Services de post-marché
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Services de post-marché
SERVICES DE POST-MARCHÉ Les partenariats se multiplient Ronald McKenzie e marché des services financiers est en pleine ébullition. Pas une semaine ne passe sans qu’on annonce un partenariat audacieux. Après les associations entre les banques et les firmes de courtage, qui vont de soi parce qu’on est entre institutions financières, voilà maintenant que les banques s’allient avec des grands magasins et même des épiciers! Bientôt dans les supermarchés Loblaws au Québec, vous pourrez arrêter au comptoir President’s Choice Financial et négocier un prêt hypothécaire. Le produit, identifié à President’s Choice, est administré par la Banque CIBC. Afin de le rendre plus attirant, on l’assortit d’incitatifs L liés à l’alimentation. Vous signez une hypothèque de 100 000 $? Vous aurez droit à 447 $ de valeur d’épicerie à la fin de l’année. C’est révolutionnaire. Favoriser la vente de fonds de placement Comme les épiceries, l’industrie québécoise des fonds de placement est aussi en grande transformation. Par exemple, la firme SEI travaille à implanter auprès des intermédiaires indépendants un concept de fonds clé en main. «Ceux qui vendront nos fonds auront accès à notre système Trust 3000, qui fait le suivi administratif et comptable des fonds SEI, et qui peut aussi prendre en OBJECTIF CONSEILLER 16 É charge tout le back office du cabinet», dit Michel Di Gregorio, directeur régional, Est du Canada. SEI produira les états de compte et les feuillets et relevés fiscaux, il calculera les dividendes, les gains en capital, etc. «L’intérêt pour notre concept est évident. Au dernier congrès de l’Institut québécois de planification financière, environ 400 des quelque 530 planificateurs financiers inscrits ont assisté à nos présentations. Si tout va comme prévu, nous devrions être prêts d’ici 18 mois.» Il faut dire que le produit clé en main de SEI est attrayant. D’abord, il a du vécu. Aux États-Unis, où il est implanté depuis quelques années, la machine est rodée : 5 200 clients utilisent déjà le système Trust 3000. Ensuite, il convient aux cabinets de toute taille. Certaines firmes JUILLET-AOÛT 2000 17 Photo : Sonia Jam L’équipe du service de post-marché de E.C.E. Compensation Électronique Photo : Bernard Dufour Normand Leclerc, président de CITAC et Mario Picard, v.-p. opérations situées en région ne comptent que de 10 à 15 intermédiaires, ce qui ne les empêche pas d’obtenir tous les services, «comme s’ils faisaient partie d’une grande maison», précise Michel Di Gregorio. Enfin, le système Trust 3000 offrira des fonctions de communication avec FundServ. Mais ce ne sont pas tous les promoteurs de fonds qui ont les moyens de SEI. Lorsqu’on est un «petit» joueur, lancer un fonds est une chose, en assurer le suivi administratif en est une autre. «Mettre sur pied un back office aurait coûté très cher», constate Marie Desroches, présidente d’Évolution FM, qui distribue les fonds Avix et Azura. «Voilà pourquoi nous avons choisi de nous associer à une entreprise spécialisée. Nous avons ainsi pu concentrer notre énergie sur la création de fonds, la recherche de gestionnaires et l’organisation de notre équipe de ventes.» Cette entreprise, CITAC, est établie à Vanier, en banlieue de Québec. Elle fournit des services d’impartition en administration et en comptabilité en milieu informatisé. «Nos services sont offerts aux promoteurs de fonds, aux courtiers en épargne collective et aux compagnies d’assurance-vie», dit Normand Leclerc, président de CITAC. Les efforts de commercialisation sont axés principalement vers des fonds existants dont l’actif net est de 100 millions de dollars environ, ou vers les institutions qui projettent de créer une nouvelle famille de fonds. «Nous mettons en place les procédures comptables et administratives», précise Normand Leclerc, «mais nous pouvons aussi aider les clients à produire des analyses de rentabilité, à identifier les exigences réglementaires, à définir des indicateurs de performance, etc.» CITAC ne fait ni compensation ni garde de valeur. «Nous nous occupons de la partie administration et comptabilité du fonds, dit Normand Leclerc. Nous tenons le registre des détenteurs et nous effectuons le traitement des comptes enregistrés. Nous calculons la valeur des fonds et assurons le service aux représentants.» Pour Marie Desroches, ce dernier aspect a pesé dans sa prise de décision. «Nous voulions que nos représentants puissent être servis en français, ce qui n’est pas toujours évident lorsque le back office est à Toronto.» C’est dans cet esprit de soutien aux intermédiaires que la Banque Laurentienne a lancé en avril dernier le B2B Trust. Selon la banque, B2B Trust est un grossiste Internet de produits et de services financiers génériques et complémentaires à l’attention des intermédiaires financiers indépendants. Par le réseau Internet, ceux-ci pourront distribuer une kyrielle de produits financiers, dont des fonds de placement et des prêts pour investissement. Ensuite, ils pourront suivre en ligne leurs dossiers clients, par le truchement du portail Natlink.com (voir l’encadré). «Nous offrons aux intermédiaires un forfait bancaire complet qu’ils peuvent personnaliser et assortir de tous les fonds de placement disponibles sur FundServ», dit Michel Pelletier, vice-président exécutif, Service aux intermédiaires. Ceux-ci pourront proposer à leurs clients des comptes de chèques, des cartes de crédit Visa et des cartes Interac qui portent leur marque de commerce, mais qui sont administrées par la Banque Laurentienne. «Toutefois, c’est l’image de l’intermédiaire qui primera, pas la nôtre.» La Banque Laurentienne ne s’attaque pas à ce secteur sans expertise. Depuis plus d’un an, elle gère le back office du Cash Management Account de Merrill Lynch Canada. Le compte de chèques, les cartes de crédit et de débit et le programme de fidélisation sont aux couleurs de Merrill Lynch, mais c’est la Laurentienne qui administre le tout, y compris le centre de téléservice. «Cela permet à Merrill Lynch d’avoir au Canada l’équivalent de son produit vedette aux États-Unis», précise Michel Pelletier. Soutenir les courtiers actuels… et potentiels «Je connais des planificateurs financiers forts en vente de OBJECTIF CONSEILLER 18 La concurrence s’avive Rick Ness aura-t-il la partie facile? Au cours de notre recherche, nous n’avons identifié que E.C.E. Compensation Électronique comme firme québécoise offrant des services de courtier de plein exercice aux cabinets-conseils. Mais si elle visait le marché des courtiers en valeurs mobilières, elle aurait fort à faire! À moins de s’associer à plus grand. D’ailleurs, E.C.E. est sur le point de conclure une entente de fusion avec un important Photo : Sonia Jam fonds de placement et en gestion de portefeuille, très bons pour dénicher des titres, qui voudraient devenir courtiers de plein exercice, mais qui ne sont pas équipés pour l’être», note Rick Ness, président de E.C.E. Compensation Électronique. Quand il a lancé son entreprise en août 1999, Rick Ness avait un double objectif : fournir des services de post-marché aux cabinets de planification financière, certes, mais surtout les amener à devenir courtiers de plein exercice. Pourquoi? «Avec ce qui se prépare dans l’industrie des fonds de placement, les planificateurs financiers vont avoir besoin de nos services tôt ou tard.» À court terme, croit Rick Ness, la Mutual Fund Dealers Association pourrait devenir un organisme réglementaire pancanadien, avec des exigences identiques à celles de l’ACCOVAM, et les cabinets conseils pourraient être tenus d’en devenir membres. «Dans ces conditions, pourquoi ne pas adhérer tout de suite à l’ACCOVAM? Le cabinet aura ainsi la possibilité de vendre non seulement des fonds de placement, mais aussi des actions et des obligations.» Actuellement, les cabinets qui ne vendent que des fonds communs ne sont pas obligés d’avoir un back office qui prend position sur des titres, qui gère des liquidités, etc. Mais s’ils sont forcés d’en avoir un, ils devront faire face à de gros changements. Notamment, il leur faudra respecter des normes en matière de tenue de livres et de registres, de production d’avis d’exécution et d’états de compte, de garde de valeur, etc. «Nous sommes nous-mêmes courtier de plein exercice, dit Rick Ness, et nous sommes prêts à aider les cabinets conseils à le devenir. Nous les appuyons dans leur demande d’enregistrement, leur fournissons les systèmes requis pour transiger des actions, pour régler les transactions, préparer les états de compte, etc.» Toutefois, ne s’associe pas avec E.C.E. Compensation Électronique qui veut. «Pour démarrer une firme de courtage, il faut déjà un certain chiffre d’affaires, estime Rick Ness. Il faut deux administrateurs dont la compétence et l’expérience sont reconnues et un minimum de 500 000 $.» Rick Ness, président de E.C.E. Compensation Électronique. fournisseur de services américain. Pour l’heure, ce secteur est dominé par deux grosses pointures, TD Waterhouse et Correspondant Network. Ensemble, ces deux firmes réalisent de 7 à 10 millions de transactions boursières par année, ce qui leur procure un avantage considérable sur les petits courtiers indépendants qui ne font que 100 000 transactions par année. On comprend pourquoi elles règnent sur le marché. «Quarante des 170 membres de l’ACCOVAM sont mes clients, précise David Wood, président de Correspondant Network. Mon entreprise emploie 600 personnes et exécute 2,8 millions de transactions chaque année.» Correspondant Network fournit toute la palette des services de post-marché : exécution des ordres, compensation des titres, tenue des registres, administration des paies, etc. «À mes plus gros clients, je peux produire des rapports de recherche qu’ils publient à leur nom», dit David Wood. Propriété de la Banque Nationale depuis l’acquisition de First Marathon, Correspondant Network ne fait affaire qu’avec des membres de l’ACCOVAM. Parmi ses clients figurent Courvie/Dubeau, ProGenesis et Charles Schwab Canada. Le courtier de Toronto sent bien que les marchés financiers se transforment rapidement et en profondeur. La concurrence a même un pied dans la porte! Par exemple, B2B Trust fournit déjà à Courvie/Dubeau cer- JUILLET-AOÛT 2000 19 Quels sont leurs outils? Dans le domaine du courtage de valeurs mobilières, le système ISM est courant. C’est un «service bureau» perfectionné qui permet de faire la gestion quotidienne du back office. Le système ISM est développé par la firme ISM-BC, de Colombie-Britannique. ISM effectue automatiquement les calculs complexes, comme le financement des comptes sur marge. Il peut évidemment créer des analyses de dossiers clients : gains réalisés, projections de revenus, valeur à l’échéance, historique de rendement, etc. Certains courtiers préfèrent le système BPS, du géant américain ADP. En plus de remplir les fonctions de gestion quotidienne et de compensation des valeurs, BPS permet notamment de transférer des titres d’une succursale à une autre, ou encore de regrouper en un point centralisé des valeurs disséminées dans diverses succursales. On peut l’utiliser en mode multi-devises. D’autres courtiers, comme le Groupe Option Retraite, emploient Multipath, un produit de Star Data, de Toronto. Ce système offre tous les modules de base, y compris une fonctionnalité de gestion des REER et des FERR, avec calcul du montant des versements FERR et production des feuillets appropriés. CITAC, qui offre des services de post-marché à l’industrie des fonds communs, utilise et distribue Just Systems, un système de gestion de placements employé par plus d’un vingtaine d’entreprises totalisant un actif sous gestion de plus de 30 milliards de dollars. On peut faire rouler Just Systems dans la plupart des environnements : Unix, Windows, Windows NT, IBM AS/400, VAX/VMS et Unisys CTOS. Just Systems offre aussi les fonctions de communication FMCN et FundServ. Les intermédiaires peuvent accéder aux services de B2B Trust de la Banque Laurentienne par le portail Internet NatLink.com (www.natlink.com). Grâce à cette technologie, il est possible de consulter en ligne le portefeuille du client, de vérifier les détails de transactions, de faire des commandes d’achat, de transfert et de ventes pour plus de 2 000 fonds de placement offerts par FundServ. La Banque Laurentienne a annoncé en avril 2000 de nouveaux partenariats technologiques avec les sociétés Fiserv, IBM, DMR et First Data Resources. tains services bancaires et financiers. Lorgne-t-il son back office de courtier? «On serait en mesure de concurrencer Correspondant Network, mais nous ne sommes pas rendus là», affirme Michel Pelletier. Quoi qu’il en soit, Correspondant Network cherche à renforcer sa position au Québec. Il recrute actuellement des spécialistes qui comprennent les particularités du Québec et qui travailleront en étroite collaboration avec les courtiers. Dans cet univers où tous se connaissent, SEI n’entend pas être en reste. Active auprès des représentants en épargne collective, elle fait également de la prospection du côté des courtiers. Au moment de mettre sous presse, elle était en négociation avec un «assez important» courtier de plein exercice qui étudiait la possibilité de lui confier la gestion de son back office. «Ça va lui coûter moins cher que de le développer et de le gérer lui-même», dit Michel Di Gregorio, qui se garde de mentionner le nom de cette firme pour le moment. À contre-courant? Pas tous les courtiers voient la gestion d’un back office comme un fardeau. C’est même pour en avoir un bien à lui que Valeurs mobilières Peak a entrepris les démarches pour devenir courtier de plein exercice. «Nous pourrons ainsi contrôler notre clientèle, nos OBJECTIF CONSEILLER 20 Photo : Sonia Jam fournisseurs de services et la gestion des ordres et des inventaires. Cela nous permettra d’intégrer les divisions assurances, fonds de placement et valeurs mobilières dans une seule structure, avec un seule base de données, sans dépendre d’une firme extérieure», affirme Jean De Grosbois, président et chef de la direction de Valeurs mobilières Peak. Son objectif est de mettre sur pied un système de gestion des ordres semblable à celui de la Financière Banque Nationale et de Merrill Lynch. «Nous avons développé une plate-forme PC facile à programmer qui nous permet de communiquer par intranet. Nous ne sommes donc pas obligés d’avoir des lignes dédiées à nos représentants, nos succursales et nos soussuccursales. Cela nous coûtera moins cher, sans perte de performance.» Et pas question d’offrir en impartition ses services post-marché : Valeurs mobilières Peak n’est pas une entreprise de gestion de back office. «Seuls nos représentants en fonds de placement et nos conseillers en valeurs mobilières peuvent utiliser nos services», conclut Jean De Grosbois. Michel Di Gregorio, directeur régional de SEI pour l’est du pays.