L`arrêt de la Cour d`appel

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L`arrêt de la Cour d`appel
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&11C
REPUBLIQUE FRANCAISE
Grosses d6livr6es
aux parties le :
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARTS
P61e S - Chambre 5
ARRET DU 14 MAI 2009
(n°
,
pages)
Numdro d'inscription au r6pertoixe gdn6ral : 09/03660
Decision ddf6rde A la Cour : Jugement du 23 F6vrier 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS RG no 2008078679
APPELANTES
La S.A FRANCE TELECOM agissant poursuites et diligences on la personne de son
representantUgal
ayant son si6ge :'6 Place d'Alleray - 75015 PARIS
repr6sent6e par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avouds A la Cour
assist6e de Me Hugues CALVET et Robert Saint-Esteben, avocats au Barreau de Paris - T12
La S.A ORANGE SPORTS agissant poursuites et diligences on la personne de son
representantlegal
ayant son si6ge : 6 Place d'Alleray - 75055 PARIS
repr6sent6e par la SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, avouds a la Cour
assist6e de Me Hugues CALVET et Robert Saint-Esteben, avocats au Barreau de Paris - T12
INTIMEES
La S.A.S FREE
ayant son si6ge : 8 rue de la Ville 1'Ev€que - 75055 PARIS
repr6sent6e par la SCP DUBOSCQ - PELLERIN, avouds A la Cour
assist6e de Me Didier THEOPHILE et Me Cyril BONAN, avocat au Barreau de Paris, pWdant
pour Danois -Villey- Maillot- Brochier - R170
La S.A NEUF CEGETEL
ayant son si6ge : 40 - 42 Quai du Point du Jour - 92100 BOULOGNE BILLANCOURT
repr6sent6e par Me Frangois TEYTAUD, avou6 A la Cour
L'ASSOCIATION LA LIGUE DE FOOTBALL PROFESSIONNEL
ayant son siege ; 6 rue Ldo Delibes - 75116 PARIS
repr6sent6e par Me Dominique OLIVIER, avou6 A la Cour
assist6e de Me Jacques Philippe GUNTHER, avocat plaidant pour Willkie Farr & Gallalgher J3 Barreau de Paris
PARTIES INTERVENANTES ET COMME TELLES INTIMEES
L'ASSOCIATION NATIONALE DES LIGUES DE SPORT PROFESSIONNEL, agissant
poursuites et diligences de son President, Alain SMAD.TA, domicili6 en cette qualit6 audit
siege
ayant son si6ge ; 21 rue Ren6 Goscinny - 75013 Paris
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repr6sent6e par Me Dominique OLIVIER, avoud a la Cour
assistde de Me Maurice LANTOURNE, avocat plaidant pour Willkie Farr & Gallagher - J3
Barreau de Paris
La SOCIETE FRANtrAISE DE RADIOTELEPHONE SFR, versant aux droits de la socidte
NEUF CEGETEL, prise en la personae de son representant 16ga1, domicilie audit siege
ayant son si6ge : sis 42, avenue de Friedland - 75008 Paris
repr6sent6e par Me Francois TEYTAUD, avoud a la Cour
assistde de Me Pierre-Olivier CHARTIER, avocat plaidant pour la socidtd Carreras, Barsikian
& Robertson - RI 39 et Me Olivier FREGET, avocat au Barreau de Paris, plaidant pour Allen &
Overy J022 Paris
LE MINISTERE DE L'ECONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI,
DIRECTION GENERALE DE LA CONCURRENCE, DE LA CONSOMMATION ET DE
LA REPRESSION DES FRAUDES - DEPARTEMENT DE PARIS
8, rue FROISSART - 75153 PARIS CEDEX 03
repr6sentd par M. Emmanuel SELLIER, inspecteur, ddsignd par acte du Ministere de PEconomie
du 29 avril 2009, conform6ment R Parr etti du 12 MARS 1987 portant d6l6gation de pouvoirs
COMPOSITION DE LA COUR :
Apres le rapport oral de Mme Agnes MOUILLARD, Conseillere, conformdment aux
dispositions de Particle 785 du code de proc6dure civile, Faffaire a dtd d6battue le 30 Avril 2009,
en audience publique, devant la Cour compos6e de :
Madame H61ene DEURBERGUE, Pr6sidente
Madame Catherine LE BAIL, Conseilike
Mme Agnes MOUILLARD, Conseillere
qui en ont d6libdrd
Greff e , lors des d6bats : Monsieur Hadji MZE MCHINDA
ABUT:
- Contradictoire
- prononc6 publiquement par mise 6 disposition de 1'arret au greffe de la Cour, les
parties en ayant dtd prdalablement av9sdes dans les conditions pr6vues au deuxi6me alinda de
Particle 450 du code de proc6dure civile,
- signd par Madame H616ne DEURBERGUE, Pr6sidente et par Monsieur Fladji MZE
MCHINDA, greffier de services judiciaires auquel la minute de la d6cision a dtd remise par le
Magistrat signataire,
^a^w.^^^r^^^rar+
La socidtd Free (Free) est un op6rateur de communications electroniques, filiale A 100 %
du groupe Iliad, qui a 6t6 le premier, en 2003, a commercialiser dans les zones ddgroupdes des
offres dites multiservices, dites aussi "Multiplay", ou meme "Triple Play" en 1'espece, combinant
1'acces a Internet haut ddbit (ADSL), la t6l6phonie fixe illimitde par Internet et des services de
tcldvision par ADSL. Elle dispose actuellement d'une base d'abonnds proche de 4 millions qui
la place, en qualitd de fournisseur d'acces Internet (FAI), en deuxi6me position en part de march6
(25 %) derriere France T616com.
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La socidtd Neuf Cegetel, detenue depuis le 19 juin 2008 par la Socidtd Frangaise de
Radiotdl6phone (SFR), elle-meme filiale A 56 % de Vivendi, qui contr6le 6galement Canal Plus
et Vodafone, propose au public une offre d' accts Internet haut ddbit. Elle aussi a lance une offre
multiservices combinant 1'acc6s A Internet haut debit, la t6l6phonie fixe, la tdl6vision par ADSL
et d'autres services A la carte.
La socidtd France T616com (France T616com) est 1'op6rateur historique de
t616communications en France. Elie commercialise des offres de tdl6phonie mobile, Internet haut
debit et t6ldvision sous la marque Orange, laquelle est devenue depuis 2006 la marque unique
du groupe, Elie aussi propose des offres multiservices combinant des services d'acc6s Internet
haut debit, de tdl6phonie illimit6e et de t616vision par ADSL. Pour les zones non Eligibles A la
t6ldvision par ADSL, elle a dgalement mis en place, en juillet 2008, une offre permettant Facc6s
A des services de t6ldvision num6rique par satellite. Depuis 2007, elle s'est lanc6e dans l'ddition
de contenus audiovisuels via sa filiale, la socidtd Orange Sports, qui exploite et 6dite des services
de communication audiovisuelle, notamment des emissions de t6ldvision, et en particulier le
service Orange Sports Info ainsi que, depuis coat 2008, le service Orange Foot, devenu Orange
Sports le 10 janvier 2009.
En effet, le 6 fdvrier 2008, France T616com a obtenu, daps le cadre d'wi appel a
candidatures lance par la Ligue de football professionnel pour la retransmission des matchs de
la ligue 1 de football pour la p6riode 2008-2012, les droits exclusifs sur trois des douze lots pour
un montant annuel de 203 millions d'euros, le groupe Canal Plus ayant remportd les neuf autres
pour la somme de 465 millions d'euros par an.
La chain Orange Sports est diffusde A la fois par satellite et sur les r6seaux ADSL, sous
condition de souscription prdalable A un abonnement A Tune des offres Internet haut debit
d'Orange. Elie est alors accessible en option payante, A raison de 6 euros par mois.
Estimant que France T616com et Orange commettent des actes de concurrence d6loyale
en subordonnant, en violation de Particle L. 122-1 du code de la consommation, l'abonnement
A Orange Foot A la souscription d'un abonnement A Internet haut debit Orange, Free a, apr6s une
premi6re tentative infructueuse en rdfer6 (ordonnance du prdsident du tribunal de commerce de
Paris, en date du I" juillet 2008, disant n'y avoir lieu A rdfer6), assign6 France T616com A bref
ddlai, le 30 octobre 2008, pour qu'il lui soit ordonne sous astreinte :
- de cesser de subordonner 1'abonnement a Orange Foot A la souscription d'un abonnement A
Internet haut debit Orange,
de diffuser sur son site Internet un communiqu6 en ce sens,
d'adresser un cowrier a ses aboands en ce sens,
et demandant une expertise pour appr6cier son prejudice commercial ainsi qu'une provision de
5 millions d'euros.
De son c6t6, la sc,606 Neuf Cegetel, qui s'6tait d6jA associde par voie d'intervention
volontaire principale A la procedure de rdf6rd sus-mentiomide, a assign 6galement France
T616com A jour fixe, le 31 octobre 2008, A des fins similaires.
Les affaires ont 6td jointes,
La Ligue de football professionnel est intervenue volontairement a P instance au soutien
des inter8ts de France T616com et de Orange Sports, lesquelles se sont oppos6es aux demandes
en r6clamant reconventionnellement des dommages et int6r8ts pour procedure abusive.
Par jugement du 23 f6vrier 2009, assorti de 1'ex6cution provisoire, le tribunal de
commerce de Paris a :
- fait injunction h France T61ecom, sous astreinte de 50 000 euros par jour de retard pendant
3 mois, A compter du delai d'un mois A compter de la signification du jugement, de cesser de
subordonner Pabonaement A Orange Foot A la souscription d'un abonnement Internet haut debit
Orange, tout en se r6servant le droit de liquider Pastreinte,
- fait injunction A France Te16com de diffuser pendant deux mois un communiqud sur la page
d'accueil de son site Internet www.Orang,e1r, situe au meme endroit que les publicitds
pour son offre Orange Foot, comportant les termer suivants : "Par jugement du 23 f6vrier 2009,
le Tribunal de commerce de Paris a enjoint A la socidtd France Tdldcom de cesser de subordonner
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1'acc&s A sa chain Orange Foot A la souscription d'un abonnement Internet haut ddbit Orange,
cette pratique dtant constitutive de vente subordonnde interdite par la loi.",
- ddsignd un college expertal composd de M. Didier Faury, qui le prdsidera, et M. Jean-Paul
Aymar, pour dvaluer le quantum du prdjudice subi par Free et Neuf Cegetel i partir du nombre
d'abonnements A une offre d'acces Internet Orange en m@me temps qu'A Orange Foot souscrits
par d6sabonnement de Free et Neuf Cegetel et plus gdndralement du nombre d'abonnements i
une offre d'acces Internet Orange souscrits en consdquence de la commercialisation illicite de
l'offre Orange Foot et dont Free et Neuf Cegetel ont pu 6tre privdes de ce fait,
- ddbout6 Free et Neuf Cegetel de leurs autres demandes de publication,
- ddbout6 France T616com et Orange Sports, et la Ligue de football professionnel de lours
demandes reconventionnelles,
- condamn6 France T616com et Orange Sports A payer A chacune des soci6t6s Free et Neuf
Cegetel la somme de 30 000 euros en application de F article 700 du code de procddure civile.
LA COUR :
Vu Pappel de ce jugement interjetd par France Tdldcom et Orange Sports le
27 fdvrier 2009 ;
Vu Fordonnance du Premier Pr6sident de cette tour, en date du 5 mars 2009,
autorisant France T616com et Orange Sports A assigner A jour fixe pour le 30 avril 2009, A
14 heures ;
Vu 11ordonuance du Premier Pr6sident de cette tour, en date du 31 mars 2009,
rejetant la demande de suspension d'ex6cution provisoire pr6sent6e par France T616com et
Orange Sports ;
Vu les assignations A jour fixe d6livr6es respectivement a Free et la Ligue de football
professionnel le 11 mars 2009 et A Neuf Cegetel le 23 mars 2009, et les conclusions du
28 avril 2009 par lesquelles France T616com et Orange Sports soulAvent l'irrecevabilitd de la
pi6ce cot6e n° 3 de Free et n° 36 de SFR, en ce que sa communication est constitutive de recel
de violation du secret professionnel, et poursuivent Pinfirmation du jugement et le d6bout6 des
demandes de Free etNeuf Cegetel, A qui elles r6clament une indemnitd del 50 000 euros chacune,
en r6paration de V action. abusive intent6e, et une somme de 30 000 euros, pour chacune d'entre
elles, en application de Particle 700 du code de proc6dure civile ;
Vu les conclusions signifi6es le 30 avril2009 pax lesquelles Free souleve Pirrecevabilit6
de Pintervention volontaire de 1'Association nationale des Ligues do Sport Professionnel et du
ministre charg6 de PEconomie, poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il a prononcd des
injonctions et retenu le principe de laresponsabilit6 civile de France T616com et d'Orange Sports
A son 6gard pour concurrence d6loyale et, pour le surplus, demande A la tour :
- de lui donner acte de ce qu'elle n'a jamais soutenu quo Papplication de Particle L. 122-1 du
code de la consommation devait ndcessairement conduire France T616com A la laisser
commercialiser la chain Orange Sports au sein de ses offres de plan de services,
d' 6voquer 1'appr6ciation du prdjudice,
de juger que Particle L. 122-1 du code de la consommation n'est pas incompatible avec le droit
communautaire,
- de surseoir A statuer et, avant dire droit, de d6signer le coll6ge expertal d6jA d6sign6 par le
tribunal de commerce de Paris, soit M. Didier Faury, demeurant 140 boulevard Haussmann
75008 Paris, et M, Jean-Paul Aymar, demeurant 5 rue de Castiglione 75001 Paris, experts, avec
la mission, tenant compte des travaux ddji effectu6s A la demande du tribunal de commerce de
Paris, de donner h la tour des 616ments pour d6terminer le quantum du prdjudice subi par elle,
A partir du nombre d'abonnements h une offre d'acces Internet Orange en meme temps qu'A
Orange Sports souscrits par d6sabonnement de Free et plus g6ndralement du nombre
d'abonnements h une offre d'acces Internet Orange souscrits en consdquence de la
commercialisation illicite de l'offre Orange Sports dont elle a pu 8tre privde de ce fait, de dire
que le college expertal sera pr6sid6 par Monsieur Faury, de fixer ,h 10 000 euros le montant de
la consignation A valoir sur la r6mundration du college expertal, par moitid par Free et Neuf
Cegetel, par application des dispositions de Iarticle 276 du code de proc6dure civile, de dire que
le rapport de 1'expert devra 8tre d6pos6 au greffe dans un d6lai de 4 mois A compter de la
consignation de la provision frxde ci-dessus,
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a tire subsidiaire, de poser une question prejudicielle a la Cour de Justice des Communautds
Europdennes afin de determiner si la directive 2005/29/CE doit titre interprdtde en ce sens qu'elle
s'oppose A une disposition nationale telle que celle de Particle L. 122-1 du code de la
consummation qui interdit les ventes subordonnees d'un vendeur professionnel A un
consommateur en fonction des circonstances sp6cifiques du cas d'esp6ce et qui portent prejudice
au consommateur en raison de leur caract6re d61oya1,
- en tout 6tat de cause, de rejeter 1' intdgralit6 des demandes de France Telecom et Orange Sports
A son encontre et notamment les demandes reconventionnelles, de celles de la Ligue de football
professionnel et de ('Association nationale des ligues de sport professionnel, enfin de condamner
France T616com, Orange Sports, la Ligue de football professionnel et 1'Association nationale des
ligues de sport professionnel, chacune, h lui verser une Somme de 30 000 euros au titre de
Particle 700 du code de procddure civile ;
-
Vu les conclusions signifi6es le 30 avri12009 par lesquelles SFR, versant aux droits
de Neuf Cegetel pour Pavoir absorbde le 31 mars 2009, poursuit la confirmation du jugement
et demande A la tour :
- A titre principal, de d6clarer Fintervention du ministre chargd de 1'Economie irrecevable pour
d6faut de qualitd a agir et defaut de competence, de constater que Particle L. 122-1 du code de
la consommation est conforme au droit communautaire, que les modalit6s de commercialisation
de la chaine de t616vision Orange Sports, anciennement Orange Foot, sont constitutives d'une
vente subordonnde prohibee, que le comportement illicite de France T616com se double d'actes
de concurrence ddloyale A son prdjudice, de rejeter 1'ensemble des demandes de France T616com
et Orange Sports, de la Ligue de football professionnel et de PANLSP,
- en cons6quence de confrrmer le jugement entrepris et, dvoquant sur le prejudice subi par elle,
de surseoir A statuer'sur sa demande de reparation et, avant dire droit sur Pappr6ciation de ce
prdjudice, de d6signer le college ddjA d6signd par le tribunal de commerce de Paris, soit
M. Didier Faury, demeurant 140 boulevard Haussmann 75008 Paris et presidant le college, et
M. Jean-Paul Aymar, demeurant 5 rue de Castiglione 75001 Paris, avec pour mission, tenant
compte des travaux de'jA effectues A la demande du tribunal de commerce de Paris, de donner A
1a tour des 616ments pour determiner le quantum du prdjudice subi par elle, h partir du nombre
d'abonnements a une offre d' acces Internet Orange en meme temps qu'A Orange Sports souscrits
par ddsabonnement de SFR, du nombre d'abonnds A une offre d'acc6s Internet Orange FAI ayant
pu 6tre conservds comme clients par France Telecom du fait de la commercialisation d'Orange
Sports et plus g6neralement du nombre d'abonnements A une offre d'acc6s Internet Orange
souscrits en consdquence de la commercialisation illicite de l'offre Orange Sports et dont elle a
pu 8tre privde de ce fait, de fixer A 10 000 euros 1e montant de la consignation A valoir sur la
r6muneration des experts par moiti6 par Free et Neuf Cegetel, de dire que le rapport des experts
devra titre ddposd au greffe dans un ddlai de 4 mois A compter de la consignation,
- A titre subsidiaire, de surseoir A statuer et de poser la question prdjudicielle en interprdtation du
droit eommunautaire h la Cour de Justice des Communaut6s Europeennes, suivante :
:'Les principes de Libre circulation des marchandises et des services de la liberte
detablissement, d'une part, et I'objectifde developpement de pratiques commerciales loyales
ausein de l'Espace Economique.Europeenpoursuivispar la Directive, d'autrepart, s'opposentils au maintien daps la legislation fran^aise de la prohibition des pratiques de vente
subordonnde alors que celle-ci ne determine pas, par voie legislative, les exceptions auprincipe
de prohibition mais laisse aujuge le soin d'appreciersi les circonstances de l'esp9ce permettent
de considerer que la vente subordonnde est licite 7 ",
- en toute hypoth8se, de lui dormer acte de ce qu'elle ne revendique pas le droit de distribuer
commercialement la chaine Orange Sports, de d6bouter France T616com et Orange Sports ainsi
que la Ligue de football professionnel et de I'Association nationale des ligues de sport
professionnel de toutes leurs demandes, enfin de condemner France Tdldcom et Orange Sports
it lui verser la somme de complementaire de 50 000 euros au titre de Particle 700 du code de
procedure civile ;
Vu les conclusions signifiees le 24 avril 2009 par lesquelles la Ligue de football
professionnel demande A la tour de confirmer le jugement en ce qu'il a ddclare son intervention
volontaire recevable, de 1'infirmer en ses autres dispositions et, statuant A. nouveau, de dire
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Particle L. 122-1 du code de la consommation inapplicable car contraire A une norme superieure
du droit communautaire, de faire droit aux demandes de France Telecom et Orange Sports, enfin
de condemner Free et Neuf Cegetel au paiement de 25 000 euros chacune au titre de
Particle 700 du code de procedure civile ;
Vu les conclusions signifiees le 24 avri12009 par lesquelles I'Association nationale
des ligues de sport professionnel (I'ANLSP) demande A la tour, vu Particle 554 du code de
procedure civile, la directive 2005/29/CE du Parlement europden et du Conseil, du 11 Mai 2005,
relative aux pratiques commerciales ddloyales des entreprises vis-A-vis des consommateurs dans
le marchd interieur, interpretde par 1'arr6t de la C7CE du 23 avril 2009 (aff. C-261/07 et
C-299/07), vu le principe de primautd du droit communautaire, vu Particle L.122-1 du code de
la consommation, de lui donner acte de son intervention en cause d'appel, de donfirmer le
jugement on ce qu'il a jugd recevable et bien fondee l'intervention volontaire de la Ligue de
football professionnel en premiere instance, d'infirmer le jugement daps toutes ses autres
dispositions et de faire droit aux demandes des socidtes France Tdldcom et Orange Sports et de
la Ligue de football professionnel ;
Vu les conclusions d'intervention du ministre de I'Economie, en date du 29 avril 2009,
par lesquelles ce demier expose que Iarticle L. 122-1 du code de la consommation ne lui paralt
pas titre la base juridique la plus adaptde pour apporter la rdponse appropride aux prdoccupations
fondamentales des concurreats d'Orange relatives A la distribution d'Orange Sports, lesquelles
touchent A la question de 1'exclusivit6 commerciale, soit au premier chef au droit de la
concurrence, pr6cisant qu'il a d'ailleurs saisi I'Autorite de la concurrence d'une demande d'avis
A ce sujet ;
STIR CE :
- sur la recevabilitd de "Pinterventiou" du ministre de PEconomie, contest6e par Free et
SFR
Consid6rant qu'en vertu de Particle L. 470-5 du code de commerce, le ministre chargd
de 1'dconomie ou son reprdsentant pout, pour Papplication, notamment, de Particle L. 122-1 du
code de la consommation, ddposer des conclusions devant les juridictions civiles ou pdnales et
les d6velopper oralement h Paudience ; qu'aux termes des articles 1 et 2 d'un arr@t6 ministeriel
du 12 mars 1987 (publid au 70 du 13 mars 1987), le ministre pout se faire reprdsenter, pour ce
faire, par les chefs de services ddpartementaux de la concurrence, de la consommation et de la
rdpression des fraudes pour ce qui concern les affaires traitees par les juridictions du
departement dans lequel ils exercent leurs attributions, et, en cas d'emp@chement de ces demiers,
des fonctionnaires ddsign6s par eux, appartenant au cadre A, peuvent les supplder pour
d6velopper oralement A !'audience le conclusions ddposees ; qu'il suit de lh que la participation
A !'instance du ministre, qui a ddposd des conclusions dcrites signees de Mme Zylbermann, chef
du service ddpartemental de la concurrence, de la consommation et de la rdpression des fraudes
de Paris, lesquelles ont dtd ddveloppdes oralement h !'audience par M. Emmanuel Sellier,
inspecteur rdgulidrement ddsignd A cette fin par Mme Zylbermann le 29 avril 2009, est done
reguli6re et recevable, peu important en outre qu'il ne formule aucune demande prdcise d6s lors
que sa pr6sence aux ddbats ne rev€t pas le caract&e d'une intervention au sons des articles 325
et suivants du code de procedure civile ;
- sur la recevabilit6 de la piece cotee n° 3 de Free et n° 36 de SFR, contest6e par France
T616com et Orange pour violation du secret professionnel
Consid6rant qu'aucun dldment du dossier n'etablit que 1'avis de 1'ARCEP, quand biers
m€me it n'aurait pas encore fait l'objet d'une mesure de publication de la part de cette autoritd,
soit confidentiel, alors en outre que son existence et son contenu ont ddjA dte relatds dans la
presse (piece 47 de Free) ; qu'en cot dtat, et a defaut d'autres dlements, it ne peut titre retenu que
ce document, dont la tour n'entend pas se servir au demeurant, ait etd obteau dans des conditions
illicites ; qu'il n'y a done pas lieu de 1'dcarter des d6bats ;
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ARRET DU 14 MAI 2009
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sur la recevabilitd de Pintervention volontaire de PANLSP, contestde par Free pour
defaut d'intbri:t
-
Considdrant quo PANLSP est une association rdgie par Is loi du I" juillet 1901 qui
rdunit diffdrentes ligues de sport professionnel, parmi lesquelles la Ligue de football
professionnel, la Ligue nationale de handball, la Ligue nationale de rugby, la Ligue nationale de
basket et la Ligue nationale de volley-ball -lesquelles reprdsentent prds de 170 clubs
professionnels- et qui a pour objet statutaire, notamment, la protection des intdrdts gdndraux des
ligues et la promotion du sport professionnel ; qu'elle revendique donc A juste titre un intdr6t A
intervenir A la prdsente instance en vue d'obtenir 1'infirmation du jugement attaqud qui, selon
elle, compromet, d'une part, la continuitd d'exploitation des matchs dont les droits sont
commercialisds par les ligues de sport professionnel or qui ont dtd concddds h France Tdldcom
(actuellement Is commercialisation de Orange Sports est arr8t6e depuis le 24 mars dernier) et,
d'autre part, le maintien d'une rdelle concurrence sur le march&de Pachat de droits sportifs "dans
la mesure 41'int6r8t financier et la visibilitd de ces m@mes ligues daps les prochaines anndes
en ddpendent fortement" ;
Qu'il suit de IA que l'intervention de I'ANLSP, conforme aux dispositions de
Particle 554 du code de procddure civile, est recevable ;
- sur le fond
Considdrant que France Tdldcom et Orange Sports soutiennent que Poffre
multiservice incluant l'offre Orange Sports constitue un produit unique, excluant de ce fait la
qualification de vente subordonnde illicite au sens de I'article L. 122-1 du code de la
consommation, qu'A tout le moins, la commercialisation de 1'offre Orange Sports daps le cadre
de l'offre multiservices de France Tdldcom est justifzde par un usage commercial, excluant
encore de ce fait la qualification de vente subordonnde illicite au sens de Particle L. 122.1 du
code de Is. consommation, qu'en tout dtat de cause, it rdsulte d'unejurisprudence constante que
le droit national doit etre interprdtd de fagon telle, quand c'est possible, qu'il soit conforme au
droit communautaire, qu'A cot dgard, la tour devrait retenir que Particle L, 122-1 du code de la
consommation pennet une apprdciation au cas par cas, en ce qu'il ne prohibe pas la
commercialisation d'un produit unique ou rdpondant A un usage commercial constant, ce qui est
le cas en 1'esp6ce, qu'ainsi, la cour devrait rejeter Panalyse du tribunal qui conduirait
inexorablement A constater l'incompatibilitd de Particle L. 122-1 du code de la consommation
avec la directive n° 2005-28/CE, ce qu'elle no ferait qu'A titre infiniment subsidiaire ; qu'elles
en ddduisent qu' elles ne se sont pas rendues coupables d' actes de concurrence ddloyale, de sorte
que les demandes de Free et SFR doivent dtre rejetdes, et soulignent dgalement Pabsence de
preuve du lien de causalit6 et du prdjudice prdtendument subi du fait de la pratique ddnoncde,
justifiant 1'annulation de 1'expertise ordonnde par le jugement ;
Considdrant que la Ligue de football professionnel et PANLSP souldvent A titre
principal l'incompatibilitd de Particle L. 122-1 du code de la consommation avec le droit
communautaire, compte tenu de la jurisprudence rdcente de la C our de Justice des C ommunautds
Europdennes, et, pour le surplus, se rangent aux observations de France Tdldcom et Orange quant
A Papplication de cot article A la pratique on cause ;
Considdrant que SFR et Free estiment que Particle L. 122-1 du code de la
consommation, en ce qu'il permet une apprdciation au cas par cas de la pratique, n'institue pas
une interdiction gdndralisde et ne contrevient donc pas au droit communautaire, selon la
jurisprudence en cause ; qu'elles invitent la cour A retenir, au sens de la directive sur les pratiques
commerciales ddloyales, que la pratique reprochde "altere ou est susceptible d'alt4rer, de
manidre significative, du fait de la contrainte, la liberti de choix ou de conduite du
consommateur moyen d l'dgard d'un produit et, par consdquent, l'amdne ou est susceptible de
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Vamener a prendre une dicision commerciale qu'il n'aurait pas prise aarlement" ; qu'en
particulier, SFR prdtend que 1'offre de Orange exerce une contrainte stir le consommateur, d' une
part, parce qu'elle est trompeuse, le site Orange.fr invitant le consommateur A s' abonner pour le
prix, modique, de 6 euros par mois, sans Paviser qu'il devra aussi quitter son FAI s'il en a d6ja
un et, de toute fagon, acquitter le cofit de Pabonnement a la fourniture d'acc6s par Orange, plus
elevd que ceux proposds par les concurrents, d'autre part, parce qu'elle est agressive en ce qu' elle
impose un changement de foumisseur de t6ldcommunications sans n6cessitd alors que Fautodistribution de la chame sur des r6seaux tiers permettrait de ne pas exercer cette contrainte ; que
Free estime 6galement que l'offre d'Orange exerce une contralnte sur le consommateur, atteint
dans sa libertd de contracter s'il veut regarder la retransmission des matcbs de football de ligue
I retransmis sur la chain Orange Sports exclusivement, puisqu'il est alors obligd, le Gas 6ch6ant,
de r6silier 1'abonnement ADSL dejd souscrit aupras d'un operateur concurrent et, de toute fagon,
de souscrire 61' offre multiservices la plus chdre du marchd, dont it ne veut pas n6cessairement ;
Que, pour ce qui est du droit national, elles font valoir que la commercialisation des
chains de t6levision est inddpendante de 1'offre triple play du FAI, laquelle associe trois services
de communications 6lectroniques, Internet, la t6ldphonie et la t6ldvision, qui sont d'ailleurs
accessibles au consommateur s6pardment, s'il le souhaite, alors que les chaines peuvent 61re
commercialisdes, soit par les FAI, qui jouent alors le role de distributeurs de services de
communications audiovisuelles, soit par 1'dditeur de la chain lui-m@me, en auto-distribution,
le FAI agissant alors comme un simple transporteur, a Pinstar de ce que fait Te16diffusion de
France (TDF) pour la t6lddiffusion hertzienne ou Astra et Eutelsat lorsqu'elle est effectude par
satellite ; qu'elles ajoutent que, si Orange Sports n'est actuellement accessible que via le FAI
Orange, cette situation, qui ne rdsulte nullement d' une contrainte technique, n' est pas le standard
du marchd et rdsulte d'une stratdgie commerciale d'Orange ; qu'elle soulignent que cette
situation est prejudiciable, tant au consommateur, contraint de r6silier son abonnement chez un
autre FAI au profit de Orange s'il souhaite voir laretransmission des matchs achetee par Orange
Sports, en particulier ceux du samedi soir, et aux autres FAI, qui n' ont pas les moyens d'investir
daps les contenus t6ldvisuels de France T61ecom, et qui voient ainsi leurs abonn6s d6tournds par
le biais d'un comportement illicite, cette pratique 6tant d'autant plus grave que le march6 est
mature et que le recrutement de nouveaux clients est difficile, et alors en outre que les trois
principaux FAI ont annoncd des investissements importants afin de d6velopper la fibre optique
de trds haut debit, qui devront @tre amortis par les abonnements sousorits ;
Considdrant que Particle L122-1 du code de la consommation, en sa r6daction issue de
la loi 2001-1168 du 11 d6cembre 2001, dispose que "il est interdit de refuser a un consommateur
la vente dun produit ou la prestation d'un service, sauf motif ligitime, et de subordonner la
vente d'un produit a Pachat dune quantite imposie ou a Pachat concomitant d'un autre produit
ou d'un autre service ainsi que de subordonner la prestation d'un service a Celle d'un autre
service ou a l'achat dun produit" ;
Considdrant que le tribunal de commerce a jugd que France T616com et Orange violent
ce texte en subordonnant Fabonnement A la chaine Orange Sports A la souscription d'un
abonnement a Internet haut debit Orange ;
Considerant que, par arrdt du 23 avri12009 (C-261/07 et C-299/07 Total Belgium NV
et Galatea BVBA contre Sanoma Magazines Belgium NV), rendu sur renvoi pr6judiciel, la Cour
de justice des Communautes europ6ennes (la CJCE) a dit pour droit que la directive 2005/29/CE
du Parlement europden et du Conseil, du I I mai 2005, relative aux pratiques commerciales
ddloyales des entreprises vis-6-vis des consommateurs dans le marchd intdrieur et modifiant la
directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du
Parlement europden et du Conseil et le r6glement (CE) n° 2006/2004 du Parlement europden et
du Conseil, doit kre interprdt6e en ce sens qu'elle s'oppose A une r6glementation nationale -en
1'esp6ce la loi belge- qui, sauf certaines exceptions et sans teriir compte des circonstances
sp6cifiques du cas d'espece, interdit toute offre conjointe faite par un vendeur A un
consommateur ;
Consiyrant qu'au vu de cette jurisprudence, les quatre parties principales demandent
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A la tour, non d'dcarter la loi nationale comme incompatible avec le droit communautaire, mais
de l' interpreter dans un sens qui la rende conforme au droit communautaire ;
Consid6rant qu'il r6sulte en effetd'une jurisprudence constante de la CJCE depuis 1'arret
du 10 avril 1984 (Von Colson et Kamann 14/83, Rec. p. 1891, point 26), que l'obligation des
Etats membres, d6coulant d'une directive, d'atteindre le r6sultat prdvu par Celle-ci ainsi que leur
devoir, en vertu de Particle 10 du traitd instituant la Communaut6 Europdenne (TCE), de prendre
toutes mesures g6ndrales ou particuli6res propres A assurer 1'exdcution de cette obligation
s'imposent A toutes les autoritds des Etats membres y compris, dans le cadre de leurs
comp6tences, les autoritds juridictionnelles (voir, notamment, arrets du 13 novembre 1990,
Marleasing, C-106/89, Rec. p. I-4135, point 8 ; Faccini Dori, pr6citd, point 26 ; du
18 d6cembre 1997, Inter-Environnement Wallonie, C-129/96, Rec. p. 1-7411, point 40, et du
25 f6vrier 1999, Carbonari e.a., C-131/97, Rec. p.1-1103, point 48) ;
Que le devoir des jmidictions nationales d'assurer la protection juridique d6coulant pour
les justiciables des dispositions du droit communautaire et de garantir le plein effet de celles-ci
s'impose de plus fort lorsque PEtat membre a dejApris les dispositions en vue de transposer une
directive qui vise A confdrer des droits aux partlculters, ce qui laisse presumer, eu 6gard A
Particle 249, alinda 3, du TCE, qu'ayant utilis6 la marge d'appreciation dont it b6ndficie en vertu
de cette disposition, it a eu Pintention d'ex6cuter pleinement les obligations d6coulant de 1a
directive concernde (voir arret du 16 d6cembre 1993, Wagner Miret, C-334/92, Rec. p.1-6911,
point 20) ; que te1 est cas en Pesp6ce, la transposition de la directive ayant dt6 opdrde
essentiellement par la loi n° 2008-776 du 4 ao0t 2008 ;
Qu'en outre, selon la jurisprudence de la CJCE, doivent etre consid6r6es comme
relevant du champ d'application de la directive, non seulement les dispositions nationales dont
Pobjectif expr6s est de transposer Mite directive, mais regalement, a compter de la date d'entr6e
en vigueur de cette directive, les dispositions nationales prdexistantes, susceptibles d'assurer la
eonfomtitd du droit national A Celle-ci ;
Qu'ainsi, le principe d'interpr6tation conforme requiert que la tour fasse tout ce qui
rel6ve de sa comp6tence, en prenant en considdration 1'ensemble des regles du droit national,
pour garantir, daps le cadre de P application de Particle L, 122-1 du code de la consommation au
present litige, la pleine e£fectivitd de la directive du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales
deloyales ;
Considerant qu'A cet dgard, Parr& du 23 avril 2009, m@me s'il ne conceme pas la loi
frangaise, contient les motifs propres a 6clairer la tour sur la mani6re d'interprdter la r6gle
communautaire en cette matike et peut donc 8tre transpos6, sans doute reel, au prdsent litige,
sans qu'il soit n6cessaire de poser une question pr6judicielle ainsi que le requi6rent SFR et Free
A titre sub sidiaire ;
Qu'en effet, tout d'abord, aucune des parties ne conteste que les offres en cause
constituent des actes commerciaux s'inscrivant dans le cadre de la strat6gie Commerciale de
France Telecom et d'Orange et visant directement A la promotion et A 1'dcoulement des ventes
de ces demi6res, constituant A Ce titre des pratiques commerciales au sens de Particle 2, sous d),
de la directive 2005/29/CE du Parlement europden et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux
pratiques commerciales ddloyales des entreprises vis-A-vis des consommateurs dans le march6
mt6rieur, et qu'elles reldvent, en consequence, du champ d'application de Celle-ci ;
Qu'ensuite, la Cour de Justice rappelle :
- que la directive vise A dtablir, conformement A ses cinqui6me et sixi6me consid6rants ainsi qu'A
son article let, des r6gles uniformes relatives aux pratiques commerciales deloyales des
entreprises vis-A-vis des consommateurs, afin de contribuer au bon fonctionnement du marchd
int6rieur et d'assurer un niveau dlev6 de protection de ces derniers, qu'elle proc6de ainsi A une
harmonisation compl6te desdites r6gles au niveau communautaire de telle sorte que, comme le
pr6voit expressdment Particle 4, les Etats membres ne peuvent pas adopter des mesures plus
restrictives que celles d6frnies par la directive, meme aux fins d'assurer un degrd plus elevd de
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protection des consommateurs,
- qu'en outre, Particle 5 de la directive prdvoit ]'interdiction des pratiques commerciales ddloyales
et dnonce les crit6res permettant de d6terminer un tel caractbre ddloyal,
- qu'ainsi, et confortndment au paragraphe 2 de cette disposition, une pratique commerciale est
ddloyale si elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et altere ou est
susceptible d'altdrer de mani6re substantielle le comportement dconomique du consommateur
moyen par rapport au produit,
- que Particle 5, paragraphe 4, d6frnit deux catdgories precises de pratiques commerciales
ddloyales, A savoir les apratiques trompeuses » et les opratiques agressives» r6pondant aux crit6res
sp6cifids respectivement aux articles 6 et 7 ainsi que 8 et 9 de la directive,
- qu'en vertu de ces dispositions, de telles pratiques sont interdites.lorsque, compte tenu de leurs
caract6ristiques et du contexte factuel, elles amenent ou sont susceptibles d'amener le
consommateur moyen A prendre une d6cision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement,
- que la directive 6tablit 6galement,. A son annexe I, une liste exhaustive de 31 pratiques
commerciales qui, conformement A Particle 5, paragraphe 5, de la directive, sont r6put6es
ddloyales oen toutes circonstances», de sorte que, ainsi que le pr6cise expressement le
dix-septi6me consid6rant de la directive, it s'agit des seules pratiques commerciales qui peuvent
titre eonsiddr6es comme deloyales sans faire ]'objet d'une 6valuation au cas par cas au titre des
dispositions des articles 5 A 9 de la directive ;
Considdrant que l'offre subordonnee ne figure pas parmi les pratiques enumdr6es A
]'annexe I et, plus particulidrement, n'entre pas dens les prdvisions du point 6 qui vise le fait de
"proposer 1'achat de produits d un prix indiqud et ensuite de refuser de presenter aux
consommateurs Varticle ayant fait l'objet de la publicitd ou de refuser de prendre des
commandes concerhant cet article ou de le livrer daps un Mat raisonnable ou d'en presenter
un dchantillon ddfectueux dons le but de faire la promotion d'un produir dii fdrent (amorcer et
fewer) ", ainsi que le pr6tend A tort SFR, au prix d'une reproduction tronqu6e de ce texte ;
Considdrant que, dans une telle hypoth6se, la Cour de Justice pr6conise de v6rifier, A
la lumidre du contenu et de 1'economie gen6rale des dispositions de la directive, rappel6es aux
paragraphes prdc6dents, si le texte qui la prohibe, soit Particle L. 122-1 du code de la
consommation, rdpond aux exigences posdes par la directive ;
Consid6rant qu'A Pinstar de ce qu'a constat6 la Cour de Justice dans Parrot prdcit6 A
propos de la loi beige, it doit 8tre relevd que P article L. 122-1 du code de la consommation, qui
dtablit le principe de ]'interdiction des ventes subordonndes, alors m6me que de telles pratiques
ne sont pas visdes i ]'annexe I de la directive -laquelle dnum6re de mani6re exhaustive les seules
pratiques commerciales interdites en toutes circonstances, comme telles dispens6es d'un examen
au cas par cas- se heurte au r6gime institu6 par ]a directive en ce qu'il prohibe, de mani6re
g6ndrale et prdventive, les offres subordo:nndes tndependamment de toute v6rification de leur
caract6re d6loyal au regard des crit6res posds aux articles 5 A 9 de la directive ;
Considdrant que cette interpr6tation ne saurait 8tre remise en cause par le fait que la
jurisprudence nationale pr6voit un certain nombre d'exceptions A la prohibition des offres
subordonndes, en particulier lorsque les biens vendus constituent un produit unique ou que les
offres en cause rel6vent d'un usage commercial constant, comme le pr6tendent France T616com
et Orange ; qu'en effet, mdme si ces assouplissements sont susceptibles de restreindre la port6e
de l'interdiction des offres subordonn6es, it n'en reste pas moins qu'ils ne sauraient, du fait de leur
nature limitde et pr6-d6finie, se substituer A ]'analyse, qui doit titre n6cessairement men6e au
regard du contexte factuel de chaque esp&e, du caractdre ddloyal d'une pratique commerciale a
la lumidre des criteres dnoncds aux article 5 A 9 de la directive ;
Consid6rant qu'A ce stade du raisonnement, it convient de rappeler que Cest aux
j urid ictions nationales que le ldgislateur communautaire a conft6 lahtission d' 6valuer le caract6re
loyal d'une pratique commerciale eu 6gard aux circonstances de l'esp&e et en particulier du point
de vue de son influence sur le comportement dconomique d'un consommateur moyen ; que le
principe d'interpr6tation conforme commande done A la tour de proc6der A cette appr6ciation,
conform6ment aux crit6res 6nonc6s dans la directive ;
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Consid€rant que Particle 5 de la directive pr6cise qu'une pratique commerciale est
d6loyale si, A la fois, elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et si elle
alt6re ou est susceptible d'altdrer de mani6re substantielle le comportement 6conomique, par
rapport au produit, du consommateur moyen qu'elle touche ou auquel elle s'adresse, en
partzculier lorsqu'elle est trompeuse au sens des articles 6 et 7, ou agressive au sens des
articles 8 et 9 ;
Consid6rant que, pour ce qui est du moyen tird du mract6re trompeur de 1'offre
d'Orange Sports "pour un consommateur d'attention moyenne", invoqud par SFR pour la
E remi&e fois dans ses ultimes 6critures devant la tour, deuxjours avant Paudience, en ce que
e site Orange.fr mettrait en avant le coat modique de la souscription A la chaine, en tant
qu'option payante, sans attirer son attention sur la n6cessit6 de souscrire un abonnement ADSL
chez Orange et sur le coot de cet abonnement, le seul 616ment soumis A la tour h ce titre, qui se
rdsume A un 6cran sur lequel,s'afftche la possibilit6 de souscrire A Poption Orange Foot pour
6 euros par mois, assortie de la pr6cision que ' pour profater de l'option Orange Foot, it est
ndcessaire d'grre client de la tildvision d'Orange" (§ 146 et suivants des conclusions du
30 avril 2009), ne permet pas de caract6riser une pratique commerciale trompeuse susceptible
d'induire en erreur "un consommateur moyen", au sens des articles 6 ou 7 de la directive ;
Consid6rant que, s'agissant de l'offre subordonn6e, Particle 8 dispose qu'une pratique
commerciale est riputde agressive si, dans son contexte factuel, compte tenu de routes ses
caractdristiques et des circonstances, elle altdre ou est susceptible d'altirer de manure
significative, du fait du harcdlement, de la contrainte, y compris le recours a la force physique,
ou d'une influence injustlfie, la liberti de choix ou de conduite du consommateur moyen, k
l'dgard d'un produit; et, par consiquent, Pamene ou est susceptible de l'amener dprendre une
ddcision commerciale qu'il n'aurait pas prise autrement, cependant que Particle 9 precise que
les crit6res A prendre A consideration afm de d6terminer si une pratique commerciale recourt an
harc6lement, A la contrainte, y compris la force physique, ou A une influence injustifi6e sont
a) le moment et 1'endroit ou la pratique est mise en oeuvre, so nature et sa persistance,
b) le recours k la menace physique ou verbale,
c) Vexploitation en connaissance de cause par le professionnel de tout Malheur ou circonstance
particulidre d'une graviti propre a altirer le jugement du consommateur, dans le but
d'influencer la dicision du consommateur a d'dgard du produit,
d) tout obstacle non contractuel important ou disproportionnd impost par le professionnel
lorsque le consommateur souhaite faire valoir ses droits contractuels, et notamment celui de
mettre f n au contrat ou de changer de produit ou de fournlsseur,
e) toute menace d'action alors que cette action nest pas Idgalement possible ;
Consid6rant, d'abord, que les parties n'invoquent aucun 616ment pr6cis au soutien de
leur affirmation selon laquelle l'offre litigieuse serait contraire A la diligence professionnelle ;
Qu'ensuite, Panalyse de l'o£fre au regard des crit6res 6num6r6s A Particle 9 ne conduit
pas A retenir qu'elle recourt au harc6lement, A la contrainte, y compris la force physique, ou A une
influence injustifi6e ;
Qu'enfln, et contrairement A ce que pr6tendent SFR et Free, le seul fait que le
consommateur doive souscrire un abonnement ADSL Orange pour obtenir Facas h la chaine
Orange Sports ne rdpond pas a la d6finition de la contrainte dnonc6e h Particle 8 ; qu'il est
constant en effet que, dans 1e cadre de la concurrence qu'ils se livrent, tous les FAI s'efforcent
d'enrichir le contenu de leurs offres pour les rendre plus attractives, par la mise en place de
services innovants ou Pacquisition de droits exclusifs sur des contenus audiovisuels,
cindmatographiques ou sportifs 6v6nementiels ; qu'ainsi, Free proposait r6cemment 16 bouquets
d'environ 150 chaines, ayant int6gr6 r6cemment 28 nouvelles chaines dont 6 sportives, outre
50 chaines A 1'unit6, et SFR, pour sa part, offrait 14 bouquets' de plus de 150 chaines et
11 chaines A Punit6, dont la chaine br6silienne T$ Globe International qui n'est pas accessible
autrement en France ; qu'en outre, PARCEP a releve dans un avis du 8 janvier 20081'existence
d'accords exclusifs, conclus entre Free et le groupe Canal + pour 1'acc6s des abounds de Free it
la plate-forme ^VoD "Canal Play", ou encore entre Neuf Cegetel et Universal Music pour la
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fourniture d'une offre de location illimit6e de titres dans le cadre du forfait 100 % Neuf Box ;
qu'il rdsulte ndcessairement de cette configuration du marchd, et en particulier de la structure de
l'offre, que le consommateur moyen qui s'apprete A souscrire un abonnement ADSL se
ddtermine, pr6cisdment, en considdration des services qui y sont associds et, partant, des
capacit6s de diff6renciation de ces dernieres par rapport aux offres concurrentes ; que, daps ces
conditions, it ne saurait titre consid6rd que le fait que 1'acces a la chaine Orange Sports soit
associ6 exclusivement A l'offre ADSL de Orange altere de fagon significative sa libertd de choix
A l'dgard des offres ADSL, bien au contraire, Pessentiel au lens de la directive etant qu'il soit
libre de ne pas y souscrire, ce qui n'est pas contest6 en 1'espece ;
Considdrant que, dans ces conditions, it ne peut titre fait grief A France x616com et
Orange d'avoir enfreint Particle L. 122-1 du code de Is consommation, tel qu'interpr6t6 A la
lumidre de la directive 2005/29/CE du Parlement europden et du Conseil, du 1 I mai 2005,
relative aux pratiques commerciales d6loyales des entreprises vis-A-vis des consommateurs dans
le march6 int6rieur ; qu' it suit de Ih que le jugement doit titre infirm6 en toutes ses dispositions,
sauf en ce qu'il ddclare la Ligue de football professionnel recevable en son intervention
volontaire, et les demandes de Free et SFR rejet6es ;
Et consid6rant que, SFR et Free n'ont pas fait de leur droit d'agir en justice un usage
fautif ; que France T61ecom et Orange doivent €tre d6bout6es de leur demande de dommages et
intdr8ts pr6sentd6's sur ce fondement ;
Considdrant enfin que France Tdl6com, Orange et la Ligue de football professionnel ont
du exposer des frais non compris dans les d6pens qu'il serait inequitable de latsser en totalite A
leur charge ; qu'il y a lieu de leur accorder le bendfice des dispositions de Particle 700 du code
de procedure civile, daps la mesure qui sera pr6cis6e au dispositif ;
PAR CES MOTIFS
Dit n'y avoir lieu de rejeter les conclusions du ministre charg6 de 1'Economie, ni
d'6carter Favis de 1'ARCEP du 19 mars 2009,
Ddolare I'ANLSP recevable en son intervention volontaire,
Inftrme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il ddclare la Ligue de
football professionnel recevable A`t'ntervention volontaire,
Et statuant A nouveau,
Rejette les demandes des societds SFR et Free,
Rejette la demande de dommages et inter@ts pour procddure abusive form6e par lea
socidt6s France T616com et Orange,
Condamne, en application de Particle 700 du code de procedure civile, les socidtds SFR
et Free, chacune, A payer A la soci6te France Te16com la somme de 10 000 euros, A la socidtd
Orange Foot celle de 10 000 euros et A la Ligue de football professionnel celle de 5 000 euros
et rejette leurs demandes,
Condamne les socidtes SFR et Free aux d6pens de premi&e instance et d'appel et dit
que ces derniers pourront @tre recouvrds conformdment aux dispositions de Particle 699 du code
de proced a civile.
Le Off{ed
La Presidente
.qw.
l
H, MZE MCHINDA
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H. DEURBERGUE
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