Médecine dentaire
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N° 27 PRINTEMPS 2009 Belgique - België P.P. - P.B. B - 018 Autorisation de fermeture B/018 Trimestriel (printemps, été, automne, hiver) – Expéditeur : CHU de Liège – Editeur responsable : Pol Louis, av. de l’Hôpital B35, 4000 Liège – Bureau de dépôt : Liège X – Agrément n° P801120 Bulletin d’information des médecins du Centre Hospitalier Universitaire de Liège la révolution des traitements conservateurs > page 6 Un label de qualité pour les labos du CHU Mieux gérer l’analgésie postopératoire > page 5 > page 12 page 2 chuchotis Médecine dentaire 1 N° 27 PRINTEMPS 2009 éditorial En bref Le printemps est à nos portes. Les primevères sortent le 4 L’actualité du CHU de Liège en un coup d’œil : les nouveautés médicales, les progrès de la recherche et quelques autres nouvelles de l’hôpital. Who’s who Découvrez le visage des 28 chefs de clinique nommés au cours des derniers mois. bout du nez. Il semble que l’hiver enneigé et si long se dé cide enfin à lâcher prise. Cette période de renouveau devrait éveiller espoir et confiance. Mais on en est loin. A l’effondre ment des places financières fait suite une récession écono mique dont on nous dit qu’elle sera longue ; le déficit budgé taire en 2009 dépassera les 10 milliards d’€ ; les problèmes qui fâchent la Belgique fédérale sont mis au frigo, pour mieux rejaillir (?). Bref, le climat est à une profonde morosité. Et pourtant, il y a dans notre pays, dans notre région lié 5 geoise, des institutions et des structures qui continuent, dans Qualité Trois des laboratoires du CHU de Liège viennent d’être accrédités selon la norme européenne ISO 15189. ce contexte défavorable, à avoir des projets, à les concréti ser, à aller de l’avant. C’est le cas du CHU de Liège. Le numéro précédent évoquait l’avancement de notre projet stratégique COS, dans le cadre du redéploiement multisite. 6 Le bilan de ce plan de complémentarité institutionnelle était Dossier Médecine dentaire 13 11 Les prothèses, implants, appareillages orthodontiques, soins des gencives et traitements des caries ont énormément évolué ces dernières années. Coup de projecteur sur les fleurons de la dentisterie d’aujourd’hui. page 3 chuchotis 2 0 e a nni v ers a ire sommaire Actualité justement au menu du séminaire qui a réuni à Durbuy tous les chefs de service, un week-end de janvier. Les progrès de l’informatique hospitalière y ont également été abordés, ainsi que plusieurs nouveaux projets stratégiques qui témoignent de la vitalité du CHU de Liège. Nous aurons l’occasion de vous en reparler. Autre preuve du dynamisme de notre CHU, 28 médecins ont été désignés chefs de clinique. Ils apportent un sang jeune, des idées et des compétences nouvelles dans notre institu tion. Dans le contexte de raréfaction de l’offre médicale, il est réconfortant de noter que beaucoup de jeunes croient Hypertension. Un consensus se dégage pour la promotion de l’automesure de la tension, en complément de l’examen réalisé par le médecin. en l’avenir de notre institution et considèrent qu’ils peuvent Analgésie. Comment optimiser la gestion des douleurs postopératoires et éviter leur évolution en douleurs chroniques ? mise sur l’hyperspécialisation et la complémentarité. Vous Recherche Des recherches épidémiologiques liégeoises débouchent sur une meilleure appréciation de la prévalence des adénomes hypophysaires, ainsi que sur l’identification d’une nouvelle variante familiale de la maladie. s’y épanouir. Le dossier principal de ce numéro est consacré à la dentis terie. Réparti sur quatre sites, le département de dentisterie considérerez sans doute la dentisterie avec un autre œil et surtout un autre sourire. Je vous souhaite une excellente lecture. Pr. Christian Bouffioux directeur médical directeur de la rédaction Bulletin d’information des médecins du Centre Hospitalier Universitaire de Liège éditeur responsable : P. Louis, Administrateur délégué du CHU (04 366 70 00), av. de l'Hôpital 13 bât. B35 - 4000 Liège - Directeur de la rédaction : Pr. C. Bouffioux Conseil éditorial : A. Bodson, C. Bouffioux, J.P. Delporte, Q. Désiron, V. D’Orio, C. Faidherbe, D. Giet, J.M. Krzesinski, M. Lamy, P. Louis, M. Malaise, G. Pierard Coordination, rédaction et réalisation : A. Pironet ([email protected], 0479 87 30 87) - Conception graphique : R. Gray - Photos : C. Ernotte et M. Mathys (CHU), J.-M. Clajot. http://www.chuliege.be l’actualité EN BREF Coup d’œil sur du CHU Plan cancer Dépistage du cancer colorectal Les cinq projets de recherche translationnelle présentés par le CHU de Liège dans le cadre du Plan national cancer ont été retenus par le jury d’experts réuni par la ministre fédérale de la santé publique, Laurette Onkelinx. Comme nous vous l’annoncions Répartition des cancers colorectaux dans notre numéro précédent, un en fonction du niveau de risque programme de dépistage de masse du cancer colorectal vient de débuter à l’initiative de la Communauté française. Il s’adresse à près d’un million de personnes de 50 à 74 ans. Le Pr. Christian Montrieux, du département de médecine générale de l’ULg, et le Dr Marc Polus, gastroentérologue au CHU de Liège, figurent parmi les coordinateurs de cet ambitieux projet visant à diminuer la mortalité spécifique du cancer colorectal grâce à un diagnostic des lésions à un stade précoce : « Avec une incidence de plus de 7 500 nouveaux cas par an et un taux de mortalité élevé (40 à 50 % des patients décèdent dans les cinq ans), le cancer colorectal représente un véritable problème de santé publique. Son dépistage généralisé est une nécessité car 77 % des cancers du colon sont observés dans la population à risque moyen, c’està-dire des hommes et des femmes asymptomatiques et sans antécédents personnels ni familiaux. » Le dépistage (recherche de sang occulte dans les selles et coloscopie en cas de positivité, voire coloscopie d’emblée chez les patients à haut risque ou symptomatiques) s’appuie très largement sur l’adhésion des médecins généralistes. Il sera répété tous les deux ans. Les chercheurs liégeois s’intéresseront plus particulièrement aux thèmes suivants : nla mise au point d’un traitement ciblé et individualisé d’une forme de cancer du cerveau, le glioblastome (V. Bours, P. Robe), nle développement d’une approche thérapeutique individualisée du cancer du col de l’utérus, basée sur une meilleure évaluation pronostique (F. Kridelka, J.-M. Foidart), nl’évaluation de l’angiogenèse tumorale par imagerie fonctionnelle PET-CT (R. Hustinx), nla caractérisation de biomarqueurs moléculaires pertinents pour le diagnostic et le pronostic des lymphomes à cellules T périphériques (L. de Leval, G. Fillet), nl’utilisation de cellules souches mésenchymateuses pour prévenir et traiter les complications des greffes allogéniques de cellules souches hématopoïétiques (Y. Beguin). www.cancerintestin.be Mélanomes : miser sur l’auto-dépistage Le lundi 11 mai, les dermatologues du CHU de Liège participeront dans la verrière du Sart Tilman à une action de sensibilisation à l’importance de l’auto-examen pour le dépistage précoce du mélanome et des autres cancers de la peau. Comme chaque année au moment de la campagne européenne d’EuroMelanoma, ils proposeront gratuitement des examens cutanés (sur rendez-vous), mais en insistant plus particulièrement sur les dangers présentés par les mélanomes à croissance rapide, à risque métastatique élevé et peu accessibles aux campagnes de dépistage. Deux formes majeures de mélanomes sont actuellement distinguées (cf. CHUchotis n° 26, p. 16) : nLes deux tiers des mélanomes sont caractérisés par une croissance lente. Ils sont identifiables à l’aide des traditionnels critères ABCDE (asymétrie, bords irréguliers, couleur hétérogène, diamètre ≥ 6 mm, évolution de la lésion dans le temps). nLes mélanomes à croissance rapide, dont l’épaisseur augmente de 0,5 mm par mois, échappent aux critères ABCDE et sont donc moins facilement dépistés. Il est indispensable d’insister sur l’apprentissage de l’auto-examen régulier pour détecter à temps toute modification rapide des lésions pigmentaires, nécessitant un rendez-vous rapide chez un dermatologue. L’objectif est d’identifier le mélanome lorsqu’il a la taille d’un grain de tapioca, avant qu’il évolue en nodule épais au pronostic sombre. page 1 chuchotis Au total, 29 projets (sur les 61 présentés) vont bénéficier conjointement d’un financement de 22 millions d’euros sur deux ans. Destinés à faire bénéficier, le plus rapidement possible, les patients cancéreux des dernières découvertes scientifiques, ces 29 projets sont répartis entre trois grands thèmes : la biologie moléculaire, la pharmacogénomique et l’imagerie fonctionnelle. EN BREF Coup d’œil sur l’actualité du CHU Sclérose en plaques Un projet de recherche clinique visant à évaluer l’efficacité de l’accompagnement personnalisé proposé par le programme BESEP (BE your Sporting hEalth Partner) aux personnes souffrant de sclérose en plaques vient de débuter au CHU de Liège sous la direction du Dr Shibeshih Belachew (service de neurologie) et du Dr Frédéric Douchamps (service de médecine physique). Ce programme pilote est basé sur le constat suivant : maintenir une activité physique bien gérée et encadrée contribue à préserver – voire à améliorer – le niveau de performance physique des patients, et par là leur autonomie et leur bien-être. Les résultats préliminaires sont encourageants, tant pour les capacités motrices que pour la fatigue chronique, la forme psychologique et la qualité de vie. Plusieurs « besepers » participeront d’ailleurs le 19 avril prochain au jogging urbain « Viva Liège », une manifestation sportive organisée par Urban Tour. Les résultats observés chez les patients atteints de sclérose en plaques devraient être applicables à d’autres affections chroniques limitant la mobilité et l’autonomie, comme la maladie de Parkinson, le syndrome de fatigue chronique ou la fibromyalgie. Le programme de soins BESEP n’est actif que grâce à une asbl du même nom. Cette association de patients s’est chargée de récolter les fonds privés nécessaires. Pour continuer à se développer et pour optimaliser son encadrement multidisciplinaire, BESEP espère bénéficier bientôt de l’appui des pouvoirs publics. Depuis son lancement en 2007, plusieurs autres hôpitaux belges se sont ralliés à l’initiative liégeoise. www.besep.be - www.urbantour.be Art africain page 2 chuchotis Du 2 au 29 mai, plusieurs dizaines de masques africains seront exposés dans la verrière sud (site du Sart Tilman) à l’initiative du Pr. Albert Beckers, chef du service d’endocrinologie du CHU de Liège. Ces très beaux masques font partie d’une collection exceptionnelle de plus d’un millier de pièces, toutes glanées en Afrique par le Pr. Michel Hermans, endocrinologue à SaintLuc et passionné d’anthropologie. Informations : 04 366 74 68 Fonds Léon Fredericq Au cours de la traditionnelle « Soirée Projets » du Fonds Léon Fredericq, qui s’est tenue le 21 novembre 2008, une cinquantaine de jeunes chercheurs de l’ULg et du CHU ont reçu une bourse destinée à promouvoir l’excellence dans la recherche biomédicale et les soins de santé. Depuis sa création il y a 21 ans déjà, le Fonds a distribué près de quatre millions d’euros et soutenu plus de 300 scientifiques liégeois. Pr. Faymonville Le choix de la Reine Début janvier, la Reine Fabiola a été brièvement hospitalisée au CHU de Liège pour une intervention réalisée sous hypnose. Largement commenté par la presse malgré la grande discrétion qui a entouré le séjour liégeois de la Reine Fabiola, ce choix a mis en lumière l’un des fleurons du CHU, le recours à l’hypnose lors de certaines interventions chirurgicales. C’est au début des années 90 que la Pr. MarieElisabeth Faymonville a commencé à utiliser l’hypnosédation comme alternative à l’anesthésie générale. Aujourd’hui, plusieurs centaines d’anesthésistes du monde entier ont été formés à l’hypnosédation par la pionnière liégeoise et quelque 6 500 patients du CHU ont bénéficié de cette méthode « douce », le plus souvent pour des opérations de chirurgie plastique, ophtalmologique ou endocrinienne. Plusieurs études scientifiques ont en outre objectivé les mécanismes d’action de l’hypnose sur la perception de la douleur et démontré les nombreux avantages de l’hypnosédation pour le patient : meilleure stabilité hémodynamique, moins de douleur post-opératoire, moins d’anxiété, moins de nausées et récupération plus rapide. Last but not least, l’hypnosédation permet d’éviter les effets secondaires d’une anesthésie générale, trop risquée pour certains patients. EN BREF Mousquetaires solidaires En septembre dernier, les participants du « Tournoi de golf des Mousquetaires » de Gomzé ont permis de réunir environ 4 000 euros, offerts au laboratoire de thérapie cellulaire et génique du CHU de Liège pour soutenir ses activités en matière de production de cellules souches mésenchymateuses. Issues de donneurs sains volontaires, elles interviennent dans la prévention et le traitement des complications de la greffe de cellules souches hématopoïétiques. Le laboratoire liégeois a créé la seule banque belge de cellules souches mésenchymateuses et alimente les différents Des mains en or Se désinfecter et/ou se laver les mains avant et après tout contact avec un patient, porter des gants pour chaque soin entraînant un risque de contact avec des liquides biologiques, voilà les règles d’or pour diminuer de manière draconienne la transmission des infections nosocomiales. Pour la troisième édition de la campagne nationale de sensibilisation « Vous êtes en de bonnes mains », l’équipe d’hygiène hospitalière du CHU de Liège a choisi d’intégrer les polycliniques dans la démarche. Les médecins, les prestataires de soins et les patients seront informés des bonnes pratiques en matière d’hygiène des mains, à l’aide notamment d’affiches et de dépliants informatifs. services d’hématologie du pays. Prévention des anévrismes Depuis le 1er janvier, la télévision est gratuite pour les patients hospitalisés sur tous les sites du CHU de Liège (Sart Tilman, N.-D. des Bruyères, Esneux). Plusieurs spécialistes des anévrismes, dont le Pr. Natzi Sakalihasan (service de chirurgie cardiovasculaire du CHU de Liège), ont mis en commun leurs résultats afin de constituer la plus grande série mondiale de cas familiaux jamais établie. Cette analyse à grande échelle leur a permis d’identifier une même particularité génétique dans des cas d’infarctus du myocarde, d’anévrisme de l’aorte abdominale et d’anévrisme intracrânien : une séquence spécifique sur le gène 9p21. « Cette découverte devrait nous conduire, d’ici dix à quinze ans, à dépister très tôt les patients à risque. Nous pourrons alors les traiter préventivement, afin qu’ils ne développent pas d’anévrisme », estime le Pr. Sakalihasan. Cette étude a été publiée dans le prestigieux Nature Genetics. Obésité en ligne Suis-je en surpoids ou obèse ? Comment traiter l’obésité ? Quand une solution chirurgicale peut-elle être envisagée ? Quels en sont les risques ? Et les répercussions sur la façon de s’alimenter ? Mis en ligne par l’équipe du centre interdisciplinaire de recherche et de traitement de l’obésité, un site internet clair et bien pensé répond à ces questions et à bien d’autres (www.surgery.be/obesity). Il propose également le programme du « Gastroclub », dédié au partage d’expériences entre patients. Le centre regroupe des intervenants de nombreux services du CHU de Liège : chirurgie abdominale, anesthésie-réanimation, diabétologie, nutrition et maladies métaboliques, endocrinologie, diététique, psychologie, gastroentérologie, imagerie et pédiatrie. ImagéSanté La 9e édition du festival international ImagéSanté se déroulera du 15 au 20 mars 2010. L’appel aux films est lancé dès ce 16 mars à 20h au cinéma le Parc (Droixhe), à l’occasion de la soirée de découverte du festival. Quelques films primés lors de la dernière édition sont au programme, ainsi que la première de « Rachel getting married » de Jonathan Demme, avec Anne Hathaway et Debra Winger. www.imagesante.org page 3 chuchotis Plus de confort WHO’S WHO Who’s who Ces derniers mois, 28 médecins ont reçu le titre de chef de clinique confirmant leur engagement dans le cadre médical du CHU de Liège. Oreste Battisti pédiatrie Aude Beliard gynécologie-obstétrique Daniela Betea endocrinologie Christophe Bonnet hématologie clinique Edmond Brasseur urgences Jo Caers thérapie cellulaire Frédéric Chantraine gynécologie-obstétrique Joëlle Collignon oncologie médicale François-Guillaume Debray, génétique Nancy Detrembleur anatomie pathologique Stephanie Gaillez génétique Christine Gennigens oncologie médicale Sybilla Hick urgences Séverine Lauwick anesthésie-réanimation Nathalie Layios soins intensifs Ilias Mamalis pédiatrie Philippe Martinive radiothérapie Anne-Simone Parent pédiatrie Sophie Perrier d’Hauterive, gyn.-obst. Patricia Piront gastroent.-hépatologie Andrée Rorive oncologie médicale Isabelle Salvador urgences Gabrielle Scantamburlo psychiatrie-psychol. méd. Thibault Senterre néonatologie Daniel Van Daele gastroent.-hépatologie Xavier Werenne radiothérapie Patricia Xhignesse néphrologie page 4 chuchotis Sophie Allepaerts gériatrie L A B O R AT O I R E S La qualité, entre rigueur et transparence Trois des laboratoires du CHU de Liège viennent d’être accrédités selon la norme européenne ISO 15189. Ils sont parmi les premiers en Communauté française à décrocher ce précieux label de qualité. Un état d’esprit Cette reconnaissance officielle concrétise un travail long de plusieurs années. Long et minutieux : le moindre geste doit être enregistré, tracé, justifié. C’est le service de chimie médicale qui a ouvert la voie, avec l’accréditation ISO 45001 obtenue en 2000 pour une large part des analyses effectuées. La démarche qualité s’est ensuite étendue à deux autres services, l’hématologie biologique et la toxicologie clinique. Actuellement, plus de 250 tests sont accrédités et la liste s’accroît chaque année. « La norme ISO 15189 est – et de loin – la norme la plus exigeante que nous connaissions », estime le Pr. Jean-Paul Chapelle, chef du service de chimie médicale et pré- sident du département de biologie clinique. « Avec elle, c’est toute l’organisation des laboratoires qui bénéficie d’une reconnaissance de qualité, depuis le prélèvement sanguin jusqu’à la validation des résultats des analyses, en passant par la gestion informatisée des données, la formation du personnel, la validation des techniques, etc. Lors de chaque nouvel audit, nous constatons une augmentation du degré d’exigence des auditeurs, tous experts dans le domaine de la biologie clinique. Et nous y répondons en améliorant encore nos performances. » Une norme ambitieuse La grande nouveauté de l’accréditation ISO 15189 réside dans l’importance accordée aux phases pré-analytique et post-analytique. Pour bénéficier du précieux label de qualité, les laboratoires sont tenus non seulement d’améliorer sans cesse les procédures d’analyses, mais également d’intervenir en amont (au moment du prélèvement, du transport, de la conservation et de la réception des échantillons) et en aval (au moment de la transmission des résultats et de leur interprétation par le médecin). Les biologistes voient donc leur métier évoluer, comme le souligne Etienne Cavalier, coordinateur qualité pour le département de biologie clinique : « D’une part, nous devons à présent mener des actions préventives en salle afin d’améliorer la qualité des prélèvements. D’autre part, la norme ISO 15189 Les laboratoires du CHU de Liège La biologie clinique : 4 services www.chuliege.be/biologieclinique n chimie médicale n hématologie biologique et immuno-hématologie n toxicologie clinique n microbiologie La génétique : 1 service n génétique L’anatomie pathologique : 2 services n anatomie pathologique n dermatopathologie Plusieurs centres de prélèvement accueillent les patients sans rendez-vous : n Sart Tilman (bloc central, niveau -2, fléchage 23) : 04 366 83 17 n Bruyères (rez-de-chaussée, aile D) : 04 367 96 46 n Esneux (rez-de-chaussée) : 04 380 92 15 n polyclinique Brull (14e étage) : 04 270 30 09 n Ougrée (Esplanade de la Mairie 1) : 04 336 68 67 renforce notre rôle de conseil auprès des médecins. » Dans le secteur des laboratoires d’analyses médicales, la norme ISO 15189 s’impose peu à peu sur le plan européen. En Belgique, elle deviendra d’ici peu obligatoire pour une large palette d’activités. Au CHU de Liège, les prochains à entrer dans la course seront les laboratoires de biologie moléculaire, de génétique et d’anatomopathologie. Grâce à l’expérience acquise par les trois pionniers du département de biologie clinique, ils bénéficient déjà d’une solide avance. Pr. J.-P. Chapelle Chef du service de chimie médicale 04 366 88 22 jp.chapelle @chu.ulg.ac.be page 5 chuchotis De la fabrication de machines à coudre à la spécification des nanomatériaux, du vocabulaire des technologies de l’information aux tests de résistance au vent, plus de 17 000 normes ont été élaborées par l’Organisation internationale de normalisation, l’ISO. L’une d’entre elles, la norme ISO 15189, spécifie les exigences de qualité et de compétences propres aux laboratoires d’analyses médicales. C’est celle que les équipes de chimie médicale, d’hématologie biologique et de toxicologie clinique ont scrupuleusement respectée pour passer avec brio les longues et difficiles procédures d’audit imposées par l’organisme accréditeur belge BELAC. DOSSIER Pour sourire de toutes ses dents Vous grincez des dents à la simple pensée d’une visite chez le den tiste ? C’est peut-être parce que vous ne savez pas à quel point la « dentisterie de papa » a évolué ces dernières années. Moins invasi ves et beaucoup plus performantes, les techniques d’aujourd’hui vont vous faire retrouver le sourire. Pr. M. Lamy Prothèse amovible 04 270 31 13 marc.lamy @chu.ulg.ac.be Qu’il s’agisse de prothèses, d’implants, d’appareillages orthodontiques, de dévitalisation, de soin des gencives ou du « simple » traitement des caries, la médecine dentaire a tellement évolué depuis quelques années qu’à moins d’être vous-même un patient assidu des dentistes, il est probable que la lecture de ce dossier vous fera envisager d’un œil neuf le monde trop souvent méconnu des pathologies buccales. Hyperspécialisation et intégration Pr. A. Vanheusden Prothèse fixée 04 270 31 02 alain.vanheusden @chu.ulg.ac.be Pr. M. Limme Orthodontie et pédodontie 04 270 31 28 page 6 chuchotis michel.limme @chu.ulg.ac.be Avec plus de 100 000 rendez-vous en 2008, le département de dentisterie du CHU de Liège se porte à merveille. Ses consultations spécialisées en orthodontie, en parodontologie, en endodontie, en implantologie, en pédodontie, en esthétique ou dans le traitement des problèmes d’occlusion attirent de nombreux patients, souvent référés par les dentistes privés. « A l’heure actuelle, un dentiste ne peut plus être compétent dans tous les domaines », explique le Pr. Marc Lamy, président du département de dentisterie. « La dentisterie traverse la même évolution que celle précédemment connue par la médecine, avec l’émergence de diverses disciplines. Même si la plupart de nos spécialités ne sont pas encore reconnues comme telles par l’Inami, les domaines de pointe exigent un équipement et des compétences très spécifiques, en évolution permanente. » Deux fois par semaine, les cinq chefs de service et leurs assistants se réunissent pour déterminer les plans de traitement les plus adéquats. Conjuguée à l’hyperspécialisation, cette prise en charge pluridisciplinaire est l’une des grandes forces de l’école liégeoise et explique en partie l’excellente réputation qu’elle se forge en Belgique et à l’étranger dans le domaine de la réhabilitation orale. « Nos dentistes sont formés à prendre en charge le patient dans sa globalité et à travailler en synergie avec leurs confrères », précise Marc Lamy. « Quel que soit le service auquel il s’adresse, le patient bénéficie ainsi de l’ensemble des compétences nécessaires. » Le dossier médical informatisé participe évidemment à la qualité de cette prise en charge intégrée, de même que la réunion en un même endroit de l’ensemble des praticiens : « Dans beaucoup de cas, il suffit de passer la tête dans le cabinet d’à côté pour demander un avis autorisé. Nous envisageons d’ailleurs de renforcer encore cette collaboration en instituant des plages horaires consacrées aux consultations pluridisciplinaires », ajoute le Pr. Alain Vanheusden, chef du service de prothèse fixée. L’ e s s o r d e l a m é d e c i n e d e n t a i r e DOSSIER > Les pathologies orales peuvent avoir des répercussions désastreuses sur la santé, par exemple en favorisant l’apparition d’infections pulmonaires, de pathologies cardiovasculaires, de dénutrition ou en aggravant les effets du diabète. A l’inverse, certaines maladies peuvent entraîner l’apparition de caries ou de maladies parodontales. Les patients cancéreux traités par chimiothérapie ou par radiothérapie doivent par exemple bénéficier d’un suivi attentif avant, pendant et après leur traitement. Le traitement des désordres temporo-mandibulaires est lui aussi exemplatif de l’importance d’une collaboration étroite entre le dentiste, le médecin généraliste et plusieurs autres praticiens, du neurologue à l’ORL, en passant par le kinésithérapeute et l’ostéopathe. Un patient qui se plaint de maux de tête matinaux souffre-t-il de migraines ? Ou grince-t-il tout simplement des dents pendant son sommeil ? Nombre de personnes souffrant de douleurs articulaires ou musculaires au niveau de la tête, de la nuque ou du dos – et même des personnes empoisonnées par des acouphènes – se retrouvent ainsi, à leur grande surprise, dans le fauteuil du dentiste. « Les problèmes d’occlusion sont parfois extrêmement complexes, avec une origine multifactorielle », met en garde Marc Lamy. « Les traitements que nous proposons doivent donc être peu invasifs. Pour rééquilibrer les contacts entre les dents, nous privilégierons par exemple le port d’une gouttière plutôt que d’envisager d’emblée des traitements plus lourds de réhabilitation orale. » L’institut de dentisterie Au CHU de Liège, le département de dentisterie compte cinq services et propose des consultations sur quatre sites : la polyclinique Brull, qui regroupe la majorité des fauteuils, le Sart Tilman, Notre-Dame des Bruyères et Esneux. Si les textes légaux ne reconnaissent encore, à l’heure actuelle, que deux spécialisations en sus de la dentisterie générale – l’orthodontie et la parodontologie –, l’évolution des connaissances et les progrès technologiques amènent inévitablement les praticiens à se consacrer plus particulièrement à un domaine de prédilection. En dentisterie générale, la Pr. Sabine Geerts dirige ainsi le service de dentisterie conservatrice (traitement médico-préventif de la carie, endodontie) ; le Pr. Alain Vanheusden celui des prothèses fixées (ponts et couronnes, facettes céramiques) ; le Pr. Marc Lamy celui des prothèses amovibles (son champ d’action s’étend aux problèmes d’occlusion, aux prothèses sur implants et à la gérodontologie). Le Pr. Michel Limme, qui dirige le service d’orthodontie et pédodontie, s’intéresse notamment aux apnées obstructives du sommeil. Le Pr. Eric Rompen, chef du service de médecine dentaire au Sart Tilman, est spécialisé en parodontologie et en chirurgie buccodentaire (implantologie). Cinq années d’études sont nécessaires pour obtenir le master en sciences dentaires, trois bacs et deux masters, plus une sixième année consacrée à l’apprentissage de la pratique autonome chez un maître de stage. La spécialisation en parodontologie compte trois années d’études supplémentaires, celle en orthodontie quatre années. Rendez-vous : à la polyclinique Brull 04 270 31 00 (quai Godefroid Kurth 45, 4020 Liège), au Sart Tilman 04 366 76 54. Enfin, certaines dysmorphoses dento-faciales prédisposent au syndrome des apnées obstructives du sommeil, dont les conséquences en termes, notamment, de surcharge cardiovasculaire mortelle sont aujourd’hui bien connues. Le service d’orthodontie dirigé par le Pr. Michel Limme collabore depuis une quinzaine d’années avec le spécialiste de ce syndrome, le Pr. Robert Poirrier, neurologue responsable du centre du sommeil du CHU de Liège, pour mettre au point un logiciel d’aide au diagnostic sur la base d’analyses céphalométriques, mais également pour intervenir dans le plan de traitement. Le port nocturne d’une orthèse de propulsion mandibulaire diminue en effet le risque d’apnées en ouvrant les voies aériennes supérieures ; dans un certain nombre de cas, un traitement orthodontico-chirurgical d’avancée de la mâchoire est proposé en collaboration avec un chirurgien maxillo-facial. Pr. S. Geerts Dentisterie conservatrice 04 270 30 16 sabine.geerts @chu.ulg.ac.be Pr. E. Rompen Médecine dentaire 04 366 82 90 eric.rompen @chu.ulg.ac.be page 7 chuchotis Des dents saines dans un corps sain DOSSIER La dentisterie tout en douceur En médecine dentaire, la tendance « conservatrice », ou moins in vasive, est une véritable lame de fond qui traverse les différentes spécialités. plus de temps. » Ces « nouveaux » matériaux composites, qui misent sur l’adhésion micromécanique et chimique, permettent également de réaliser des attelles de contention pour prolonger la vie de dents « en bout de course », en collaboration avec les parodontologues, et de modifier à moindre coût la forme ou la teinte de dents trop petites ou disgracieuses, par exemple en complément d’un traitement orthodontique. Carie dentaire page 8 chuchotis La facette la plus visible de la lame de fond « conservatrice » qui révolutionne la dentisterie, c’est sans doute le traitement de la carie. Adieu fraises et plombages, place à l’air-abrasion, à la sonoabrasion, aux vernis fluorés et aux obturations adhésives blanches. « Ces dernières, décriées il y a quelques années, sont aujourd’hui beaucoup plus performantes », explique Sabine Geerts, chef du service de dentisterie conservatrice. « Les nouveaux produits mis sur le marché sont très résistants en couche fine et présentent l’avantage d’économiser les tissus sains, au contraire de l’amalgame traditionnel qui exige la réalisation d’une cavité beaucoup plus grande. Revers de la médaille, cette technique moins délabrante et plus esthétique exige une excellente connaissance des produits et un champ opératoire plus strict. Elle demande également Pour cureter une dent cariée en préservant au maximum les tissus sains, de nouveaux instruments ont fait leur apparition. Le « sablage » par air-abrasion (de l’air sous pression projette des particules d’oxyde d’alumine) ne creuse la surface de la dent que si le tissu sous-jacent est déminéralisé par une carie. Avec la sono-abrasion, ce sont des vibrations soniques qui animent un insert diamanté ; offrant une meilleure précision du geste, cette technique est particulièrement intéressante pour traiter les caries entre deux dents, sans risquer de toucher la dent saine. Mieux encore, la thérapeutique fluorée permet de traiter une carie débutante, diagnostiquée à la radio, en y appliquant un vernis ou un gel fluoré. Ici, plus aucun curetage n’est nécessaire ! Endodontie Organisée par le service de dentisterie conservatrice, la consultation spécialisée d’endodontie devient une référence pour les traitements complexes et minutieux des pulpites et des parodontites apicales. Il est possible de dévitaliser la dent de l’intérieur en utilisant un équipement perfectionné (microscope et ultrasons). Orthodontie L’orthodontie ou, pour utiliser la dénomination internationalement admise, l’orthopédie dento-faciale permet non seulement de redresser les dents, mais également d’influencer la croissance des maxillaires pour éviter, à l’âge adulte, le recours à la chirurgie. « Je suis convaincu qu’il faut privilégier les traitements interceptifs précoces chez le jeune enfant, afin d’éviter des traitements plus lourds à l’adolescence ou à l’âge adulte », insiste Michel Limme. « Même si cette façon de voir n’est pas partagée par mes confrères des autres universités belges. Liège est d’ailleurs la seule province du pays où l’Inami constate des dépenses en orthodontie pour des enfants de quatre ou cinq ans ! » Deux tiers des enfants présentent un problème d’ordre orthodontique ; la moitié d’entre eux ont besoin d’un traitement. « Nous travaillons en concertation avec les ORL et les logopèdes pour agir directement sur les causes du problème, comme une respiration par la bouche (végétations), une déglutition atypique (langue interposée) ou une succion du pouce. Des “appareils de gymnastique” des muscles masticateurs permettent de stimuler les processus naturels de croissance, trop peu sollicités dans notre société friande d’aliments mous. » L’ e s s o r d e l a m é d e c i n e d e n t a i r e DOSSIER > Dans le domaine des appareillages fixes multi-attaches, plus fréquents chez les jeunes adolescents, une toute nouvelle technique vient d’être adoptée par le service d’orthodontie : les « plaquettes » autoligaturantes, qui présentent l’avantage d’autoriser des mouvements dentaires plus libres, plus physiologiques. La durée des traitements devrait être réduite de quelques mois, avec une meilleure protection de l’intégrité des dents et des racines. Dessine-moi un sourire Pas de beau sourire sans belles dents, ni sans belles gencives. L’école liégeoise jouit aussi d’une excellente réputation dans le domaine de l’esthétique. Ici encore, c’est la synergie à l’œuvre entre les différents services du département de dentisterie qui permet de redresser les dents, de corriger leur forme et leur teinte, de remplacer les dents manquantes et de rectifier la forme des gencives. Prothèses fixées facettes en céramiques sont placées avec une réduction tissulaire minimale, de l’ordre de quelques dixièmes de millimètres. Pour les dents postérieures, des pièces partielles en céramique, les inlays, onlays ou overlays, remplacent avantageusement les plombages, sans devoir étendre la cavité existante. « Beaucoup de patients nous sont référés par leur dentiste. La technique novatrice des facettes céramiques suscite une demande énorme, malgré le fait que l’Inami ne rembourse pas les prothèses fixées, considérées comme un “luxe” », précise Alain Vanheusden, chef du Pédodontie : miser sur la prévention Trop de personnes pensent encore que les dents de lait n’ont pas besoin d’être soignées. Elle participent pourtant au bon développement de l’appareil masticateur et jouent un rôle important dans l’acquisition du lan gage. Enfin, la prévention est la base d’une bonne santé dentaire : « Traiter la carie, c’est aussi apprendre aux enfants à se brosser les dents correctement et à traquer les sucres cachés », rappelle Sabine Geerts. Un credo bien sûr partagé par Michel Limme : « Certains enfants d’à peine trois ou quatre ans ont les dents tellement abîmées que nous sommes obligés de les extraire toutes et de leur placer une prothèse totale. Les biberons de lait ou d’eau sucrée pour aller dormir et les tétines au miel sont de véritables crimes ! Les bonnes habitudes en matière d’hygiène dentaire doivent s’acquérir dès le plus jeune âge. » Et pour dédramatiser les visites chez le dentiste, rien de tel que de laisser les enfants accompagner leurs parents lors des séances de routine, histoire de les familiariser en douceur. service de prothèse fixée. « Il s’agit pourtant d’une alternative plus esthétique, mais aussi plus durable. En outre, la céramique est inerte, donc plus saine que les autres matériaux. » En dépit de ces innovations technologiques, du confort de mastication et de l’intégration plus anatomique offerts par les prothèses fixées, les prothèses amovibles conservent un avantage de taille : un coût moindre. Implantologie Si le domaine de la prothèse amovible n’a pas connu de changement majeur ces dernières années, celui de la prothèse sur implants, par contre, révolutionne la prise en charge des patients édentés partiels ou complets. Réalisée sous anesthésie locale, la pose d’un implant est un acte beaucoup moins « agressif » qu’on ne pourrait le penser, avec des suites opératoires moindres que celles d’une extraction de dent. Aujourd’hui, un seul geste opératoire est nécessaire, alors qu’il y a à peine cinq à dix ans, deux interventions chirurgicales avaient lieu à au moins trois mois d’intervalle. Mieux encore, une couronne ou un bridge provisoires peuvent être fixés sur les implants le jour de leur placement. page 9 chuchotis La philosophie « moins invasive » s’applique également à la mise en place de prothèses fixées, c’est-àdire solidarisées soit à des dents naturelles, soit à des implants. Si les restaurations périphériques de type couronnes et ponts (bridges) sont encore d’actualité, certaines techniques moins mutilantes pour l’organe dentaire sont de plus en plus utilisées grâce à la mise sur le marché de nouvelles céramiques dont la grande résistance intrinsèque est encore renforcée par des techniques performantes de collage. Dans le secteur antérieur, pour restaurer des dents abîmées, corriger leur forme ou leur teinte, des DOSSIER Possible dans un grand nombre de cas, cette mise en fonction immédiate est à porter au crédit de l’amélioration de la surface de l’implant en contact avec l’os, qui permet une meilleure cicatrisation. Avec les techniques de conception et de fabrication assistées par ordinateur, les nouvelles dents sont taillées sur mesure dans des matériaux performants, pour une efficacité optimale. Lorsque le volume osseux n’est plus suffisant pour poser un implant, les chirurgiens buccodentaires sont aujourd’hui capables de reconstruire l’os grâce à des techniques plus fiables et de moins en moins agressives. « Les progrès en matière d’implantologie sont tellement rapides que tout diagnostic posé il y a plus de trois ans a de grandes chances d’être obsolète », précise Eric Rompen, chef du service de médecine dentaire. « La pose d’un implant est souvent la meilleure solution à envisager lorsqu’on perd une dent. Le seuil écueil est l’aspect financier, aucun remboursement n’étant jusqu’à présent assuré par l’Inami. » Liège est aujourd’hui le plus gros centre universitaire belge d’implantologie. page 1 0 chuchotis Parodontologie La parodontologie est un des autres fleurons de la dentisterie liégeoise. Les problèmes de gencives sont aujourd’hui la première cause d’extraction dentaire. La quasi totalité des adultes souffrent de gingivite, le plus souvent sans le savoir. Liée à une élimination insuffisante de la plaque bactérienne, la gingivite est sournoise : presque toujours indolore, elle favorise l’apparition de parodontite. A partir de 50 ans, une personne sur deux est atteinte de parodontite sévère ; il s’agit probablement de l’infection chronique la plus fré- quente chez l’adulte. Les bactéries s’insinuent entre les gencives, s’infiltrent le long des racines et provoquent une résorption osseuse de plus en plus importante. « Ce problème est encore plus dramatique chez les fumeurs, en raison des effets négatifs du tabac qui supprime les signaux d’alerte. Lorsque les fumeurs prennent conscience que leurs gencives sont malades, il est souvent trop tard pour sauver leurs dents », prévient Eric Rompen. « En outre, la parodontite sévère accroît le risque de maladie cardiovasculaire, en raison du nombre important de bactéries envoyées dans le torrent circulatoire lors de chaque mastication. » Dépistage et prévention sont, ici encore, les meilleures armes. Une excellente hygiène dentaire et interdentaire, ainsi qu’un détartrage régulier chez le dentiste permettent de venir à bout de la gingivite. S’il est effectué avant que les dégâts deviennent trop importants, un surfaçage radiculaire non chirurgical permet de guérir, en deux séances seulement, la majorité des parodontites. Des soins spécifiques pour les personnes âgées Perdre ses dents, une fatalité liée au vieillissement ? « Pas du tout », s’insurge Marc Lamy. « Les causes principales de la perte d’une dent, carie et parodontite, se traitent très bien. Evidemment, la prévention est essentielle. Avec un suivi régulier, plus besoin d’extraire une dent. » Conséquence logique du vieillissement de nos populations, la gérodontologie est une discipline amenée à se développer. Elle prend en compte, d’une part, certaines spécificités des patients âgés, comme la polymédication. D’autre part, elle s’intéresse à l’état dentaire des personnes institutionnalisées et dépendantes. « Dans ce domaine, tout reste à faire », déplore Marc Lamy. « Les prestataires de soins dont dépendent ces patients ne sont pas suffisamment conscients des enjeux liés à la santé de la sphère orale. Et les patients eux-mêmes considèrent que les problèmes de dents ne sont pas une priorité. » Pour améliorer l’accès aux soins et la prévention chez nos aînés, un long chemin reste à parcourir. Un premier pas vient d’être fait par les pouvoirs publics : à partir du mois de mai, certains patients édentés de plus de 70 ans auront droit au remboursement partiel de deux implants destinés à soutenir une prothèse totale. « Lorsqu’on peut fixer la prothèse sur deux implants, on constate que l’amélioration de l’efficacité masticatoire a des répercussions positives sur les paramètres biologiques des patients », explique Eric Rompen. « En plus d’améliorer le confort psychologique et relationnel des patients âgés, cette technique présente le grand avantage de participer à la lutte contre la dénutrition », renchérit Marc Lamy. ACTUALITé L’hypertension un mal insidieux Le tensiomètre est devenu un outil banal dans tout cabinet médical. Tellement banal, peut-être, qu’on en oublierait presque le caractère crucial du dépistage précoce de l’hypertension artérielle. Le fait est connu. Ce qui l’est peutêtre moins, c’est que près de 50 % des hypertendus ne sont toujours pas diagnostiqués, que 50 % des hypertendus conscients de la chose ne sont pas traités et que 50 % de ceux qui sont traités le sont de façon insuffisante. Il reste donc du chemin à parcourir. « Si beaucoup de généralistes ont le réflexe de mesurer la tension de leurs patients à chaque consultation ou presque, ce n’est pas suffisamment le cas chez les spécialistes qui ne se sentent pas directement concernés par l’hypertension », constate le Pr. Jean-Marie Krzesinski, chef du service de né phrologie et membre de la société européenne de l’hypertension. « Un contrôle systématique de la tension favoriserait pourtant le dépistage des patients à risque. » Le diagnostic d’hypertension ne doit évidemment pas être posé à la légère. Chez 25 à 30 % des patients, une pression artérielle trop élevée s’explique tout simplement par l’effet « blouse blanche », c’est-à-dire par l’inquiétude géné- rée par la présence du médecin, la crainte du diagnostic ou de l’acte médical. Cet effet peut largement biaiser la précision de la mesure de l’hypertension. De plus, la grande variabilité de la pression artérielle dans le temps entraîne fréquemment des valeurs erronées. Eduquer à l’automesure Pour confirmer le diagnostic et éliminer l’effet « blouse blanche », deux directives internationales récentes, l’une européenne et l’autre américaine, préconisent de laisser le patient mesurer lui-même sa tension, à son domicile. Le consensus que vient de rédiger le comité belge de l’hypertension va dans le même sens : chez les patients capables d’être éduqués à l’automesure, l’utilisation d’un appareil validé constitue une aide pertinente au diagnostic, en complément de la mesure au cabinet de consultation et de la technique ambulatoire sur vingt-quatre heures. Le manque d’observance est responsable du tiers des mauvais résultats obtenus avec les antihypertenseurs. En aidant le patient à prendre conscience du mal dont il souffre, l’automesure de la tension peut améliorer la bonne observance du traitement. Elle présente également un intérêt pour apprécier l’efficacité thérapeutique et pour adapter le traitement. Aujourd’hui, un consensus se dégage clairement pour la promotion de l’automesure de la tension, en complément de l’examen réalisé par le médecin. Quel autotensiomètre conseiller ? De nombreux appareils mis sur le marché n’offrent pas une précision suffisante. Il est essentiel de choisir un autotensiomètre validé et de le faire contrôler régulièrement. Pour la fiabilité des mesures et la précision de l’interprétation, conseillez de préférence un appareil permettant la mesure au bras, et non au poignet. Une liste d’appareils validés est disponible sur les trois sites internet suivants : Chef du service de néphrologie 04 366 72 03 jm.krzesinski @chu.ulg.ac.be n www.automesure.com/Pages/ tensiometre.htm n www.bhsoc.org/blood_pressure_ list.stm n www.dableducational.org A lire n F. Krzesinski, J.-M. Krzesinski, « Pourquoi et comment faire mesurer correctement la pression artérielle par le patient », texte à paraître dans la Revue médicale de Liège. n A. Pr. J.-M. Krzesinski Persu, R. Fagard, P. De Corte et al., « Du bon usage de l’automesure tensionnelle. Document de consensus », Louvain Médical, 2008 ; 127, 8 : 305-309. page 1 1 chuchotis Favorisée par l’âge, la sédentarité, l’excès de poids, le stress, le sel ou encore l’hérédité, l’hypertension reste asymptomatique pendant de longues années. Elle n’est le plus souvent découverte qu’à la faveur d’un examen de routine. Insuffisamment contrôlé, ce mal sournois provoque cependant des dommages considérables. L’hypertension artérielle est l’un des plus importants facteurs de risque cardiaque ; elle peut également entraîner attaques cérébrales et atteintes rénales. ACTUALITé Une analgésie toujours plus efficace Près d’un patient opéré sur dix souffre d’une douleur chronique consé cutive à l’intervention chirurgicale. Plusieurs modalités de prise en charge sont mises au point au CHU de Liège pour prévenir ce phénomène de « chronicisation » et optimiser la gestion de la douleur postopératoire. Pr. J. Joris Chef de service associé en anesthésieréanimation 04 366 71 80 jean.joris @chu.ulg.ac.be « Normale », la douleur ressentie après une intervention chirurgicale ? Pas selon le Pr. Jean Joris, anesthésiste au CHU de Liège. Ce spécialiste de l’analgésie post opératoire, internationalement renommé, contribue depuis une vingtaine d’années à l’amélioration de la prise en charge des patients. A l’occasion de la journée médico-scientifique « Synthèse » organisée l’automne dernier, il a présenté au corps médical liégeois les nouvelles stratégies analgésiques nées d’une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques et pharmacologiques de la douleur. page 1 2 chuchotis Hyperalgie et douleur chronique « Une analgésie postopératoire efficace est importante à plusieurs titres, et pas seulement pour améliorer le confort du patient », explique Jean Joris. « On sait depuis longtemps que la douleur contribue au stress chirurgical proprement dit, avec des répercussions hémodynamiques et respiratoires. On sait moins que des mécanismes d’hyperalgie peuvent favoriser le passage à la chronicité des douleurs. Cette prise de conscience est très récente. » Toutes interventions chirurgicales confondues, ce sont 8 à 10 % des patients opérés qui se retrouvent aux prises avec des douleurs chroniques perdurant trois à six mois après l’opération. Ils représentent le tiers des patients suivis dans les centres de la douleur. En cause, une série de cercles vicieux liés aux mécanismes physiopathologiques de la douleur postopératoire, mais également, dans certains cas, une utilisation excessive des morphiniques. Au cours des dix dernières années, on s’est en effet rendu compte que l’administration plus généreuse et mieux adaptée des morphiniques, quoique efficace, présentait des limites importantes. D’abord, les morphiniques se sont avérés moins actifs pour soulager les douleurs déclenchées par la mobilisation de la zone opérée, en raison de mécanismes différents impliqués en condition statique et en condition dynamique. Ces molécules sont donc peu adaptées pour favoriser une récupération rapide. Ensuite, les morphiniques amplifient le phénomène d’hyperexcitabilité spinale responsable de l’hyperalgie. Non seulement les sensations douloureuses sont ressenties comme plus douloureuses encore, mais les récepteurs excités répondent également à des stimulations en principe non douloureuses. Ces phénomènes d’emballement font le lit des processus induisant le passage à la chronicité des douleurs. Enfin, mais cela n’est pas encore démontré scientifiquement, les morphiniques pourraient perturber la fonction immunitaire, ce qui est préoccupant en cas de chirurgie oncologique, notamment. Analgésie balancée Ces « nouveaux » effets secondaires des morphiniques, venant s’ajouter aux effets décrits depuis plus longtemps (dépression respiratoire, nausées, vomissements, iléus), poussent les anesthésistes à limiter l’usage de ces molécules en les combinant avec d’autres analgésiques comme le paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens. C’est le concept de l’analgésie balancée qui, avec le recours aux analgésies locorégionales, offre les conditions optimales pour accélérer la récupération fonctionnelle et raccourcir la durée d’hospitalisation. A cette approche vient aujourd’hui s’ajouter l’administration dès la période peropératoire de différentes molécules destinées à atténuer, voire prévenir, l’hyperalgie : la kétamine, la clonidine, la lidocaïne par voie intraveineuse, la gabapentine et la prégabaline (toutes deux initialement utilisées comme anti-épileptiques). La lidocaïne, notamment, a fait l’objet de nombreux travaux au CHU de Liège, où elle est incluse depuis plusieurs années dans les protocoles de chirurgie abdominale. Des études sont également en cours sur l’influence positive de l’hypnosédation dans la prévention de l’hyperalgie. « Les morphiniques ne constituent plus la base de l’analgésie postopératoire, mais deviennent des analgésiques de secours », conclut Jean Joris. « D’autres stratégies ont fait leurs preuves pour une analgésie de qualité, apte tant à prévenir l’hyperalgie qu’à accélérer la récupération fonctionnelle. » A lire n S. Lauwick, A. Kaba, J. Joris, « Horizons nouveaux pour l’analgésie postopératoire », Revue médicale de Liège, 2008 ; 63 : Synthèse 2008 : 2-9. RECHERCHE Adénomes hypophysaires, épidémiologie et génétique Un géant, une vallée apparemment frappée d’une malédiction et une fin heureuse : la recherche médicale réunit parfois tous les ingrédients du conte de fées. Ou quand la curiosité d’un chercheur l’amène à démasquer la prévalence réelle des adénomes hypophysaire à travers le monde. Pour en avoir le cœur net, l’endocrinologue sollicita ses confrères généralistes afin de vérifier si la maladie n’avait pas atteint d’autres personnes encore. Les résultats de cette étude eurent un retentissement énorme. Avec 16 cas dans la région de Soiron, 27 dans la région d’Oupeye et 25 à Ans, soit un cas pour mille habitants, il fallut se rendre à l’évidence : la prévalence des adénomes hypophysaires en région liégeoise semblait cinq fois plus élevée qu’ailleurs. Soucieux de comprendre le mal à l’œuvre dans sa vallée natale, Albert Beckers décida d’élargir ses investigations en collaboration avec plusieurs centres européens. Il découvrit que les données épidémiologiques liégeoises concordaient avec celles des autres régions du monde. Ouf, la « vallée des adénomes », comme on commençait à l’appeler dans les congrès d’en- En plus de provoquer une altération notable de la qualité de vie, les adénomes hypophysaires présentant des signes cliniques raccourcissent l’espérance de vie de plusieurs années. Détectés précocement, ils répondent bien aux traitements médicamenteux ou chirurgicaux. « Les adénomes hypophysaires sont encore largement sous-diagnostiqués », déclare le Pr. Albert Beckers, chef du service d’endocrinologie du CHU de Liège. « Leur prévalence réelle est sans doute de 1 sur 600. J’estime que chaque médecin traitant compte probablement entre un et cinq cas dans sa patientèle. » docrinologie, n’était pas frappée d’une malédiction, mais tout simplement le point de départ d’une meilleure appréciation de la prévalence réelle de la maladie à travers le monde. Passionné par le sujet, l’endocrinologue fit une autre découverte d’ampleur internationale : il identifia une quinzaine de familles liégeoises atteintes d’une variante encore inconnue d’adénome hypophysaire familial, qu’il nomma « FIPA » (Familial Isolated Pituitary Adenomas). Il étudia les données cliniques de toutes ces familles, ainsi que celles d’autres familles belges, hollandaises, françaises, italiennes, argentines et brésiliennes. En juin 2006, il détailla cette nouvelle maladie dans un article publié dans la « bible » des endocrinologues, The Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism. Au même moment, des chercheurs finlandais décrivirent trois mutations du gène AIP dans quelques cas d’acromégalie familiale. Notre endocrinologue entama illico une étude européenne encore plus vaste, en collabo- ration avec 34 centres de 9 pays différents, afin d’identifier chez 73 familles « FIPA » (156 patients) les mutations du gène récemment mis en cause. Quelques mois plus tard, l’équipe liégeoise signa un nouvel article décrivant une dizaine de mutations et démontrant que lorsque le gène AIP est muté, les adénomes surviennent beaucoup plus tôt (25 ans vs 38 ans) et sont beaucoup plus agressifs (24 mm vs 14 mm de diamètre). Albert Beckers et ses collaborateurs poursuivirent assidûment leurs travaux*. Pour paraphraser la formule consacrée, ils furent invités à présenter leurs découvertes dans le monde entier, publièrent de nombreux articles et reçurent plusieurs prix prestigieux. * Ils étudient actuellement les mutations du gène AIP, cherchant notamment à établir l’utilité de leur dépistage chez les patients jeunes avec une grosse tumeur, ils analysent les adénomes hypophysaires sporadiques et recherchent avec l’aide de Michel Georges, éminent généticien, quels autres gènes pourraient être impliqués dans les FIPA. Pr. A. Beckers Chef du service d’endocrinologie 04 366 70 83 albert.beckers @chu.ulg.ac.be page 1 3 chuchotis Il était une fois un endocrinologue qui un beau matin, sur le chemin du travail, se mit à penser aux patients habitant à proximité de son village. Ici, un géant acromégale, là une dame atteinte d’un Cushing, un peu plus loin une autre souffrant d’un prolactinome. A sa grande surprise, il compta pas moins de 12 personnes souffrant d’une forme d’adénome hypophysaire. Intrigué par ce nombre bien plus élevé que les statistiques le laissaient entendre, le Pr. Albert Beckers entreprit dès son arrivée à l’hôpital de compulser ses dossiers et ajouta à sa liste trois autres cas. La verdoyante vallée entre Soiron et Nessonvaux semblait abriter un nombre record d’adénomes hypophysaires.