visualiser ce numéro
Transcription
visualiser ce numéro
Décembre 2014 / Numéro 7 Spécial environnement > Anne Hidalgo, Paris se rapproche de Kinshasa > Bivac et KPMG en appui à l'amélioration du climat des affaires > Bienvenue au Goethe Institut Édito Photo : Bernard Poudevigne Willkommen !!! B ienvenue à l’Institut Goethe qui revient à Kinshasa après plus de deux décennies de fermeture. Bienvenue à Anne Hidalgo, présente en RDC à l’occasion de la 34ème assemblée générale de l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF). Bienvenue à Agnès Polet, «madame tout-le-monde», femme-courage, dont le grave accident n’a pas amoindri l’engagement humanitaire. Bienvenue, enfin, aux artistes arrivés des quatre coins du monde pour participer à la biennale «Yango», grande première pour les arts plastiques en RDC. Et surtout Joyeux Noël et Bonne Année à tous nos lecteurs puisque ce numéro 7 paraît en cette période de fêtes. Et ce n’est pas un hasard si l’arbre illustrant la première de couverture, à défaut de revêtir boules et guirlandes, étend majestueusement ses immenses frondaisons en ce qui semble représenter le V de la victoire. En cette fin d’année, après tout, pourquoi ne pas rester fidèles à la tradition éditoriale d’Impact et dire bien haut toutes les raisons qui nous permettent d’espérer un avenir meilleur pour un pays trop souvent vu à travers le prisme de ses guerres et de ses épidémies. Espérance politique avec la vision d’un enjeu stratégique dévoilée par le ministre de l’Environnement, de la Conservation de la Nature et du Tourisme. Mais aussi avec le rapprochement opéré entre deux grandes capitales à l’occasion de la rencontre entre Anne Hidalgo, Maire de Paris et André Kimbuta, gouverneur de Kinshasa. Il n’est jusqu’aux grands partenaires de la RDC pour témoigner d’un attachement à la reconstruction de ce grand pays. Le témoignage de Wolfgang Manig, ambassadeur d’A llemagne, est, à cet égard, révélateur. Bureau Veritas, un monde d’expertise et une société au coeur des marchés Espérance économique avec deux grandes entreprises, KPMG et Bureau Veritas, engagées dans le processus d’amélioration du climat des affaires lancé par les autorités congolaises. Autre exemple, celui de Jean Bamanisa, homme d’affaires devenu député national puis gouverneur de la Province orientale : il livre à nos lecteurs son combat quotidien pour développer un territoire aussi vaste que l’Espagne, le but ultime étant l’amélioration des conditions de vie de sa population. Le Groupe Bureau Veritas et sa filiale BIVAC vous proposent une gamme étendue de services spécialisés dans le domaine de l’inspection de marchandises, de la certification, de l’évaluation de conformité, de la formation et du conseil. Il est un acteur mondial sur des marchés tels que la facilitation du commerce et particulièrement celui du Guichet Unique du Commerce Extérieur. Plateforme d’informations sécurisée et dédiée aux communautés du commerce extérieur pour toutes leurs opérations d’Import – Export, Transit et Transbordement, elle facilite et accélère le dédouanement des marchandises. Vous l’aurez deviné, le sujet retenu comme fil conducteur de ce nouveau numéro est d’ailleurs de ceux qui ont une influence directe sur la vie quotidienne de tous : l’environnement. Et la lecture du dossier réalisé par l’A FD incite, là-aussi, à l’espoir sinon à l’optimisme quand on constate la mobilisation des agences internationales et des partenaires bilatéraux de la RDC. Et puisque l’on parle « fêtes », Impact vous propose de belles pages culturelles, parfois excentriques. Avec Colin Delfosse et ses photographies de catcheurs, avec les toiles des sœurs Chevalme, qui transpirent l’ambiance de la SAPE. Ou encore dans l’univers fantasmagorique d’Eugenia Velis. *Avançons en confiance Pour en connaître les modalités, nous vous invitons à nous contacter. À nouveau Joyeux Noël ! La rédaction d’Impact est d'ailleurs heureuse de vous offrir un tout nouveau site internet, totalement repensé et compatible avec vos tablettes et smartphones. L'adresse reste inchangée : www.impact.cd BIVAC RDC Avenue des Etoiles 22 09 La Gombe - Kinshasa République Démocratique du Congo Tél. : +(243) 99 00 36 910 [email protected] www.bureauveritas.com/gsit Philippe Larrieu Directeur de la publication * www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 3 10 88 N ° 7 / D ÉC E M BR E 2 0 14 Sommaire 64 58 Éditorial 03 Willkommen !!! Politique 06 Les ressources naturelles de la RDC : Interview exclusive du ministre de l'Environnement 10 Wir kehren zurück ! 14 Anne Hidalgo en RDC 18 De beaux projets pour les Kinois ! 22 Kinshasa, capitale des maires francophones… Économie 24 Adapter le contexte et les mentalités aux ambitions de modernité... 28 Un nouveau cadre pour le commerce ou une révolution pour le commerce extérieur 32 Restaurer l’autorité de l’Etat et relancer l’économie : Sept questions au gouverneur de la Province Orientale 06 4 / Impact n°7 / Décembre 2014 82 28 36 Création de l’Agence Française d’Expertise Technique Internationale (AFETI) : Un nouvel opérateur pour de nouvelles ambitions Dossier 40 "Tout naturellement..." 42 AFD : Concilier le progrès économique et social et préserver l'environnement en RDC 44 Lutte contre le dérèglement climatique et développement durable : des solutions innovantes et efficaces... 46 Les images satellite au service de la lutte contre la déforestation dans le bassin du Congo 48 Le projet Agedufor : pour une gestion durable de la forêt du bassin de RDC 52 La CICOS face aux enjeux de la gestion intégrée des ressources en eau du Congo 96 Le Musée de l’Echangeur accueille le « World Press Photo » 2014 98 Beau début de saison à Bilembo 100 Impact junior : Il y a 100 ans, la Première Guerre mondiale 103 Impact junior : Madame Livingstone 54 La Banque Mondiale, pour une gestion durable des ressources naturelles en RDC 58 Le WWF, face aux enjeux de la préservation de la biodiversité Société 62 Un choeur gros comme ça…! 64 L’arbre dans la société congolaise 68 La forêt de la Province Orientale : poumon de l’économie « verte » 72 Le Katanga et son Miombo : une dégradation préoccupante 74 Les Congolais, la Force publique belge et la Première Guerre mondiale Vie pratique 104 À la conquête du Kin-Ouest… 110 Manger sain et local ? 114 Une foule d’infos pour comprendre le Congo 88 Yango : première biennale d’art contemporain de Kinshasa 94 Kinshasa, une plate-forme culturelle en pleine renaissance En couverture : la vie au village dans le Bas-Congo Culture 78 Bienvenue au Goethe Institut 80 Deuxième édition de la Fête du livre : le public au rendez-vous 82 Colin Delfosse sur orbite congolaise www.impact.cd (photo : Martin van der Belen) 114 Directeur de publication Philippe Larrieu Conseiller spécial du directeur Bernard Poudevigne Secrétaire de rédaction Martin van der Belen Comité de rédaction Philippe Bosse, Patrick Botrel, Michel Champredon, Sébastien Dauré, Patrick Demougin, Chloé Douafli, Matthieu Juin-Levite, Emmanuelle Marqui, Jean-Christophe Maurin, Sabrina Palma, Gérard Pointe, Christophe Roussin, Mélanie Sirdey-Coid, Matthieu Vuillermet, Antoine Yvernault. Conception et réalisation graphique Gédéon Mukendi (IFK) Impression : Imprimerie AGB Dépôt légal BNC N° JE 3.01301-57012 Impact est un magazine gratuit et ne peut pas être vendu www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 5 Les ressources naturelles de la RDC Un enjeu stratégique pour le développement nombreux produits et services indispensables aux populations (pharmacopée traditionnelle, alimentation, bois de chauffe, etc.). Elles abritent enfin de multiples espèces de flore et de faune. > Le réseau hydrographique de la RDC est dense et constitue la moitié des réserves d’eau douce du continent africain. La RDC est membre de plusieurs commissions et initiatives régionales traitant de la gestion des ressources en eau, telles que l’Initiative du Bassin du Nil (IBN), la Commission Internationale Congo – Oubangui - Sangha (CICOS), l’Autorité du Bassin du Lac Kivu et de la Rivière Ruzizi dont les textes fondateurs viennent d’être signés à Kinshasa, le 4 novembre 2014. > La RDC abrite une riche biodiversité dont de nombreuses espèces floristiques et fauniques endémiques. Les plus emblématiques étant le gorille des plaines de l’Est, le bonobo, l’okapi, le paon congolais, la girafe de la Garamba. Elle a développé un vaste réseau d’aires protégées, composé de huit parcs nationaux dont cinq inscrits au Patrimoine mondial (Garamba, Virunga, Kahuzi-Biega, Maïko et Salonga). Quels sont les grands enjeux de la protection en RDC ? Les enjeux se situent au niveau national et international. > En RDC, le défi est de concilier la protection des ressources naturelles avec le développement socio-économique des populations locales qui exercent des pressions croissantes sur ces res- Le gouvernement s’est engagé depuis plusieurs années dans la mise en place des réformes nécessaires à l’amélioration de la protection de l’environnement et de la gestion des ressources naturelles. sources. C’est la raison d’être du moratoire décrété au bénéfice du processus de conversion des anciens titres de concession forestière qui aurait dû être clôturé le 31 juillet 2014. > Au plan international, comme je l'ai déjà indiqué, la RDC doit relever un premier défi important dans la conservation de la biodiversité, notamment au regard des espèces abritées dans ses aires protégées. Un deuxième enjeu, très stratégique, réside dans le maintien de son rôle de château d’eau de l’A frique. Un troisième enjeu important se situe dans le processus de lutte contre les changements climatiques, par l’effet d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre, que sont en mesure de remplir ses forêts. Les principales causes de déforestation sont liées à la pratique traditionnelle de l’agriculture itinérante sur brûlis et à celle des coupes de bois de feu pour la consommation d’énergie domestique d’une très forte proportion de la population nationale. Pour relever ces défis, la RDC sait pouvoir compter sur le soutien multiforme de ses partenaires Photo : Seli Safari Zongo Photo : AFD POLITIQUE La RDC est connue dans le monde entier pour ses mines, ses forêts, ses fleuves, ses parcs naturels. Bavon N’Sa Mputu Elima, ministre de l’Environnement, de la Conservation de la Nature et du Tourisme, nous expose les enjeux nationaux et planétaires d’un tel patrimoine. Impact : Monsieur le ministre, pouvezvous présenter l’importance des richesses naturelles de la RDC et la politique du gouvernement en matière de protection de l’environnement ? Bavon N'sa Mputu Elima : En effet, il est reconnu internationalement que la RDC possède un potentiel immense de ressources naturelles. J’aimerais simplement insister sur les ressources 6 / Impact n°7 / Décembre 2014 dont la responsabilité de gestion incombe à mon ministère, à savoir les forêts, l’eau et la biodiversité. > Les forêts de la RDC s’étendent sur environ 150 millions d’hectares, soit les deux tiers du territoire national. Elles constituent également les deux tiers des forêts du bassin du Congo, deuxième massif forestier tropical au monde après celui de l’A mazonie. Ces forêts fournissent de www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 7 POLITIQUE techniques et financiers. À cet égard, la France, à travers l’A FD, appuie particulièrement la République démocratique du Congo pour une exploitation durable de ses forêts. Quelles sont les réformes engagées actuellement par le Gouvernement en faveur de la prise en compte et de la protection de l’environnement ? Le gouvernement s’est engagé depuis plusieurs années dans la mise en place des réformes nécessaires à l’amélioration de la protection de l’environnement et de la gestion des ressources naturelles. Rappelons-en les principales : > L’arsenal juridique a été renforcé avec notamment la refonte et la formulation des lois et textes règlementaires relatifs aux forêts, à la conservation de la nature et à l’environnement. Photo : M&VAnastassiou Riche biodiversité Les forêts de la RDC fournissent de nombreux produits et services indispensables aux populations (pharmacopée traditionnelle, alimentation, bois de chauffe, etc.). Elles abritent aussi de nombreuses espèces de flore et de faune. 8 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Pour relever ces enjeux, la RDC sait pouvoir compter sur le soutien multiforme de ses partenaires techniques et financiers. À cet égard, la France, à travers l’AFD, appuie particulièrement la RDC pour une exploitation durable de ses forêts. - une phase d’investissements a été entamée. Précisons que les besoins financiers pour soutenir cette phase d’investissement, dont les programmes sont développés dans la Stratégie nationale REDD+ se chiffrent en milliards de dollars. Un premier apport a été obtenu avec le soutien de la Banque Mondiale à un projet REDD+ situé dans la province du Bandundu, districts des Plateaux et de Mai-Ndombe, qui va conduire à la conclusion d’un contrat d’achat – vente de crédits carbone. La multiplication de telles initiatives contribuera, à terme, à améliorer la gouvernance dans la gestion des nos ressources naturelles. Propos recueillis par Philippe Bosse Photo : Seli Safari Zongo Photo : MarclSchauer Photo : Virginie Leroy_AFD Pionnier de la REDD+ Depuis le lancement du processus de préparation à la REDD+ en 2008, la RDC fait partie des pays pionniers dans ce domaine. > Un Programme national Environnement, Forêts, Eau et Biodiversité a été élaboré et validé en 2012. > Un processus de suivi-évaluation des actions menées a été établi dans le cadre d’une matrice de gouvernance préparé par le gouvernement en partenariat avec la Banque Mondiale. > Un programme de rajeunissement des effectifs et de renforcement des capacités des services administratifs a été engagé avec le soutien de la Banque Mondiale et de la Coopération allemande. > Un fonds fiduciaire pour la conservation de la nature, appelé Fonds Okapi, a été créé et doit être capitalisé à hauteur de 50 millions de dollars. > Une politique d’assainissement a été récemment adoptée et un cadre légal est en cours d’élaboration. Enfin, plusieurs instruments juridiques internationaux ont été ratifiés pour protéger nos ressources marines et côtières : > la Convention d’Abidjan sur la coopération en matière de protection et de mise en valeur du milieu marin et des zones côtières, > la Convention MARPOL pour la prévention de la pollution par les navires, > la convention Internationale sur la préparation, la lutte et la coopération en matière de pollution par les hydrocarbures, > la Convention Internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, > la Convention FIPOL, etc. La RDC est un pays immense. Sa nature et ses forêts représentent des enjeux importants pour sa population, mais aussi pour la planète et la communauté internationale. Pourriez-vous rappeler l’engagement de la RDC dans la lutte contre le changement climatique et les progrès accomplis dans la mise en place du mécanisme REDD+ ? Depuis le lancement du processus de préparation à la REDD+ en 2008, la RDC, qui fait partie des pays pionniers dans ce domaine, a réalisé les importantes avancées suivantes : - une stratégie REDD+ a été produite, validée par l’ensemble des parties prenantes et approuvée par le gouvernement ; - un cadre juridique et institutionnel de mise en œuvre de la REDD+ est en phase de montage ; - un Fonds national REDD+ a été institué par décret du Premier Ministre ; www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 9 POLITIQUE Photos : Martin van der Belen productions théâtrales et musicales. De par son mode de fonctionnement très décentralisé, le Goethe Institut installé en Afrique du Sud, plus précisément à Johannesburg, a été en mesure de soutenir, tout au long de ces années, les artistes congolais du cinéma, de la musique, de la danse, des arts plastiques (la liste est loin d’être exhaustive) et de promouvoir les échanges culturels entre la RDC et l’A llemagne. J’ajoute que je suis reconnaissant à l’Institut français de Kinshasa d’avoir appuyé certaines de nos initiatives, alors que nous n’avions pas de présence institutionnelle. Je pense par exemple à ce que nous avons fait au profit de l’Orchestre symphonique kimbanguiste, l’an passé au Théâtre de verdure, à l’occasion de la célébration du cinquantenaire du Traité de l’Elysée. Wir kehren zurück !!!* Le Docteur Wolfgang Manig, ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne en RDC, a officiellement annoncé à la presse, le 19 novembre dernier, l’ouverture d’un Bureau de liaison du Goethe Institut à Kinshasa, au sein de la Halle de la Gombe. Effaçant une absence de 23 ans, qui n’a jamais empêché la poursuite d’une solide coopération, l’Allemagne revient donc en force dans le secteur culturel. Le Dr. Manig présente cette renaissance et plus généralement l’action de son pays en République démocratique du Congo. Impact : En cette période de fêtes, l’Allemagne vient de faire un beau cadeau aux Kinois avec la réouverture du Goethe Institut. Pourriez-vous expliquer à nos lecteurs le contexte de ce retour ? Wolfgang Manig : Le Goethe Institut est une institution chargée de renforcer les relations culturelles entre la République fédérale d’A llemagne et le reste du monde. Bien que financé par le ministère des Affaires étrangères, il est indépendant de ce dernier. Nous avions effectivement fermé nos installations à Kinshasa il y a 23 ans, en raison de la dégradation du climat 10 / Impact n°7 / Décembre 2014 sécuritaire et des pillages dont nous avions été victimes. Pour autant, cette longue période de fermeture ne signifie pas que notre coopération culturelle avec la RDC ait été interrompue. Mais aujourd’hui, nous revenons à une présence «physique» de la culture allemande. *Wir kehren zurück!!! est une expression signifiant en français nous sommes de retour ! Vous dites que les relations ne se sont pas interrompues sur le plan culturel. Pourriez-vous nous donner quelques exemples ? La section culturelle de notre ambassade n’a jamais cessé de fonctionner. Elle a soutenu des www.impact.cd Vous venez d’évoquer l’Institut français, où s’installera le Goethe Institut dans un premier temps. Comment ce dernier va-t-il s’organiser, au sein de la Halle de la Gombe ? Nous allons d’abord ouvrir un Bureau de liaison. C’est une procédure classique, qui débouche normalement au bout de deux ans sur une implantation capable de proposer des cours de langue et des ateliers dans des secteurs culturels aussi variés que possible. Mais pour l’instant, je suis heureux que l’Institut français accueille notre Bureau. Je pense que le positionnement de ce dernier au sein de la Halle de la Gombe, lieu très connu des Kinois, est à la fois une occasion de renforcer la coopération franco-allemande dans le domaine de la culture, mais aussi d’engager une coopération trilatérale germano-franco-congolaise. Mais je crois savoir qu’indépendamment du Bureau de liaison, vous allez offrir au public de Kinshasa une bibliothèque dédiée aux auteurs allemands, dont le nombre et la qualité n’est plus à démontrer ? Oui, nous allons proposer un certain nombre d’ouvrages qui constituent une première contribution à l’offre culturelle allemande. Nous avons aussi découvert qu’il existe en RDC quelques îlots où la langue allemande a été enseignée (je pense notamment à l’université de Kisangani, capitale de la Province Orientale). Nous envisageons donc, en Province Orientale mais aussi à Kinshasa et dans d’autres localités, d'offrir des enseignements de langue allemande car la de- mande, bien que nous soyons dans une région francophone, est réelle. Cette bibliothèque n’est qu’une première étape. L’Allemagne n’est pas seulement un grand et généreux partenaire de la RDC sur le plan culturel, c’est aussi un très grand partenaire en matière d’aide au développement. Pourriez-vous nous donner quelques exemples ? La coopération entre la RDC et l’A llemagne est effectivement dense et très étroite. Nous participons notamment aux efforts de stabilisation engagés par le gouvernement congolais et ses partenaires techniques et financiers. La coopération entre la RDC et l’Allemagne est effectivement dense et très étroite. Nous participons notamment aux efforts de stabilisation engagés par le gouvernement congolais et ses partenaires techniques et financiers. Impact n°7 / Décembre 2014 / 11 POLITIQUE rebelles. Relèvent aussi de cette surveillance, les «exploitations minières artisanales» susceptibles de contribuer au financement de ces derniers. Il ne s’agit bien sûr que d’une partie de nos ambitions. Notre appui à la RDC vise aussi le renforcement de la coopération transfrontalière à l’est du pays. Il faut trouver une solution durable pour solidifier la cohabitation et la coopération avec les Etats voisins, notamment le Rwanda et l’Ouganda. Nous pouvons, à cet égard, nous référer au bel exemple de l’amitié entre la France et l’A llemagne, deux pays qui ont pourtant connu plusieurs conflits majeurs au cours de leur histoire. Mais ce pays étant, en superficie, le deuxième «poumon» de la planète Terre, nous intervenons aussi de façon appuyée dans le domaine de la protection de l’environnement. Bien d’autres sujets font l’objet d’un soutien allemand à la RDC. Je pense en particulier au secteur de l’eau et de la microfinance appliquée aux impératifs du développement durable, autant de domaines qui contribuent à la satisfaction des besoins vitaux de la population congolaise. Au-delà de la culture et de l’assistance technique, il y a bien sûr la coopération politique, qui fait l’objet d’un suivi régulier. Un dernier domaine que l’A llemagne entend développer : les relations économiques. Cela dépendra beaucoup des conditions offertes par la RDC. Mais je crois que la stabilisation du pays se poursuivant, il est possible d’espérer un rétablissement de liens économique plus étroits. Vous venez de parler des relations politiques. À quel niveau se situent-elles aujourd’hui ? L’A llemagne exerce actuellement la présidence du Groupe international de contact de la Région des Grands Lacs jusqu’à la fin du mois de janvier de l’année prochaine. Dans ce contexte, elle sera proactive dans des secteurs tels que la certification des minéraux, cette approche étant en synergie avec notre propre coopération. L’objectif est de mieux contrôler les flux physiques et financiers susceptibles d’alimenter les mouvements 12 / Impact n°7 / Décembre 2014 Revenons à l’économie si vous le voulez bien. Que manque-t-il, selon vous, dans ce pays pour rétablir la confiance des investisseurs ? Tout tourne, selon moi, autour du thème de la bonne gouvernance. Je ne doute pas que les dirigeants de ce pays aient la volonté de le réformer en profondeur. Mais après trente années de bouleversements et de luttes fratricides, il faut aussi rétablir la solidarité de la société congolaise et développer les capacités de l’appareil administratif. Nombreux sont les exemples, dans d’autres Etats pourtant moins affectés par des conflits, de dirigeants aux ambitions réformatrices : ils n’ont rien pu faire de durable et d’effectif, sans un développement des compétences. A cet égard, la présence et l’implication en RDC de l’Union Européenne mais aussi d’autres partenaires bi- et multilatéraux, devraient permettre d’appuyer ces réformes et de soutenir l’administration et la société congolaises. Mais encore une fois, un développement harmonieux ne peut se faire que dans le cadre d’une vision réformatrice du pays et d’une société congolaise réconciliée avec ellemême. Propos recueillis par P.L. Je pense que le positionnement du Goethe Institut au sein de l'Institut français, lieu très connu des Kinois, est une occasion de renforcer la coopération franco-allemande dans le domaine de la culture, mais aussi d’engager une coopération trilatérale germano-franco-congolaise. www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 13 POLITIQUE Cette langue véhicule des valeurs et nous permet d’appréhender les défis qui se posent à nos sociétés humaines en intégrant des éléments d’ordre très différents. Certes, les technologies sont là pour résoudre une partie des problèmes, les questions de cohésion sociétale, de santé, d’éducation, de genre, de démocratie, de parole donnée aux habitants sont autant d’éléments que nous pouvons aborder, de par notre langue commune, au sein de la francophonie. En d’autres termes, mon message tend à promouvoir le partage d’expériences portées par les maires francophones. Ainsi en est-il, par exemple, de l’expérience, portée par l’A IMF, des « maires médiateurs », c’est-àdire de ceux qui interviennent pour trouver des solutions à des conflits de voisinage, y compris d’ordre ethnique. Ce genre d’initiatives, que l’on rencontre à Kinshasa et à Brazzaville, sera étendu à Bangui. Pour conclure, je crois à l’importance des pouvoirs locaux, dès lors, bien sûr, qu’ils ne sont pas déconnectés des Etats mais travaillent en lien avec ces derniers. Paris encore plus proche de Kinshasa ! Anne Hidalgo, maire de Paris, est venue en RDC pour présider la 34ème Assemblée générale de l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF). Elle a profité de cette visite pour signer un accord de coopération entre la capitale française et Kinshasa. Un accord bilatéral Anne Hidalgo, maire de Paris, échange avec André Kimbuta Yango, son homologue de la ville de Kinshasa, les termes de l'accord de partenariat qui rapprochera les deux capitales. C’est donc sous cette casquette de présidente de l’AIMF que vous êtes venue pour la première fois en RDC ? Tout à fait. Ce faisant, je réponds à une demande assez ancienne de nos amis africains désireux d’organiser une réunion en RDC. Une telle démarche m’a paru d’autant plus justifiée que visà-vis d’un pays résolument engagé dans un vaste mouvement de réformes, réunir l’ensemble des maires francophones à Kinshasa et y apporter la contribution de l’A IMF prenait tout son sens. J’ajoute que c’est aussi un signal fort que nous donnons à ses habitants. N’oublions pas enfin que, s’agissant d’une assemblée générale de maires francophones, c’est aussi un moment très important pour la francophonie. Quel sera l’essentiel de vos messages pendant ces quelques jours de congrès ? D’abord que les pouvoirs locaux sont en place et agissent pour contribuer à relever les grands défis de la planète, avec les Etats, bien sûr. Car il est vrai que les pouvoirs locaux (municipalités, régions…) ont une capacité et une rapidité d’action qui sont, sans doute, moins importantes que celle des gouvernements sur certains sujets. Pour autant, Etats et pouvoirs locaux sont complémentaires. Prenons, par exemple, le thème du changement climatique. Les Etats participeront à Paris, en 2015, à la 21ème conférence mondiale sur le climat ; ils y joueront un rôle prédominant dans la fixation de nouveaux objectifs. Dans le même temps, nombreuses seront les solutions qui seront trouvées localement. D’ailleurs, même à l’ONU, on est conscient qu’il 14 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Photos : Martin van der Belen Impact : Vous êtes la première femme à présider aux destinées de la capitale de la France. Que vous inspire cette situation ? Anne Hidalgo : Un grand bonheur et une grande responsabilité. Pour moi, être maire de Paris, c’est être investie d’une formidable mission dans l’une des plus belles villes du monde ; une ville qui impressionne de par son histoire et sa capacité à se réinventer. En ma qualité de maire de Paris, je préside aussi l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF). Là-aussi, c’est la première fois qu’une femme est à la tête de cette institution. Je mesure donc pleinement le poids des responsabilités qui pèsent sur mes épaules. Mais j’ai beaucoup d’énergie et je les assumerai. faut donner la parole aux villes, qui sont les principaux acteurs du changement climatique, à côté des entreprises, des ONG et des Etats. C’est tout le sens de l’invitation qui m’a été faite en septembre dernier par le Secrétaire Général, M. Ban Ki-moon, à m’exprimer devant l’Assemblée Générale sur cette question du climat. Autre message important que je veux faire passer à Kinshasa : la francophonie est une famille ayant en commun une langue et une histoire. www.impact.cd Indépendamment de ce grand rendezvous international, je crois savoir que vous avez une échéance d’ordre bilatéral : la signature, avec le gouverneur de Kinshasa, d’un accord de coopération. Pourriez-vous nous en dire plus ? Le gouverneur de Kinshasa a souhaité que Paris puisse s’engager de façon concrète de manière bilatérale. J’ai naturellement accepté car il y a beaucoup de sujets sur lesquels nous avons un intérêt commun : d’abord l’environnement et l’urbanisme, car je pense qu’une ville comme Kinshasa, qui connaît une urbanisation débridée, a besoin d’un certain nombre d’apports, d’expertises, dont nous disposons à Paris. Mais d’autres sujets tels que la gestion des finances locales ou la prise en compte plus affirmée de la santé des femmes pourront conduire des experts et fonctionnaires de la ville de Paris sur les rives du fleuve Congo. Ils travailleront avec les services correspondants ou accompagneront des projets, notamment en matière de santé. Pour moi, de tels accords de partenariat ne doivent pas rester à l’état de déclarations amicales d’intention. Ils doivent être appliqués. Je suis très pragmatique et lorsque je signe un document de ce genre, j’entends qu’une telle démarche se traduise rapidement par des actes concrets. Impact n°7 / Décembre 2014 / 15 POLITIQUE Ci-dessous, en compagnie de l'ambassadeur de France, Luc Hallade. est possible : nous l’avons fait et nous allons le généraliser ; chauffer des immeubles de bureaux avec la chaleur produite par les ordinateurs lorsqu’ils sont en marche : nous l’avons expérimenté et cela fonctionne. Pour résumer, la transition écologique ne consiste pas seulement à s’appuyer sur les énergies renouvelables. Il faut aussi recourir à des sources d’énergie relevant d’économies circulaires, rechercher de nouvelles façons de faire fonctionner la ville sur le plan énergétique. - Autre grand chantier auquel je me suis attelée: 16 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Photos : MVDB Je voudrais, pour terminer, revenir à Paris. En cette fin d’année, quels sont vos principaux objectifs et quelles sont les pensées que vous avez pour les Parisiens ? D’abord Paris est une ville-monde. Elle est très ouverte. Elle est curieuse. Sa population est jeune, énergique, solidaire ; elle ne vit pas à l’écart des bouleversements qui affectent le reste de la planète. Je veux sincèrement préserver et même amplifier ce caractère très particulier de Paris, cette qualité de ville-monde. - Pour les Parisiens, mon objectif numéro un est le logement. La crise du logement ayant atteint un seuil critique, je veux être en mesure de leur Visite chalereuse à Kinshasa Anne Hidalgo a longuement rencontré les femmes lors de sa visite à Kinshasa. Outre l'environnement, l'urbanisme ou les finances locales, la santé des femmes fait en effet partie des thèmes qui feront l'objet de projets de coopération entre les deux villes. Après son passage chez le gouverneur Kimbuta, Anne Hidalgo a visté l'exposition du plasticien Dikisongele... offrir chaque année 10.000 logements supplémentaires, que ces derniers relèvent du logement social ou non. Le « réservoir foncier » de la capitale étant relativement limité, je m’appuierai non seulement sur la « construction neuve » mais aussi sur la transformation de bureaux en logements. Cette politique devra être complétée par un important travail autour du coût du logement. Au niveau du marché de l’immobilier, il faudra travailler avec le gouvernement pour essayer de contenir les coûts, en surveillant par exemple l’encadrement loyers. - La transition écologique est un autre de mes objectifs prioritaires. Nous avons expérimenté, les années précédentes, de nouvelles sources d’énergie. Deux exemples : chauffer une école avec la chaleur produite par les égouts de Paris les transports. Vous le savez, nous devons faire face à des pics de pollution liés notamment à un trafic automobile qui reste important même s’il est en diminution sensible. D’où une politique de transports consistant, d’une part à prolonger les lignes de tramway sur les boulevards des maréchaux, d’autre part à accroître le parc de bus à mobilité électrique. Mais la « mobilité douce » (vélo, marche à pied) ne sera pas oubliée. Nous allons essayer d’amplifier la pratique du vélo d’autant que les Parisiens l’utilisent désormais, non seulement pour l’agrément mais aussi pour leurs déplacements domicile – travail. Comment y parvenir ? Avec l’installation d’une mobilité électrique sur les vélos et, dans le même temps, l’augmentation du nombre de piste cyclables www.impact.cd dans l’ensemble de la capitale. - Enfin je mettrai en œuvre un programme de développement économique s’appuyant sur le monde des start-ups, notre ville ayant fait le pari du numérique. Ce programme sera original en ce qu’il s’articulera avec une approche fondée sur l’environnement (car nous devons assumer nos responsabilités en matière de climat et de transition écologique) et sur le social car il ne peut y avoir de société parisienne harmonieuse sans une cohésion assurée, en particulier, par des services sociaux notamment aux plus démunis. J’ai, en effet, conscience que c’est à travers les entreprises, dans les secteurs traditionnels mais aussi dans des secteurs «nouveaux» tels que le numérique, que nous allons pouvoir écrire de nouvelles pages pour notre capitale. Propos recueillis par PL. Impact n°7 / Décembre 2014 / 17 POLITIQUE De beaux projets pour Kinshasa ! Impact : Vous avez récemment reçu Anne Hidalgo, maire de Paris, avec qui vous avez signé un accord de coopération. Pourriez-vous nous en dire davantage ? André Kimbuta : Tout a commencé lors d’un de mes voyages à Paris au cours duquel j’ai rencontré Anne Hidalgo. À cette occasion, nous sommes convenus d’élaborer un projet qui serait formalisé et signé à Kinshasa. Dans la mesure où nous appartenons tous deux à l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF) et du fait que Kinshasa est, du point de vue démographique, la deuxième ville francophone du monde, il nous paraissait normal que nos deux métropoles fûssent liées par un accord de coopération. Dans un souci d’efficacité, nous avons décidé de nous limiter à quelques thèmes pouvant avoir des répercussions concrètes et aussi rapides que possible sur la vie des Kinois : je pense notamment à l’aménagement urbain, la promotion de la femme, l’éducation, la santé et la gestion des finances dans le cadre de l’amélioration de la gouvernance. Cette coopération ne sera d’ailleurs pas à sens unique. Certes, nous aurons besoins des experts et spécialistes de la ville de Paris dans les secteurs que je viens d’énoncer. Mais du point de vue culturel notamment, il s’agira réellement d’échanges car Kinshasa a beaucoup à apporter, et dans de nombreuses disciplines. En définitive, si l’on reprend le contexte de l’assemblée générale de l’A IMF, à laquelle nous avons tous deux participé, l’accord de coopération que nous venons de signer a valeur d’exemple. Vous venez de parler d’experts et de spécialistes. Qu’attendez-vous concrètement de Paris ? Nous ne cherchons pas à réinventer la roue. La ville de Paris a une expérience forte et ancienne dans tous les domaines que je viens d’énumérer. L’être humain étant au centre de tout développement, nous allons donc essayer de renforcer les capacités de nos agents au moyen de stages, des formations et d’ateliers. En premier lieu, nous allons donc privilégier la formation. Début décembre, je reviendrai d’ailleurs à Paris à l’invitation du directeur général d’ONU-Sida et d’ONU-Habitat. Je saisirai cette occasion pour 18 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Photos : MVDB Le 5 novembre dernier Anne Hidalgo, maire de Paris, et André Kimbuta, gouverneur de Kinshasa, ont signé, à l’Hôtel de ville de la capitale congolaise, un accord de jumelage entre les deux grandes métropoles. André Kimbuta revient sur ce moment historique et sur les perspectives ouvertes par ce texte fondateur. Pour les lecteurs d’Impact, il livre aussi sa vision de la coopération internationale et ses ambitions pour les Kinois. rencontrer, avec quelques collaborateurs, certains responsables qui seront partie prenante à cette coopération en matière de développement des capacités. D’une manière générale, nous nous essaierons de recueillir un maximum d’informations pratiques concernant les secteurs que je viens d’évoquer afin de pouvoir nous en inspirer à Kinshasa. Au-delà de la ville de Paris, avez-vous déjà noué d’autres coopérations dans la sphère internationale ? Naturellement. Vous savez que nous sommes une ancienne colonie belge et il est normal que nous soyons jumelés avec Bruxelles. En France, avant Paris nous avions noué un partenariat avec la ville de Nice. En Afrique, nous avons des accords avec Abidjan, Dakar et Pretoria. La ville de Kinshasa a donc une vraie politique étrangère ? Naturellement. Pour nous, la coopération in- www.impact.cd ternationale représente un enjeu important et nous nous efforçons d'en élargir l’assiette au fil du temps. L’idée n’est pas seulement de partager des expériences ; il s’agit aussi de s’approprier ce qui a réussi ailleurs pour le plus grand bien de la population kinoise. À l’opposé, nos partenaires peuvent découvrir, chez nous, des projets dont ils s’inspireront. Cela a été le cas, par exemple, de nos amis sud-africains. Pour nous, la coopération internationale représente un enjeu important et nous nous efforçons d'en élargir l’assiette au fil du temps. L’idée n’est pas seulement de partager des expériences ; il s’agit aussi de s’approprier ce qui a réussi ailleurs pour le plus grand bien de la population kinoise. Impact n°7 / Décembre 2014 / 19 Il s’agit donc d’une approche de la base vers le sommet ? Oui. Ce qui nous a intéressés, c’est de mieux connaître les attentes de la population et de cerner les priorités. Je pense par exemple à l’adduction d’eau, à l’offre de soins, à la rénovation des infrastructures, à la protection civile et aux transports urbains. Autre élément particulièrement sensible : la bonne gouvernance. De beaux chantiers en perspective. En effet ! Et n’oublions pas un thème qui sera d’actualité en 2015 : le changement climatique. Je voudrais pouvoir faire de 2015 une année de l’arbre à Kinshasa, en expliquant à ses habitants l’importance du reboisement dans une ville aussi peuplée que la capitale de RDC. Ceci me paraît d’autant plus justifié que ce sont les grandes villes qui sont les plus exposées aux conséquences né- Photos : Francis Wambole En cette fin d’année, avez-vous déjà défini des axes d’action pour 2015 au profit de vos administrés ? Mon action s’inscrira dans une politique de la ville, elle-même reliée à la politique du gouvernement et à la vision du Chef de l’Etat. La population y adhère car elle résulte d’un processus de consultations ayant débouché sur une série de «cahiers des charges», ces derniers étant devenus une base de travail lors des «Etats généraux» de la ville de Kinshasa. Les recommandations qui ont été formulées à cette occasion sont, en définitive, devenues notre programme politique. Photo : MVDB POLITIQUE ^ Signature du partenariat entre Paris et Kinshasa Anne Hidalgo et André Kimbuta ont signé un accord de coopération entre les deux capitales, en marge de la 34e AG de l'AIMF, du 3 au 7 octobre 2014. gatives du changement climatique. Je voudrais terminer sur un chantier auquel j’attache aussi une grande importance : celui de l’éducation. J’ai, en effet, réalisé que les enseignements dispensés à notre jeunesse ne se traduisaient pas par de bons résultats scolaires. En attestent, les mauvais « scores » à l’examen d’Etat comparable à votre baccalauréat. C’est naturellement une question qui doit être prise en compte non seulement au niveau des professeurs mais aussi à celui des élèves et même des parents. Propos recueillis par P.L. 20 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 21 POLITIQUE vironnement, inégalités de richesses, flux migratoires, santé publique, notamment celles liées au sida et à l’épidémie d’Ebola, place des femmes… Ainsi, lors de la deuxième journée, consacrée à la thématique «Dialogue, Autorités Locales, Union Européenne et autres partenaires internationaux», les participants ont recommandé d'enganger un plaidoyer auprès des Etats pour un transfert effectif des compétences tant administratives que financières et un renforcement des capacités des acteurs locaux dans l’élaboration des budgets participatifs. La troisième journée a porté sur le thème «Villes en lutte contre le changement climatique». L’un des deux ateliers abordait plus précisément le rôle des villes dans cette lutte : « Quelles démarches environnementales ? Quels changements et engagements élémentaires ? ». Parmi les intervenants, Olivier Mushiete a présenté l’expérience congolaise dans le domaine des «puits carbone» agro-forestiers d’Ibi Village au plateau des Bateke, dans la périphérie de Kinshasa. La réflexion des maires a débouché sur des déclarations en faveur de la création de villes durables, misant sur la réduction de la consommation d’énergie, le recyclage et les énergies renouvelables. Les participants ayant conscience que pour une ville aussi grande que la capitale congolaise il s'agissait d'un sérieux défi à relever. S'agissant de mesures communes concrètes, la présidente de l’A IMF, Anne Hidalgo, a annoncé Kinshasa capitale des maires francophones… La 34ème Assemblée générale de l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF) s’est tenue à Kinshasa du 4 au 7 novembre. Quatre jours de réflexion et d’engagements sur les défis urbains dans un univers mondialisé… lus de 140 villes francophones étaient représentées. Et pour souligner l’importance de cette Assemblée générale des maires francophones à Kinshasa, le Président Kabila a prononcé un discours de clôture revenant sur la substance de cette riche rencontre en RDC. En effet, de nombreuses questions ont pu y être debattues : développement économique, en- 22 / Impact n°7 / Décembre 2014 ^ Maire-Président Nicéphore Soglo, ex président du Bénin, maire de Cotonou, avec Joseph Kabila, président de RDC. www.impact.cd Révélation Le professeur JeanJacques Muyembe Tamfum, directeur général de l’Institut National de Recherche Biomédical de la RDC (INRB), considéré comme l’un des meilleurs virologues congolais, a affirmé à l’occasion de la 34ème AG de l’AIMF, que «la RDC est cliniquement débarrassée de l’épidémie d’Ebola à Djera en Équateur» le lancement de neuf nouveaux projets financés à hauteur de 2 millions d’euros dans le domaine de la santé, de l’éducation et des services aux populations, devant bénéficier à près de 900.000 personnes dans diverses villes de l’univers francophone. MVDB La présidente de l’AIMF, Anne Hidalgo, a annoncé le lancement de neuf nouveaux projets financés à hauteur de 2 millions d’euros dans le domaine de la santé, de l’éducation et des services aux populations, devant bénéficier à près de 900.000 personnes dans diverses villes de l’univers francophone. Photos : Francis Wambole P ^ www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 23 ÉCONOMIE Sur ces nouveaux axes, est-ce que le dialogue avec le gouvernement est facile et où se situent les difficultés ? La RDC est un pays qui requiert une présence effective et beaucoup de détermination, car nombreux sont les défis à relever. À l’aune de mon expérience personnelle, je peux dire qu’il existe une réelle volonté réformatrice du gouvernement et du Chef de l’Etat pour faire en sorte que l’Etat fonctionne beaucoup mieux. Cette démarche s’étend au secteur privé marchand afin qu’il puisse fonctionner de manière plus libre. Président de la section RDC des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CCEF), Jean-Yves Parant dirige KPMG en RDC depuis 2004. Mais ce spécialiste en questions commerciales et en expertise comptable n’en est pas à sa première expérience africaine, puisque c’est en 1982 qu’il s’installe sur le continent, plus précisément à Abidjan. Confidences d’un esprit libre et ouvert. Impact : Vous travaillez pour KPMG depuis 1994. Pourriez-vous dire à nos lecteurs ce que représente KPMG dans le monde ? Jean-Yves Parant : KPMG est l’un des quatre grands cabinets d’audit et de conseil dans le monde, les trois autres étant Ernst & Young, PricewaterhouseCoopers et Deloitte Touche Tohmatsu. Aujourd’hui, KPMG emploie 155.000 personnes dans 150 pays. Son chiffre d’affaires annuel est de 23 milliards de dollars, généré à hauteur de 80% dans les zones Etats-Unis et Europe. Jusqu’à présent, l’A frique occupe donc une place modeste. Avez-vous personnellement connaissance d’exemples précis de cette volonté réformatrice ? Naturellement. Si je fais référence à nos « métiers de base », à savoir l’audit et le conseil, je constate que l’adhésion à l’OHADA n’a pas seulement été une décision de principe. Elle a été effectivement mise en œuvre. Or ce changement est très important parce que la RDC avait un corpus de textes très anciens (la loi sur les sociétés datait des années 1900, le code de commerce était également très ancien) qui ne laissaient que deux solutions: soit, passer à un système qui existe déjà et qui a fait ses preuves dans seize autre pays, soit se lancer, à titre purement national, dans la réforme de nombreux textes, ce qui aurait généré de nombreux retards. La bonne solution a donc été d’adopter l’OHADA et de passer rapidement à une étape supérieure. Je crois qu’aujourd’hui, notamment au regard du climat des affaires, ce qui est important c’est de pouvoir donner la possibilité aux différents acteurs économiques d’opter pour des contrats possédant une clause d’arbitrage, ce qui permet d’éviter de longues et difficiles procédure de certains tribunaux. Photo : KPMG Photo : MVDB Adapter le contexte et les mentalités aux ambitions de modernité... www.impact.cd Revenons justement au climat des affaires. Qu’est-ce qui vous paraît le plus urgent à réformer dans les mois à venir ? Il est important d’avoir une visibilité sur la protection juridique et aussi sur la pression fiscale car il y a beaucoup de taxes parafiscales qui se superposent. En d’autres termes, il y a un manque de lisibilité et de stabilité de la politique fiscale. Il faut bien reconnaître que les textes fiscaux sont, là aussi, relativement anciens et qu’il va falloir engager une réforme dans ce domaine, réforme qui, je crois, a été initiée par le gouvernement, le but étant d’alléger et de moderniser ces textes. Vous êtes aussi Président des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CCEF). Pourriez-vous nous expliquer ce que sont ces CCEF ? La création des CCEF remonte à 1898. À l’époque, le gouvernement français recherchait des solutions pour relancer la France à l’international et développer ses exportations. Aujourd’hui, ces conseillers sont présents dans 146 pays et représentent une « force de frappe » globale de 4.300 personnes. Leur objectif est d’apporter des avis, conseils et recommandations aux pouvoirs publics français sur l’économie et les perspectives de développement commercial dans les pays où ils travaillent. Cette fonction est conférée par décret du Premier Ministre pour une durée de trois ans et s’exerce de façon bénévole. Dans les pays où il existe une « section » des CCEF, l’objectif est d’obtenir une représentation des acteurs français majeurs dans les différents secteurs d’activité significatifs. En RDC par exemple, nous avons une section de 12 personnes représentatives des secteurs d’activité les plus importants. Je constate que l’adhésion à l’OHADA n’a pas seulement été une décision de principe. Elle a été effectivement mise en œuvre. Or ce changement est très important... Précisément, que fait KPMG en Afrique et plus spécifiquement en RDC ? Les métiers traditionnels de KPMG en Afrique sont l’audit et l’expertise comptable. Mais aujourd’hui, nous développons les missions de 24 / Impact n°7 / Décembre 2014 Photo : KPMG conseil, notamment en matière d’infrastructures, de santé, d’énergie et d’hydrocarbures. Nous travaillons aussi pour les gouvernements. www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 25 ÉCONOMIE Il y a aujourd’hui un changement dans les mentalités congolaises. Voyez-vous le même mouvement dans les mentalités françaises ? Oui. Depuis trois ou quatre ans, je vois un nombre croissant d’entreprises françaises s’implanter en RDC. Et pas les moindres : Orange, Canal+, et aujourd’hui Air France, qui développe de nouvelles 26 / Impact n°7 / Décembre 2014 activités. Or ces entreprises drainent avec elles des sous-traitants, qui bénéficient de l’appui de ces grandes entreprises. Comme dans beaucoup de pays en Afrique, le développement de la RDC s’appuie sur un fort développement des investissements directs étrangers. En définitive, comment pourriez-vous caractériser la communauté française en République démocratique du Congo ? Elle est soudée, dynamique et composée de personnes d’expérience. Il existe un Club français des affaires (CFA) qui se réunit une fois par mois et qui permet d’échanger sur différents thèmes ; son action est soutenue par le Bureau du MEDEF International pour l’A frique Centrale, installé à Kinshasa. Maestro de l'audit KPMG est l’un des quatre grands cabinets d’audit et de conseil dans le monde, les trois autres étant Ernst & Young, PricewaterhouseCoopers et Deloitte Touche Tohmatsu. Aujourd’hui, KPMG emploie 155.000 personnes dans 150 pays.. Quelle est la différence entre les CCEF et le CFA ? Le CFA est une association permettant de partager librement les informations sur l’évolution du pays et des différents secteurs d’activité. C’est une enceinte qui permet de se faire connaître et d’échanger. Les CCEF travaillent de manière plus structurée en faisant des notes sectorielles de nature plus stratégique, qui sont remises à notre ambassadeur. Mais le CFA ne fait-il pas double emploi avec la CCIFC (Chambre de Commerce et d’Industrie Franco-Congolaise) ? Pas du tout car la CCIFC est organisée avec deux collèges, l’un français l’autre congolais. Ses objectifs sont différents : travailler avec l’UCCIFE (Union des Chambres de Commerce et d’Indus- www.impact.cd tries Françaises à l’Etranger) et développer des activités telles que des formations ou des événements comme la Semaine française de Kinshasa. Le CFA est plutôt une réunion d’entrepreneurs français au cours de laquelle les participants échangent sur l’évolution des secteurs et du climat des affaires. Y sont conviées des personnalités importantes telles que, récemment, le professeur Masamba sur la thématique de l’OHADA. Revenons à KPMG. Pourriez-vous nous donner l'exemple d'un « contrat phare » remporté en RDC ? Oui. La mission que nous avons réalisée sur l’ITIE (Initiative pour la Transparence des Industries Extractives). Elle avait pour objectif de rapprocher les versements faits par les entreprises minières à l’Etat des fonds effectivement reçus par ce dernier. Ce rapprochement a permis de démontrer que contrairement peut-être à une idée reçue, les sommes versées à l’Etat se trouvaient bien dans ses caisses. Nous avons noté très peu de différences, ce qui a permis à la RDC de devenir membre de l’ITIE, à la grande satisfaction des autorités congolaises. Donc vous avez validé un « process ». Parfaitement. Entre ce qui était déclaré, versé par les entreprises et perçu par l’Etat. Pourriez nous donner d'autres exemples d’opérations auxquelles KPMG a participé? Nous avons participé à l’audit de la dette intérieure, travail très important qui a permis de contrôler un certain nombre de créances de l’Etat. À une autre époque, nous avons participé à l’audit de la Gécamines. Dernièrement nous venons de terminer un audit de gestion de la SNEL. D’une manière générale, nous travaillons de manière assez rapprochée avec le gouvernement pour essayer de trouver les marges de progrès conformes à sa volonté d’améliorer le climat des affaires et la performance des entreprises. www.impact.cd Améliorer le climat des affaires en RDC Généralement, KPMG travaille de manière assez rapprochée avec le gouvernement pour essayer de trouver les marges de progrès conformes à sa volonté d’améliorer le climat des affaires et la performance des entreprises. Dans le secteur des assurances et de l’électricité, vous travaillez avec le gouvernement pour accélérer les réformes. Comment cela se matérialise-t-il ? En réalité, nous ne travaillons pas directement avec le gouvernement sur ces réformes puisqu’elles ont déjà été engagées : le secteur de l’électricité a été libéralisé et celui de l’assurance est en passe de l’être au niveau du Parlement. Une telle évolution est d’ailleurs salutaire. Prenez l’exemple de l’électricité dans le contexte d’une croissance de 8,5% et, si tout va bien, à deux chiffres dans les prochaines années. Sans davantage de production électrique, le secteur minier, très gros consommateur d’électricité, sera en panne et freinera la croissance. Il est donc clair que le projet d’INGA, par exemple, va permettre à la RDC de s’affirmer comme un grand producteur d’électricité africain (peut-être le premier). Tout en étant en mesure d’exporter une partie de sa production, il contribuera à améliorer très sensiblement la disponibilité en énergie à l’intérieur du pays. Or si l’on peut maintenir les populations où elles se trouvent actuellement et leur offrir les conditions d’un développement durable, il faudra être capable d’acheminer cette énergie vers les consommateurs finaux. Cela veut dire aussi, dans les provinces, l’intervention d’acteurs nouveaux et la création de centres de production d’énergie indépendants de la SNEL. Propos recueillis par P.L Photo : KPMG Et vous êtes entendus en France ? Il est vrai que les Français sont assez frileux, à part les Corses et le Bretons [sourire] qu’on retrouve un peu partout. La culture d’expatriation économique n’a pas été très développée jusqu’aux années récentes. Mais les choses changent et les jeunes, notamment, sont de plus en plus enclins à partir travailler à l’étranger. Il est vrai que les Français sont très gâtés dans leur pays du fait d’un environnement social particulièrement protecteur. Partir à l’étranger reste donc une aventure qui n’est pas toujours évidente, et encore moins évidente si l’on est chargé de famille. Cela étant, il n’est pas très facile, je pense notamment aux PME, de s’installer en RDC? Que conseillez-vous à ces dernières ? Les PME qui veulent s’implanter en RDC doivent être prêtes à y investir. Elles doivent nécessairement disposer d’une logistique et de ressources humaines appropriées, ainsi que de produits adaptés à la RDC. Elles doivent aussi prospecter le marché en s’appuyant, le cas échéant, sur les CCEF, le service économique de l’ambassade de France et la Chambre de commerce et d’industrie franco-congolaise. Mais en définitive, une implantation réussie dans ce pays requiert une forte détermination et une prise de risque en toute conscience. Peut-on dire qu’aujourd’hui vous travaillez davantage sur les réformes du gouvernement que pour le secteur privé ? Actuellement, notre chiffre d’affaires provient, pour 60%, de contrats avec le gouvernement et les bailleurs de fonds. Le secteur privé ne représente donc que 40% de notre activité. Il est vrai qu’il existe peu d’entreprises de haut niveau répondant aux critères acceptables par KPMG pour que nous puissions travailler pour elles. Photo : MVDB Quand le Premier Ministre dit qu’il souhaite davantage de présence française en RDC, que faites-vous justement pour aller dans son sens ? Nous travaillons d’abord à donner des informations aussi objectives que possible sur la situation en RDC. Je crois, en effet, qu’un des freins majeurs aux investissements étrangers dans ce pays provient de sa mauvaise image extérieure. Dans cette perspective et à travers le Conseil économique créé auprès de l’ambassadeur, nous réalisons des monographies sur les différents secteurs afin de donner un éclairage plus mesuré sur les possibilités d’investissements pour les entreprises françaises. Impact n°7 / Décembre 2014 / 27 ÉCONOMIE Un nouveau cadre pour le commerce ou une révolution pour le commerce extérieur tion Assessment, and Control ». Son arrivée en RDC remonte à novembre 2005, au lendemain d’un appel d’offres international lancé par le gouvernement congolais pour choisir un prestataire capable d’assister, d’une part, l’administration des douanes (DGDA) principalement dans l’évaluation douanière des marchandises et leur classification, d’autre part, l’OCC (Office Congolais de Contrôle) sur les aspects relevant davantage du domaine qualitatif. Arrivé en novembre 2011 à Kinshasa pour diriger BIVAC (filiale du Bureau Veritas), Jean-Michel Perret a longtemps travaillé dans le secteur des transports et de la logistique, en Europe comme en Afrique. Egalement spécialiste en marketing et en gestion des entreprises, il fait partie de ceux qui encouragent la venue des investisseurs français, que ce soit au sein de la Chambre de Commerce et d’Industrie franco-congolaise (CCIFC) dont il est membre, ou en qualité de secrétaire général des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CCEF). Il vient de « décrocher » un très important contrat avec le gouvernement de RDC. Depuis votre arrivée, vous vous êtes personnellement investi dans un important contrat que vous avez d’ailleurs remporté. Pourriez-vous nous en donner les grandes lignes ? En septembre 2012, la RDC a souhaité lancer un appel d’offres international à travers un avis à manifestation d’intérêt, pour recruter une société capable de mettre en œuvre et opérer un Guichet Unique du Commerce Extérieur. Ce processus s’inscrivait dans une démarche, voulue par le Chef de l’Etat et soutenue par le Premier Ministre et visant à répondre aux recommandations d’organisations internationales telles que l’OMD (Organisation Mondiale des Douanes), l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) ou la Banque Mondiale recommandant aux Etats membres de tout faire pour faciliter le commerce. Le guichet unique est donc un outil qui doit permettre à la RDC d’effectuer un certain Bureau Veritas ici, c’est donc BIVAC. Comment pourriez-vous en décrire les principales activités ? BIVAC est une filiale du groupe, dont l’acronyme signifie en anglais « Bureau of Inspection, Valua- Les principaux «métiers» de Bureau Veritas sont l’inspection, la certification et le contrôle de conformité. 28 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Photos : Martin van der Belen Impact : Vous présidez aux destinés de BIVAC en RDC, c’est-à-dire de Bureau Veritas. Pourriez-vous nous dire ce que représente cette entreprise dans le monde ? Jean-Michel Perret : Bureau Veritas est une société française très ancienne puisqu’elle a été créée en 1828. Aujourd’hui elle est présente dans plus de 140 pays et emploie 65.000 personnes. Son chiffre d’affaires avoisinait les quatre milliards d’Euros en 2013. Les principaux «métiers» de Bureau Veritas sont : l’inspection, la certification et le contrôle de conformité. L’entreprise est organisée en divisions avec une division historique, celle de la Marine. Il y en a sept autres qui traitent de l’Industrie, de la Vérification/Inspection en service, de la Construction, de la Certification, des Commodités (céréales, minerais,…) et des Biens de consommation. La septième, pour laquelle je travaille ici, s’appelle «Service aux gouvernements et Commerce international». Expertise technique Jean-Michel Perret a longtemps travaillé dans le secteur des transports et de la logistique, en Europe comme en Afrique... nombre d’avancées : - Améliorer son classement dans le « Doing Business » de la Banque Mondiale, puisque c’est l’un des critères de la notation au regard du commerce transfrontalier ; - Mobiliser les recettes de façon plus soutenue ; - Assurer une transparence et une traçabilité des opérations, principalement au niveau de l’Etat ; - Faciliter et accélérer toutes les démarches administratives liées au commerce extérieur, au profit des opérateurs économiques. Le guichet unique, que nous appelons «Intégral», va couvrir l’ensemble du commerce classique, à savoir l’import, l’export et le transit pour tous les modes de transport existants. On retrouve en RDC la totalité de ces modes de transport: maritime, fluvial, lacustre, routier, ferroviaire, aérien. Le but est de permettre aux opérateurs économiques de disposer d’une plateforme dématérialisée à partir de laquelle ils pourront effectuer toutes leurs formalités d’importation ou d’exportation, voire de transit, dès l’amont du processus que nous appelons le « pré-dédouanement ». S’agissant du « post-dédouanement » ou de la logistique, en aval, nous mettrons en place un module permettant de tracer toutes les marchandises qui sortiront des places portuaires, aéroportuaires, etc. Commençons, par exemple, par l’amont : avant de faire venir une marchandise en RDC, il faut obtenir un certain nombre d’autorisations, dont www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 29 ÉCONOMIE Photo : Donvictorio Vous serez-partie prenante à cette société ? Tout à fait. les licences d’importation de biens. Toutes ces démarches prennent du temps. Selon le classement de la Banque Mondiale, le délai est estimé à 43 jours (pour la pré-importation). Ce nouvel outil devrait permettre de réduire considérablement ces délais, ce qui aura un effet positif pour les opérateurs économiques. En effet, le temps de préparation des autorisations administratives pour importer les marchandises sera raccourci et l’accélération de la rotation des navires désengorgera le port de Matadi. Passons à la partie centrale : le guichet unique dialoguera avec le système déjà utilisé par la douane congolaise, qui s’appelle SYDONIA, et qui constitue un outil de dédouanement performant. S’agissant du « post-dédouanement » ou de la logistique, en aval, nous mettrons en place un module permettant de tracer toutes les marchandises qui sortiront des places portuaires, aéroportuaires, routières etc. Votre mandat vous permet-il de suggérer des solutions à mettre en œuvre par le gouvernement ? Des recommandations pourront être formulées en effet, notamment sur les aspects règlementaires. Le guichet unique intégral, vous l’aurez compris, est un système dématérialisé. Il sera donc important que le pays se dote, entre autre, d’une loi sur le commerce électronique. Je crois savoir qu’elle est d’ailleurs à l’étude. C’est ce genre de recommandations que nous pourrions faire. En d’autres termes, pour que le nouvel ou- 30 / Impact n°7 / Décembre 2014 til, dont nous venons de parler, soit totalement efficace, il faudra certainement adapter plusieurs dispositifs législatifs et règlementaires. De la même manière, comment allez-vous concrètement intervenir sur l’aval du processus ? Le dédouanement restera le privilège de la douane congolaise. Mais l’intérêt du système est de permettre de consolider les informations de tous les intervenants et d’assurer de fait une traçabilité des informations. Il en sera de même au niveau des paiements, puisque lorsque vous importez ou exportez une marchandise, vous payez des frais règlementaires ; là aussi ces frais seront contrôlés, suivis et il y aura une transparence et une traçabilité à ce niveau-là. On voit bien que le contrat signé avec le gouvernement congolais contribuera à améliorer le climat des affaires. Mais comment allez-vous prendre en compte la problématique de la fraude ? Le guichet unique intégral reste un outil. La société d’exploitation qui sera créée prochaine- Raisonnablement optimiste, oui. Je pense que les sociétés françaises ont le savoir-faire et l’expertise pour répondre aux besoins gigantesques de la RDC et à ses attentes. www.impact.cd Restons sur le climat des affaires. Voyezvous d’autres pistes pour son amélioration en RDC ? Elles me paraissent devoir s’inscrire dans le suivi des recommandations d’institutions telles que l’OMC ou l’OMD. Je pense notamment à un « toilettage » législatif. Je constate d’ailleurs que la RDC s’est engagée dans cette voie, puisque depuis septembre 2012, elle a adhéré à l’OHADA, ce qui constitue une grande avancée au regard du climat des affaires. N’oublions pas, en effet, que l’OHADA est une organisation juridique commune à dix-sept pays. Cela contribue à rassurer les investisseurs qui veulent développer leurs activités à l’échelle régionale. Le mouvement que vous décrivez vous rend-il optimiste quant à l’arrivée de nouveaux investisseurs en RDC ? La RDC est un pays qui a un potentiel gigantesque dans tous les secteurs d’activités, que ce soit l’agriculture, les infrastructures, la santé, les transports, l’énergie. Je pense que les réformes qui ont été engagées depuis quelques années par le gouvernement, sous l’impulsion du Chef de l’Etat, encouragent clairement les investisseurs étrangers à venir en RDC. Le pays avance. D’aucuns pourront dire que ce n’est peut-être pas assez rapide. Pour autant, il avance ! Logistique S’agissant du «postdédouanement» ou de la logistique, en aval, Bivac met en place un module permettant de tracer toutes les marchandises qui sortiront des places portuaires, aéroportuaires, etc. Vous avez plusieurs autres casquettes : membre de la Chambre de Commerce et d’Industrie Franco-Congolaise (C.C.I.F.C.), Secrétaire Général des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (C.C.E.F.)... Comment allez-vous, en interne au sein de ces instances, favoriser l’arrivée de ces investisseurs français ? S’agissant de la CCIFC, au sein de laquelle je n’ai pas de mandat exécutif, j’estime que cette institution doit attirer, en y mettant les ressources appropriées, les investisseurs, notamment les PME qui n’ont pas toujours des surfaces financières importantes, ce qui peut être un frein à leur développement. Elle pourrait, notamment, offrir des solutions de « portage » permettant leur installation en RDC. En ce qui concerne les CCEF, nous avons de très nombreux contacts avec des entreprises françaises désireuses de s’implanter dans ce pays. Comme le fait la Chambre, nous contribuons à corriger l’image, par trop négative, de la RDC, tout comme le magazine Impact d’ailleurs. Kinshasa n’est pas l’Est (encore que la situation s’y soit considérablement améliorée) et il est possible de faire des affaires dans la capitale, au Katanga, à Matadi et dans bien d’autres endroits. Propos recueillis par P.L Photo : Martin van der Belen ment en partenariat avec l’Etat congolais pour gérer cet outil, sur la base d’une concession de dix ans et d’un partenariat public-privé, n’a pas vocation de dégager les administrations compétentes de leurs obligations ni de leurs responsabilités. Vous êtes donc raisonnablement optimiste quant à la venue d’investisseurs français ? Raisonnablement optimiste, oui. Je pense que les sociétés françaises ont le savoir-faire et l’expertise pour répondre aux besoins extraordinaires de la RDC et à ses attentes. Que ce soit par le biais de grands groupes ou de PME (95% des sociétés françaises sont des PME), nous pouvons apporter économiquement un certain nombre de réponses à des problématiques rencontrées dans ce pays. www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 31 ÉCONOMIE Photo : Martin van der Belen de restructuration et de responsabilisation à mettre en place doivent s’étendre aux entités les plus basiques telles que les villages ou les ETD. Mais comment y parvenir avec un service public défaillant et décrédibilisé ? Il a donc fallu agir non seulement au niveau des structures, mais aussi et surtout vis-à-vis de ceux qui les servent, afin qu’ils aient conscience de leurs devoirs et sachent faire respecter leurs prérogatives. Cette restauration de l’autorité de l’Etat avait pour corollaire une politique « lisible » en termes de sécurité. Comment, là aussi, asseoir la stabilité de nos institutions et engager la province dans le développement durable sans la paix prônée par le Président de la République, Joseph Kabila Kabange ? Telles sont les grandes priorités que je m’étais fixées et qui, j’en suis heureux, ont reçu un soutien appuyé de la population. Restaurer l’autorité de l’Etat et relancer l’économie Impact : Vous avez été élu, en 2013, 38ème gouverneur de la Province Orientale. Quelles sont les priorités que vous-vous étiez fixées lors de votre prise de fonction? Jean Bamanisa : Le programme que j’ai présenté à l'Assemblée Provinciale n’était autre que la consolidation des idées et actions que j’avais déjà lancées alors que j’étais député national, élu de la ville de Bunia. La priorité numéro un était, 32 / Impact n°7 / Décembre 2014 et cela ne vous étonnera pas, la restauration de l'autorité de l'Etat dans toute l’étendue de la province. A la suite des nombreux troubles d’ordre politico-militaire qui ont affecté cette dernière pendant plusieurs années, notre administration, en effet, s’était fragmentée, disloquée, au point de ne plus être en mesure d’exercer la moindre prérogative régalienne. Cette situation était d’autant plus grave que dans le processus de décentralisation qui s’engage, les mécanismes www.impact.cd Photos : Presse Gouvernement provincial La Province Orientale, vaste territoire, est en train de réorganiser sa gestion et son économie. Elle entend redevenir une florissante plaque tournante du pays. Renforcement des capacités, éducation et environnement, sont des domaines où elle cherche à développer des partenariats. Son gouverneur est un homme pragmatique issu du terrain… Revenons à l'économie, si vous le voulez bien, car votre réputation d'entrepreneur n'est plus à démontrer. Quels sont les principaux obstacles que vous avez rencontrés jusqu’à présent dans la mise en œuvre de cette partie de votre programme? La Province Orientale souffre essentiellement de deux maux : - un manque cruel d’infrastructures ; - l'abandon des unités de production dans le domaine de l'agriculture et de l’agrobusiness. Je m’efforce donc de redessiner l'ancienne carte économique de la Province Orientale à partir d’une amélioration des compétences et des aptitudes de nos populations dans certaines filières agricoles, le but ultime étant d’accroître la valeur www.impact.cd Projet artisanal La province doit organiser les exploitants en coopératives afin de les amener à travailler dans des filières formelles, dotées de bureaux d'achat et d'export. Un telle démarche permettra de réduire les trafics en tous genres et contribuera au développement de l'entreprenariat. ajoutée de la production. Y contribueront le retour à la culture du café, de l'hévéa et du palmier à huile mais aussi l’introduction d’autres spéculations telles que le riz. S’agissant des infrastructures, et dans la mesure où la Province Orientale (dont la superficie équivaut à celle de l’Espagne) est au centre de la RDC et plus généralement de l’A frique, je recherche le développement de réseaux de transport multimodaux de façon à faciliter la logistique des échanges de personnes et de biens. Au-delà de ces deux objectifs de base, j’entends bien mettre en valeur les potentialités qu’offre la Province Orientale dans les domaines minier et pétrolier. Ainsi l'industrie de l'or, à travers Kibaligold, constitue-t-elle un exemple qui doit nous inspirer pour attirer encore quelques gros investissements. De la même manière, les entreprises détentrices de droits pétroliers doivent réellement s'investir dans l’économie locale de façon à permettre à la production pétrolière de rattraper celle de nos voisins du Sud Soudan et de l’Ouganda. Ainsi pourrons-nous générer les revenus nécessaires aux besoins de la politique d'émergence de la RDC à l’horizon 2030. Dans le domaine artisanal, enfin, je veux organiser les exploitants en coopératives afin de les amener à travailler dans des filières formelles, dotées de bureaux d'achat et d'export. Un telle démarche permettra de réduire les trafics en tous genres et contribuera au développement de l'entreprenariat congolais. En quoi les partenaires étrangers de la RDC, bi ou multilatéraux, publics ou privés, peuvent-ils aider à surmonter les difficultés que vous venez d'évoquer ? Nous sommes naturellement très ouverts aux Impact n°7 / Décembre 2014 / 33 ÉCONOMIE Entités Territoriales Décentralisées (ETD). - Les zones de parcs et de réserves doivent être mieux protégées pour éviter d'éliminer des espèces rares telles que l'okapi. Aujourd’hui, en effet, les braconniers « pullulent » et se livrent à des trafics qui portent malheureusement atteinte à la sécurité des populations par les créations de bandes armées ; ainsi en est-il du parc de la Garamba. - Enfin, le tourisme reste à organiser afin d’inciter les visiteurs à découvrir les merveilles de nos vastes étendues à la végétation luxuriante et variée. partenaires bi et multilatéraux. Et plus que jamais je souhaite que les différents programmes en faveur de la RDC incluent de façon croissante la Province Orientale, qui compte 14 millions d’habitants sur un territoire dont j’ai rappelé l’étendue. Les besoins sont multiples et je salue ceux qui participent déjà à des programmes structurants. Vous pouvez nous donner des exemples ? Bien sûr ! La CTB (Coopération Technique Belge) intervient dans les domaines de l'agriculture, des infrastructures locales telles que les routes de desserte agricole, la transformation et l'éducation. La Banque Mondiale développe, pour sa part, des programmes d’infrastructures routières. Quant à la Banque Africaine de Développement, elle est présente en matière de santé et d’équipements aéroportuaires. Ce ne sont que des exemples ; car beaucoup d’autres partenaires agissent à travers les agences des Nations Unies. ^ Visite du président Joseph Kabila sur le chantier de rénovation de l'Hôtel Congo Palace, exécuté par l'entreprise chinoise SZTC et financé sur fonds propres de l'INSS. Travaux de voirie urbaine à Kisangani financés sur fonds propres du gouvernement provincial, confiés à l'Office des voiries et drainage, avec l'appui technique de la SZTC. le développement du système éducatif dans un territoire aussi vaste que celui de la Province Orientale ? Attendez-vous là aussi un soutien d'autres partenaires étrangers ? La Province Orientale regorge d'un capital humain considérable et sa jeunesse « foisonne ». Elle a besoin de bonnes bases éducationnelles pour participer pleinement aux différents programmes de relance. Je soutiens la coopération avec les organismes éducatifs de l'Église catholique et protestante, d’ailleurs appuyés par l’Etat. Le relèvement du niveau des éducateurs est, à cet Photos : Presse Gouvernement provincial Au-delà du développement économique et parce que je vous sais très attaché à l'éducation, comment concevez-vous égard, d’une importance stratégique. Le secteur de l’enseignement professionnel est à mettre sur pied afin de former les bâtisseurs de demain. Je tiens par ailleurs à remercier particulièrement la coopération française à travers M. Larrieu, qui a procuré à une école naissante de Kisangani, La Roche, des tableaux numériques ainsi que la formation des enseignants sur site. Cette école est donc la première en RDC, après le lycée René Descartes de Kinshasa, à s’être dotée du matériel interactif qui formera l'esprit de tous les jeunes aux connaissances basées sur l'informatique. L’ambassadeur de France, M. Luc Hallade, a également soutenu notre programme et ne cesse de nous encourager. Enfin l’ancien Centre culturel de Kisangani, devenu Alliance française depuis 1995, redevient un carrefour d'échanges et d'émulation culturels ; j’en félicite son directeur, M. Matthieu Juin-Levite. 34 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Ce numéro d'Impact est plus particulièrement consacré à l'environnement. Or la Province Orientale, de par sa superficie et ses ressources naturelles, représente un véritable enjeu à l'échelle de tout le pays. Quelle est votre vision de cet enjeu environnemental ? Nous comptons poursuivre le quatrième pilier de notre programme basé sur l'environnement par une gestion saine de nos ressources naturelles. Dans cette perspective, nous agirons dans plusieurs directions : - Le secteur du bois artisanal et industriel, très important pour l’économie, devra respecter des règles strictes. Il importe en effet de préserver nos forêts et éviter le gaspillage et les coupes sauvages qui la détruisent. - Nous allons prochainement, dans le cadre de la création du portefeuille provincial, mettre en place des entreprises de préservation dont les populations pourront être actionnaires à travers les www.impact.cd Enfin, pour terminer cet entretien, comment voyez-vous l'avenir de la Province Orientale et son chef-lieu Kisangani ? Mon objectif, ma vision et mon rêve sont de transformer ce magnifique territoire en un espace de vie agréable pour sa population, ses investisseurs, ses visiteurs, et plus généralement tous ceux qui veulent participer avec nous à cette grande œuvre de reconstruction. Propos recueillis par Matthieu Juin-Levite S’agissant des infrastructures, et dans la mesure où la Province Orientale est au centre de la RDC, je recherche le développement de réseaux de transport multimodaux de façon à faciliter la logistique des échanges de personnes et de biens. Impact n°7 / Décembre 2014 / 35 ÉCONOMIE < Tous pour un Très engagée dans le développement, FEI, qui vulgarise ici l'emploi d'orpailleuses dans un village du Burkina-Faso, ne sera plus que l'un de six éléments constitutifs de l'AFETI Création de l’Agence Française d’Expertise Technique Internationale (AFETI) Un nouvel opérateur pour de nouvelles ambitions Au 1er janvier 2015, FEI fusionnera avec cinq opérateurs pour constituer une agence française unique d’expertise technique internationale (AFETI). Cette nouvelle agence aura pour objectif d’accroître les capacités de mobilisation de l’expertise technique publique française à l’international, pour mieux répondre aux besoins grandissants des pays émergents et en développement en matière de politiques publiques, dans tous les secteurs d’accompagnement des réformes et de transfert de compétences et de formation. 36 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd ix opérateurs publics actifs dans le domaine de l’assistance et de la coopération technique internationale seront réunis au sein de cette agence unique : > L’établissement public à caractère industriel et commercial «France Expertise Internationale» (FEI) ; > Le groupement d'intérêt public «Assistance au développement des échanges en technologies économiques et financières» (ADETEF); > Le Groupement d'intérêt public «Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau» (GIP Esther) ; > Le Groupement d'intérêt public «International» (GIP Inter) ; > Le groupement d'intérêt public «Santé protection sociale internationale» (GIP SPSI) ; > L’association «Agence pour le développement et la coordination des relations internationales» (ADECRI). Sous la supervision conjointe du ministère des Affaires étrangères et du ministère chargé de l’Economie, l’Agence Française d’Expertise Technique Internationale inscrira pleinement son action dans le cadre de la politique extérieure de développement et de solidarité de la France et reprendra l’ensemble des droits et obligations des opérateurs actuels. d’exécution de contrats : ceux-ci seront intégralement repris et assumés par l’A FETI au 1er janvier 2015, de même que les conventions de tous ordres signées et exécutables par elles avec les tiers, ainsi que leurs biens, droits et obligations. La compétence, les références et l’expérience acquises par chacune des six organisations seront intégralement préservées et développées. La nouvelle agence s’appuiera sur des atouts importants > La qualité de l’offre, en développant les viviers d’expertise, en particulier les viviers d’experts publics, au-delà de ce qui avait pu être fait ; Photo : FEI Photo : FEI S La nouvelle agence assurera la continuité juridique des contrats en cours Une nouvelle agence pour de nouvelles ambitions. Comme le précise la loi du 7 juillet 2014, «l’A FETI se substitue aux six opérateurs pour tous les contrats et conventions passés dans le cadre de leur activité avec transfert de plein droit de leurs biens, droits et obligations». Ainsi, jusqu’à la fin 2014, les six organisations actuelles continueront d’assumer la plénitude de leurs responsabilités en matière de passation et www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 37 ÉCONOMIE > Une capacité juridique et financière innovante, à travers un ensemble de compétences articulées: maîtrise d'ouvrage, gestion déléguée, maîtrise d’œuvre, réponse aux appels d’offres, activité bilatérale, jumelages, conseil sur les partenariats public-privé ; La nouvelle agence aura une organisation privilégiant l’approche projets tout en préservant une forte expertise métier > Une direction des opérations, composée d’un service en charge de l’appui aux projets de jumelages institutionnels de l’UE, et de 7 dépar- > Une direction de la stratégie et des partenariats, chargée avec l’ensemble des acteurs, secteur privé compris, de positionner l’Agence stratégiquement face aux nouveaux enjeux «post 2015». Elle sera également chargée d’une animation par grandes zones géographiques, En appui aux opérations conduites par l'UE Participation à la lutte contre la piraterie (Corne de l’Afrique, Golfe de Guinée…) des contacts bilatéraux dans ce cadre, et d’une fonction d’animation de l’expertise ; > Un fonds d’intervention qui aura vocation à soutenir, notamment par des co-financements, le positionnement de l’agence sur les grands projets financés par l’Union européenne ou les institutions multilatérales lorsque celles-ci en manifestent le besoin. Des Comités sectoriels, rattachés au Comité d’orientation relatif au développement de l’expertise technique publique et privée, permettront d’orienter l’activité en cohérence avec les actions engagées par d’autres acteurs dans les différents domaines, notamment les ministères, et de rechercher des coopérations et des partenariats nouveaux. Bernard Poudevigne Un engagement g g fort p pour l'accompagnement p g du développement de l'Afrique Francophone Subsaharienne et du monde des affaires Photo : AFETI > La conformité aux exigences croissantes en matière de mise en œuvre de l'aide au développement, qui est un des facteurs clefs pour la crédibilité de l'opérateur de référence français que sera l'A FETI. tements thématiques traitant des contrats d’assistance, notamment financés par les bailleurs internationaux : - Gouvernance et droits humains - Développement économique - Finances publiques - Stabilité, sûreté, sécurité - Santé - Développement durable - Protection sociale et emploi Un spécialiste de l'international Jean-Christophe Donnellier Délégué Interministériel à la Coopération technique internationale N ommé par le Premier Ministre Délégué interministériel à l’expertise technique internationale en juillet 2014, JeanChristophe Donnellier est chargé d’organiser la création de la nouvelle Agence Française d’Expertise Technique Internationale, l’AFETI, qu’il présidera à partir du 1er janvier 2015. Il a mené l’essentiel de sa carrière à l’international à la direction générale du trésor à Paris et à l’étranger (Chicago, New York, Washington). Il a également occupé des fonctions en cabinets ministériels à deux reprises, auprès du ministre de la Fonction publique et du Plan d’abord, puis plus récemment comme conseiller économique du ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, Thierry Breton, en charge auprès du ministre des questions de politique économique et de finances publiques. Il a ensuite occupé les fonctions de directeur des relations internationales au Trésor, assumant auprès des ministres l’appui aux grands contrats internationaux, le suivi des relations économiques bilatérales de la France et représentant la France au Comité de politique commerciale à Bruxelles, Comité qu’il a présidé pendant la récente présidence française de l’UE. Chef de poste à New York puis ministre conseiller pour les affaires économiques et financières à Washington, Jean-Christophe Donnellier connaît bien les Etats-Unis où il a servi à trois reprises au sein de l’ambassade de France. Plus récemment, ministre conseiller en charge des questions économiques et financières à la Représentation permanente de la France auprès de l’OCDE, il a également occupé le poste de vice-président du Comité d’aide au développement de l’OCDE et de Représentant de la France à ce même Comité. 38 / Impact n°7 / Décembre 2014 > Des Comités sectoriels, rattachés au Comité d’orientation relatif au développement de l’expertise technique publique et privée, permettront d’orienter l’activité en cohérence avec les actions engagées par d’autres acteurs... www.impact.cd Photo : Ministère de la défense/J.Guiavar > Une couverture géographique étendue, en étant plus présente sur le terrain, mais aussi auprès des organisations internationales ; en développant notamment les travaux de veille amont existants sur les politiques publiques financées par les bailleurs multilatéraux, les fondations, les partenaires... Nous sommes un réseau é mondial de cabinets d'audit et de conseil présent dans 156 pays. Nous employons 152 400 professionnels à travers le monde avec un chiffre d’affaires combinés en 2013 avoisinant USD 23,42 23 42 milliards. milliards KPMG sert 82% des 500 premières entreprises mondiales. Notre vision : Etablir une relation de confiance co a ce a avec ec nos os cclients e ts et co convertir et HQ YDOHXU DMRXWpH QRWUH FRPSUpKHQVLRQ GH O LQIRUPDWLRQ financière, des secteurs pFRQRPLTXHV HW PRQGH GHV DIIDLUHV q p dédiée p pour vous accompagner p g En RDC une équipe au passage à l’OHADA dans les domaines suivants: 9Comptable : Migration Plan Comptable; /RJLFLHO G¶pGLWLRQV GHV pWDWV ILQDQFLHUV 2+$'$ 0DQXHO GHV SURFpGXUHV FRPSWDEOHV REOLJDWLRQ DFWH XQLIRUPH 7UDLWHPHQW FRPSWDEOHV GHV RSpUDWLRQV VSpFLILTXHV 9 Juridique : 0LVH HQ KDUPRQLH GHV VWDWXWV ,QVFULSWLRQ 15& 9 Fiscal : Nos engagements : Pragmatisme HW SURDFWLYLWp GDQV XQ PRQGH FRPSOH[H 3RXU UpSRQGUH j YRV besoins, nos professionnels font SUHXYH GH FDSDFLWpV G DGDSWDWLRQ HW d anticipation d anticipation dans la UHFKHUFKH de VROXWLRQV DSSURSULpHV www.impact.cd $FFRPSDJQHPHQW SRXU OHV SUpSDUDWLRQV HW OD SUpVHQWDWLRQ GH OD QRXYHOOH GpFODUDWLRQ ILVFDOH Impact n°7 / Décembre 2014 / 39 "Tout naturellement..." Photo : AFD DOSSIER E nsuite, car avec nos partenaires congolais et d’autres institutions internationales nous soutenons très concrètement en RDC des programmes visant à préserver les ressources du bassin du Congo : deuxième poumon de la planète après l'A mazonie. Nous avons ainsi associé certains de nos partenaires pour offrir aux lecteurs d’Impact une palette d’expériences et de points de vue, sur les questions d’environnement et de développement durable qui, sans être exhaustifs, abordent quelques sujets d’actualité dans la région : le WWF (World Wide Fund, en français Fonds mondial pour la nature) sur les enjeux de la préservation de la Biodiversité ; la Banque Mondiale sur la gestion durable des ressources naturelles ; la CICOS (Commission Internationale du bassin Congo – Oubangui – Sangha) sur la gestion intégrée des ressources en eau du bassin du fleuve Congo ; les partenaires du projet d’appui à la gestion durable des forêts soulignent pour leur part les efforts en faveur d’une exploitation forestière plus responsable socialement et écologiquement. Impact a décidé de consacrer son nouveau numéro à l’environnement et l’AFD s’est tout naturellement prêtée au jeu pour élaborer cette édition spéciale. Tout naturellement, d’abord, car c’est le cœur de notre métier de développeur puisque l’AFD finance des projets de développement économique et social qui contribuent également à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du réchauffement climatique ou qui soutiennent les pays du sud dans la mise en œuvre de leurs politiques de transition écologique. Photo : Virgine Leroy_AFD Jean-Christophe MAURIN 40 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 41 DOSSIER d’un millions de Kinois qui en bénéficieront d’ici 2017. Grâce à la distribution d’eau potable qui ne subit aucun traitement chimique, car tirée de forages profonds (100 à 150 m), ce programme permet de limiter la pollution et les maladies hydriques, d’alléger le travail des femmes et des enfants de ces quartiers, et de faciliter leur insertion économique et sociale. En privilégiant les matériaux locaux par la confection de briques de terre crue qui sont compressées à froid pour la construction d’un millier de salles de classes qu’elle finance en faveur des écoliers du Bandundu et du Bas-Congo, l’Agence limite l’utilisation des fours à bois et par là-même, la déforestation. Agence Française de Développement Concilier le progrès économique et social et préserver l'environnement en RDC E n République Démocratique du Congo, l’A FD a repris ses activités fin 2003, après une interruption de treize ans. L’agence concentre ses financements sur trois objectifs principaux : - améliorer les services sociaux de base directement au profit des populations, notamment dans l’accès à l’éducation, la santé et à l’eau potable ; 42 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd - contribuer au développement économique en favorisant le renforcement du capital humain par la formation professionnelle et l’extension du crédit bancaire en direction des PME ; - apporter une coopération technique pour améliorer l’exploitation des forêts et la gestion de l’environnement. Jean-Christophe Maurin Château d’eau financé par l’AFD Photo : AFD_JC Maurin L’Agence Française de Développement (AFD) est l’institution financière du dispositif français de coopération qui agit pour lutter contre la pauvreté et favoriser le développement dans les pays du Sud et d'Outre-mer. Au moyen de subventions, de prêts, de fonds de garantie ou de contrats de désendettement et de développement, elle finance des projets d’investissements et accompagne ses partenaires du Sud dans le renforcement de leurs capacités. Les engagements de l’A FD en RDC s'élèvent à 223 millions d’euros fin 2014. Depuis juillet 2013, le Contrat de Désendettement et de Développement (C2D) représente, à lui seul, un engagement de 106 millions d’euros. À travers ses financements, l’A FD considère que le développement est aussi un élément de réponse au défi planétaire du dérèglement climatique. C'est particulièrement le cas au Congo, où l'administration et les sociétés forestières mettent en œuvre un programme d'aménagement des forêts qui a pour objectif, à la fois de dynamiser le tissu économique local et de préserver le deuxième poumon de la planète après l'A mazonie. Photos : Joseph Moura_AFD Confection de briques de terre crue compressées à froid pour la construction de salles de classes financées par l’AFD En appuyant la Commission Internationale du Bassin Congo-Oubangui-Sangha (CICOS), l’agence contribue aussi au développement durable du bassin du Congo en soutenant une politique de gestion intégrée des ressources en eau, fondée sur la connaissance des ressources et l’aide aux décisions d’aménagement et de gestion des eaux. En finançant des réseaux d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement à Kinshasa, l’agence contribue à alimenter plus de 400.000 personnes résidant dans les quartiers périphériques de la capitale. Avec le C2D, ce sont près www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 43 DOSSIER Lutte contre le dérèglement climatique et développement durable Des solutions innovantes et efficaces... Impact : Comment l’AFD concilie-t-elle climat et développement ? Pierre Forestier : Pour un bailleur de fonds, le climat n’est pas un objet en soi. Nous finançons des projets de développement qui ont un « bénéfice climat ». C’est-à-dire des projets de développement économique et social qui contribuent également à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (projets d’atténuation), à la résilience aux effets du dérèglement climatique (projets d’adaptation) ou qui soutiennent les États et les collectivités locales dans la mise en œuvre de leurs politiques de transition écologique. Les questions climatiques sont donc un sujet majeur du développement, qui touche tous les acteurs et toutes les natures d’investissements économiques, au premier rang desquels le secteur de l’énergie, mais aussi les infrastructures, l’industrie, les services, etc. Nous sommes aussi très engagés pour la valorisation des services rendus par la nature, comme la capacité de certaines ressources naturelles (sol, forêt) à stocker des tonnes de carbone. Photo : AFD Trois questions à Pierre Forestier, responsable de la division Changement climatique à l'AFD. La prise en compte des questions climatiques va-t-elle modifier l’aide au développement ? On pourrait dire que l’aide internationale est déjà en pleine mutation. On peut, en particulier, avancer que le dérèglement climatique « légitime » l’aide publique au développement. L’enjeu de la question climatique, c’est de financer et d’accompagner l’innovation, les prises de risques, la redirection des investissements et des flux de financement et les politiques de transition énergétique. Et là, les financeurs ont une vraie valeur ajoutée ! Il s’agit aussi d’assurer sur la durée un accès aux infrastructures et services de base. Ces questions d’adaptation et de vulnérabilité aux effets du changement climatique, en Afrique, en particulier, redonnent un caractère d’urgence à la solidarité internationale. On peut donc affirmer que la prise en compte de la « dimension climat » dans les programmes de développement, d’une part, renforce notre mission de solidarité dans les pays pauvres, et, d’autre part, légitime totalement notre action dans les pays émergents et le pourtour méditerranéen, où notre objectif est bien de réorienter les politiques publiques et d’accompagner les acteurs économiques pour assurer un développement durable et bénéfique à tous. Propos recueillis par Jean-Christophe Maurin 15 MILLIARDS D’EUROS Qu’est-ce que cela implique pour un financeur comme l’AFD ? La prise en compte du climat n’est pas un frein au développement. Mais nous devons penser des instruments nouveaux et faire des choix d’investissement différents. L’A FD, acteur financier public de poids, est engagée depuis plus de dix ans sur le sujet « climat et développement ». Nous avons acquis un savoir-faire et développé des instruments efficaces capables de répondre à une attente croissante des pays et des acteurs économiques (prêts budgétaires, programmes 44 / Impact n°7 / Décembre 2014 d’accompagnement des politiques publiques, instruments à effets de levier sur le système bancaire local et le secteur privé, programmes de recherche…). Nous avons également adopté une stratégie opérationnelle ambitieuse qui repose sur un engagement financier, une sélectivité des projets que nous finançons, la mesure systématique de leurs impacts carbone et, bientôt, une analyse de vulnérabilité systématique. C’est le montant des engagements climat de l’AFD depuis 2005 dans les domaines des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique, des transports propres, de la protection de la forêt, de l’agroécologie, ou de l’adaptation au changement climatique. www.impact.cd www.impact.cd « Les priorités de l'AFD pour un développement durable » L es enjeux climatiques conduisent l'AFD à revoir profondément les choix de développement mais aussi la conception des projets. Nous accompagnons nos partenaires pour accélérer le développement des projets qui limitent les émissions de carbone tout en répondant aux enjeux économiques et sociaux, comme par exemple les énergies renouvelables, les transports publics ou encore les projets de lutte contre la déforestation. Nous visons ainsi deux objectifs principaux. Soutenir le développement des énergies renouvelables et agir sur l’efficacité énergétique. La production d’énergie est la principale source d’émission de gaz à effet de serre (GES), et un enjeu économique majeur pour tous les pays. Le développement des énergies renouvelables peut être une opportunité de développement et d’indépendance énergétique pour les pays pauvres, notamment en Afrique. L’essentiel de nos financements se concentrent sur l’émergence de technologies propres (solaire thermique à concentration, éolien, hydraulique, géothermie) dans des pays qui ont la volonté de les développer et d’atteindre à court ou moyen terme la parité des coûts avec les filières conventionnelles de production d’énergie. Ils concernent également la mise en place de systèmes et technologies efficaces de maîtrise et de réduction de la consommation énergétique, en particulier dans les mégalopoles africaines par l'aménagement de moyens de transports publics plus sobres en Carbone (métro du Caire, bus articulés en site propre à Lagos). Appuyer la valorisation économique des services environnementaux rendus par la forêt et l’agriculture. La déforestation et les pratiques agricoles représentent presque 30 % des émissions de gaz à effet de serre (GES). Le coût de l’externalité des GES étant reconnu par la communauté internationale, le bénéfice de séquestration par les sols et le non-déstockage par la déforestation peuvent être valorisés économiquement. Cette valorisation est une opportunité économique pour les pays concernés et surtout pour les communautés démontrant une bonne gestion de leur capital forestier (biodiversité) et des pratiques agricoles et rurales durables (agriculture familiale). L’AFD, très impliquée sur ces questions, développe des programmes d’aménagement des forêts (bassin du Congo), d’agroécologie (Madagascar), de développement local et de gestion des terroirs ruraux. Laurence Breton-Moyet, directrice du département Développement durable à l'AFD Impact n°7 / Décembre 2014 / 45 Les images satellite au service de la lutte contre la déforestation dans le bassin du Congo ^ Image SPOT4 de résolution 20 mètres, en couleurs: la forêt dense apparaît en rouge. Copyright : CNES 2000, Distribution Airbus DS/Spot Image Photographier et cartographier les espaces forestiers pour mieux lutter contre la déforestation dans le deuxième plus grand massif forestier du monde, le bassin du Congo, telle est l’ambition du projet initié par l’AFD, en partenariat avec Airbus «Defence and Space». Projet qui affiche ses premiers résultats. 46 / Impact n°7 / Décembre 2014 Impact : L’observation de la Terre par satellite est aujourd’hui reconnue comme un outil essentiel pour faire face aux défis environnementaux. Comment cette composante est-elle intégrée dans les programmes de l’AFD ? Karen Colin de Verdière : L’observation de la Terre depuis l’espace, grâce aux satellites, est en effet un outil essentiel pour faire face aux défis globaux, que ce soit la gestion durable des ressources naturelles (forêts, pêche, biodiversité, ressources en eau), la lutte contre le changement climatique, la sécurité alimentaire (usage des sols, assurance, irrigation) ou l’aménagement des territoires (cadastre, aménagement urbain). Car les satellites d’observation de la Terre permettent d’obtenir des informations précises sur de très grandes superficies, de manière répétée et à moindre coût, dans des régions du monde parfois difficiles d’accès. Par exemple, il est possible de cartographier, grâce aux satellites, l’ensemble des forêts du bassin du Congo, qui couvrent plus de 3 millions de km² (soit cinq fois la superficie de la France), alors qu’il serait difficile, voire impossible, de réaliser une couverture exhaustive depuis le terrain, où les voies d’accès en milieu forestier sont souvent inexistantes. Cependant, les pays du Sud, dans lesquels intervient l’A FD, n’utilisent encore que très peu ces technologies car les données satellites disponibles sont peu nombreuses et les capacités à les interpréter et à les utiliser sont insuffisantes. L’accès aux données spatiales constitue ainsi un enjeu majeur de solidarité internationale et de préservation de l’environnement. Quelles sont les caractéristiques du projet pilote d’observation spatiale des forêts tropicales d’Afrique centrale ? En quoi estce une démarche innovante ? Lors du sommet de Copenhague en décembre 2009, l’A FD s’est engagée, au travers d’un partenariat avec Airbus « Defence and Space », filiale www.impact.cd du Groupe Airbus et fournisseur d’images satellites, à mettre à disposition, gratuitement, des images satellite de haute résolution SPOT aux administrations, instituts de recherche et organisations de la société civile qui travaillent au service de la gestion durable des forêts du bassin du Congo. Cette initiative vise à stimuler l’utilisation des données spatiales en Afrique Centrale, à renforcer les capacités des acteurs locaux à utiliser ces technologies et à développer des cartographies forestières nationales afin de mieux évaluer l’efficacité des politiques de lutte contre la déforestation. D’un coût total de 8,5 millions d’euros sur cinq ans, ce projet est mis en œuvre par un consortium d’institutions françaises spécialisées dans le domaine de la télédétection. Ce consortium est piloté par IGN France International et réunit l’IRD, le CNES et l’IGN. Dans le même temps, Le projet GEOFORAFRI, financé par le Fonds Français pour l’Environnement Mondial (FFEM), s’intéresse, de façon complémentaire, à favoriser l'adoption et la maîtrise méthodologique et technique des données satellitaires d'observation de la terre au sein des pays d'A frique centrale et de l'ouest grâce à des renforcements de capacités et d’accès à ces technologies. Quels sont les impacts attendus ? Les premiers résultats sont-ils encourageants ? Pensez-vous que l’usage de cette technologie soit reproductible dans d’autres géographies et d’autres secteurs d’intervention de l’AFD ? Depuis son démarrage, le projet a déjà permis la réalisation d’une cartographie forestière historique de près de 300.000 km², permettant de suivre l’évolution du couvert forestier du bassin du Congo entre 1990, 2000 et 2010. Le projet a aussi financé l’acquisition de plus de mille nouvelles images de haute résolution sur le bassin, constituant une couverture satellite complète des forêts de cette région. Son actualisation, avec de nouvelles images, est en cours. Par ailleurs, l’A FD soutient le développement des applications des technologies spatiales à d’autres secteurs et d’autres géographies. Par exemple, en Indonésie, l’A FD finance la mise en place d’un centre de surveillance maritime par satellite, qui permettra le suivi des ressources halieutiques et de l’environnement marin (coraux, mangroves), des activités de pêche (légale et illégale), des pol- www.impact.cd Photo : Eric Thauvin DOSSIER Karen Colin de Verdière Chef de projet Biodiversité à l’Agence Française de Développement. lutions par hydrocarbures, etc... L’A FD va également lancer une étude qui réalisera un état des lieux de l’utilisation de ces technologies pour l’agriculture en Afrique sub-saharienne, afin de pouvoir répondre de manière plus économique et plus réactive aux besoins de pilotage des politiques agricoles des gouvernements africains (planification de l’usage des terres à différentes échelles, prévisions de rendements, épidémio-surveillance, état des infrastructures, etc.). D’une manière générale, ces interventions dans un domaine de technologie de pointe, en constante évolution, nécessitent un engagement public important, pour la construction d’une infrastructure de production d’images exploitables par des acteurs publics comme privés et des systèmes rigoureux de vérification des interprétations. La formation des experts nationaux et leur association à des réseaux internationaux sont indispensables. Dans tous les domaines d’application évoqués (forêt, océan, agriculture), des institutions et entreprises françaises peuvent grandement y contribuer. Propos recueillis par Jean-Christophe Maurin L’AFD s’est engagée, au travers d’un partenariat avec Airbus « Defence and Space », à mettre à disposition, gratuitement, des images satellite de haute résolution SPOT aux administrations, instituts de recherche et organisations de la société civile qui travaillent au service de la gestion durable des forêts du bassin du Congo. Impact n°7 / Décembre 2014 / 47 DOSSIER pour une gestion durable de la forêt du bassin du Congo Impact : Que signifie la gestion durable des forêts ? Sébastien Malele : À la fin des années 80, en raison des effets négatifs désormais démontrés et souvent très visibles d’une utilisation excessives des ressources naturelles dans le monde, sont apparus simultanément le concept de développement durable et son corollaire, la volonté de préserver le patrimoine national et également mondial qu’elles représentent pour les générations actuelles et les générations futures. L’application de ce concept de développement durable au secteur de la forêt a été consacrée par la Conférence de Rio en 1992, car la gestion Sébastien Malele Chef du projet AGEDUFOR, directeur du département des Inventaires et des Aménagements Forestiers au ministère de l’Environnement, de la Conservation de la Nature et du Tourisme de la RDC. République Centrafricaine Etat d'avancement du processus d'aménagement des titres forestiers en RDC Octobre 2014 Soudan Gbadolite ! ! Cameroun Gemena ! ! Fleuve Congo Guinée Equatoriale ! Isiro Lisala Orientale ! Basankusu Bunia Equateur . ! . ! Mbandaka ! Kisangani ! Wanie-Rukula Boende Gabon Fleuve Congo ! . ! Inongo Goma Rwanda Bukavu République du Congo . ! " ! ! . ! Boma ! Mbanza-Ngungu Uvira !B u r u n d i Bandundu ! Kenge ! Kikwit n cide i Oc Madimba Angola . ! Kindu Kasa K K II N NS SH HA AS SA A . ! Bandundu ! Matadi ! Lusambo Luebo . ! Kananga ! Mbuji-Mayi ! ! Tshilenge!Kabinda . Tshimbulu! Kalemie Ta n z a n i e tal Légende Processus d'aménagement Angola Titre résilié Processus d'aménagement non initié 0 62,5 125 250 Kilomètres 48 / Impact n°7 / Décembre 2014 375 500 ! Kamina En cours d'aménagement Plan d'aménagement en cours de validation Photo : AFD L’aménagement durable des forêts tropicales est un défi dont l’enjeu est planétaire. Il doit pouvoir concilier l’équilibre économique de la production de bois et la préservation des écosystèmes. Une nécessité pas toujours facile à comprendre… durable s'est alors imposée comme la seule solution réaliste et pérenne, permettant de concilier la mise en valeur économique de la forêt, le développement socio-économique des territoires forestiers et la conservation de ces ressources naturelles, certes renouvelables mais fragiles. En quoi, cela consiste-t-il ? En termes simples, la gestion forestière durable doit dépasser la simple vision d’une production quantitative de bois pour également maintenir la biodiversité et le bon fonctionnement de l’ensemble de l’écosystème forestier, en intégrant une dimension sociale au bénéfice des populations locales dont l’existence parfois relève des ressources ligneuses et non ligneuses de la forêt. En résumé, elle doit assurer la durabilité de l’ensemble des fonctions de la forêt au niveau des territoires et de ses populations mais aussi au niveau des éco-systèmes . Le principal défi de l’aménagement durable des forêts tropicales réside ainsi dans la multiplicité des fonctions à préserver, tout en conciliant l’équilibre économique de la production de bois. En Afrique centrale, depuis les années 90, divers projets ont permis de jeter les bases des itinéraires techniques d’aménagement durable de ces forêts. L’Agence Française de Développement (AFD) a été un des contributeurs forts de ces projets pilotes, et s’est toujours engagée pour appuyer le développement harmonieux du secteur des bois tropicaux en Afrique. www.impact.cd Comme tous les plans d’aménagement forestiers, ceux établis en Afrique centrale s’appuient sur une solide connaissance préalable des forêts, de leurs ressources, des conditions de leur mise en valeur, de leurs fonctions sociales et écologiques. C’est d’autant plus nécessaire que ces forêts restaient très mal connues préalablement. Ainsi, l’élaboration des plans d’aménagement passe par une série d’études lourdes, souvent onéreuses : - l’inventaire statistique d’aménagement multi-ressources décrivant la structure de la forêt et quantifiant de façon dynamique les ressources actuelles et futures en bois des différentes essences, mais aussi les ressources fauniques ; - la cartographie de base du territoire sous aménagement et de l’occupation du sol, avec création d’un Système d’Information Géographique (SIG) utilisable au moment d’appliquer la gestion forestière durable ; - les diagnostics socio-économiques, et les contributions de l’activité forestière au développement local en termes d’infrastructures, d’emplois et de revenus financiers. L’analyse de l’ensemble de ces données permet d’établir un plan d’affectation des terres à long terme réservant des espaces pour le développement des activités aux populations, des superficies protégées ou conservées pour la biodiversité. Sur les superficies dédiées à la production de bois d’œuvre, des règles d’intervention et une planification des coupes sont arrêtées sur le long terme (25 années), de manière à garantir une production « soutenable ». Grâce à son plan d’aménagement, l’entreprise concessionnaire dispose de la garantie d’une récolte sur le long terme ; elle acquiert également une visibilité de ses productions potentielles qui lui permet de chercher des solutions de valorisation optimale des ressources, et enfin elle s’intègre de façon pérenne dans le territoire de sa concession et dans son développement. Cet investissement important pour les entreprises s’inscrit sur le long terme et nécessite un cadre institutionnel adéquat. Quel est le rôle de l’état et de chacun des acteurs ? Au moment du développement de la dynamique d’aménagement des forêts dans les années 1990, face aux capacités limitées des Etats, mais aussi aux contraintes logistiques de mise en œuvre des projets d’aménagement, et dans le souci d’adapter au mieux les méthodes de gestion aux modèles économiques des entreprises, la déci- www.impact.cd Gestion du patrimoine forestier En 2005, la RDC s'est engagée dans un processus de gestion durable de son patrimoine forestier. Un processus de conversion des anciens titres forestiers s'est alors engagé. Ainsi sur plus de 15 millions ha de permis forestiers en 2005, aujourd'hui environ 10 millions d'habitants répartis sur 57 titres de concessions forestières sont engagés dans un processus d'aménagement et de gestion durable. sion a été prise de demander l’élaboration des plans d’aménagement des forêts de production d’A frique centrale aux opérateurs auxquels elles avaient été concédées. L’élaboration des plans d’aménagement et leur mise en œuvre restent sous le contrôle de l’Etat, propriétaire de la forêt, qui s’assure que les législations encadrant la gestion durable sont bien mises en œuvre. Dans des forêts sur lesquelles les entreprises cohabitent avec des populations puisant une partie de leur ressource des forêts et sont dépendantes de l’économie de la filière bois, un dialogue doit être mis en place avec ces communautés, de manière à préserver leurs intérêts, leur intégrité et leurs droits au développement. Les législations prévoient une contribution directe des entreprises au développement des régions dans lesquelles elles sont installées, à travers le financement de réalisations à vocation communautaire. De plus, dans la mesure du possible les décisions techniques de découpage de la concession en assiettes annuelles de coupe prennent en compte l’organisation traditionnelle des communautés afin de ne pas susciter des tensions entre elles en raison des ressources financières générées par l’exploitation. Le plan d’aménagement permet ainsi aux communautés et peuples autochtones de continuer à exercer librement leurs droits d’usage traditionnels. Les entreprises forestières se sont ainsi peu à peu muées en gestionnaires d’espaces forestiers multi acteurs. Le plan d’aménagement devient un outil de leur développement mais aussi de celui de leurs partenaires nationaux et locaux. Le rôle de l’Etat et de ses administrations consiste alors à la promotion, à l’organisation et au contrôle de la mise en œuvre de cette gestion commune de son espace forestier. Photo : Philippe Mortier_AFD Le projet Agedufor Impact n°7 / Décembre 2014 / 49 DOSSIER de financement de réalisations sociales, dans des territoires ruraux particulièrement touchés par la pauvreté. Dans quelle situation se trouve l’exploitation forestière en RDC ? Comment se caractérise-t-elle ? Géant forestier en terme de surface au niveau régional avec plus de 60% des superficies de forêt dense du Bassin du Congo (10 pays de l’espace COMIFAC), le secteur forestier industriel de RDC n’est pas parvenu à décoller véritablement ces dernières années. La production à partir des surfaces de forêt mises en concessions, n’a jamais dépassé plus de 400.000 m3 de grumes par an, destinées au «grand export» depuis le début des années 90, il y a plus de vingt ans, et représente moins de 5% des productions de bois tropicaux de l’A frique Centrale en volume. Le secteur industriel est également marginal dans la consommation locale, dont plus de 90% du volume est fourni par le secteur informel souvent illégal et opérant sans respecter les principes de gestion 50 / Impact n°7 / Décembre 2014 La RDC accuse un certain retard sur les autres pays de la région abritant des forêts denses humides en matière d’aménagement (hormis la Guinée Equatoriale), d’autant plus qu’elle connaissait une période de conflit au moment où ces autres pays s’engageaient dans cette voie. www.impact.cd Photos : Philippe Mortier_AFD Quels sont les impacts et les retombées attendues ? Cette gestion commune de l’espace forestier, issue de la concertation de l’ensemble des acteurs concernés, est consignée dans un document, le plan d’aménagement. Ce document stratégique guidera le gestionnaire forestier et les partenaires pendant 20 à 30 ans. Il fixe ainsi les décisions à long terme sur la planification de la récolte en bois, les orientations d’industrialisation, une programmation des actions concernant les volets de développement socio-économique et le maintien de la biodiversité. Il s'agit donc de promouvoir et de garantir un développement durable sur ces espaces dans l’intérêt de tous et dans le respect de l’environnement. durable, sur des surfaces de forêt non affectées, libre d’utilisation par l’agriculture ou pour y exploiter ses ressources en bois, fauniques et halieutiques. Le secteur forestier industriel est confronté à de très nombreuses contraintes, notamment : - des infrastructures de transport en très mauvais état, en partie compensées par la possibilité de transport fluvial ; - des possibilités d’exportation fortement limitées par la faible capacité du port de Matadi ; - une gouvernance déficiente ou insuffisante en particulier dans les administrations décentralisées ou déconcentrées, qui génère de nombreuses « tracasseries » au quotidien et une parafiscalité pesante ; - des forêts relativement sous exploitées (prélèvement de 2 à 4 m3/ha contre 5 à 15 dans les pays voisins) par rapport aux autres pays de la sous-région et une grande extension des superficies marécageuses ; - une concurrence déloyale exercée par le secteur informel qui vient parfois empiéter sur les concessions légales ; - une image négative à l’extérieur dont le pays en général et son secteur forestier souffrent, liée à des actions de communication et de forte opposition à la commercialisation sur les marchés européens, en particulier des bois de RDC. Pourtant, le développement d’une filière bois congolaise opérant dans le cadre de la légalité offre une véritable opportunité au développement local. Bien que fonctionnant à bas régime, ce secteur fournit déjà 6.000 emplois directs, assure 15 à 20 millions de dollars chaque année de contribution fiscale et plus 3 millions de dollars Quelles sont les perspectives de cette exploitation et que faut-il faire pour en améliorer les conditions et les performances ? Ce contexte difficile, largement hérité d’une histoire douloureuse, tend à s’améliorer maintenant que l’essentiel du pays a retrouvé une stabilité. Les infrastructures sont progressivement réhabilitées, des efforts sont entrepris pour améliorer le climat des affaires. Le secteur industriel commence à devenir compétitif sur certaines niches du marché national, et la consommation intérieure déjà élevée se développe encore. Ainsi, la RDC accuse un certain retard sur les autres pays de la région abritant des forêts denses humides en matière d’aménagement (hormis la Guinée Equatoriale), d’autant plus qu’elle connaissait une période de conflit au moment où ces autres pays s’engageaient dans cette voie. La RDC a dû passer par un processus de validation de la légalité des titres d’exploitation forestière en 2004 qui s’est accompagné, ce qui est unique dans la région, de l’élaboration de plans de gestion provisoires, qui sont en réalité des documents d’aménagement destinés à établir une planification sur les premières années. Si le processus d’aménagement peine à se lancer, c’est notamment en raison de la trop faible rentabilité actuelle de cette activité économique, avec des exigences fortes en matière de normes d’aménagement, de faibles capacités techniques des entreprises et des administrations, la quasi absence d’expertise forestière dans le secteur privé et les nombreuses contraintes évoquées auparavant. Néanmoins, sur les 11 millions d’hectares de forêt concédés, la dynamique d’aménagement est désormais engagée par toutes les entreprises importantes de la filière. La quasi-totalité des plans de gestion provisoires ont été validés, les inventaires d’aménagement ont été conduits sur plus de 4 millions d’hectares, deux plans d’aménagement sont en cours d’instruction et certains concessionnaires sont d’ores et déjà engagés dans des démarches de certification forestière. Par ailleurs, pour accompagner cet engagement dans ce processus d'aménagement de ses forêts, l'administration forestière a entrepris dernièrement des réformes de textes règlementaires pour les adapter à ce nouveau contexte. Sur le terrain, les services de contrôle forestier www.impact.cd Le projet AGEDUFOR Démarré en juin 2011, le projet AGEDUFOR, sur fonds de 5 millions d’euros de l'AFD, a pour objectif d’appuyer la gestion forestière durable en RDC par l’appui à la mise en place de plans d’aménagement dans les exploitations forestières. Il prévoit un appui de 3 ans, principalement dédié aux services centraux et provinciaux de la direction des Inventaires et Aménagement des Forêts (DIAF) du ministère de l'Environnement, de la Conservation de la Nature et du Tourisme (MECNT). Il associe également les opérateurs privés et les organismes de formation du secteur forestier. Le projet a quatre objectifs : - renforcer les compétences de l’administration au niveau central et dans les trois provinces forestières, du Bandundu, de l’Equateur et de l’Orientale, pour l’évaluation, le suivi et le contrôle des plans d’aménagement à produire par les entreprises ; - intégrer, dans les pratiques des entreprises, les techniques de mise en œuvre des plans d’aménagement ; - améliorer le cadre règlementaire, les méthodes et outils permettant la mise en œuvre opérationnelle des plans d’aménagement ; - favoriser la prise en compte par tous les acteurs des principaux enjeux liés à la gestion durable des régions forestières. La modernisation du secteur forestier est une priorité de la politique forestière nationale pour son développement et la pérennisation de ses activités. La volonté de réforme des autorités congolaises s’est traduite par l’adoption d’un nouveau Code forestier en 2002, incluant la révision des modalités d’attribution des concessions forestières et l’obligation faite aux concessionnaires de les aménager. À travers ce projet, l’AFD contribue significativement à une amélioration des capacités des acteurs en charge de la gestion des forêts de RDC, à une meilleure gouvernance du secteur grâce à l’emploi d’outils d’évaluation objectifs et transparents et à une levée des contraintes évoquées plus haut au développement du secteur. La France est déjà très présente dans son soutien aux efforts accomplis par la RDC dans la lutte contre le changement climatique, notamment dans les mesures de réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD+). Cet appui sur financement de l’AFD à la gestion durable des forêts en RDC vient consolider ce partenariat entre les deux pays dans un secteur stratégique sont progressivement renforcés et formés de façon à mieux suivre les activités des concessionnaires et les accompagner dans la traçabilité de leurs produits forestiers. Le Projet AGEDUFOR (voir encadré) financé par l'A FD, joue un grand rôle d’accompagnement et d’appui dans ce processus de renforcement des capacités de l'administration forestière. Propos recueillis par Philippe Bosse Impact n°7 / Décembre 2014 / 51 face aux enjeux de la gestion intégrée des ressources en eau du Congo Photo : MVDB_GIZ L’eau est une grande richesse et coule en abondance dans le bassin du Congo. Une gestion sous-régionale raisonnable et concertée est cependant essentielle. Comprendre le fonctionnement du bassin permettra de mieux cerner l’impact de ses usages actuels et potentiels… Bio-express Ingénieur hydrologue, travaille pour BRLingénierie (Nîmes) depuis presque quinze ans en France et en Afrique sur les thèmes de la gestion de l’eau, des inondations. Conseiller technique du SG de la CICOS depuis mai 2012 sur financement AFD. Impact : Qu’est-ce que la CICOS ? Damien Brunel : Avant de présenter la CICOS, il me semble important de vous parler rapidement du bassin du Congo. Le Bassin versant du fleuve Congo est hors normes : c’est le premier d’A frique et le deuxième du monde en superficie (3.822.000 km²) et en débit moyen (41.000 m3/s à Kinshasa-Brazzaville). La longueur totale du fleuve est de 4.373 km. Sa position à cheval sur les deux hémisphères lui confère un débit très stable à l’aval, les saisons sèches et humides se complétant. Les affluents principaux du Congo sont le Kasaï, l’Oubangui et la Sangha. Les ramifications hydrographiques permettent d’offrir 25.000 km de voies navigables de différents gabarits. Dans sa partie aval le fleuve n’est pas navigable du fait de nombreux rapides infranchissables (chutes de Livingstone), mais ce handicap qui coupe Kinshasa et Brazzaville de la mer par voie fluviale engendre par contre un potentiel hydroélectrique avec notamment une dénivellation de 102 mètres à Inga en seulement 15 km, ce qui est rarissime dans les parties aval des grands fleuves. Cette dénivelée conjuguée au débit hors du commun du fleuve Congo crée un potentiel de 44 GW sur ce seul site (l’équivalent d’environ trente cinq réacteurs nucléaires dernière génération). Lorsqu’on parle seulement du «bassin du Congo», on ne sait pas si on parle de forêt ou d’eau. Cette dénomination commune n’est qu’une des expressions qui traduit que les écosystèmes forestiers exceptionnels sont intiment liés à l’eau et réciproquement. Enfin, les pays du bassin du fleuve Congo sont au nombre de 10 : Angola, Burundi, Cameroun, 52 / Impact n°7 / Décembre 2014 Centrafrique (RCA), Congo, Gabon , République démocratique du Congo (RDC), Rwanda, Tanzanie et Zambie, ce qui lui confère une dimension régionale pour le partage de ses ressources. C’est pour faire face aux enjeux régionaux que les Chefs d’Etat du Cameroun, du Congo, de la Centrafrique et de la République démocratique du Congo ont créé en novembre 1999 la Commission Internationale du bassin Congo – Oubangui - Sangha (CICOS) en signant l’accord instituant un régime fluvial uniforme. Le premier mandat de la CICOS était alors tourné principalement sur la navigation. Mais en février 2007, le mandat de la CICOS a été élargi à la Gestion Intégrée des Ressources en Eau (GIRE). Le Gabon a rejoint en 2011 la CICOS. La CICOS est piloté par son Comité des ministres (deux ministres par pays), qui se réunit ordinairement une fois l’an, précédé d’un Comité de direction (trois experts par Etat). L’organe exécutif est le Secrétariat général, basé à Kinshasa. La CICOS possède la particularité d’être également une institution spécialisée de la Communauté Economique et Monétaire de l’A frique Centrale (CEMAC) ce qui lui assure, avec la contribution de la RDC, non membre de la CEMAC, un fonctionnement relativement pérenne par rapport à ses homologues en Afrique. Le but de la CICOS est donc de favoriser le bienêtre des populations à travers le développement de l’utilisation des riches ressources en eau du bassin tout en préservant l’environnement. Elle joue aussi un rôle de concertation régionale autour des grands projets hydrauliques afin de promouvoir la paix dans la sous-région. www.impact.cd Quels sont les principaux appuis de la France à la CICOS ? Si le fonctionnement de la CICOS est assuré par les Etats, les projets sont encore souvent portés par les bailleurs de fonds comme l’Union Européenne, la coopération allemande, la Banque Africaine de Développement (BAD) et bien sûr la coopération française. La France est un état pionnier dans l’approche GIRE et concrétise cette vision à la CICOS en aidant l’institution à se doter d’outils indispensables à la bonne gestion des ressources en eaux, à savoir : - Remettre des réseaux de mesure dans les cours d’eau, réseaux tombés à l’abandon depuis les années 60 en RDC et depuis les années 90 dans les autres pays. Deux phrases pourraient résumer cette démarche : « on ne gère que ce que l'on connaît » et « même l’abondance se gère ». Quand on mesure le potentiel hydroélectrique et le besoin en développement de la sous-région, cela devient une évidence et la CICOS, avec l’aide de l’A FD et du FFEM, transmet ce message aux autorités des différents pays, dont la RDC. - Modéliser le bassin pour mieux comprendre son fonctionnement complexe (comment la pluie se transforme en débit, comment les eaux se propagent, notamment au niveau de la cuvette centrale) et surtout qu’est-ce qu’il est possible de faire de ces eaux en préservant les intérêts de chacun et l’environnement. Concrètement ces projets sont mis en œuvre à l’aide d’un assistant technique, financé par l’A FD et par une convention du Fonds Français pour l’environnement Mondial (FFEM) pour un montant total de 2.1 millions d’euros. Vous élaborez un modèle, en quoi consiste-t-il ? Il s’agit d’un modèle numérique, c'est-à-dire qu’on tente de reproduire le fonctionnement du bassin et des usages de l’eau à l’aide d’hypothèses et d’équation. Ce type de modèle a fait ses preuves ailleurs dans le monde, y compris en Afrique, par exemple dans le bassin du Niger. Comme évoqué précédemment, le but du modèle est à la fois de mieux comprendre le fonctionnement du bassin versant mais aussi de mieux cerner les impacts des différents usages actuels. Mais cela va au-delà, l’intérêt pour la CICOS et ses états membre et d’utiliser ce modèle pour tester de futurs grands ouvrages comme «Grand Inga» sur le fleuve Congo ou «Palambo» sur l’Oubangui (une quinzaine de grands www.impact.cd Photo : Jorn Schumann_GIZ La CICOS Photo : Christina Karliczek_GIZ DOSSIER projets vont être modélisés). Le modèle permettra également d’y voir plus clair sur les impacts possibles du projet de transferts des eaux vers le Lac Tchad, ce dossier très politique manquant de bases scientifiques pour le bassin versant du Congo. La CICOS joue ainsi son rôle qui lui a été confié par la CEEAC, visant à défendre les intérêts des pays pourvoyeurs de ressources. Le modèle va permettre également de tester les impacts possibles des changements climatiques sur les débits du fleuve et de ses affluents et donc sur les usages de l’eau (navigation, production hydroélectrique…). Propos recueillis par Jean-Christophe Maurin Le but de la CICOS est donc de favoriser le bienêtre des populations à travers le développement de l’utilisation des riches ressources en eau du bassin tout en préservant l’environnement. Impact n°7 / Décembre 2014 / 53 Photo : Banque Mondiale DOSSIER La Banque Mondiale, pour une gestion durable des ressources naturelles en RDC Le Congo possède un capital naturel considérable. Des ressources minérales abondantes, une biodiversité très riche, une étendue de forêt incroyable. La Banque mondiale a proposé d’aider le pays à développer une bonne gouvernance dans l’exploitation des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables… Les ressources naturelles sont importantes en RDC. Quels sont les enjeux de leur exploitation ? Il est courant de mesurer la richesse d’un pays à son PIB. Une autre possibilité est de regarder son capital, lequel comprend le capital naturel, le capital produit (infrastructures et capital humain) et ses institutions. De ce point de vue, la RDC a un PIB modeste mais un capital naturel considérable. C’est vrai pour les minerais, notamment le cuivre, l’or et le désormais fameux coltan (pour columbite-tantalite), pour les terres arables, même si peu sont pour le moment cultivées, pour le potentiel hydro électrique même si comme pour les terres arables peu est réalisé et c’est bien entendu vrai pour la forêt. Elle couvre 150 millions d’hectares, soit 7% de la superficie mondiale des forêts tropicales. Cette ressource naturelle renouvelable (par opposition aux minerais et aux hydrocarbures) fournit des biens et des services à environ 60% de la population du pays. Elle pourrait, même si ce n’est pas le cas pour le moment, servir de base au développement d’une industrie manufacturière de transformation du bois d’œuvre. Par ailleurs, la forêt contribue au stockage du carbone et à la préservation de la biodiversité, deux services environnementaux dits « globaux », qui en font un bien public d’importance mondiale. L’enjeu de la gestion de la forêt en RDC est donc stratégique : il s’agit de combiner d’une part la préservation de ce précieux capital naturel, notamment contre la déforestation d’origine 54 / Impact n°7 / Décembre 2014 agricole (le taux de déforestation en RDC est encore bas comparé aux pays d’A mérique du Sud ou d’Asie mais il est deux fois plus élevé que les autres pays du bassin du Congo), et d’autre part l’exploitation durable des biens et services qu’il produit au profit des populations locales et autochtones, éventuellement de l’industrie (et donc de l’emploi) et du climat mondial. La Banque mondiale a proposé à l’État congolais la mise en place d’une matrice de bonne gouvernance de cette exploitation. En quoi consiste cette matrice ? La matrice de gouvernance économique a été adoptée par la RDC en 2010 après l’annulation par les pays membres du Club de Paris d’une partie de la dette de la RDC pour un montant de 7,35 milliards de dollars. Préparée conjointement par la Banque mondiale et le FMI, elle est l’instrument principal du dialogue sur la gouvernance entre les partenaires au développement et le gouvernement en RDC. Elle fait l’objet de comptes rendus périodiques au conseil d’admi- La matrice de gouvernance économique a été adoptée par la RDC en 2010 après l’annulation par les pays membres du Club de Paris d’une partie de la dette de la RDC pour un montant de 7.35 milliards de dollars... www.impact.cd nistration de la Banque mondiale et est utilisée régulièrement par la société civile pour rappeler au gouvernement de la RDC ses engagements en matière de transparence et d’accès à l’information. Cette matrice comprend une vingtaine de mesures de politique publique destinées à améliorer : - la transparence dans les secteurs de l’exploitation des ressources naturelles renouvelables et non renouvelables (mines, pétrole et forêts) ; - la qualité et l’efficacité des procédures de dépenses publiques ; - le climat des affaires en RDC. S’agissant de la forêt, la matrice comprend des mesures destinées à lutter contre l’exploitation illégale et à améliorer la transparence dans l’attribution des concessions forestières. En 2013, plusieurs mesures concernant l’initiative REDD+ pour une réduction des émissions de gaz à effet de serre liées à la déforestation et dégradation des forêts ont été inclues dans la matrice de gouvernance. Cette nouveauté marque la volonté du gouvernement et de ses partenaires de valoriser davantage les services environnementaux rendus par son l’abondante forêt tropicale et de lutter ainsi contre l’extension de l’agriculture sur brûlis et l’exploitation non contrôlée des forêts. Une expérience grandeur nature est actuellement conduite dans le district du MaiNdombe dans la Province du Bandundu. Réduire la déforestation dans le district de Maï-Ndombe Le district de Maï-Ndombe, situé à 250 km au Nord-est de la capitale, est un front pionnier de déforestation qui s’est développé sous l’influence des besoins croissants en charbon de bois, bois d’œuvre, et produits agricoles de la ville de Kinshasa dont la population est estimée entre 8 et 12 millions d’habitants. Plusieurs initiatives sont en cours dont l’objectif commun est de tester, avec les populations locales, un modèle alternatif de développement durable qui consiste à inciter les ménages à développer des activités économiques ayant un impact réduit sur la ressource forestière. www.impact.cd Jean Christophe Carret Coordonnateur de programmes Banque mondiale en RDC: infrastructures, agriculture et ressources naturelles. La gestion durable des ressources naturelles est une approche encore très récente en RDC, comment voyez-vous son développement futur ? La prédiction est un art difficile. Disons qu’en imposant à l’exploitation forestière une norme qui repose sur l’obligation de produire un plan d’aménagement des forêts et d’impliquer les populations locales et autochtones, la RDC a jeté les bases d’une gestion durable de ses ressources forestières. Toutefois, compte tenu de l’immensité du territoire, des moyens limités de l’administration et du manque d’infrastructures de transport, de communication et d’informations, les défis à venir pour étendre ce nouveau type d’approche sont considérables. Il faut souligner aussi l’importance de l’utilisation des outils modernes de suivi des exploitations. La mise en place effective d’un système de traçabilité et de contrôle des bois depuis leurs lieux de production est une des conditions de l’exploitation durable des forêts du bassin du Congo. La Banque mondiale soutient non sans difficultés ce type d’initiative en RDC. Par ailleurs, la croissance démographique et le développement d’infrastructures de transport associés éventuellement à l’essor d’une agriculture extensive, comme on le voit actuellement dans le Bandundu, constitueront à l’avenir un défi supplémentaire pour la préservation des écosystèmes et du capital naturel des forêts du bassin du Congo. Quels sont les nouveaux instruments financiers qui sont ou pourront être mobilisés dans le cadre de cette nouvelle approche de l’exploitation ? Il existe plusieurs façons de soutenir financièrement la gestion durable des forêts en RDC. Impact n°7 / Décembre 2014 / 55 DOSSIER Photo : Virginie Leroy_AFD Une agence Nous venons d’en décrire une : venir en aide, en finançant des activités génératrices de revenus mais compatibles avec la gestion forestière, aux populations vivant à proximité de ces forêts pour éviter qu’elles n’aient d’autres choix que de pratiquer l’agriculture sur brûlis. Une autre approche consiste à rémunérer le pays sur la base des performances obtenues en matière de réduction de la déforestation, par rapport à un scénario de déforestation de référence. Sur ce principe, la RDC a commencé à développer avec le Fonds carbone du Partenariat pour le carbone forestier administré par la Banque mondiale, une expérience pilote, toujours dans le cas du district de MaiNdombe. Les revenus associés à cette expérience pourraient être de l’ordre de 50 millions de dollars sur une période de cinq ans. La Banque, à la demande du gouvernement, coordonne les bailleurs de fonds dans ce secteur. Quels sont les principaux partenaires et les principaux programmes ? Le Groupe Inter bailleurs Environnement est un groupe très actif en RDC. Les sujets discutés sont la gestion durable des forêts, la préservation de la 56 / Impact n°7 / Décembre 2014 Gestion du patrimoine forestier En 2013, plusieurs mesures concernant l’initiative REDD+ pour une réduction des émissions de gaz à effet de serre liées à la déforestation et dégradation des forêts ont été inclues dans la matrice de gouvernance proposée par Banque mondiale. Cette nouveauté marque la volonté du Gouvernement et de ses partenaires de valoriser davantage les services environnementaux rendus par l’abondante forêt tropicale de la RDC… biodiversité et l’initiative REDD+. Les principaux membres de ce groupe sont l’Union Européenne, l’A FD, la KFW, la GIZ, la Norvège, le PNUD, l’USAID, la JICA, et la Belgique. Tous ces bailleurs ont des projets dans le secteur de l’environnement. L’USAID, comme la Banque mondiale, est présent dans tous les domaines. Certains partenaires comme le PNUD et la Norvège sont plus particulièrement focalisés sur l’initiative REDD+ alors que l’A llemagne à travers la GIZ est impliquée dans des projets liés à la gouvernance des forêts et la préservation de la biodiversité. L’Union Européenne finance les parcs nationaux de RDC, notamment l’emblématique parc des Virunga, au Nord Kivu. Enfin, l’A FD étend à la RDC une démarche de partenariat développée depuis 20 ans dans les pays d’A frique centrale avec le secteur privé et les autorités locales de promotion de l’aménagement durable des forêts. ouverte sur le monde Institution financière publique, l’Agence Française de Développement (AFD) agit depuis plus de soixante-dix ans pour combattre la pauvreté et favoriser le développement durable dans les pays du Sud et dans les Outre-mer. Elle met en œuvre la politique définie par le Gouvernement français. Présente sur quatre continents où elle dispose d’un réseau de 71 agences et bureaux de représentation, dont 9 dans les Outre-mer et 1 à Bruxelles, l’AFD finance et accompagne des projets qui améliorent les conditions de vie des populations, soutiennent la croissance économique et protègent la planète. En 2013, l’AFD a consacré 7,8 milliards d’euros au financement de projets dans les pays en développement e t en faveur des Outre-mer. Ils contribueront notamment à la scolarisation d’enfants, à l’amélioration de la santé maternelle, à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, à l’appui aux agriculteurs et aux petites entreprises, au renforcement de l’accès à l’eau, à l’énergie et aux transports. Les nouveaux projets financés contribueront également à lutter contre le dérèglement climatique, en permettant notamment d’économiser 3,3 millions de tonnes d’équivalent CO 2 par an. Propos recueillis par Philippe Bosse www.afd.fr www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 57 DOSSIER Le WWF face aux enjeux de la préservation de la biodiversité en RDC Photo : WWF Un des enjeux du développement de la RDC est de mieux concilier croissance économique, conditions de vie des populations et conservation des ressources naturelles. Il implique un renforcement des capacités techniques et scientifiques des acteurs de protection de la nature et la promotion des parcs nationaux… Impact : La RDC est un scandale géologique bien connu, mais du point de vue de la biodiversité, qu’est-ce que l’on peut en dire ? Bruno Perodeau : La République démocratique du Congo est classée aujourd’hui au nombre des 10 pays au monde ayant une méga biodiversité, c’est-à-dire rassemblant, à eux seuls, environ 60% des espèces de faune et flore actuellement recensées sur la planète. Le pays contient la deuxième plus grande étendue de forêt tropicale au monde et avec le fleuve Congo, possède plus de la moitié de l’eau douce du contient africain. Sa 58 / Impact n°7 / Décembre 2014 faune et sa flore sont très diversifiées. Le pays dispose du plus grand nombre d’espèces de mammifères de toute l’A frique, à savoir 425 espèces recensées. Il a aussi été répertorié 352 espèces de reptiles, 220 espèces de batraciens ou d’amphibiens. Le nombre d’oiseaux inventoriés est estimé à 1.139 espèces. Les espèces connues d’invertébrés aquatiques sont également nombreuses (plus de 1.500), dont 1.423 d’eau douce. Les espèces de poissons sont estimées à plus de 400. Les espèces végétales sont aussi particulièrement nombreuses avec plus de 11.000 plantes vasculaires dont environ 10.000 espèces d'angiospermes (plantes à fleur). La RDC est le foyer de plus de 3.200 espèces endémiques, certaines étant emblématiques du pays comme l'okapi, le paon congolais et le bonobo. Malheureusement, plusieurs espèces se trouvent sur la liste d’espèces menacées comme l’okapi, le bonobo, l’éléphant de forêt, le gorille, le lion, le zèbre, le singe bleu, et biens d’autres. La biodiversité constitue une des grandes richesses de la RDC et du bassin du Congo. Sa préservation passe par des actions de protection mais aussi de mise en valeur. La RDC a été un des tout premiers pays en Afrique à avoir créé un Parc national. Quels sont, aujourd’hui, les principaux dispositifs de protection ? La RDC protège son patrimoine naturel et cultu- www.impact.cd Photo : WWF en œuvre conjointement par l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) et le Fonds Mondial pour la Nature (WWF). Le PARAP a pour objectif d’évaluer l’état actuel des aires protégées de la RDC et de produire des recommandations pour leur consolidation et extension en vue d’assurer la conservation de la biodiversité exceptionnelle de la RDC. Il consiste principalement au renforcement des capacités techniques et scientifiques de l’ICCN et à la promotion de ces aires. rel depuis longtemps au travers d’aires protégées. Le Parc National de Virunga, créé en 1925, est le premier « parc » établi en Afrique, tandis que le Parc National de la Salonga, crée en 1975, est le plus grand massif de forêt tropicale protégées du continent Africain, avec une superficie de 3.3 millions d’hectares. Aujourd’hui, le réseau des aires protégées en RDC est principalement sous mandat de gestion de l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) et couvre environ 13% du territoire national. Il comprend 7 parcs nationaux, 57 réserves naturelles et domaines de chasse ainsi que d’autres types d’aires protégées comme les jardins botaniques (Jardins Botaniques de Kinshasa, Kisantu et Eala) et 3 réserves de biosphère reconnues par l’UNESCO dont celles de Luki au Bas Congo et de Yangambi en province Orientale. Cinq aires protégées sont inscrites au registre des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO: le Parc National des Virunga, le Parc National de la Salonga, le Parc National de Kahuzi-Biega, le Parc National de la Garamba et la Réserve de Faune à Okapis, pour une superficie totale de 6.9 millions d’hectares. Depuis 1975, la RDC a fait état à maintes reprises d’un ferme engagement pour consolider son réseau d’aires protégées et l’étendre à 15% du territoire (soit 35 millions d’hectares). Cet engagement a été réitéré en 2002 lors de la révision du Code forestier. L’objectif d’extension a été officiellement porté à 17% (soit près de 40 millions d’hectares) en 2010 à l’occasion de la 10ème conférence mondiale sur la biodiversité tenue à Nagoya au Japon. Pour atteindre cet objectif, la RDC a mis en place un Programme d’Appui au Réseau des Aires Protégées (PARAP), une initiative mise www.impact.cd Bruno Perodeau Directeur de Conservation au WWF en République démocratique du Congo Les espaces naturels sont aussi des milieux le plus souvent habités ou qui regorgent de ressources naturelles qui présentent des grands enjeux économiques et sociaux : comment la RDC peut-elle concilier ces différents enjeux de manière équitable et durable ? Les espaces naturels ainsi que leurs ressources représentent effectivement de grands enjeux. Ces enjeux sont de plus en plus importants pour les pays ainsi que pour l’ensemble de l’humanité, compte tenu de la rareté croissante de ces ressources au rythme des pressions dont elles font l’objet. Les réseaux d’aires protégées font partie d’un mécanisme de protection indispensable dans le monde entier pour la conservation de la biodiversité. Les experts s’accordent pour mieux lier croissance économique, conditions de vie des populations et conservation des ressources naturelles. La protection de la biodiversité doit être gérée de façon intégrée, c’est-à-dire en prenant en compte tous ses aspects dans le processus de décision. Elle doit être comprise comme étant une richesse permettant de soutenir le développement, un peu comme une infrastructure naturelle soutenant notre bien-être général. En RDC, cela ne pourrait être plus vrai dans la mesure où 80% de la population dépendent directement des ressources naturelles pour leur survie quotidienne. Nous savons qu’environ 95% des ménages utilisent le bois comme source principale d’énergie. Aussi, plus d’un million de tonnes de gibiers est chassé chaque année Le PARAP a pour objectif d’évaluer l’état actuel des aires protégées de la RDC et de produire des recommandations pour leur consolidation et extension en vue d’assurer la conservation de la biodiversité exceptionnelle de la RDC. Impact n°7 / Décembre 2014 / 59 pour les besoin de l’alimentation humaine. Les pressions anthropiques augmentent avec la croissance démographique. La déforestation, la dégradation des forêts et des sols, la disparition d’espèces animales et végétales sont des conséquences évidentes d’une gestion non durable des ressources naturelles. La conciliation des besoins humains et de la conservation n’est pas chose facile, puisque résultant de pratiques multiformes et de nombreux groupes d’acteurs. Le WWF, avec le soutien financier de ses partenaires, notamment de l’Agence Française de Développement et de la coopération allemande, appuie le gouvernement de la RDC dans la recherche de solutions concertées, où la gouvernance locale est au centre des préoccupations. C’est dans cette logique que WWF participe aux travaux de REDD+ visant à promouvoir la recherche de solutions durables dans les espaces forestiers sensibles. Quels sont les principaux enjeux en termes de conservation ? Quels sont les principales menaces? Le principal enjeu est le développement et le bien-être des populations. Avec une croissance démographique galopante et une réserve de ressources naturelles importantes mais somme toute fragile et limitée, la RDC doit faire des 60 / Impact n°7 / Décembre 2014 choix de société aujourd’hui pour assurer ses conditions de vie de demain. Plusieurs espèces animales et végétales sont menacées de disparition dans le pays. Des niveaux de plus en plus élevés de contamination sont constatés dans plusieurs endroits industrialisés de la RDC affectant directement des populations et communautés entières. La plupart des populations qui travaillent avec le WWF se plaignent de leurs conditions de vie et de la perte rapide des ressources naturelles jadis abondantes. Les pratiques agricoles actuelles ne permettent pas à la RDC de couvrir ses besoins alimentaires et participent à une dégradation accélérée de l’environnement, notamment par l’agriculture itinérante sur brûlis et l’érosion rapide des sols. Un déclin important de la biodiversité des éco- systèmes naturels en RDC est déjà constaté. Les analyses du WWF permettent de classifier les principales menaces sur la conservation de la biodiversité en RDC. La première est l’exploitation illicite de l’ivoire qui risque de bientôt provoquer la disparition des quelques milliers d’éléphants encore restant dans le pays. L'extinction de ces derniers, comme d’autres espèces, engendre une multitude d’impacts sur les équilibres écologiques et une perte de biodiversité dans l’ensemble de l’écosystème. Ensuite, la chasse commerciale approvisionnant les centres urbains, totalement illégale selon les lois actuelles, terminera de vider les forêts congolaises d’ici quelques années si le rythme actuel se maintient. En troisième lieu, les pratiques agricoles de masse et les feux de brousse incontrôlés, qui ont pour effet de stopper la régénération naturelle et le processus de renouvellement de la fertilité des sols, provoquent des difficultés accrues de sécurité alimentaire. Par ailleurs, l’exploitation informelle des forêts, et les extractions minières et pétrolières non contrôlées et non encadrées constituent des menaces particulièrement néfastes notamment dans les aires protégées en RDC. Pourquoi mettre en péril un extraordinaire patrimoine biologique dont dépend une grande fraction de la population au bénéfice d’une exploitation minière et pétrolière qui ne serait pas respectueuse de l’environnement et des populations riveraines et dont les retombées ne serviraient que quelques intérêts à court terme ? Les débats sur ces sujets doivent trouver des solutions sur le long terme au bénéfice de tous y compris la nature et les générations futures. Propos recueillis par Philippe Bosse Photo : Eric Thauvin Photo : WWF DOSSIER I l y a dix ans, suite à une série d’initiatives régionales importantes pour la conservation des ressources naturelles, telles que l’implantation des premières phases du programme CARPE (Central Africa Regional Program for the Environment), la mise en place de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC) et le lancement du Partenariat pour les Forêts du Bassin du Congo (PFBC), le WWF décida la réouverture d’un bureau national en RDC. Actif d’abord au nord du pays, dans le Parc National de la Garamba et à l’est dans le Parc National des Virunga, le WWF a ouvert en mars 2004 un bureau national à Kinshasa. Il s'agissait, au départ, d'une petite équipe technique d’une dizaine de personnes travaillant sur quelques projets. On retiendra, par exemple, avec l'appui de CARPE, les actions conduites dans les régions de la Salonga et du Lac Tumba. Elles portaient essentiellement sur l’exploration et la caractérisation de ces riches socio-écosystèmes, encore très mal connus. L'implication de WWF dans l’Est, dans les zones des Virunga et de la Maiko-Kahuzi Biega, allait être formalisée plus tard, avec un processus d’unification des programmes du WWF en RDC. C’est aussi pendant ces premières années que le projet d’appui à la gestion durable des écosystèmes forestiers, financé par la coopération belge, allait démarrer, jetant les bases du futur programme forêt du WWF RDC. Il allait en être de même de l’ambitieux projet de mise en oeuvre d'un modèle de développement durable autour de la réserve de Biosphère de Luki. Au cours de ces dix années, le WWF a privilégié le dialogue avec le gouvernement, la société civile, les communautés locales, les peuples autochtones, et le secteur privé. De nombreuses activités ont été conduites dans le cadre de programmes couvrant des thématiques le plus souvent nouvelles en RDC. Les appuis du WWF ont notamment facilité la création de trois aires protégées : les réserves naturelles de Tumba Ledima, du Triange de la Ngiri, et d’Itombwe. Ils ont aussi permis de lancer le reboisement à grande échelle autour des Virunga et de la réserve de Luki ainsi que la prise en compte de milliers de communautés locales et de peuples autochtones dans la gestion des ressources naturelles. Aujourd’hui, WWF RDC compte un peu plus de 150 agents et coordonne huit programmes dont quatre géographiques (Programmes Lac Tumba, Salonga, Bas-Congo et Est de la RDC) et quatre thématiques (Programme Forêt, Economie Verte, Aires Protégées et Faune Sauvage) avec un budget annuel d’environ 10 millions de dollars. En 2013, WWF a réalisé l’étude économique du Parc de Virunga (http:// www.wwf.be/_media/Valeur%20Economique%20du%20Parc%20National%20 des%20Virunga_LR_380671.pdf). Cette étude a notamment établi que si dans la situation actuelle, la valeur du Parc National des Virunga s’élève à 48,9 millions de dollars par an. Ce montant pourrait, dans une situation stable et sécuritaire, s’accroître fortement. Le WWF, avec le soutien financier de ses partenaires, notamment de l’Agence Française de Développement et de la coopération allemande, appuie le gouvernement de la RDC dans la recherche de solutions concertées, où la gouvernance locale est au centre des préoccupations. www.impact.cd Dix ans d’action du WWF en RDC www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 61 Photo : Martin van der Belen Kikongo-Français, imagier en Kikongo-Français et anglais qui ont été distribués dans les écoles du Bas-Congo. Nous croyons, en effet, que la langue maternelle doit être utilisée comme la langue de transmission du savoir. La prise en compte de la diversité culturelle et la promotion du multilinguisme sont essentiels dans l’éducation. Langue et éducation sont étroitement liées et sont, toutes deux, facteurs de développement. Les cinq livres que nous avons produits font partie du fonds Congo et du fonds francophone de la médiathèque de l'Institut français de Kinshasa depuis juin 2014… Un chœur gros comme ça…! Agnès Polet est une infirmière dont la vie devient presque un roman. Sa relation avec le Congo commence par une double passion. Le chant, l’amour. Elle a subi récemment un terrible accident. Contre attente, elle met encore plus de cœur dans cette relation passionnante… Impact : Vous êtes engagée depuis un certain temps dans un lien fort avec le Congo. Pouvez-vous nous raconter un peu votre histoire ? Agnès Polet : C'est en 2007, lors des Choralies de Vaison-la-Romaine [France], que l'on m'a confié la tâche d'accompagner le chœur «La Grâce» de Kinshasa, en qualité d’administrateur du mouvement choral «À Cœur Joie». C'est lors de cette expérience que j'ai rencontré celui qui allait devenir mon mari, le musicien, comédien, écrivain, Ne Nkamu. Il encadrait les jeunes du Centre Culturel Mbongi'êto (CCMBO), qui accompagnaient la chorale kinoise. Ce fut mon premier contact avec l'A frique, avec le Congo. Si les mélopées du chœur «La Grâce» m'ont vite enchantées, le discours de Ne Nkamu m'a petit-à-petit fait entrer dans le monde profond de la philosophie Kongo. En décembre 2007, je me retrouvais à Luozi, district des Cataractes, où Ne Nkamu 62 / Impact n°7 / Décembre 2014 organisait l’atelier de musique Kunîngisa, «faire vibrer» et le festival de musique Ngomaio Fest... En France, nous avons créé l'association de solidarité internationale «Kiamvu-Le Pont» qui soutient les actions et projets du Centre Culturel Mbongi'êto et nous œuvrons ensemble, utilisant la culture comme vecteur de l'éducation et considérant l'éducation comme passage obligé de développement. Nous avons reconstruit l'école de Kinkenda, parrainé la scolarité d'une centaine d'enfants, fourni un groupe électrogène solaire, créé un centre informatique communautaire à Kimata, assuré une formation en bureautique. Nous nous sommes, de surcroît, impliqués dans la conservation, promotion et sauvegarde du patrimoine (matériel et immatériel) : collecte des chants traditionnels Kongo et édition d'un livre sur ces chants et leurs circonstances; promotion de la langue nationale locale, le Kikongo, en produisant les livres de grammaire, conjugaison www.impact.cd Malgré le terrible accident que vous avez eu en RDC, vous continuez à venir, comme si cet épisode tragique n'avait fait que redoubler votre motivation...? D'abord cet accident aurait pu se passer n'importe où, et je dois dire que j'ai été très fâchée de la réaction, très rare il est vrai, d'une personne qui m'a écrit : «L'Afrique te rend bien mal tout l'amour que tu lui portes». J'aime le Congo, mais je n'ai qu'à voir les réactions des villageois à mon retour après l'accident pour voir l'amour qu'ils me portent. Je ne pense pas que cet accident ait fait augmenter ma motivation, mais il est certain que toutes leurs preuves d'affection m'ont confortée sur le fait qu'ils apprécient nos actions et alors oui, peut-être avez-vous raison, cela me donne encore d'avantage d'enthousiasme. Cet accident a permis de mettre en évidence mon amour du Congo. L'amputation de mon bras droit m'ouvre d'autres horizons auxquels je n'aurais, peut-être, jamais pensé. Et, j'ai bien envie de prendre cette nouvelle vie à bras le corps ! www.impact.cd Photo : Martin van der Belen SOCIÉTÉ Hommage à Mâ Niesi Le 8 novembre à l'Institut français, la communauté congolaise a tenu à rendre hommage à l'action humanitaire d'Agnès Polet (ici, avec Luc Hallade, ambassadeur de France en RDC). Un film est en train d'être réalisé autour de votre histoire. Quel message voudriez-vous faire passer à travers ce témoignage? Je suis infirmière et chef de chœur, présidente de l’association internationale Kiamvu-Le Pont; ce film est le portrait d'une femme ordinaire à travers laquelle on réalise que l'on peut déplacer des montagnes, grâce à son enthousiasme et ses convictions dans ses actions, en donnant du bonheur et surtout en le recevant. On pourra bientôt voir ce film à Kinshasa ? La réalisatrice Euzhan Palcy est en en train de visionner tous les rushs et commencera le montage sous peu. Mais la création prend un certain temps et pour le moment, il n'est pas encore possible de donner la date de sortie. Bien entendu les premières projections seront réservées à la RDC et à l'Institut français… Propos recueillis par MVDB Impact n°7 / Décembre 2014 / 63 SOCIÉTÉ L’arbre dans la société congolaise En RDC, l’arbre est souvent associé à la forêt, la mère pourvoyeuse des ressources vitales et des symboles pérennisant les traditions. Bien plus qu'un simple ornement, l’arbre fait partie intégrante de notre vie sociale… D sur près de 68% du territoire national. En effet, la RDC possède la deuxième plus grande forêt tropicale du monde ; c’est un véritable poumon qui aide la planète à respirer, une réserve incroyable de biodiversité. Porteur de mythes Par le passé, l’arbre représentait un point de repère essentiel. Les mythes s’enracinaient dans les forêts sacrées, les esprits habitaient dans les arbres. C’était un référent culturel également pour la construction des cases et la fabrication des outils quotidiens (pirogues, mortiers, tambours,…) et des objets spéciaux dotés de pouvoirs magiques tels que le tabouret et la canne du chef coutumier, les statues, les masques… Au Bas-Congo, le nkondi, une sculpture Yombe au ventre criblé de clous, permettait de châtier le coupable. Au Maniema, le chef coutumier se sert encore aujourd’hui de la statuette Kajeba pour communiquer avec les esprits ancestraux. Ces objets étaient taillées dans du bois résistant à l’attaque des parasites comme le bois noir du wenge (Milletia laurentii), le bois de l’A frican teak (Chlorophora excelsa). Le bois rouge (PtePhoto : MVDB ans la plupart de nos villes, de nos villages, l’arbre borde les rues ou entoure les maisons. Mais en réalité, c’est en forêt que l’on mesure toute son importance, soit Fonction écologique La plantation et la conservation des arbres permettent de lutter contre l'érosion du sol, très fréquente en milieu urbain. Les racines des arbres maintiennent le sol en place dans les terrains en pente alors que leur feuillage apporte régulièrement de la matière organique pour fabriquer une litière permettant de recouvrir les terrains. Les arbres permettent de stabiliser et de régulariser l'hydrologie du sol et le niveau de la nappe phréatique. rocarpus tinctoris Wein), lié à la voyance, était utilisé dans les rituels, notamment lors des initiations. L’arbre à palabre était le lieu d’entretien de la mémoire collective, d’apaisement social. On y racontait des légendes et on y résolvait des conflits. En savane, les chefs, plantaient deux baobabs à l’entrée du village, en signe de délimitation de leurs territoires. Si le passé se confond encore au présent pour ceux qui respectent les traditions, l’évidence est inéluctable : ce qui se cache derrière l’arbre s’estompe peu à peu à cause des croyances religieuses des uns et de l’esprit cartésien des autres, produit de la civilisation dira-t-on ! Des milliers d’usages En ville, le plus souvent, l'arbre à palabre est devenu l'arbre « à ombrage » (pare-soleil), sous lequel s'abritent des vendeurs ambulants ou d'autres groupes de personnes discutant foot et politique... Et la valeur utilitaire de l’arbre est, à plus d'un titre, évidente. Il peut nous servir de combustible ou nous procurer des fruits, des médicaments ou être une matière première trans- Photos : Alain Huart Gardienne Vert-Bleu 64 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Godelieve Vununu est née en 1954 à Boma, ville portuaire à l'orée de la forêt du Mayombe dans la province du Bas-Congo. Diplômée de l'Université de Kinshasa en Sciences Chimiques, elle a travaillé au laboratoire des sciences au Lycée Prince de Liège (LPL) jusqu’aux événements de 1991. Elle est retournée ensuite à l’Unikin pour obtenir un diplôme d'études supérieures en gestion de l'environnement. En 2007, préoccupée par la situation de son pays, elle a initié un projet d'éducation à l'environnement en faveur de la jeunesse, « Le Gardien Vert-Bleu » (gardien des plantes et de l'eau). Depuis lors, elle édite un journal qui porte le même nom, renforce les capacités des enseignants et sensibilise à l'environnement les jeunes en milieu scolaire et à l’espace Texaf-Bilembo. Impact n°7 / Décembre 2014 / 65 SOCIÉTÉ Des plans d’urgence complets sont régulièrement actualisés et testés pour faire face efficacement aux accidents comportant un risque de pollution des eaux superficielles. SEP Congo assure le contrôle et l’analyse de tous les rejets résultants de ses activités. pour lutter contre l’hypertension, la fatigue générale et les maux d’estomac. Les feuilles d’eucalyptus, en bain de vapeur, peuvent agir contre le diabète, le paludisme, la grippe ou la sinusite. L’écorce de manguier combat les rhumatismes et les hémorroïdes… Plusieurs facteurs menacent la silhouette familière de l’arbre en RDC : la démographie galopante, la concentration de la population en SEP Congo participe activement avec le Ministère de l’Environnement au plan POLMARC centré sur la lutte contre les pollutions marines par les hydrocarbures. L’entreprise a développé ses propres plans d’urgence maritime et fluvial (PUM) sur les bases de Ango-Ango (Matadi), Kinshasa, Kisangani et Ilebo. Conformément aux principes de transparence et de dialogue de sa charte Hygiène, Sécurité, Environnement et Qualité (HSEQ), Un kit de survie… pour l’Humanité Certains arbres sont importants dans la pharmacopée. On notera par exemple que les feuilles de l’avocatier en décoction sont recommandées 66 / Impact n°7 / Décembre 2014 SEP Congo s’engage à préserver la qualité de l’eau et de l’air, à réduire les déchets, à assurer la traçabilité jusqu’au traitement et la valorisation de ses déchets, à réhabiliter les sites et les sols en cas de pollution et à sauvegarder la biodiversité. Protection contre la chaleur Les espaces boisés constituent une protection contre la chaleur par le rafraîchissement de l'air ambiant. L'être humain recherche l'ombre lors des journées ensoleillées. Dans les parcs et les boisés urbains, la température de l'air est généralement plus fraîche qu'en milieu ouvert. Le feuillage des arbres intercepte, absorbe et reflète la radiation solaire et réduit ainsi l'intensité du rayonnement et la chaleur qui en résulte. milieu urbain, l’exploitation incontrôlée du bois, l’ignorance de la population sur tous les services offerts par l’arbre. Si les jeunes ne craignent plus trop les esprits susceptibles d’habiter les forêts, ils ont plutôt peur des animaux qui y vivent car ils ne connaissent finalement plus la forêt, ni les arbres. On oublie trop souvent leur rôle dans la purification de l’air et dans la lutte contre l’augmentation rapide de l’effet de serre, ou dans la prévention des érosions et de la désertification… Il faut donc réapprendre ce que signifie globalement l’arbre pour notre société, sans quoi - n’en déplaise aux Cartésiens les esprits qui y habitent ne nous le pardonneront pas… Godelieve Vununu www.impact.cd Photos : Alain Huart formable pour l’ébénisterie et la construction. Son exploitation, de surcroît, peut nous assurer des revenus. En milieu urbain, l’arbre est planté surtout pour ses fruits, comme le manguier, le safoutier, le palmier à huile, l’avocatier… La règle veut que l’on peut cueillir les fruits d’un arbre mais pas le couper sans l’autorisation de son propriétaire. Et pourtant, il est régulièrement abattu ou déraciné sans autre forme de procès, pour de l’argent : charbon de bois, bois de chauffe des ménages ou des fours à usage commercial. En milieu rural, il faut toujours l’autorisation du chef coutumier pour exploiter une forêt, même si on est en règle vis à vis de l’Etat. On ne voudrait pas réveiller ce qui se cache derrière l’arbre… L’arbre à corail (Erythrina abyssinica) est planté autour des cases et des champs pour fournir des ustensiles de cuisine. Si le bois noir ou le teak continuent à être fort prisés dans l’art et l’ébénisterie, le bois brun jaune du limba (Terminalia superba) fournit des bardeaux, des pagaies, des boîtes et des cercueils. Les rondins sont découpés dans le bois blanc et dur d’un arbuste (Lannea antiscorbutica) pour la construction des maisons et des clôtures. La fabrication des instruments de musique et des manches à outils est réalisée avec du bois d’or (Milletia vasicolor). Les procédures SEP Congo en matière d’environnement répondent aux standards internationaux. Elles permettent : sLÏVALUATIONDESRISQUES environnementaux pour mieux les maîtriser, sLESUIVIDELÏVOLUTIONDELA performance environnementale, sLÏTUDEDIMPACTS environnementaux dans nos projets d’investissement. www.impact.cd SEP Congo s’engage à faire que ses activités soient mieux acceptées par le voisinage ainsi que les parties prenantes, en identifiant leurs attentes en matière d’environnement et de santé. Impact n°7 / Décembre 2014 / 67 SOCIÉTÉ Photo : Meni Mbugha La forêt de la Province Orientale Poumon de l’économie « verte » de la RDC en donnant une valeur ajoutée importante et en créant des emplois. Les concessions ne représentent en Province Orientale que 20% de la surface forestière. Le reste est simplement régi par le code forestier et laissé à la disposition des populations locales, très présentes dans ce massif. À l’époque où les conditions économiques étaient favorables, cette province constituait l’un des greniers du pays. Aujourd’hui, la 68 / Impact n°7 / Décembre 2014 Province Orientale dispose toujours de nombreux atouts propices à son redéveloppement : diversité climatique, qui permet l’exploitation d’une gamme variée de produits agricoles, et diversité des ressources naturelles permettant le développement des secteurs de l’industrie et du transport, tels que les nombreuses rivières, le www.impact.cd Photos : Jean-Michel LAGE La Province Orientale c’est quatre districts : Tshopo, Ituri, BasUélé et Haut-Uélé. Mais aussi quatre parcs nationaux : Garamba, Maiko, la réserve de Faune à Okapis d’Epulu et le nouveau parc de la Lomami, à cheval sur le Maniema et le Kasaï Oriental. Partageant ses frontières avec la Centrafrique, l'Ouganda et le Sud Soudan, elle constitue la future voie de passage transafricaine destinée à relier l’Afrique australe à l’Afrique du nord. fleuve et cette immense forêt tropicale. Cette forêt tropicale couvre environ 155 millions d’hectares du territoire national, ce qui en fait le deuxième pays forestier au monde après le Brésil. Elle couvre principalement trois provinces : Le Bandundu, l’Equateur et la Province Orientale. Si ce massif forestier est d'une densité généralement assez faible, il abrite néanmoins des essences de très grande qualité (Wengue, Afrormosia, Acajou, Sipo, etc.). À l'opposé, certaines essences que l’on retrouve dans les pays voisins à l’état disséminé sont ici regroupées en peuplements denses, ce qui est exceptionnel (cas du Wengue dans le Bandundu ou de l’A frormosia en Province Orientale). La nécessité de gérer ce massif a conduit le gouvernement à créer en 2010, 80 concessions forestières aménageables, dont 23 dans la seule Province Orientale. Ces concessions ont été attribuées à des sociétés d’exploitation et de transformation du bois, avec obligation de présenter avant quatre ans, un plan d’aménagement durable pour chacune des concessions. Soutenu par l’Agence Française de Développement, le projet d’appui à la gestion durable des forêts (Agedufor) de la RDC a donc pour objectif de renforcer les compétences des administrations centrales et provinciales du pays en matière d’exploitation des différentes concessions forestières. L’immensité du Congo et l’éloignement de la Province Orientale freinent la commercialisation des produits forestiers bruts et amènent les industriels à transformer les produits sur place www.impact.cd Facteur de développement Il est certain que la forêt soit une source propulseuse de l’économie de RDC. Dans le cas de la Province Orientale, elle est facteur de développement touristique, avec de nombreuses retombées économiques sur son territoire. La gestion forestière en Province Orientale Chaque concessionnaire peut orienter ses objectifs en fonction de ses moyens et du contexte international du bois. Trois options se présentent : > Retour à l’État (15% des concessions) : le concessionnaire choisit de rendre la concession à l’État car il estime ne pas pouvoir la valoriser correctement. > La mise en conservation (10% des concessions): ce choix place la concession «en défense» ; toute exploitation y est interdite et priorité est donnée aux opérations de reboisement de substitution (bois de feu) et d’élevage (protection de la faune), l’objectif étant de bénéficier, à terme, de fonds provenant de la REDD+ (Réduction des Emissions de carbone Dues à la Déforestation). > L’aménagement forestier (75% des concessions): cette option permet une exploitation durable de la ressource forestière de façon très règlementée grâce à la planification de toutes les opérations forestières et à la concertation permanente entre le concessionnaire et la population locale afin d’éviter les conflits. Un plan d’aménagement approuvé par le ministère de l‘Environnement est alors exigible. Il est évident que c’est le seul moyen de valori- Impact n°7 / Décembre 2014 / 69 SOCIÉTÉ ser cette forêt tout en préservant sa pérennité et celle de sa faune, et surtout en y associant les peuples indigènes et autochtones qui y vivent. Les labels de certification forestière (PEFC, FSC etc.) attestent du respect de ces bonnes pratiques et permettent de mieux commercialiser les produits des concessions. Cet objectif n’est pas encore atteint en RDC, mais le gouvernement et quelques sociétés responsables y travaillent dejà. Perspectives La lutte contre l’exploitation illégale et le contrôle des origines des produits forestiers entrant dans Kisangani permettra de créer un pôle attractif pour tous les opérateurs qui savent que l’exploitation rationnelle d’une forêt n’est pas incompatible avec la préservation de l’environnement mais la complète. La forêt doit générer des ressources financières et fiscales importantes dans cette province appartenant au pays le plus boisée du monde. Pour cela il est nécessaire de poursuivre l’implantation d’industries de transformation de bois créatrices d’emploi et de promouvoir une agriculture adaptée. Quelle est la genèse du projet ? En 2011, je me suis rendu une première fois dans la forêt d'Epulu pour rencontrer ces artisans pygmées. Dans les villages alentour, j’ai constaté que les Mbutis exprimaient leur vision du monde sur des écorces d'arbres battues, collectées sur des ficus puis peintes à l'aide de pigments extraits de végétaux de teintes noire, rouge ou jaune. Les dessins, réalisés alors par ces femmes sous l'œil attentif de leurs enfants, représentent la faune et la flore. Ces écorces sont portées ou utilisées dans les cérémonies rituelles mais également appréciées des NDURA* «Une forêt, un peuple, un avenir» L es Bambuti sont des peuples autochtones de la République démocratique du Congo. Ils vivent dans la réserve de faunes à okapis d’Epulu en Ituri dans la Province Orientale. Excellents chanteurs et danseurs, ils sont aussi des peintres reconnus. Ils expriment leur vision du monde sur des écorces d’arbres battues avec des colorants naturels. Plus qu’une activité lucrative, la peinture sur écorces est une réelle école du savoir qui est socialement durable. Cependant, la situation socio-économique des Bambuti reste préoccupante et cette activité pâtit de l’assimilation des pygmées et du déclin du tourisme. *Ndura veut dire foret en Kibila, langue parlée par les Babila, groupe ethnique bantou vivant avec les communautés pygmées d'Epulu. Photos : Meni Mbugha Rôle socio-économique de la forêt en Province Orientale L’agglomération de Kisangani compte plus d’un million d’habitants. Le bois y est utilisé pour la construction, le coffrage, les échafaudages, les meubles... D’autres sous-produits de la forêt comme le charbon de bois, les chenilles, certaines écorces ou plantes entrent dans les recettes de cuisines ou les préparations médicinales. Mais une forêt bien gérée doit d’abord fournir du bois d’œuvre, ce qui est d'autant plus faisable que le fleuve Congo permet le flottage des grumes par radeaux (bois flottables) ou par barges (bois non flottables). La transformation des bois dans des scieries locales ou des usines de transformation (contreplaqués) est une source d’emplois importante et devrait encore se développer dans cette province sous l’impulsion d'un gouverneur très impliqué. Les sociétés forestières créent des routes et permettent le désenclavement de nombreux territoires. Pour autant, ce progrès ne doit pas s’accompagner d’une destruction de l’environnement (culture sur brûlis) mais bien au contraire par un zonage puis une agriculture raisonnée et responsable. Meni Mbugha, d’où venez-vous et d’où vous vient ce besoin de valorisation et de promotion de ce peuple des forêts ? Je suis né dans l'est de la France, à Nancy, d'un père nutritionniste et d'une mère au foyer élevant quatre enfants. C’est à l’âge de 6 ans que je suis revenu en RDC avec mes parents. Bien que passionné de stylisme, j’étudie l’informatique pendant trois ans avant de m’inscrire à l’académie des Beaux-arts et à l'Institut supérieur des arts et métiers de Kinshasa en 2004. Ce besoin d’attirer l’attention sur le peuple pygmée me vient très certainement de mon côté «écologiste». Et c’est pour cela que j’ai décidé d'étudier un jour le lien entre la mode et la protection de la forêt. C’est en 2007, à Kinshasa, que je rencontre une famille Bantoue ayant une «bonne» pygmée. Le chef de famille me prête un livre sur les Mbutis et sur leur art pictural. Je me sens concerné par le sort tragique des Bambutis lorsque je constate en 2011 leur dénuement à Epulu. Le projet Ndura a pour mission de promouvoir le savoir traditionnel, mais aussi le pérenniser et favoriser la création d’une activité génératrice de revenus pour les Bambutis dans la réserve de faune à okapis. touristes et des collectionneurs occidentaux. De ce fait, ce savoir traditionnel serait le moyen de contribuer à l’amélioration des conditions de vie des Bamboutis puisque les écorces sont belles et appréciées. Au lieu de peindre les écorces, il faudrait peindre le tissu. Aujourd’hui, c’est en qualité de designer et de promoteur du label VIVVYA, mais aussi d'enseignant à l’Institut Supérieur des Arts et Métiers (ISAM) à Kinshasa que j’ai réalisé ce travail qui entre dans le cadre du projet NDURA. Ce dernier a pour mission de promouvoir ce savoir traditionnel mais aussi de pérenniser et de favoriser la création d’une activité génératrice de revenus pour les Bambutis dans la réserve de faunes à okapis. J’ai ainsi créé une collection de tissus que j’ai intitulé «Signature» et une ligne de vêtements appelée «Protos». Ces créations, que les visiteurs découvrent dans cette exposition, se sont inspirées de ces motifs peints sur les écorces. Bio-express Né en 1981 à Nancy en France, Mbugha Meni est l'avant-dernier d'une famille de quatre enfants. Passionné de danse et de dessin, il apprend les rudiments du dessin de mode aux côtés d'une cousine qui rêva de devenir Qu’est-ce que vous avez voulu montrer en imaginant cette exposition ? J’ai voulu d’abord démontrer le lien existant entre la culture, l'écologie et le développement par le biais du design textile et de la mode. Ces facteurs devraient être intégrés dans la relance de notre grand pays, le Congo. Mais cette exposition, d’abord présentée à l’Institut français Halle de la Gombe à Kinshasa en juillet 2014 puis à l’Alliance française de Kisangani en novembre dernier, était aussi le moyen de faire connaître et de lancer un cri d’alarme sur la situation de ce peuple méconnu, mais aussi de tous les autres peuples autochtones du pays, tout en démontrant qu’il est possible de produire au Congo, des produits « éthique et écologique », qui peuvent contribuer à vaincre la précarité et la vulnérabilité de ce peuple. L’exposition se compose donc d’écorces battues et peintes par les Bambutis entre 2011 et 2014, de photos et vidéos sur la réalisation de ces écorces, de tissus imprimés et teints ainsi que les créations réalisées. styliste. En 1986, de retour à Kinshasa, il continue à pratiquer le dessin. Cependant, plus tard , il s'inscrit à l'ISAM/Kinshasa d'où il en sort Chargé de pratique professionnelle en 2007 et actuellement, Assistant de premier mandat, rejoignant ainsi l'activité professionnelle de son père. Depuis 2008, il présente ses collections et les expose dans diverses manifestations culturelles, d'abord en Namibie, ensuite à Kinshasa et enfin à Kisangani. Propos recueillis par Matthieu Juin-Levite Jean-Michel LAGE 70 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 71 SOCIÉTÉ «Gestion des ressources naturelles du Miombo» (BAK ASBL) - l’enseignement de l’écologie (E.P. Mikembo) - la revalorisation du cours « Environnement et Santé » et la formation des enseignants (GIZ et ASBL Mikembo) - des projets de gestion en partenariat avec l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) des parcs de l’Upemba (CEE) et des Kundelungu (GIZ). Le Katanga et son Miombo Une dégradation inquiétante Le Miombo, localisé dans la province du Katanga, couvre presqu’entièrement le district du Haut-Katanga et la ville de Kolwezi, une partie du Tanganyika et du Lualaba. Il joue un rôle important dans la régulation du climat et influence le cycle de l’eau et du carbone tout en déterminant certaines conditions environnementales en Afrique australe. SOS Miombo Aujourd’hui, déforestation, makala, exploitation minière, feu de brousse, anthropisation… sont les causes principales qui menacent l’écosystème de la forêt de Miombo au Katanga. Il en découle une érosion des sols, une perturbation du cycle de l’eau, la disparition des espèces végétales et animales, une baisse de fertilité des sols et, par conséquent, une augmentation des gaz à effet de serre. 72 / Impact n°7 / Décembre 2014 Katanga, deux Parcs Nationaux ont été créés, l’Upemba (1939) et les Kundelungu (1970). À cette époque, la chasse et la coupe de bois étaient strictement réglementées sur l’ensemble du territoire. La faune y était alors abondante. Depuis plusieurs décennies, les conflits qui ont affecté le pays ont entrainé une dégradation importante du Miombo. En effet, ces deux Parcs Nationaux, qui regorgeaient autrefois de gibier, sont aujourd’hui quasi déserts et il suffit de circuler sur les grands axes routiers de la province pour se rendre compte du déboisement intensif qui met en péril la biodiversité. La quasi totalité de la faune est déjà en voie de disparition et en particulier, le plus noble des animaux, l’éléphant. En outre, la relance du secteur minier, trop souvent réalisée de façon anarchique, a également provoqué une forte dégradation des écosystèmes du Miombo. Aujourd’hui, déforestation, makala, exploitation minière, feu de brousse, anthropisation…..sont les causes principales qui menacent l’écosystème de la forêt de Miombo au Katanga. Il en découle une érosion des sols, une perturbation du cycle de l’eau, la disparition des espèces végétales et animales, une baisse de fertilité des sols et, par conséquent, une augmentation des gaz à effet de serre. Sans oublier que le Miombo nourrit la population avec ses champignons, ses termites, ses végétaux et ses animaux. Les habitants sont de facto privés progressivement de www.impact.cd La nature comme valeur économique et éducative : une «Win Win Strategy» Chez nos proches voisins et au-delà, l’écotourisme est une source importante de développement durable, de revenus et d’emplois. Pourquoi ne pas le développer au Katanga, sachant que le potentiel naturel est bien plus élevé que dans la plupart de ces pays ? À la suite d’une réelle prise de conscience, il existe, depuis plusieurs années, des actions qui tentent d’inverser la tendance, notamment au travers d’initiatives privées qui ont créé des zones protégées et réintroduit une partie de la faune endémique du Katanga (Game Ranch). Mais les autorités en charge de l’éducation ne sont pas en reste. En témoignent plusieurs décisions concernant : - la formation d’étudiants de l’Université de Lubumbashi (UNILU) qui ont obtenu un DEA en Vanessa et Michel Anastassiou/ Mélanie Sirdey-Coid Qu’est-ce-que le Miombo ? Le Miombo est la végétation de type forêt claire dans la région dite «zambézienne» localisée en Afrique australe et Centro-australe. Cet écosystème couvre environ 10% du continent africain (Angola, Zambie, Zimbabwe, Malawi, Mozambique, Tanzanie, Namibie, Afrique du Sud, Botswana, Rwanda et la partie Sud de la République Démocratique du Congo). La quantité des pluies varie entre 600 et 1200 mm par an. On distingue le Miombo humide au nord et le Miombo sec au sud en fonction des précipitations. Sa biodiversité héberge 8500 espèces végétales dont plusieurs sont endémiques et on y rencontre de nombreux refuges pour des espèces animales. Plus de 75 millions de personnes habitent en milieu rural et 20 millions dans les centres urbains. Plus de 70% de ces populations utilisent quotidiennement les produits du Miombo pour générer de l’énergie (charbon de bois et bois de chauffe), se soigner (plantes médicinales), se nourrir (produits forestiers non ligneux : fruits, champignon, miel, etc.). Certaines espèces sont utilisées en menuiserie et en construction. Photos : M&V Anastassiou L e Miombo du Katanga compte parmi les forêts les plus humides ayant la plus grande diversité en espèces végétales. On y retrouve d’autres écosystèmes comme la forêt dense (Muhulu) ou la forêt galerie (Mushitu). On y voit également des savanes steppiques (Dilungu) en plus des écosystèmes de type forestier. Au cours du XXème siècle, afin de contribuer à la protection de la biodiversité de la province du protéines et le potentiel de développement de l’interland katangais s’appauvrit. À terme, à l’instar de ce qui s’est passé au Sahel, le risque de désertification est important. Une solution durable ne peut cependant passer que par une volonté sans faille des autorités politiques du pays à travers : - l’application effective des lois existantes de sauvegarde de l’environnement (coupe de bois, makala, chasse, pêche, exploitation minière, …) ; - la mise en place d’un plan d’aménagement du territoire qui définirait de nouvelles zones où la biodiversité serait protégée avec l’adhésion des populations locales qui doivent y trouver leur intérêt ; - la sensibilisation de la population à l’importance de la protection du Miombo et de ses composantes notamment au travers de l’éducation. À terme, la définition d’un plan d’électrification de la province et sa réalisation permettraient de réduire drastiquement la consommation de Makala et d’inverser, par conséquent, la courbe de la dégradation de la forêt du Miombo. www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 73 SOCIÉTÉ Histoire na biso ! Hadisi yetu ! Déjà 100 ans ! 1914-2014 «Les Congolais, la Force publique belge et la Première Guerre mondiale» Dans le cadre du centenaire de la Première Guerre mondiale, l’ambassade de France en RDC, le gouvernement de la Province Orientale, l’Institut français de RDC, les Studios Kabako et d'autres partenaires, ont souhaité accompagner l’initiative de l’Alliance française de Kisangani dans son projet éducatif et culturel destiné à valoriser le devoir de mémoire et à sensibiliser les nouvelles générations à la Grande Guerre de 14-18. Retour sur une initiative très appréciée. L e fondement et la stabilisation d’une nation passent par son histoire. Tout travail de mémoire y a sa place. Les faits historiques, tels que la Première Guerre mondiale, ont laissé des traces que les historiens, les sociologues et les scientifiques tentent de retrouver et de reconstituer. Ainsi le réseau culturel français, Instituts et Alliances françaises notamment, avait été invité à imaginer une programmation s’inscrivant dans cette commémoration à l’échelle mondiale et te- 74 / Impact n°7 / Décembre 2014 nant compte des spécificités locales. Quoi de plus naturel pour l’A lliance française de Kisangani, qui fêtera ses 20 ans d’existence en 2015, que de participer à ce mouvement en demandant à deux artistes de la ville d’exprimer leur vision de la Grande Guerre et aux universitaires de transmettre leurs connaissances à la population d’aujourd’hui. Mais quand ces artistes, ces universitaires et Matthieu Juin-Levite, directeur de l’A lliance française, plongent dans l’histoire, on peut s’at- Vous êtes directeur de l’Alliance française de Kisangani et représentant du service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France à l’Est de la RDC depuis maintenant une année. Pourquoi avez-vous jugé important d’intégrer dans la programmation culturelle et éducative 2014 de l’Alliance française de Kisangani le centenaire de la Grande Guerre ? Toutes les Alliances françaises dans le monde sont des associations de droit local à but non lucratif, qui exercent leur mission de manière autonome, en dehors de tout engagement de nature politique ou religieuse. Elles ont en commun la poursuite de trois missions essentielles : l’enseignement du français, la transmission des savoirs et la connaissance des cultures française et locale, tout en favorisant la diversité culturelle. Cette exposition commémorative, qui se voulait accessible à tous, petits et grands, remplissait ces trois missions. Partant de ce constat, il ne restait qu’à mettre en œuvre le projet de façon pédagogique et artistique, en faisant se rencontrer historiens, communicologues, politologues et artistes. La plupart des commémorations de la Grande Guerre se limitent trop souvent à ce qui s’est passé en Europe et, parfois, avec une approche élitiste. Or il s’agit d’une guerre mondiale : ce qui s’est passé en Belgique et en France a été important, c’est certain, mais cette guerre a connu des combats dans bien d’autres endroits du monde. Cette guerre, dans cette région d’A frique, a été complètement, ou presque, oubliée. En organisant cette commémoration, l’A lliance française a souhaité rendre hommage aux Photos : JM MBenga tendre à ce que les visiteurs découvrent des aspects oubliés ou dissimulés du passé de leur pays. Il est vrai que les « supports » ne manquaient pas: une belle exposition donnant beaucoup d’informations sur le rôle joué par les congolais, civils et militaires, au cours de la Première Guerre mondiale, une conférence-débat et, sur la même thématique, des spectacles de danse folklorique du ballet du Centre de Recherche de Danses Africaines et de danse moderne créative du Collectif Danckis. Matthieu Juin-Lévite Directeur de l'Alliance française de Kisangani La scénographie de l’exposition avait été pensée pour inviter le public à fermer les yeux et écouter les sons de la forêt équatoriale. À tendre l’oreille et se laisser porter sur les flots du fleuve Congo. www.impact.cd www.impact.cd anciens combattants congolais de la Guerre de 14-18, jetés malgré eux dans un conflit aux côtés des colons belges, alors qu’ils n’en comprenaient pas les enjeux qui les dépassaient. Elle contribue ainsi au devoir de mémoire en y associant la société civile. L’Alliance française a donc en quelque sorte invité son public à un voyage dans le temps, un voyage pour se souvenir ? Oui tout à fait, il s’agit bien d’un voyage auquel le visiteur a été convié en parcourant une exposition d’œuvres spécialement réalisées par le peintre Papy Basikaba et le sculpteur Justin-Florent Badjoko. L’exposition s’achève sur un ultime hommage à ces anciens combattants avec la présentation de photos-souvenirs provenant de la Bibliothèque Royale de Belgique, prises en 1916 par le Sous-lieutenant Robert Vincent durant cette campagne militaire d’A frique Orientale et avec un film documentaire historique de 28 minutes de la CINEMATEK de Belgique. La scénographie de l’exposition avait été pensée pour inviter le public à fermer les yeux et écouter les sons de la forêt équatoriale. À tendre l’oreille et se laisser porter par les flots du fleuve Congo. À écouter le tonnerre des obus qui retournent la terre. À regarder ces combattants aux visages tendus et graves, peints ou sculptés. Cet enfer-là, des millions de soldats dans le monde l'ont vécu il y a cent ans et les artistes de la ville l’ont compris et l’ont parfaitement retranscrit sur la toile, sur le bois rouge et l’ébène qui ceinturent la Ville de Kisangani. Impact n°7 / Décembre 2014 / 75 SOCIÉTÉ Mais quel fut véritablement le rôle des congolais dans cette guerre ? Comment les artistes ont-ils pu retranscrire ce rôle dans leurs œuvres ? L’un des objectifs était de rafraîchir les mémoires sur un conflit qui a profondément marqué l’ensemble des nations européennes et, avec elles, leurs colonies telle que la République démocratique du Congo d’aujourd’hui. Il était donc Sculpture ébène de Justin Florent Badjoko Quel est le message que vous avez voulu faire passer à la population locale et que retenez-vous des rencontres et des échanges qui sont nés de cette commémoration ? Aujourd'hui, la Guerre de 14-18 est entrée dans l'histoire, dans notre histoire à tous. La cruelle Photos : JM MBenga important de rappeler, au travers de cette exposition qui mêle créations et images d’archives historiques, que lorsque le gouvernement belge a décidé d’attaquer les Allemands au Rwanda et Burundi, il y a 100 ans, c’était au prix d’un véritable tour de force logistique. L’approvisionnement des troupes devait se faire à l’aide de porteurs chargés d'acheminer la nourriture et les munitions de 18.000 soldats. Près de 260.000 personnes avaient ainsi été recrutées en très peu de temps. D’un autre côté, en Province Orientale par exemple, la population allait cultiver massivement du riz pour nourrir les troupes. C’est une belle et courageuse illustration de la contribution décisive des Congolais dans cette guerre. Les artistes l’ont parfaitement illustré dans leurs créations. loi du temps qui passe fait que cela donne aux générations qui suivent, aux nôtres, davantage encore de responsabilités. En tant qu’institution culturelle, il nous appartenait d'aller plus loin, d'associer le souvenir des victimes à la connaissance des causes, des circonstances et des conséquences de cette guerre... C'est donc un devoir de mémoire. Et c’est le but que nous nous étions fixés et que nous avons atteint en accueillant près de 3 000 visiteurs dont 1482 jeunes de moins de 18 ans qui ont eu la possibilité de découvrir, vivre et comprendre, au travers de cette exposition, cette Grande guerre vécue par leurs ancêtres congolais. Et puis vous savez, je fais partie de ces générations qui ont eu la chance d'arriver à mon âge sans connaître personnellement la guerre. Cela nous donne, cela me donne, des responsabilités particulières à l'égard des générations qui ont vu leurs rangs décimés par toutes les guerres du XXème siècle. Cela nous donne aussi collectivement des responsabilités particulières à l'égard de ceux de nos concitoyens respectifs qui, aujourd'hui encore, risquent leur vie et, pour certains, la perdent au nom de nos patries. Enfin, à quoi doit s’attendre le public de l’Alliance française de Kisangani en 2015 puisque l’association fêtera ses 20 ans de création ? Nous préparons, entre-autres, une grande exposition sur l’histoire de la ville, de Tippo Tip à aujourd’hui. Les 250 m² du hall d’exposition seront totalement occupés, plongeant à nouveau le visiteur dans une époque passée. Mais je n’en dis pas plus… créations, photos, films, textes littéraires, poésies, etc. Là encore, l’A lliance française contribuera à la connaissance et aux savoirs des petits comme des grands. Propos recueillis par Aliana Alipanagama 76 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Incontournable à Kisangani Chez Bronzetta V ous cherchez un endroit où vous restaurer ou tout simplement vous rafraîchir à Kisangani ? Situé dans le centre ville, lieu réputé pour sa convivialité, le restaurant « Chez Bronzetta » vous offre un cadre paisible, à la fois chaleureux et sympathique. Installez-vous confortablement et laissez-vous charmer par ce lieu agréable, situé en plein cœur de ville. Lieu de rendez-vous incontournable du Tout-Kisangani, idéalement situé pour vos repas d’affaires, aussi bien que pour vos sortis en famille, entre amis ou en tête-à-tête, Chez Bronzetta vous accueille sous une authentique paillotte congolaise à l’atmosphère à la fois intime et conviviale. Elle vous permet de profiter encore davantage de l’exceptionnelle douceur des soirées boyomaises. La cuisine est de qualité. Elle s’amuse à réinventer les classiques de la cuisine occidentale. Shawarma, cheeseburger, pizza, bœuf bourguignon et carbonade, sans oublier, les incontournables grillades de viande de bœuf, poissons Kalimba et Capitaine qui sont parmi les délices du menu. Une cuisine simple, rapide et efficace au cœur de Kisangani ! Ouvert aux groupes, le restaurant Chez Bronzetta vous propose aussi de privatiser ses espaces si nécessaire. Une solution parfaite pour vos anniversaires, repas d’entreprises ou événements spéciaux. Ouvert du mardi au dimanche de 12h30 à 22h00 3, avenue Abbé Kaozi, Makiso, Kisangani En face de l'Etat Major 9e Région Militaire (+243) 0819 740 884 - (+243) 0976 111 150 Photo : Gédéon Mukendi CULTURE Bienvenue au Goethe Institut L'ouverture du bureau de liaison de l'Institut Goethe, qui sera effective le 1er janvier 2015, a été célébrée le 21 novembre dernier à la Grande halle de la Gombe. Ambiance festive, qui a marqué les quelque 400 invités présents. français de RDC avait été définitivement avalisée une semaine plus tôt à l’occasion du vote du budget 2015 de l’Etat allemand. Quatre cents personnes se pressaient ce soir-là sous la grande halle parmi lesquelles on reconnaissait le Dr. Wolgang Manig, ambassadeur d’A llemagne en RDC, Luc Hallade, ambassadeur de France en RDC, Jean-Michel Dumont, ambassadeur représentant l’Union Européenne en RDC et Martin Kobler, représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU en RDC. Kathryn Alexandra, jeune musicienne allemande installée depuis moins d’un an à Kinshasa, eut le redoutable privilège d’ouvrir cette soirée musicale avec son groupe « Nsinsani » avant que le groupe « Jocelyn Balu et les aigles de la révolte » ne fasse entendre sa musique métissée sur la scène de la grande halle. Enfin, Jupiter et son groupe Okwess International ont offert, dans une ambiance survoltée, un spectacle de près de deux heures face à un public conquis. Le choix de Jupiter ne devait d’ailleurs rien au hasard puisque ce dernier, fils de diplomate, a passé une dizaine d’années de sa jeunesse en Allemagne, à Berlin-Est précisément. Il a d'ailleurs interprété un de ses titres en allemand. Avant la prestation de Jupiter, Philippe Larrieu, conseiller de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France et directeur de l’Institut français de RDC, prit la parole pour souhaiter la bienvenue au Goethe Institut avant que Norbert Spitz, directeur du Goethe Institut pour l’A frique du Sud et l’A frique subsaharienne ne le fasse à son tour pour se réjouir de l’excellence des relations culturelles entre les deux pays et sou- haiter qu’elles puissent se développer encore au profit des artistes et du public. L’occasion aussi pour M. Spitz de lancer officiellement le portail web «Music in Africa» destiné à fédérer le réseau des musiciens africains. Le bureau de liaison du Goethe Institut ouvrira officiellement ses portes le 1er janvier 2015 et orientera son action sur la programmation culturelle. Un espace de littérature allemande, traduite en français, ouvrira d’ailleurs au premier étage de la médiathèque Floribert Chebeya de l’Institut français de RDC. Les échanges entre la RDC, la France et l’A llemagne seront ainsi renforcés et des pistes de coopération sont déjà esquissées. Dès janvier 2015 à l’Institut français, une programmation de films allemands sera proposée au public kinois. CR 78 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Photos : Martin van der Belen L es premières discussions entre le Goethe Institut de Johannesburg et l’Institut français avaient débuté 18 mois plus tôt. En ce vendredi soir, les trois drapeaux de la République fédérale d'A llemagne, de France et de RDC, pavoisaient à l’entrée de l’Institut français aux côtés de bannières à l’effigie du «Goethe Institut» deployées à différents endroits de la Halle de la Gombe. Tout laissait présager un important événement : le retour en RDC du Goethe Institut après 23 ans d’absence. La bonne nouvelle avait été rendue publique deux jours plus tôt par l’ambassadeur d’A llemagne en RDC au cours d’une conférence de presse donnée à l’Institut français. Préparée depuis des mois par les représentants basés à Johannesburg, au siège africain de l’opérateur culturel allemand et par les responsables de l’Institut français de RDC, l’officialisation de l’ouverture d’un bureau de liaison du Goethe Institut au sein de l’Institut www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 79 Deuxième édition de la Fête du livre le public au rendez-vous A près une première édition, qui avait suscité un fort engouement, la deuxième Fête du livre de Kinshasa s’est déroulée du 12 au 16 novembre derniers sur les sept sites suivants : l’Institut français de Kinshasa, le Lycée français René Descartes, le Lycée Prince de Liège, le Centre Wallonie-Bruxelles, l’Académie des Beaux-Arts, Le Centre Texaf-Bilembo et le Collectif Sadi. Une 80 / Impact n°7 / Décembre 2014 belle occasion d’échanger et de rencontrer des auteurs passionnés par le Congo autour de la thématique retenue « le Congo dans la mondialisation ». C’est dans une ambiance festive que les promoteurs de la désormais traditionnelle fête du livre se sont retrouvés pour l’inauguration à la médiathèque de la Délégation Wallonie Bruxelles. Devant près de 200 invités, Kathryn Brahy, déléguée Wallonie-Bruxelles et Philippe Larrieu, conseiller de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France et directeur de l’Institut français, ont officiellement ouvert cette deuxième édition qui a réuni cette année une trentaine d’auteurs. Nouvelle venue, Marie Darrieussecq pouvait confronter le Congo mythique de son dernier roman à la réalité kinoise et félicité David Van Reybrouck, l’auteur du fameux «Congo, une histoire », désormais célèbre dans le monde entier, mais aussi Fiston Mwanza et son très remarqué « Tram 83 », Guillaume Jan et son « Traîne-savane ». Enfin des habitués comme Lieve Joris, dont le récit «Sur les ailes du dragon» vient tout juste d’être publié, ne boudaient pas leur plaisir de participer à l'événement. Au programme cette année, des face-à-face à la médiathèque de l’Institut français, des conférences, des lectures publiques mises en scène par la compagnie « Les Béjarts », un concert, des ateliers de bande dessinée, des séances de dédicaces à la librairie éphémère... Notons au passage le spectacle truculent présenté au Centre Wallonie Bruxelles le vendredi 14 novembre dernier à partir du roman de Marie Darrieussecq « Il faut beaucoup aimer les hommes », Prix Médicis 2013, en présence de l’auteure visiblement amusée par cette interprétation kinoise, pleine d’hu- www.impact.cd Photos : MVDB, Christian Kisavu CULTURE mour, des dialogues amoureux du roman. Près de 700 élèves des écoles congolaises ont pu rencontrer et échanger directement avec les auteurs pour connaître leurs motivations, leurs rapports au Congo, leurs sentiments et leurs espoirs pour ce pays. ALEF, association kinoise de promotion de la lecture, a également animé une conférence autour du livre «Congo, une histoire » de David Van Reybrouck, présent pour en débattre et qui a visiblement apprécié l’analyse critique faite de son ouvrage et a répondu avec beaucoup de plaisir aux questions perspicaces d’un public venu en nombre. Des conférences thématiques sur le thème «le Congo dans la mondialisation» et «Ecrire le Congo» préparées durant des semaines par les élèves du Lycée français René Descartes se sont déroulées sous la grande halle du Lycée Prince de Liège en présence notamment de Jean-Joseph Boillot, économiste auteur d’un ouvrage intitulé «Chinindafrique» sur les relations économiques entre les deux grandes puissances que sont l’Inde et la Chine et le continent africain, de Lieve Joris qui s’intéresse dans son dernier ouvrage aux Congolais installés en Chine, de Colette Braeckman, d’Olivier Appollodorus, de Fiston Mwanza, de Douna Loup ou encore de David Van Reybrouck et de Guillaume Jan, écrivain-voyageur parti sur les traces des explorateurs Stanley et Livingstone. En clôture, après la remise du prix de la meilleure bande dessinée au vainqueur, le jeune Dirk Mabidi, un concert dessiné de Barly Baruti a parachevé en fanfare cette édition. Le dessinateur-musicien, avec un sens consommé du spectacle, a enthousiasmé le public notamment en revêtant «le costume imaginaire» d’un David Livingstone avec kilt écossais, chemise bouffante et casque colonial. Plus vrai que nature ! Les auteurs invités, visiblement séduits, sont repartis avec des rêves un peu fous à l’esprit comme celui de réaliser une croisière littéraire sur le fleuve, une remontée au «cœur des ténèbres» vers Kisangani depuis Kinshasa. Lubie irréaliste sur ce fleuve mythique ou prémices d’un vrai projet d’échanges culturels avec les populations www.impact.cd locales, l’avenir nous le dira. Après avoir raconté le périple d’un Congolais du Congo jusqu’à la Suisse, l’auteure suisse Douna Loup, invitée par l’ambassade de Suisse en RDC, envisage, quant à elle, d’effectuer maintenant le trajet en sens inverse. Les auteurs, enthousiastes, souhaitent encore mieux faire connaître cette fête et beaucoup envisagent déjà de se retrouver à Kinshasa pour la troisième édition qui sera pour partie décentralisée vers les quartiers périphériques de la capitale. Rendez-vous est déjà pris pour 2015, à vos plumes ! CR Au clair de ma voix Poèmes de Microméga Bandefu Poète et slameur kinois, c'est chez son grand-père maternel où il grandit, que Microméga prend goût à la lecture dès son bas-âge et rêve de devenir écrivain. Poussé par sa fièvre pour la poésie, il consacre plus de dix années à un travail acharné de versification jusqu’à se tailler une très bonne réputation dans l’univers culturel de Kin. Sa première reconnaissance remonte en 2010 lorsqu’Anne-Claude Lumet, charmée par sa plume inspirée, le fait slamer dans le court-métrage «Valise bleue» qu’elle coréalise avec Gilles Lemounaud pour le compte de FESTIMAGE, leur structure de cinéma. C’est aussi le début de sa carrière de slameur. Il vient de publier son premier recueil intitulé «Au clair de ma voix – poèmes à lire avec les oreilles», sorti justement pendant la deuxième fête du livre de Kinshasa où il est invité comme auteur. « Au clair de ma voix » est à découvrir également sur le site www.weyrichedition.be/africa Impact n°7 / Décembre 2014 / 81 CULTURE Colin Delfosse sur orbite congolaise Né à Bruxelles en 1981, Colin Delfosse est diplômé en journalisme et se tourne en 2006 vers la photographie documentaire. L’Institut français de Kinshasa a exposé son travail “Les sorciers du ring et catcheurs congolais”, rendant ainsi hommage à l’un des sports les plus étranges et décalés de la planète et à ces sportifs méconnus du grand public. Vous êtes photojournaliste et aussi photographe d’art, comment abordez-vous ces deux manières de traiter un sujet ? Avant tout, je fais de la photo documentaire, j’ai un peu de mal avec la notion d’artiste pour qualifier mon travail. J’essaie ainsi de traiter un sujet de manière originale, en montrant des gens et des sujets différents. Depuis mes débuts, mon style a évolué. En 2009, avec la série sur les femmes du PKK au Kurdistan, j’ai décidé de réaliser des photos plus artistiques et en couleurs. Pour la série des portraits de catcheurs, je me suis indirectement inspiré des oeuvres en couleurs et moyen format du sud-africain Pieter Hugo. Impact : Bonjour Colin, pourriez-vous revenir sur votre parcours ? Colin Delfosse : J’ai effectué des études de journalisme et rédigé un mémoire en photographie pour lequel j’ai réalisé mon premier reportage au Vietnam sur les lépreux, dans un style photo-reportage classique en noir et blanc. Puis, avec des amis de l’école, nous avons décidé de créer le collectif «Out of focus». Par la suite, j’ai effectué plusieurs reportages au Vietnam, au Mali, au Kurdistan irakien, en RDC et au Kazakhstan. 82 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Pourquoi avoir choisi de photographier des catcheurs congolais ? L’objectif était de montrer un aspect plus festif et plus inhabituel de la RDC. Le catch mélange les traditions vaudoues (fétiches, costumes de guérisseurs) avec le catch américain, révélant un autre visage de la culture congolaise. C’est aussi un intérêt pour la théâtralité congolaise et cette manière que chacun a de s’appeler par un titre («honorable») qui m’a fasciné et que j’ai voulu faire découvrir au public. Impact n°7 / Décembre 2014 / 83 CULTURE Photos : Colin Delfosse Vous avez parcouru le Congo de long en large mais aussi d’autres pays (Kurdistan irakien, Vietnam, Mali) ; qu’est-ce qui vous fascine tant en RDC pour que vous y reveniez aussi souvent ? J’ai commencé au Mali, à Bamako, puis par hasard on m’a proposé d’être observateur pendant les premières élections démocratiques en RDC en 2007 pour une ONG à Kolwezi. En revenant, j’ai voulu faire un sujet sur les mines et “l’héritage de la Gécamines” et j’ai croisé des catcheurs pour la première fois. C’est là que tout a commencé. Le projet a duré plusieurs années car il était difficile de trouver des combats lors de mes différents passages en RDC. Au début, il ne s’agissait que de photos de reportages ; puis j’ai commencé les portraits, ce qui allait de pair avec l’évolution de mon écriture. J’ai acheté un appareil moyen format, un argentique. J’ai alors voulu faire un travail plus plastique et ainsi faire poser les catcheurs en tenue de combat. Quels sont vos projets ? Je suis actuellement en train de monter un nouveau projet sur Mobutu avec une chambre technique, ce qui permet un rendu de lumière incroyable pour les portraits. Je reviens d’un voyage d’un mois qui m’a mené notamment au Katanga sur les traces de l’aventure spatiale qu’avait lancé Mobutu avec la société allemande Otrag dans les années 70. Par ailleurs, je publierai un livre sur les catcheurs dont les textes seront rédigés par Jean Bofane, l’auteur de « Mathématiques congolaises ». Propos recueillis par Morgane Guimier 84 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 85 CULTURE Le journal Afrique Photos : Colin Delfosse 64’ Le monde en français Pour en savoir plus sur le travail de Colin Delfosse et du collectif “Out of focus” : www.outoffocus.be/ © C. Guibbaud, J. Knaub / TV5MONDE La chaîne culturelle francophone mondiale 86 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Retrouvez vos magazines sur la webTV Afrique tv5mondeplusafrique.com tv5monde.com www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 87 CULTURE Pluridisciplinaire Photomontage mural de Nils Ramjoh (Suède) au MACM. Fresque d’Ivan Izquierdo (Espagne). Installation de Jeff Ding Junfeng (Chine). Performance de Michel Ekeba (RDC). Installation de David Kazadi (RDC) à l'Académie des Beaux Arts de Kinshasa. Yango Première biennale d’art contemporain de Kinshasa L e lancement d’une biennale ressemble un peu à celui d’un satellite. Même si tous les paramètres semblent avoir été vérifiés, contrôlés, il arrive parfois que des phénomènes imprévisibles viennent en perturber le bon déroulement à la dernière minute. Celui de « Yango » n’a pas échappé à cette règle. Le samedi 22 novembre, devant près de 200 invités, Rufin Bayambudila, ministre provincial des Mines, du Tourisme, de la Culture et des Arts a donc officiellement dé- Photos : MVDB, Guy Wouete, Jovial Kalala La première édition de la biennale d’art contemporain «Yango» s’est ouverte le samedi 22 novembre. Les expositions se tiennent jusqu’au 19 décembre au Musée de l’échangeur de Limete, à l’Institut français de Kinshasa, au Centre Wallonie-Bruxelles, à l’Académie des Beaux-Arts et à l’Espace Bilembo. 88 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 89 CULTURE claré ouverte la première édition de la biennale d’art contemporain de Kinshasa dans les jardins de l’Institut français. La galerie de l’Institut accueillait, à cette occasion, une exposition-panorama de la jeune génération d’artistes congolais parmi lesquels Bouvy Enkobo, Mega Mingiedi, Géraldine Tobe, Jean Katambay, Bienvenu Nanga ou Kura Shomali. Mais le temps fort de cette manifestation fut sans conteste l’ouverture de l’exposition internationale au musée d’art contemporain de Limete devant près de 400 personnes. Une ambiance bon enfant régnait ce soir-là sur la plateforme de l’échangeur de Limete, au pied de la grande tour de béton, construite dans les années Mobutu et aujourd'hui symbole de la ville. Photos : MVDB, Guy Wouete, Jovial Kalala Un autre regard Construction de l'installation de Rob Voerman (Hollande) à l’Académie des Beaux Arts de Kinshasa. Tête zoomorphe de Diamas (RDC). Fresque murale éphémère dans une rue de Lingwala, peinte par Kapow (RDC). Déploiement urbain La pirogue en raphia de Baptiste Desjardins (France) parcourt les rues de Kinshasa… Nyaba Léon Ouedraogo (Burkina Faso) accroche ses œuvres au MACM. Serge Diakota (RDC) en processus de création. Les artistes en séance de concertation. 90 / Impact n°7 / Décembre 2014 Les invités commençaient tout de même à s’impatienter même s’ils avaient déjà admiré les œuvres présentées à l’extérieur du musée, notamment les deux portraits géants de jeunes Congolais réalisés par l’artiste suédois Nils Ramhoj ou l’installation de la plasticienne japonaise Keiko Sato, vision très personnelle d’un Kinshasa réinventé, hybride de jardin japonais et de jeux d’enfants sur la plage. Vers 19h30, les membres du comité d’organisation ont pris successivement la parole pour souhaiter la bienvenue au public. Une douzaine d’artistes africains (RDC, Nigeria, Zimbabwe, Cameroun, Burkina Faso), asiatiques (Japon, Chine, Afghanistan), européens (France, Belgique, Pays-Bas, Suède, Espagne) présentait leurs œuvres parmi lesquelles on remarquait d'emblée celle de l’artiste et architecte chinois Junfeng Jeff Ding, sorte de papillon de nuit géant. Pour plus de détails sur les artistes, consultez le site web de la biennale et la page facebook : www.yangobiennale.org Facebook : inside yango biennale www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 91 Prix décernés et artistes primés à l’issue de la biennale Yango 2014 Les sculptures de métal soudé de Freddy Tsimba, l’installation du Camerounais Guy Wouete, celle du Nigérian Bright Ugochukwu Eke, les peintures de jeunes Congolais comme Diamas ou Eddy Kamwanga, ou encore les peintures afghanes inspirées de miniatures persanes du peintre Khadim Ali s'imposaient aussi aux visiteurs. Belle surprise également, le défilé de mode organisé par les stylistes de l’ISAM au sein même du musée avec, cerise sur le gâteau, des costumes et robes afghans portés par des mannequins kinois. Une belle manière de marquer le caractère réellement international de cette première édition très réussie, notamment grâce à l’audacieuse sélection de la commissaire artistique de Yango, Sithabile Mlostwa, directrice de la Fondation Thamgidi et directrice artistique de l’IFAA (festival pluridisciplinaire aux Pays-Bas) et au travail acharné des organisateurs congolais de la manifestation. NB : à part le prix spécial de l’UE, tous les autres sont des prix qui permettront des résidences d’artistes. Ces prix sont décernés grâce à un partenariat entre l’IFAA Coordination Kiripi Katembo (coordonnateur) et Cédrick Nzolo (coordonnateur-adjoint). Art Plateform et les différents partenaires. IFAA : International Festival and Artists in Residency (Arnhem/Hollande) MACM : Musée d’Art Contemporain & Multimédia (RDC) Photos : Guy Wouete, Jovial Kalala Prix Spécial de l’Union Européenne Bouvy Enkobo (RDC) Prix Tongi University of China Marcos lora Read (Rép. Dom.) Bright Ugochukwu Eke (Nigeria-EU) Prix Cape Town University (RSA) Rob Voerman (Hollande) Prix IFAA pour MACM (RDC) Khadim Ali (Afghanistan) Prix IFAA pour l’espace Aimé Mpané (RDC) Isaac Cordal (Belgique) Prix IFAA - Maroc Keiko Sato (Japon) Niosta Nyo (RDC) Prix IFAA Hollande Mega Mingiedi (RDC) Eddy Kamuanga (RDC) Prix IFAA Afghanistan – Ambassade d’Afghanistan à Bruxelles Freddy Tsimba (RDC) Nils Ramhoj (Suède) Guy Wouete (Cameroun) Prix IFAA – 32°East (Ouganda) Baptiste Desjardins (France) Prix Art et pensée a.s.b.l (Belgique) Kura Shomali (RDC) Géraldine Tobe (RDC) Christophe Roussin 92 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 93 Photo : Christian Kisavu Kinshasa 40 ans après le fameux combat du siècle Ali/Forman et le festival international de musique qui s’est tenu à cette occasion, la capitale de la RDC retrouve sa place de grand centre de la culture et attire de nouveau les artistes du monde entier. pense les meilleures photos de reportage. Une belle initiative pour ouvrir le nouveau Musée d’A rt Contemporain et Multimédia de l’Echangeur de Limete (MACM). En marge de ce projet international, le concours «Congo Press Photo» a également permis à quelques heureux lauréats congolais de présenter leur travail (voir article p.96). Les arts visuels étaient encore à l’honneur, le vendredi 24 octobre, pour l’ouverture de l’exposition des soeurs jumelles Delphine et Elodie Chevalme ; leur gémellité les a rapidement conduites à se poser la question de la mixité culturelle et à aborder les problématiques identitaires. Les deux artistes se sont très librement inspirées des publicités de Jean-Paul Goude pour composer des peintures dont les sapeurs sont les nouvelles effigies. Les œuvres ont d’abord été exposées à Brazzaville et ont traver- sé le fleuve avec les artistes. Le public présent au vernissage a pu assister à la parade de quelques sapeurs kinois venus spécialement pour l’occasion. Contraste saisissant, l’artiste plasticien 94 / Impact n°7 / Décembre 2014 Photo : MVDB Photo : Gwen Dubourtumieu P our la première fois, Kinshasa a eu le privilège d’abriter, en octobre 2014, le «World Press Photo» qui récom- Photo : Gédéon Mukendi une plate-forme culturelle en pleine renaissance Photo : Christian Kisavu CULTURE www.impact.cd www.impact.cd Aïcha Muteba est à mille lieu du concept de l’élégance et de la publicité, quand il réalise cette performance intitulée «Conservation de la vie» sur le terrain en chantier de l’ancien «Marché du rail» à proximité de la maison Schengen. Il a souhaité rendre hommage aux mamans vendeuses qui luttent pour leur survie et leur dignité et a demandé qu’on lui «explose» sur le corps pas moins de 150 œufs, symboles de vie... Autre lieu, autre genre, la compagnie LZD «Les arts dramatiques» a enthousiasmé le public kinois, le 15 novembre dernier, sous la grande Halle de l’Institut français de Kinshasa. Dans «Ster City», les deux acteurs polyglottes et survoltés ont retracé avec brio l’histoire de l’A frique du Sud, une histoire de peau et de territoire, et ont donné à voir et à entendre la richesse culturelle de la Nation Arc-en-Ciel. Danse, vidéo, musique dans un spectacle inclassable et surprenant mis en scène par Jean-Paul Delore. Ambiance bon enfant en clôture de la deuxième édition de la Fête du livre de Kinshasa : le musicien et dessinateur Barly Baruti a offert un spectacle haut en couleur, le 16 novembre, sous la grande Halle de l’Institut français. Arborant des costumes de scène toujours plus excentriques (il a notamment fait sensation en empruntant celui de David Livingstone avec kilt, chemise bouffante et casque colonial), Barly et ses musiciens ont été chaudement applaudis. La «Rumba Nostalgie» fait toujours autant d'émules... CR Impact n°7 / Décembre 2014 / 95 Photo : aymé katendi Photo : aymé katendi CULTURE Le Musée de l’Echangeur Photo : Makangara Justin accueille le «World Press Photo» 2014 P Photo : Djenny Suanga lus de 98.000 images ont été inscrites à ce prestigieux concours pour 53 photographes primés, présentés dans une exposition itinérante qui visite près de 100 villes dans plus de 45 pays ! Pour la première fois, Kinshasa a eu l’honneur d’abriter cette exposition de photojournalisme qui récompense les meilleures photographies du monde, durant tout le mois d’octobre. Cette organisation internationale hollandaise, œuvrant depuis 1955, a pour mission de susciter le plus large intérêt Lauréats nationaux Quatre images des photographes congolais primés pour le "Congo Press Photo" 2014. Infos congopressphoto.com et worldpressphoto.org 96 / Impact n°7 / Décembre 2014 possible sur le travail des journalistes photos, d'encourager leur créativité et de stimuler le libre-échange de l'information. Cette belle initiative de ArtLab (agence spécialisée en Marketing Culturel), a bénéficié du soutien de l’ambassade des Pays-Bas, du Musée d’A rt Contemporain et Multimédia de l’Echangeur de Limete (MACM) et de l’IMNC. En marge de ce projet international, le concours « Congo Press Photo » ; initié par ArtLab et parrainé par Canon International, a également donné l'opportunité à quelques heureux lauréats congolais d’exposer auprès des plus grands photographes du monde. Les images sélectionnées pour ce cru 2014 sont de Justin Makangara (1er), Aymé Katendi (2ème), Aymé Katendi (3ème), Joseph Moura (4ème), Djenny Suanga (5ème). MVDB www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 97 CULTURE Beau début de saison à l’espace Texaf-Bilembo Plusieurs mondes en fracture, visions multiples de l’autre, relations complexes qui se nouent, se dénouent, se tissent, s’entrecroisent. A force d’arpenter les quartiers populaires de Kinshasa, les toiles ont vécu et portent les cicatrices de leur migration urbaine. MVDB L e 11 octobre s’y tenait la Congo Fashion Week. Texaf-Bilembo, née jadis du coton, renouait ainsi avec les fils de la mode congolaise. Défilés des mannequins pour Fanny Mandina, Sera Perfection, Marcia Créations et Bitshilux Mode. Le 16 octobre s’ouvrait l’exposition « Elili », montrant le travail d’Eugenia Velis (Mexique). Ambiance pleine de mystère, à l’image des nombreuses interrogations qui planent dans l’œuvre de l’artiste mexicaine. Impressionné par le nombre de toiles, leurs dimensions et la grande maîtrise technique, un journaliste congolais n’arrivait pas à croire qu’elle ait pu faire cela toute seule ! Dans le cadre du « OFF » de la biennale Yango, se sont rajoutés à cette expo les artistes Michele Vanvlasselaer (Belgique) et Papa Mfumu Eto 1er (RDC). Le 29 novembre, l’ambassadeur de Belgique a offert un cocktail à cette occasion… Eugenia Velis dissèque au scalpel l’identité culturelle des diverses populations qui se côtoient à Kinshasa, souvent sans se rencontrer réellement. 98 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 99 IMPACT JUNIOR « À l’arrière » En dehors des champs de bataille, la vie aussi est difficile. La nourriture manque et les gens se plaignent car des enfants meurent de faim. En 1914, les hommes partis au combat, les femmes doivent les remplacer. Si elles travaillent déjà beaucoup avant le conflit, elles les remplacent pendant la guerre dans les usines. Elles conduisent les camions et les tramways. Ça va contribuer à changer les mentalités de l’époque ! Il y a 100 ans, la Première Guerre mondiale Marie-Jo et Ashley-Deborah À l’occasion du centenaire de la guerre de 14-18, les élèves de CM2 du lycée français René Descartes de Kinshasa ont effectué des recherches sur cet événement qui a fait des millions de morts. Une occasion pour eux de découvrir un conflit qui a aussi touché la République démocratique du Congo... Les troupes coloniales Ce sont les soldats issus des colonies. Ces troupes étaient surtout composées de soldats africains, dont une partie enrôlée de force. Plus de 180.000 de ces soldats africains ont combattu pour la France pendant la première guerre mondiale. En tout, il y a eu plus de 65.000 victimes parmi les soldats des colonies. Beaucoup n’ont pas survécu aux combats mais aussi à cause des maladies et du climat en Europe (le froid). La vie dans les tranchées L’A llemagne a envahi la Belgique avant d’entrer en France. Après les premières semaines de mouvements, les troupes se sont positionnées dans les tranchées, càd de profonds fossés allongés, creusés près des lignes ennemies. Entre deux assauts, les soldats restent terrés. Il y fait froid, il y a de la boue, de l’eau et beaucoup de morts. On appelle les soldats « poilus » car ils ne se lavent et ne se rasent presque jamais. Pendant leur temps libre, ils jouent au cartes, chantent des chansons tristes et lisent leur courrier ou écrivent. Ils sont témoins de scènes horribles et peuvent être traumatisés. Photos : Martin van der Belen Isaac Amelia et Lola 100 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Le Congo en guerre En 1914 le Congo est une colonie belge. Il ne va pas encore en guerre mais les soldats se préparent. Les soldats congolais vont combattre en Afrique : ils n’iront pas en Belgique car le pays est occupé par les Allemands ! Vers l’ouest du Congo, l’armée congolaise est envoyée en septembre 1914 pour aider les troupes françaises à conquérir le Cameroun, colonie allemande. Plus de 500 Congolais aidaient les Français. Ça se termine le 1er janvier 1916. La fuite des Allemands met fin aux combats. Pour maîtriser le Lac Tanganyika (à l’est de la RDC), il y a des combats. Les Alliés (Britanniques et Congolais) prennent la ville de Tabora aux Allemands en septembre 1916. La bataille se termine définitivement en août 1917 par la prise de Mahenge, une ville de Tanzanie. Pendant la guerre des milliers de porteurs sont utilisés pour le transport des vivres et des munitions des soldats. Josiane www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 101 IMPACT JUNIOR L’armistice est signée le 11 novembre 1918 : les combats s’arrêtent. L’A llemagne a capitulé devant la France et la Grande-Bretagne. Elle devra payer de lourdes réparations aux Alliés. Depuis 1922, le 11 novembre devient une fête nationale en France. Céline « Chers amis, vous vous imaginez que la guerre, c’est la lutte contre les ennemis que l’on voit, la bataille, l’assaut, l’ivresse du combat et finalement la victoire au plus vaillant. Et non, ce n’est pas cela, la guerre. La Guerre, c’est la marche, la nuit, dans les chemins boueux, défoncés, montagneux [...]. Vous mangez à côté des ordures, vous marchez dedans et vous vous couchez dedans. Vous êtes d’une saleté repoussante. Vous mangez avec des mains pleines de terre ou de boue [...]. La guerre, c’est quelques fois la bataille, comme le 8 octobre, dans les betteraves, où pas un des nôtres n’a tiré une cartouche, comme le 20 octobre à Vingré, où le 298° (régiment) a perdu mille deux cents hommes. Enfin, la Guerre, c’est le manque de nouvelles. C’est le dégoût de tous, pour une boucherie pareille, à notre siècle prétendu civilisé. La Guerre, c’est la sensation très nette que bien des chefs se moquent de la vie d’un homme. La Guerre, c’est l’angoisse qui vous étreint quand vous entendez le rôle des mourants ou les plaintes des blessés qui souvent meurent au coin d’un bois ou dans un champ, faute de soins. Enfin, la Guerre, c’est l’attente de la mort pour un moment imprévisible, mais qui viendra sûrement, le jour où on nous lancera contre ces mitrailleuses, ces fusils, ces canons invisibles qui nous entourent et qui nous guettent. » Lettre de Jean Dumont, front de l’Aisne 1914 102 / Impact n°7 / Décembre 2014 www.impact.cd Madame Livingstone La rencontre de deux hommes, au coeur d’une guerre qui n’est pas la leur. D urant la Première Guerre Mondiale, dans la région des Grands Lacs, un aviateur, lieutenant de l’armée royale belge, est chargé de couler un cuirassé allemand sur le lac Tanganyika. Il fait la connaissance d’un métis énigmatique qui prétend être le fils du célèbre explorateur écossais, David Livingstone. Pendant que la guerre entre puissances coloniales fait rage, le jeune lieutenant au contact de celui qu’on surnomme “Madame Livingstone” se surprend à remettre en cause les raisons de la présence européenne dans la région et les bienfaits de la colonisation. Sur un récit d’Appollo (France), dessins de Barly Baruti (RDC) et textes de Christophe Cassiau-Haurie (France). Editions Glénat 2014. Photos : MVDB L’Armistice du 11 novembre 1918 « Nous sommes montés mille deux cents et nous sommes redescendus trois cents ; pourquoi suis-je de ceux qui ont eu la chance de s'en tirer, je n'en sais rien, pourtant j'aurais dû être tué cent fois, et à chaque minute, pendant ces huit long jours, j'ai cru ma dernière heure arrivée. Nous étions tous montés là-haut après avoir fait le sacrifice de notre vie, car nous pensions pas qu'il fut possible de se tirer d'une pareille fournaise [...] Huit jours sans boire et presque sans manger, huit jours à vivre au milieu d'un charnier humain, couchant au milieu des cadavres, marchant sur nos camarades tombés la veille ; ah j'ai bien pensé à vous tous durant ces heures terribles [...] nous portons dans notre cœur le deuil de tous nos camarades tombés à Verdun du 5 au 12 mars. Est-ce un bonheur pour moi d'en être réchappé ? Je l'ignore. » Lettre de Gaston Biron à sa mère, 25 mars 1916 www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 103 VIE PRATIQUE À la conquête S du Kin-Ouest… i « Kinshasa est un lieu de vie qui s’écoule avec la même puissance que le fleuve qui l’a enfanté », cette mégalopole possède également un important patrimoine bâti qui a conduit à la rédaction d’un guide d’architecture présenté dans le numéro précédent et basé sur un premier Photos : Martin van der Belen Ancienne résidence des rois Ngaliema et Kintambo, cette partie de Kinshasa possède une histoire très riche. C’est là que se sont installés les premiers colons et que s’est développée la future capitale. Moins connue que la Gombe, elle n’en est pas moins intéressante. Outre ses quartiers résidentiels verdoyants, aérés et huppés, comme Macampagne et Joli Parc, bien d’autres lieux valent le détour. Suivez le guide pour découvrir un riche patrimoine historique... > Une baie historique Sur les rives du fleuve, derrière les chantiers navals Chanic, on aperçoit l'INBTP et la maison communale de Ngaliema, tandis que les sommets du Mont sont depuis toujours un lieu de pouvoir... 104 / Impact n°7 / Décembre 2014 inventaire réalisé en 2009. «Patrimoine pré-colonial, colonial mais aussi édifices bâtis après 1960 qui doivent être appréhendés non comme des bâtiments isolés, mais comme l’élément constitutif d’un paysage urbain spécifique » . Le Mont Ngaliema constitue ainsi un des premiers éléments structurants de la ville sur lequel s’ouvre le guide de Kinshasa. D’emblée se pose la question de la préservation de ce patrimoine dont la mémoire doit être conservée, tout en acceptant une logique de «laisser-vivre» car il doit être habité, transformé, adapté. Se pose aussi celle de son authenticité, telle que la définit la Charte de Venise. Etablie en 1965 lors du Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques, à la suite des désastres causés par deux guerres mondiales, cette charte préconise des normes d’intervention sur les monuments historiques et, par la suite, sur les villes historiques. Il y est question de «conservation intégrée», alliant conservation, restauration mais également réaménagement éventuel pour assurer au bâtiment sa pérennité sans tomber dans l’excès de «nostalgie» ou de «culte» du patrimoine. L’histoire matérielle de l’édifice, à savoir son passage à travers le temps, est aussi importante que son existence matérielle. Le Mont Ngaliema, directement lié à l’histoire précoloniale mais également à l’origine de la ville coloniale et à l’accession du Congo à l’indépendance, « est l’exemple parfait d’un palimpseste sur lequel se sont inscrites, à travers le temps, différentes couches physiques et idéologiques, correspondant chacune au système de pouvoir du moment » : toutes ont leur importance et doivent être préservées pour leur valeur de témoin. Nicole Gesché, historienne de l’Art www.impact.cd www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 105 mb a Bens eke Chaussé e de Ave nue Ng g i BANDALUNGWA JAMAÏQUE er e Parc du Mont Ngaliema (B2) (4) C’est là que le Roi Ngaliema résidait avant l’arrivée des colons. Il offrit à Stanley de choisir où s’installer. Ce dernier opta pour cet emplacement idéal qui domine la baie et la plaine. Devenu Mont Stanley, puis jardin et zoo privé de Mobutu, ce parc verdoyant redevenu public fait l’objet d’une revalorisation progressive… Il renferme notamment les réserves de l’Institut des Musées Nationaux du Congo (IMNC), le Théâtre de verdure et le Cimetière des pionniers. u Kwil a Idiof ra Kimbele Joli Par c Rue du Ring Wam b a C o lline ue Afriq Kobo pagne Route de Ma Cam Kitona Fay l Maison du chef de gare (B2) (1) Située sur l’ancienne Léopoldville-Ouest, ce bâtiment construit vers 1890 témoigne de l'urbanisation ancienne du quartier. Il était un point de passage important pour le rail reliant la capitale au Bas-Congo, principale voie commerciale avec l’extérieur... 106 / Impact n°7 / Décembre 2014 Chantier Chanic (B2) (2) Située dans la Baie de Ngaliema, à l’endroit même où Henry Morton Stanley accosta pour la première fois en 1880, les chantiers navals Chanic forment un vaste complexe industriel fondé en 1928, toujours en activité. On peut y voir l’ancien steamer « AIA » de l'explorateur, en cours de restauration. La concession Chanic, avec ses infrastructures techniques (ateliers de montage, forge,…), ses bureaux, ses résidences et infrastructures sociales, était autrefois une véritable ville dans la ville, dont il reste de nombreux témoignages intéressants. Eglise Saint François (B2) (11) Située en face du stade Vélodrome de Kintambo, l’église Saint François de Sales été construite en 1938. De style Art Déco, l’édifice en briques est entourée d’une cour-jardin ombragée, dans laquelle une grotte a été aménagée pour s'y recueillir. Kenge v BINZA JOLI PARC Maison communale de Ngaliema (B2) (9) Ancien hôpital pour Blancs de Kintambo, monté vers 1890, ce bungalow tropical a été, comme nombre de maisons du début de la colonie, partiellement préfabriqué. Elle possède une véranda (ou barza) qui entoure tout le premier étage. Sa haute toiture débordante, ventillée, est également adaptée au climat tropical. Av. de la Montagne, en face de l'entrée du Camp Tshatshi. em a Ngali ga Kasan ie NZA KINSUKA Amphithéâtre de Verdure (B2) (6) Dans les jardins du Mont Ngaliema, derrière les réserves de l’IMNC, cet agréable amphithéâtre de 1.800 places a accueilli des grandes stars internationales depuis le début des années 70. James Brown, Halliday,… Arch. Anibal Badot & Daniel Visart. O.-C.Cacoub lele ake M Avenue Rin ba la Av. de Mad imb a Av. de uma Ma Ca m zi Luo Mosambo be Gom ango di Bun Lufu o Kok Shilo za Mun koko ubu sa-V e Ka Bula eN enu gum Av bi Sum p MA CAMPAGNE o uda Mad nu Ave e gn pa Eglise B as S u n di uzi Lub ok i a tad de M om Oyama KINTAMBO Centre catholique Lassalien Nguma Chemin de la R i LT. Pilotempia Centre supérieur militaire Q.MAKELELE B ue en Av a go lon A . So la Luku a n té NGALIEMA Nduisi la S ub u es Trois vallé Avenue Cataractes ngo de Av. e Solo Rue uth o wam i de K e Load a Av. d n Rue de Bana e Ru -V Mb 11 ofoy a Kas nue Ave CAMP CAPITAINE LUANO e ’Uel de l Av. ivu du K Av. 13 e gala de L nu Ave an de B okolo Av. K B u Kind Tuidi 12 tes Chu Av. Rue d e Mat adi es Ecuri oko Bas nue Ave TASOK m ba dji liko Kasaï on obo 1 lM e u e B Rue du n o n l o o C r e e u o Av Aven e Bok eng ah a de M Rue ue Bom R OUA nue Ave ami om de L Ru e aki Kalik .A O.U Ba Kintambo Magasin ge len ke Lu Shoprite e Chrétienne Avenu nes ava Car s e d min Che e riqu Lim Av. aya de L Rue ado de Rue de M Kivu anie ma 9 Av .d e 16 la C Ru eJ i Pa reh ul Ba nd om a Kali k a ki Ave nu 3 l’Av eni r 10 Av. de o az aw M 6 o St Basok ba im uz .M ko ol so Ba .C Av 2 8 e des enu Av 3 a mb bo lam Mi 5 7 15 ssa 4 MONT NGALIEMA e Ma u ba im uz l. M e la Terras se Co ed Av en A Ru O. U. A 2 Av . ne olo C e ji Avenue Kisa ngan 1 ristes 14 d on lM Chapelle Sims (A2) (3) Première chapelle baptiste; dédiée à son fondateur, le révérend écossais Sims Aaron, médecin et linguiste. D’esprit néogothique, cet édifice raffiné surplombe la Baie, avec une belle vue sur Brazza et Gombe. Jusqu’en 1930, la toiture était en paille. Avenue de l’Avenir. www.impact.cd Musée de sculptures en plein air (B2) (5) Aménagé sur l’esplanade de l’IMNC, cet espace vert agréable (libre d’accès) est consacré notamment à l’exposition des statues coloniales dont celles de Léopold II, d'Albert Ier et de Stanley. L’explorateur, immortalisé par le sculpteur Dupagne, était initialement vissé sur un belvédère plus haut sur le même site, tandis que les souverains belges trônaient dans les avenues de la capitale jusqu’à la politique de « Recours à l’authenticité » des années 70. On y organise aussi des expositions temporaires. www.impact.cd Cimetière des pionniers (B2) (7) Premier cimetière réservé aux Européens, dont certains collaborateurs de Stanley. Stèles et croix funéraires y sont étalées en terrasses. Vers 1890. Institut National des Bâtiments et des Travaux Publics (INBTP) (B2) (8) Av. de la Montagne. Ensemble de bâtiments modernes aux allures géométriques, où sont formés les ingénieurs. Arch. E. Palumbo, vers 1961. Maison de la société Chanimétal (A3) (10) Datant de la fin du XIXème siècle, cette magnifique maison rappelant le style victorien aurait été la demeure de Roger Casement, diplomate et poète britannique, connu pour son engagement contre les abus du système colonial au Congo et dont parle Joseph Conrad dans «Au cœur des ténèbres». Aujourd’hui résidence du directeur de Chanimétal… Maternité de Kintambo (B2) (12) Initialement conçu pour les travailleurs d’Utex et leurs familles, ce centre médicosocial imposant atteste d’une infrastructure ultramoderne pour l’époque. En « H », le bâtiment se compose de bureaux sociaux, dispensaires, pharmacies, laboratoires, salles de radiologie, de chirurgie ou d’accouchement. À l’étage, l’hospitalisation possède une capacité de 120 lits. Son architecture est élégante, articulée par un jeu d’auvents et de brise-soleil qui lui confère une image moderniste. Arch. Ilensky, 1951-1953 Impact n°7 / Décembre 2014 / 107 Espace Texaf-Bilembo (B2) (15) Centre culturel installé dans un des ateliers des filatures de l’usine de coton Texaf. Conservant son cachet d’origine, la grande salle, aux colonnes en fonte apparentes, s’étale sur de plus de 800m2. Entourée de murs aveugles , elle possède toutefois une belle luminosité car sa toiture est "à sheds", en dents de scie, partiellement vitrée. A côté des expositions temporaires, de la cafeteria et de la librairie, une exposition permanente retrace l’ancienne activité de Texaf, autrefois la plus importante industrie textile d’Afrique. Les autres locaux industriels du complexe sont principalement devenus des bureaux. Reconversion en cours. Patrimoine en péril... Concession Utex (B2) (14) Vaste ensemble résidentiel autrefois réservé aux cadres de la société Texaf, dont les ateliers étaient attenants. Au milieu de jardins verdoyants, bien ordonnés, en bordure du fleuve, les logements (villas et immeubles à appartements) et infrastructures collectives (piscine, tennis,…) forment un cadre de vie agréable dont la cohérence architecturale est délibérément préservée. 108 / Impact n°7 / Décembre 2014 Eglise Saint Léopold (B2) (16) Eglise de style art déco tardif construite en 1951 sur un site historique pour la congrégation des Pères de Scheut. Structure en béton avec briques de remplissage, en forme d’arc, d’où jaillit la flèche d’un clocher élancé. En extension, a été construit le grand séminaire Jean XXIII (Jacques Dequeker, 1978-88). Avenue des Ecuries. « Elle était élégante et sans doute l’un des témoignages les plus significatifs du courant Art Nouveau à Kinshasa. Dans un bon état de conservation du gros œuvre, cette bâtisse coloniale aurait pu être réhabilitée et facilement valorisée : située dans grande parcelle avec vue sur le fleuve, face au parc du Mont Ngaliema, une zone à haut potentiel touristique. Et devenir un musée, un restaurant,… ? On la voit ici en 2012, en cours de destruction, quelques heures avant d’être réduite à un tas de gravats. La parcelle est aujourd’hui vide… Comment expliquer cette destruction ? Manque de mesures de protection et de valorisation du patrimoine? Appât du gain des propriétaires ? Qui peut empêcher ce type de destruction ? On espère que la RDC se dotera bientôt des instruments juridiques nécessaires pour préserver son patrimoine et sensibiliser sa population à l’importance de son potentiel en termes de témoignage historique et esthétique aussi bien qu’en termes de levier économique et touristique.» www.impact.cd Article réalisé en collaboration avec la Faculté d’Architecture de l’Université Libre de Bruxelles (ULB). Crédits photos : ULB, Alain Huart, Martin van der Belen, archives. Cercle Hippique de Kinshasa (CHK) (B2) (13) Son portail imposant est situé tout en haut de l’avenue des Ecuries (n°1). Le CHK est un site assez impressionnant avec toutes ses installations (terrain de sauts d'obstacles, hippodrome, écuries, sellerie, « Club house » aux allures vintage) et son domaine boisé d’une soixantaine d'hectares. Avec le Golf de Kinshasa, cette infrastructure sportive a permis de préserver un bout de nature important dans la capitale. www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 109 VIE PRATIQUE de Matadi Mayo. Chez les petits producteurs, les intrants non bio sont peu utilisés faute de moyens ou parce que certaines cultures n’en ont pas besoin. La FAO a longtemps préconisé la lutte biologique contre les ravageurs. A Nkamba, les Kimbanguistes cultivent des légumes à l’abri de toute pollution et sans le moindre produit pesticide. Manger sain et local ? Consommer des légumes variés semble parfois un cassetête à Kinshasa, surtout pour les expatriés. Pourtant, le maraîchage est une activité majeure de la capitale et les plantes locales principalement consommées par la population congolaise sont très riches en protéines, minéraux, vitamines. L’amarante ou le mfumbwa, par exemple, sont mêmes considérés comme des légumes d’avenir pour notre santé, par les chercheurs américains… Bio ou pas ? Il existe différentes initiatives de production biologique accessibles aux habitants de Kinshasa. C’est souvent la distribution qui est un peu plus difficile à organiser. Les produits locaux distribués dans la capitale proviennent du Bas-Congo, 110 / Impact n°7 / Décembre 2014 de la périphérie de Kinshasa dont Kimwenza, ainsi que du Bandundu. Les revendeurs vont s’approvisionner au marché de La Liberté pour les légumes qui arrivent par route des Plateaux des Bateke. Les légumes du Bas-Congo abondent dans les marchés du sud de la ville, comme celui www.impact.cd Le miel de Mampu, générateur de revenus Les fermiers de Mampu, formés et encadrés par le CADIM, se sont appropriés les techniques apicoles d'élevage des abeilles, de récolte, d'extraction, de conditionnement et de conservation du miel. Ils produisent, conditionnent et commercialisent chaque année plus de 7.500kg de miel d'acacia par l'intermédiaire de la Coopérative des Apiculteurs de Miel Mbankana. Ce revenu supplémentaire pour les fermiers de Mampu est complété par la valorisation de sousproduits du miel tels que la cire ou l'hydromel. www.impact.cd Le maraîchage, filière existentielle La filière maraîchère à Kinshasa que l’on appelle aussi horticulture, assure la production et la commercialisation des légumes de la capitale. C’est l’une des professions les plus importantes, car elle fait vivre une population de 500.000 personnes. La moyenne de la surface exploitée par le maraîcher est de 4 ares, soit 400 m2 par exploitant. La production légumière de Kinshasa est largement dominée par la culture des légumes feuilles (87%), mais comporte aussi des légumes fruits (11%) et des légumes racines, principa- lement la carotte (2%). Il y a deux types de légumes-feuilles ; ceux à cycle court (environ un mois) : amarante, feuilles de patate douce ; et les légumes-feuilles à cycle long : c'est le cas de la ciboule, du chou chinois, de la morelle, de l’oseille. L'amarante (28%) prédomine parmi les légumes feuilles, suivi des feuilles de patate douce (25%), de la ciboule (18%) et des feuilles de manioc (15%). Ces dernières servent à la préparation du pondu, tandis que leurs tubercules sont transformés en farine pour préparer le fufu, son amidon donnant, pour sa part, la chikwang. Les légumes fruits sont dominés par l'aubergine violette (5%), suivie par la tomate et le gombo (3%). L’amarante, star des marmites L'amarante (Amaranthus, appelée localement Biteku Teku), dont le goût avoisine celui de l’épinard, a trop longtemps été considérée comme le légume du pauvre en RDC. De fait, cette plante pousse sur des sols pauvres et résiste à la séche- Impact n°7 / Décembre 2014 / 111 VIE PRATIQUE Alain Huart 112 / Impact n°7 / Décembre 2014 Brunch mensuel Un échantillon de produits de qualité est proposé à la boutique de l’espace TexafBilembo. Ne ratez surtout pas le brunch du premier dimanche du mois. On peut y goûter des recettes et boissons originales à base d’aliments locaux. Ce sera l’occasion d’y acheter de beaux fruits et légumes bio au prix du marché… Contact : Chridé : 085 49 12 949 et 081 87 85 072 Le Biteku, une plante importante pour la jeunesse Les colonies de vacances au Biteku s’observent au Bandundu, dans les territoires d’Idiofa, Bulungu, Gungu ; les jeunes filles en vacances scolaires produisent le Biteku (en un mois) et se rendent ensuite dans les centres urbains pour le vendre et se faire un peu d’argent de poche pour les vacances. A Kinshasa, plus de 18.700 élèves ont participé au programme de potagers scolaires du projet FAO HUP potagers scolaires ; c’est un moyen très efficace d’améliorer la nutrition des enfants: les élèves reçoivent des rudiments d’horticulture, des vivres frais pour des repas scolaires sains et ils aident les enseignants à préparer les cours de diététique. Repris à la maison, ces savoirs améliorent la nutrition familiale. Même si le projet FAO HUP a cessé ses activités depuis trois ans, le principe des potagers scolaires a été repris par plusieurs centres. www.impact.cd Photos : Alain Huart resse, aux parasites et aux maladies. Sa culture exige donc moins de temps et d'argent. Un atout auquel s’ajoutent les rendements importants qu’elle génère, et son caractère plus écologique que celui des plantes nécessitant des pesticides. Par ailleurs, la valeur alimentaire des feuilles d'amarante est très élevée, notamment en protéines, vitamines et minéraux. Elles peuvent contenir trois fois plus de vitamine C, dix fois plus de carotène, quinze fois plus de fer et quarante fois plus de calcium que les tomates. Sa richesse en calcium en fait un aliment préventif de l'ostéoporose. Les graines d'amarante contiennent 16% de protéines et sont remarquablement riche en lysine, un acide aminé essentiel et absent dans la plupart des céréales. La teneur de l'amarante en minéraux est aussi remarquable : c'est une excellente source de calcium, fer, magnésium, potassium, cuivre, manganèse, sélénium, phosphore, potassium et zinc. Elle contient aussi de la lécithine, favorable au système nerveux et cérébral. Ses graisses sont composées de 70% d'acides gras polyinsaturés. Elle est constituée aussi d'une grande quantité de fibres et ne contient pas de gluten. Les fleurs et les feuilles de l'amarante sont salutaires pour l'intestin. Avec cette richesse nutritionnelle, l'amarante est donc un aliment de choix pour tous et, en particulier, pour les femmes enceintes, les convalescents, les végétariens, les personnes âgées ou les enfants en pleine croissance. pub agb CARNET Une foule d’infos pour comprendre le Congo Comment diffuser des informations pertinentes dans les domaines de l’environnement, l’agriculture, l’entreprenariat ou la dynamique communautaire…? E n complément de ses contenus numériques, la plateforme d’échange de savoirs EcoCongo lance la seconde édition de son Almanach; un bel outil pratique qui vise à mieux faire comprendre le pays, ses acteurs et leur potentiel. Plateforme associative congolaise, elle entend rendre l’information accessible dans la recherche d’un développement durable pour la RDC. Elle diffuse tous types de documents pertinents qui permettent d’expliquer les enjeux environnementaux, sociaux et économiques, ainsi que d’encourager et soutenir des pratiques respectueuses de notre milieu. 114 / Impact n°7 / Décembre 2014 Almanach Ecocongo Format 17 x 24 cm 244 pages Infos : www.ecocongo.cd tions, ONG, médias,…) ont développé des projets pertinents, mais trop souvent ne trouvent pas le rayonnement qu’ils méritent. Soit leur communication est restreinte, soit celle-ci ne parvient pas atteindre sa cible. La solution proposée par EcoCongo consiste à partager les moyens et à mutualiser les supports et les canaux de communication afin d’augmenter l’impact de leur diffusion… Un almanach très pratique Après une première édition remarquée, EcoCongo lance maintenant la seconde édition de son Almanach. C’est un agenda papier, pratique et facile à utiliser, organisé en semainier. Il prodigue conseils et recommandations pour l’entrepreneur, l’agriculteur, le journaliste, l’enseignant ou encore l’étudiant qui a la volonté d’être un acteur de la construction de son pays, mais aussi et d’abord de sa vie professionnelle. Richement illustré, cet almanach permet à son lecteur de découvrir son pays, ses richesses culturelles, naturelles et patrimoniales. Il s’adresse à tous les curieux qui désirent découvrir ce pays tel qu’il est en réalité… MVDB www.impact.cd Photos : Alain Huart À l'origine, une dynamique numérique Au départ, EcoCongo a créé une plateforme de contenus numériques accessibles à tous, que ce soit depuis les quatre coins du pays ou à partir de l’étranger. La plateforme s’appuie sur des acteurs positifs de l’économie et du social pour alimenter ses pages. L’équipe d’Ecocongo se concentrant sur un travail de lisibilité, d’organisation et de valorisation des contenus. Beaucoup d’acteurs sur le terrain (écoles, entreprises, institu- www.impact.cd Impact n°7 / Décembre 2014 / 115 S.A. Envoyer et recevoir de l’argent dans le monde*, avec nous c’est r4JNQMF r'JBCMF r$POWJWJBM 4FSWJDFEJTQPOJCMFEBOTUPVUFTMFTBHFODFT40'*#"/26& ΎWůƵƐĚĞϮϯϬ͘ϬϬϬWŽŝŶƚƐĞ^ĞƌǀŝĐĞƌĠƉĂƌƟƐĚĂŶƐϭϯϬƉĂLJƐ͘ Té l . : + 2 4 3 8 1 7 3 0 0 2 0 0 - 2 0 1 - 2 2 4 t,inshBTB tBanEVnEV7JllF www.sofibanque.com tMBUBEJ t.CVKJ.BZJ t-VCVNCBTIJ FO)
Documents pareils
Télécharger - Institut Français de Kinshasa
l’éducation garçons/filles d’ici 2015. Les progrès considérables accomplis par beaucoup d’États en quelques
années montrent que cet objectif ambitieux peut devenir réalité. Mais cet élan ne peut êt...