Alan Vega, conversation avec un indien

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Alan Vega, conversation avec un indien
Alan Vega, conversation avec un indien, est le premier opus de
la collection Fusion que nous souhaitons riche et fournie, qui
présente des artistes dont la vie créative est dense — à l’image d’un
Alan Vega, musicien et plasticien — des personnages singuliers à
l’avant-garde ou défricheurs, mais avant tout enclins à effacer les
frontières et faire bouger les lignes. C’est pourquoi, nous aussi,
en tant qu’éditeur, nous avons fait le choix de la créativité pour
une nouvelle expérience de lecture, celui du livre enrichi, qui
mêle textes, sons et images.
b sonic
59, rue Froidevaux
75 014 Paris
www.letextevivant.fr
Alan Vega, New York, 1980
© photo : Pierre René-Worms
Fusion
ALAN VEGA
CONVERSATION
AVEC UN INDIEN
Alexandre
Breton
© Editions LE TEXTE VIVANT, 2013
« Qui ne s’est jamais laissé enchaîner ne saura jamais ce qu’est la liberté », Serge Gainsbourg
ISBN : 978-2-36723-042-9 Alan's work is as bold and exploratory as anything Free
Jazz players did in their time. Alan has always stayed true
and outside. He is the real thing and his integrity is absolute. Henry Rollins
They were a very pure minimalistic distilled version
of rock'n'roll. Joe Foster got me into Suicide as he did a lot
of great music. Creation was music fans trying to be
a record company; me and Joe were fans that put out music...
I supported them in 89, I think at Dingwalls with
Biff ! Bang ! Pow! They were great guys.
Alan MacGee
SOMMAIRE
Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
Paris, février 2011. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
New York, juillet 2012. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
A| Alan ? Artaud. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .23
B|Brooklyn, Boxe, Bacon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
C|Camp de concentration. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
D|Duende, Deuce Avenue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
E|Elvis. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39
F|Frankie Teardrop. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
G|Gamble - Parier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
H|Humour. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
I |Influences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48
J |Jazz, Juif. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
K|Kerouac. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
L|Light Sculptures. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
M|Mort . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
N|Neon. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
O|Ocasek, Ric . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
P|Punk. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
Q|Question . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65
R|Rev, Revolution. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 66
S|Suicide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
T|Trompette, trombone. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
U|Underground. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71
V|Vega . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73
W|Warriors. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
X|Croix, Christ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
Y|Pénultième... . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81
Z|Zante. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
Discographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
Filmographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95
Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97
Liens Internet. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
alan vega
A | ALAN ? ARTAUD
Bâtard saturnien d’Elvis, Alan Vega cumule les mystères.
Patronyme biffé, date de naissance flottante. Vega : patronyme
élu — hasard d’un soir de 1973 sur les trottoirs de New York
downtown. Nom d’une étoile proche de la Terre autant que du
Soleil, l’une des plus brillantes que l’œil humain puisse apercevoir. Vega, qui appartient à la bien-nommée constellation de la
Lyre. Vega, c’est aussi une Chevrolet, quatre cylindres, quatrevingt-dix chevaux, lancée par General Motors en 1968. Un
gouffre économique pour la firme de Détroit. Le mythe américain dans son versant cauchemardesque. Le lustre et le trash.
Initialement né Alan Boruch Bermowitz le 23 juin 1938, d’un
père fils d’immigré russe naturalisé et d’une mère américaine,
tous deux Juifs. Alan n’est Vega qu’après avoir été d’abord Alan
Boruch Bermowitz, puis Alan Suicide — alors qu’il commence,
fin des années 1960, à exposer ses installations à la galerie Ok
Harris — , ou encore Nasty Cut lors des premiers concerts de
Suicide avec Martin Rev et Paul Liebegott. Peu importe.
Un nom et une naissance à double-fond. Une naissance artistique qui se substitue qui se substitue à un état civil initial, le
corrige et le rature sans relâche... « Maintenant, j’en suis fatigué,
j’aimerais un autre nom, mais je n’arrive pas à le trouver. De
toute façon, c’est trop tard. Je suis Vega. Je l’ai fait parce que je
voulais me distancier du non Suicide. Mais ce n’est pas l’unique
raison. Suicide est devenu un obstacle, car on était souvent
censuré juste à cause de notre nom. » 1 Dans ce jeu des signiExtrait d’un entretien avec Mathieu Copeland, in Alan Suicide Vega, Infinite Mercy, catalogue
de l’exposition au MAC Lyon (2009), édité aux Presses du réel (disponible sur commande auprès
du Musée).
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conversation avec un indien
fiants, Vega est autre, Juif au nom barré, qui n’aura eu de cesse
de se chercher un nom, de chercher à se faire un nom. Donc à
brouiller les états civils, les géographies.
Un nom, nomade.
Rien d’étonnant à ce que le même Alan Bermowitz-SuicideVega ait régulièrement fini ses prestations scéniques par la seule
reprise, avec « Be Bop A-Lula », du répertoire live du groupe
« 96 Tears », du bien-nommé « ? » accompagné de ses Mysterians
aux épouvantables costumes de scène orange et noir. Griffonné
initialement en 1962 par « ? » — soit Rudy Martinez pour l’état civil
américain, dit-on — le titre, pressé d’abord à 750 exemplaires sur
l’éphémère label texan Pa-Go-Go avant que les droits ne soient
habilement rachetés par le rusé Neil Bogart de Cameo-Parkway
Records, fut pour « ? » un de ses tubes ultimes de l’année 1966,
année séminale pour le rock. Entièrement construit autour d’un
riff imparable de Frankie Martinez sur clavier Vox Continental (le
même qu’utilisera dès le début des années 1970 l’alter ego Martin
Rev), 96 Tears devient rapidement, à l’instar de « Louie Louie »
ou « Gloria », l’un des incunables absolus du répertoire garage.
Les reprises sont légion : Big Maybelle et Aretha Franklin sont
étonnamment les premières, suivies de The Foundations, Music
Machine, les Modern Lovers de Jonathan Richman, Eddie et the
Hot Roads, les Stranglers, les Cramps, les Residents, Terry Hall
des Specials, Iggy Pop, Primal Scream, les oubliés Skatterbrains,
Garland Jeffreys, jusqu’à Bruce « The Boss » Springsteen.
« 96 Tears » est un incontournable de l'année 1970, année noire
pour le duo Rev-Vega. En 1977 Suicide, signé depuis peu chez Red
Star Records par Marty Thau, l’ex-manager des New York Dolls (ayant
travaillé auparavant pour Cameo-Parkway), entame une première
tournée en Europe, ouvrant d’abord pour Elvis Costello et The
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alan vega
Attractions, puis les Clash pour leur tournée anglaise On Parole
Tour. C’est peut-être la sortie du long désert traversé par le
groupe depuis sa formation en 1970 (en trio, alors, composé
de Vega/Nasty Cut au chant, guitare et trompette, Martin Rev/
Marty Maniac aux claviers et batterie, Paul Liebegott/Cool P. à
la guitare). De l’underground new-yorkais auquel Rev et Vega
semblent définitivement confinés, depuis les concerts au Mercer
Arts Centre, au Max’s Kansas City ou au CBGB’s, sous les huées
que suscitaient leurs performances. Et cela, malgré une reconnaissance croissante tant du côté de la critique (Lester Bangs transi)
que de la vague punk de 1976-1977 qui voue au duo électro
un culte respectueux (Blondie, Ramones, Wayne County, Dead
Boys, Cramps, Richard Hell, Lydia Lunch ou James Chance en
tête). Cette signature est donc une véritable bouée d’oxygène. Elle
permet à un premier album de voir le jour. L’éponyme Suicide,
enregistré en novembre 1977 avec Craig Leon et Marty Thau
à la technique, sort aux États-Unis le 28 décembre. L’album à
la pochette barrée d’un « Suicide » couleur sang dégoulinant
signé Vega, reçoit un accueil favorable en Europe, mais, hormis
quelques louanges ça et là, ne rencontre qu’une estime très relative aux États-Unis. Suivent quelques dates américaines aux côtés
des Ramones, Runaways, Contortions, Dead Boys, Senders ou
Fleshtones, traversant New York, Philadelphie, San Francisco,
Toronto, puis, enfin, la tournée européenne. Montée au début
de l’été 1978, celle-ci commence à Metz, à l’occasion — significative ! — de la troisième édition du Festival International de
la Science-Fiction et de l’Imaginaire. Vega et Rev, assurés d’un
accueil plus chaleureux de la part du public français, affronteront protestations, sifflets, jets de chaussures, de chaises et pire.
Vega est menacé, poursuivi sur scène ; le matériel est détruit.
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Photographies de couverture et de 4e de couverture :
Pierre René-Worms
Couverture et mise en page :
Camille Chauvin et Vanessa Lalande | atelierplakat.com
Figure majeure et fascinante de l'underground
new-yorkais, Alan Vega a marqué profondément
l'histoire du rock'n'roll, avec son groupe
Suicide ou en solo, autant que le champ des
arts plastiques, par ses installations lumineuses.
De la sculpture à l'expérimentation sonore,
de l'activité politique engagée aux courses
hippiques, d'Elvis aux figures du Christ, de
Spinoza à la judéité, Alan Vega, conversation
avec un indien est une incursion dans l’œuvre
foisonnante de l’artiste ; une lecture nomade,
urbaine, poétique et polyphonique, scandée par
les voix d’agnès b., Bob Gruen, Pascal Comelade,
Dirty Beaches, Marc Hurtado, Perkin Barnes,
Christophe, Martin Rev…
Alexandre Breton, né en 1973, est professeur
de philosophie en région parisienne et
producteur pour Radio France pour qui il
a notamment réalisé des portraits d’Archie
Shepp, Christophe, Alan Vega, Jonas Mekas.
Il est aussi directeur artistique du festival
parisien City Sounds, dédié aux musiques
actuelles et prépare une anthologie du cinéma
expérimental américain.
ISBN : 978-2-36723-042-9