées. Il est ainsi le cinquième producteur mondial de pétrole mais possède aussi des ressources minières qui le placent parmi les premiers producteurs mondiaux d’uranium, de nickel, de fer, de potasse, de cobalt. ©Olymicflame - Fotolia.com E > 110 Echanges bilatéraux France-Canada En 2015, la France était son 8ème partenaire. En 2014, les échanges Ottawa. ©City Hall - Fotolia.com > Ontario à Toronto. commerciaux entre la France et le Canada totalisaient 9,2 milliards de dollars canadiens, en hausse de 8 % par rapport à l’année précédente. Bien que dynamiques, les échanges d’IDE (Investissements Directs Etrangers) entre la France et le Canada étaient orientés à la baisse en 2014. L'Hexagone était alors en 10ème position avec 11,7 milliards de dollars canadiens, 6ème investisseur européen, derrière les Pays-Bas, le Luxembourg, le Royaume-Uni, l’Allemagne, et la Suisse. Plus de 10 000 entreprises françaises exportent vers le Canada dont 75 % de PME. 550 entreprises françaises implantées dans le pays emploient environ 80 000 personnes. S'implanter au Canada assure aussi une ouverture vers l’ensemble du territoire nord-américain, et ses 460 millions de consommateurs. Où s'implanter et investir ? Chaque province a ses spécificités Le Canada présente des débouchés importants pour les produits français notamment dans l’aéronautique, l’équipement mécanique et électrique, l’agroalimentaire (environ 66 % correspondent aux ventes de vins, 2ème produit français le plus exporté au Canada), le secteur biopharmaceu- tique, et cosmétique. De son côté, la France importe principalement des matériels de transport ainsi que des produits pétroliers raffinés et des minerais métalliques et uranifères. Chaque province a ses spécificités. Les investissements français au cours de ces dernières années ont progressé en Ontario, en Alberta, Saskatchewan et en ColombieBritannique mais la première province d’accueil reste le Québec, que 70 % des entreprises françaises ont privilégié. L'aéronautique, les TIC, l'audiovisuel, la santé et les biotechnologies, l'environnement, les biens de consommation, l'alimentaire, les mines, et l'hydroélectricité y sont les principales activités. L’Ontario, province caractérisée par son ouverture notamment vers les Etats-Unis, a vu sa capitale Toronto se positionner comme grand centre bancaire international. C'est la province la plus peuplée et la plus dynamique du Canada, avec une industrie et des entreprises innovantes, notamment dans les services (financiers, communications, médias), l'électronique, l'audiovisuel, le cinéma, les TIC, les mines, l'automobile, les industries mécaniques, la plasturgie, la santé et les biotechnologies, la chimie et la sidérurgie, l'agroalimentaire. L'Alberta est connue pour ses ressources naturelles, son industrie minière et les nanotechnologies. Le sud de cette province, balayé par les vents, offre des opportunités intéressantes dans les énergies renouvelables et le développement éolien. En Colombie britannique, dominent l'industrie forestière, les mines, le gaz naturel, les TIC, la santé, les biotechnologies, les piles à combustibles, les technologies de l’hydrogène, et l'astronomie. Sa capitale économique, Vancouver, est le premier port de la côte ouest de l’Amérique du Nord et une porte ouverte vers les marchés asiatiques. Enfin, la province de Manitoba dispose de compétences spécifiques dans les technologies des appareils médicaux tandis que celle de Saskatchewan est connue pour son agriculture, l'extraction minière, ses infrastructures urbaines durables et les biotechnologies des plantes. On citera aussi Terre Neuve Labrador et les technologies océaniques et marines, le Nouveau-Brunswick et les technologies du sans-fil, la NouvelleÉcosse et les technologies du sans-fil, sciences de la vie et des biotechnologies marines ou l'Ile-du-PrinceÉdouard, pour son excellence dans les sciences nutritionnelles et la santé. Sources : Fiche pays Canada Business France 2015 - diplomatie.gouv.fr investiraucanada.com -Rapport phare -Investir au Canada – Edition 2013-2014 111 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA MSH International au Canada : ce qui se conçoit bien s’énonce clairement Philippe de DREUZY, président directeur général de MSH INTERNATIONAL à Calgary ©DR Cinquième courtier d’assurance en France, Siaci Saint Honoré comprend plus de 1500 employés dans le monde et propose une gamme complète de produits d’assurance que ce soit en IARD ou en assurance Santé et Prévoyance. Sa division MSH International possède quatre bureaux régionaux à Shanghai, Paris, Dubaï et Calgary. Ses produits phares sont des solutions d’assurance santé pour les personnes en mobilité internationale, soit 330 000 personnes dans le monde ; pour la plupart des étudiants à l’étranger, des expatriés en assurance collective ou en individuelle. Philippe de Dreuzy, président directeur général de MSH International à Calgary, au Canada, nous expose les problématiques et la stratégie de la compagnie en matière de transparence et d’innovation technologique. Pouvez-vous présenter vos activités ? Nous sommes implantés à Calgary au Canada depuis les années 2000 avec un centre administratif important dédié à la gestion de plans d’assurance médicale, vie et incapacité. Dans une logique de croissance, MSH International a acquis en 2006 Norfolk Mobility Benefits. Nous avons depuis fusionné pour fonder une nouvelle société qui nous a permis d’élargir l’éventail de nos services sur le continent nord-américain. La principale mission de notre société est d’assurer le meilleur service par la prise en charge de nos clients désireux d’accéder à un vaste réseau médical sur le continent américain et ceci à des prix abordables, en présentant simplement leur carte d’assuré MSH. Notre mission est de fédérer les meilleurs hôpitaux et médecins spécialistes sélectionnés tant par la qualité de leurs soins que par la simplicité des démarches à suivre. Notre département médical émet des lettres de garantie financière et de pré-autorisation d’hospitalisation quel que soit le degré d’urgence. Ce type de services est essentiel pour les entreprises en matière de mobilité à l’international. Mais notre offre ne s’arrête pas là puisque nous nous concentrons également sur la conception de nouveaux produits et services à fortes valeurs ajoutées. Notre bureau de Calgary est composé de cent personnes et de plus de 35 nationalités différentes, ce qui nous permet d’être plus proches de notre clientèle en percevant ses sensibilités culturelles. Notre centre régional dispose également de bureaux satellites à Toronto, Ontario, et à Houston aux Etats-Unis. Nous devons ouvrir très prochainement un bureau à Montréal dans la province du Québec. Quels sont vos principaux atouts ? Pour moi qui suis en poste depuis deux ans, je constate un fort esprit d’équipe et le besoin de communiquer tous ensemble pour aller de l’avant. Depuis mon arrivée nous avons considérablement renforcé notre équipe marketing pour être d’avantage à l’écoute de nos clients. Ce travail d’analyse nous a permis de constater que le cout élevé des primes d’assurance notamment sur le territoire nord-américain et l’absence de transparence sur leurs calculs de la part des assureurs locaux étaient un gros sujet de frustration au sein des entreprises. Nous nous devions de les munir d’outils offrant plus de transparence. Notre position d’administrateur et de courtier nous conduit à développer des solutions innovantes basées sur les dernières technologies. Nous venons en effet de lancer un logiciel type tableau de bord appelé “MSH Aviator” qui permet aux entreprises de connaitre de façon continuelle l’état de la situation de leur plan d’assurance collective. L’ensemble des primes et décomptes sont stockés de façon sure et privée et disponible en ligne. Enfin nous élaborons des solutions de réclamation basées sur le traitement en ligne à partir d’un simple smart phone, réduisant ainsi nos temps de traitement et plus de simplicité pour l’assuré. Force est de constater que le monde de l’assurance n’a pas rapidement progressé sur le plan technologique. C’est un vieux métier qui se doit d’évoluer rapidement. Le back office est en effet très compliqué à gérer. SIACI, avec l’appui de notre nouvel actionnaire Ardian (un des premiers fonds d’investissement français), va nous permettre de continuer cette perpétuelle course contre la montre. Notre stratégie est aussi d’être à l’écoute des dernières régulations en matière d’assurance. La loi ObamaCare (PPACA) aux Etats-Unis, qui est au demeurant favorable pour les Américains vivant aux Etats-Unis, a provoqué beaucoup de confusion au sein de la communauté expatriée. Il est donc normal que nous nous efforcions de simplifier au mieux toutes ces nouvelles régulations qui peuvent être parfois contradictoires, notamment en matière de flux liés aux transactions financières. En conclusion et selon le principe de “ce qui se conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément” (1), nous nous efforçons ainsi d’aller au plus simple dans notre langage d’assureur tout en préservant l’essentiel. (1) Nicolas Boileau – écrivain français 1636 - 1711. 113 ©Adwo - Fotolia.com Université de Montréal. STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX ©DR CANADA Un enseignement ouvert sur le monde ©Maxime ©Maxime Desbiens Desbiens Michel PATRY, Directeur de HEC Montréal HEC Montréal conjugue tradition européenne et approche pragmatique américaine, un enseignement très complet et dans un nombre toujours plus important de filières et de certifications. Aujourd’hui, elle va plus loin en lançant un tout nouveau programme que l’on peut suivre entièrement à distance. ouvez-vous nous dire quelques mots de l’historique de HEC Montréal ? Créée en 1907, HEC Montréal est la plus vieille école de gestion du Canada. Elle accueille quelque 13 500 étudiants et 8 000 cadres en formation. Elle figure dans les meilleures écoles du Canada et est bien placée dans les classements internationaux. P 116 Quelle est la philosophie de l’École ? HEC Montréal dispense d’un enseignement théorique plus important que dans les autres écoles, tout en suivant l’approche nord-américaine, beaucoup plus pragmatique et fondée sur l’analyse de cas et la recherche de solutions. Notre premier cycle propose donc un tronc commun pour acquérir des bases suffisantes pour décoder le monde, avant d’affiner les connaissances selon le domaine choisi. Quelles sont ses spécificités pédagogiques ? Nous pratiquons la pédagogie inversée ; les étudiants disposent de ressources en ligne et de documents pour assimiler le cours et, lorsqu’ils Canada se retrouvent en classe, testent leur compréhension face à des analyses ou des études de cas. Les échanges avec les enseignants sont ainsi quotidiens, d’autant que les cours magistraux ne comportent pas plus de 60 élèves. Nous sommes très attachés à ce modèle. Quels nouveaux cursus, formations et certificats que l’École présente-t-elle cette année ? Nous allons créer un tout nouveau certificat enseigné à distance pour les personnes qui ne peuvent se déplacer à nos cours. Jusqu’ici, nos formations continues se partageaient entre une partie à distance et une partie présentielle. Désormais, notre cursus complet en administration pourra être suivi à distance. Par ailleurs, l’École innove beaucoup dans les nouvelles technologies. Elle dispose d’un laboratoire qui mesure, aux plans neuronal et cognitif, l’attention des usagers. Ces données serviront de base à une formation concernant l’expérience des utilisateurs, qui pourra être appliquée au commerce ou aux interfaces électroniques. En ce qui concerne l’École des dirigeants, quels sont ses spécificités et ses objectifs ? L’École des dirigeants HEC Montréal propose des formations qualifiantes et diplômantes pour des cadres en exercice qui ont identifié un besoin de formation complémentaire. Les c u rs u s vo n t j u s q u ’ à ce l u i d e Executive MBA. L’École s’est récemment associée à de nombreux organismes publics et privés reconnus pour leur expertise et leur ancrage sectoriel, comme le Centre Européen d’Éducation Permanente. Ces démarches nous permettent d’offrir aux cadres un soutien plus concret en leur donnant un accès privilégié à nos quelque 400 experts. L’École poursuit également ses démarches en France et à l’international : nous avons d’ailleurs récemment remporté un appel d’offres pour former les membres du comité de direction de LISI Aerospace. Que peut apporter HEC Montréal à de jeunes Français qui souhaitent suivre des études à l’étranger ? Ce que nous pouvons offrir à des étudiants français, c’est une expérience nord-américaine dans un lieu qui peut rappeler les grandes écoles, une mise en relation avec un environnement d’affaires nord-américain, avec une très forte ouverture sur l’international, le tout, à partir de l’Amérique du Nord. C’est d’ailleurs la possibilité de travailler à l’international qui motive les étudiants à passer par HEC Montréal. 117 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA L’École entrepreneuriale : une culture du risque et de la réussite ©DR Rino LÉVESQUE, cofondateur de l’Organisation Internationale des Écoles Communautaires Entrepreneuriales Conscientes (OIECEC) Active sur trois continents, l’OIECEC, l’Organisation Internationale des Écoles Communautaires Entrepreneuriales Conscientes, veut faire de l’école un lieu pour apprendre à entreprendre et innover. Depuis 24 ans, son fondateur, Rino Lévesque, nommé en 2014 ambassadeur international pour l’éducation entrepreneuriale chez les jeunes par l’OCDE, développe ce modèle. Il présente ici son concept et sa philosophie. omment est née l’Organisation Internationale des Écoles Communautaires Entrepreneuriales Conscientes ? Elle est née d’un rêve de créer un réseau d’écoles innovantes et entrepreneuriales au service des besoins des jeunes et de leurs environnements humains. L’internationalisation du projet s’est amplifiée dès 2011 grâce à une rencontre avec M. Yves Sylvain, actuel Sous ministre adjoint au Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MEERS) du Québec, alors Directeur général de la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB) de Montréal. Notre première expérience date de 1991, au Canada, en Colombie Britannique puis vers l’Est en Saskatchewan. À compter de 1999, elle connaît un grand succès avec l’école Cœur-Vaillant au Québec. En 2005, le ministère de l’Éducation du Nouveau-Brunswick (Canada) entreprend d’instaurer le concept dans l’ensemble des écoles francophones. L'expérience intéresse alors de nombreux pays. La commission canadienne de l’Unesco reconnaît le concept et Microsoft Corp souligne l’originalité de l’ECEC ; je suis ensuite désigné comme membre officiel du World Entrepreneurship Forum. Dans la foulée, la CSMB lance un plan de mise en œuvre dans 12 de ses 92 écoles primaires et secondaires, ses centres d’éducation pour adultes et de formation professionnelle. C De quels constats êtes vous partis ? De nombreux défis doivent être relevés face à l’économie globalisée du XXIème siècle. L’ECEC estime qu’il n’est pas possible de maintenir une croissance continue dans un monde fini aux ressources limitées. L’entrepreneuriat conscient est un 118 projet éducatif de société endogène et viable et qui vise trois grands défis. Il s'agit de développer les capacités des individus pour qu’ils se prennent en charge de manière autonome ; d'inventer et de proposer de nouveaux modèles de développement pour chacun ; de développer la conscience des défis contemporains. Comment un établissement d’enseignement peut-il devenir une École Communautaire Entrepreneuriale Consciente ? Il est accompagné selon un processus progressif et personnalisé, notamment, en fonction du rythme d’appropriation. Un préalable est la mise en œuvre de composantes structurantes organisationnelles (7, puis 12) de notre approche pédagogique. Les composantes fondamentales sont l’approche p é d a g o g i q u e , le p ro g ra m m e d’apprentissage et la philosophie de l’entrepreneuriat conscient. Elles doivent être en synergie les unes par rapport aux autres pour contribuer au développement de l’élève. Quelles sont votre philosophie et votre stratégie de la réussite pour l’élève ? Au terme de sa scolarité dans une ECEC, chaque élève développe trois rôles : initiateur, réalisateur et gestionnaire. Il acquiert trois compétences : s’entreprendre, entreprendre et créer de l’innovation de façon consciente, responsable et autonome. Il acquiert trois attitudes : la fierté identitaire et culturelle, la recherche constante d’innovation et son engagement envers son milieu humain (communauté). Douze qualités sont ainsi visées : la confiance en soi, le respect des autres, l’esprit d’équipe, le sens de l’organisation, la solidarité, le sens des responsa- bilités, le sens de l’initiative, l’ingéniosité et la créativité, le leadership, la conscience entrepreneuriale, l’apprentissage autonome et l’humanisation. Enfin, trois forces doivent émerger : le diagnostic, le dynamisme et la détermination. L’ECEC permet le développement chez l’élève de ce profil de sortie. Son approche p é d a g o g i q u e i n t é g ré e a ss u re l’apprentissage de notions prévues aux cursus scolaires (maths, sciences, français, histoire, géographie, etc.). Comment est organisé votre réseau? Nous avons regroupé des professionnels motivés et passionnés par notre modèle afin de proposer notre concept partout dans le monde. Notre réseau se compose de directeurs d’établissements, de pédagogues, d’éducateurs, de gestionnaires en éducation, sur les continents nordaméricain, européen, africain et sudaméricain. Chacun œuvre dans des réseaux scolaires et des organisations éducatives, certains, dans le cadre d'une carrière après la retraite. Notre structure est composée d’un bureau exécutif, d’un conseil d’administration, d'un conseil de gouvernance, d'une équipe de coordinateurs et de coordinatrices pour la Belgique et l’Europe, le Maroc et le monde arabe, la Côte d’Ivoire, le Bénin et l’Afrique de l’Ouest, les États-Unis, l'Amérique latine, les Caraïbes, l'Amérique du Sud. Nous disposons de coordonnateurs pour l’Afrique Australe et l’Afrique Centrale. Nous disposons d’une équipe dédiée au développement pédagogique, une cellule de communication, une autre, des organisations qui appuient le développement éducatif : citons ici la Fondation Paul Gérin-Lajoie, des commissions scolaires canadiennes dont la CSMB, le SAJE Accompagnateurs d’entrepreneurs, Canada HEC Montréal et divers partenaires internationaux dont l’Organisation internationale de la Francophonie et l’OCDE. Quelle est l'étendue de ce réseau aujourd'hui? Des ECEC se développent sur trois continents, dans cinq pays et deux provinces canadiennes. En Afrique, nous sommes implantés au Bénin, en Côte d’Ivoire et au Maroc, avec de nombreuses demandes depuis 2013. Au Bénin, nous connaissons un fort développement depuis 8 ans. Nos programmes intéressent actuellement le gouvernement de Côte d’Ivoire comme l’Unesco. Au Maroc, sept écoles privées ont adopté notre modèle. Le Conseil Supérieur de l’Éducation du Maroc étudie la possibilité d’appuyer l’implantation d’ECEC dans plusieurs écoles publiques. Nous avons de grands espoirs sur le continent africain, notamment en Afrique subsaharienne. En Europe, nous avons quelques écoles à Bruxelles et Namur, d’autres, en Belgique et désormais en France, indiquent vouloir se transformer selon ce modèle, qui concerne actuellement le primaire, le secondaire et la formation professionnelle. Quels sont vos innovations et vos tarifs? Parmi nos innovations il faut noter un programme pédagogique complet en entrepreneuriat conscient qui s’intègre pendant et après les heures de classe. Par exemples, est proposé aux écoles un système d’activités, de projets et de microentreprises pédagogiques, auxquels s’ajoutent une micro chambre de commerce des entrepreneurs et une micro banque d’investissement en entrepreneuriat conscient servant, dans ce dernier cas, à soutenir le démarrage de micro-projets que réalisent les élèves. La micro banque a aussi pour rôle de réguler la qualité de la pédagogie tout en permettant une compréhension des concepts liés au microcrédit. L’ECEC est en quelque sorte une « micro société ». Il s’agit d’un modèle écosystémique « écolefamille-environnement socioéconomique ». Notre service d’accompagnement offre jusqu’à 14 jours par année (trois ans) aux enseignants, directions et certains partenaires. Nous proposons des programmes adaptés aux besoins pour la formation des équipes-écoles souhaitant mettre en œuvre l’ECEC. Selon le programme d’accompagnement choisi, les tarifs moyens (selon la taille de l’école) vont jusqu’à 25 000 euros chaque année pendant trois ans, puis jusqu’à 15 000 euros pour les deux années suivantes assurant la consolidation des acquis et menant à la certification ECEC. Les mentalités évoluent, l’entrepreneuriat conscient fait son chemin, au Québec comme dans d'autres pays. Sa philosophie et sa pédagogie sont de plus en plus reconnues car elles visent à réduire le décrochage scolaire, à augmenter la motivation des élèves, à fédérer école, communauté et milieu socio-économique autour d’un projet éducatif porteur de sens ; puis, dans la perspective d’un développement à portée sociale, elle véhicule l’espoir de contribuer à mieux vivre ensemble, pour un avenir rayonnant et des économies viables. Voir : http://acteursdeleconomie.latribune.fr/debats/opinion/2015-11-27/une-culture-de-l-entrepreneuriat-conscient-pour-tous.html (La Tribune, novembre 2015) 119 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX CANADA École canadienne bilingue de Paris : l'enseignement canadien rayonne ©DR Hélène LEONE, directrice de l’école S'il existe des écoles françaises au Canada, la réciproque n’était pas vraie dans l'Hexagone. Pourtant, l'enseignement canadien, classé 3ème au PISA (Program for International Student Assessment) de l'OCDE n'a rien à envier au système français. Depuis septembre 2015, la première École canadienne bilingue de Paris offre à ses élèves une véritable éducation bilingue en anglais et en français. 'École Canadienne Bilingue de Paris que vous dirigez à ouvert ses portes en septembre 2015. Quelles étaient les attentes des parents de vos élèves ? Je pense que l'une des attentes majeures étaient de permettre à leurs enfants d'acquérir une véritable éducation bilingue, source de compétences égales dans les deux langues que sont le français et l’anglais en lecture, en écriture, en expression et compréhension orale. Dans la majorité des écoles, la deuxième langue, quelle qu'elle soit est une matière. Dans notre structure, le français et l'anglais sont utilisés à part égale dans l'ensemble des enseignements, qu'il s'agisse des mathématiques, des sciences ou encore des sciences humaines. En deçà du bilinguisme, notre particularité est d'adapter notre pédagogie à l'enfant, individu unique et non l'inverse. Nous valorisons le potentiel de chacun, l'accompagnons pour qu'il surmonte ses faiblesses et les mue en forces. Nous refusons la mise en échec et travaillons sur l'épanouissement personnel et intellectuel. L'enseignement bilingue et biculturel, le mène aussi à explorer ses passions et sa créativité par le biais de programmes artistiques et sportifs spécifiques. L Toutes les nationalités sont-elles représentées ? Nous accueillons 60 % de familles françaises et 40 % d'expatriées, qu'elles soient canadiennes, américaines, allemandes ou encore italiennes. L'un de nos fondamentaux est l'ouverture au monde. Comment est organisé l’enseignement ? Nous suivons le programme officiel de la Colombie-Britannique et accueillons des enfants de 3 à 19 ans. Attentifs à nos élèves, ceux qui arrivent avec une maitrise moindre de l'anglais ou du français sont assistés en cours par une enseignante supplémentaire, qui les accompagne jusqu'à ce qu'ils puissent suivre dans les deux langues, sans difficulté. Nos classes étant composées de 6 à 8 élèves, nous pouvons ainsi travailler en finesse avec les enfants et répondre aux besoins individuels, leur apprendre à apprendre, leur donner la soif et les moyens d'accéder à la connaissance. J'ai apporté un grand soin au recrutement des enseignants, en retenant cinq sur les 183 candidatures reçues. Je souhaitais qu'ils soient en accord parfait avec les fondements de l'éducation que je voulais transmettre, que les enfants puissent évoluer dans un environnement sécurisant, chaleureux, et inclusif, comme au Canada. Qu'est-ce qui vous différencie des autres écoles bilingues ? Je pense qu'il s'agit de notre conception du bilinguisme en soi. Nous apprenons un vrai bilinguisme, qui intègre les deux langues dans l'apprentissage et n'en fait pas des matières distinctes. Nos élèves sont des citoyens du monde en devenir. J'ai mûrement pensé ce projet pendant quatre longues années, l'ai nourri de mes expériences d'enseignante, de chercheur en sciences de l'éducation, et aussi de parent de deux enfants qui s’identifient bilingue. Je souhaitais offrir aux élèves le meilleur de l'enseignement canadien et transmettre cette pédagogie unique. Comment envisagez-vous le développement de votre école ? Je souhaite qu'elle garde sa dimension humaine. Nous avons de prime abord accueilli 12 premiers élèves en septembre et nous en avons aujourd'hui 24. A la prochaine rentrée, une quarantaine de nouveaux arrivants sont inscrits. Il me semble important de conserver des classes de petits groupes, qui ne doivent jamais dépasser 16 élèves. Ma mission est de faire rayonner en France et à Paris, cet enseignement canadien, de transmettre nos connaissances pédagogiques, qui bien que reconnues à l'échelle mondiale, ne se sont pas encore vraiment développées, loin du Canada. 121 ©Adinafelea - Fotolia.com La Roumanie conserve son attractivité Bucarest. Bucarest. STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX ROUMANIE France-Roumanie : un partenariat solide Les relations franco-roumaines se sont intensifiées au fil des siècles dans les domaines économique, politique, culturel, linguistique, etc. a Roumanie, pays de 20 millions d'habitants, est membre de l'Union européenne depuis 2007, tout comme la Bulgarie. Son PIB a augmenté en moyenne de 6,3 % par an en moyenne entre 2002 et 2008 mais a ensuite connu une forte baisse en raison de la crise économique et financière de 2008. L'aide du FMI et de l'Union européenne ont aidé au redémarrage de l'économie qui a connu environ 3 % de croissance en 2014. Parmi les secteurs porteurs, on peut citer l'industrie et notamment la filière automobile avec plus de 500 équipementiers et sous-traitants implantés sur le territoire, la production étant en grande partie exportée. L'agroalimentaire est également dynamique, la Roumanie étant le 2ème producteur européen de mais et se plaçant parmi les 10 premiers producteurs de lait. En outre, la Chambre de Commerce française en L ©Adinafelea - Fotolia.com > Bucarest. Roumanie estime que le marché roumain des nouvelles technologies est un des plus dynamiques du continent avec environ 8 000 entreprises et des centres spécialisés dans l'outsourcing et le développement informatique. Le secteur de l'énergie est en pleine mutation : les énergies renouvelables vont ainsi attirer 18 milliards d'euros d'investissements jusqu'en 2020. Un commerce bilatéral en progression Les échanges commerciaux entre la France et la Roumanie ont progressé de plus 3,4 % lors des 11 premiers mois de 2014. La Roumanie est le 26ème pays destinataire des exportations françaises, qui ont connu une hausse de 1,9 %. Les biens d'équipements et le matériel de transport ont vu leurs ventes augmenter de 5 % et de 8,5 %. Nos exportations de produits agroalimentaires (3 % du total), ont progressé de 10 %, contre 4,5 % pour les parfums et cosmétiques. En revanche, nos livraisons de parties et accessoires pour véhicules automobiles ont reculé de 9 % et celles de véhicules automobiles de 1,5 %. Nos importations en provenance de Roumanie, qui ont progressé de 5,3 % durant les 11 premiers mois de 2014, concernent principalement les équipements mécaniques, électriques, électroniques et informatiques ainsi que le matériel de transport. Les achats de véhicules automobiles ont augmenté de 5,8 % et celles de produits agroalimentaires ont gagné 26,6 %. Néanmoins, nos achats de textiles ont reculé de 6,2 %. Des investissements français dynamiques Selon la Chambre de Commerce française en Roumanie, « le rôle de Roumanie pionniers des investisseurs français et leur engagement durable en Roumanie leur assurent une place à part dans le paysage local. Les investissements français ont par exemple la particularité d'avoir continué à se développer dans un contexte économique pourtant difficile et peu propice aux investissements ». Selon la Banque de France, le stock d’IDE français en Roumanie s’élève à 3,9 milliards d'euros en 2013, en quatrième place après les Pays-Bas, l'Autriche et l'Allemagne. Parmi les grandes entreprises françaises présentes dans le pays, on peut citer Renault-Dacia, Valeao, Michelin, Société générale, Crédit agricole, BNP Paribas, Lafarge, Alstom, Carrefour, Auchan, etc. On compte également de plus en plus de PME travaillant dans les secteurs de l'automobile, les technologies de l'information et de la communication (TIC), l'ingénierie et les TIC. À l'occasion de la visite du Président roumain Klaus Iohannis en France en février 2015, François Hollande a souligné que « la France est présente en Roumanie, des investissements importants ont été faits ces dernières années et nous voulons les amplifier. Je rappelle que Renault est très implanté en Roumanie et contribue à hauteur de 3 % à la production nationale roumaine. C’est dire l’ampleur de ce qui a pu être fait dans ce pays et dans l’intérêt aussi de la France, puisque c’est un courant d’échanges qui nous est favorable et qui fait que la balance commerciale est excédentaire pour la France dans sa relation avec la Roumanie. Nous avons plusieurs sujets sur lesquels nous pouvons mieux coopérer encore, notamment les infrastructures, les projets d’autoroutes, l’énergie, y compris sur le nucléaire, les services, notamment tout ce qui est nouvelles technologies et également la défense ». Des liens culturels forts Le Président français a également rappelé que, « sur le plan culturel, il y a de nombreux rapports, échanges, relations universitaires, scientifiques et également la présence d’établissements culturels français en Roumanie et nous voulons que l’année 2018 soit une année particulièrement marquante, puisque ce sera le 100ème anniversaire de l’État roumain moderne et il y aura une mobilisation pour faire de cet évènement un grand moment d’amitié entre nos deux pays». La Roumanie est membre à part entière de la Francophonie depuis 1993. Le ministère des Affaires étrangères estime que plus de 50 % des élèves du pays étudient notre langue, qui est par ailleurs parlée par un quart de la population. L'Institut français de Roumanie, les Alliances françaises et le Lycée français de Bucarest permettent de développer la coopération culturelle et linguistique, En outre, l'Institut de France a décerné en 2012 le prix Louis D pour un montant de 750 000 euros au Centre régional francophone de recherches avancées en sciences sociales (CEREFREA) qui est hébergé dans la villa Noël, inaugurée en 2014. Concernant l'enseignement supérieur, la France est le troisième pays d'accueil des étudiants roumains ( 5 0 0 0 p e rs o n n e s ) d e r r i è re le Royaume-Uni et l'Italie. La Roumanie compte quand à elle plus de 1 000 étudiants français, en particulier en médecine. La coopération décentralisée (entre collectivités territoriales) est également dynamique et touche des domaines très variés : le développement économique, l'éducation, la santé, la patrimoine, etc. La Roumanie a ainsi organisé à Constata les 4èmes assises de la coopération décentralisée en juin 2013. Sources : DG Trésor, ministère des Affaires étrangères, Chambre de Commerce française en Roumanie Dana GRUIA DUFAUT, avocat à la Cour d’Appel de Paris et au Barreau de Bucarest Fondatrice d’un des plus importants cabinets d’avocats d’affaires français de Bucarest, Maître Dana Gruia Dufaut accompagne depuis 25 ans les investisseurs français en vue de leur permettre de s’implanter durablement sur le marché local. Elle nous livre ci-après son analyse du marché roumain aujourd’hui, de ses opportunités et de la place qu’y occupent nos entreprises françaises. ourquoi les entreprises françaises devraient-elles s’intéresser à la Roumanie? Les statistiques parlent d’ellesmêmes : la croissance des grandes économies est passée de 1,8 % en 2014 à 1,9 % en 2015, soit le meilleur rythme depuis 2010. Période durant laquelle la croissance en Roumanie a été de 3,4 - 3,5 % du PIB, ce qui est au-dessus de la moyenne européenne et de sa région. Et les prévisions des institutions financières internationales pour la Roumanie en 2016 sont encore plus optimistes. La Roumanie est un pays qui évolue, un pays qui avance et se développe. Les statistiques sont bonnes, non seulement concernant l’évolution de l’économie, la stabilité macroéconomique et financière, mais aussi au regard de l’inflation, du prix de la main d’œuvre. En outre, sa fiscalité reste toujours aussi attractive pour les investisseurs avec un Impôt sur le P revenu au taux unique de 16 %, un impôt sur les sociétés de 16 %, et une TVA passée au 1er janvier 2016 de 24 % à 20 % et qui tombera à 19 % au 1er janvier 2017. A cela se rajoutent une multitude de ressources et la position stratégique de la Roumanie dans la région. Autant d’arguments en faveur de l’attractivité de ce pays comptant déjà une forte communauté d’affaires française. Les grands groupes français du domaine de la construction automobile, de l’aéronautique, des services publics, de la gestion de l’eau, de l’énergie y sont déjà présents et envisagent de développer leurs activités. L’usine Renault Dacia de Roumanie est la plus grande entreprise du pays, produisant environ 3 % du PIB et 9 % des exportations roumaines. A la fin de l’année 2014, la France était le 5ème investisseur étranger en Roumanie, avec un stock de 4,1 milliards d’euros. Enfin, il faut tenir compte d’un ©Gruia Dufaut ©Gruia Dufaut ©Gruia Dufaut Droit et pratique du droit en Roumanie 127 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX Que vous a enseigné l’accompagnement que vous offrez aux investisseurs français depuis vingt-cinq ans ? Cette année, en effet, cela fera un quart de siècle que je suis installée en Roumanie, assistant en juin 1991 ma première société mixte créée par un grand groupe français, en partenariat avec l’Etat roumain. Nous devions être à ce moment-là parmi les premiers investisseurs étrangers dans ce pays et j’avoue avoir vécu des expériences extraordinaires au cours de ces années… nous étions des pionniers dans ce nouveau monde qui venait de s’ouvrir à l’Est. Et la première chose que j’ai apprise de ce 128 parcours professionnel en Roumanie, c’est que si nous sommes tentés par une aventure et qu’il y a quelque chose de suffisamment fort qui nous anime, il faut se lancer. Jusqu’à ce qu’on démarre un projet, il y a de l’hésitation, des soucis. Mais, à partir du moment où l’on s’engage définitivement et de tout son être, alors la providence avance aussi. Il n’y a pas de mystère… il faut être passionné de tout son être pour réussir dans ce qu’on entreprend. Il y a vingt-cinq ans, j’ai découvert un pays sinistré mais offrant de nombreuses opportunités et un pays qui, malgré quelques soubresauts, s’est engagé très rapidement sur une trajectoire européenne sans retour. J’ai commencé à bâtir des ponts entre la France et la Roumanie et le pari a été bon. Les entreprises qui y sont allées ont eu raison de le faire ; le pays, membre de l’Union Européenne et de l’OTAN, garde son attractivité et son économie est en plein essor. C’est aussi un pays proche culturellement de la France. Enfin, je dirais aussi que pour réussir, il faut agir, avoir de la ténacité et travailler beaucoup. Pourquoi je me suis lancée vers la Roumanie au début des années quatre-vingt-dix ? Par esprit de conquête, parce que, finalement, je suis quelque part un peu casse-cou et qu’aller prendre à bras le corps une législation naissante en droit des affaires cela m’a plu, je dirai même m’a passionnée… Car, vraiment, les premières années ont été très difficiles mais aussi les plus passionnantes, justement parce qu’il ©Gruia Dufaut s’agissait, en droit, de tout construire, reconstruire. Il a fallu dépasser les obstacles comme, par exemple, lorsqu’il s’est agi de réaliser des opérations juridiques et que les textes n’étaient pas encore là …. Il a fallu créer, innover, contractualiser, ce qui n’était pas encore texte de loi. Un travail très difficile mais passionnant ! Comment caractérisez-vous la communauté d’affaires française de Roumanie et quelle a été la motivation à créer en Roumanie, il y a vingt ans, la Chambre de Commerce, d’Industrie et de l’Agriculture française dont vous êtes administrateur depuis 2010 ? La communauté française à beaucoup grandi ces dernières années ; elle est hétérogène en ce qui concerne les domaines d’activité, mais en même temps très soudée. La Chambre de Commerce française d’Agriculture et d’Industrie en Roumanie (CCIFER), dont je suis également administrateur, constitue un lien fort au sein de cette communauté en ouvrant la possibilité de voir se côtoyer des PME avec les grands groupes et en accompagnant nos intérêts français en Roumanie, en partenariat avec la Mission Economique de l’Ambassade de France en Roumanie ou Business France. Il est important de savoir que, lorsqu’on part à l’étranger, on n’est pas seul et que des organismes de la sorte existent pour aider les entreprises dans le Pays de destination. La CCIFER compte parmi ses membres non seulement des entreprises françaises, mais aussi des ©Gruia Dufaut certain optimisme concernant la relance de divers secteurs qui ont été les plus touchés par la crise : l’immobilier, les constructions, l’énergétique et les infrastructures. Après la chute du régime communiste dans les années quatre-vingt-dix, le retard pris par la Roumanie à opérer sa transition vers une vraie économie de marché, par rapport à ses voisins de l’ancien bloc communiste tels que la Pologne, la Hongrie et la Slovaquie, fait que nombre de domaines manifestent un besoin important en investissements et savoir-faire étranger, et pourquoi pas français ; infrastructures, énergie, agriculture, tourisme mais aussi services publics. Paradoxalement, ce pays grand dont la superficie correspond à la moitié de celle de la France compte seulement environ 650 km d’autoroutes, le réseau de voies ferrées étant tombé par ailleurs en ruine. L’absence de ces infrastructures a produit un décalage énorme de développement entre les diverses régions du pays. Prenons un seul exemple : la Roumanie a un potentiel agricole énorme, détenant une des plus grandes surfaces de terrain agricole de l’Europe, alors qu’il s’agit d’une agriculture de subsistance contribuant trop faiblement au PIB du pays. L’agriculture roumaine a besoin de projets d’investissements d’envergure dans le système d’irrigations, d’élevage, dans de fermes agricoles à production de masse. Il en est de même, par exemple, des infrastructures telles que l’adduction d’eau, les canalisations. En un mot, il n’est pas exagéré de dire qu’en Roumanie, aujourd’hui encore, tout reste à faire et que tous les domaines d’activités sont encore ouverts ! ©Gruia Dufaut ROUMANIE ©Gruia Dufaut Roumanie entreprises roumaines partageant les valeurs de la France. La CCIFER compte presque 500 membres qui représentent près de 15 % du PIB roumain, employant plus de 125.000 personnes. Une vraie force au bénéfice de notre développement. Quels conseils donneriez-vous à ce jour à des entreprises françaises souhaitant se développer à l’international ; quels sont en particulier les « A ne pas faire » ? L’internationalisation est un processus objectif qui suit la transition d’une e n t re p r i s e e n d éve lo p p e m e n t local, jusqu’à l’acquisition des connaissances et du know-how lui permettant d’entrer pleinement dans la compétition globale. Toute démarche de lancement à l’international, en particulier pour les PME, constitue un fait objectif nécessaire au développement de l’affaire en soimême et, en même temps, une condition de soutenabilité, voire même de survie des économies nationales. Les premiers pas à faire sont essentiels pour le succès de cette démarche. Du point de vue juridique, par exemple, une entreprise souhaitant s’implanter en Roumanie doit s’interdire de penser que tout y est comme chez elle et d’ignorer les particularités locales ; de la forme d’implantation au recrutement du personnel et des partenaires locaux. La Roumanie est un pays riche en opportunités d’affaires mais il faut choisir attentivement car la compétition est déjà forte dans certains domaines d’activité, ou bien dans certaines régions du pays, sans compter que le prix de l’implantation peut parfois être élevé. Enfin, je répète à tous les potentiels investisseurs qu’il faut se méfier « des faux amis », à savoir des actes semblant identiques aux documents français mais qui cachent en réalité des différences significatives avec un impact majeur sur les affaires. Exemple classique : la constitution d’une société à responsabilité limitée pour laquelle la législation roumaine prévoit la possibilité d’avoir un Conseil d’Administration, contrairement à ce qui se passe en France. Il est en même temps essentiel pour les entreprises françaises de renoncer aux clichés circulant sur la Roumanie ; corruption, pauvreté, un pays gris avec des gens tristes… Il faut se donner la peine de découvrir ce pays, la réalité sur place modifiant radicalement cette image. Les entrepreneurs français découvriront un pays à l’économie très dynamique, avec des paysages à faire rêver et des gens accueillants. Propos recueillis par Sophie Schneider Dana Gruia Dufaut, Avocate au Barreau de Bucarest depuis 2002 et du Barreau de Paris depuis 1987, est l’auteur d’une thèse de doctorat en droit soutenue en 2002 devant la Faculté de Droit de Bucarest sur « Les règlementations de droit commercial dans le cadre des relations entre la France et la Roumanie dans le contexte de l’intégration de la Roumanie dans l’UE ». Egalement Avocat-conseil de l’Ambassade de France en Roumanie et Conseiller du Commerce Extérieur de la France pendant plus de dix ans, elle est l’auteur de nombre d’articles sur la Roumanie. Chevalier de l’Ordre National du Mérite depuis 2006, Me Dana Gruia Dufaut a été élue en 2014 Conseiller Consulaire pour la Roumanie et la Moldavie, pour un mandat de six ans. Les expertises de son cabinet sont accessibles sur www.gruiadufaut.com 129 ©Seanpavone Photo - Fotolia.com L’Espagne vers une nouvelle croissance Madrid. Madrid. ©Ste Schum - Fotolia.com Madrid. Des échanges fructueux Jean-François COLLIN, Ministre conseiller pour les Affaires économiques de l’ambassade de France en Espagne ©DR L’amélioration de l’économie espagnole profite également à la France. Les deux pays développent désormais des partenariats autour de l’énergie et des transports. L’Espagne est également un allié de choix pour défendre les positions de la France dans les débats européens sur l’investissement et l’union économique et monétaire. n 2015, les indicateurs prévoient une croissance plus élevée en Espagne que dans le reste de la zone Euro. Comment l’expliquez-vous ? L’Espagne connaît une trajectoire de croissance assez singulière en Europe. La croissance a été beaucoup plus forte que dans le reste de l’Union européenne de 1998 à 2008, avec 3,8 % par an. Cette croissance était en partie artificielle et la crise a é t é e n E s p a g n e p l u s fo r t e qu’ailleurs : le PIB a diminué de 7 % entre 2007 et 2013. La croissance économique est revenue en 2014 (+ 1,4 % du PIB) et les prévisions pour 2015 placent effectivement l’Espagne en tête des pays de la zone Euro (autour de 3 % de croissance du PIB). Trois facteurs expliquent ces bonnes performances récentes : des facteurs externes, la politique économique menée au cours des dernières années et le relâchement de la politique d’ajustement budgétaire. En ce qui concerne les facteurs externes, la baisse du prix du pétrole joue un rôle très important dans un pays qui E importe 71 % de son énergie. La baisse de la parité euro/dollar soutient les exportations (la chute de la consommation interne a incité les entreprises à se tourner vers l’international pour trouver de nouveaux marchés – actuellement les exportations représentent 32,5 % du PIB). Enfin, la crise que connaissent les pays de la rive sud de la Méditerranée a permis au secteur du tourisme d’enregistrer des performances exceptionnelles. Le gouvernement a conduit des réformes internes qui, après avoir accentué les effets récessifs de la crise, ont eu un effet bénéfique sur la compétitivité de l’économie espagnole. Le secteur b a n ca i re a é t é p ro fo n d é m e n t restructuré (pour un coût de 127 milliards d’euros dont 40 milliards d’euros devraient rester à la charge du contribuable). Le nombre d’établissements financiers est passé d’une cinquantaine à une quinzaine. Ensuite, le gouvernement s’est employé à réduire les déficits publics en recourant aux moyens classiques : augmentation des impôts et réduction des dépenses. Ce n’est pas l’originalité des moyens mis en œuvre qui est remarquable, mais l’importance de la réduction des dépenses publiques et de l’augmentation des impôts. En 2014, le déficit public atteignait 5,8 % du PIB respectant ainsi l’objectif fixé par l’Eurogroupe et la commission européenne. La prime de risque est passée en deçà de la barre des 100 points début 2015 alors qu’elle atteignait 638 points en 2012. De plus, le gouvernement a mis en œuvre une politique de dévaluation interne visant à rétablir l’équilibre de sa balance des paiements et améliorant la compétitivité espagnole. Il a modifié les conditions d’organisation du dialogue social et réduit les garanties accordées aux salariés en facilitant les licenciements et en allégeant les procédures collectives, puis en favorisant la flexibilité de l’organisation du travail au sein des entreprises en privilégiant les accords d’entreprise sur les accords de branche et les accords nationaux. 131 ESPAGNE Enfin, le relâchement des mesures d’ajustement budgétaire permet de soutenir la croissance en 2015. Le gouvernement a effectué une réforme fiscale fin 2014 dont l’objectif principal est d’abaisser la pression fiscale sur les sociétés et sur les revenus du travail. Celle-ci devait permettre de rendre, selon les premières estimations, 9 milliards d’euros aux contribuables. Par ailleurs, une deuxième vague d’allègement fiscal était prévue pour le 1er janvier 2016, mais le gouvernement vient de décider de la mettre en œuvre dès le 1er juillet 2015. La France est le troisième investisseur en Espagne. Quels sont, aujourd’hui, les éléments d’attractivité de l’Espagne qui peuvent concourir à renforcer ces investissements français ? Le dynamisme actuel de l’économie espagnole est un puissant facteur d’attractivité dans un environnement européen languissant. Les conditions favorables aux employeurs de l’organisation du marché du travail sont une raison non négligeable de la délocalisation d’activités industrielles de la France vers l’Espagne, dans le secteur de l’automobile notamment. Les salaires sont inférieurs à ce qu’ils sont en France dans presque toutes les Communautés autonomes, même s’il existe d’importants écarts à travers le pays. Les relations sociales sont beaucoup moins conflictuelles qu’en France. En outre, la qualité des infrastructures (ferroviaire n° 5/ routière n° 1 en Europe, aéroportuaire n° 3 en Europe) et sa position géographique entre l’Amérique latine, l’Afrique du Nord et l’Europe permettent à l’Espagne d’attirer des investissements étrangers souhaitant y établir une plateforme vers ces destinations. Enfin, d’après le classement réalisé par HSBC, l’Espagne se situe à la 7e place des pays offrant le meilleur cadre de vie aux travailleurs étrangers. Quelles opportunités l’Espagne offret-elle aux entreprises françaises dans le domaine de la recherche et de l’innovation ? Le secteur de la R&D a beaucoup souffert de la crise. Les budgets publics ont été considérablement réduits et les conséquences de cette réduction des moyens se feront sentir durablement. Depuis 2014, le gouvernement espagnol cherche à 132 relancer la R&D. L’imposition sur les sociétés a été allégée. La réforme fiscale adoptée fin 2014 abaisse le taux normal d’IS à 28 % en 2015, 25 % en 2016 et 20 % en 2017 (contre 30 % en 2014) et elle unifie le taux d’imposition de toutes les sociétés (suppression du régime spécifique aux PME). Dans le même temps, le plafond de déduction des dépenses en R&D accordé aux entreprises qui consacrent plus de 10 % de leur chiffre d’affaires à ce poste est augmenté (déduction plafonnée à 5 milliards d’euros contre 3 milliards d’euros précédemment). L’assiette des déductions fiscales est élargie à de nouvelles dépenses (projets pilotes liés à l’animation et aux jeux vidéo). D’après l’indice B-Index de l’OCDE, l’Espagne est au troisième rang des pays ayant le régime fiscal le plus généreux s’agissant des activités de R&D. Le régime français reste cependant plus favorable. Quels sont les secteurs dans lesquels les entreprises françaises sont performantes sur le marché espagnol ? La présence économique de la France en Espagne est considérable. Selon l’Institut espagnol des statistiques, 1 852 filiales françaises (soit 12 % du nombre de filiales françaises installées en Europe) étaient implantées en Espagne en 2012. Les filiales f r a n ça i s e s s o n t le p l u s g ro s employeur étranger en Espagne (près de 300 000 personnes). Leur chiffre d’affaires représentait, en 2012, 18 % du total du chiffre d’affaires réalisé par les filiales étrangères implantées en Espagne, devançant largement l’Allemagne (13,2 %) et les États-Unis (13,2 %). Les filiales françaises sont actives dans presque tous les secteurs de l’économie. Elles se distinguent notamment dans les secteurs de la grande distribution (Carrefour, Al Campo, Décathlon), de l’automobile (PSA et Renault) et des télécommunications (Orange, qui vient de racheter Jazztel). Mais les entreprises françaises sont présentes également dans l’agroalimentaire, les assurances, les services financiers ou l’économie numérique. S’agissant de deux économies développées, même si elles ont leurs spécificités, il n’existe pas de secteurs en friche et la concurrence est partout très vive. L’Espagne est l’un des premiers fournisseurs de la France. Quels sont les domaines où les importations françaises progressent ? ©Seanpavone Photo - Fotolia.com Madrid. Nous avons importé pour 29,6 milliards d’euros de marchandises en 2014. L’Espagne est notre 6e fournisseur alors que la France est le premier client de l’Espagne. Nous importons principalement du matériel de transport (26,4 % du total de nos achats), des produits de l’industrie agroalimentaire (13,1 %) et des équipements mécaniques (9,9 %). En ce début d’année 2015, nos importations depuis l’Espagne ont été dynamiques pour les produits pharmaceutiques (+ 28 %), les équipements électriques et ménagers (+ 20 %), les produits agricoles (+ 11 %) et les matériels de transport (+ 12 %). Quels grands contrats ou projets de coopération entre les deux pays sont actuellement en cours de développement ? Les relations entre la France et l’Espagne sont excellentes et très denses. Les très nombreuses rencontres politiques, qui ont eu lieu depuis le Sommet bilatéral de décembre 2014, en témoignent : • 20 février 2015 : acte d’inauguration de la ligne électrique à haute tension franco-espagnole - visite du Premier ministre Manuel Valls, rencontre avec M. Rajoy ; • 2 au 4 mars : visite d’Axelle Lemaire à l’occasion du Mobile World Congress de Barcelone, rencontre avec M. Calvo-Sotelo, secrétaire d’État aux Télécommunications et pour la Société d’information ; • 4 mars : sommet Énergie à Madrid en présence de François Hollande, Mariano Rajoy, Pedro Passos Coelho, Jean-Claude Juncker et Werner Hoyer ; • 21 au 23 avril : visite d’une délégation de la Commission des finances du Sénat français (rencontres notamment avec Luis De Guindos et Cristobal Montoro) ; • 22 mai : visite de Michel Sapin pour un entretien avec Luis De Guindos ; • 26 mai : Carbon expo à Barcelone avec la participation de Laurence Tubiana, ambassadrice chargée des négociations sur le changement climatique ; • 2 au 4 juin : visite d’État du Roi à Paris ; • 10 juillet : visite d’Emmanuel Macron au cours de laquelle il a rencontré M. Soria, L. De Guindos, V. Calvo Sotelo et J. Garcia-Legaz ; • 28 et 29 juillet : visite d’Alain Vidalies afin de rencontrer les ministres A.M. Pastor et I. Tejerina. Les projets d’interconnexions électrique et gazière sont considérables. Un projet de ligne électrique sousmarine dans le golfe de Gascogne a fait l’objet d’études techniques approfondies. Le tracé de deux traversées dans les Pyrénées est à l’étude, ainsi que la faisabilité du projet d’interconnexion gazière « MIDCAT ». Ces projets représentent des milliards d’investissements et sont considérés comme des réalisations nécessaires à la construction d’un marché européen de l’énergie. Les liaisons ferroviaires vont être développées pour transporter des passagers et des marchandises. Les industriels français comptent bien, également, jouer un rôle dans les très importantes commandes de matériel ferroviaire qui sont en préparation. La coopération dans le domaine des satellites est très développée. Les investissements dans l’automobile se poursuivent. De plus, nous partageons de nombreuses positions dans les débats européens, qu’il s’agisse de la nécessité de développer les investissements dont le plan Junker constitue une première reconnaissance, d’approfondir l’union économique et monétaire et de réaliser des progrès dans la gouvernance politique de la zone Euro. 133 ©DR > Felipe VI lors de sa visite d’État en juin 2015 et de sa participation au forum d’affaires Espagne-France, l’Avenir. « La France est le premier marché de l’Espagne » Santiago MENDIOROZ, Conseiller économique et commercial en chef de l’Office économique et commercial de l’ambassade d’Espagne en France ©DR Les relations privilégiées que les deux pays entretiennent de longue date favorisent les investissements d’autant que l’Espagne a renoué avec la croissance. ouvez-vous nous rappeler les missions de l’Office économique et commercial de l’ambassade d’Espagne à Paris ? Notre principale mission est d’aider le s e n t re p r i s e s e s p a g n o le s à s’introduire sur le marché français, augmenter leurs ventes ou investir dans l’économie française, de réaliser des actions de promotion menées par l’Institut du commerce espagnol ICEX Exportations et Investissements comme la promotion de secteurs espagnols (carrelage, jambon, vins, fleurs…), dans le cadre des normes autorisées par l’Union européenne (UE), ou la présence dans différents salons spécialisés en France, soit avec des pavillons organisés par les fédérations d’entrepreneurs espagnoles, P 134 soit avec des participations individuelles. Nous suivons également les marchés et de l’économie française, spécialement en ce qui concerne toute éventuelle mesure de discrimination incompatible avec le Marché Intérieur. En relation avec l’administration économique et commerciale française, nous suivons les données économiques, élaborons des rapports, et gérons les contentieux entre les entreprises privées ou émanant de l’action de l’Administration. Nous échangeons des informations et préparons des réunions économiques ou commerciales à Bruxelles et dans les différents forums bilatéraux franco-espagnols. Enfin, notre activité est orientée vers la recherche d’inves-tissements en Espagne, pour les entreprises françaises et multinationales avec ou sans activité en France. À cet effet, nous organisons des forums et séminaires spécialisés avec l’aide essentielle de la Direction des Investissements de l’ICEX Exportations et Investissements. Quelles sont les perspectives pour les entreprises françaises en Espagne ? Je les résumerais en un seul mot : excellentes ; c’est le moment d’investir en Espagne, avec une croissance proche des 3 % en 2015 et, en 2016, une inflation inexistante ou négative, un marché du travail vaste, depuis la recherche (I+D) jusqu’à la fabrication des produits, des professionnels bien formés et des coûts directs et indirects moins élevés que les coûts Espagne français. L’équivalent du SMIC avoisine les 700 a, les charges sociales ne dépassent pas 40 % et il existe de nombreuses aides à la création d’emplois. La fiscalité des entreprises se situe autour des 25 % des bénéfices et il existe un programme d’aides à l’investissement et à la recherche. L’immobilier, à l’achat et à la location, est nettement moins cher qu’en France. Finalement, la qualité de vie est au moins aussi bonne qu’en France, et à un coût bien moindre. Quels conseils leur donneriez-vous pour réussir une implantation ? La proximité culturelle et géographique ne doit pas faire oublier les spécificités de l’Espagne et la façon d’y faire des affaires. Le rôle de l’État en Espagne est beaucoup moins décisif qu’en France (la partie de l’État dans le PIB espagnol atteint à peine 40 %) ; la réglementation civile, bien que semblable à celle de la France, a des spécificités selon les régions (Navarre, Pays Basque, Catalogne) ; les tribunaux de commerce français n’existent pas ; les différends entre les entreprises se résolvent dans les tribunaux civils devant des juges professionnels membres du pouvoir judiciaire ; la réglementation est moins complexe qu’en France ; l’utilisation du français dans le domaine économique a pratiquement disparu ; le rôle des notaires, aussi bien dans les transmissions immobilières est complètement différent, etc. Il est donc préférable de compter sur l’aide d’experts pour les démarches administratives des projets, la recherche de la localisation la plus adéquate, ou les aides applicables sur le marché du travail aussi bien pour la R+D+i que pour l’investissement. Cela est le rôle de la Direction des Investissements de l’ICEX Exportations et Investissements (www.icex.es) et le travail que nous réalisons depuis l’Office commercial pour canaliser les projets qui peuvent exister. Finalement, il est très important de signaler que les conditions de production en Espagne en font une plateforme depuis laquelle on peut attaquer les marchés globaux. De nombreuses entreprises françaises, notamment dans l’industrie de l’automobile ou les énergies renou- velables, l’ont bien compris. Il faut donc réfléchir à l’implantation en Espagne en considérant le marché de toute la péninsule ibérique (c’est-àdire, avec Portugal et Andorre), celui de l’Union européenne bien sûr, le marché du Maghreb (seulement 14 km séparent Algésiras du Maroc) et surtout le marché mondial de langue espagnole. Plus de 500 millions de personnes dans le monde parlent l’espagnol comme première langue, dont 55 millions aux ÉtatsUnis. L’Espagne a des relations privilégiées avec tous les pays américains d’origine hispanique, aussi bien en termes d’accords ou traités de protection réciproque des investissements ou pour éviter la double imposition, comme en termes de relations d’entreprises, proximité culturelle et, bien entendu, de liens familiaux. Or, les pays les plus dynamiques et avec les meilleures perspectives actuellement sont le Mexique, la Colombie ou le Chili. Quelles sont les spécificités du contexte d’affaires, des forces et faiblesses de la France face au marché espagnol ? La France est le premier marché pour l’Espagne et le second investisseur en termes de stocks. C’est sans doute une des plus grandes forces de la France et des entreprises françaises sur notre marché. En plus de l’excellent accueil que les entreprises françaises trouveront toujours sur le marché et dans l’Administration espagnole, elles ont créé des réseaux de soutien importants comme les chambres de commerce à Madrid et à Barcelone ou le « lobby » DIALOGO. En outre, l’ambassade française en Espagne propose soutien et collaboration. L’image de la France en Espagne est associée au luxe, à la qualité et au bien-être et l’excellence culturelle et intellectuelle de ses professionnels, de ses techniciens et de ses chercheurs est reconnue. Le financement, à partir de fonds propres ou depuis les institutions financières françaises, peut supposer un avantage face aux entreprises espagnoles qui obtiennent leur financement de la banque en général, dans des pourcentages supérieurs à la moyenne européenne, ce qui fait que les coûts de financement en Espagne peuvent être supérieurs. En ce qui concerne les faiblesses, je pense surtout à deux choses : la réticence à pratiquer des langues étrangères (que ce soit l’espagnol ou l’anglais), et une certaine tendance à donner une image de pays en difficulté qui ne correspond pas à la richesse, à la capacité, à l’initiative et l’esprit d’entreprise français. À quels événements ou dossiers porterez-vous une attention particulière ? (2) Le suivi des résultats de la COP 21 est important, tout comme la préparation et le développement des travaux concernant les jeux Olympiques et l’Expo 2025, car cela concerne les entreprises espagnoles, depuis le BTP jusqu’aux énergies renouvelables ou la biotechnologie. Dans le domaine des relations bilatérales, il y a deux sujets d’importance spéciale : le Sommet hispano-français qui devrait avoir lieu, après les élections générales en Espagne, au milieu de l’année prochaine, et les négociations commerciales de l’UE. Cela inclut le TTIP1, dont la gestion revient à la Commission, mais dont l’approbation s’effectuera au Conseil et au Parlement européens et où les positions française et espagnole diffèrent sur des points importants. De plus, la négociation avec Mercosur est importante pour nous et, par conséquent, la posture française dans ces négociations. Nous inquiète particulièrement la montée de ce que nous pourrions nommer «nationalisme économique » qui, en principe, n’a rien de négatif, mais qui peut amener à prendre des mesures incompatibles avec le Marché intérieur européen. Nous sommes également préoccupés par tout ce qui influence la libre circulation des marchandises, depuis la réglementation de la circulation à celle du travail ou à celle de la sécurité, car la France est un pays de transit obligatoire pour nos exportations vers la UE et le reste de l’Europe, pour plus de 60 % de nos exportations. Finalement, l’amélioration de nos interconnexions, aussi bien dans le domaine de l’énergie comme dans celui des transports, constitue une priorité absolue pour l’Espagne. Ces projets à long terme ont toute notre attention. 1. TTIP : Transatlantic Trade and Investment Partnership - partenariat transatlantique de commerce et d'investissement. 2. Cet entretien a été réalisée au 3e trimestre 2015. 135 ©DR Diner de gala donné par l’Ambassadeur J. Bonnafont à la Résidence de France. Développer le potentiel des entreprises françaises Emmanuel MIELVAQUE, Président de la section des conseillers du commerce extérieur de la France en Espagne Le savoir-faire français est reconnu par les Espagnols qui ont une proximité naturelle avec notre pays. Cependant, pour réussir en Espagne, les Français doivent tenir compte des particularités régionales autant que nationales. ©DR > ouvez-vous nous rappeler le rôle des conseillers du commerce extérieur de la France en Espagne ? Nommés par le Premier ministre, les conseillers du commerce extérieur de la France sont au nombre de 4 000 et sont présents dans 147 pays. Nous avons quatre missions : conseiller, accompagner, former et promouvoir. Premièrement, en tant que responsable d’un secteur particulier, nous informons les pouvoirs publics et l’ambassadeur de l’évolution de la situation économique. Notre deuxième rôle, en partenariat avec Business France, est d’accompagner les entreprises françaises, PME comme grands groupes, sur le marché espagnol et de les aider à se P 136 développer. Nous leur faisons bénéficier de notre réseau, leur délivrons des conseils pour optimiser leur implantation. Nous avons aussi une mission de formation par l’intermédiaire du volontariat international en entreprise (VIE), mis en place par Business France. Enfin, nous sommes chargés de promouvoir l’attractivité de la France et de favoriser l’investissement des entreprises espagnoles dans notre pays. Comment évolue le système des VIE en Espagne et comment le soutenezvous ? Cette année, le nombre de VIE a connu une belle progression, puisque 250 VIE ont rejoint l’Espagne. Les grands groupes sont séduits par le système, reste à convaincre les PME et nous y travaillons. Une solution serait de créer un portage de VIE. Ceux-ci qui pourraient être ainsi associés à plusieurs entreprises. Les VIE valorisent la compétence française à l’étranger. Celle-ci est d’ailleurs reconnue des entreprises espagnoles. Nous soutenons cette initiative en organisant chaque année un grand prix des VIE, doté de prix en numéraire pour récompenser les VIE qui auront le plus contribué à montrer le savoir-faire français. Comment s’articule votre travail avec le Service économique ? Étant au plus près des entreprises, nous collectons des informations que nous faisons remonter au Service Espagne Quel regard portez-vous sur l’économie espagnole en 2015 ? La reprise d’activité se confirme et cela se ressent sur le moral des investisseurs. Ils sont optimistes, ont retrouvé la confiance et l’envie de faire des affaires. On note une progression de 5,3 % dans le commerce de détail, ce qui est un bon indicateur. De plus, le chômage baisse de 24,6 % à 21,3 %, même s’il reste encore trop élevé. On constate en outre que 90 % des contrats de travail conclus actuellement sont des CDD, ce qui dénote un manque de confiance à long terme, comme si les entreprises étaient encore incertaines sur l’avenir. Cela est compréhensible, car la situation politique est, elle aussi, instable. L’émergence de deux nouveaux partis, relativement jeunes, a créé un vrai changement. L’économie espagnole, c’est aussi une économie de région. La Catalogne, notamment, est devenue une place d’affaires prépondérante où de nombreux sièges se sont implantés. Si des réformes structurelles, dans le droit du travail, le secteur financier et l’énergie ont porté leurs fruits, certains problèmes demeurent. Le manque d’investissement dans la recherche et le développement par exemple, qui est un des plus faibles d’Europe en dépit d’une politique fiscale attractive avec un crédit d’impôt recherche et un crédit d’impôt technologie et un troisième pour l’environnement. L’investissement est actuellement trop faible pour créer de l’emploi pérenne. Quels sont les secteurs où nos entreprises françaises peuvent augmenter leur part de marché ? Le numérique reste un domaine important, et qui offre de nombreuses opportunités en Espagne. L’agroalimentaire ensuite, car on note une amélioration du secteur agricole et la France a un savoir-faire sur toute la chaîne de production. Enfin, l’énergie est un secteur qui a souffert énormément en Espagne, qui n’a pas su faire sa transition, mais qui garde un fort potentiel avec le solaire et l’éolien, où la France peut prendre des parts de marché. Enfin, l’immobilier se porte mieux. De nombreux investisseurs étrangers sont présents et prennent part à des opérations immobilières. À quoi nos entreprises doivent-elles être attentives pour réussir en Espagne ? Il faut tout d’abord parler la langue du pays, car les Espagnols y restent attachés, c’est un signe de reconnaissance. Ensuite, il faut comprendre aussi qu’en Espagne, on prend le temps de faire connaissance et l’on conclut les contrats après. Ne pas prendre ce temps est mal perçu. Il faut également tenir compte des particularités régionales. À Madrid, il est facile de travailler, mais au Pays basque et en Navarre ou en Catalogne, on gagne beaucoup de temps si l’on a déjà des contacts locaux. Notre rôle de conseil est ici important pour expliquer comment les choses se passent en Espagne et où s’implanter pour un développement régional. Quels sont les temps forts de 2016 pour les CCEF ? Nous avons deux moments forts. D’une part, l’assemblée générale, en présence de Business France et de l’ambassadeur, qui aura lieu la troisième semaine du mois de janvier à Madrid. À chaque fois, nous faisons intervenir un personnage public important de l’économie espagnole ou internationale pour discuter des aspects économiques et de leur impact sur les activités françaises. Cette année, nous accueillerons Daniel Calleja Crespo, Directeur général de l’environnement à la Commission européenne. Nous avons également un rendez-vous annuel où l’on se déplace dans la région. Cette année, nous avons choisi la Galice, dans le nord-ouest de l’Espagne, où se trouve une grosse usine de PSA que nous irons visiter. C’est l’occasion pour nous de voir comment se développe le tissu économique local et quel rôle la France peut y jouer. ©DR économique (SE). Nous diffusons des notes sectorielles, ou organisons des réunions plénières des déjeuners thématiques avec le chef du SE et l’ambassadeur. Par exemple, nous réfléchissons ensemble aux réformes sur le droit du travail et leur impact sur le marché de l’emploi en Espagne, avant l’arrivée des élections. Un autre thème et l’économie du numérique et la place que la France peut occuper dans ce secteur. > Assemblée générale de janvier 2015 avec au centre comme invitée principale Mme Cristina Garmendia, Présidente de la fondation Cotec pour l’innovation et ancien Ministre des Sciences et de l’innovation. 137 ©Peresanz - Fotolia.com Barcelone. Retour à la compétitivité Richard GOMES, Directeur de Business France en Espagne Après des années difficiles, l’Espagne a renoué avec la croissance plus vite que ses voisins européens. Elle a repris sa consommation, ce qui permet à la France de reprendre ses exportations à un haut niveau. P ouvez-vous nous rappeler les missions de Business France en Espagne ? Notre équipe de 20 personnes, répartie entre Madrid et Barcelone – nous nous occupons aussi du Portugal -, est organisée de manière régionale. Business France accompagne, chaque année, plus de 500 PME sur l’ensemble de la Péninsule ibérique : 400 PME en Espagne et 100 PME au Portugal. L’accompagnement en Espagne se fait plutôt de manière traditionnelle (recherche de distributeurs, d’importateurs, d’agents ou de partenaires au sens large) par opposition au Portugal, pays dans lequel nous travaillons plus la problématique de l’investissement (investissements, rachats et implantations). Quelles sont les caractéristiques de l’économie ibérique ? L’Espagne est un gros marché traditionnel de 46 millions d’habitants, avec une croissance à 3,5 %, en pleine reprise de consommation. C’est un marché mature, car 1 500 filiales françaises y sont implantées. Le Portugal, lui, n’a que 1,5 % de croissance prévue pour 2015, mais sa main-d’œuvre est compétitive. 138 Quels sont les secteurs porteurs pour les entreprises françaises ? Citons d’abord l’aéronautique, où Airbus a continué sa croissance, même pendant les années de crise, mais aussi les transports, car l’Espagne est le deuxième pays, derrière la Chine, en nombre de kilomètres de lignes ferroviaires à grande vitesse. Et elle garde des possibilités de développement dans ce secteur. Autre secteur porteur dans l’industrie : tout ce qui concerne l’efficience énergétique, les énergies renouvelables et leur distribution. C’est un domaine important, parce que l’énergie coûte cher. À ce sujet, Manuel Valls et le Premier ministre espagnol ont inauguré la ligne à haute tension souterraine qui augmente considérablement les échanges énergétiques franco-espagnols. Dans les secteurs des technologies de l’information et de la communication (TIC), des mathématiques, de l’ingénierie, les Français ont un savoir-faire reconnu et l’Espagne a une grande culture de la nouveauté et de l’innovation et dans ce domaine. Les trois quarts des téléphones espagnols sont des smartphones. L’Espagne est un ©Artur Bogacki - Fotolia.com ©DR > gros consommateur de TIC, mais en produit peu, c’est donc un gros client pour la France. Le pays a investi dans le service Blablacar par exemple, l’un des fleurons français. À ce sujet, les deux principaux événements européens des TIC ont lieu sur la péninsule : le Mobile World Congress, qui a lieu à Barcelone, et où nous avons un pavillon et où nous accompagnons 130 des 180 entreprises françaises présentes sur le salon. Le principal salon du Web (30 000 visiteurs), Web Summit, où 20 start-ups françaises seront accompagnées, qui passera à Lisbonne pour les trois prochaines années à partir de 2016. Ces événements sont emblématiques de l’appétence de la péninsule ibérique pour ces TIC. Où en sont les exportations francoespagnoles ? L e s ex p o r t a t i o n s re p re n n e n t . L’Espagne se développait structurellement sur l’immobilier, maintenant, elle s’appuie sur la dévaluation interne. On remarque qu’il y a deux mondes qui coexistent : les travailleurs qui sont rentrés dans l’entreprise il y a longtemps et qui conservent des salaires plus élevés que ceux qui viennent d’être embauchés, avec une rémunération nettement plus basse. Forte de ces efforts, l’Espagne est redevenue compétitive à l’export. La France, elle, a connu un déficit commercial avec l’Espagne pendant la crise, ce qui ne nous était jamais arrivé. Mais nous avons retrouvé un solde positif, car l’Espagne se remet à consommer, ce qui favorise nos exportations. L’Espagne reste toutefois notre principal concurrent sur les produits agroalimentaires, les vins, les spiritueux et les voitures. Comment travaillez-vous ? Nous sommes leader dans l’accompagnement des entreprises françaises en Espagne. Concrètement, nous permettons aux sociétés françaises de développer leur chiffre d’affaires dans ce pays en identifiant les meilleurs prospects pour leurs solutions. Ainsi, dans les nouvelles technologies, nous mobilisons l’ensemble de l’écosystème espagnol, pour montrer les belles start-ups françaises aux grands comptes locaux. Nous participons ou initions certains événements, comme Digital Sisters, qui en est à sa troisième édition et qui permet la promotion de nos start-ups. Dans le domaine de l’aérospatial, nous organisons des rendez-vous ou nous faisons se rencontrer entreprises françaises et espagnoles. Enfin, dans le domaine de l’automobile, qui représente un marché important, car l’Espagne produit plus de voitures que la France et qu’elle est le deuxième marché européen derrière l’Allemagne, nous présentons des soustraitants français à des constructeurs espagnols. Il y a également le programme des volontaires internationaux d’entreprises (VIE), où l’Espagne a le plus fort taux de croissance mondial, puisque nous sommes passés de 68 VIE en janvier 2013 à 255 aujourd’hui. Cela représente un gros travail, notamment de mes équipes, pour susciter l’intérêt de la formule auprès des filiales françaises en Espagne. Le changement fiscal qui s’est opéré pour les VIE qui, désormais, ne payent plus leurs impôts qu’en France, rend cette solution intéressante pour les compagnies espagnoles, car cela leur coûte 30 % moins cher. Depuis que la consommation a repris, on constate un retour d’intérêt pour tout ce qui est bien-être, spas, cosmétiques en Espagne. Enfin, en raison du Printemps arabe, l’activité touristique a connu un essor, avec 68 millions de visiteurs et une première place en terme de dépenses dans le pays. Enfin, à nous de remettre en avant ce secteur, et de permettre aux entreprises françaises de profiter de ce renouveau. Quels sont les atouts des entreprises françaises en Espagne ? Les atouts sont le savoir-faire innovant, une image de sérieux et de qualité, un bon service après-vente, le côté rigoureux des Français. En revanche, nous avons des difficultés à commercialiser les produits à l’international et c’est là que Business France intervient, pour faire le lien entre le produit et l’acheteur. C’est un rôle décisif dans cette compétition internationale. Quels sont les grands projets en cours ? Il y a des projets d’interconnexions et de transports, par exemple, de ligne Paris Madrid à grande vitesse pour désengorger l’autoroute des Landes. Le gazoduc qui transporte le gaz de l’Espagne vers les pays du nord, ainsi que l’autoroute de la mer, qui renforcerait la navigation le long des côtes françaises. Enfin, l’avenir est lié à des questions politiques, car il va y avoir en Espagne des élections importantes qui vont montrer l’émergence de nouveaux partis comme le Parti « Ciudadanos » (Citoyens) ou Podemos. Cela peut avoir des conséquences sur l’économie espagnole. 139 ©Sergii Figurynyl - Fotolia.com La Suisse une économie solide et diversifiée Bern. ©DR > Alain Carbonne, Florence Dobelle et Alban Aubert. Priorité à l’innovation Florence DOBELLE, chef du service économique régional en Suisse, Ambassade de France en Suisse En 2015, la Suisse a conforté sa place dans le top 20 des économies mondiales et, à ce titre, a été invitée à participer au G20 Finances. Suite à la récession de 2009, l’économie suisse a bien rebondi, enregistrant une croissance modeste, mais constante. Les entreprises françaises progressent, mais il reste encore de belles possibilités de développement, notamment dans les technologies de l’information et de la communication. Q uel regard portez-vous sur l’économie suisse en 2016 ? La Suisse dispose d’une économie solide, dotée d’une grande capacité de résilience aux crises. Elle a ainsi très vite surmonté la crise financière avec une croissance moyenne annuelle avoisinant 2 % entre 2010 et 2014. La forte globalisation de l’économie suisse atténue l’impact négatif du franc fort en lui permettant de bénéficier de la baisse des prix des intrants, qui représentent un pourcentage élevé de la valeur des exportations (avec, par exemple, un ratio de 40 % d’importations pour le secteur pharmaceutique). Il existe une sensibilité structurelle des exportations suisses à la croissance mondiale avec, selon les estimations de l’Institut Avenir Suisse, une augmentation de 2 % des exportations CH pour chaque point de PIB mondial supplémentaire et une croissance de 7 % des exportations suisses en cas de croissance du PIB allemand de 2 % supplémentaires, sachant que la zone Euro est le premier partenaire commercial de la Suisse. S’appuyant sur un excédent structurellement élevé de la balance des transactions courantes (7,3 % du PIB en 2014), la Suisse est devenue la 19e économie mondiale en 2015 (PIB de 642 milliards de CHF, soit 592 milliards d’euros). Elle a ainsi été invitée par la Chine à participer aux travaux du G20 Finances. Ses finances publiques sont saines grâce à l’adoption, par votation à 85 % des suffrages exprimés, dès 2001, d’un mécanisme contraignant de frein à l’endettement. Mais l’appréciation du franc suisse (suite à l’abandon du taux plancher par la Banque nationale suisse en janvier 2015) pèse sur les exportations : une croissance plus modeste est attendue en 2015 (autour de 0,9 % après 1,9 % en 2014) et en 2016 (1,3 %). L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) recommande à la Suisse de s’engager dans la voie de réformes structurelles1 pour redresser sa productivité, qui progresse moins vite que les salaires depuis 2008. Le rythme de croissance de l’économie suisse dépendra aussi du maintien ou de l’évolution du cadre de ses relations économiques et commerciales avec l’Union européenne (UE), suite à la votation « Contre l’immigration de masse » du 9 février 2014. Dans l’hypothèse - non confirmée d’une abolition de l’actuel Paquet dit Bilatéral I2, l’Institut BAK Basel estime que l’incidence négative qui en résulterait serait, au minimum, de l’ordre d’une perte totale de 630 milliards de francs suisses sur une période vingt ans, avec un effet « crescendo » sur le PIB suisse : de - 5 milliards en 2018, - 15 milliards en 2020, et de - 64 milliards sur le PIB 2035 (soit 10 % du PIB actuel). Quelle est l’évolution des échanges bilatéraux franco-suisse depuis deux ans ? La France est un partenaire commercial majeur de la Suisse : son 3e client (derrière l’Allemagne et les ÉtatsUnis). La Suisse est, quant à elle, notre 9e client et notre 3e marché hors UE : elle absorbe environ 3 % de nos exportations. Les régions frontalières (Rhône-Alpes, Alsace, FrancheComté) sont à l’origine de plus de 20 % des exportations françaises. 141 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE La Suisse est le 7e investisseur étranger en France. Quels sont les domaines les plus porteurs en France pour les investisseurs helvètes ? Oui, la Suisse est le 7e investisseur en France, juste après la Belgique (5e) et les États-Unis (6e), avant l’Italie (8e) et l’Espagne (9e). Pour mémoire, le 142 stock d’investissements directs étrangers (IDE) suisses en France ressort à 50,4 milliards d’euros en 2014 (8,4 % du stock total d’IDE en France). Fin 2014, les 1 400 entreprises suisses implantées en France y employaient plus de 175 000 salariés. Les IDE suisses en France se concentrent dans l’agroalimentaire (14 %), la pharmacie (10 %) et le textile (10 %). Les investissements suisses en Fra n ce re ste n t d y n a m i q u e s . Business France a ainsi identifié en 2014 49 nouvelles décisions d’investissement, ayant permis la création ou le maintien de près de 1 100 emplois en France. Et pareillement, quels sont les secteurs où pourraient encore se développer nos entreprises françaises en Suisse ? Selon les données de la Banque nationale suisse (BNS), la France est le 3e investisseur4 en Suisse (avec 6 % du stock total des investissements directs étrangers [IDE] en Suisse), après les États-Unis (1er) et les Pays-Bas (2 e ), avant le ©Auremar -Fotolia.com La Suisse est aussi notre 9e fournisseur. Les échanges commerciaux ont permis d’enregistrer un excédent commercial de 441 millions d’euros en 2014, avec des exportations d’un montant de 12,9 milliards d’euros. Nos principaux produits d’exportation sont les articles de joaillerie et de bijouterie (15 % du total des exportations), les produits des industries agroalimentaires (8 %, principalement des vins, des produits laitiers et fromagers et des légumes), les préparations pharmaceutiques (5,5 %), les exportations de produits de raffinage du pétrole (3,7 %), les automobiles et l’aéronautique (3,1 %). Nos importations de Suisse sont constituées d’articles d’horlogerie (15 % du total de nos importations5), de produits des industries agroalimentaires (12 %). Par exemple, nos importations de capsules Nespresso3 ont connu une forte progression ces dernières années. La France importe aussi de Suisse des préparations pharmaceutiques (11 %), des instruments et fournitures à usage médical (6 %) et des arômes et huiles essentielles (6 %). Les données commerciales définitives pour 2015 ne sont pas encore connues. La hausse des exportations françaises en euros enregistrée par les douanes françaises est portée par l’effet richesse lié à l’appréciation du franc suisse : sur les dix premiers mois de l’année 2015, les ventes de certains produits ont connu en volume une progression à deux chiffres, qu’il s’agisse des matériels de transport (+ 16 %, notamment en raison de bonnes ventes pour les automobiles produites en France), des produits informatiques, électroniques et optiques (+ 16 %) ou de produits pharmaceutiques (+ 11 %). Mais les importations, portées par l’effet valeur de l’appréciation du franc suisse, ont également nettement progressé : ainsi, sur les dix premiers mois de 2015, des équipements mécaniques, électroniques et informatiques (+ 11 %), des produits pharmaceutiques, chimiques (+ 16 %). Luxembourg (4e) et l’Allemagne (5e). Pour mémoire, selon la Banque de France, le stock d’IDE français en Suisse se monte à 41,8 milliards d’euros. Les IDE français en Suisse se concentrent dans les secteurs manufacturier (40 %), financier et de l’assurance (20 %), ainsi que de la logistique et de l’immobilier, et aussi de la culture. Selon l’enquête OFATS de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la France compte un peu moins de 1 1 0 0 e n t re p r i s e s e n S u i ss e employant plus de 60 000 salariés5. Les secteurs de la logistique et du numérique offrent, par exemple, encore de réelles possibilités de développement. En 2014, les investissements français en Suisse ont notamment été marqués par la reprise par NJJ Capital, de l’opérateur de téléphonie mobile, Orange Suisse, devenue Salt. En ce qui concerne les starts-ups suisses, le problème réside souvent sur la difficulté à trouver des Suisse Quels sont les grands projets développés par nos deux pays en matière de recherche et d’innovation ? Nos relations bilatérales sont fortement ancrées dans le cadre des relations économiques UE-Suisse. C’est également le cas pour la recherche et l’innovation. Selon l’organisation faîtière SWISSMEM (industries électromécaniques) « les programmes européens de recherche sont les plus efficaces du monde ». L a S u i ss e , m e m b re a ss o c i é d’EURATOM et membre fondateur du CERN, participe au programme ITER. Avec le Centre de recherches en physique des plasmas (CRPP) de l’EPFL (École polytechnique fédérale de Lausanne), la Suisse contribue pleinement à l’effort européen et mondial dans la recherche en fusion. Plus d’une trentaine d’entreprises suisses (systèmes électromécaniques, appareillages et autres composants nécessaires au réacteur) sont directement concernées. La Suisse est également membre de l’Agence spatiale européenne (ASE). Le lancement du projet d’Ariane 6, soutenu par la France, a des retombées très positives pour l’industrie suisse dont trois entreprises sont directement engagées dans la fabrication de la fusée. ©Happy Alex - Fotolia.com financements. La plateforme Wirate, qui est spécialisée dans la notation et l’analyse d’entreprises en croissance, vient d’étendre ses activités en Suisse. Par son système de notation, elle permet d’attirer l’attention des investisseurs sur des projets intéressants et pourrait donc se révéler d’un grand soutien pour ces jeunes entreprises. > Bale. Au niveau des entreprises, les coopérations sont très actives dans le domaine aéronautique, par exemple dans des secteurs tels que les drones civils professionnels, les navettes de lancement de satellites suborbitaux, le projet d’avion à énergie solaire « Solar Impulse », la sécurité aérienne. Les entreprises suisses (de la start-up aux grands groupes) sont invitées au Conseil supérieur de l’attractivité dirigé par le président de la République. La coopération dans le domaine n u m é r i q u e o f f re d e g r a n d e s opportunités. Le franc fort renforce la nécessité6 pour les industries suisses – manufacturière (4.0) et financière (FINTECH) - d’investir davantage dans la digitalisation de leurs processus. Or, la France est l’un des rares pays à disposer d’acteurs qui couvrent toute la chaîne de valeur numérique. Signalons que des professeurs français de renom enseignent l’informatique dans les Écoles polytechniques fédérales, à Zurich comme à Lausanne. 1. Telles que la prolongation de la vie professionnelle, une plus grande participation des femmes à l’économie, un soutien scolaire plus marqué aux enfants issus de l’immigration, une plus grande ouverture à la concurrence notamment dans les secteurs de l’agriculture et des services (avec, par exemple, la privatisation de Swisscom détenue à 51 % par la Confédération), une rationalisation de l’offre de soins et une baisse des prix des génériques (par fixation à l’avance d’un forfait de remboursement). 2. Le Paquet Bilatéral I regroupe les Accords UE-Suisse entrés en vigueur en 2002 et portant sur la Libre Circulation des Personnes (ALCP), la reconnaissance mutuelle des normes techniques, la reconnaissance mutuelle des AOP-IGP (appellations d’origine et indications géographiques protégées) et des normes vétérinaires, les marchés publics, le transports aérien, les transports terrestres, la recherche. Une éventuelle dénonciation de l’ALCP impliquerait (« clause guillotine ») la caducité des six autres accords conclus entre l’UE et la Suisse dans le cadre du paquet dit « Bilatéral I ». 3. La Suisse est le 3e torréfacteur mondial. 4. En méthodologie « investisseur ultime ». La Suisse est le 8e récipiendaire des IDE français. 5. La BNS recense une estimation proche, de 66 100 salariés d’entreprises françaises en Suisse en 2014. Cette différence s’explique notamment par un périmètre plus large d’entreprises considérées (certaines de participation suisse minoritaire). 6. Une étude récente de l’association faîtière suisse des associations et des entreprises fournissant et utilisant les technologies de l’information et de la communication estime que les entreprises suisses auront besoin, d’ici à 2022, de 87 000 spécialistes IT. 143 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE La chambre pour le commerce et l’industrie France Suisse Partenaire de réussites La chambre pour le commerce et l’industrie France Suisse, fondée en 1894, est la plus ancienne chambre de commerce implantée en Suisse. Membre fondateur du réseau CCI France international, qui regroupe 111 chambres de commerce à l’étranger, elle n’a de cesse d’aider les entreprises françaises à réussir leur développement helvétique. Asie : Japon, Chine, Thaïlande, Vietnam, etc. S’implanter en Suisse signifie donc de s’assurer des débouchés commerciaux dans le monde entier. Enfin, la Suisse, c’est le 4e PIB du monde par habitant, un marché de consommateurs à fort pouvoir d’achat. ©MNY-JHEE - Fotolia.com Genève. orte d’une équipe de 11 collaborateurs rompus aux spécificités des deux marchés, français et suisse, la CCI France Suisse est une association de droit local d’utilité publique. Elle aide aussi bien les entreprises françaises à s’installer en suisse que les entreprises suisses à investir en France. Ces 500 entreprises adhérentes des deux pays représentent, au total, un réseau de plus de 1 500 contacts d’affaires. F D e s m i s s i o n s a u s e r v i ce d e l’investissement En tant qu’organisme bilatéral, la chambre a plusieurs missions. Premièrement, elle crée des liens et favorise des synergies en animant la communauté d’affaires franco-suisse par le biais de rencontres, forums, salons ou séminaires. Elle transmet les informations économiques pertinentes à son réseau. Deuxièmement, 144 elle est le relais opérationnel des entreprises qui veulent faire des affaires en Suisse ou en France. Enfin, la CCI assure la représentation institutionnelle de ses adhérents. Une économie performante et de nombreuses opportunités Mercredi 3 février dernier, la CCI organisait à Paris un séminaire intitulé « Réussir sur le marché suisse ». Il est vrai que le pays présente de nombreux facteurs d’attractivité. La libre circulation des personnes, des biens et des capitaux est devenue très facile et le cadre fiscal et fiscal y est très favorable. La Suisse a signé une trentaine d’accords de libreéchange. Outre les pays de l’Union européenne, on compte les pays d’Afrique du Nord : Maroc, Tunisie, Algérie, Égypte, ceux du MoyenOrient : Liban, Jordanie, Israël, d’Amérique du Sud : Mexique, Chili, Colombie, mais aussi de la zone Des offres adaptées L’une des principales prestations de la Chambre est l’approche test marché, qui étudie la réceptivité du marché aux produits/services proposés. Ce service sur mesure évalue les objectifs comme les moyens pour les atteindre grâce à de nombreuses prises de contact dans tout le réseau que compte la Chambre. En 2009, la CCI France Suisse a créé l’étude Booster Primo, à l’attention des primo-exportateurs, récompensée, en 2010 par le prix de l’innovation CCI France International. Par sa connaissance fine des marchés, la Chambre est en mesure d’effectuer du renseignement économique et d’aider les entreprises à étendre leur influence, en identifiant les contacts clés dans leur domaine d’activité. Enfin, pour les implantations de filiales, la Chambre peut s’emparer de la partie administrative : comptabilité et gestion fiscale, et même gestion salariale. Valoriser les réussites Aider les entreprises à s’implanter ne fait pas oublier les réussites qui sont mises en avant par la chambre, grâce aux Trophées CCIS, dont la 27e édition aura lieu le 12 février 2016. Ce prix récompense les sociétés dont les performances témoignent du dynamisme des relations économiques franco-suisse. ©DR Montreux Music and Convention Center. Montreux-Riviera, dynamisme économique et qualité de vie Bernard SCHMID, Directeur de Promove - Promotion économique de la région Riviera-Lavaux S’appuyant sur sa connaissance du territoire, sur son rôle d’interface public-privé et sur son réseau, l’association Promove accompagne les entreprises locales et tous les porteurs de projet désirant s’implanter dans la région. ©DR > ouvez-vous nous rappeler quelles sont les missions de l’association Promove dont vous êtes le directeur ? Promove est une association de droit privé à but non lucratif, dédiée au développement économique de la région Riviera-Lavaux, située au bord du Lac Léman. Ses membres sont les 12 communes de la région, ainsi que toute entreprise, personne privée ou association partenaire désireuse de soutenir le développement économique de la Riviera et de Lavaux, sur une base volontaire. A ce jour, l’association compte près de 300 membres. Son équipe opérationnelle est active sur les trois grands leviers de développement régionaux : la promotion économique exogène, le soutien à la réalisation de nouveaux projets à valeur ajoutée et la valorisation des atouts régionaux. Sa première mission est donc de favoriser l’implantation de nouvelles entreprises suisses et internationales ; de plus, Promove soutient les porteurs de projet, qu’il s’agisse de création d’entreprise, de manifestations ou d’infrastructures à P 146 valeur ajoutée ; enfin, nous nous impliquons, en tant que représentants du tissu économique, dans les dossiers de politique régionale, afin de développer l’activité de la région en s’appuyant sur ses atouts. Quel regard portez-vous sur la région Riviera-Lavaux ainsi que sur son potentiel de développement ? Cette région présente des atouts économiques importants : Montreux jouit d’une notoriété internationale et a développé une véritable expertise dans le domaine de l’accueil. Le tourisme est en effet l’axe économique principal, la région a toutefois su également se diversifier en s’appuyant d’une part sur son excellence dans le domaine de l’éducation, comme en témoigne la présence de nombreuses écoles internationales, d’autre part sur son expertise en matière de santé et de soins médicaux : elle compte plusieurs cliniques de haut niveau. L’accueil des étrangers fait donc partie de nos principales valeurs ! J’ajouterai que la Riviera lémanique est également un acteur majeur dans le domaine de l’organisation de congrès et d’événements internationaux. On pense évidemment au Festival de jazz de Montreux mais je pourrais également citer d ’ i m p o r t a n t e s m a n i fe s t a t i o n s comme le Sommet de la francophonie que nous avons accueilli en 2010, les conférences sur la paix en Syrie qui se sont déroulées en 2015 ou e n co re d e n o m b re u x co n g rè s professionnels. Notre culture est très internationale et notre capacité d’accueil s’appuie à la fois sur un savoir-faire régional et sur nos prestations hôtelières : nous disposons d’établissements de prestige, que mettent en valeur un microclimat et un cadre naturel exceptionnel, lié à la proximité du lac Léman et aux paysages de montagne qui l’entourent… sans oublier la présence des vignobles de Lavaux inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. J’ai coutume de dire que notre région offre cette opportunité unique : ne pas avoir à choisir entre travailler et vivre ! Le cadre exceptionnel et la culture internationale viennent en Suisse Quels sont les moyens mis en œuvre pour attirer et accompagner de nouvelles sociétés ainsi que pour favoriser les investissements ? Nous travaillons principalement avec les Chambres de commerce transfrontalières qui constituent nos partenaires prioritaires. Avec la CCI France-Suisse, bien évidemment… mais aussi avec les CCI SuisseAllemagne, Suisse-Italie, SuisseMoyen-Orient, Suisse-Russie ou encore Suisse-Belgique. Par ailleurs, un certain nombre de demandes nous parviennent de façon spontanée, et nous pouvons également compter sur des relais locaux, constitués de ressortissants étrangers vivant dans la région et possédant un important réseau dans leur pays d’origine. Ces personnes sont en effet la plupart du temps très impliquées dans le milieu économique et jouent en quelque sorte un rôle d’ambassadeurs. Quatre collaborateurs de Promove travaillent exclusivement au développement économique de la région. Leurs prestations sont totalement gratuites (le financement de l’association étant assuré par les communes, les membres et le Canton de Vaud) et ils se tiennent à disposition pour renseigner tout porteur de projet qui envisagerait une implantation dans notre région. Nous pouvons aider à établir un business plan conforme aux usages suisses et les renseigner dans tous les domaines juridiques, fiscaux et financiers. Notre équipe est également en mesure de les orienter, en fonction de la nature de l’activité et des besoins, vers les 300 membres que compte l’association. Unissant autour d’un objectif commun tant les autorités que le tissu économique et l’ensemble des partenaires concernés, notre association joue un rôle d’interface entre le privé et le public : grâce à son réseau très dense, elle est en mesure d’intervenir comme facilitateur auprès de l’administration. Compte tenu du contexte économique européen, comment se présente l'année 2016 ? La situation dépasse le contexte régional et nous sommes tous soumis aux mêmes contraintes. Au début de l’année passée, nous avons été très inquiets au sujet de la hausse du franc suisse par rapport à l’euro. Néanmoins, le segment qui est le nôtre est très ouvert : nos contacts sont très diversifiés, venant aussi des Etats-Unis ou d’Asie. C’est cette ouverture mondiale qui constitue notre force car elle nous permet de pondérer ces éléments conjoncturels. Notre région est attractive en elle-même et, en combinaison avec les atouts traditionnels de la Suisse, présente un fort potentiel pour qui souhaite développer ses affaires. Le World Economic Forum ne vient-il pas de classer à nouveau la Suisse au premier rang de la compétitivité mondiale ? Qualité de vie et compétitivité internationale se conjuguent ici. Nous sommes donc très positif quant à l’attrait d’un tel positionnement, à l’avenir également. ©DR effet parfaitement se combiner avec un impressionnant dynamise économique. Pour vous donner quelques exemples emblématiques, Vevey abrite le siège mondial de Nestlé tandis que la société Merck Serono, un des leaders mondiaux de la biotechnologie, exploite le plus grand bio-générateur au monde au sein d’un complexe de très haute technologie situé sur les collines dominant notre lac. Enfin, la proximité de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne est également un important facteur de développement. Par ailleurs, rappelons que la Suisse occupe une position centrale au sein de l’Europe, avec des infrastructures de transport (autoroutes, trains, aéroports…) assurant son accessibilité dans de très bonnes conditions. La région Riviera-Lavaux qui se situe au cœur de la Suisse francophone en bénéficie : nous sommes à une heure de route de Bern, la capitale, et de l’aéroport de Genève. En ce qui concerne le potentiel de développement du territoire, nous ciblons des activités à haute valeur ajoutée : en effet, compte tenu de la topographie des lieux, entre lac et montagne, nous disposons de peu de réserves foncières. Nous ne pouvons donc pas envisager d’implanter des industries lourdes nécessitant de grandes surfaces planes. En revanche, nous sommes potentiellement en mesure d’accueillir des unités de recherche & développement, des sièges administratifs ou des entreprises de services travaillant à travers toute l’Europe et qui rechercheraient la sécurité, la stabilité, la culture de l’innovation, l’ouverture internationale et la proximité des hautes écoles que l’on peut trouver en Suisse. > Lac Léman et Lavaux, patrimoine mondial de l’UNESCO. Promotion économique de la région Riviera-Lavaux rue de la Gare 2 - 1820 Montreux - Tél. : +41 21 963 48 48 - Fax : +41 21 963 80 65 www.promove.ch - [email protected] 147 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE Platinn, plateforme de soutien aux innovations des start-ups et PME Christoph MEIER, Directeur de l’association ©DR En 2009, les cantons romands se sont dotés d’une nouvelle organisation de soutien aux start-ups et PME. Baptisée platinn, cette structure remplace l’ancien CCSO, qui visait déjà à soutenir les entreprises dans leur création et leur développement. réée il y a six ans, l’association Platinn est une plateforme d’innovation. Quels sont ses activités et ses domaines de compétences ? Cette plateforme est dédiée aux start-ups et aux petites et moyennes entreprises. L’association est basée à Fribourg, en Suisse et nous fonctionnons en réseau. Tous les cantons ont une antenne de proximité et c’est primordial pour les PME. Les sociétés qui font appel à nous sont jeunes et elles se dirigent vers une industrialisation ou pré-industrialisation de leurs produits. Pour répondre à leurs besoins, nous avons mis en place plusieurs activités. Nous les soutenons dans leur projet d’innovation d’affaires et depuis deux ans, nous mettons l’accent sur le financement C ©Focus platinn L'entreprise Frewitt SA. des entreprises. Dans ce sens, à travers notre plateforme matchINVEST (www.matchinvest.ch) lancée il y a quelques mois, nous permettons la rencontre entre investisseurs et PME. Nous avons d’un côté des entreprises qui ont une activité depuis moins de cinq ans et de l’autre des entreprises bien établies. Nous ne sommes pas focalisés sur un secteur industriel en particulier, l’innovation englobe une multitude de technologies et de secteurs industriels, à savoir la biologie, la mécanique, l’horlogerie… Ces six dernières années, nous avons coachés plus de mille entreprises. Notre équipe est composée de quarante coachs accrédités qui sont chacun spécialisés dans un domaine particulier. Certains ont une forte expérience industrielle, d’autres sont experts du développement des affaires, de la stratégie, du marketing, de la distribution et certains coachs sont orientés finances, quand d’autres peuvent répondre aux besoins de partenariats et de collaboration. Monsieur Meier, vous déclariez, lors de la présentation officielle de la plateforme d’innovation Platinn, le 28 mai 2009, que « si les idées ne manquent pas au sein des PME, la capacité pour elles de la réaliser fait souvent défaut ». Comment Platinn pallie-t-elle ce problème ? Quelles avancées constatezvous depuis sa création ? Oui c’est juste et cela se confirme aujourd’hui, nous avons plus d’idées et d’innovations d’affaires que de moyens de les réaliser. Maintenant une société est toujours confrontée à une évolution très dynamique, elle crée un nouveau produit, elle doit l’industrialiser, elle veut aller sur les marchés internationaux, elle retombe dans une phase de consolidation où elle se retrouve avec des concurrents qui proposent des produits similaires et elle doit se renouveler. Les PME ont des étapes, des transitions, de cycles de vie qui sont assez typiques. Et beaucoup d’entrepreneurs vivent pour la première phase, celle de transition, par exemple d’une industrialisation vers une expansion internationale. Et c’est à ce moment qu’elles doivent développer de nouvelles compétences. Le coaching Platinn aide à surmonter cette barrière. Le coaching c’est une combinaison quelque part entre formation, transferts de bonnes pratiques et conseil à l’industrie. Suisse C’est donc le premier défi à relever. Le second, c’est le financement de ces transitions. Car une expansion ça a un coût. Il faut donc des moyens financiers. Platinn intervient dans l’aide à la R&D (recherche et développement). Comment participez-vous à cette R&D ? Nous avons ainsi mis en place un service de coaching qui identifie les besoins en matière de financement, nous avons également cette nouvelle plateforme matchINVEST, qui permet la rencontre entre investisseurs et PME. matchINVEST fonctionne bien, nous observons des centaines de mises en relation chaque mois. Selon une récente enquête, nos clients lèvent chaque année plus de cinquante millions de fonds, ce qui est plutôt satisfaisant. Mais les entreprises ont encore des besoins. La phase d’industrialisation a un coût : fabriquer un produit, mettre en place un dispositif commercial, nécessitent des moyens importants et aujourd’hui malheureusement les investisseurs se font rares. Au sein de Platinn, nous cherchons donc des pistes supplémentaires qui nous permettraient de remédier à ce problème. Une de nos idées, est de trouver un partenaire commercial, qui pourrait être un fournisseur, un client, un intermédiaire, qui souhaiterait investir dans cette phase critique pour en tirer un profit de synergie à plus ou moins long terme. Comment voyez-vous l’évolution de Platinn ? Autour de l’innovation d’affaires, il y a plusieurs axes majeurs qui dominent toute la discussion : l’accès au marché et l’accès au capital. Nous devons donc agir en fonction de ces vecteurs. La recherche de clients pilotes, de financements pour les sociétés, sont des défis majeurs pour nos entreprises et donc pour l’association. La troisième chose à prendre en compte concerne le développement des ressources internes au sein des sociétés. Chaque nouvelle innovation nécessite de nouveaux profils de compétences. Il faut donc innover dans l’organisation, la gestion, et Platinn s’implique dans la recherche de ressources internes. Enfin, je dirai que le quatrième vecteur essentiel, est la recherche de partenariats. Cette activité est relativement complexe, mais elle est essentielle. Le défi auquel nous allons devoir répondre est le développement de l’innovation au sein de la société. Alors que la PME travaille son produit, elle lance en parallèle un projet d’innovation. Alors comment organiser ces deux activités sans déranger le travail quotidien ? Un autre élément auquel il faut faire face, c’est l’organisation. Les sociétés doivent s’adapter, aligner leur organisation et gérer les questions stratégiques. Ce sont ces thèmes : innovation, organisation, stratégie, q u i d o m i n e n t a u j o u rd ’ h u i le s préoccupations de nos petites et moyennes entreprises. 149 Groupe Meninx - Siège social : Meninx AG Poststrasse 1, 8956 Killwangen, Suisse Tél. : +41 56 544 72 90 • Email : [email protected] • Internet : http://www.meninx.net STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE Plateforme logicielle Semeion : passerelle vers la compétitivité Jean-Christophe GODINAUD, Président du Groupe Meninx ©DR En B2B comme en B2C, l’heure est aux gages de compétitivité. La plateforme logicielle Semeion de Meninx a séduit en ce sens, nombre d’acteurs de secteurs variés. Qu’est-ce que Semeion ? Semeion est une plateforme logicielle qui simplifie, personnalise et optimise les tâches quotidiennes, enrichit les processus métier et structure la communication avec les clients. Avec Semeion, nous gérons les flux et processus d’une façon contrôlée et sécurisée, nous planifions, nous surveillons l’infrastructure, nous informons les utilisateurs, nous gérons les stocks et les prix, nous créons et archivons les documents et plus encore. Semeion collecte toutes les données opérationnelles et fournit tous les rapports, statistiques et indicateurs de performance souhaités afin que les entreprises soient plus performantes. Quelle est sa valeur ajoutée ? C h a q u e e n t re p r i s e c h e rc h e à diminuer ses frais opérationnels. Nous développons Semeion depuis 2007 pour les aider. Cette plateforme logicielle révolutionnaire fournit une technologie moderne, combinée à des services professionnels talentueux, pour rationaliser, industrialiser, simplifier et individualiser leur fonctionnement : collaboration entre les personnes, communication interne et externe, automatisation et suivi des flux métier. Résolvant les challenges complexes et nouveaux des entreprises, Semeion constitue l’outil idéal pour diminuer, dans le cadre d’une approche transversale, ces frais et ainsi améliorer la compétitivité. Comment mettez-vous cet outil en place ? Nous aidons nos clients à conceptualiser leurs besoins de changement. Nous élaborons la stratégie de simplification des processus en mutualisant les ressources logicielles, matérielles et humaines. Forts d’un audit précontractuel, nous nous imprégnons de la culture et des enjeux de l’organisation. Puis, contractuellement, nous intégrons Semeion et concrétisons le projet d’optimisation en collaboration avec le client. De fait, quel que soit le profil, la taille et le secteur de l’organisation, notre intervention s’avère plus rapide et moins coûteuse car fondée sur une technologie développée intelligemment pour résoudre tous types de challenges présents et futurs. Nous considérons que Semeion est très différente des logiciels «prêts à l’emploi», développés spécifiquement ou modulaires car ces derniers ne résolvent que des problèmes clairement identifiés. Ils font ce que les développeurs ont programmé ! Semeion innove et concrétise ce que nos clients escomptent. Nous fournissons du sur-mesure, dans une logique de «compliance», sans crainte des risques d’obsolescence liés aux évolutions technologiques et réglementaires. Pourquoi est-il essentiel à la communication de l’entreprise ? Notre logiciel optimise les moyens de communication en sécurisant et en automatisant tous les processus métier, sources des interactions avec les clients finaux, y compris la gestion des données et des documents, la production omni canaux et de masse des documents, sans oublier l’enrichissement des fonctions des progiciels de gestion intégrée (ERP) et de gestion de la relation clients (CRM). Ainsi structurée, la communication de l’entreprise devient le vecteur essentiel d’une activité efficace et ambitieuse, la clé du succès. Vos références, privées comme publiques, peuvent-elles convaincre start-up et PME ? Deux de nos meilleures références sont des Etats Suisses. Comme toute entreprise, ils ont initié un programme ambitieux de réduction des dépenses et d’amélioration de la qualité des services : plus de qualité et de sécurité ; plus de transparence et une meilleure anticipation des changements. Ils ont choisi Semeion, ayant compris que l’outil leur apportait flexibilité et pérennité. Mêmes avantages pour les entreprises privées souhaitant répondre de façon personnalisée aux attentes de leurs clients, tout en rendant des services attractifs à forte valeur ajoutée. Automobile, finance, télécommunication, énergie, éducation, logistique, prestation de services sont les secteurs de nos clients. L’optimisation s’avère certes d’autant plus facile que les volumes sont importants. Start-up et PME rencontrent cependant les mêmes challenges que les grandes entreprises : gestion de la collaboration, de la communication, de la qualité, des cycles de vente, des contrats, des incidents et des processus notamment. A nous d’adapter Semeion à chaque entité, en fonction de la plus-value apportée. Semeion, dans un Cloud à défaut d’une infrastructure informatique adaptée, offre les mêmes fonctions essentielles, avec l’agilité informatique en plus. En quoi votre philosophie rejoint-elle le souci général de compétitivité ? La meilleure solution pour faire face à une concurrence mondiale parfois déloyale est, à notre sens, l’amélioration simultanée de la qualité, de la sécurité, du support, des moyens de promotion. Avec Semeion, nos clients gagnent des parts de marché même si le prix de leurs services reste supérieur à celui de leurs concurrents. Nous aidons les entreprises de toutes tailles et de tous secteurs à disposer des outils de planification d’un futur brillant. 151 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE Encourager l’entrepreneuriat Stéphane SCHNEIDER, Directeur de la section suisse des conseillers du commerce extérieur de la France ©DR Pour s’implanter en Suisse, il faut tenir compte de la diversité d’un pays qui compte 26 cantons et trois langues. Cependant, le dialogue social y est apaisé et l’économie reste compétitive. Les CCEF, par leur connaissance du secteur, conseillent les entreprises et encouragent les jeunes entrepreneurs. C omment l’économie suisse a-t-elle évolué en 2015 ? L’économie suisse a connu une année contrastée. En début d’année, la Banque Nationale suisse a supprimé le taux plancher de 1,20 franc suisse pour 1 euro pour laisser le franc suisse flotter. Il a rapidement atteint la parité avec l’euro. Cela a créé un ©DR 152 choc important pour les PME, qui exportent pour 60 % dans la zone Euro, ainsi que pour le tourisme. De plus, le commerce intérieur a un peu souffert, notamment dans les zones frontalières, car les Genevois ont davantage acheté en France et les Helvètes du Nord en Allemagne. Cependant, l’économie suisse reste en bonne santé. Le taux de chômage progresse de 0,3 %, pour atteindre 3,7 % à fin décembre, ce qui est relativement faible par rapport à ses voisins. Pour vous, quels sont les facteurs de l’attractivité suisse ? Un des points forts est la flexibilité du Suisse marché de l’emploi et, plus globalement, du dialogue social. Lorsque le franc suisse est devenu équivalent à l’euro, dans beaucoup d’entreprises, les salariés ont accepté de passer de 42 heures à 46 heures de travail par semaine sans augmentation de salaire, pour éviter la délocalisation. Ce type d’accord dure en général de six mois à un an, avant réévaluation de la situation. Cela montre la volonté d’un dialogue social, où chacun comprend l’intérêt de l’autre. Un autre facteur est la formation. Les entreprises s’y impliquent par le biais de l’apprentissage et de l’alternance. Enfin, un élément clé est la stabilité de la politique réglementaire suisse ; il n’y a pas de changement de loi ou de décret ou de revirement après chaque élection nationale. et a trois langues officielles : l’allemand, le suisse et l’italien. Ce n’est pas parce que l’on a des bureaux à Genève que l’on peut travailler dans toute la Suisse. Le gouvernement fédéral a ses compétences, mais les cantons aussi et ils sont très attentifs au maintien de leurs prérogatives. Il faut donc s’informer au niveau cantonal, pas seulement national. Les particularités locales s’exercent aussi au niveau des types d’activité. Les entreprises chimiques sont principalement situées dans le bassin rhénan, près de Bâle, le secteur de l’horlogerie se trouve dans le Jura suisse tandis que la finance est implantée majoritairement à Zurich. Une fois ces particularités prises en compte, il est très agréable de faire des affaires dans ce pays. Quels sont les points importants à connaître pour s’implanter en Suisse ? Il faut tenir compte de sa diversité. La Suisse est constituée de 26 cantons Quels sont les événements organisés par les CCEF ? Notre événement phare, c’est le prix du jeune entrepreneur. C’est un concours organisé entre cinq écoles suisses : l’université de Saint-Gall, l’École polytechnique fédérale de Zurich, l’École polytechnique fédérale de Lausanne, l’École hôtelière de Lausanne et l’université du Tessin. Ce prix récompense le meilleur projet entrepreneurial en lien avec la France. Le jury délibère à l’ambassade de France. Le prix 2016 sera remis le 9 juin par l’ambassadeur lui-même. Par la suite, selon les éléments ou aspects qui sont à creuser dans le projet, les CCEF vont accompagner la jeune entreprise dans son développement : prises de contact, peaufinage du business plan, mise en relation avec les investisseurs, etc. Enfin, la convention tripartite par secteur d’activité établie avec Business France et les pouvoirs publics est une manière de nous rapprocher, de mutualiser nos moyens et de partager nos informations, donc de mieux travailler ensemble. 153 Rue Ferdinand-Hodler 13 c/o Sofirege 1207 Genève - Suisse - Tél : +41 79 137 86 23 Email : [email protected] SPÉCIALISTE DE L’ASSISTANCE TECHNIQUE À L’INTERNATIONAL, DU PORTAGE SALARIAL ET DE LA MOBILITÉ INTERNATIONALE www.easyexpat-international.com STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE Faciliter le recrutement à l’international ©Vic Polinelli Sébastien BUDZINSKI, Directeur Général de Easy Expat International P Easy Expat International met à disposition, de ses clients, des experts, spécialistes et autres ingénieurs envoyés en mission sur des projets industriels et dont EEI gère la mobilité internationale. Son Directeur Général, Sébastien Budzinski, nous présente les prestations EEI. ouvez-vous nous présenter Easy Expat International ? Easy Expat International est une entreprise suisse, spécialiste de l’expatriation et des solutions en ressources humaines, dédiée aux entreprises du secteur industriel souhaitant faire appel à des experts pour des missions à réaliser en France, en Europe et à l’International. Nos clients sont des entreprises des secteurs de l’environnement, de l’énergie, de l’industrie lourde, de la cimenterie, du ferroviaire, du BTP, de l’infrastructure. Grâce à une cvthèque riche de profils spécialisés, nous recherchons et mettons à disposition de nos clients des experts ayant les compétences techniques recherchées pour contribuer au succès de leurs projets industriels. Nous permettons ainsi aux entreprises de faire appel aux compétences nécessaires à la réalisation d’un projet sans avoir à les embaucher. Le domaine d’activité phare d’Easy Expat International est l’assistance technique. Cette prestation consiste à mettre à disposition de nos clients des collaborateurs spécialisés. L’expertise peut-être orientée sur le marché français et/ou international. L’assistance technique englobe deux de nos prestations clés : le portage et le recrutement. Nous proposons des prestations de portage salarial pour nos clients ayant identifié l’expert nécessaire à la réalisation de leur projet. Easy Expat International contractualise le spécialiste travaillant pour son client. L’expert est salarié d’Easy Expat International le temps de sa mission. Nos prestations incluent la prise en charge de toutes les dispositions relatives à la légalisation de nos ex p e r t s d é t a c h é s . N o u s contractualisons, légalisons en obtenant visa et permis de travail, payons les charges sociales et taxes applicables dans le pays où est détaché notre expert. C’est grâce à notre réseau étoffé de partenaires fiables à travers le monde que nous sommes en mesure d’offrir ces prestations. Quel est le profil des collaborateurs qui souhaitent travailler à l’étranger ? Les collaborateurs auxquels Easy Expat International fait appel sont des ingénieurs, techniciens, managers reconnus dans leur domaine d’activité. Il faut noter qu’il est plus délicat de recruter dans la tranche d’âge 30-40 ans qui, avec de jeunes enfants, a plus de difficultés à s’expatrier. L’âge moyen de nos experts est de 50 ans. Nous faisons également travailler des experts retraités. L’avantage majeur que nous proposons à ces derniers c’est un statut plus protecteur que celui qu’offrent les structures individuelles comme autoentrepreneur ou Eurl. En effet, si ces statuts sont suffisants en France pour bénéficier d’une couverture sociale et RC, ils s’avèrent inadaptés à l’étranger. Nos prestations sont en effet plus adaptées au secteur industriel et à l’expatriation que ne le sont celles des statuts d’indépendants. Quelles sont les principales difficultés que rencontrent les entreprises françaises qui souhaitent recruter des collaborateurs étrangers ? En France, il est assez complexe d’établir un contrat de travail à une personne de nationalité étrangère. Bien qu’affiliée à l’Urssaf pour les prestations de services de nos experts réalisées sur le territoire français, Easy Expat International est une société suisse redevable du droit du travail suisse. C’est cette nuance qui offre à nos clients la flexibilité optimale nécessaire, entre autres, au recrutement de collaborateurs étrangers. Nous faisons ainsi office de facilitateurs pour ces entreprises françaises qui souhaitent recruter du personnel étranger. 155 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE La gestion de patrimoine en Suisse Alexandre VALLADIER, Fondateur de A&M, Global Family Office SA ©DR A&M propose ses services dans deux domaines : la gestion de fortune et d’autre part, Family Office pour répondre aux besoins de riches familles. rrivé en Suisse en 2002, vous vous êtes spécialisé dans la gestion de fortune et avez fondé en 2011, A&M, Global Family Office SA. Quels sont les domaines d’actions de votre société ? Il faut savoir que la Suisse est une place de gestion de fortune majeure dans le monde. Il y a à peu près 5000 milliards d’actifs qui sont gérés dans le pays aujourd’hui. J’ai ainsi voulu répondre au besoin en créant A&M, il y a quatre ans. Nous sommes deux associés et cinq employés. Nous faisons de la gestion de fortune, donc une activité de gérant indépendant régulé par la banque centrale suisse. Mais nos activités ne s’arrêtent pas là. Il y a toute une partie Family Office. Ce sont des services rendus à de riches familles, en matière de structuration du patrimoine, donc le conseil légal, l’optimisation fiscale, l’assistance pour le financement de résidence secondaire en dehors d’Europe…Nous nous chargeons de leur trouver les banques qui vont les financer, nous créons les sociétés en prenant en compte l’optimisation fiscale puis nous leur obtenons des crédits grâce à nos partenaires bancaires. A Vous avez-vous-même vécu au MoyenOrient, à Bahreïn, aux Emirats Arabes Unis, à Oman, mais aussi en Europe. Est-ce cette clientèle étrangère que vous conseillez aujourd’hui ? Notre clientèle est effectivement étrangère, ce sont de riches familles du Moyen-Orient et d’Europe de l’Est pour l’essentiel. Nous les appelons les Ultra High Net Worth Individual (UHNWI). Ces familles ont besoin d’expertise dans l’investissement de leur argent. Mon travail consiste à faire des affaires pour mes clients : j’achète, je vends des titres, des obligations, des actions, sur les comptes des clients directement ouverts dans des institutions financières, telles que Barclays, UBS, la Société Générale. Notre rôle est également de donner un service clé en main à notre clientèle étrangère. Même si nous sommes basés en Suisse, notre clientèle a un appétit pour les investissements en France. Il faut savoir qu’aujourd’hui, nous pratiquons plus de 70 millions d’euros de crédits pour nos clients en France, via nos partenaires bancaires. Qu’attendent vos clients ? Devez-vous vous adapter en fonction de la zone géographique d’où proviennent vos clients ? Chaque pays, chaque zone géographique a une approche différente quant à la nature de ses investissements. La clientèle du Moyen-Orient cherche davantage à bâtir une relation de longue durée, avec un gain en capital raisonnable, alors que la clientèle d’Europe de l’est, cherchera plus le gain important, immédiat et elle sera moins fidèle. La clientèle européenne quant à elle, est plus éduquée, nous nous retrouvons face à des personnes qui pensent en savoir davantage que les professionnels. A nous de nous adapter. Vous êtes spécialisé dans le modèle du Family Office. Pouvez-vous nous en expliquer le principe ? Nous essayons de promouvoir effectivement le modèle du Family Office. Si certaines grosses fortunes ont leur propre Family Office, d’autres n’ont pas forcément envie d’avoir une charge, des bureaux, du staff, et vont préférer faire appel à des sociétés indépendantes comme la nôtre. Nous devenons alors leur chief financial officer, CFO. Nous sortons du cadre des marchés financiers et nous allons nous focaliser sur leurs investissements réels, les aider à faire des audits, des consolidations d’acquis. Notre rôle est également de les accompagner à leurs rendez-vous d’affaires et d’analyser leurs potentiels futurs investissements. Comment votre société se distingue des autres sociétés de gestion d’actifs, de gestion de patrimoine ? Vous savez dans notre business, vous avez deux types de structures : vous avez les grandes banques, les banques d’affaires, d’investissements, privées…ce que j’appellerai l’industrie. Et vous avez les boutiques, comme nous. Nous offrons un service personnalisé au client. Il y a effectivement beaucoup de structures qui font la même chose que nous en Suisse, en Europe, et même aux Etats-Unis. Le Family office est un secteur en pleine croissance, mais le marché est suffisamment important pour que tout le monde y trouve sa place. Quelle est votre stratégie sur le moyen et long terme ? Nous avons deux activités. La première est la gestion de fortune qui est régulée par la Banque Centrale suisse. Nous allons la poursuivre parce que nous considérons que gérer l’argent des clients c’est la base de la confiance. D’un autre côté, nous pensons que l’activité de gérance simple a vécu et qu’aujourd’hui la partie Family Office doit vraiment être la partie principale. Nous sommes des consultants de gestion de fortune, d’investissement et notre expertise est intellectuelle, elle est destinée à simplifier la vie du client. Il existe de plus en plus de gens riches dans le monde avec des problématiques de plus en plus complexes. Ils ont donc besoin d’aide et de technicités. Pour moi, la partie Family Office va connaître un grand bond et nous serons présents pour répondre aux besoins des clients. 157 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE TeamWork management : l’ingénierie informatique au cœur des entreprises internationalisées Philippe REY-GORREZ, Président ©DR Digitalisation oblige, les services d’ingénierie informatique sont devenus essentiels aux entreprises d’envergure internationale. Un domaine dans lequel TeamWork management accompagne ses clients. n quoi votre offre globale d’ingénierie permet-elle d’optimiser les décisions des entreprises ? La particularité de TeamWork est d’associer des capacités sur les aspects fonctionnels et technique de manière intégrée ou modulaire. Le niveau d’expertise de nos consultants, leur complémentarité permettent d’aborder les besoins clients aussi bien à partir de besoins métiers qu’à travers des besoins d’architecture et d’infrastructure. Nos prestations vont du conseil, à la réalisation du projet jusqu’au maintien en conditions opérationnelles sur l’ensemble du périmètre en mode 24 / 7. E Quelle est la typologie de vos clients ? Nos clients sont des sociétés internationale actives dans les secteurs du luxe, de la pharmacie, de la chimie, de la distribution, de la banque, de l’industrie de machines ou encore de l’agroalimentaire. Nous leur fournissons une capacité d’accompagnement local au plus près de leurs centres de compétence ou de décision, mais aussi une capacité de déploiement dans le monde. En quoi vos partenariats stratégiques sont-ils un atout ? Nos partenaires, comme SAP, Oracle, IBM, EMC, Cisco, Lenovo, etc.. disposent eux-mêmes d’une présence mondiale. Ces partenariats permettent d’apporter une réponse en rapport au niveau d’exigence de nos clients. Ceci nous 158 Suisse confère donc en particulier la possibilité de traiter en simultané des sujets relevant à la fois de la sphère technique et de la sphère applicative. Pourquoi avoir lancé en 2015 TeamWork Architecture Solutions (TWAS) ? L’enjeu était de nous mettre en capacité de réaliser le design, l’architecture et le négoce de plate-formes matérielles hardware (machines, serveurs et baies de stockage) et software (système d’exploitation, virtualisation, sauvegarde, stocka) en faisant le lien avec les couvertures applicatives. Quelle stratégie poursuivez-vous en Asie avec l’ouverture récente de votre Bureau à Shanghai ? Nous disposions déjà d’une plateforme de conseil technique sur Hô-Chi-Minh, au Vietnam, et d’une plateforme fonctionnelle basée à Singapour. Notre bureau sur Shanghai nous permet désormais de traiter les demandes spécifiques de notre clientèle en Chine. Nous avions une réelle volonté de nous adapter aux besoins de notre clientèle chinoise. Quelles sont vos perspectives de développement ailleurs dans le monde ? À moyen terme, nous ouvrirons un bureau en Inde pour y accompagner nos clients et disposer d’une autre source d’approvisionnement en compétences sur nos prestations globales. À plus long terme, nous projetons d’assurer notre présence sur les continents africain et sud-américain. Cela, tout en renforçant nos positions en Europe : le marché allemand est important et l’Espagne, comme le Portugal pourraient nous permettre aussi de proposer des ressources qualifiées et encadrées à des conditions compétitives. 159 160 ©Moneky Business - Fotolia.com STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE Des valeurs partagées Norbert FOERSTER, Directeur de l’Institut international de Lancy (IIL) et Président de la Fédération Suisse des Écoles Privées (FSEP) ©DR L’Institut International de Lancy a fondé sa pédagogie sur le respect des cultures et des croyances de chacun. Norbert Foerster, son directeur, nous présente son projet pédagogique. ouvez-vous nous parler de l’historique de l’Institut International de Lancy ? À l’origine, l’Institut International de Lancy était un pensionnat, fondé en 1903 par les religieuses de la Congrégation des Sœurs de SaintJoseph. Son nom a changé pour rendre compte de l’évolution de son projet pédagogique, mais l’école fait toujours partie du réseau des écoles de Saint-Joseph. En 1927, pour la première fois, les élèves passent les épreuves du baccalauréat français. Dans les années 1980, l’école devient un externat et intègre l’enseignement de l’anglais dès les plus jeunes âges. En 2001 et 2005, les sections primaires et secondaires anglaises ont été créées. Enfin, en 2009, l’IIL a reçu l’autorisation d’enseigner le programme du diplôme du baccalauréat international et est devenue une école du monde de l’IB. L’Institut est désormais la plus grande école catholique de la Suisse et la troisième école privée de Genève. P Quelle est la philosophie de l’Institut ? Une des particularités est son caractère international, multiculturel et multireligieux. L’Institut accueille 1 500 élèves de 90 nationalités différentes. Dans le groupe francophone, il y a une forte proportion d’élèves catholiques qui peuvent d’ailleurs faire leur catéchèse dans l’établissement. Dans le groupe anglophone, de nombreuses religions sont représentées. Dès le niveau secondaire, nous avons introduit un enseignement qui présente les principales religions du monde, car le respect de toutes les religions est important pour nous. Nos élèves évoluent dans un esprit de paix, de tolérance et d’ouverture. Des activités culturelles ainsi que des voyages où se mélangent groupes anglophones et francophones sont également le moyen de favoriser le bien-vivre ensemble. C’est notamment le cas lors de nos séjours de cohésion qui durent trois jours et où les élèves apprennent à mieux se connaître. Nous cherchons non seulement à délivrer un enseignement, mais aussi à promouvoir nos valeurs éducatives auprès des familles. Quelles sont vos spécificités pédagogiques ? Les effectifs par classe sont 30 % inférieurs à ceux de l’Éducation nationale. Les langues sont un de nos objectifs prioritaires. Nous proposons un enseignement par petits groupes en tenant compte des besoins spécifiques de chacun. Notre ambition est d’enseigner la langue dans toutes ses dimensions : affectives, culturelles et sociales. L’enseignement en anglais de certaines disciplines — arts, sports, musique et sciences humaines dans le primaire, sciences dans le secondaire — offre aussi l’occasion d’approfondir les compétences linguistiques des élèves francophones. Outre l’accent particulier mis sur le français et l’anglais, les élèves peuvent apprendre l’allemand, l’italien, l’espagnol ou le chinois. Une partie de nos familles sont amenées à changer de pays régulièrement, raison pour laquelle il est important que leurs enfants maîtrisent plusieurs langues. Notre école se positionne en leader de l’innovation pédagogique appliquée à l’enseignement, plus particulière- ment dans le domaine des nouvelles technologies. Cette approche renforce l’efficacité des apprentissages et contribue également au développement de compétences indispensables pour le parcours académique et professionnel de nos élèves. En plus d’avoir été la première école en Suisse à mettre en place un One-to-One iPad programme (chaque élève est doté d’un iPad), IIL a récemment formalisé sa vision de l’application de la technologie à l’éducation au travers d’un Livre blanc mis à la disposition des enseignants, des parents et de tous ceux qui accompagnent l’Institut dans sa réflexion. Outre l’enseignement, quels sont les autres services proposés par l’école ? L’Institut propose une large palette d’activités extrascolaires : une dizaine de disciplines sportives, des cours de musique, de dessin et de peinture, de théâtre, etc., un service de garderie et d’étude et un service de transport scolaire pour faciliter la vie des familles. Quels sont les projets développés par l’école ? Nous développons nos infrastructures en construisant une nouvelle salle de gym, un amphithéâtre, un second restaurant scolaire, des salles de classe ainsi que des espaces ouverts (open space) qui favorisent l’échange et le travail collaboratif des élèves. Avec cette approche, l’école n’est pas seulement un lieu d’étude, mais aussi un véritable lieu de vie. www.iil.ch 161 ©Pressmaster - Fotolia.com STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE « Nous formons les futures personnes influentes du monde » Thomas SCHÄDLER, Directeur du Collège du Léman, à Genève ©DR Ecole internationale d’enseignement privé, le Collège du Léman se situe sur les rives du lac Léman, à Genève. Un cadre idyllique pour un enseignement d’excellence. Rencontre avec son Directeur, Thomas Schädler. ©DR et multinationale d’entreprise. Le Collège du Léman a également toujours été attrayant pour les familles suisses et françaises locales. Nos élèves reçoivent une éducation de grande qualité et, comme le prouve le travail effectué avec des professeurs et élèves de différents pays, une expérience de vie qu’ils auraient du mal à trouver ailleurs. Ce qui sera extrêmement avantageux pour leurs carrières futures : une compréhension et une appréciation d’autres cultures et nationalités ainsi que la confiance nécessaire pour maîtriser et surmonter les problèmes de compétences linguistiques. onsieur Schädler, vous êtes le Directeur du Collège du Léman, une école internationale d’enseignement privé située à Genève. Pouvez-vous nous présenter votre école ? Le Collège du Léman est un externat et un pensionnat bien établi et de renommée internationale sur les rives du lac Léman. Il accueille une communauté de près de 2000 élèves et 250 professeurs. Nos programmes bilingues anglais-français permettent de répondre aux besoins de chaque enfant de la meilleure façon. De mon point de vue, les écoles ont deux responsabilités fondamentales qui peuvent sembler contradictoires mais qui sont aussi complémentaires et mutuellement bénéfiques. Tout d’abord, elles sont censées transmettre un savoir collectif et les valeurs traditionnelles de la société. En ce sens, elles sont conservatrices, M 164 étant obligées de préserver les croyances établies de la civilisation. Cependant, les écoles et les établissements universitaires sont aussi des lieux laissant la place à l’innovation et au changement, où les questions importantes de l’époque sont posées, et où la recherche et l’expérimentation ont toute leur place. De tels engagements exigent d’aller au-delà des limites et d’être avant-gardiste. Pour le Collège du Léman, ces deux responsabilités sont importantes et nous assurent que les éléments conservateurs et progressistes sont réunis dans une approche productive et mutuelle de soutien, de sorte qu’ils coopèrent pour le bien de chaque élève. Le Collège du Léman, comme école internationale à Genève, est une caractéristique importante de l’infrastructure de cette ville mondiale servant la communauté diplomatique Ecole d’excellence, comment votre établissement se distingue-t-il des autres campus ? Quelle est la vision et quelles sont les missions de l’équipe enseignante du Collège du Léman ? Notre programme, nos méthodes d’enseignement, la diversité de notre programme et de notre personnel, sont soigneusement imbriqués pour aider à éduquer et former les futures “personnes influentes” du monde. Nous formons nos élèves à être consacrés comme citoyens à l’échelle mondiale, désireux d’apporter une contribution profonde et de longue durée à la société. Les élèves du Collège du Léman ont pour habitude de résoudre efficacement des problèmes ; ils prennent le temps de réflexion nécessaire pour cela, apprécient les différentes perspectives et cherchent un terrain d’entente avec ceux qu’ils rencontrent. Comme la technologie numérique évolue, l’éducation du futur requièrera plus d’agilité, de mobilité, et une vision du Suisse monde plus globale. Lorsque les élèves sont diplômés du Collège, ils savent que l’humanité et la compassion sont aussi nécessaires que la compréhension de la science, des mathématiques ou de l’histoire. Ils possèdent une résilience qui leur donne le courage de prendre des risques, l’endurance nécessaire pour réussir dans un monde très concurrentiel, la capacité de penser de façon critique et la volonté de contester les hypothèses existantes. Quelles sont les activités extrascolaires proposées aux élèves ? Le programme extrascolaire du Collège du Léman vise à améliorer et à compléter le programme académique et renforcer les domaines clés de notre mission à travers toute l’école, soutenir notre déclaration de mission et tenir compte des besoins de la communauté scolaire. Ces activités aident les élèves dans de nombreux domaines ; à la fois socialement et avec leurs performances académiques. Nos quatre-vingt activités extrascolaires se trouvent à tous les niveaux de notre système scolaire, cela comprend le sport, les arts de la scène, le conseil des élèves, les clubs de l’école, le programme académique, les arts et les divers évènements sociaux ainsi que les organisations de charité. Ces expériences multiples forment un troisième programme approuvé et parrainé par les autorités scolaires. En 2015, le groupe hongkongais, Nord Anglia Education, annonçait le rachat de l’établissement. Qu’apporte au Collège du Léman l’appartenance à un groupe mondial et quelles sont les perspectives pour les années à venir ? Nord Anglia Education est le leader mondial des écoles de renommées internationales. Nous sommes une famille qui s’agrandit, composée de quarante-deux écoles dans le monde. Pour le Collège du Léman, c’est un énorme avantage parce que les professeurs, les élèves et les classes peuvent désormais se connecter à un portail mondial avec leurs homologues du monde entier. Nous l’appelons la salle de classe globale. Par exemple, si une classe étudie le changement climatique et la pollution industrielle à Genève, ils peuvent maintenant facilement collaborer avec une autre classe à Pékin ou Singapour où la pollution est terrible et leur demander comment cela se présente, et s’ils peuvent avoir une leçon commune. Pour les professeurs, ce sont là des occasions incroyables de développement professionnel et de partage d’experts à travers une plateforme en ligne et des cours d’universités accrédités. En collaboration avec l’Ecole Juilliard de réputation mondiale pour les arts du spectacle, nous offrons un programme de musique remarquable au Collège du Léman, un programme unique d’été où les élèves viennent du monde entier pour pratiquer et jouer ensemble avec des professeurs et artistes de renommée mondiale. Nord Anglia Education continuera son expansion dans les années à venir afin de mieux servir les besoins d’un enseignement global de qualité pour les familles souhaitant offrir à leur enfant une éducation internationale. 165 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE Institut « La Gruyère » : un projet pédagogique à vocation internationale Anne BUTTY REVAZ, Directrice générale ©DR Situé dans le cadre montagneux idyllique de La Gruyère, cet établissement d’enseignement privé familial à vocation internationale accueille élèves suisses et internationaux pour les préparer dans les meilleures conditions possibles à leur avenir professionnel. D ans quelles conditions l’Institut est-il né en 1949 ? Il a été fondé par mon oncle, passionné d’enseignement. Il avait découvert ses talents de pédagogue en enseignant pendant plusieurs années dans un pensionnat privé à Villars-sur-Ollon, établissement déjà très international. C’était à l’époque une génération d’enseignants très polyvalente, curieuse et ouverte à toutes les disciplines. Fort de cette précieuse expérience pédagogique, mon oncle a souhaité créer son propre établissement d’enseignement privé, avec cette même vocation internationale. La Suisse a toujours été une terre d’accueil pour les grandes organisations et institutions internationales. En outre, la situation dans les Préalpes qui abrite l’Institut et dont notre famille est toujours propriétaire, a de tout temps attiré les familles. La perspective de voir leurs enfants apprendre en pleine montagne, près de la nature, les séduisait et les séduit encore. 166 ©DR Quels cursus général proposez-vous aux élèves? Notre établissement propose depuis sa création le programme d’enseignement suisse dispensé aux élèves, âgés de 12 à 20 ans. Ils peuvent ainsi suivre le cycle d’orientation qui correspond au collège français et le cursus de la maturité fédérale, pendant du lycée français. Il faut savoir qu’en Suisse, les élèves obtiennent l’équivalent du baccalauréat français à vingt ans ; il n’y pas de classes préparatoires avant l’Université. Nous avons également mis en place, depuis deux ans et demi, le baccalauréat français dès la classe de seconde. Nous accueillons ainsi élèves, suisses comme internationaux, Suisse dans ces deux filières. Cela étant, nous avons toujours dispensé en parallèle des cours de français, à titre de langue étrangère, pour les enfants du monde entier. Notre Institut est résolument francophone, considérant depuis l'origine que l’apprentissage du français est un préalable indispensable à l’accès à d’autres écoles. Quels autres programmes linguistiques proposez-vous, dans cette même optique internationale? Nous leur proposons de passer des diplômes reconnus dans le cadre du portefeuille européen des langues qui constitue le référentiel de l’Union européenne. Ils peuvent ainsi préparer au choix les différents niveaux des certificats anglais de Cambridge, les diplômes en langue espagnole dans le cadre du D.E L.E, ou encore les examens de langue allemande du Goethe Institut. Ce programme linguistique approfondi nous paraît essentiel pour les aider à préparer leur avenir d’étudiant, surtout lorsqu’ils ne savent pas encore précisément quelle orientation prendre. Aussi, chaque semaine, en sus des horaires classiques, certains suivent un enseignement linguistique spécifique. Sur quelles valeurs repose votre projet pédagogique ? Notre enseignement traditionnel repose sur une relation personnalisée très humaine entre nos 20 à 25 professeurs et nos 80 élèves, 50 internes et 30 externes. Les effectifs de nos classes sont volontairement réduits de 8 et 12 élèves - pour favoriser proximité, dialogue et réactivité. Les activités sportives tiennent par ailleurs une place essentielle dans notre projet, considérant que l’activité physique est indispensable à la pleine activité intellectuelle. Ces activités quotidiennes, pratiquées au sein de clubs, évoluent au fil des saisons : basket, tennis, ski, escalade, équitation… En outre, fidèle à l’esprit ouvert et curieux de son fondateur, notre Institut propose aussi une importante activité culturelle : les arts visuels, complétés par des visites d’exposition, un club de théâtre et des voyages d’étude mettant toujours en lien une matière avec un lieu. Notre prochaine destination sera le Vietnam, voyage que nous préparons soigneusement en amont, épaulés par trois professeurs. Ces voyages d’étude constituent un enrichissement certain pour les élèves, et une réelle expérience de partage. Dans quelle mesure contribuez-vous à l’éducation de vos élèves ? Nous n’avons pas vocation à nous substituer aux parents de nos élèves mais participons naturellement à leur éducation en leur rappelant certaines valeurs, dont le savoir-être. Nous leur inculquons en particulier le goût de l’apprentissage et celui de l’effort et leur livrons, à notre mesure, les outils pour devenir les Hommes et Femmes de demain. Quels sont vos projets ? Toujours maintenir la qualité de notre enseignement interdisciplinaire. La fidélité de notre équipe pédagogique nous y encourage, certains enseignants nous accompagnant depuis 30, voire 40 ans. Et continuer aussi à ouvrir l’esprit de nos élèves à d’autres cultures, par les voyages. 167 STRATÉGIES ET MARCHÉS INTERNATIONAUX SUISSE La Suisse, économie solide et diversifiée La Suisse bénéficie d'une économie prospère et plusieurs domaines d'excellence (finance, horlogerie, industrie chimique, etc.) qui exportent massivement. La vitalité de son économie repose notamment sur la finance, mais l'industrie y concourt également. ne étude de BAKBASEL commanditée par l'Association suisse des banquiers (ASB) et l'Association suisse d'assurances (ASA) montre que le secteur financier suisse « consolide sa position de secteur clé de l'économie. En 2014, son activité économique s'est traduite, en tenant compte des effets directs et indirects, par une valeur ajoutée brute de 81,1 milliards de CHF et 393 000 postes de travail en équivalents temps plein. » Parmi ses acteurs, on peut citer les banques, les assurances et les autres services financiers. Bien que les perspectives sur le court terme soient « marquées par le ralentissement conjoncturel général dû à l'abolition du court plancher du franc suisse par rapport à l'euro et aux intérêts négatifs », sa prévision de croissance est tout de même égale à 1,3 % en 2016, soit davantage que celle du PIB (1,1 %). U L'industrie des machines, équipements et métaux (MEM) Environ 330 000 salariés travaillent dans le secteur des machines, équipements et métaux, ce qui en fait le premier employeur du pays. Il représentait en 2013 32,5 % des exportations suisses (65 milliards CHF). Avec 80 % de sa production destinée à l'exportation (16,1 milliards pour le premier semestre 2014), il « se présente aujourd'hui comme un secteur de haute technologie aux multiples facettes » (mobilité, habitat, santé, alimentation, sécurité...). L'industrie chimique La ville de Bâle est le centre de l'industrie chimique suisse, qui regroupe notamment les produits pharmaceutiques, les colorants, les essences de parfum ainsi que les arômes alimentaires. Novartis et Hoffmann-La Roche sont aujourd'hui les poids lourds du secteur pharmaceutique suisse. L'horlogerie Troisième industrie suisse d'exportation, l'horlogerie a bénéficié d'une croissance dynamique (4,5 % par an entre 1997 et 2012) selon les données de l'Institut Crea de macroéconomie appliquée de la faculté des HEC de l'Université de Lausanne. Près de ©Ezoom - Fotolia.com Sources : BAKBASEL, CCI France-Suisse 56 000 personnes y travaillent. Pays leader pour les ventes de produits horlogers, la Confédération représente en effet 45 % du commerce international dans ce domaine. La santé Environ 185 000 personnes sont employées au sein des hôpitaux et cliniques suisses. Selon CCI FranceSuisse, « le secteur santé et social dans son ensemble a participé pour 6,6 % au PIB en 2009 ». L'économie étant interdépendante, les établissements sanitaires travaillent avec d'autres acteurs tels que les fabricants de matériel et les laboratoires (médicaments, pansements, etc.). La construction L'industrie du bâtiment regroupe 85 000 employés à temps plein et représente environ le dixième du PIB de la Suisse. Les 2/3 des personnes travaillant dans les BTP sont issus de pays de l'Union européenne. Les dépenses de construction ont atteint 63,1 CHF en 2013 (+1,8 par rapport à 2012).