La Voix Syndicale de L`Essonne

Transcription

La Voix Syndicale de L`Essonne
de l’Essonne
Prix 1,50 €
N° 98
Bimestriel de l’Union Départementale CGT de l’Essonne
Comité général de l’UD 91
Les Unions Locales en première ligne
pages 3 à 7
SOMMAIRE
Les Unions locales CGT
de l’Essonne (DR)
Appel 24 Évry
64 jours de grève
pour la dignité
Énergie : le fond des
factures (pages 10-11)
Élections Carrefour Market :
grand chelem CGT (page 17)
USR 91 : retraités en
mouvement (page 19)
Femmes en lutte pour
l’égalité (page 20)
Prud’hommes : quel avenir
en 2018 ? (pages 22-23)
Dossier santé
Actionnaires goinfrés,
maternité et psychiatrie
menacées
La Voix Syndicale
de L’Essonne
12 Place des Terrasses de l’Agora
91 034 évry Cedex
Directrice de publication :
Véronique Josien
tél. 01 60 78 28 41 - fax 01 60 78 55 43 [email protected]
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- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - Avril - Mai 2015 -
pages
12 - 16
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COMITÉ GÉNÉRAL
Comité général de l’UD CGT 91 en juin 2015
Échangerait méthodes et outils communs
contre temps et efficacité
L’Union départementale CGT de
l’Essonne tiendra un Comité Général les 18 et 19 juin 2015, à la Maison des Syndicats d’Évry. Quels en
sont les objectifs ? La Voix Syndicale a interrogé cinq responsables
de la CGT : Ollivier Champetier
(OC), secrétaire général de l’UD 91 ;
Véronique Josien (VJ), membre du
bureau de l’UD ; Jean-Louis Betoux
(J-LB), secrétaire de l’UL d’Évry ;
Brigitte Gabriel (BG), secrétaire de
l’UL de Massy ; Philippe Madranges
(PM), secrétaire de l’UL des Ulis.
La Voix Syndicale. Quels sont les
points principaux de ce Comité
Général ? Les Unions locales sontelles au premier plan ?
Véronique Josien. N’est-il pas naturel et indispensable de parler de
nos UL dans un comité général de
l’UD ? Nous nous situons à mi-mandat entre deux congrès de l’UD 91,
mais aussi dans la préparation du
51e congrès confédéral. Il y a une
forte attente des camarades sur le
sujet. L’activité des UL n’est pas un
supplément d’âme, mais doit être un
axe permanent de l’activité et de la
réflexion de chaque syndicat. Nous
avons la volonté de les faire vivre
et que leur place, leur rôle, leurs
actions soient concrets dans tous
les esprits militants. C’est le premier
outil syndical interprofessionnel à la
portée de nos militants et des salariés. Nos UL donnent au déploiement de la CGT l’ampleur nécessaire
sur leur territoire et sont largement
sollicitées sur de nombreux fronts.
Comment ne seraient –elles pas la
priorité de notre vie syndicale ?
Ollivier Champetier. Véronique l’a
dit, l’ensemble des initiatives, débats et discussions doivent se placer dans cette préparation du 51e
congrès. La rencontre régionale Ilede-France des Unions Locales, qui
s’est déroulée le 26 mars dernier,
a rencontré un vif succès, démontrant l’intérêt des camarades pour le
fonctionnement de nos structures.
Nous plaçons logiquement notre
Comité Général dans ce processus de construction et de décisions
pour ré-imaginer l’outil indispensable à notre politique revendicative et de transformation sociale. La
question centrale est : « Quel outil
pour quelles constructions ? » Une
part de la réponse se trouve évidemment auprès des UL.
L’Union Locale est un lieu physique
de rencontres et de convergences
revendicatives. C’est aussi un territoire et il faut des militants pour
animer celui-ci. Nous devons réflé-
sur le droit du travail, assurer les formations ? Nous devons redéfinir et
valider collectivement leur rôle !
LVS. Pensez-vous que les problèmes confédéraux, comme l’affaire Lepaon, ont laissé des traces
chez les militants CGT et les salariés de l’Essonne ou que le changement de direction a tourné la page
dans les esprits ?
Brigitte Gabriel. « L’affaire Lepaon »
a provoqué un choc chez nos adhérents CGT, mais plus encore chez
Les Unions locales CGT
de l’Essonne (DR)
chir sur un triptyque : locaux, territoires et militants. Les locaux, nous
les avons. Les territoires sont, peutêtre, à redéfinir. Les militants, c’est
le sujet principal, avec les moyens
dont ils ont besoin. C’est là qu’il faut
trouver de nouvelles réponses.
Comment faire mieux comprendre
que l’implication dans le collectif et
l’ouverture vers l’action interprofessionnelle sont pour partie les solutions à nos difficultés ? Que veut dire
militer dans l’interpro ? Pour nombre
de nos militants, l’UL est une évidence. Mais pour les autres ? Pourquoi va-t-on à l’UL ? Est-ce que tout le
monde le sait ? Les UL ne sont-elles
là que pour accueillir et renseigner
nos militants qui courent après les
moyens. Aujourd’hui, la page n’est
pas encore tournée, car trop de
choses restent dans l’ombre. Même
si Philippe Martinez l’a blanchi en déclarant qu’il ne savait rien, personne
ne peut croire que de tels montants
soient réglés pour des travaux dans
une location. Nous sommes tous
conscients qu’il ne s’agit pas de
« l’affaire » d’un seul homme, mais
d’une organisation trop nébuleuse.
Ceci dit, ce fut un mal pour un bien
qui a permis de remettre à l’ordre du
jour les valeurs fondamentales de la
CGT et d’enfin reparler de lutte de
classes. La CGT redevient un syndicat contestataire et reprend sa place
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COMITÉ GÉNÉRAL
Comité général de l’UD CGT 91 en juin 2015
dans la revendication pour l’émancipation sociale. Le succès de la journée interprofessionnelle du 9 avril
relance cette dynamique et l’espoir
de vraies conquêtes sociales.
O.C. C’est vrai que le 9 avril était
attendu. Pas la date en elle-même,
mais cet appel confédéral pour une
journée de grève et de manifestation. 11 bus sur le département, on
ne l’avait pas vu depuis 2008… La
preuve de cette attente des militants
d’en découdre avec un gouvernement social libéral qui a fait le choix
de la finance, et pas du salarié.
Preuve aussi que « les affaires »
CGT n’ont pas entaché la détermination à aller à la confrontation. Si
notre confédération a bien compris, elle trouvera dans cette réussite une partie du fil conducteur de
notre prochain congrès : redevenir
un syndicat de classe et de masse,
qui œuvre par la lutte à la transformation de la société. Il ne faut pas
laisser refroidir ce succès du 9 avril
et ne pas attendre septembre pour
repartir à la bagarre.
même de longue date, mais nous ne
constatons pas de démissions liées
directement à cette affaire.
La journée du 9 avril a réellement
boosté les militants. Deux cars affrétés par l’UL d’Évry, il faut remonter à bien longtemps pour avoir une
telle mobilisation, y compris avec
de nouvelles têtes !
LVS. De quoi votre UL a-t-elle le
plus besoin ?
B.G. La discussion sur les besoins
des UL est récurrente. Quel besoin
est le plus pressant ? De nouveaux
adhérents pour le soutien financier ? Des formations syndicales
pour que les nouveaux adhérents
deviennent des militants appelés
à être nos nouveaux cadres ? Des
moyens supplémentaires en heures
de délégation ? En fait, il s’agit pour
toute la CGT de faire émerger la
conscience des salariés. Seules la
Philippe Madranges. La polémique
est derrière nous. Philippe Martinez,
avec les revendications sur les 32
heures, la retraite à 60 ans et le Smic
à 1 700 euros, a remis les choses à
leur place. Le 9 avril a montré que
les militants étaient mobilisés.
V.J. La période n’a pas été facile à
vivre pour les militants, surtout au
moment des élections professionnelles de la fonction publique en
décembre 2014. Mais que les syndiqués redoublent de vigilance sur
la bonne gestion de leurs structures
syndicales et demandent des règles
claires ne peut pas faire de mal à
notre démocratie interne. Rapidement, les militants ont manifesté
l’envie de se remettre au boulot sur
nos questions revendicatives, c’est
le bilan que je fais de la journée
réussie du 9 avril. À nous de transformer l’essai !
Jean-Louis Betoux. Oui, effectivement, les histoires de la Confédé ont
laissé des traces chez les syndiqués,
J-L. B. Nous avons surtout besoin
de l’investissement de nos camarades délégués syndicaux sur l’activité interprofessionnelle, continuer
à travailler sans relâche la syndicalisation de masse. À l’UL d’Évry, nous
nous félicitons des stages de forma-
Jean-Louis Betoux (DR)
discussion, l’éducation au plus près
des salariés permettront ce réveil.
Oui, mais avec quels bras ?
PM. C’est le mot. Au-delà des questions financières, les UL ont surtout
besoin de bras ! Sans militants,
pas d’activité. Sans conscience de
classe, pas de perspectives de luttes.
Les syndicats doivent prendre toute
leur place dans l’UL, pour travailler
les convergences. L’UL n’appartient
pas à quelques-uns, c’est pas une
affaire de spécialistes, mais le point
de départ d’une reconquête syndicale. Tous concernés !
Ollivier Champetier (DR)
tion syndicale, trois par an environ.
Plus d’une trentaines de syndiqués
en ont bénéficié en 2014.
LVS. L’interpro est la raison d’être
des organisations territoriales CGT,
mais d’où viennent les manques de
relations entre territoires et professions ?
V.J. L’interpro doit reposer sur l’engagement des syndicats professionnels d’un territoire qui décident
de construire un outil commun.
Actuellement, je vois deux raisons
principales à ce déficit de liens .
D’abord, la tentation d’un mouvement syndical de repli sur soi. Il faut
y résister. C’est évident pour certains militants, moins pour d’autres.
Il s’agit surtout de ne pas déléguer
les questions interprofessionnelles
à telle ou telle structure.
Ensuite, certaines de nos structurations conduisent à des types de
syndicats différents : national, départemental ou local d’entreprise.
Cela va perdurer, d’autant que les
problèmes de représentativité impactent aussi notre organisation.
Cette diversité de situations n’aide
pas toujours à créer le liant nécessaire sur un territoire défini, mais
nous devons adapter notre mode
de structuration et évoluer.
Ce qui fait notre force, c’est le collectif ! Si nous nous engageons
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COMITÉ GÉNÉRAL
Comité général de l’UD CGT 91 en juin 2015
dans une juxtaposition de syndicalismes professionnels, nous irons
droit dans le mur et perdrons le
sens même de notre appartenance
à la CGT. L’interpro, ce n’est pas les
autres, c’est tout le monde ! Cela
nécessite de revoir les relations
avec les professions et les Fédérations pour articuler le fonctionnement avec les UL.
B.G. En matière de territoire, UL,
UD et région vont dans le bon sens
avec de plus en plus une réelle coopération. Quant aux professions,
il y a là un grand vide avec la plupart des organisations, hormis trois
ou quatre. Quant aux fédérations,
nous avons le sentiment dans les
UL d’être la cinquième roue du carrosse. Il faudrait au moins que nous
ayons systématiquement les noms
des DS et DSC qu’ils désignent. La
tâche nous serait simplifiée dans
nos relations dans les entreprises.
Combien de fois avons-nous la surprise d’apprendre qu’une société de
notre territoire fonctionne avec une
CGT autonome !
OC. Nous pointons la question de
notre syndicalisme: confédéré ou
pas ? Des congrès fédéraux ont eu
lieu et nous voyons bien que nous
sommes plus sur un renfermement
que sur une ouverture. De plus en
plus de syndicat nationaux ou régionaux s’organisent de façon autonome, avec une perte de repères et
encore une fois une défiance visà-vis d’un syndicalisme confédéré.
Cela n’est-il pas aussi la conséquence des atermoiements revendicatifs de notre confédération ?
Nous devons faire la démonstration
que le syndicalisme rassemblé est
la seule solution et que l’éparpillement nuit gravement à la santé revendicative !
P.M. Ce qui manque sur le territoire,
ce sont certaines structures professionnelles comme par exemple
l’Ustm, la Coordination des Services
Publics, la Santé, etc. On a besoin
d’animateurs Commerce avec des
moyens pour développer l’activité
et se faire le relais de la Fédé sur
Brigitte Gabriel (DR)
le terrain, avec les UL. On a aussi
besoin d’être informé par les Fédés
lorsqu’elles désignent un DS...
J-L.B. Cela tient à notre avis à la frilosité de certaines fédérations qui,
devant de mauvais résultats électoraux, devant des pertes de syndiqués dues aux restructurations
incessantes des services, opèrent
des replis sur soi, alors que plus que
jamais nous avons besoin du tous
ensemble.
O.C. Des différences il y en a, les territoires, les façons de faire, les histoires et les personnalités. J’aurais
tendance à dire « heureusement ».
C’est aussi toute notre richesse, ces
expériences différentes pour une
action commune. Je pense que les
missions « historiques » confiées à
nos UL sont assurées, certes peutêtre de façon différenciée, mais
surtout en fonction des capacités
humaines de chacun.
LVS. Le département est marqué
par une dualité entre Nord urbanisé et Sud semi-rural. Comment des
UL plus urbaines qui fonctionnent
au Nord-Ouest, Massy et les Ulis,
peuvent-elles coopérer avec une
zone Sud en difficulté ?
LVS. Les UL de l’Essonne ont un
fonctionnement et des résultats
inégaux. Comment expliquez-vous
ces disparités ?
V.J. D’abord par les différences des
territoires et de leur histoire, c’est
une évidence ! Les UL, comme
toutes les structures CGT, n’appartiennent pas à des dirigeants. Elles
sont des outils syndicaux qu’il faut
faire vivre avec les syndiqués. Je le
répète, il faut convier tous les camarades à venir dans les UL, pas pour
voir s’il y a de la lumière, mais pour
être partie prenante de l’activité. Les
formations niveau 1 sont souvent
une première porte d’entrée. Proposer des AG à tous les syndiqués
sur un territoire d’UL, ce n’est pas
si fréquent en dehors des congrès.
Et pourtant, c’est en rencontrant les
camarades, en leur montrant ce qui
fait le quotidien d’une UL, que nous
récupérerons des forces militantes.
C’est aussi rester en lien avec les
élus et mandatés, avoir un retour
sur l’utilisation de leurs heures, sur
leur mandat. Tout cela alimente la
vie de nos structures, et dans les
deux sens !
Philippe Madranges (DR)
B.G. Le terme « dualité » me gêne…
Les valeurs de la CGT m’amènent à
dire que la coopération avec des UL
en difficulté est une priorité, mais
comment faire ? J’en reviens à une
question précédente : avec quels
bras ?
P.M. Les Ulis ont décidé de
s’inscrire dans cette coopération
en allant parrainer les deux zones
d’activités de Dourdan. C’est ce
qu’on a fait le mardi 31 mars dans
l’espoir de réanimer cette UL pour
reprendre une activité revendicative sur ce territoire. Cet espace, qui
dépend de UL d’Étampes, est trop
grand pour marquer une présence
syndicale sans soutien de l’UD.
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COMITÉ GÉNÉRAL
Comité général de l’UD CGT 91 en juin 2015
LVS. La réforme territoriale Hollande-Valls, aujourd’hui imprécise
en Ile-de-France, va impacter le
découpage administratif et politique actuel. Pensez-vous que le
découpage territorial des UL doit
suivre mécaniquement la carte administrative ou existe-t-il d’autres
critères ?
et au fonctionnement, l’implantation de certains syndicats… Tout
cela est en mouvement et risque de
bouger plus vite que nos structures
syndicales. C’est pourquoi il faut
trouver les méthodes de travail qui
permettent toutes les transversalités entre territoires sans empiéter
les uns sur les autres.
P.M. C’est encore trop tôt pour définir une stratégie vis-à-vis du découpage territorial envisagé par ce
gouvernement, beaucoup d’incertitudes planent ! La population et
nombres d’élus politiques de tout
bord sont attachés aux départements et aux principes républicains
qui vont avec « égalité ».
O.C. La réforme des territoires qui
va s’engager risque d’impacter nos
organisations et c’est peut-être tant
mieux ! Pourquoi je dis ça ? Non pas
parce que nous devrions calquer les
territoires des UL sur le découpage
qui se prépare, mais cela va nous
contraindre à travailler ensemble
entre territoires. Régions et départements vont se retrouver bousculés, nous ne pouvons plus rester
enfermés dans et par des frontières
invisibles.
L’impact de cette réforme touchera
plus, à mon avis, nos UD et nos UR
que nos structures locales. Hormis
les structures professionnelles,
nous aurons à travailler particulièrement avec la CSD des Services Publics, car nous allons nous retrouver
avec des communautés d’agglos se
retrouvant sur deux départements,
V.J. Ce nouveau puzzle institutionnel va accroître la perte de repères,
les inégalités et la concurrence entre
les territoires. Ce découpage, centré
sur les métropoles et pôles d’excellence, appuyé sur des raisons économiques et financières dans le
cadre d’une politique d’austérité,
n’apporte pas de solutions à la crise
actuelle. Il ne vise au final qu’à servir
les intérêts des grandes entreprises
et du capital. Il ne paraît ni possible,
L’analyse des territoires est celle du
tissu économique
et social (DR)
ni souhaitable pour le moment, que
notre découpage syndical se calque
sur un tel découpage administratif. Il y a des priorités qui semblent
davantage impacter notre action
syndicale, comme les nécessités
géographiques, la répartition de la
population, les zones d’activité, la
localisation des bassins d’emplois,
les besoins liés à la représentativité
91 et 77, mais aussi le 78, avec des
élections de représentants des personnels dans ces communautés
que l’on nous annonce pour 2016…
J-L.B. Il ne s’agit pas pour notre UL
d’Évry, mais je crois aussi pour notre
UD, de suivre le découpage administratif du gouvernement et de la
volonté patronale, mais d’être l’outil
de proximité des salariés sur les bas-
sins d’emploi, sur les zones industrielles, quand elles existent encore,
les Centres Commerciaux, etc.
LVS. Faut-il revoir, en termes de fusion ou de scission, la carte des UL
de l’Essonne ?
Véronique Josien (DR)
V.J. Beaucoup de secteurs professionnels sont confrontés à des restructurations importantes. Dans la
fonction publique, les politiques de
décentralisation, la RGPP (Révision
générale des politiques publiques),
les suppressions d’emplois, les évolutions ou les suppressions de missions, conduisent à des réorganisations qui, outre leurs effets négatifs
sur les personnels et les missions
de service public, peuvent impacter
nos structures syndicales.
Dans le secteur privé, nous sommes
confrontés aussi à des restructurations, fusions/acquisitions, externalisations, qui peuvent avoir des
conséquences sur les champs de
syndicalisation.
C’est aussi pour cela que la question du redécoupage, ou non, ne se
pose plus de la même façon. Cela
nous a confiné dans des débats
longs, techniques et internes qui ne
nous ont pas permis d’être réactifs
et n’ont pas débouché pas sur une
amélioration de notre activité dans
les territoires. Il faut dépasser ce
questionnement pour le moment et
être plus pragmatique.
B.G. Ce sujet n’est pas à l’ordre du
jour. Nous essayons déjà de faire
vivre les UL existantes. Ni la fusion
ni la scission ne créeront plus de
moyens.
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COMITÉ GÉNÉRAL
P.M. Avant de parler de fusion ou
de scission, il faut d’abord faire en
sorte que les structures existantes
fonctionnent.
O.C. La question n’est pas tant
de revoir des découpages que de
réfléchir au travailler ensemble !
Comme nous avons su bien le faire
pour les TPE, nous devons continuer sur cette logique et l’amplifier.
Quand l’UL des Ulis va distribuer à
Dourdan, pourtant raccroché à l’UL
d’Étampes, sommes-nous dans une
OPA hostile ou dans la prémisse
d’une nouvelle façon de travailler ?
Nous sommes là dans l’approche
qui doit nous réunir, le travailler
ensemble. Peu importe la carte, le
territoire, c’est la CGT qui en sort
gagnante. La mise en commun de
nos objectifs, actions et formations,
est d’ores et déjà engagée. Nous
devons la poursuivre et l’amplifier.
J-L.B. En ce qui nous concerne, ni
scission ni fusion, mais plutôt la
recherche de mutualisation de nos
moyens, au travers d’échanges, de
rencontres, d’entraide matérielle,
tirages de tracts, aides en matière
de droit du travail au travers des
permanences, etc.
LVS. Ces questions de territoires et
d’action militante ont déjà été évoquées dans les précédents congrès
et comités généraux de l’UD. Ces
débats n’ont pas généré de modifications positives sensibles. Quels
sont les outils du changement réel ?
O.C. Je ne suis pas sûr que tous ces
débats n’aient pas eu d’effets bénéfiques. Pour exemple, la formation
que nous mutualisons. Aujourd’hui,
il n’y a plus de stage niveau 1 propre
à chaque UL, ou même département.
Nous devons pousser cette même
logique pour l’ensemble des sujets qui animent la vie des Unions
locales et plus largement pour nos
départements.
Mais nous devons passer la vitesse
supérieure, en bousculant un peu
nos habitudes, car c’est de cela aussi dont nous devons débattre, nos
habitudes ! Pour voir plus loin.
V.J. De quoi avons-nous besoin ? De
moyens ! En premier lieu, il faut des
bras, c’est-à–dire des militants pour
participer à la vie de nos UL, mais
ces militants doivent être plus nombreux, formés et organisés dans le
collectif. Comment mutualiser nos
forces, nos collectifs militants sur
des territoires conjoints ? Peut-on
envisager des réunions de travail
communes ?
Ensuite, comment impliquer davantage de camarades, y compris
ceux qui sont mandatés sur le territoire ? Il serait intéressant de définir collectivement des règles de vie,
une sorte de charte, qui nous permettent d’avancer concrètement
sur ces points.
LVS. L’effort de syndicalisation et
une politique financière rationnelle
sont minorés dans l’activité de la
CGT, au profit des débats internes.
Êtes-vous décidés à changer de
méthodes ?
P.M. Je me suis déjà exprimé sur
ce sujet à la C.E. de l’UD, je trouve
qu’on fait trop de réunions et pas
assez de terrain. Pour plusieurs
raisons. Des mandats syndicaux
qui bouffent les camarades, NAO,
Gpec, égalité H/F, Contrat Senior,
etc, plusieurs casquettes...
L’orga doit redevenir une priorité,
appeler les bases pour les Fni, pour
les stages niveau 1, pour la diffusion des tracts, les manifs, visiter
les syndicats, faire le point avec
eux, comment les aider, participation à l’activité des UL etc. La formation des nouveaux élus doit être
une priorité.
B.G. Nous, les UL de l’Essonne,
mettons tout en œuvre pour dépasser les débats internes stériles.
Nos priorités affichées sont dans la
rencontre des salariés dans et hors
l’entreprise. Il nous faut refuser les
réunions imposées par les directions d’entreprise pour élaborer des
chartes ou tout autre document inutile. Notre temps est trop précieux
pour le perdre. Seules les campagnes de syndicalisation, les discussions avec les salariés, les syndiqués, les élus sont importantes.
Nous devons aussi nous attacher à
les former pour voir ressortir de ces
stages les militants de demain.
O.C. Notre comité général, l’instance entre deux congrès, est bien
le moment pour parler de ça. Aujourd’hui, éparpillés, demain, rassemblés ? Nous avons à nous questionner et à mettre en place des
solutions .
V.J. S’il y a un but à ce comité général, c’est d’en sortir avec des
méthodes de travail et des outils
communs qui nous fassent gagner
du temps et de l’efficacité. Ces deux
jours doivent nous servir dans notre
quotidien militant pour aller sur le
terrain, à la rencontre des syndicats
et des salariés, y compris dans les
déserts syndicaux, pour mener nos
campagnes revendicatives.
J-L.B. La meilleure des réponses à
apporter à cette question est d’arrêter de passer plus de temps à régler
nos problèmes internes qu’à être
sur le terrain.
Inciter nos militants à retourner sur
le terrain de la lutte des classes, à
disputer le terrain du combat des
idées au Medef et au gouvernement, et à poser en grand la question de l’adhésion à la CGT.
Le programme
Jeudi 18 juin (matinée)
- Actualité sociale
et revendicative
- Bilan d’activité et mise en
œuvre des orientations depuis
le dernier congrès de l’UD
jeudi 18 juin (après-midi)
Lien et coopération entre
nos organisations syndicales
et nos structures territoriales
Introduction
- Travail en ateliers :
- droits syndicaux et activité
interprofessionnelle
- travail commun et solidarité
entre territoires
Vendredi 19 (matinée)
Bilan des ateliers et prise
de décisions
Repas fraternel
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g
luttes
Appel24/Sérénité24 à Évry
64 jours de grève pour la dignité
Une PME en grève pendant plus de
deux mois, ce n’est pas courant,
sauf en cas de fermeture. Le conflit
qui s’est terminé (provisoirement)
le 18 mai 2015 n’est pas lié au maintien de l’emploi, mais à des conditions de travail inadmissibles.
L’examen du dossier montre aussi
des défaillances pour le moins suspectes des pouvoirs publics.
Appel24 et Sérénité24 sont deux entreprises liées, domiciliées 48 Boulevard des Coquibus, à Évry. Elles
s’occupent officiellement de « soutien aux entreprises ». Pratiquement,
ce sont des centres d’appel spécialisés dans le secteur médical (prises
de RV de médecins, de commandes
de laboratoires, intermédiaire du
numéro d’Urgence cardiologique,
7 jours sur 7 et 24 h sur 24). Le 16
mars 2015, 11 salariées sur 17 se
mettent en grève. « Cette décision
a été prise à cause d’une énième
insulte de la direction, qui a fait déborder le vase ». Plus précisément,
une cadre (très) proche du directeur,
Alain Karadjian, traite une collègue
de « conne » à la suite d’une réclamation de client médecin.
Les revendications sont nombreuses pour des opératrices
payées aux alentours du Smic et à
horaires variables : 120 euros brut
mensuels d’augmentation, relevé
précis des heures travaillées en l’absence de pointeuse, salle de pause
améliorée, et surtout respect de la
direction envers des jeunes femmes
considérées comme des répondeurs téléphoniques plus ou moins
intelligents et corvéables à merci.
Pas les moyens ?
« Les revendications ont été mal
accueillies », explique une négociatrice des 11 salariées, ramenées
à 10 peu après le début de l’action.
« Dès le début, refus catégorique
de communiquer. Le patron dit ne
pas avoir les moyens de nous augmenter ». C’est aller un peu vite. Le
PDG n’est pas à la soupe populaire,
mais à la tête de plusieurs socié-
tés domiciliées à la même adresse
et générant un résultat net annuel
d’environ 850 000 euros (chiffres
du bilan 2013). L’argument financier est donc irrecevable, mais son
bénéficiaire se montre intraitable.
« L’employeur propose 3 € brut sous
conditions, de la provoc pure et
simple », explique la CGT. Dans les
grève cinq nouvelles salariées, sur
des CDI avec période d’essai. Volonté de favoriser un clash avec les
grévistes ? Perdu. Les relations ne
s’enveniment pas et le dialogue se
noue entre anciennes et arrivantes,
même lors des blocages du site.
Cependant, pas facile de vendre un
service de qualité avec une moitié
bandes dessinées du dialogue social à la sauce Macron, le dialogue
devrait s’ouvrir. Chez M. Karadjian,
non. Les grévistes vont donc chercher du soutien à l’extérieur.
D’abord, la mairie d’Évry, dès le 16
mars. « La juriste nous a conseillé
d’aller voir la CGT », dit une salariée. Commentaire d’un militant de
l’Union locale : « Chaque fois qu’il
y a un problème qui les dérange, la
mairie nous l’envoie. C’est systématique ». Le secrétaire de l’UL, JeanLouis Betoux, résume simplement :
« Les salariés sont venues nous
voir et ont trouvé une écoute. L’action de l’UL d’Évry a été d’être au
jour le jour auprès des salariées, de
les conseiller, de les accompagner
dans toutes les démarches, sans
jamais faire à leur place, de populariser leur mouvement, d’appeler à
la solidarité humaine et financière ».
Pour discuter, il faut une volonté
commune. Elle est absente chez le
patron, qui embauche pendant la
d’effectif. À l’extérieur, la solidarité
s’organise, syndicale avec la CGT,
mais aussi politique et associative.
Où sont
les pouvoirs publics ?
La grande défaillance vient des pouvoirs publics. Après que son service
juridique ait botté en touche vers la
CGT, la mairie d’Évry nomme un
« médiateur » qui fera deux brèves
apparitions sous forme de conversations avec le directeur avant de
rentrer à la maison.
La justice se montre nettement
meilleure. « Le 3 avril au matin », raconte Jean-Louis Betoux, « les salariées et la CGT ont été convoquées
par voie d’huissier, sur demande de
l’employeur au Tribunal de Grande
Instance, notamment pour entrave
à la liberté du travail. Au travers de
cette convocation il s’agissait bel et
bien d’une entrave au droit de grève
et à l’action syndicale. La justice lui
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 8 - Avril - Mai 2015 -
luttes
a donné tort, a reconnu la liberté
fondamentale des salariées d’exercer le droit de grève, le rôle et la reconnaissance de l’UL CGT d’Évry ».
Côté police, l’attitude est surjouée.
Chaque fois que les grévistes occupent l’entrée du bâtiment, les
flics arrivent à l’appel urgentissime
de la direction et restent aussi longtemps que des touristes devant une
attraction foraine, demandant leurs
papiers à des grévistes qui ne provoquent aucun trouble à l’ordre
public et leur donnant des cours
gratuits : « Connaissez pas la loi,
vous ? Savez pas que c’est interdit
de rester là ? J’vais vous apprendre
le droit, moi... ». L’UD CGT 91 a interpellé le préfet de l’Essonne.
La DIRECCTE de l’Essonne et son
Inspection du Travail sont plus dis-
Un autre service public est mouillé
jusqu’à l’os dans cette affaire : Pôle
Emploi. Comme Alain Karadjian est
un homme d’affaires avisé, il s’occupe aussi de formation professionnelle, le pactole social de l’époque. Le
système a déjà été décrit par la Voix
Syndicale à propos des salariées du
Centre Leclerc de Fleury-Mérogis, où
des « stagiaires » étaient employées
à plein temps en oubliant de les
payer, sous couvert de « formation »,
avec la complicité de l’agence locale
de Pôle Emploi, qui case des dossiers
en arrosant des employeurs confondant formation et exploitation. Le
système d’Appel24 est légèrement
différent, puisqu’il ne s’adresse pas à
crètes. Alors que les conditions
de travail sont pour le moins discutables, en termes d’horaires et
de comportement de la direction,
l’agence d’Évry confirme sa politique des petits singes chinois :
surdité, cécité, mutisme. « Les gens
de la DIRECCTE étaient mous du
genou, les pouvoirs public n’ont
servi à rien », résume une gréviste. Confirmation de Jean-Louis
Betoux : « On ne peut pas dire que
les pouvoirs publics ont manifesté
une volonté de régler cette affaire,
de par leur attitude que l’on qualifiera au moins de frileuse. Mis à
part le Procureur de la République,
qui a débouté l’employeur de ses
demandes, la DIRECCTE et la Préfecture n’ont véritablement pas agi
dans un sens favorable aux salariées ».
des demandeurs d’emploi, mais qu’il
inclut la formation dans l’activité
de ses salariées en étant payé pour
cela, deux fois gagnant en somme.
D’après un organisme soutenant les
grévistes, ces mesures sont d’autant
plus néfastes que « les salariés ne
résistant pas longtemps dans l’entreprise finissent par démissionner,
ils doivent alors rembourser 750 € à
l’employeur, puisque le contrat de
formation n’est pas respecté par le
salarié en cas de désengagement
avant un an ».
Un protocole de fin de conflit est
signé le 11 mai. Il ne comporte pas
d’amélioration financière pour les
salariées, mais marque des avancées sur d’autres points. « Une salle
de pause et de restauration sera
aménagée pour fin juin 2015 au plus
tard ». L’accord promet aussi l’amé-
La formation
à votre service
lioration des écrans et de la gestion
des appels, mais aussi « une amélioration de la communication interne ». La langue de bois du texte
rédigé par le conseil juridique de la
direction promet que « M. Karadjian
s’assurera que le processus interne
de l’entreprise est bien maîtrisé par
tout l’encadrement afin que celuici explique bien aux salariés les
anomalies qu’ils commettent dans
le traitement de certains de leurs
appels ». En français de base, les
gardiennes renoncent à traiter de
connes les collègues qui rencontrent
un problème avec un client.
Une victoire morale
Des élections de représentants
du personnel seront organisées,
« sous réserve que les conditions
légales d’effectif minimum soient
remplies ». À propos de la grève,
ses jours ne seront pas payés, mais
prélevés sur les congés et/ou les
salaires jusqu’au 31 décembre. Un
article du protocole est toutefois
ambigu : « La société s’engage à
ne notifier aucune sanction pour
les faits commis pendant la grève.
Cet engagement ne concerne pas
les faits commis avant la grève ».
La dernière phrase touche directement une salariée très impliquée
dans le mouvement et en conflit
avec l’employeur avant le déclenchement. Un licenciement est en
jeu. Les protocoles d’accord n’excluent pas la rancune.
En fait, le travail ne reprendra que
le 18 mai à cause du licenciement
en question. La grève aura donc
duré 64 jours, du fait des mauvaises
manières et de l’entêtement d’une
direction d’un autre âge. Au-delà
des personnalités, l’affaire Appel24
montre une forme de revendication
qui se différencie en les renforçant
des autres demandes syndicales :
l’exigence grandissante de dignité
et de respect dans le travail. Sur ce
point, la victoire morale des grévistes est nette. Elle a aussi valeur
d’exemple.
-La
LaVoix
VoixSyndicale
Syndicale--nouvelle
nouvellesérie
série--N°
N°93
98--page
page99--Avril
Avril--Mai
Mai2014
2015--
Gilbert Dubant
g
actualités
Transition énergétique
Fausse concurrence et vraies factures
En France et dans le monde entier, la transition énergétique est
le grand dossier des années qui
viennent. Dans son numéro 97,
« La Voix Syndicale de l’Essonne »
a interrogé deux camarades spécialistes de cette question. On
continue sur deux points précis :
la « concurrence » entre fournisseurs publics et privés, ainsi que
le système de facturation. Olivier
Fégueux, de la Fédération CGT
Mines-Énergie, répond.
La Voix Syndicale. La récente transformation de GDF Suez en Engie n’a
pas éclairé la fixation des tarifs de
l’énergie pour le consommateur, ni
la question de la concurrence entre
opérateurs supposée favoriser la
baisse des prix. Quel est votre avis ?
Olivier Fégueux. Sous l’impulsion
d’une Europe libérale, la concurrence libre et non faussé est actée
dans les lois françaises et déclinée
dans les accords d’entreprises.
Cette soi-disant « concurrence obligée » n’est qu’un leurre et masque
les réelles intentions du capital. La
dérégulation nous a été vendue
comme un moyen de faire baisser
les tarifs et un mieux-vivre au travail pour les agents et salariés de ce
secteur. Après dix ans de dérégulation, il en va tout autrement !
Depuis la privatisation d’EDF GDF,
l’entreprise ne cesse de s’attaquer
aux garanties collectives statutaires
des agents du service public. La
rentabilité à outrance est prégnante
dans chaque unité de travail sur
l’ensemble du territoire, séparation
juridique de l’opérateur commun,
prévue par la loi entre les distributeurs d’énergie (ERDF/GRDF).
Pour financer les lois gouvernementales, compétitivité emploi, loi
Macron, en direction du capital,
et avoir ainsi du « cash-flow » disponible rapidement, l’État prévoit
la vente d’actifs des filiales d’EDF
(RTE, ERDF) et la création de nouvelles entreprises 100 % EDF avec
des salariés en dehors du statut des
électriciens et gaziers. La machine
à démanteler le secteur de l’énergie
et à broyer l’humain est en ordre de
bataille et s’accentue !
LVS. Les professionnels ont-ils
conscience de ces attaques ?
O.F. Les agents et salariés de l’énergie ne sont, certes, pas tous et toutes
à la même hauteur d’information,
mais ils connaissent bien sûr la finalité du projet de loi sur leurs conditions de vie au travail et vie privé.
Vers le 15 août 2014, la ministre de
l’Énergie, Ségolène Royal, confortée
par Francois Hollande, annonce qu’il
y a urgence de réagir sur les questions énergétiques face à l’augmentation des GES (Gaz à Effet de Serre,
NDLR). Un projet de loi Transition
Energétique est présenté à l’Assemblée nationale début octobre 2014.
Un grand débat parlementaire, et
donc de choix de société, s’ouvrait
aux citoyens. Mais afin de scléroser
tout débat ou contestation possible,
le projet de loi est passé en procédure accélérée.
Face à l’attitude irresponsable de
nos dirigeants, avec en coulisse
la privatisation, la FNME CGT et
ses syndicats ont décidé de réagir
avec des initiatives revendicatives
fortes, par exemple en coupant
l’électricité lors d’une visite électorale de Manuel Valls dans le Doubs,
ou des manifestations interprofessionnelles en novembre 2014 et janvier 2015. Nous allons continuer.
LVS. Quand l’usager reçoit une facture d’énergie, il regarde d’abord
la somme, plus rarement le reste.
Comment les prix sont-ils calculés ?
O.F. La facture est composée d’une
part fixe, l’abonnement, et d’une
part variable, proportionnelle à la
quantité d’énergie consommée.
Le montant de chaque facture est
la somme du prix de la fourniture
d’énergie proprement dite, de son
acheminement via les réseaux et
des taxes et contributions.
Quel que soit le fournisseur et
l’offre d’électricité ou de gaz naturel, le prix que chacun paie est toujours composé de trois éléments :
la fourniture d’énergie proprement
dite ; l’acheminement, c’est-à-dire
l’utilisation des réseaux ; les taxes
et contributions.
Le prix de la fourniture permet au
fournisseur de couvrir les coûts de
ses achats d’énergie (approvisionnement en gaz naturel et en électricité), de production dans le cas de
l’électricité, pour les fournisseurs
qui possèdent des centrales de production, et de gestion commerciale.
C’est la seule partie de la facture qui
fait l’objet d’une concurrence entre
les différents fournisseurs, c’est-àdire qu’elle peut différer d’un fournisseur à l’autre.
Vient ensuite l’acheminement jusqu’au domicile par les réseaux de
transport et de distribution, ainsi
que les capacités de stockage pour
le gaz naturel. La facturation de
l’acheminement est l’application
des tarifs d’utilisation des réseaux
établis par les pouvoirs publics sur
proposition de la Commission de
Régulation de l’Énergie. Ce sont
des tarifs régulés.
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 10 - Avril - Mai 2015 -
actualités
Source : observatoire des marchés de l’électricité et du gaz
naturel du 3e trimestre 2014 de
la Commission de régulation de
l’énergie (CRE).
LVS. Quelles sont les différences fiscales entre les sources d’énergie ?
Elle est calculée en fonction de ma
consommation.
Les Taxes sur la Consommation
Finale d’Electricité (TCFE) sont
définies par chaque commune et
chaque département. Elles dépendent de la puissance souscrite
et d’un coefficient multiplicateur
fixé et voté avant le 1er octobre de
chaque année par les conseils municipaux et généraux pour l’année
suivante.
La Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA)
s’applique avec un taux réduit de
5,5 % sur l’abonnement HT et la
CTA ; elle s’applique avec un taux
de 20 % sur le prix de l’électricité
HT, sur la CSPE et les TCFE.
O.F. Pour l’électricité, il existe quatre
taxes. La Contribution Tarifaire
d’Acheminement (CTA) permet
de financer les droits spécifiques
relatifs à l’assurance vieillesse des
personnels relevant du régime des
industries électriques et gazières.
La Contribution au service public
de l’électricité (CSPE) permet de
financer les obligations de service public : surcoût de production
d’électricité dans les îles, soutien
aux énergies renouvelables, tarif
social et la moitié du budget du
médiateur national de l’énergie.
LVS. Et pour le gaz ?
O.F. Dans le cas du gaz naturel, on
a cinq taxes et contributions. La
Contribution Tarifaire d’Acheminement (CTA) permet de financer les
droits spécifiques relatifs à l’assurance vieillesse des personnels
relevant du régime des industries
électriques et gazières. La Contribution au Tarif Spécial de Solidarité
Gaz (CTSSG) permet de financer le
Tarif Spécial de Solidarité Gaz, au
profit des clients démunis et la moitié du budget du médiateur national de l’énergie.
Cette part de la facture est indépendante du fournisseur ; il la perçoit et
la reverse aux gestionnaires de réseaux et de stockage, d qui sont les
mêmes quel que soit le fournisseur.
Les taxes et contributions s’ajoutent
à la facture hors taxes. Elles sont
fixées par les pouvoirs publics et
perçues par les fournisseurs qui les
reversent aux bénéficiaires.
La Contribution bio-méthane, appelée également CSPG, Contribution au Service Public du Gaz,
permet de financer l’achat de biométhane injecté dans les réseaux
de gaz naturel. La taxe intérieure
sur la consommation de gaz naturel (TICGN) est appliquée, depuis
le 1er avril 2014 à la consommation
des particuliers. Elle est intégrée,
en tant que recette, au budget de
l’État. La TVA obéit aux mêmes
règles que pour l’électricité.
LVS. Que pensez-vous de l’utilisation de ces taxes ?
O.F. En 2014, après une forte augmentation du KWH en électricité et
gaz, le retour sur investissements
des actionnaires a été de 3,6 milliards d’€ de la part de GDF-SUEZ et
2,5 milliards d’€ de la part de EDF !
Pour bien appréhender la facture
d’énergie, le système actuel est
financé d’une manière centralisée.
Grâce à une taxe payée par tous
les usagers et qui permet l’égalité
de traitement, c’est-à-dire le même
prix payé pour la même prestation,
tout citoyen bénéficie quel que soit
l’endroit où il vit, des mêmes conditions de fournitures et prestations.
La programmation des investissements de production ou l’organisation des réseaux doivent impérativement relever d’un service public
national. L’égalité de traitement et
l’aménagement harmonieux du
territoire ne peuvent exister qu’au
travers d’un échelon national fort et
démocratique. Mais demain, qu’en
sera-t-il ?
Un exemple : sur la CSPE, seulement 12 % de cette taxe sont alloués
aux familles reconnues en difficulté
et 60 % aux Energies renouvelables.
Avec 11 millions de familles en précarité énergétique, c’est aberrant
et scandaleux de ne leur consacrer
que 12 % !
C’est sur des questions comme ça
que le Pôle Public de l’Énergie, avec
en son sein des entreprises nationalisées, prendrait tout son sens.
Le prix des factures serait sous
l’égide de l’État, donc régulé. C’est
ce que propose la CGT.
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 11 - Avril - Mai 2015 -
(Propos recueillis
par Gilbert Dubant)
g
Dossier Santé
Ramsay et Générale de Santé fusionnent
Quelles conséquences pour l’emploi
et la qualité des soins ?
Fin avril 2015, les pouvoirs publics
valident le rachat de la Générale de
Santé (83,43 % du capital), n° 1 de
l’hospitalisation privée en France,
par l’australien Ramsay Health
Care et Prédica, une filiale du Crédit Agricole. L’événement touche
directement la région parisienne où
Ramsay possède 9 établissements,
contre 29 pour la Générale de Santé.
En Essonne, trois sites sont concernés : la Clinique du Mousseau à
Évry (Ramsay), les hôpitaux privés Jacques-Cartier de Massy et
Claude-Galien
de
Quincy-sous
Sénart (Générale de Santé). La
question de la fusion se double à
Massy par l’annonce du départ de
la maternité vers Antony (Hautsde-Seine). Bien que les deux villes
soient voisines, ce déménagement
ne présage rien de bon pour les
naissances massicoises et l’emploi.
La santé de la population est concernée par tous les mouvements de
direction, d’équipements et de personnels. Pour les usagers, la frontière entre établissements publics
et privés est de moins en moins
étanche et l’ARS (Agence Régionale
de Santé) a clairement fait le choix
de mettre les premiers au régime
sec en laissant les autres s’entredévorer à leur convenance. La fusion
Ramsay-Générale s’intègre à ces
grandes manœuvres, pendant que la
pression de l’ARS se renforce sur des
pièces maîtresses de la psychiatrie
en Essonne comme Perray-Vaucluse.
Dans tous les cas, la CGT mène des
campagnes d’explication et d’action
là où c’est possible. Certains militants, dont l’UD CGT 91, souhaitent
d’ailleurs une convergence des analyses et des luttes dans les secteurs
public et privé, qui font partie d’un
patrimoine commun à toute la société française.
Olivier Poher : « Tout un travail
d’éducation et d’information est à
faire ! »
Olivier Poher est l’animateur de la
CGT à la Clinique du Mousseau à
Évry. Il a aussi une activité syndicale dans le groupe Ramsay.
Dans le compte-rendu du Comité
d’Entreprise évryen, dont il est secrétaire, consacré le 30 mars 2015
à la fusion, il fait observer à Nicolas Champ, directeur de la clinique,
d’inquiétants aspects financiers.
« La fusion permet de reprendre la
dette de la GDS contractée en 2007
pour une durée de 7 ans d’un montant de 1 084 800 000 € avec un crédit in fine et la dette de Ramsay SA
de 240 millions d’Euros.
Cela se traduit par un nouveau crédit de 1 075 000 000 € d’une durée
de 6 ans assortie de contraintes
bancaires, basées notamment sur
un ratio entre l’endettement et
l’EBE (Excédent Brut d’Exploitation)
consolidé.
L’EBE étant composé de la masse
salariale pour 40 % environ, quelles
vont être les répercussions sur les
conditions de travail et les effectifs ? Parmi les financements prévus dans l’emprunt, il est stipulé
que 160 millions serviront au financement de distributions de toute
sortes. Effectivement, cela semble
respecté puisque lors de l’Assemblée Générale des actionnaires du
18 novembre 2014, ils se sont d’ores
et déjà distribué des dividendes
exceptionnels d’un montant de
60 377 098 € et d’un «acompte» pour
2014 de 78 998 073 €.
Les actionnaires se sont donc servis
sans attendre un quelconque résultat et cela à crédit sur la promesse
de baisser la masse salariale. Cet
endettement a pour conséquence
des frais financiers importants et
aggrave le déficit fiscal du groupe.
Cela lui permet, alors qu’il récupère
de ses filiales l’impôt sur les bénéfices dus par celles-ci, de ne pas
payer d’impôt à ce titre en France.
Nous pouvons nous interroger également sur ce qu’il se passera en
2020 lorsqu’il faudra rembourser
le prêt. Serons-nous à nouveau rachetés par un plus gros que nous
avec de nouvelles contraintes sur
le personnel ? La stratégie d’entre-
Olivier Poher (DR)
prise vise à créer de la valeur à long
terme pour les actionnaires. Nous
comprenons mieux l’économie de
la fusion !»
Zéro augmentation
Avant de formuler sans ambiguïté
un « avis défavorable », le CE extraordinaire pointe d’autres points
essentiels.
« L’organisation de la santé privée,
basée sur de grands groupes capitalistiques, ne risque-t-elle pas à
terme par le biais de restructuration
à visée purement spéculative d’engendrer des déserts médicaux sur
le territoire national ?
Est-il pertinent que l’argent des cotisations sociales, fruit du travail des
salariés, aboutisse à rémunérer des
actionnaires d’un groupe étranger
au détriment de la sécurité sociale ?
La présence de Prédica au sein de
l’actionnariat ne présage-t-elle pas
la prédominance des assurances
complémentaires sur l’assurance
maladie basé sur un système par
répartition ?
Quelle possibilité aura le patient
vis-à-vis du choix de son médecin
et quelle liberté aurait-il dans l’exercice de sa médecine ? Ne seront-ils
pas soumis aux injonctions de ces
groupes financiers dans leur liberté
de pratique, d’installation, d’exercices et de rémunération ? »
Le ratio disproportionné dividendes/
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 12 - Avril - Mai 2015 -
Dossier Santé
autofinancement
s’accompagne
d’une « promesse de baisser la
masse salariale ». Comment ? Pour
Olivier Poher, la réponse est simple.
« Ramsay pratique la flexibilité dans
les emplois du temps à outrance,
demande la libéralisation du plafond d’heures supplémentaires, fait
pression sur les salariés pour adapter leurs horaires au plus près de
l’activité en renvoyant les soignants
à la moindre variation de la charge
de travail. Ils ont également recours
en toute illégalité à un nombre
considérable d’emplois précaires,
principalement des CDD à la journée. Ils mettent en place, en dehors
de tout accord, voire en dénonçant
les accords existants des organisations permettant le rappel des
agents à leur domicile. Le non remplacement des personnels absent
est devenu la règle. Chaque départ
à la retraite est l’occasion d’une
suppression de poste. Les NAO
sont guidées par le siège et la règle
est simple : zéro augmentation ! »
Vers
une action d’envergure ?
La fusion Ramsay-GDS touche 39
établissements franciliens, ce qui
concerne environ 11 000 postes. Mais
quelle influence peut avoir un avis négatif des représentants des salariés ?
« L’avis rendu par le CE de la Clinique
du Mousseau n’a malheureusement
aucune conséquence directe sur la
fusion. Il a par contre le mérite de
mettre en lumière le dessein purement financier au profit des actionnaires, contrairement à la petite musique légendaire distillée dans les
établissements sur le bienfondé de
la Famille Ramsay et permettra de
replacer à sa place le débat lors des
futures négociations ».
Et l’action syndicale, en particulier celle de la CGT ? L’ampleur du
rapprochement touche évidemment toutes les organisations, à
commencer par la Fédération de la
Santé. Quelles réactions et propositions d’action ?
« L’analyse faite par le Comité d’Entreprise de la clinique du Mousseau,
dont 100 % des membres ont été élus
sur des listes CGT, a été diffusée à
l’ensemble des délégués syndicaux
CGT du Groupe GDS/Ramsay et nous
nous sommes réunis en collectif fin
avril à Marseille afin de partager nos
expériences et envisager les moyens
d’actions à venir » , explique Olivier
Poher. « Cela a d’ailleurs été l’occasion de soutenir le délégué syndical
d’une clinique du groupe à Marseille
lors d’une assemblée générale où,
suite à la dénonciation par le groupe
de l’accord d’entreprise, on tente
d’imposer la signature d’un nou-
vel accord par tous moyens, allant
jusqu’aux menaces à peine déguisées. La concentration des établissements de Santé au sein de grands
groupes semble être un mouvement
d’ensemble. Les attaques de plus en
plus pressantes de notre convention
collective (FHP) en vue de supprimer
le peu d’avantages qu’elle garantit,
et les derniers propos de son président, M. Lamine Gharbi qui, dans un
bras de fer avec le gouvernement,
promet l’arrêt de toute négociation sur les thèmes de l’emploi, des
qualifications et des salaires, nous
ordonne d’organiser un mouvement
de grande ampleur touchant tous les
établissements de la branche. C’est
sur cette base, que nous proposerons à la Fédération Santé et Action
Sociale une action d’envergure sur
le sujet pour octobre ».
Et localement, au plan départemental par exemple ? Le responsable
CGT d’Évry est plus dubitatif. « Il
me parait difficile aujourd’hui de
fédérer uniquement sur le thème de
la fusion, ses conséquences n’étant
pas encore intégrées par les salariés, ou tout du moins, ils ne font
pas encore le lien entre la dégradation de leurs conditions de travail et
l’appartenance à un groupe financier. Tout un travail d’information et
d’éducation est encore à faire ! »
Maternité de Massy
730 naissances annuelles
menacées de déménagement
Massy est par sa population la troisième ville de l’Essonne. Sa seule
maternité ce trouve à l’hôpital
Jacques-Cartier, touché par la fusion Ramday-GDS. Sur les 122 établissements de la Générale de Santé en France, c’est l’un des quatre
plus importants. Outre les menaces que fait peser sur l’emploi et
les conditions de travail le regroupement capitaliste, la direction du
groupe veut envoyer la maternité à
Antony (Hauts-de-Seine). Le syndicat CGT de Jacques-Cartier (HPJC)
et l’Union locale de Massy s’opposent vigoureusement à cette
mesure prévue pour août 2015.
La maternité existe depuis la création
de l’HPJC (plus de 40 ans). C’est une
maternité familiale, à taille humaine et
de niveau I, avec une prise en charge
immédiate et de très haut niveau en
pédiatrie cardiaque. C’est aussi un
symbole fort aux yeux de la population. Alors, pourquoi vouloir fermer
cet équipement ? Réponse d’Anne
Mingot, responsable CGT à JacquesCartier : « Ce n’est pas une fermeture
administrative, ni un manque de sécurité, bien au contraire. La décision
vient de la direction. La raison est
uniquement financière. L’objectif est
de récupérer de l’espace dans l’hôpital pour créer un service beaucoup
plus rentable, au détriment des salariés, de l’avis de la population et de la
liberté de choix du lieu de naissance
par les futurs parents ».
En fait, il s’agit plus d’un transfert
vers Antony que d’une fermeture
sèche. Là encore, c’est une mesure
comptable. Comme la majorité des
maternités du secteur privé, Antony
et Massy connaissent une diminution des accouchements. Le verdict
de la calculette s’appelle regroupement. Quel avenir en ce cas pour
le personnel de la maternité HPJC
et d’Antony ? La direction parle de
transfert d’activité (personnel et
naissances), mais la fusion des
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 13 - Avril - Mai 2015 -
.../...
Dossier Santé
deux maternités entrainerait un sureffectif du personnel.
« Pensez-vous sincèrement que la
direction va payer du personnel en
trop alors que sa politique est à la
rentabilité des actionnaires? », feint
de s’interroger Anne Mingot. « Un
tel transfert menacerait à très moyen
terme l’emploi et le statut professionnel. Notre maternité emploie 23
personnes. Les ajouter brutalement
à la maternité d’Antony revient à faire entrer un éléphant par la fenêtre ».
publics (Dourdan ou Arpajon dans
l’Essonne), c’est plus que vraisemblable. L’autre appui est interne.
Lors de l’annonce (timide) du transfert, la surveillante de la maternité,
membre élue CFDT au Comité d’Entreprise, n’a rien dit aux représentants du personnel.
Maintenir la maternité à l’HPJC, est
ce possible? Depuis 2012, par tracts
mais aussi par des discussions hou-
L’ARS en renfort ?
Conséquences
supplémentaires pour le personnel de l’hôpital de
Massy : augmentation du
temps de trajet et frais
kilométriques, obligation
de payer le parking, modifications de planning et
des conditions de travail,
changements d’horaire
de travail, travailler un
jour en plus, bouleversements familiaux…. « Si on travaille à Massy,
c’est qu’on ne veut pas travailler ailleurs ! », rappellent plusieurs salariées concernées.
La direction de Jacques-Cartier a
été plus que mesurée dans l’information du personnel. En fait, elle
(DR)
pratique le black-out, pensant bénéficier d’au moins deux soutiens.
Selon le directeur, l’Agence Régionale de Santé serait favorable à la
fusion. Compte tenu de la réduction à la hache des équipements
leuses en CE, la CGT avait dénoncé
l’incurie de la précédente direction
et sa volonté de laisser la situation
de la maternité se dégrader.
Aujourd’hui, le projet de travaux
décidé par la direction fait craindre
un
endettement
insupportable.
L’investissement envisagé, cumulé
à l’énorme dette
en cours, est très
dangereuse pour
l’avenir de l’hôpital. Depuis 2008,
le turn-over des
directeurs et leurs
choix
d’investissement
ont
conduit l’hôpital
à un endettement
phénoménal, sans
amortissement.
La succession de
directeurs a aligné les coupes
franches sur le
matériel, le linge,
les produits pharmaceutiques,
l’alimentation,
les
diminutions
d’actes des prestataires de service
et la masse salariale. Ces choix
plombent les conditions de travail
et dégradent l’ambiance générale.
Seule, la CGT
Un autre risque pour l’HPJC est le
repli sur son métier principal, la
cardiologie. « Cette politique du «
tout cardio », est inquiétante pour
l’avenir des deux services d’hospitalisation de chirurgie générale et
des services en relation direct avec
ces derniers », estime la CGT.
Dans la lutte pour le
(DR) maintien de la maternité
de Massy, plusieurs acteurs doivent être réunis.
La CGT elle-même mène
des actions à l’intérieur
du personnel et au niveau
de l’Union locale.
Les salariés de la maternité ont écrit aux membres
élus du CHSCT pour demander une expertise
extérieure sur le projet de
fermeture et le projet de
restructuration associé.
Ils sont en attente d’une
réponse de leurs collègues. Pour l’instant, le seul élu CGT
au CHSCT a accepté.
Au Comité d’Entreprise, les deux
membres CGT ont immédiatement
accepté, les autres ont suivi. Le CE
peut, en cas de carence du CHSCT,
engager une expertise et demander une expertise des comptes de
l’entreprise.
Dans la ville et au-delà, l’UL CGT de
Massy a diffusé la pétition « Non
à la fermeture de la maternité » et
distribué des tracts d’information.
Sa secrétaire générale, Brigitte Gabriel, considère la question comme
prioritaire. « C’est un dossier qui
contient l’essentiel des questions
sociales du moment : l’emploi, le
statut, les droits des femmes, la
population entière, les services
sociaux dans leur ensemble. Nous
n’allons pas lâcher l’affaire ».
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 14 - Avril - Mai 2015 -
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Dossier Santé
Psychiatrie publique
La CGT lutte
pour la sauvegarde de Perray-Vaucluse
Depuis plusieurs années, l’ARS
tente de fusionner les trois établissements qui gèrent la psychiatrie
publique
parisienne
(Perray-Vaucluse, Ste-Anne et
Maison-Blanche).
Depuis un peu plus d’un an a été
conclue une convention constitutive de Communauté Hospitalière
de Territoire (CHT), malgré l’opposition quasi unanime des organisations syndicales, la dénonçant
aujourd’hui par une opération de
démantèlement de l’EPS PerrayVaucluse avec un plan social à la
clef... »
Depuis début avril 2015, le syndicat a multiplié les actions pour
ouvrir des négociations, avec notamment la journée de grève du
jeudi 16, qui a mobilisé plus de 200
salariés, sans compter les agents
grévistes restés en service pour
assurer les soins et la sécurité.
(DR)
comme l’étape ultime avant la fusion des établissements.
Cette fusion se traduirait par la
création d’un mastodonte de près
de 130 structures réparties sur
trois départements et près de 7 000
salariés, soit une gestion hospitalière sans proximité ni humanité.
À Perray-Vaucluse, dans l’Essonne, l’ARS a placé ses pions
avec une nouvelle équipe de direction depuis septembre 2014. « Ces
gens-là s’acharnent, sans aucun
état d’âme, à fermer les unités les
unes après les autres, au profit de
Sainte-Anne, dont le directeur, M.
Chassaniol, président proclamé
de la CHT, est plus guidé par ses
ambitions personnelles que par
l’intérêt de la psychiatrie publique
de secteur », dénonce le responsable CGT, Christophe Freychet.
« Concrètement, cela se traduit
le rétablissement des acquis sociaux remis en cause depuis l’arrivée de cette directrice en 2014, le
respect des personnels et de leurs
représentants. S’y ajoutent les
revendications nationales : augmentation immédiate de la valeur
du point d’indice ; fin des suppressions d’emplois ; suppression des
projets de regroupements hospitaliers ; reconnaissance des qualifications ; mesures contre la précarité.
Le 17 avril 2015, Christophe Freychet expliquait : « Nous exigeons
depuis plus de deux semaines
l’ouverture de négociations entre
l’intersyndicale CGT-SUD, l’ARS
et la directrice : nos interlocuteurs
font toujours la sourde oreille à
nos exigences, préférant nous
adresser des lettres de menaces
de sanctions disciplinaires voire
de poursuites pénales ». Les interlocuteurs en question n’ont pas
changé d’attitude, mais la nouvelle
attitude, plus mobilisée, des salariés, pourrait donner un nouveau
visage au conflit.
Sourde oreille et menaces
Le soutien politique a pris une
dimension régionale, avec la présence de Marjolaine Rauze, maire
de Morsang sur Orge et conseillère départementale PCF, devant
l’hôpital du Perray, ou celle d’Hervé Bègue, conseiller municipal du
14° arrondissement de Paris et
membre du conseil de surveillance
de l’EPS Perray-Vaucluse, qui a
participé à l’assemblée générale
organisée le 16 avril sur l’Hôpital
Henri Ey à Paris.
Les revendications de l’intersyndicale CGT-SUD sont de deux
ordres. Au plan local, l’arrêt des
attaques contre les fermetures ou
les transferts de services, les suppressions de postes, est au premier rang, avec les moyens nécessaires en effectifs et qualifications,
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 15 - Avril - Mai 2015 -
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Dossier Santé
Qu’elle soit privée ou publique, la
santé dans l’Essonne est un enjeu général, donc syndical, par le
nombre de salariés concernés et
l’importance du secteur pour toute
la population. Les exemples cités
plus haut, de la fusion Ramsay-GDS
au sort de la psychiatrie publique,
confirment une offensive conjointe
des gouvernements successifs et
du patronat pour piller le secteur
public en engraissant les profits
privés, au détriment de l’emploi et
des salaires dans les deux cas.
Les luttes ont toujours existé dans
la santé. Elles demeurent. Mais les organisations de la CGT
éprouvent des difficultés à les coordonner
et à faire jouer les solidarités territoriales et
interprofessionnelles.
Évry, Massy ou Perray-Vaucluse ne sont
pas les seuls lieux
essonniens où le syndicalisme se bat. La
maternité de Dourdan,
le Centre Hospitalier
Sud-Francilien,
les
hôpitaux
d’Arpajon,
d’Orsay ou de Longjumeau, luttent
chacun à leur manière contre une
gestion publique désastreuse, pendant que les cliniques défendent
leurs emplois. Mais ces actions
réelles donnent l’impression, à
l’échelon départemental ou, plus
encore, régional, d’un ensemble de
foyers de résistance ayant peu de
liens entre eux.
Olivier Poher, responsable CGT à
Évry, ne dément pas, mais nuance :
« Sur des points précis où l’offensive est flagrante comme à la maternité de Massy qui, malgré ses
730 accouchements, se voit regrouper avec Antony, nous nous tenons
régulièrement informés entre délégués syndicaux. La menace touchant également d’autres établissements faisant de l’obstétrique,
l’inquiétude des salariés pourrait
conduire plus facilement à une action concertée ».
L’USD Santé CGT 91 fait évidemment de son mieux pour informer
et coordonner, mais le travail est
rendu difficile par les distances
géographiques, les différences
« culturelles » entre public et privé
et le manque de bras syndicaux au
plan départemental. Si les établissements où la CGT est présente
disposent de militants aguerris,
l’échange d’expériences et les
luttes communes, sauf sur des
revendications nationales, ne sont
pas monnaie courante.
La question n’a pas échappé à la direction de l’UD CGT 91, dont la préparation du Comité Général de juin
2015 renforce l’acuité, tout comme
l’analyse des résultats inégaux des
élections du 4 décembre 2014 dans
la Fonction publique hospitalière.
« La fusion capitaliste Ramsay-GDS
a son pendant dans le secteur public, c’est la politique de l’Agence
Régionale de Santé », estime le
secrétaire général de l’UD CGT,
Ollivier Champetier. « Et même si
le directeur de l’ARS Ile-de-France,
Claude Évin, est un ancien ministre,
de la Santé justement, il ne pourrait
pas faire tous ces dégâts s’il n’y était
pas incité par une politique gouvernementale qui ne change pas depuis 15 ans : raboter les moyens et
les prestations du service public au
profit d’un secteur privé lui-même
de plus en plus affamé de profits
immédiats pour ses actionnaires.
Les attaques incessantes contre la
Sécurité Sociale, aussi bien son financement que la solidarité qu’elle
représente, font partie de l’offensive générale contre ce qui fait le
socle de notre système social depuis la Libération ».
Sur plusieurs fronts
Une fois le constat fait, comment
lutter syndicalement ? Les fronts
sont multiples. D’abord en recherchant l’unité là où elle est possible.
L’intersyndicale CGT-SUD à PerrayVaucluse est une force, mais plus
difficile à réaliser dans des établissements publics comme le CHSF,
ou privés comme HPJC Massy, où
les attitudes des différentes organisations sur les revendications et
envers les directions sont peu compatibles et où les élections sont le
théâtre de durs affrontements.
Autre difficulté, les différences revendicatives
entre secteurs privé et
public, même si elles ont
tendance à diminuer sous
les coups assénés aux
deux. Cependant, l’habitude n’est pas prise d’un
échange constant d’informations ou de revendications communes sur
un même territoire entre
deux bases CGT, pas plus
d’ailleurs qu’entre ces
syndicats et leurs UL. Or
si la préparation du 51e
congrès confédéral de 2016 et du
Comité Général de l’UD 91 en juin
s’accordent sur la nécessité d’un
travail en profondeur, au plus près
des militants et des salariés, il y a
encore du chemin à faire.
« Je crois qu’il faut en parler avec
tous les camarades concernés, à
l’USD, dans les établissements et
avec la Fédé », dit Ollivier Champetier. « Au niveau de l’UD, il ne
s’agit pas de dire aux copains de se
débrouiller tout seuls. Nous devons
apporter notre pierre. Le premier
boulot, c’est de réfléchir ensemble
comment on peut partager les informations, nombreuses et importantes dans le secteur de la santé,
et donner un coup de main efficace
à toutes celles et ceux qui ont l’impression de se bagarrer dans leur
coin. Mon objectif, ce n’est pas de
créer une nouvelle instance plus
ou moins théorique, mais d’être
au plus près du terrain. Il n’y a pas
d’autre recette pour avancer ».
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 16 - Avril - Mai 2015 -
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élections
élections professionnelles Carrefour Market
La CGT à guichet fermé au Plessis-Pâté
Les salariés de l’entrepôt Erteco-France du PlessisPâté, dans l’Essonne, changent plus souvent d’enseigne que de choix syndical. Les élections professionnelles de 2015 ont cependant encore renforcé
l’audience de la CGT, au point de la transformer en
raz-de-marée dans plusieurs secteurs.
Il s’agissait de renouveler, fin mars 2015, les représentants des salariés au Comité d’Entreprise et les DP
(Délégués du Personnel). Depuis le dernier scrutin en
2011, beaucoup de choses avaient changé au PlessisPâté. Le sigle actuel Erteco-France n’est que la sousmarque d’entrepôts et de magasins ballottés par une
valse d’enseignes, passant de ED à l’espagnol DIA pour
revenir chez Carrefour Market, marquée par le mépris
des personnels, les franchises de magasins et un management local souvent dépassé.
Au plan syndical, mars 2012 a marqué un tournant. Une
longue grève gagnante sur les salaires et les conditions
de travail, menée par la CGT, installe durablement ses
dirigeants, Laurent Portala, Anne Gyamfua ou Robert
Bozien, comme les représentants d’une majorité de salariés. Les habituels « syndicats maison », FO et CFTC,
subissent la même défaite que la direction.
En 2015, il s’agissait de savoir si le phénomène allait
se réduire ou s’amplifier. Le résultat est écrasant en
faveur de la deuxième hypothèse, en particulier dans
le premier collège (ouvriers et employés).
Au Comité d’Entreprise, la CGT recueille 108 voix (100 %
des élus) contre 13 suffrages à FO et 27 à la CFTC. Dans
le 2e collège (techniciens et agents de maîtrise), le résultat est moindre, mais la CGT fait jeu égal avec FO
(1 élu chaque).
« 85 % des salariés ont voté CGT pour les élus des délégués du personnel », observe Laurent Portala. « Pour
les DP magasins, nous avons 64 voix, 11 pour la CFTC et
7 pour FO. En fait, ce sont seulement les responsables
des syndicats maison qui ont voté pour eux-mêmes.
Les autres salariés les ont carrément ignorés ».
Comment expliquer ces résultats remarquables ? Dans
l’ensemble de la grande distribution en région parisienne, on assiste depuis début 2015 à une montée des
luttes revendicatives, en particulier à Carrefour Market.
La grève de 2012 au Plessis-Pâté était donc en avance
sur son époque.
En second lieu, la montée de la CGT dans ce site est le
fruit d’un travail de plusieurs années en direction d’un
personnel rendu méfiant par les discours des autres
syndicats affiliés à la direction. Le bilan du Comité
d’Entreprise dirigé par la CGT depuis quatre ans et les
multiples interventions des délégués du personnel
pour améliorer les conditions de travail et les salaires
ont fini par convaincre.
Enfin, les responsables syndicaux ont choisi une politique de communication efficace. Elle repose essentiellement sur un travail de terrain quotidien et la publication régulière de tracts facilement compréhensibles,
car argumentés par des faits vérifiables.
« La confiance sans faille que nos collègues nous
ont manifestée nous touche énormément », dit Anne
Gyamfua. « Les scores très faibles, pour ne pas dire
ridicules, des autres syndicats démontrent bien l’envie
de changement ».
Les retraitées de Morsang vont à Montreuil
Pour la journée internationale
des droits des femmes, le 5 mars
2015, quatre retraitées CGT de la
Section Multipro de Morsang-surOrge sont allées au siège confédéral de Montreuil. Récit.
« La salle était pleine », dit l’une
d’elles. « Nous étions 185 participants de tous les coins de France.
Nous avons eu des témoignages
tout au long de la journée : une
délégation italienne de la CGIL et
espagnole des CCOO y étaient chaleureusement accueillies. Leurs re-
vendications sont les mêmes que
les nôtres. Deux sujets fédérateurs
ont été choisis pour les débats : la
pauvreté des femmes retraitées et
leur place dans le syndicalisme.
Pourquoi une telle initiative autour des femmes retraitées ? Au
fil des années, la pauvreté des
femmes s’installe de manière insidieuse, des bas salaires résultent
les petites pensions. Les camarades italiennes et espagnoles
nous parlent de départ à la retraite
à l’âge de 69, voire 70 ans, et des
difficultés dans leurs pays.
Pour convaincre que leurs exigences spécifiques sont justes, qui
peut mieux le faire que les femmes
retraitées ? Mais pour cela, elles
doivent s’organiser dans des collectifs de proximité, des associations locales pour échanger, partir de leurs vécus, des réalités, le
montant des pensions, l’accès aux
soins, aux transports, à tous les
services publics, aux logements,
etc. Quelle belle journée ! Cela
nous a boostées ! »
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 17 - Avril - Mai 2015 -
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Luttes
SNECMA
Riposte syndicale devant
la goinfrerie des actionnaires
Snecma-Corbeil est l’une des
grosses unités de production du
groupe Safran, dont les moteurs
équipent les leaders industriels
mondiaux, d’Ariane 5 à Boeing ou
Airbus. C’est le résultat
du travail de 69 000 salariés, ainsi que des milliers de fournisseurs et
de sous-traitants, dont
les grands gagnants
sont cependant les actionnaires. Une situation qui alimente depuis
plusieurs semaines une
action syndicale dans
la plupart des unités du
groupe.
Le 23 avril 2015, les actionnaires Safran tiennent assemblée générale (DR)
au CNIT de la Défense,
où les résultats complets pour 2014
doivent être rendus publics. Ils sont
plus que satisfaisants. La CGT note
cependant : « Pour la première fois
en 2015, la direction du groupe veut
obtenir la modération des salaires
afin de réduire la masse salariale
dans le but de dégager un résultat
encore en hausse. La réaction des
salariés a été immédiate avec 9000
personnes en grève au mois de
mars pour protester contre les propositions des directions. L’unité des
syndicats CGT, CGC, CFDT et FO a
permis de faire bouger à la hausse
les propositions Safran, mais sans
obtenir ce à quoi le personnel aspire : le maintien du pouvoir d’achat
et une progression de carrière. L’action a été poursuivie activement,
réunissant des milliers de salariés
sur différents sites comme au siège
de Safran, à Corbeil ou à Villaroche,
et ce malgré la démobilisation du
syndicat FO et un engagement de
signature de la CGC. Heureusement
pour nous, ce dernier étant un
syndicat catégoriel et ayant
moins de 30% de représentativité dans le groupe, il ne peut
signer seul ».
La mobilisation syndicale n’a
pas empêché la direction du
groupe de décider une hausse
de 7 % du dividende des actionnaires. Une autre inquiétude réside dans les désengagements successifs de l’État
dans le capital de Safran, car
cela augmente le capital flottant et permet l’entrée de nouveaux actionnaires comme
des fonds de pensions, tout
en stimulant l’appétit des anciens.
En vendant ses actions, le gouvernement fait rentrer de l’argent dans
ses caisses, mais se prive de recettes régulières dans l’avenir. Son
rôle sera donc de plus en plus marginal dans la stratégie du groupe.
Comearth ORSAY
Les nouveaux syndiqués marquent des points
COMEARTH est une entreprise de
télé-marketing située à côté de la
gare d’Orsay. Après plusieurs rencontres à l’Union Locale CGT des
Ulis, les salariés décident de franchir le pas et de créer une section
syndicale. À ce jour, plus de 20 salariés ont adhéré sur un ensemble de
150 environ.
il faut dire que les conditions de
travail sont au plus bas: salaires au
niveau du Smic, prime de 130 euros
à la tête du client, samedi régulièrement travaillé, pas de RTT, pas de
13e mois, pressions permanentes
des managers, 20 euros demandés
par mois pour le parking , un CE en
Délégation Unique du Personnel qui
ne fonctionne pas du tout, aucune
activité, même sociale, et un important turn-over du personnel.
C’est Julien Rajaoson que ses camarades ont choisi pour être représentant de la section syndicale. La
direction ne se laisse pas impressionner et conteste d’office la désignation par l’UL des Ulis au Tribunal d’Instance de Palaiseau.
En attendant de prochaines élections, la section prépare le cahier
de doléances et Julien, pas impressionné par les avertissements qu’il
reçoit, continue de syndiquer ses
collègues.
Déjà, la direction n’impose plus le
travail du samedi tous les 15 jours,
bizarrement disparu, mais le climat
reste délétère.
Julien Rajaoson (DR)
Gageons que la confirmation de
Julien par le Tribunal dans ses fonctions de RSS donnera du courage
aux salariés pour affronter une direction d’un autre âge.
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 18 - Avril - Mai 2015 -
Philippe Madranges
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Luttes
Zones industrielles du Sud-Essonne
Succès des mouvements revendicatifs
Les salariés de deux entreprises de
la chimie, l’une à Dourdan et l’autre
à Saint-Chéron, ont décidé de ne
plus accepter les conditions de travail imposées par les employeurs.
Dans celle de Dourdan, une PME
de 25 personnes, les salariés se
sont mis en colère suite à l’accord
signé par les délégués du personnel
sans étiquette, très proches de l’employeur, annonçant 0 % d’augmentation des salaires pour 2015. Colère
justifiée ! Les 23 salariés ont décidé
de se mettre en grève immédiatement. Ils étaient près d’en venir aux
mains avec les délégués du personnel mais, heureusement, un syndiqué CGT a prévenu immédiatement
l’Union Locale d’Étampes. Après
intervention, il a enfin été possible
de réunir tous les salariés autour
d’une table, y compris les délégués
du personnel en titre.
L’employeur, contraint de négocier,
a pourtant utilisé toutes les provocations pour éviter les négociations:
démission des DP, présence policière devant l’entreprise. Les salariés ont cependant élu un représentant des salariés. Ainsi celui-ci, avec
la CGT, a essayé de négocier une
augmentation de salaire.
Au bout de trois jours de grève, l’employeur a cédé et on a pu conclure
un protocole de fin de grève. Les
salariés ont obtenu une augmentation de salaire de 4 % sur 2015
en deux fois (2 % en avril et 2 % en
septembre); une augmentation de
4 % sur trois ans actualisée en fonction de l’inflation; une réunion du
CHSCT en présence de l’Inspection
du Travail et du médecin du Travail ;
le paiement des jours de grève ; l’organisation des élections professionnelles conformément à la loi.
De Saint-Chéron à Dourdan
À Saint-Chéron, les salariés sont
entrain de s’organiser. Trois adhésions à la CGT ont été enregistrées.
Les salariés montent un dossier sur
les conditions de travail et ont demandé une rencontre avec l’inspectrice du Travail. C’est une entreprise
gérée par un groupe américain. Les
salariés sont venus à l’Union locale
CGT ce qui leur a permis d’échanger
et de s’organiser.
À l’UL de Dourdan, on a évité une
crise violente entre les salariés et
l’employeur du fait qu’un salarié
s’était syndiqué à la CGT. L’exemple
montre que même un seul syndiqué
CGT peut faire bouger les choses, à
la condition qu’il soit en relation avec
l’union locale CGT de son secteur.
USR 91
Pour des transports gratuits et une vie dans la dignité
Les retraités CGT de l’Essonne ont largement participé aux mobilisations et aux manifestations de mars et
avril 2015. Leurs revendications s’expriment aussi par
des démarches portant sur la gratuité des transports
en commun dans le Val d’Orge ou la volonté réaffirmée de passer sa retraite dans la dignité.
Les retraités des UL CGT de Sainte-Geneviève-des-Bois
et Morsang-sur-Orge, négocient avec la Communauté
d’Agglomération du Val d’Orge l’accès et la gratuité des
transports en commun sur ce territoire.
Les salariés actifs, les chômeurs, les étudiants perçoivent une indemnisation des transports en commun ;
les retraités n’ont pas cette possibilité. Pourquoi, alors
que ces mesures sont largement appliquées ailleurs ?
Les retraités participent à la vie du pays, avec des responsabilités dans des structures sociales. Ils doivent disposer des moyens adéquats pour assurer leurs missions.
Le STIF et la région viennent de prendre une décision
(attendue) visant à uniformiser et à diminuer le coût
des transports en commun en Ile de France avec la
carte Pass Navigo. Quelle retombée pour les retraités ?
Une réunion s’est tenue le 26 mars 2015, avec le VicePrésident chargé des transports à l’Agglomération du
Val d’Orge. Il s’est engagé à saisir le STIF (Syndicat des
Transports d’Ile-de-France), prendre contact avec l’Agglo
de l’Arpajonnais, et étudier le coût réel de la mesure.
Rendez-vous a été pris pour juin 2015 pour examiner
les retombées des démarches.
Une charge pour la société ?
Autre sujet moins concret, mais tout aussi sensible pour
les retraités : la dignité. Des militants de l’USR CGT 91
ont écrit récemment un texte dont nous publions des
extraits :
« Les retraités une charge pour la société ? Pendant des
dizaines d’années de vie professionnelle, ces femmes
et ces hommes, salariés, ont permis la création de
richesses, les progrès des sciences. À l’âge de la retraite, ce sont toujours des consommateurs, leur vie
en fait un moteur économique et social. Ce sont des
soutiens essentiels, des appuis pour de nombreuses
familles. Combien d’associations ne vivent que grâce à
leur investissement ? Leur rôle dans la société exige de
bénéficier des moyens nécessaires pour bien vivre sa
retraite. C’était le sens de notre présence dans les rassemblements de l’année 2014 et de ces premiers mois
de 2015. Le 17 mars dernier, les retraités foulaient de
nouveau le pavé ; ils étaient avec les actifs le 9 avril,
toujours contre l’austérité et le projet de loi Macron.
Notre pouvoir d’achat se dégrade depuis deux décennies. Le projet de loi sur le vieillissement de la société,
engagé sous le gouvernement Ayrault, semble aujourd’hui remisé aux oubliettes. La CGT le considère
essentiel pour un grand service public de l’autonomie
pris en charge et financé dans le cadre de la Sécurité
Sociale ».
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 19 - Avril - Mai 2015 -
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actualités
Au travail, les femmes sont partout, l’égalité
L’histoire de France nous a habitués
à ce que des pouvoirs de droite,
conservateurs par réflexe, autoritaires par habitude, s’en prennent
à l’égalité républicaine. Mais ce
n’était pas une fatalité sans retour,
puisque l’opposition de gauche devenait l’alternative en disant non à
ce recul. Aussi quand c’est au tour
d’une majorité, élue par la gauche,
de faire disparaître la ministre des
Droits des Femmes et son ministère si fraîchement installé, comment croire que le désastre ne soit
pas plus grand, pas seulement pour
les femmes, mais pour l’ensemble
de la société ?
Quand le ministère du « Droit des
femmes » devient « Affaires sociales », il n’y a pas de surprise a
constater le peu d’accords d’entreprise efficients, ni même que déjà
1 500 entreprises ont fait l’objet
d’une mise en demeure pour ne
pas avoir respecté leurs obligations
en matière d’égalité F/H, mais que
seules deux ont été contrôlées et
48 sanctionnées. Déréglementer ne
fera qu’amplifier les résultats d’aujourd’hui.
Les inégalités hommes-femmes
sont à peu de choses près les
mêmes depuis 30 ans. Bien que les
femmes sont partout dans l’entreprise, leurs situations reflètent pour
partie le sexisme ordinaire dont
sont elles sont victimes dans leur
milieu professionnel. Un sexisme
qui transparait nettement à travers
la persistance des inégalités sur la
question des salaires, des conditions de travail et des parcours de
carrière. Cette situation est aggravée par la crise économique, qui
voit le démantèlement de la Fonction et des services publics, alors
il y a de quoi s’inquiéter pour elles
qui doivent déjà, aux deux bouts de
la chaîne, pallier les carences d’un
véritable service public de la petite
enfance et l’absence notable d’un
service public pour les personnes
âgées.
Accidents
et maladies professionnelles
Qui dit égalité professionnelle, dit
égalité salariale. Depuis la première
loi sur l’égalité professionnelle de
juillet 1983 (Yvette Roudy), plusieurs textes prometteurs visant à
réduire les écarts de rémunération
entre les femmes et les hommes,
ont été votés. Le dernier en date
ouvrait même la voie aux sanctions
financières, mais les décrets et circulaires suivants ont fini d’amoindrir la portée du texte initial et les
sanctions ont été tellement réduites
que les entreprises ne craignent
plus rien.
Selon la dernière grande enquête
de l’Insee, depuis 1990, l’écart de
revenus entre les femmes et les
hommes stagne. 14,1 % des femmes
vivent sous le seuil de pauvreté
(contre 12,9 % des hommes). Cette
différence de niveau de revenus, et
donc de niveau de vie, résulte notamment de la question des temps
de travail. En 2010, les femmes occupent 82 % des emplois à temps
partiel imposé, 9 % sont en sousemploi (3 % pour les hommes),
elles sont surreprésentées dans les
emplois peu qualifiés et davantage
concernées par les CDD (pour 59 %).
Et pourtant les femmes sont de plus
en plus qualifiées, mais les entreprises les cantonnent majoritairement au bas de l’échelle des postes,
les exposent à des conditions de
travail stressantes ou des travaux
pénibles surtout pour la catégorie
ouvrière. L’étude 2011 de l’ANACT
constate que le nombre d’accidents
du travail des femmes augmente de
21,8 % alors que, pour les hommes,
il régresse de 18,6 %. En dix ans, les
maladies professionnelles reconnues ont augmenté deux fois plus
vite pour les femmes (+179,5 %)
que pour les hommes (91,9 %). En
2010, elles dépassaient celles des
hommes.
Plus 3 % de FNI
Les statuts de la CGT incluent en
annexe la Charte Egalité et la journée internationale de luttes des
Femmes a été l’occasion d’une rencontre nationale le 5 mars dernier,
qui a permis de faire le point de la
place des femmes dans notre organisation.
Les participants, hommes et femmes
(26 hommes sur 115 présent(e)s)
ont réaffirmé que l’émancipation
des hommes passe par celle des
femmes, que les avancées pour les
femmes le sont pour tous.
Le constat chiffré dans notre organisation infirme les critiques qui ont
vécu jusqu’à aujourd’hui. Il y a pas
de difficultés pour faire adhérer les
femmes à la CGT, elles sont plus
de 46 % et ne sont pas moins longtemps adhérentes puisque de 2009
à 2015, le FNI montre une progression de 3 %.
Persiste par contre un déficit dans
la prise de responsabilités, un turnover important lié au refus de garder les responsabilités au-delà d’un
à deux mandats.
L’engagement en responsabilité
touche au coeur des rapports de
genre et explose le rôle traditionnellement dévolu aux femmes. Elles
sont plus souvent mises à l’épreuve
et leur autorité est plus souvent
remise en cause, dans un contexte
où il n’existe pas ou peu de mouvement d’indignation pour contester
des attitudes sexistes, voire réactionnaires.
Garder des responsabilités implique la prise en charge financière
des contraintes telles que garde
d’enfants et déplacements, un respect du temps entre vies privée et
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 20 - Avril - Mai 2015 -
actualités
nulle part
professionnelle. Cela implique des
activités à des heures compatibles
avec une vie personnelle et l’obligation de la parité à tous les niveaux.
Dans notre organisation, des progrès sont en cours et doivent se
poursuivre pour se conformer au
salariat tel qu’il est, en particulier
les secteurs du Commerce, la Santé et l’action sociale, qui reste très
féminisée. Autre effort, le besoin
de pérenniser les adhésions des
femmes dans les bases nouvelles
et faciliter leurs accès aux responsabilités au tous les niveaux de
l’entreprise au département.
Il est retenu l’amélioration du Plan
d’action pour l’égalité femmehomme dans la CGT qui sera le
support des repères revendicatifs
repris pour l’ensemble des négociations dans les instances nationales.
Annick Jeannette-Stiti
La Voix Syndicale
Ont participé
à ce numéro 98
de la Voix Syndicale
Intervenants:
Pierre Benoit
Claudine Berthonier
Jean-Louis Betoux
Ollivier Champetier
Jean-Claude Clément
Claude Doucet
Gilbert Dubant
éric Dumas
Olivier Fégueux
Christophe Freychet
Brigitte Gabriel
Anne Gyamfua
Annick Jeannette-Stiti
Véronique Josien
Hubert Lasserre
Éric Lesage
Philippe Madranges
Anne Mingot
Olivier Poher
Laurent Portala
Administratif et technique :
Brigitte BLANCHE
Publicité :
COMEDIANCE 01 49 22 74 57
ENPARTANCE :
Initiatives Solidaires 2015
Plus de 50 % des français ne partiront pas en vacances
encore cette année. Cette situation est en constante progression depuis trop longtemps. Le droit aux vacances
n’est pas un luxe, mais demeure un besoin vital nécessaire à l’équilibre, indispensable à l’épanouissement de
chacun. Un pouvoir d’achat en berne, une recrudescence
de la précarité des actifs, retraités et privés d’emploi sont
les causes d’une situation entretenue par nos dirigeants,
favorisant la finance au détriment d’un bien-être social.
Il n’est pas concevable que notre organisation syndicale se
contente de faire un état des lieux sans un réel investissement
de chaque structure syndicale locale, professionnelle et départementale, alors que nous avons des moyens de revendiquer
des droits sociaux pour tous.
Aider à faire partir des familles en vacances n’est pas une utopie et la CGT doit jouer un rôle social dont elle a vocation.
Cette année, nous devons renouveler en étroite collaboration
avec Enpartance île-de-France « Association fondée par les
UD CGT IDF » deux grandes initiatives dont les journées à la
mer à Dieppe les 25 juillet et 22 août 2015. Amplifier le succès
rencontré les années précédentes avec 1 391 participants pour
2014, soit plus du double depuis le lancement en 2011 de ces
journées.
Chaque syndicat, Union Locale, Comités d’entreprises en Essonne est invité à prendre part à cette action solidaire afin de
permettre aux familles essonniennes de partager une journée
fraternelle commune inoubliable.
Militer pour le droit aux vacances, c’est aussi prendre part à la
tombola solidaire, ainsi permettre de faire partir des familles
en 2016.
21 familles ont bénéficié en 2014 de séjours en villages vacances grâce à la vente de billets de tombola et de l’investissement de nombreux militants CGT et de l’Association Enpartance.
Des billets de tombola sont disponibles dans les Unions Locales et Syndicats. Nous invitons l’ensemble de nos syndiqués
à prendre part à la réussite de ces évènements, ainsi démontrer que pour la CGT la solidarité a du sens, que la concrétiser
est possible.
Ensemble, partageons la réussite de ces deux belles initiatives.
Ensemble, renouvelons leur succès.
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 21 - Avril - Mai 2015 -
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Conseils de Prud’hommes
Droit des salariés et justice prud’homale
Quel avenir en 2018 ?
Sans changement législatif, les
Conseils de Prud’hommes actuels
en ont jusqu’au 31 décembre 2017.
Les lois du 20 novembre 2014 et du
17 février 2015 (loi Macron) l’ont
décidé, au mépris des syndicats, en
particulier de la CGT.
Dans son numéro précédent, la Voix
Syndicale a commencé de traiter le
sujet en interrogeant le président
CGT du Conseil de Prud’hommes
d’Évry, Éric Lesage. Nous publions
la suite de l’entretien.
La Voix Syndicale. Quelles sont les
dispositions concernant les défenseurs des salariés et qu’en pensezvous ?
Éric Lesage. Pour les représentants
des salariés au sein des entreprises,
aucune disposition de la loi Macron
ne semble remettre en cause leurs
pouvoirs. Par contre, pour ce qui est
des défenseurs syndicaux, le texte
de novembre 2014 s’inspire très largement du rapport Lacabarats. En
clair, l’idée est d’améliorer le fonctionnement des prud’hommes par
deux mesures phares.
D’abord, accorder au militant syndical qui représente le salarié devant
les juges, un véritable statut. Aujourd’hui, il n’existe aucune règle
sur les conditions de recrutement,
de formation, de travail de ces délégués syndicaux.
La CGT réclame depuis des années
l’existence d’un véritable statut des
défenseurs syndicaux. Le nouveau
statut devrait donc prévoir une rémunération de ces heures de défense des salariés, ce qui constitue
une première étape, mais reste loin
de nos exigences.
Seconde mesure, une formation
initiale obligatoire, une obligation
de confidentialité qui permettra
d’avoir accès aux bases de données
et logiciels internes aux juridictions.
Tout ceci reste au conditionnel. Depuis des décennies, la CGT tape du
poing et du pied pour un véritable
statut de nos défenseurs syndicaux. Pourquoi ?
Parce qu’en premier lieu, les défenseurs syndicaux officient principalement dans ce qui doit rester une
justice de proximité. Mais là encore, plusieurs aspects. Au fil des
ans, les avocats se sont progressivement imposés dans les Conseils
de Prud’hommes. Le résultat immédiat a été la complexification des
procédures.
Éric Lesage (Doc LVS)
En second lieu, nos défenseurs syndicaux doivent bénéficier non pas
d’une, mais des formations indispensables au regard de la complexité du droit du travail, qui ne
cesse d’évoluer chaque jour.
LVS.Les chiffres officiels donnent
un pourcentage de 65 % des affaires présentées en Conseil de
Prud’hommes sujettes à un appel.
Ce chiffre est-il exact ? Qu’en penser en termes d’efficacité ?
É.L. Oui, ce chiffre est exact au
niveau national. Les Conseils de
Prud’hommes d’Évry et Longjumeau connaissent les mêmes proportions. C’est encore l’un des
arguments avancés par le rapport Lacabarats pour remettre en
cause les prud’hommes. Mais il
est simple de retourner un tel argument. Aujourd’hui, aucune statistique officielle ne permet d’établir
combien d’arrêts de la Cour d’Appel
sont infirmés ou cassés par la Cour
de Cassation, et par voie de conséquence, donnent plus ou moins raison au Conseil de Prud’hommes.
Il suffit de lire les arrêts de cassation qui tordent le cou en droit pur
aux arrêts de Cour d’appel. Chaque
jour, la Cour de Cassation rend
entre deux et trois arrêts en matière
sociale. Dès lors, l’argument ne
tient pas une seconde et constitue
un faux prétexte pour réformer les
prud’hommes.
Pourquoi, dans un dossier prud’homal, les employeurs qui perdent
leur procès ont-ils tendance à faire
appel de la décision ? Tout simplement pour gagner du temps.
Une procédure prud’homale dure
dans le meilleur des cas environ un
an à Évry, entre le moment où le salarié a saisi les prud’hommes et le
rendu de la décision en bureau de
jugement. La moyenne des autres
conseils du ressort, c’est-à-dire des
conseils qui dépendent de la Cour
d’Appel de Paris, est de 18 mois.
Dans certains conseils, ce délai
peut être facilement porté à deux
ans. Si un employeur fait appel de
la décision prud’homale, vous rajoutez facilement deux années de
plus. Si par malheur l’employeur
fait un pourvoi en cassation, rajoutez deux ans de plus.
L’autre aspect est purement financier. Lorsqu’une décision prud’homale est frappée d’appel, seules
sont exécutoires les sommes ayant
le caractère de salaires. Les dommages et intérêts n’ont pas ce
caractère et sont suspensifs, c’està-dire que pour prétendre à ces
sommes, le salarié devra attendre
la décision en appel confirmant le
jugement prud’homal.
Mais l’aspect financier n’est pas
le seul motif, la possibilité offerte
à l’employeur de faire traîner au
maximum l’affaire peut être purement personnelle. Il existe un déséquilibre flagrant entre la situation
de l’employeur et celle du salarié.
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 22 - Avril - Mai 2015 -
Conseils de Prud’hommes
L’employeur a les moyens financiers et le temps pour faire traîner
une procédure, car l’argent ne sort
pas de sa poche, mais résulte d’une
provision budgétée sur les comptes
de l’entreprise.
LVS. Les prud’hommes ne sont pas
des juristes professionnels. Sontils efficaces ?
É.L. Il est vrai que les Conseillers
prud’homaux ne sont pas des juges
professionnels, car issus du monde
du travail. Ils peuvent paraître partiaux au premier
abord, alors qu’ils ont prêté
serment devant le Procureur
de la République.
La spécificité de la juridiction
prud’homale est l’impartialité. Et c’est justement parce
que les juges prud’homaux,
qu’ils soient employeurs ou
salariés, sont issus du monde
du travail que cette partialité
apparente garantit l’impartialité, contrairement au juge
professionnel. Sur l’efficacité, je réponds oui sans hésiter. C’est une justice efficace
dès lors que l’on lui donne les
moyens nécessaires.
LVS. Les audiences prud’homales donnent l’impression
que de nombreuses affaires
font l’objet de renvois à
répétition. Comment faire
pour raccourcir l’attente des
décisions, dans l’intérêt des
salariés ?
É.L. La véritable question est : que
faut-il entendre par « délai raisonnable » s’agissant du traitement
des dossiers ? On ne peut pas
mettre systématiquement les retards de procédure sur le dos des
avocats ou des défenseurs syndicaux. Quelquefois, le retard est dû
aux conseillers eux-mêmes dans
l’élaboration des décisions, ce que
l’on appelle plus couramment les
prorogés. Pour les avocats, leurs
honoraires sont généralement fixés
par convention pour une instance.
Donc, le fait que l’affaire soit reportée n’a aucune incidence pécuniaire
pour le salarié.
Pour autant, il est courant que
s’agissant d’un premier bureau de
jugement, les avocats demandent
le renvoi de l’affaire, essentiellement pour des délais de communication de pièces, notamment la
veille de l’audience.
En général, les délais de renvoi sont
courts, entre trois et quatre mois,
pour permettre aux avocats de répliquer aux conclusions tardives de
leurs confrères. Ce paramètre fait
donc partie intégrante du délai de 12
mois que j’évoquais précédemment.
Pour les délais, oui, il est possible
de les réduire à condition que les
conseillers prud’hommes s’approprient des prérogatives du bureau
de conciliation. En effet, le bureau
de conciliation, première étape
dans le procès, doit s’efforcer de
concilier les parties, comme son
nom l’indique.
Le faible taux de conciliation partielle ou totale, d’environ 10 %,
reste stable depuis plus de 30 ans.
Aucune disposition du Code du Travail n’impose au juge de concilier
à 100 %. C’est tout simplement impossible et le législateur le sait bien.
Pour les délais au niveau des Cours
d’appel, 36 seulement existent sur le
territoire. Leur compétence s’étend
sur plusieurs départements et elles
souffrent comme les prud’hommes
d’un manque récurrent de moyens
et d’effectifs, alors que le nombre
d’affaires ne cesse de progresser.
Conséquence logique : l’allongement des délais, en matière sociale.
Mais pire encore, si votre ex-employeur obtient le simple renvoi de
votre affaire devant la Cour d’appel
de Paris, comptez environ deux ans
supplémentaires.
Le gouvernement déclare avoir augmenté le budget de la justice en 2015
de 2,3 %, soit 7,98 Mds €. En
2014, il avait rapidement débloqué 20 Mds € au titre du
CICE, censé relancer la croissance. On a vu le résultat.
LVS. En tant que militant
CGT et président du Conseil
de Prud’hommes d’Évry,
quelles actions allez-vous
mener d’ici fin 2017 et ensuite ?
É.L. Comment pourrionsnous rester un seul instant
les bras croisés tant l’ampleur et la violence de ces attaques sont sans précédent ?
Certes, des initiatives ont
été menées dans certains
conseils de prud’hommes.
Certes, l’URIF et le pôle
confédéral DLAJ se sont impliqués et continuent de mener des campagnes pour la
défense des prud’hommes,
notamment concernant la
signature de pétitions au niveau régional.
Mais cela ne suffit pas. Si nous voulons être écoutés, il nous faut passer à des actions fortes. Les conseillers prud’hommes sont des juges
élus, et mandatés par leurs UD. A
ce titre il est indispensable que la
prise d’initiatives soit concertée au
niveau départemental ou régional
et en « interpro ».
Elle doit être impulsée par nos UD
et non par les conseillers prud’homaux qui décident d’actions tous
seuls dans leur coin. Nous sommes
en 2015 et le mandat des conseillers
est repoussé jusqu’en 2017. Il n’est
pas trop tard pour mener des actions fortes si nous voulons conserver le principe des élections.
- La Voix Syndicale - nouvelle série - N° 98 - page 23 - Avril - Mai 2015 -
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