Child Labour French 2nd - Save the Children`s Resource Centre
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Child Labour French 2nd - Save the Children`s Resource Centre
L’Alliance Internationale Save the Children 4th floor 275–281 King Street Londres W6 9LZ Royaume-Uni Tel. +44 (0)20 8748 2554 www.savethechildren.net Position de Save the Children sur les enfants et le travail L’Alliance Internationale Save the Children est la plus grande organisation indépendante de défense des droits des enfants. Elle a des membres dans 29 pays et conduit des programmes opérationnels dans plus de cent. Ce document expose la position de Save the Children sur le travail des enfants et il est destiné à servir de cadre de travail dans les programmes de Save the Children qui abordent le problème des enfants et du travail. © L’Alliance Internationale Save the Children Traduction: Elisabeth Desvergnes-Pillet Ce document peut être téléchargé auprès de : www.savethechildren.net Produit de la part de L’ Alliance Internationale Save the Children par Save the Children UK 17 Grove Lane Londres SE5 8RD Royaume-Uni Tel. +44 (0)20 7703 5400 E-mail: [email protected] www.savethechildren.org.uk « Mon travail, c’est de trouver des gros rochers au bord de la rivière. Ca me plaît car cela me permet d’aider ma famille. Mais ils ne nous donnent pas assez de temps de repos. » « Je travaille comme assistant-maçon. J’aime bien poser le mortier. Je n’aime pas le préparer. » Benjamin Calderon, 13 ans, Ocotal, Nicaragua* Marvin Aràuz, 13 ans, Ocotal, Nicaragua* *Les propos d’enfants cités sont le résultat d’une consultation sur ce document de position réalisée en Amérique centrale. Position de Save the Children sur les enfants et le travail L’adoption de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CDE) a été un événement essentiel en termes de reconnaissance et de respect des droits des enfants ; cela inclut le droit de ne pas avoir à faire un travail nuisible. Depuis lors, un certain nombre d’avancées importantes ont été faites sur la question du travail des enfants. Avant tout, il y a eu l’adoption par l’Organisation internationale du travail de la Convention n° 182 sur les pires formes de travail des enfants. Par ailleurs, les consommateurs se sont mis à se préoccuper du travail des enfants, les entreprises ont été confrontées à leurs responsabilités sociales, et il y a eu une prise de conscience des conséquences pour les enfants des politiques macro-économiques. C’est dans ce contexte qu’a été élaborée notre position. Elle est le produit d’une consultation d’un an avec le personnel de Save the Children et des garçons et des filles qui travaillent. Notre but Save the Children se bat en faveur des droits de l’enfant. Dans le cadre de cet objectif, Save the Children cherche à : s’assurer que les filles et les garçons sont protégés contre les formes nuisibles du travail. Notre but et nos conceptions du travail des enfants et des réponses appropriées sont tous déterminés par la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant (la CDE) et par une approche de la programmation basée sur ces droits. Nous reconnaissons implicitement dans notre but que le travail des enfants ne constitue pas une occupation homogène et que nous devons admettre que, si certaines formes de travail sont effectivement en violation avec les droits de l’enfant, d’autres ne le sont pas. La plupart des formes de travail comportent à la fois des aspects positifs et des aspects négatifs, et peuvent donc être à la fois nuisibles et bénéfiques au développement et au bien-être des enfants. Nous n’acceptons donc ni les interdictions globales de toutes les formes de travail pour les enfants, ni une approche qui encouragerait sans équivoque le travail des enfants. Nous pensons que des réponses différentes doivent être adaptées à des formes différentes de travail et à des enfants différents. Pour atteindre notre objectif, nous cherchons à veiller à ce que les gouvernements, les familles et 1 les autres « titulaires de devoirs » remplissent leurs obligations envers les droits de l’enfant. Nous veillons aussi à ce que les garçons et les filles participent pleinement et utilement aux décisions qui les concernent. Les enfants doivent avoir la possibilité d’exercer leurs droits, et d’avoir de plus amples opportunités afin que le travail devienne un choix et non une nécessité. Définitions Enfant Un enfant est une fille ou un garçon âgé de moins de 18 ans. Cela englobe les adolescents qui sont souvent exclus des réflexions sur les enfants qui travaillent. Les enfants sont les détenteurs de droits tels qu’ils ont été définis par la Convention des Nations unies relatives aux droits de l’enfant (CDE).1 Nous considérons tous les enfants comme des êtres humains capables de participer activement à la revendication de leurs droits légaux. Travail Save the Children considère le travail des enfants au sens le plus large, c’est-à-dire comme des activités que les enfants effectuent pour contribuer à la vie économique de leur famille ou à la leur. Cela englobe donc le temps passé à des corvées d’entretien de la maison ainsi que des activités 1 L’Article 1 de la CDE énonce que : « Au sens de la présente Convention, un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins 2 génératrices de revenus, à la maison ou à l’extérieur. Les activités agricoles non rémunérées que de nombreuses filles et garçons accomplissent dans les fermes familiales, ainsi que les corvées domestiques que font beaucoup d’enfants chez eux sont donc englobées dans cette définition. Le travail peut être à temps plein ou à temps partiel. Notre définition du travail n’exclut pas des activités criminelles ou illicites. Tandis que certains estiment que le fait de décrire des activités telles que l’exploitation sexuelle à but commercial des enfants en tant que travail peut apparaître comme une légitimation de ces activités, nous pensons que les englober dans nos définitions du travail a deux principaux avantages. Premièrement, le fait de définir des activités d’enfants comme « délits » peut avoir comme conséquence que certains enfants exploités et abusés soient traités comme des criminels, plutôt que de rendre responsables ceux qui les exploitent et les abusent. Deuxièmement, tandis que nous reconnaissons que ces activités exploitent les enfants, leurs causes et certaines de leurs conséquences sont semblables à celles d’autres formes de travail, surtout les formes extrêmement nuisibles de travail. Cela laisse entrevoir des possibilités de partage des connaissances et de recoupement des réponses. de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable. » Comment les enfants définissent eux-mêmes le travail Nos tentatives de définition du travail nous poussent à reconnaître qu’il n’existe souvent pas d’opinion générale sur ce qui constitue le travail. Pour les garçons et les filles, le travail signifie beaucoup de choses. Pour certains, les activités non rémunérées ne sont pas considérées comme du travail, alors que pour d’autres il est important de les inclure pour s’assurer que le travail ménager des filles soit reconnu. Certains enfants qui travaillent affirment que le travail est quelque chose d’« honorable », qui contribue à leur survie ainsi qu’à celle de leur famille. D’autres voient le travail comme étant dommageable ou les exploitant.2 Formes nuisibles du travail Pour définir le travail nuisible, nous faisons référence à l’article 32 de la CDE : « Les États parties reconnaissent le droit de l’enfant d’être protégé contre l’exploitation économique et de n’être astreint à aucun travail comportant des risques ou susceptible de compromettre son éducation ou de nuire à sa santé ou à son développement physique, mental, spirituel, moral ou social. » Dans cet article, on sous-entend que les garçons et les filles n’ont besoin d’être protégés que contre le travail dommageable, et que ce travail a un certain nombre de composantes, y compris des dommages pour la santé, le développement et l’éducation. Pour faire la distinction entre les différentes formes de travail, nous avons besoin de l’entière participation des garçons et des filles qui travaillent. Au sein de la vaste catégorie du travail nuisible, il est aussi utile de faire la distinction entre les différents degrés de travail nuisible. Pour certaines formes de travail, les dommages constituent une partie inévitable du travail, tandis que pour d’autres, il peut être possible d’empêcher leurs effets nuisibles. Nous pouvons donc distinguer trois catégories de travail : • le travail extrêmement dommageable à l’enfant, où les violations des droits sont impossibles à éviter, qui requiert de retirer de façon urgente l’enfant du travail. Elle correspond à la Convention n° 182 sur les pires formes de travail des enfants et couvre par exemple le travail forcé et la prostitution • le travail dans lequel des droits sont violés, mais où il est possible d’empêcher ces violations en améliorant les conditions de travail ou en aidant les enfants à trouver de meilleures solutions de remplacement au travail nuisible • le travail dans lequel les droits ne sont pas violés et qui peut contribuer à la réalisation des droits. Ce type de travail peut être encouragé. 2 Ces définitions proviennent de sources variées, notamment de nos consultations avec des enfants qui travaillent pour la préparation de ce document de position. 3 Nous n’utilisons pas les termes « travail forcé des enfants » et « travail des enfants » pour faire la distinction entre les formes nuisibles du travail et celles qui ne le sont pas, mais nous utilisons le terme « travail des enfants » pour faire référence à toutes les formes de travail des enfants, et quand c’est nécessaire, nous indiquons explicitement les différents degrés de dommages.3 Les causes fondamentales et les conséquences du travail des enfants Dans cette section nous explorons les causes sous-jacentes fondamentales du travail et les conséquences du travail sur la réalisation des droits de l’enfant, et nous envisageons quels « titulaires de devoirs » sont responsables des facteurs qui poussent les enfants à travailler. Cette analyse est essentielle pour documenter notre position sur le travail des enfants. Pourquoi est-ce que les filles et les garçons travaillent ? On donne souvent la pauvreté comme cause fondamentale du travail des enfants, et tout porte à croire que de nombreux enfants travaillent pour leur survie ou celle de leur famille. Mais il existe aussi des preuves que certains pays pauvres, et bien sûr certains ménages pauvres, réussissent 3 Dans la langue anglaise nous ne faisons pas la différence entre les expressions « child labour » et « child work » pour plusieurs raisons. D’abord, il existe des difficultés de traduction. De plus, l’utilisation constante du terme « child labour », avec ses connotations négatives, implique que toutes les formes de travail 4 mieux que d’autres à s’attaquer aux formes nuisibles de travail des enfants, avec des ressources semblables. Cela tend à suggérer que, outre la pauvreté, d’autres causes fondamentales doivent aussi être étudiées afin de véritablement comprendre pourquoi les enfants travaillent. Le manque d’accès à une éducation adaptée et de bonne qualité est aussi considéré comme une cause fondamentale du travail des enfants. Dans de nombreux cas, les garçons et les filles travaillent parce qu’il n’y a pas d’école où aller ou bien parce que l’enseignement offert est de qualité médiocre et peu adapté à leurs besoins de survie. Le fait que l’éducation ne constitue pas une alternative viable au travail pour de nombreux enfants, peut être en partie lié à l’incapacité des gouvernements à assurer un enseignement véritablement gratuit (à cause de ressources insuffisantes), ou bien à investir dans des améliorations de la qualité de l’enseignement. Pourtant, c’est souvent un manque de motivation envers l’éducation, et en conséquence, l’attribution des ressources à d’autres secteurs, qui sont à l’origine de conditions d’éducation médiocres. Les attitudes négatives et le manque de compétence des enseignants ainsi que le niveau des mauvais traitements dans les écoles sont des facteurs supplémentaires au fait que les enfants et leurs familles considèrent le travail comme étant plus important que l’école. sont nuisibles, or nous ne pensons pas que ce soit le cas. Nous avons aussi trouvé que dans certains cas, une catégorisation plus pointue s’avère nécessaire que celle offerte par la dichotomie trop simpliste « child labour »/ « child work ». Il existe des inégalités structurelles, basées sur le sexe, la caste ou la classe sociale, la religion et l’invalidité, qui sont d’importants déterminants, tant dans le type de travail que dans la quantité de travail que font les filles et les garçons. Des enfants, par exemple, peuvent être victimes de discrimination pour des raisons de sexe, d’appartenance ethnique ou de handicap, qui peuvent entraîner l’exclusion de l’école, des perspectives d’emploi très limitées et peu d’autres choix que d’être employés dans des formes nuisibles de travail. Des critères liés au sexe peuvent empêcher les femmes d’obtenir un emploi rémunéré, ce qui peut forcer les enfants à travailler. Des croyances liées à l’enfance sont aussi à l’origine du travail des enfants. Alors que dans le monde occidental, on considère l’enfance comme une période de jeux et d’apprentissage scolaire, dans de nombreuses autres parties du monde, c’est le travail qu’on considère comme le lieu le mieux adapté pour apprendre et se développer. Ces croyances peuvent influencer les décisions parentales relatives au travail des enfants, les opinions des employeurs sur le caractère approprié du recrutement d’enfants, et la législation des gouvernements sur le travail des enfants. Les enfants qui travaillent ne devraient pas toujours être considérés comme les victimes passives d’une exploitation. Les enfants eux-mêmes ont peut-être choisi de travailler, estimant que le travail leur offre de meilleures possibilités que la scolarisation, pour faire plaisir à leurs parents ou simplement parce qu’ils veulent gagner de l’argent. Des problèmes apparemment sans aucun lien, tels que le VIH/SIDA, les conflits armés ou les Le point de vue des enfants sur les raisons pour lesquelles ils travaillent Lors du processus de consultation qui a précédé cette prise de position, des filles et des garçons qui travaillent en Mongolie ont donné les raisons suivantes au fait qu’ils travaillent : • • • • • la pression des parents leur propre choix le travail des amis le fait que les parents soient sans emploi l’effondrement du système soviétique. Au Nicaragua, des garçons et des filles nous ont dit qu’ils voulaient travailler pour les raisons suivantes : • ils aiment étudier et avoir une apparence soignée • le travail a des aspects positifs, notamment le fait de rendre quelqu’un heureux • ils ont besoin de travailler pour survivre. Des enfants en Inde nous ont dit que le travail pour eux est un devoir envers leur famille, pour rendre leurs parents heureux, avoir leur bénédiction et leur apporter un certain confort. changements climatiques, peuvent avoir un impact majeur sur le travail des enfants. La pandémie du VIH/SIDA par exemple, réduit la force de travail adulte et occasionne des dépenses initialement prévues pour la protection sociale et 5 l’éducation, ce qui pousse les garçons et les filles vers des formes nuisibles de travail. Les conflits peuvent entraîner une augmentation du nombre des enfants soldats et du nombre des enfants séparés de leurs familles, qui deviennent ainsi plus vulnérables aux abus et à l’exploitation. Les catastrophes écologiques, associées aux changements climatiques, peuvent également augmenter la vulnérabilité des ménages, forçant les enfants à travailler pour améliorer la régularité ou le niveau des revenus. Quand on cherche à comprendre le travail des enfants, il est important de se souvenir que, pour chaque enfant qui travaille, le choix de travailler a probablement été influencé par plus d’un facteur. Par exemple, la raison fondamentale pour laquelle des filles et des garçons issus de ménages pauvres travaillent peut être le besoin de gagner de l’argent à cause de la pauvreté. Cependant, ces enfants issus de ménages pauvres continueraient peut-être à travailler même si le revenu des ménages augmentait si, par exemple, il n’y avait pas d’école disponible comme alternative au travail. En quoi est-ce que le travail a une incidence sur la réalisation de droits de l’enfant ? Le travail peut avoir des effets à la fois positifs et négatifs sur la réalisation d’une gamme de droits de l’enfant, et ces effets varieront largement selon le type de travail, la maturité, le sexe et d’autres caractéristiques de la situation de l’enfant. Les garçons et filles plus jeunes et les enfants handicapés sont particulièrement vulnérables à un certain nombre de violations des droits de l’enfant résultant du travail. Le travail peut avoir un impact majeur sur le droit des enfants à la survie 6 et au développement. Sous ses formes les pires, le travail peut tuer. Parmi les effets négatifs du travail sur le développement physique des enfants, on peut citer les blessures causées par des équipements dangereux, des mines et des fusils, et les maltraitances physiques de la part d’employeurs ou de clients. Parmi les effets psychosociaux négatifs du travail, il y a les conséquences psychologiques des mauvais traitements verbaux, physiques ou sexuels des employeurs, et des complexes d’infériorité résultant d’un travail peu valorisant. Bien que les effets psychosociaux reçoivent souvent peu d’attention, ils peuvent être plus sérieux que les effets physiques. Le travail peut aussi aider les filles et les garçons à réaliser leur droit à la survie et au développement, et le revenu du travail par exemple, peut servir à acheter de la nourriture et payer des soins de santé. Le travail peut renforcer le respect de soi, quand les enfants savent qu’ils contribuent au revenu des ménages. Le travail peut aider les enfants à réaliser leur droit à l’éducation en permettant de payer les frais scolaires ou en offrant aux enfants des compétences et des savoir-faire. Tandis que certains enfants réussissent à concilier travail et éducation, le travail a très souvent des effets négatifs sur la scolarisation des enfants. Dans certains types de travail, les horaires très longs ou les conditions proches de l’esclavage signifient que les filles et garçons sont incapables d’aller à l’école ou bien sont trop fatigués pour atteindre le maximum de leur potentiel. Le travail peut priver les garçons et les filles du droit à la protection. Dans certaines occupations – Le point de vue des enfants sur les conséquences du travail Durant les consultations des enfants, les garçons et les filles ont identifié plusieurs effets négatifs et positifs du travail. Les effets positifs • Nous apprenons à communiquer avec les • • • • • • • • autres. Nous apprenons à subvenir aux besoins de nos familles. Nous apprenons régulièrement des choses nouvelles. Nous pouvons régler les dépenses liées à la scolarisation. Cela m’aide à me comporter avec assurance et améliore ma façon de parler. Nous apprenons à manier l’argent. Nous apprenons à être responsables plus rapidement que les autres enfants. Nous apprenons la réalité de la vie de la rue. Nous obtenons des vêtements et de la nourriture en échange de travail. par exemple l’exploitation sexuelle à but commercial, ou lorsque les enfants sont vendus pour travailler – des filles et des garçons sont traités comme des criminels à cause de leur travail. Les enfants peuvent être arrêtés mais ne sont pas toujours traités comme des mineurs au sein du Les effets négatifs • Cela peut affecter notre développement physique et entraîner des blessures. • Nous pouvons nous attacher trop à l’argent et laisser tomber l’école. • Nous pouvons nous laisser influencer par des personnes mauvaises. • Notre amour-propre peut en souffrir. • Si nous sommes maltraités, nous en souffrons. Les enfants soutiennent que les conséquences du travail varient. Des enfants en Mongolie nous ont dit que les fillettes au travail étaient plus vulnérables aux abus psychologiques, tandis que les garçons sont plus vulnérables aux mauvais traitements physiques. Un enfant d’Amérique centrale nous a dit : «Je pense que pour un enfant âgé de trois à douze ans, ce n’est pas aussi facile de porter un seau plein d’eau que pour un jeune de quinze ou seize ans, alors c’est différent ; c’est l’âge qui fait la différence. » système pénal. Lorsque les enfants cherchent à revenir dans leur communauté, ils peuvent souffrir d’ostracisme du fait de la nature servile ou criminelle de leur travail, rendant difficile leur retour dans la communauté et la famille. Les enfants qui travaillent comme domestiques et qui 7 vivent loin de chez eux peuvent aussi être privés de leur droit à un environnement familial et, en conséquence, d’une protection contre les mauvais traitements pendant leur service. La discrimination à l’encontre des enfants qui travaillent peut avoir une incidence sur la réalisation de leurs droits. Elle peut, par exemple, se traduire par le manque d’accès de certains groupes d’enfants qui travaillent aux soins de santé ou aux services éducatifs, par des attitudes discriminatoires d’employés envers les enfants qui travaillent, ou par la façon dont les services sont fournis – par exemple, des heures d’ouverture ne permettant pas aux enfants qui travaillent d’aller au centre de santé ou à l’école, ou bien des écoles et des centres de santés éloignés du lieu de travail des enfants. Travailler signifie souvent pour les enfants avoir peu de temps, peu de liberté et de possibilité de jouir de leur droit à participer aux décisions qui les touchent. Cependant, les rôles des enfants dans la survie économique du ménage peuvent aussi leur procurer un plus grand rôle dans les prises de décision. Dans certains cas, les enfants rencontrent d’autres enfants à travers le travail et ils peuvent unir leurs forces dans des organisations d’enfants qui travaillent pour améliorer leurs droits. Les organisations d’enfants qui travaillent permettent aussi aux enfants de réaliser leur droit à la liberté d’association. Les enfants ont aussi le droit au repos, aux loisirs et à participer à des activités culturelles. Le fait de travailler de longues heures ou de concilier le travail et l’école, peut priver les enfants de ce droit. 8 Qui est responsable des formes nuisibles du travail des enfants ? Au niveau international, les « titulaires de devoirs » clés comprennent les Institutions financières internationales (telles que la Banque mondiale et le Fond monétaire international), car elles sont responsables des politiques macroéconomiques ayant un impact majeur sur la pauvreté qui pousse de nombreux enfants vers des formes nuisibles de travail. Tout porte à croire que la pression des institutions financières internationales en faveur de la dérégulation des économies, la privatisation et la diminution des investissements dans les services publics, a réduit la quantité et la qualité de l’éducation et des mesures de protection sociale, et est à l’origine d’une plus grande vulnérabilité des familles et d’une augmentation probable du travail dangereux pour les enfants. Au niveau national, la manière dont les gouvernements choisissent d’allouer leurs ressources dans des domaines comme la protection sociale peut avoir un impact majeur sur la pauvreté et la vulnérabilité des ménages. Les gouvernements ont la responsabilité de veiller à ce que les écoles offrent une solution de remplacement viable au travail nuisible, et si les enfants continuent de travailler, ils doivent pouvoir concilier travail et école. Les gouvernements ont la responsabilité d’adopter des législations sur le travail des enfants, et particulièrement, de veiller à ce que ces législations soient appropriées et mises en vigueur d’une manière efficace, dans l’intérêt supérieur des enfants, et sans criminaliser les enfants qui travaillent. Les gouvernements ont aussi la responsabilité des réglementations dans le secteur privé relatives au travail des enfants. La décision des employeurs – allant des divisions d’entreprises multinationales jusqu’au chef de famille recherchant des enfants comme domestiques – d’employer ou non des garçons et des filles a évidemment un impact majeur sur le nombre d’enfants qui travaillent. Les employeurs sont aussi souvent responsables de la dangerosité à laquelle les enfants ont à faire face au travail. Les décisions relatives à la durée du travail, à la santé et la sécurité, et la façon dont les enfants sont traités, ont toutes une incidence sur le fait que le travail viole des droits de l’enfant ou non. La manière dont les employeurs traitent les employés adultes peut aussi avoir une incidence sur le travail des enfants. La recherche continuelle dans les sociétés multinationales de main-d’œuvre bon marché peut être par exemple à l’origine de bas salaires pour les adultes, et du besoin des familles de pallier les insuffisances de revenus par le biais du travail des enfants. Alors que la majorité des enfants travaillent pour des petits employeurs en dehors du secteur de l’exportation, les entreprises multinationales ont une portée globale énorme et peuvent avoir un impact potentiel important sur un grand nombre d’enfants qui travaillent. Les sociétés multinationales ont la responsabilité de surveiller et de lutter contre les formes nuisibles du travail des enfants à travers leur chaîne d’approvisionnement. Les consommateurs, les clients et les collègues ont tous aussi une responsabilité dans la façon dont les enfants sont traités au travail et peuvent exercer des pressions sur les employeurs afin qu’ils se comportent de façon responsable. Les parents et toutes les personnes en charge d’enfants ont la responsabilité, même avec des ressources limitées, de faire tous les efforts possibles pour protéger les filles et garçons contre le travail dangereux. Si les parents et les personnes en charge d’enfants n’ont pas d’autre choix que d’envoyer les enfants au travail, ils ont alors la responsabilité de minimiser les conséquences négatives du travail sur les droits de l’enfant. Bien choisir le type de travail que font les enfants, écouter l’opinion des enfants et leurs préoccupations, et respecter leurs contributions peuvent réduire le danger. Les « titulaires de devoirs » enfin ont la responsabilité de remettre en question les relations de pouvoir et les attitudes qui perpétuent les formes nuisibles de travail des enfants dans nos communautés. En plus des actions directement liées au travail des enfants, tous les responsables ont le devoir d’analyser et de s’attaquer à l’impact de problèmes apparemment sans relation, tels que les conflits armés et le VIH/SIDA, sur le travail des enfants. 9 Le rôle et les principes généraux de Save the Children dans les réponses appropriées au travail des enfants Le rôle de Save the Children Afin d’atteindre notre objectif qui est d’assurer que les garçons et les filles sont protégés contre les formes nuisibles de travail, le rôle de Save the Children a deux facettes : soutenir des interventions directes qui empêchent les formes nuisibles du travail des enfants ou qui améliorent la vie des enfants qui travaillent, et aussi influencer les autres « titulaires de devoirs » afin qu’ils remplissent leurs obligations. Ces deux rôles sont inextricablement liés et, tandis que certains éléments de l’organisation peuvent choisir de s’axer plutôt sur l’un de ces deux rôles, l’organisation Save the Children dans son ensemble n’atteindra pas son objectif si elle cherche à remplir un rôle aux dépens de l’autre.4 Afin de soutenir les interventions directes, et de renforcer sa capacité d’influencer les autres, Save the Children a aussi un rôle à jouer dans le travail de recherche, de suivi et d’évaluation. Pour être bien informé, notre travail doit se baser sur des recherches approfondies, auxquelles les enfants participent pleinement. Le suivi et l’évaluation sont importants dans la réussite ou dans l’échec des interventions pour améliorer réellement la vie des enfants. Dans tout son travail, Save the 4 Les interventions directes n’atteignent jamais qu’une petite proportion des enfants qui travaillent, et un plus grand nombre d’enfants peuvent être touchés si nous exerçons une influence sur les autres. Les activités de plaidoyer envers les « titulaires de 10 Children œuvre en collaboration avec des partenaires – au niveau local, pour mettre en œuvre des projets ou poursuivre des objectifs de plaidoyer, dans le cadre d’un mouvement international pour les enfants, et au niveau international, à travers des réseaux et des coalitions auxquelles participent des organisations non-gouvernementales (ONG), des universitaires, des instituts de recherche, etc. Principes généraux du travail de Save the Children Tout notre travail est fondé sur une approche basée sur les droits. Les droits sont interdépendants et indivisibles. La violation d’un droit a souvent un effet sur les autres droits, et aucun droit n’est supérieur à un autre. La nature holistique des droits de l’enfant rend cruciale la parfaite connaissance des liens entre le droit des enfants à être libérés du travail nuisible et leurs autres droits. Cela ne veut pas dire que tous les droits de l’enfant doivent être abordés en une seule intervention. Une approche basée sur les droits doit plutôt examiner la situation de l’enfant dans son intégralité, trouver des lacunes dans les interventions ou des abus de droits qui demandent une attention urgente, et examiner comment on peut utiliser les capacités des organisations pour avoir un impact maximum. Quand on aborde le domaine du travail de l’enfant, il faut faire attention à ne pas se laisser devoirs » doivent se baser sur une connaissance approfondie de la vie réelle des enfants qui travaillent et de l’efficacité des différentes réponses, compréhension qui s’acquiert mieux dans les interventions directes. influencer par les préjugés à ce sujet pour décider quelles interventions faire en priorité. Par exemple, bien que le travail des enfants dans la production à l’exportation soit l’objet d’une intense publicité, les enfants qui travaillent dans des emplois moins visibles, comme par exemple le travail domestique, méritent aussi toute notre attention. Une analyse de la situation est indispensable pour trouver un point d’entrée dans l’action. Cette analyse doit examiner les causes fondamentales et les conséquences du travail des enfants, en même temps que les interventions des autres « titulaires de devoirs » en réponse au travail des enfants. En mettant en œuvre une programmation basée sur les droits, il importe aussi de veiller à ce que les quatre principes suivants de la CDE soit reflétés dans tout notre travail. Le droit à la survie et au développement Dans tout notre travail, nous devons faire « le maximum » pour assurer aux enfants le droit à la survie et au développement. Nous devons reconnaître à la fois les effets négatifs et positifs du travail sur la survie et le développement, et nous devons aussi reconnaître que, au fur et à mesure que les enfants grandissent, leur vulnérabilité aux abus des droits résultant du travail varie également. Les très jeunes enfants par exemple, sont particulièrement vulnérables aux dangers du travail et demandent une protection spéciale. Les enfants plus âgés, qui ont dépassé l’âge de l’école obligatoire mais n’ont pas encore atteint 18 ans, peuvent avoir besoin d’aide pour trouver du travail et aussi de mesures de protection. L’intérêt supérieur de l’enfant Dans tout notre travail, notre préoccupation première doit être d’agir dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Cela signifie, en relation avec le travail des enfants, qu’il faut se débarrasser du préjugé selon lequel tout travail est nuisible, et qu’il faut reconnaître que dans certains cas, le travail est dans le meilleur intérêt de l’enfant. Nous devons reconnaître par exemple que, s’il est quelquefois impératif de retirer l’enfant d’un travail dangereux, retirer les enfants du travail sans penser à l’impact que cela aura sur leur survie et leur développement n’est pas dans leur intérêt supérieur. On ne peut déterminer l’intérêt supérieur des enfants qu’en les consultant, ainsi que leurs familles. La non-discrimination Dans tout notre travail, nous devons nous efforcer de veiller à ce que les enfants soient protégés contre toute forme de discrimination, qu’elle soit motivée par l’âge, le sexe, l’invalidité, l’appartenance ethnique, le pays d’origine ou toute autre situation. Nous devons également veiller à ce que les enfants qui travaillent ne soient pas victimes de discrimination du fait qu’ils travaillent. La participation Dans tout notre travail, nous devons faire participer les enfants aux décisions les concernant. Cela veut dire écouter les enfants et prendre leurs observations et leurs suggestions au sérieux. Nous devons faire participer les enfants à la planification, la mise en œuvre et l’évaluation des actions, et encourager les autres à faire de même. Nous devons aussi apporter un soutien aux 11 propres initiatives des enfants qui veulent participer aux décisions qui les concernent. Les adultes ont un rôle important à jouer pour conseiller et soutenir les enfants qui se battent pour leurs droits. Cela suppose que les garçons et les filles qui travaillent sont suffisamment informés pour pouvoir véritablement participer. Le droit des enfants à participer ne libère cependant pas les adultes de leur responsabilité de protection des enfants contre l’exploitation ou les abus. Notre position sur les questions clés Dans le cadre de nos activités visant à atteindre notre objectif, à savoir veiller à ce que les enfants soient protégés contre les formes nuisibles de travail, nous avons acquis des connaissances et de l’expérience dans certains domaines clés. Dans cette section, nous exposons les grandes lignes de notre position sur ces questions fondamentales. Ces positions forment l’assise de nos interventions directes et de nos activités de plaidoyer. Faire la distinction entre les effets positifs et les effets négatifs du travail La CDE implique que toutes les formes de travail ne sont pas dommageables pour les droits de l’enfant. La reconnaissance que le travail peutêtre à la fois nuisible et bénéfique à la réalisation des droits de l’enfant doit former le fondement de toutes les interventions liées au travail des enfants. En conséquence, Save the Children n’est pas en faveur d’une interdiction totale du travail. Mais 12 nous n’encourageons pas non plus un « droit au travail » inconditionnel. Aucun article de la CDE ne fait référence à ce droit. Par contre, les filles et les garçons ont un certain nombre de droits, comme le droit à la survie et le droit à l’éducation, qui peuvent être favorisés par le travail des enfants. Nous pensons que nous devons nous battre en faveur de ces droits, et reconnaître que certaines formes de travail peuvent être une façon – parallèlement par exemple, à la scolarisation ou la protection sociale – de réaliser ces droits. Cela ne doit pas nous empêcher de déclarer clairement que beaucoup d’autres formes de travail ont des effets négatifs sur les droits de l’enfant. Pour pouvoir décider du type d’intervention à faire sur les formes de travail ayant un effet négatif sur les droits de l’enfant, il est essentiel de faire la distinction entre le type de travail dans lequel le danger est extrême et la seule option est d’en soustraire l’enfant parce que les violations de ses droits sont impossibles à empêcher (par exemple, l’exploitation sexuelle à des fins commerciales ou le travail dans des mines souterraines), et le type de travail dans lequel on peut réduire les dangers en améliorant les conditions de travail. Pour le travail dans lequel les violations des droits sont extrêmes et impossibles à empêcher, les « titulaires de devoirs » doivent chercher immédiatement à soustraire les enfants de ce travail. Dans ce contexte, la mise en oeuvre de la convention n° 182 sur les pires formes de travail des enfants est un outil important. Les enfants engagés dans les pires formes de travail ont souvent été séparés de leur famille, par exemple dans le cas du trafic d’enfants ou du recrutement dans les forces armées. Pour nombre de ces enfants, la réunification avec leur famille constitue un aspect important du processus de réhabilitation. Il existe cependant certains enfants impliqués dans des formes de travail extrêmement dangereuses qui peuvent provenir de situations familiales où ils étaient maltraités et dans ce cas, la réunification n’est pas une option viable. Même lorsque l’enfant doit être réuni avec sa famille, il peut être bénéfique pour lui de passer une courte période dans une institution, ce qui lui donne l’occasion de se reposer et de recevoir un soutien professionnel pour se remettre de ses expériences. Dans tous les cas, c’est l’intérêt supérieur de l’enfant qui doit guider le choix des mesures de réhabilitation, et les enfants concernés doivent être pleinement consultés avant de choisir une réponse appropriée. Dans le cas du travail où une amélioration des conditions de travail peut réduire les méfaits, les « titulaires de devoirs » doivent envisager toute la gamme des violations de droits sur le lieu de travail. Il peut s’agir par exemple, de s’attaquer à des questions de santé et de sécurité, de réduire les horaires de travail, de veiller à ce que les garçons et les filles qui travaillent ne soient pas victimes d’abus et soient traités avec respect, et de permettre aux enfants qui travaillent de pouvoir aller à l’école en même temps. Les politiques macro-économiques et le travail des enfants Les politiques économiques aux niveaux international et national ont des implications sérieuses dans les facteurs à l’origine du travail des enfants. Les gouvernements nationaux et les institutions financières internationales qui ont la responsabilité de mettre en œuvre ces politiques doivent donc assumer leurs responsabilités et veiller à ce que leurs politiques n’entraînent pas une augmentation du nombre des filles et des garçons dans des situations de travail dangereux, et n’augmentent pas leur vulnérabilité aux risques dans les emplois existants. Les gouvernements par exemple, doivent mettre en haut de leur liste de priorités les dépenses dans les domaines de l’éducation et de la protection sociale, destinées aux groupes les plus vulnérables aux formes nuisibles du travail des enfants. Les préoccupations liées aux droits de l’enfant et au travail des enfants devraient aussi être incorporées dans les documents de stratégie de réduction de la pauvreté, en déclarant comme objectif explicite la réduction du travail dangereux des enfants et en définissant des stratégies pour atteindre cet objectif. L’éducation et le travail des enfants Les gouvernements doivent mettre au point des stratégies pour que l’éducation devienne un moyen effectif d’empêcher le travail nuisible pour les enfants et pour veiller à ce que le droit à l’éducation des enfants qui travaillent soit respecté. Bien que les gouvernements aient la responsabilité première d’offrir une éducation, les organisations travaillant en dehors du secteur d’état ont aussi leur rôle à jouer. Pour assumer leurs responsabilités, les gouvernements doivent assurer des investissements adéquats dans le secteur de l’éducation, et aborder les problèmes de discrimination, de qualité et de pertinence de l’éducation dans les écoles. Ils ont la responsabilité de : 13 • reconnaître l’importance de l’éducation de la petite enfance, qui peut garantir que les enfants aillent à l’école plutôt qu’au travail • faire participer les enfants et les communautés aux prises de décision relatives à l’école – cela contribuera par exemple à rendre l’école mieux adaptée à leurs besoins • reconnaître les besoins particuliers des enfants plus âgés. Les enfants plus âgés n’ont peut-être pas été scolarisés dans le passé et ne veulent pas se retrouver en classe avec des enfants plus jeunes. Des conditions spéciales peuvent être nécessaires pour leur permettre d’être scolarisés • reconnaître l’importance de l’éducation secondaire, qui peut fournir aux enfants les aptitudes nécessaires à trouver une alternative aux formes de travail qui les exploitent. Pour que les filles et les garçons puissent concilier travail et éducation, les gouvernements doivent : • éviter de placer une charge trop lourde sur les enfants en leur demandant de passer de longues heures à l’école ou de faire des devoirs à la maison en plus des longues heures de travail. Les enfants ont le droit au repos et aux loisirs • reconnaître la valeur éducative de la vie des enfants qui travaillent, et essayer de valider cet apprentissage dans le système éducatif. Par exemple mettre au point des programmes qui luttent contre les attitudes et les critères qui renforcent et rendent légitimes l’exploitation des enfants • se servir de l’école comme moyen d’aider les enfants à affronter les problèmes qu’ils ont au travail. Par exemple, à l’école on peut enseigner 14 aux enfants leurs droits et ce qu’ils peuvent faire quand ils estiment que ces droits sont bafoués. L’enseignement non formel peut aussi être un moyen de permettre aux enfants que le système formel a laissé tomber d’obtenir un enseignement de bonne qualité et en fin de compte, d’avoir accès à ce système formel. Bien que l’enseignement non formel puisse servir de modèle pour influencer le système formel, il ne faut pas le voir comme une solution de remplacement durable à l’enseignement formel. La législation sur le travail des enfants C’est aux gouvernements qu’incombe la responsabilité d’adopter et de mettre en vigueur une législation appropriée pour assurer que les filles et les garçons sont protégés contre les formes nuisibles du travail des enfants. Cette législation comprend les lois nationales ainsi que les conventions internationales, telles que la Convention de l’ Organisation internationale du travail contre les pires formes de travail des enfants (182) et concernant l’âge minimum d’admission à l’emploi (138). Une législation ne sera bénéfique aux enfants que dans les cas suivants : • si elle est dans l’intérêt supérieur de l’enfant – ceci doit être l’objectif premier de toute législation • si elle traite les personnes qui ont abusé des enfants comme des criminels, et non les enfants dont les droits ont été abusés • si elle évite l’interdiction totale du travail sans différencier entre les formes nuisibles du travail des enfants et celles qui ne le sont pas, ou sans reconnaître les avantages que peut procurer le travail • si elle ne nuit pas aux autres droits des enfants, notamment le droit à la survie et le droit au développement, en offrant par exemple des compensations pour le manque à gagner • si elle fait participer pleinement les enfants et les familles aux décisions qui concernent sa formulation et son application. En ce qui concerne la législation sur l’âge minimum, il ne faut pas oublier que l’âge n’est qu’un des facteurs qui permettent de déterminer le niveau des méfaits causés par le travail. Lorsqu’on décide de légiférer contre les formes nuisibles du travail des enfants, il importe d’examiner aussi d’autres facteurs, tels que le sexe de l’enfant et son niveau de développement ou d’invalidité, qui peuvent influer sur les effets du travail. Comme il est improbable que la législation touche tous les enfants du secteur informel, qui sont difficiles à atteindre, des mesures alternatives doivent être adoptées pour pouvoir les atteindre. Les gouvernements doivent aussi adopter et mettre en œuvre un système d’enregistrement des naissances. Un tel système constitue un outil important pour faire appliquer avec succès de nombreuses législations. La responsabilité des employeurs pour aborder les formes nuisibles du travail des enfants. Tous les employeurs – qu’il s’agisse de divisions de sociétés multinationales ou de particuliers employant un seul domestique – ont la responsabilité de s’attacher à résoudre le problème des formes nuisibles du travail des enfants. Les employeurs doivent éviter les solutions « rapides » (par exemple, le renvoi sommaire des enfants) qui vont dans l’intérêt de l’employeur plutôt que celui des enfants. Les employeurs doivent au contraire : • prendre des mesures immédiates pour retirer les enfants des formes extrêmement nuisibles de travail, et le faire d’une manière qui offre des alternatives viables et agit dans l’intérêt supérieur de l’enfant • compenser le manque à gagner des enfants soustraits à leur travail (par exemple sous forme de prime de licenciement) • améliorer la vie des enfants qui continuent à travailler, notamment en les traitant avec respect et en leur permettant de concilier travail et scolarité • veiller à ce que les enfants qui travaillent légalement ne soient pas victimes de discrimination dans leurs rémunérations et leurs conditions de travail. Il faut par exemple éviter d’interdire tout travail aux enfants âgés de moins de 18 ans, car cela peut réduire les possibilités d’emploi de garçons et de filles qui ont moins de 18 ans, mais qui sont au-dessus de l’âge de la scolarité obligatoire. Les plus gros employeurs doivent apporter leur soutien aux programmes à long terme qui empêchent les formes nuisibles du travail des enfants. Comme nous l’avons déjà mentionné, ils doivent aussi veiller à ce que les adultes qu’ils emploient ne soient pas victimes d’exploitation, car cela peut avoir des répercussions sur la pauvreté et le travail des enfants. Pour que les sociétés multinationales s’acquittent de leur engagement à lutter contre le travail nuisible, elles doivent à la fois s’attaquer au travail des enfants dans leurs propres chaînes d’approvisionnement et 15 veiller à ce que leur exigence de profit n’entraîne pas de baisse de revenu des ménages, au point que les enfants en soient réduits à faire du travail nuisible. D’autres « titulaires de devoirs », y compris les gouvernements et les consommateurs, peuvent exercer des pressions sur les employeurs afin que ceux-ci s’acquittent de leurs responsabilités. Ceux-ci doivent cependant éviter d’avoir recours aux sanctions commerciales et aux boycotts pour obliger le secteur privé à aborder le problème des formes nuisibles du travail des enfants. De telles mesures pourraient pousser les garçons et les filles en dehors du secteur bien réglementé de l’exportation, vers le secteur informel, souvent plus dangereux. Cela ne veut pas dire que les consommateurs ne doivent rien faire. Les consommateurs peuvent exercer des pressions sur les entreprises pour qu’elles adoptent une approche responsable vis-à-vis du travail des enfants, en les encourageant, par exemple, à donner la possibilité aux enfants qui travaillent d’aller à l’école, ou en leur offrant des formations professionnelles. Soutenir les organisations d’enfants qui travaillent Les organisation d’enfants qui travaillent aident à réaliser les droits de l’enfant à participer et à s’associer, et elles peuvent contribuer à la réalisation du droit de l’enfant à être libéré des formes nuisibles de travail. Elles ont des fonctions multiples, à savoir tirer la sonnette d’alarme, 16 surveiller les lieux de travail, offrir un soutien et une protection mutuelle, et plaider en faveur de changements de politiques. Les filles et les garçons ont le droit de participer et de s’associer, et il faut encourager ces organisations. Les organisations d’enfants, à l’instar des organisations d’adultes, reflètent un large éventail d’opinions ; certaines sont axées sur les avantages du travail des enfants, alors que d’autres se concentrent sur la sensibilisation du public aux méfaits causés par le travail des enfants. Comme différentes formes de travail demandent des réponses différentes, ces deux objectifs ne sont pas nécessairement contradictoires. Les ONG, les syndicats et les autres « titulaires de devoirs » ont un rôle à jouer pour soutenir ces organisations, par exemple en leur procurant des ressources et en veillant à ce que la participation des enfants soit avisée, éthique et efficace. La participation doit toujours être dans l’intérêt supérieur de l’enfant, et les enfants peuvent avoir besoin d’aide en cas de réaction des parents ou des employeurs. Les adultes impliqués dans les organisations d’enfants doivent prendre garde à ne pas les manipuler, mais en même temps, à ce qu’ils fassent des choix en toute connaissance de cause. L’Alliance Internationale Save the Children Mars 2003