Thérèse Desqueyroux, le dernier film de Claude

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Thérèse Desqueyroux, le dernier film de Claude Miller est
un chef -d'oeuvre
Présenté hors-compétition à Cannes, en mai dernier le dernier film de réalisateur de
"L'effrontée' et d'"Un secret" avait été accueilli avec beaucoup d'émotion, à peine deux mois
après la disparition du grand monsieur du 7 art. Adaptation sensible et délicate du roman de
François Mauriac, "Thérèse Desqueyroux" est un très grand film, tant par son habitation
modeste des costumes d'une époque, que par le profil de femme qu'il esquisse. Sortie le 28
novembre.
Dans la bourgeoisie terrienne des landes, il va de soi que Thérèse Larroque (Audrey Tautou)
promise depuis sa tendre enfance au fils des propriétaires doit épouser Bernard Desqueyroux
(Gilles Lellouche, dans un brillant contre-emploi) pour que leurs domaines fusionnent à
Argelouse. Tandis-que les préparatifs du mariage s’arrangent, Thérèse est la confidente de sa
jeune sœur Anne (Anaïs Dumoustier) qui s'est éprise d'un beau et riche jeune-homme mais
joueur et juif. En charge de faire passer cette amourette inconvenante, Thérèse découvre tout
un monde qui lui restera fermé : la passion, le désir, l'angoisse et le doute, bref l'état amoureux.
Fidèle au poste de femme de notable et de fille de famille, elle fait ce qu'elle doit : organiser
l'intendance de la maison, tomber enceinte pour fournir un héritier. Jusqu'au jour où, comme
poussée par une force qui lui échappe, elle se met à empoisonner méthodiquement son mari.
Face au premier plan du film : l'inévitable scène des deux sœurs à vélo riant en dévalant la
pente d'un sous-bois rétro les ramenant chez elles, on craint le pire. Et pourtant non, ce clin
d’œil au vieux fusil n'annonce en rien le reste du film puisque Miller bannit le flash-back qui
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structurait le livre de Mauriac pour dévider la pelote de sentiments complexes et mystérieux qui
président à la destinée de Thérèse Desqueyroux. Et cette linéarité est tout simplement parfaite
et bouleversante. La dureté parfois reprochée à Audrey Tautou se transmue en mystère dans
ses costumes de bourgeoisie de province des années 1930 qui rehaussent à la fois le caractère
menu et fragile et puis aussi la sécheresse déterminée de l'empoisonneuse. En Bovary du
20ème siècle, Gilles Lellouche est impeccable et décline avec subtilité le mélange d'amourpropre et d'amour blessés de cet homme trompé peut-être de bien pire manière que si c'était
avec un autre. Pour contre-balancer la haine sourde et inexplicable d'une femme à l'égard de
son mari qui respecte tout ce qui fait la force de leur union - les codes de leur milieu- le
personnage d'Anaïs Dumoustier est parfaitement fraiche et entière. Libre. Jouant des
archétypes sans jamais les figer, Claude Miller sublime un texte qui est-disons-le- aujourd'hui
un peu vieillot et bien souvent la terreur des lycéens. Portrait d'une héroïne en train de se
débattre pour tenter, tragiquement, de récupérer les fils directeurs de sa propre vie, le film de
Miller atteint des sommets humains et artistique. Et le réalisateur conserve lui aussi sa part
d'ombre : Bouleversé par le mystère et la violence des sentiments féminins, le spectateur se
demande avec gratitude ce qui a pu pousser un homme de 90 ans à dédier sa dernière œuvre à
comprendre une femme fière, entière et aliénée, prisonnière des moeurs d'un autre temps.
Thérèse Desqueyroux, de Claude Miller, avec Audrey Tautou, Gilles Lellouche, Anaïs
Dumoustier, France,2011, 1h50. Sortie le 28 novembre 2012.
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