Reinette L`0ranaise Reinette L`Oranaise a chanté les trésors
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Reinette L`0ranaise Reinette L`Oranaise a chanté les trésors
Reinette L'0ranaise Reinette L'Oranaise a chanté les trésors classiques de la tradition arabo-andalouse, du folklore oranais et du chaâbi. Son nom revendique fièrement son appartenance régionale. __________________________________________________________________ Née en 1915, dans une famille juive, à Tiaret (grande cité de l'Ouest algérien), Sultana Daoud est, toute petite, atteinte de cécité. Elle apprend le cannage des chaises à l'école des aveugles, une tâche ingrate qui désespérait sa mère. Celle-ci, soucieuse de l’avenir de sa fille, lui fit cette recommandation prémonitoire : « Je veux que tu aies un métier qui t’égaye tout en égayant les autres. » Elle ne croyait pas si bien dire. A seize ans, l’adolescente est confiée au maestro Saoud qui tenait un café à Oran, rare lieu de rendez-vous de tous les mélomanes, les musiciens, les paroliers et les vedettes locales - les théâtres sous contrôle colonial refusaient toute expression algérienne. Emerveillée et troublée à la fois par son entrée dans un cercle exclusivement réservé aux valeurs confirmées, Reinette devient très vite l’élève attitrée de Saoud. L’apprentissage du classique est ardu et exigeant comme elle aime à le rappeler. Unique femme donc à être admise dans le cénacle, elle s’en tirera par étapes, avec brio et talent. Pour parfaire son éducation musicale, elle s’initie à la derbouka, ce qui lui permet d’acquérir le sens du « mizân » (la mesure) et la maîtrise du chant. Puis, elle tâte de la mandoline, mais elle ne la ressent pas ; alors, sur proposition de son génial professeur, elle se tourne vers le luth, et là se produit une symbiose idéale avec cet instrument. Heureuse de ses progrès, Reinette ne peut exulter car son cher maître affiche son intention d’ouvrir un établissement à Paris. Elle l’y suit mais, rapidement, la nostalgie prend le dessus. A son retour, elle continue à travailler avec les mêmes musiciens, dans le même café que gérait désormais un neveu de Saoud. Hélas, elle apprend que celui qu’elle vouvoyait et vénérait par-dessus tout avait « disparu » dans les camps nazis. Elle exprimera son chagrin à travers le poignant morceau « Nechkar el Karim » (Loué soit le Généreux). Peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale, Reinette s’installe à Alger, là où se trouve l’association andalousophile « El Fekhardjia ». Elle écoute passionnément la radio quand elle passe des mélopées algériennes et admire particulièrement Mohamed Belhocine (père de Hamid, le tromboniste de Kassav’) qui acceptera de devenir son maître. Reinette devient célèbre et participe tous les mardis à des émissions radiophoniques rassemblant les meilleurs artistes du chaâbi algérois et de l’andalou. Plus tard, elle intègre l’orchestre de Hadj El Anka, le fondateur du chaâbi de la casbah, entourée par des choristes de renom avec lesquelles elle avait débuté. Jusqu’en 1962, année de son exil douloureux vers la France, elle porte la bonne parole algéroandalouse. Installée à Romainville, en région parisienne, avec son mari et percussionniste Georges Layane, elle sort de sa paisible retraite dans les années 80 pour séduire à nouveau ses anciens fans et conquérir un public jeune et fasciné par son ton caustique et son bonheur de jouer irradiant. Reinette a chanté pendant plus d'un demi-siècle les trésors classiques de la tradition arabo-andalouse, du folklore oranais, du chaâbi et quelques compositions réactualisées. Son nom, jusqu'à son dernier soupir en 1998, revendique fièrement son appartenance régionale. © Hall de la Chanson