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12/11/08 11:50 Page 33 dossier 04_AFTALION_8P:DOSSIER LE TOTALITARISME ET SES ANTIDOTES par Florin Aftalion* La guerre froide sur le sol américain A CONFÉRENCE DE YALTA est généralement considérée comme le point de départ de la Guerre froide. En février 1945, avec ses 300 divisions occupant la Pologne et prêtes à déferler sur l’Allemagne, Staline paraissait décidé à mettre l’Europe entière sous sa botte. Les alliés anglo-américains allaient lui céder pour ne se ressaisir qu’au cours des années suivantes. Le conflit opposant les démocraties occidentales à l’Union soviétique et à ses satellites se prolongea jusqu’à l’effondrement du bloc communiste en 1989. Sur l’un des fronts, les services du contre-espionnage Florin Aftalion (à g.) et Thierry Wolton (à d.) américain, mal préparés à cette tâche, donnèlors de la journée Souvarine, le 24 juin 2008. rent la chasse à des espions et agents d’influence soviétiques. En une première phase que je discuterai ici, des citoyens américains trahirent leur pays pour des raisons idéologiques. Puis, à partir des années 1950, l’espionnage soviétique se professionnalisa et ne recruta plus que des agents motivés par leur intérêt matériel. L Les formes multiples de la subversion communiste En réalité, la Guerre froide avait commencé bien avant la fin de la Seconde Guerre mondiale. Pendant plus de deux décennies, elle avait été menée unilatéralement et en secret par la seule Union soviétique. Les zélateurs de cette dernière, inspirés par la * Professeur émérite à l’École des sciences économiques et commerciales. N° 36 33 04_AFTALION_8P:DOSSIER 12/11/08 11:50 Page 34 HISTOIRE & LIBERTÉ doctrine marxiste-léniniste et l’adoration de Staline, croyaient que la lutte des classes qu’ils menaient allait finir par anéantir le capitalisme et son champion, l’Amérique. En attendant qu’éclate la Révolution, le prolétariat de tous les pays devait se mobiliser en aidant l’URSS, patrie du socialisme. Aux États-Unis il se trouva dès les années 1920 des individus qui, prenant au sérieux cette conception du monde – ces élucubrations, peut-on estimer aujourd’hui – se mobilisèrent au service de leur cause. En l’occurrence, ils créèrent un Parti communiste clandestin (en plus du CPUSA, l’officiel Parti communiste des États-Unis), se mirent à la disposition du Komintern et devinrent des pions soumis aux ordres des agents secrets de l’URSS. L’espionnage et l’organisation de réseaux de soutien mutuel et d’influence furent leurs principales activités. Activités dont les États-Unis et les autres démocraties occidentales ne prirent conscience que bien plus tard. Au cours des années 1920-1930, l’objectif du Komintern était l’obtention d’informations concernant l’industrie chimique. Ceux qui se proposaient spontanément de lui en fournir, d’ordinaire des immigrants récents, n’étaient pas en situation d’obtenir des brevets et de véritables secrets de fabrication. Leurs apports contribuèrent néanmoins à moderniser une industrie soviétique fortement retardataire. À partir du début de la Seconde Guerre mondiale l’intérêt des Soviétiques se porta vers les fabrications de guerre et les armes les plus avancées: le radar et surtout la bombe atomique. Les institutions créées dans le cadre du New Deal furent des milieux propices au recrutement de jeunes fonctionnaires aux carrières prometteuses, souvent sortis des universités les plus prestigieuses. En atteignant les plus hauts rangs de l’administration, ils devenaient des agents d’influence et de désinformation extrêmement utiles pour la cause qu’ils défendaient. Les réseaux secrets qu’ils constituèrent leur permirent de se protéger mutuellement lorsque des suspicions commencèrent à peser sur certains d’entre eux. Le Département d’État et l’OSS (la future CIA) furent les institutions les plus infiltrées. En dehors de l’administration, des agents communistes s’efforcèrent aussi de prendre le contrôle de syndicats et de différentes organisations professionnelles créées elles aussi dans le cadre du New Deal. L’industrie du cinéma dont Lénine en son temps avait déjà compris l’importance dans le domaine de l’agitprop fut l’objet d’une attention particulière de la part des « organisateurs » soviétiques. Pour atteindre un large public, des associations « frontistes » furent fondées à la même époque sous les prétextes les plus divers, mais toujours avec l’objectif secret de diffuser la propagande orchestrée par le CPUSA au moyen de campagnes de signatures et de manifestations de masse. Elles n’hésitaient pas à transformer les cibles de leurs actions au fur et à mesure qu’évoluaient les buts de leur propagande. Ainsi, une asso- 34 AUTOMNE 2008 12/11/08 11:50 Page 35 LA GUERRE FROIDE SUR LE SOL AMÉRICAIN ciation s’opposant à l’entrée en guerre des États-Unis se mit à la demander le lendemain du jour où l’Allemagne attaqua son allié de la veille. En effet, tant que dura le pacte germano-soviétique (août 1939 à juin 1941), les communistes américains se mobilisèrent pour que les États-Unis restent neutres dans le conflit. Mais à partir du jour où l’Allemagne attaqua l’URSS, celle-ci eut un besoin vital (et obtint) de l’aide de l’Amérique et de son intervention militaire (le second front). À la même époque les associations frontistes, les libéraux et même le gouvernement américain s’efforcèrent de donner une image positive de l’allié russe alors que l’espionnage soviétique était plus agressif que jamais. Pourtant, la propagande finit par faire croire même à des dirigeants du CPUSA que celui-ci avait changé de nature et allait abandonner ses activités subversives. En mai 1945, un article signé par Jacques Duclos (à l’instigation de Moscou) dans Les Cahiers du communisme mettait les choses au clair: la lutte des classes continuait. Enfin, ne l’oublions pas, les réseaux tissés par les services secrets soviétiques, NKVD et GRU[1], poursuivaient et éliminaient tous ceux en qui Staline voyait des ennemis: trotskistes (le cas de Trotski lui-même en est un exemple), renégats ou transfuges (y compris, pendant la guerre, les marins soviétiques sautant par-dessus bord dans les ports américains pour se réfugier aux États-Unis). Les armes du Komintern Les moyens dont disposait le Komintern dans sa guerre secrète étaient nombreux et variés. Les effectifs du parti communiste officiel (résultat de la fusion à la fin des années 1920 de trois partis et dont la direction avait été purgée de ses éléments trop individualistes) avaient oscillé jusqu’au seuil des années 1950 de vingt mille jusqu’à cent mille adhérents. Ces derniers ne furent pas, dans leur très grande majorité, des espions. Mais nous ne connaissons pas de cas de membre du CPUSA qui ait refusé de rendre service, même illégalement, lorsque le parti le lui demandait. Quant à la direction du parti, elle collaborait étroitement avec les agents soviétiques. On peut voir dans la création d’un parti clandestin un exemple de cette collaboration, ce parti clandestin se livrant, bien entendu, en force, aux tâches d’espionnage. Les citoyens soviétiques participant à la Guerre froide sur le sol américain soit appartenaient à un service bénéficiant de l’immunité diplomatique soit, arrivés illégalement 1. Le service secret de l’Armée rouge. N° 36 35 dossier 04_AFTALION_8P:DOSSIER 04_AFTALION_8P:DOSSIER 12/11/08 11:50 Page 36 HISTOIRE & LIBERTÉ aux États-Unis, se faisaient passer pour des citoyens américains. Dans un cas comme dans l’autre c’étaient des rezidents, des représentants des services secrets, auxquels des courriers indigènes livraient les informations glanées par les agents du terrain. Deux institutions ayant pignon sur rue offrirent des couvertures particulièrement efficaces aux agents soviétiques présents légalement en Amérique: L’AMTORG, l’agence d’achats soviétique établie à New York en 1924 (donc bien avant la reconnaissance de l’URSS par les États-Unis) et le bureau soviétique basé à New York dans le cadre du système prêt-bail (land-lease) dont bénéficia l’URSS à partir de l’automne 1941. Ces deux institutions, de par leurs fonctions, entretenaient des relations avec l’ensemble de l’industrie américaine. La seconde obtenait même toutes les informations (et même les produits) que désirait Moscou de manière officielle et légale (et en fin de compte, gratuite)! Les moyens de la lutte antisubversive En contrepartie, de quels moyens disposait l’Amérique pour s’opposer à la guerre secrète dont elle était la victime? Le FBI, qui servait d’agence de contre-espionnage, n’avait pas été conçu dans le but de lutter contre la subversion. À la veille du conflit mondial, ses principales cibles – contre lesquelles il emporta d’ailleurs quelques succès spectaculaires – sont les gangs formés pendant la prohibition et les bandes de pilleurs de banques. Dans cette lutte-là, abattre l’ennemi était considéré comme légitime. En revanche, pour triompher des espions et autres agents d’influence il fallait réunir des preuves admissibles devant une justice exigeante et pointilleuse. Ce que le FBI ne réussit à faire que dans très peu de cas. Pour ajouter à ses difficultés, remarquons que tant que dura le conflit mondial, le Bureau se mobilisa contre une subversion nazie, en réalité insignifiante, et négligea (sur ordre de Roosevelt?) la soviétique. Faute de réussir à les faire condamner, le Department of Justice arriva cependant, dans les années de l’après-guerre, à neutraliser un grand nombre d’agents communistes en les contraignant à quitter l’administration. Le système de loyauté-sécurité mis en place par l’administration Truman en 1947 facilita les mises à l’écart. Puis, la condamnation en 1949 des dirigeants du PCUSA à de lourdes peines de prison désorganisa celui-ci et en paralysa pour longtemps les menées subversive. L’action antisubversive américaine se trouva doublée par des initiatives du Congrès. La Chambre des représentants, en particulier, se dota d’une commission qui en 1938 prit le nom de House Committee on Un-American Activities (connu sous l’acronyme de HUAC). Cette commission, constituée de parlementaires des deux partis, avait à son 36 AUTOMNE 2008 12/11/08 11:50 Page 37 LA GUERRE FROIDE SUR LE SOL AMÉRICAIN service un staff de professionnels, juristes et enquêteurs. Elle avait le pouvoir d’auditionner les témoins de son choix. Ceux-ci devaient répondre aux questions qui leur étaient posées sous peine d’être poursuivis pour outrage au Congrès. Ils pouvaient cependant rester silencieux en invoquant le cinquième amendement de la Constitution. Les informations recueillies au cours de ses auditions pouvaient être transmises au Department of Justice qui, à son tour, pouvait initier des poursuites. Il en allait de même de la commission conduite à la Chambre haute par le sénateur Joe McCarthy. Les maigres succès du contrespionnage américain Pour les raisons évoquées plus haut, le FBI rencontra de nombreux échecs dans sa lutte contre l’espionnage soviétique. Les exemples de revers abondent. Citons en deux particulièrement significatifs. Les menées des scientifiques recrutés par le NKVD au Radiation Laboratory (où furent conduites des recherches s’intégrant dans le projet Manhattan sur la bombe atomique), furent connues depuis leur origine par le FBI, mais aucun des suspects ne put, faute de preuves suffisantes, être traduit en justice. Ou les deux procès intentés à Judith Coplon. Cette juriste du Department of Justice informait les agents soviétiques de ce que les services de son ministère découvraient à leur sujet. Des preuves solides furent bien apportées par le FBI mais elles avaient été obtenues illégalement, ce qui suspendit les sentences prononcées par les jurys. L’impuissance des services secrets paraît d’autant plus étonnante que les autorités américaines avaient été alertées à partir de 1939 par une série de transfuges venant leur apporter des informations sur le fonctionnement des réseaux communistes. Ce fut d’abord le soi-disant général Krivitsky, un des chefs du NKVD en Europe occidentale réfugié aux États-Unis, dont le FBI se méfiait, et qui apporta pourtant aux services du contre-espionnage britannique des renseignements que ceux-ci n’exploitèrent pas suffisamment. Puis Whittaker Chambers, un agent de liaison entre un rezident du GRU et des informateurs haut placés dans l’administration (dont Alger Hiss). Son témoignage ne fut exploité qu’en 1948 alors qu’il avait prévenu dès 1939 l’un des conseillers du président Roosevelt des dangers que représentait l’infiltration communiste dans le gouvernement. Vers la fin de l’année 1945 se produisirent deux défections spectaculaires. D’une part, un employé au chiffre de l’ambassade soviétique d’Ottawa, Igor Gouzenko, livra à la police canadienne des copies de télégrammes qu’il avait soigneusement amassés. D’autre part, Elizabeth Bentley, courrier puis responsable d’un important réseau d’informateurs, donna au FBI la longue liste de ses contacts. N° 36 37 dossier 04_AFTALION_8P:DOSSIER 04_AFTALION_8P:DOSSIER 12/11/08 11:50 Page 38 DR © Roger Higgins, Library of Congress DR HISTOIRE & LIBERTÉ Ajoutons qu’en 1944, en « choisissant la liberté », Victor Kravchenko avait renseigné les autorités américaines sur les agissements de la mission soviétique des accords de prêts-bails. Les informations qu’apportaient ces transfuges venaient compléter celles que livra, petit à petit, le projet Venona[2]. Celui-ci prit corps en 1939 à la suite de la signature du traité germano-soviétique lorsque les Américains décidèrent d’intercepter tous les télégrammes (codés) échangés entre Moscou et ses représentations diplomatiques aux États-Unis. Ces télégrammes parurent d’abord indéchiffrables. Leur système Portrait de Victor Kravtchenko, en frontispice de l’édition française de de codage ne put être compris qu’à la suite des impruJ’ai choisi la liberté (éd. Self, 1949). dences commises par un NKVD débordé de travail. En 1946, la lecture de télégrammes des années 1943 et 1944 révéla que les Soviétiques avaient infiltré le projet Manhattan. Finalement, les 2900 télégrammes décryptés (sur un total de trois millions) montrèrent que 349 personnes résidant aux États-Unis avaient entretenu des relations secrètes avec l’URSS. De nombreux individus furent identifiés (dont les époux Rosenberg[3], Judith Coplon et Alger Hiss[4]) mais il fut décidé de garder secrète leur connaissance du projet Venona. Précaution inutile car les Soviétiques en connaissaient tous les développements grâce, en particulier, à Kim Philby (dont il sera question plus loin). Il est d’ailleurs probable que les télégrammes déchiffrés n’auraient pas été recevables par la justice. Le bilan de la chasse aux espions se solda côté américain par l’arrestation de quelques citoyens soviétiques qui furent renvoyés dans leur pays. Mais de tous les espions ayant exercé leur activité pendant la période qui nous intéresse, la justice américaine n’en a puni qu’à peine une quinzaine. La plupart Julius et Ethel Rosenberg, accusés furent condamnés à des peines de prison pour de conspiration en vue d’espionnage, à la US Court House au moment parjure à l’exception des époux Rosenberg, seuls à du verdict de culpabilité en 1951. avoir été condamnés à mort et exécutés. Ils seront exécutés en juin 1953. 2. John Earl Haynes and Harvey Klehr, Venona, Yale University Press, 1999. 3. Florin Aftalion, La trahison des Rosenberg, Éditions JC Lattès, 2003. 4. Florin Aftalion, Alerte rouge sur l’Amérique, Éditions JC Lattès, 2006. 38 AUTOMNE 2008 12/11/08 11:50 Page 39 dossier 04_AFTALION_8P:DOSSIER LA GUERRE FROIDE SUR LE SOL AMÉRICAIN Le riche bilan soviétique Le bilan de ses services secrets est riche pour l’URSS. Les informations technologiques et scientifiques obtenues aux États-Unis permirent la construction des premiers avions à réaction (grâce en particulier à William Perl, un proche de Julius Rosenberg) et des avancées considérables dans l’application du radar. Dans ce dernier domaine retenons le détonateur de proximité (cadeau de Julius Rosenberg[5]) qui abattit l’avion espion U2 de Gary Powell en 1962. Mais les prises les plus considérables concernent la bombe atomique dont Béria se vantait déjà en 1945 de détenir les plans. Et aussi, sans doute, les connaissances qu’apportèrent avec eux deux ingénieurs disparus en 1951 après avoir espionné pour le réseau Rosenberg ; on les retrouva quelques années plus tard en URSS où ils fondèrent l’industrie des ordinateurs de ce pays[6]. Dans le domaine des influences politiques, diplomatiques et militaires un inventaire précis est impossible à dresser. Mentionnons, entre autres, qu’Alger Hiss, conseiller de Roosevelt à Yalta, a pu infléchir les positions de ce dernier. Ou que le soutien apporté à Tito au détriment de son rival anti-communiste Mihailovich a été le résultat des fausses informations diffusées par le Département d’État. Ou encore que l’aide apportée à Tchang Kaï-chek fut largement en dessous de ce qui lui avait été promis grâce à Harry Dexter White. Ce dernier, Assistant Secretary to the Treasury puis Executive Director du FMI, eu de nombreuses occasions de prouver sa sympathie pour Moscou. Il mourut d’une crise cardiaque en 1948 trois jours après avoir comparu devant le HUAC. Mais la défaite du Kuomintang resta l’une des priorités des agents infiltrés au State Department. D’autres hauts fonctionnaires profitèrent de leurs positions dans l’administration pour peser sur la politique étrangère américaine. Soupçonnés (à cause des révélations d’Elizabeth Bentley et des télégrammes déchiffrés dans le cadre du projet Venona) d’actes subversifs sans que des preuves admissibles devant les tribunaux puissent être réunies contre eux, ils quittèrent leurs postes et parfois même les États-Unis. Ainsi Laurence Duggan, fonctionnaire du Département d’État, démissionna de l’administration en 1946 et se suicida (?) en 1948 après avoir été interrogé par le FBI. Noël Field, fonctionnaire du Département d’État, fuit derrière le rideau de fer où on le retrouva, à Budapest, comme principal témoin à charge dans le procès Rajk. Duncan 5. Alexandre Feklisov et Sergueï Kostine, Confession d’un agent soviétique, Éditions du Rocher, 1999. 6. Steve Usdin, Engineering Communism, Yale University Press, 2005. N° 36 39 04_AFTALION_8P:DOSSIER 12/11/08 11:50 Page 40 HISTOIRE & LIBERTÉ Lee, l’un des dirigeants de L’OSS, maladroitement interrogé par le FBI, ne fut jamais inquiété. Lauchlin Currie, conseiller du Président, jamais inquiété non plus, s’installa en Colombie et y dirigea la planification. Gregory Silvermaster, économiste de formation, jamais inquiété par le FBI qui pourtant le connaissait, se retira de l’administration et s’enrichit dans la promotion immobilière. Victor Perlo, occupa différents postes dans l’administration. Il nia, à l’instar de tous les autres personnages évoqués ici, avoir été communiste, quitta le devant de la scène pour réapparaître en 1981 comme dirigeant du CPUSA. Harry Hopkins, véritablement éminence grise du président Roosevelt, mourut en 1946, bien avant d’être soupçonné d’avoir été un espion[7]. En Grande Bretagne, ceux qui allaient devenir les espions et agents d’influence les plus efficaces avaient été recrutés pendant leurs études au début des années 1930. Désignés comme les « Quatre de Cambridge », ils appartenaient à la « upper class », ce qui les rendait insoupçonnables aux yeux des services du contre-espionnage britannique. Leurs activités s’étendirent aux États-Unis: ils informèrent les services secrets soviétiques des informations que le FBI possédait au sujet de leurs agents. Beaucoup ayant été écrit à leur sujet je me contente d’en rappeler les noms. Anthony F. Blunt, professeur de français, historien d’art, conseiller de la reine Elizabeth, agent du MI5 pendant la Seconde Guerre mondiale perdit ses décorations lorsque furent révélées ses activités subversives. Guy Francis de Moncy Burgess, agent du MI6, représentant du British Foreign Office à Londres et à Washington. Donald Maclean, représentant du Foreign Office entre autres à Paris, Washington et Le Caire. En 1951, sur le point d’être découvert, il fuit à Moscou en compagnie de Burgess. Enfin, Harold Kim Philby, journaliste, agent du MI6, liaison du MI6 avec la CIA soupçonné depuis longtemps, mais pas arrêté, finit par fuir à Moscou en 1963. Conclusion Les activités subversives que l’URSS a conduites sur le sol américain, très profitables de son point de vue, et commencées bien avant le déclenchement du Second conflit mondial, prouvent sans aucun doute possible que Moscou est à l’origine de la Guerre froide et que les États-Unis n’ont fait que réagir – et encore avec des années de retard – à l’agression dont ils étaient victimes. 7. Sur la foi du témoignage d’un transfuge du KGB et d’indices fournis par le projet Venona. Voir: Herbert Romerstein and Eric Breindel, The Venona Secrets, Regnery Publishing, Inc., 2001. 40 AUTOMNE 2008