chapitre 2 l`idéal de beauté - Les Classiques des sciences sociales

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chapitre 2 l`idéal de beauté - Les Classiques des sciences sociales
L’idéal de beauté
CHAPITRE 2
L’IDÉAL DE BEAUTÉ
L’ART DE LA RENAISSANCE
P
résenter brièvement chacune des œuvres constitutives de
l’art de la Renaissance est bien sûr impossible tant
chacune dans sa complexité mériterait, avant même d’être
regroupée sous une catégorie historique ou esthétique, d’être
commentée et analysée abondamment.
Aussi avons-nous pris le parti de les étudier du point de vue d’une
histoire des idées qui sans négliger les œuvres ne se confond pas avec le
projet d’une histoire des arts : les artistes sont aussi des intellectuels,
et quitte à ce que cela paraisse réducteur, telle est la thèse à partir de
laquelle nous les envisagerons !
La périodisation
Avant même des événements politiques comme la chute de
Constantinople ou la découverte de l’Amérique, le développement d’un
nouveau cadre pour la représentation, la perspective, à Florence au
début du XVesiècle, avec la génération des Brunelleschi, Masaccio et
Lorenzo Ghiberti, Les portes du Paradis, 1425-52 (détail, Baptistère de Florence)
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Les grandes figures du monde moderne
Donatello, marque toute tentative de définir la période au plan
esthétique.
La transformation est sensible surtout si l’on compare des tableaux
de la fin du XVe siècle à ceux du XIIIe siècle : l’espace y prend une autre
dimension, le monochromatisme des fonds y est remplacé par des
paysages qui se perdent dans le lointain, paysages qui sont de surcroît
encadrés par une fenêtre, une vedutta.
Léonard de Vinci, L’annonciation, 1472-5, Offices, Florence
Bref l’espace est construit et l’image devient comme plus
« naturelle » à nos yeux. Or, plus qu’au développement d’un naturalisme
fondé sur la « science » de la perspective, comme le résumera Antony
Blunt dans son livre classique sur la théorie des arts en Italie, c’est à
une sécularisation de l’art auquel on assiste alors : une nouvelle manière
de représenter des thèmes qui échappent à la transcendance, à la
révélation religieuse, et qui s’oppose dans la plupart des cas
consciemment à la représentation traditionnelle du Moyen Âge sous
le couvert d’un retour à des thèmes antiques.
Prenons pour exemple la Vénus de Botticelli (Sandro Filipepi, 14151510) dans Le printemps.
Cette indépendance par rapport à la tradition picturale religieuse
s’affirmera d’autant que les artistes se montreront de plus en plus
soucieux de marquer leurs œuvres de leur qualité propre, de leur style.
La Renaissance esthétique est une catégorie qui désigne cette
transformation mais dont on peut aussi discuter la constitution par
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L’idéal de beauté
l’examen critique des interprétations léguées par la tradition, en tentant
d’y distinguer les mécanismes analytiques qui soulignent les ruptures
Sandro Botticelli, Le printemps, v. 1478, Offices, Florence
ou la continuité. On le sait, le terme fut inventé par Vasari au XVIe
siècle dans une espèce d’hagiographie païenne, une vie des hommes
illustres, et la notion de Renaissance lui sert donc de moyen pour les
mettre en valeur, comme pour les hisser aux yeux des humanistes à la
hauteur des classiques gréco-romains. Comme nous l’avons écrit au
premier chapitre, ce sont ensuite les historiens du XIXe siècle qui
reprirent cette catégorie pour unifier leur objet d’étude.
Cependant la prise en considération que cette catégorie historique
recouvre en esthétique des phénomènes diffus dans le temps, dans
l’échelle des arts, l’architecture, la peinture, la statuaire notamment,
et dans l’espace géographique nous invite à l’utiliser avec précaution.
En effet, cette période est d’abord associée à l’Italie du Nord, et
particulièrement à Florence. À partir de là, et comme si on appliquait
un modèle de contagion ou de conquête, on y associe des artistes du
Nord tels Albrecht Dürer (1471-1528), à Nuremberg, ou Pieter Bruegel
(1525 ?-1569) en Flandres ; sans oublier qu’en France on désigne ainsi la
floraison culturelle de la vallée de la Loire où Léonard de Vinci finit
d’ailleurs ses jours, au début du XVIe siècle, tout en attribuant ce
mouvement aux guerres italiennes de François Ier.
On aurait aussi tort d’y voir un retour imposé par les humanistes
aux maîtres anciens car si cela peut sembler le cas en architecture où
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Les grandes figures du monde moderne
l’on rompt avec l’art gothique en redécouvrant Vitruve, cela ne peut
l’être pour la peinture où les traces réels ou livresques de l’Antiquité
n’existent pour ainsi dire plus.
Albrecht Dürer, Autoportrait, 1498, Musée du Prado, Madrid
La Renaissance apparaît comme une étiquette commode pour
désigner tout ce qui échappe au Moyen Âge et qui précède le
maniérisme, la période baroque et l’âge classique. Elle est l’exemple
même d’une catégorie historique et esthétique à géométrie variable
ainsi que le donne à penser le livre de Francesco Zeri sur le concept de
Renaissance. C’est comme si la catégorie esthétique Renaissance était
à disjoindre de la catégorie historique éponyme, comme si elles ne se
recouvraient pas précisément, comme si on ne pouvait les penser
sérieusement de concert.
La mise au point de cette nouvelle formule de représentation, cette
mise en perspective ne se fit pas sans peine. Certains, comme Uccello,
poursuivirent l’expérimentation avec obsession.
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L’idéal de beauté
Paolo Uccello aurait été le talent le plus charmant et le plus inventif de
la peinture depuis Giotto s’il eût pris pour les figures et les animaux
autant de peine et de temps qu’il en perdit dans l’étude de la perspective.
Bien que cette étude soit belle et féconde en recherches, à s’y adonner
sans mesure on ne fait que consumer temps après temps, forcer sa
nature et charger son esprit de préoccupations qui détruisent la
spontanéité naturelle et le rendent stérile et tortueux. On en tire, en
s’y attachant plus qu’aux figures mêmes, un style sec, tout en contours ;
Paolo Ucello, Saint-Georges et le dragon, 1455-1460, National Gallery, Londres
c’est là ce qui arrive par trop de minutie dans le travail. Et cela rend
souvent solitaire, bizarre, mélancolique et pauvre. Tel est le cas de Paolo
Uccello. Doté par la nature d’un esprit pénétrant et subtil, il n’eut plaisir
qu’à l’étude des points de perspective difficiles, voire insolubles ;
recherches qui, malgré de belles trouvailles, devinrent si gênantes pour
les figures qu’en vieillissant il les fit de plus en plus mauvaises. Il ne fait
aucun doute que forcer sa nature par un violent excès d’étude aiguise
certainement l’esprit, mais ses créations n’ont jamais cette marque de
facilité et de grâce qu’obtiennent naturellement ceux qui composent
avec mesure et qui ont un jugement réfléchi : les touches sont alors à
leur place et évitent les singularités qui donnent à l’œuvre on ne sait
quoi de contraint, de sec, de mal venu, propre à susciter chez le
spectateur la pitié plutôt que l’admiration. L’esprit de recherche ne doit
être mis a contribution que lorsque l’intelligence est excitée au travail
et l’inspiration enflammée ; c’est alors seulement que naissent les
œuvres excellentes et divines, les merveilleuses inventions.
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Les grandes figures du monde moderne
Paolo, sans jamais s’accorder le moindre répit, s’adonna donc aux
recherches les plus difficiles de l’art ; il porta à sa perfection la manière
de construire la perspective par l’intersection des lignes tirées à partir
des plans et des élévations des édifices jusqu’aux faîtes des corniches
et des toits ; il les faisait se réduire et diminuer vers le point de fuite,
après avoir établi plus haut ou plus bas, à sa convenance, le point de
vue du spectateur. Enfin, il s’appliqua tant à ces questions qu’il créa
une méthode et des règles nouvelles pour situer les figures sur les plans
où elles posaient leurs pieds et où elles diminuaient peu à peu, au fur et
à mesure qu’elles s’éloignaient vers le fond du tableau, ce qu’on avait
fait avant lui au jugé.
Il trouva également une méthode pour dessiner les nervures et les arcs
des voûtes, le raccourci des plafonds qui semblent s’enfoncer entre les
caissons et les poutres, pour peindre des colonnes rondes dans
I’encoignure d’une maison, qui, tout en épousant l’angle, le corrigent
par le dessin en perspective et le jeu des plans.
Au milieu de ces préoccupations, il en vint à demeurer seul, comme un
sauvage, sans presque recevoir personne et sans se montrer nulle part
pendant des semaines et des mois. Ces problèmes étaient beaux et
difficiles mais s’il eût passé ce temps à l’étude des figures, qu’il faisait
cependant d’un très bon dessin, il les aurait exécutées à la perfection ;
il préféra gaspiller son temps à ces fantaisies et se trouva ainsi, pendant
toute sa vie, plus pauvre que célèbre. Aussi le sculpteur Donatello, son
ami intime, lui disait souvent, en voyant ses mazzocchi à pointes et à
facettes, tracés en perspective sous divers angles, ou ses boules à
soixante-douze faces, à pointes de diamant, avec sur chaque face des
copeaux enroulés sur des baguettes, et d’autres bizarreries auxquelles
il perdait son temps : « Eh ! Paolo ! Ta perspective te fait abandonner le
certain pour l’incertain ; ce sont là exercices de marqueteurs, qui
remplissent leurs frises de copeaux, coquilles rondes et carrées, ou
autres motifs.
Giorgio Vasari, Le vite de’ più eccelenti pittori, scultori e architettori
italiani, 1550.
Il faut revenir de manière critique à la perspective, cette manière
de représenter l’espace sur un plan, la toile, à partir d’une projection
géométrique où le point de fuite est à l’inverse du point de vue du
spectateur, l’œil de celui-ci étant comme un sommet d’une pyramide
qui serait tronquée par le plan du tableau.
Cette innovation est rapidement revendiquée comme une
« science » au secours des arts et elle permet même à la peinture d’aspirer
à en être le sommet. Pourtant la construction géométrique, la
perspectiva communis, semble être une connaissance issue de la
pratique architecturale, où l’expérimentation avec des miroirs, puis avec
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des chambres noires ( camera obscura ) autant que le travail de
marqueterie, s’oppose en fait à la « science », à l’optique aristotélicienne
de l’époque.
On a donc là, avec la prolifération des écoles d’abaques pour le
commerce, l’une des sources de la diffusion de la culture des
mathématiques puisque rapidement l’enseignement de la perspective
et de la géométrie projective devint matière obligatoire dans les ateliers
d’artiste puis les écoles de beaux-arts.
Soulignons en passant la parenté entre la fascination actuelle pour
l’architectonique des formes : le rendu par le calcul de la trame, du treillis
(wire-frame) de la CAO (CAD) qui renoue ainsi avec les fantaisies
d’Ucello.
Cette nouvelle esthétique, plus théorisée, plus construite, plus
séculière, naturalisante, et qui emprunte aux auteurs anciens pour
mieux les dépasser, sera marquée au XVIe siècle par les guerres de
religion, la réforme et la contre-réforme. À l’optimisme succéderont
les nuages et l’urgence de convaincre... La transformation dans le choix
des thèmes, et dans leurs traitements, manifeste un éloignement de
l’hagiographie. Ainsi dans l’art religieux où l’on passe de la manifestation
des saints à l’emportement vers le divin. L’expression remplace alors
en partie les signes convenus, en même temps que se complexifie,
s’aristocratise le système des références : l’œuvre est à décoder pour
celui qui saura y reconnaître les clés appropriées.
Pour saisir cette conception de l’œuvre comme énigme nous allons
examiner quelques œuvres exemplaires.
Considérons d’abord La tempête de Giorgio da Castelfranco dit
le Giorgione (1477?-1510).
Ici, le « naturalisme » recouvre l’encryptage des motifs iconographiques, car le sujet religieux se cache derrière une scène d’apparence
convenue sinon banale. Le tableau peut-il se comprendre sans connaître
pour qui il a été peint et dans quel contexte précis il était exposé ?
Au premier plan, à la gauche du tableau un jeune homme debout,
en costume d’époque, regarde à sa gauche une dame nue, assise sur un
rocher et qui allaite son enfant. En arrière plan, dans un cadre marqué
de part et d’autre par des arbres, des ruines où s’inscrivent une colonne
brisée, une rivière qu’enjambe un pont, des villas, le tout étant surmonté
par de sombres nuages où tranche un éclair : d’où l’appellation du
tableau, La tempête.
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Les grandes figures du monde moderne
Qui croirait qu’il s’agit d’Adam et Ève chassés du paradis ? Peu
d’experts en tout cas puisque l’on a proposé plus d’une vingtaine
d’interprétations du sujet de ce tableau : de la famille de Giorgione
jusqu’à la découverte de Moïse en passant par la naissance de Bacchus...
Pourtant il semble qu’en remontant jusqu’à sa source, la commande
originale d’une richissime famille de Venise, et à la place que ce tableau
occupait physiquement, l’on puisse en déduire qu’il en était ainsi et
qu’il s’agit donc bien d’un tableau où la méditation religieuse nous est
cachée par l’absence tout à fait déconcertante de motifs iconographiques clairs comme le seraient la pomme ou le serpent !
Giorgione, La tempête, 1508, Accademia, Venise
Le Concert champêtre du Titien (Vecellio Tizanio, 1489-1576) se
situe sans contredit dans le prolongement du style de Giorgione alors
que l’érotisation de la représentation ouvre la porte à la pluralité des
lectures : de quelle scène mythologique ou religieuse s’agit-il ? Seuls
les clients ou quelques initiés devaient à l’origine le savoir…
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Le Titien, Concert champêtre, 1508, Musée du Louvre, Paris
Les Ambassadeurs de Hans Holbein (1498-1543), tableau peint
alors que celui-ci était à la cour d’Henri VIII, en Angleterre, caractérise
d’une autre manière cette sophistication croissante de l’art.
Hans Holbein, Les ambassadeurs, 1533, National Gallery, Londres
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Les grandes figures du monde moderne
Signalons d’abord l’anamorphose, cette projection déformée
réalisée probablement grâce à un miroir cylindrique, qui occupe le
centre bas du tableau : ce crâne, que seuls les initiés (en adoptant un
point de vue particulier) peuvent voir, est aussi la figure emblématique,
la marque par laquelle le peintre montre sa maîtrise technique, sa
maîtrise des techniques de projections géométriques. Mais c’est aussi
une « nature morte », le centre du tableau est occupé par des objets qui
peuvent, chacun, être traité comme autant de motifs iconographiques
et porter de ce fait une signification particulière. Le tableau devint ainsi
un véritable rébus en même temps qu’une méditation où l’on pourrait
se perdre…
Le statut de l’artiste
La maîtrise et la possession de ses idées avant de devenir maître
du monde ! Tel devait être la devise de ces nouveaux acteurs sur la scène
de l’histoire. Artistes, savants, génies : les humanistes-ingénieurs qui,
de Brunelleschi à Léonard, forment comme une nouvelle sorte
d’expérimentateurs, avides de connaître le monde, de le décrire mais
aussi de profiter directement de cette connaissance en créant de
nouvelles machines, utiles ou spectaculaires. Aujourd’hui l’on
qualifierait d’innovations les fruits de cette quête de la nouveauté, de
cette recherche incessante. Mais le contexte culturel était très différent.
Pensons d’abord à Brunelleschi qui, pour tenter de mettre à l’épreuve
un nouveau mode de propulsion des bateaux sur l’Arno, réclame au
préalable, pour cette invention qui sera sans doute profitable, le
privilège d’être le seul à pouvoir en tirer profit. Il contribue ainsi à
inventer la propriété intellectuelle. C’est ce même Brunelleschi que
l’histoire retiendra pour avoir conçu et réalisé le dôme de la cathédrale
de Florence. C’est un architecte dont on connaît le nom, singulièrement, alors que les maîtres d’œuvre des cathédrales gothiques ont
sombré dans l’oubli ou ont été amalgamés au grand œuvre collectif.
L’innovation devient la marque de l’individu exceptionnel. Dans un
climat où l’ingéniosité est recherchée et protégée même, les artistes
sont de moins en moins anonymes ; ils signent, ils revendiquent la
paternité de leurs œuvres. Ils en deviennent les auteurs et, en
s’associant à des commentateurs (des critiques...), font école. Certains
d’entre eux sont présentés comme des génies qui concurrencent les
demi-dieux de la mythologie romaine.
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L’idéal de beauté
C’est dans ce contexte que des humanistes polyvalents comme
Brunelleschi participèrent au développement de ce que nous
appellerions aujourd’hui le domaine de la propriété intellectuelle. De
même c’est à cette époque que Venise, véritable métropole commerciale, institua la première législation sur les brevets pour remplacer
la pratique des privilèges accordés exceptionnellement à des
inventeurs.
La figure de Léonard de Vinci nous rappelle cependant qu’il ne
faut pas moderniser indûment cette période. Car si Léonard est comme
la figure emblématique de l’artiste et du génie polymorphe, il en montre
aussi les limites : ses carnets de notes sont codés, de plus ils sont écrits
à l’envers, ce qui rend leur lecture impossible sans un déchiffrement
préalable. Certes l’on peut y voir des préoccupations qui relèvent encore
là de la propriété intellectuelle mais l’on peut aussi y voir la
manifestation intériorisée d’une méfiance face à la diffusion des idées,
méfiance justifiée par l’intolérance des religieux face à l’esprit de
découverte tout au long du XVIe siècle, intolérance renforcée par le
Concile de Trente et qui devait perdurer au moins jusqu’à l’époque de
Galilée.
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Les grandes figures du monde moderne
L’humanisme créatif s’incarne dans de nouvelles professions : des
peintres, des ingénieurs, des architectes aussi.
Voici comment l’un d’eux décrit pour de futurs clients les qualités
qu’ils devraient rechercher chez l’artiste, l’architecte en l’occurrence.
Il faut remarquer la distance avec les maîtres de l’Antiquité car si l’on
cite Vitruve c’est pour s’en éloigner en prenant appui déjà sur Alberti,
théoricien italien du siècle précédent.
Après avoir averti ceux qui veulent édifier, quelles choses ils doivent
considérer et prévoir devant que mettre la main en œuvre, et aussi après
leur avoir fait reconnaître la situation et assiette du lieu où ils doivent
bâtir, afin qu’ils se sachent garder des choses incommodes et s’aider
Pieter Brueghel, L’artiste et le client, 1565, Albertina, Vienne
des bonnes et commodes, conséquemment je les veux ici avertir qu’ils
doivent choisir un sage, docte, et expert architecte, qui ne soit du tout
ignorant de la philosophie, des mathématiques, ni aussi des histoires,
pour rendre raison de ce qu’il fait, et connaître les causes et progrès
d’une chaque chose appartenant à l’architecture, et aussi qui entende
la portraiture, pour faire voir et donner à entendre à un chacun, par
figures et dessins, les œuvres qu’il aura à faire.
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L’idéal de beauté
Semblablement qu’il connaisse la perspective, tant pour faire ses
portraits que pour savoir donner la clarté aux édifices, selon les régions
et naturel de chacune partie d’iceux. Aucuns on dit qu’il doit aussi
entendre la médecine, mais je ne trouve point que cela lui soit fort
requis, comme nous l’avons discouru en l’épître adressée aux lecteurs,
mais bien plutôt qu’il connaisse les règles de philosophie naturelle, pour
savoir discerner la nature des lieux, les parties du monde, la qualité des
eaux, les régions, assiettes et propriétés des vents, la bonté des bois,
des sables, et le naturel des pierres, afin de les faire tirer en temps propre,
et connaître celles qui sont bonnes à faire la chaux et la tuile, et comme
il faut mettre le tout en œuvre.
Il y en a aussi qui disent être nécessaire que l’architecte soit jurisconsulte
ou, si vous voulez, qu’il sache les lois, à cause qu’il advient souvent qu’en
bâtissant se peuvent mouvoir procès : mais cela à mon jugement ne lui
est requis, quelque chose qu’en écrive Vitruve ; car il suffit qu’il entende
les ordonnances et coutumes des lieux pour faire son rapport au juge,
qui puis en ordonne selon les lois, au profit de ceux à qui il appartient.
Aussi telle charge est plus propre aux maîtres maçons et officiers
(comme sont les maîtres des œuvres et maîtres jurés des rois et
seigneurs) qu’à l’architecte, qui a autre profession et beaucoup plus
grande et honorable : jaçoit qu’il en peut aussi parler quand il y est
appelé. Ledit Vitruve veut d’abondant que l’architecte soit grand
rhétoricien, pour savoir bien déduire et rapporter éloquemment son
entreprise devant les seigneurs et gens qui le mettent en besogne et
l’emploient. Je suis d’opinion, avec Léon Baptiste Alberti, que cela ne
lui est pas nécessaire, car il suffit qu’il donne seulement son conseil, et
montre sa diligence naïvement et dise ce qui sera expédient pour
parvenir à son entreprise et intention.
Philibert de l’Orme, 1561
Ce que révèle alors l’étude de la carrière des artistes c’est que ceuxci deviennent comme des professionnels de la commandite. Le marché
de l’art se développe et les artistes ne sont plus confinés à honorer qu’un
seul protecteur. Leurs ateliers s’ouvrent, ils y acceptent les commandes
tout en y faisant travailler des apprentis. Ils transmettent ainsi leur style,
leur manière. D’autre part, les commandes ne sont plus le seul fait d’une
aristocratie de robe ou d’épée ; elles ne visent pas que la réalisation
d’œuvres exposées au public. Il existe de plus en plus de collectionneurs,
riches marchands, banquiers ou artisans. Cela entraîne une privatisation
de l’art : autant les thèmes que les manières répondent à des goûts
particuliers et participent à des jeux de société où ce qui est montré
révèle le raffinement du commanditaire. L’œuvre demeure énigmatique
hors de ce contexte.
François Blanchard
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LE MOBILIER RENAISSANCE - EN FLANDRE,
EN ESPAGNE, EN ANGLETERRE
http://www.atlantic-line.fr/~albedo/sylvain/hist_art/
ha20.htm
Early Modern French Literature
http://globegate.utm.edu/french/lit/early.modern.html
La Littérature de la Renaissance française
http://www.furman.edu/~pecoy/projects/renaiss/
Poésie française de La Renaissance au début du
XXe siècle
http://poesie.webnet.fr/
Partition de neumes
http://www.oricom.ca/eden/voixmedievales/
entendez.html
Instruments
http://www.s-hamilton.k12.ia.us/antiqua/instrumt.html
Réflexions philosophiques sur l’interprétation
musicale
http://www.intr.net/bleissa/lists/authentc.html
La Renaissance -Les médias
http://www.malexism.com/medias/humanistique.html
Site du Vatican - Commentaires et illustrations sur
l’humanisme et sur la théologie aux XVe et XVIe
siècles
http://metalab.unc.edu/expo/vatican.exhibit/exhibit/chumanism/Humanism.html
La Renaissance : humanisme et beaux châteaux
http://www.jalons.fr/histoire/renaissance.html
Renaissance Costume Guide
http://www.renfaire.com/Costume/costume-guide.html
La Renaissance - Web Museum Paris
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La peinture de la Renaissance italienne
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Peinture italienne
http://www.mlink.net/~sergero/menu.html
Renaissance Art in Early 15th Century Italy
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Renaissance Sculpture, Architecture, and Painting
http://www.arth.upenn.edu/102/lecture/lecture06.html
The High Renaissance in Florence and Rome
http://www.arth.upenn.edu/102/lecture/lecture05.html
Nina Joblon : Power, Illusion, and the Technology of Perspective in the Renaissance
http://www.stanford.edu/group/STS/techne5.shtml
Sandro Botticelli
http://sgwww.epfl.ch/cgi-bin/
Webdriver?MItab=sandro&MIcol=object&MIval=frame0
&CODEHTML2=frontispice&CODEHTML1=allegory&BABEL=french
Caravaggio, un coup de foudre
http://persoweb.francenet.fr/~olamb/
Journal_Lamb_Caravage.html
Michel-Ange - Le plafond de la chapelle Sixtine
http://www.christusrex.org/www1/sistine/0B-Ceiling.jpg
Léonard De Vinci - Le génie de la Renaissance
http://pages.infinit.net/cyrus/vinci/
Pierre de Ronsard (château de la Possonière,
Couture-sur-Loir, 1524 - Saint-Cosme-en-l’Isle,
près de Tour, 1585) Poète français
http://www.geocities.com/~publius_hist/ronsard.htm
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