Homélie Jeudi Saint

L’Eucharistie
Homélie Jeudi Saint
Père Marcel Béguin
Nous avons entendu, il y a un instant, sous la plume de Saint Paul, le récit de l’institution de l’Eucharistie,
au soir du Jeudi Saint ; Saint Matthieu, Saint Marc et Saint Luc en ont donné les détails. Saint Jean, dans son
évangile, n’en parle pas, mais il raconte ce qui s’est passé avant de se mettre à table, Jésus lavant les pieds de chacun
de ses disciples.
Je vais relire tranquillement avec vous ce récit:
Il commence par ce mots : « Sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père,
Jésus ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout ». Essayons d’imaginer ce qu’il y a
dans le coeur de Jésus à ce grand moment. Il avait dit à ses apôtres : « Il n’y a pas de plus grand amour que de
donner sa vie pour ses amis. » Et voilà qu’il a conscience que ce moment est venu d’aller jusqu’au bout de ce grand
amour . C’est ce qu’explique Saint Jean : Jésus, qui est venu de Dieu, sait « qu’il retourne à Dieu ». En effet les
jeux sont faits, Judas,, dans quelques minutes quittera la table pour organiser son arrestation, au petit matin, il sera
condamné, à midi on l’aura mis en croix et trois heures plus tard il dira : « Tout est accompli. Père, entre tes mains
je remets mon esprit ».
Jésus est donc tout pénétré de la gravité de ce qu’il est en train de vivre ; il va en révéler le sens à ses
disciples par le geste inattendu dont Saint Jean nous décrit tous les détails : « Jésus se lève de table, quitte son
vêtement et prend un linge qu’il se noue à la ceinture ; puis il verse de l’eau dans un bassin, il se met à laver les
pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture ».. Pour pouvoir rapporter avec tant de
précision tous les détails matériels de cette démarche de Jésus, il a fallu que les apôtres en aient été très
impressionnés. Et c’est manifestement ce que Jésus voulait qu’ils retiennent. Il les aime vraiment ; aimer ce ne sont
pas seulement des sentiments, des mots ou des promesses, c’est, dans la réalité la plus banale de la vie, vouloir
apporter aux autres ce dont ils ont besoin. Ce soir là, ces hommes, qui ont marché dans la chaleur et la poussière, ont
grand besoin, avant de se mettre à table, que quelqu’un vienne à eux avec l’eau fraîche pour leur laver les pieds.
C’est tout ! et c’est d’abord cela le « Grand amour », dans la vie quotidienne.
En se remettant à table Jésus va dire à ses apôtres et nous dire que ce qu’il vient de faire est un exemple
qu’il nous donne, « afin, dit-il que vous fassiez vous aussi ce que j’ai fait pour vous ». Tout le reste de la soirée,
Jésus ne fera que répéter cela : « On vous reconnaîtra pour mes disciples à l’amour que vous aurez les uns pour les
autres … mon commandement, c’est que vous vous aimiez les uns les autres…aimez-vous les uns les autres comme
je vous ai aimés ». Après la grande leçon que Jésus vient de leur donner, les apôtres peuvent comprendre la manière
d’aimer qu’ils ont à vivre, concrètement, tous les jours : »vous devez vous laver les pieds les uns aux autres », c’est
à dire être à leur service pour répondre à leurs vrais besoins.
Mais un épisode qui se trouve au milieu du récit doit attirer notre attention : c’est le dialogue de Jésus avec
Pierre. Pierre a tellement de respect pour son maître et tellement conscience de sa propre indignité qu’il refuse
énergiquement de se laisser laver les pieds par lui : « Tu ne me laveras pas les pieds, non, jamais ! » Et Jésus lui
dit : « Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi. » Autrement dit, nous ne pouvons être disciples de Jésus,
et lui ressembler en nous aimant les uns les autres, que si nous laissons Jésus nous laver, c’est à dire nous donner la
force d’aimer. .La prière, l’Eucharistie et les sacrements sont autant de source pour nous, sources de pureté, de santé,
de vie. Nous avons toujours besoin de nous en convaincre .Que ces fêtes de Pâques nous en fasse profiter encore un
peu plus.