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SAISON
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JOURNAL DE L’OPÉRA NICE CÔTE D’AZUR N° 31 > OCTOBRE • NOVEMBRE • DÉCEMBRE 2014
BARBARA
HENDRICKS
UN CONCERT
EXCEPTIONNEL
À L’OPÉRA
> OPÉRA
LES VÊPRES SICILIENNES
VERSION DE CONCERT
> OPÉRA TURANDOT
> BALLET Verse Us
PLEIN FEUX SUR
DWIGHT RHODEN & NACHO DUATO
> JEUNE PUBLIC
LA GRANDE FABRIQUE DE MOTS
e rideau vient de tomber sur la saison 2013-2014 avec trois événements
inoubliables, la création mondiale de Dreyfus, sur une musique de
Michel Legrand et un livret de Didier van Cauwelaert, la prestation de
notre Ballet Nice Méditerranée qui est allé représenter la France au French May de Hong
Kong et la venue des très grands violonistes Julian Rachlin et Peter Zimmermann,
ovationnés par le public. Quant à la nouvelle saison 2014-2015, elle s’annonce déjà
prometteuse, avec elle aussi des moments particulièrement émouvants.
4 OPÉRA
LES VÊPRES SICILIENNES
en version de concert
MARCO GUIDARINI
SOPHIE FOURNIER
TURANDOT
FEDERICO GRAZZINI
IRINA RINDZUNER
Flâner sur le nouveau quai des Etats-Unis puis oublier ses préoccupations pendant
quelques heures, voici ce que vous propose l’Opéra Nice Côte d’Azur, grâce à une
excellence artistique toujours présente et soutenue par des projets ouverts sur la
création comme sur le grand répertoire, que ce soit pour la programmation lyrique,
symphonique ou chorégraphique.
La saison lyrique, proposée par Marc Adam, Directeur artistique de l’Opéra, abordera
les grands titres attendus par le public mais également des titres plus rarement
programmés qui ne manqueront pas de susciter la curiosité.
Philippe Auguin, Directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Nice, mettra
une nouvelle fois le talent de ses musiciens en valeur avec une programmation éclectique sur la scène de l’Opéra mais aussi dans des lieux emblématiques de Nice à
l’occasion d’événements exceptionnels. Un hommage tout particulier sera rendu au
grand compositeur et chef d’orchestre Pierre Boulez pour ses 90 ans.
Le Ballet Nice Méditerranée et son Directeur artistique Eric Vu-An, après nous avoir
fait vibrer cette saison et être allé porter les couleurs de Nice jusqu’en Asie, proposera une programmation toujours aussi audacieuse et talentueuse.
Merci une fois de plus aux musiciens, aux artistes du Chœur, aux danseurs, aux
techniciens, aux régisseurs, aux agents administratifs et aux ateliers de la Diacosmie,
qui réalisent un travail remarquable pour fabriquer du rêve.
Ce rêve que je vous invite à venir partager puisque l’Opéra Nice Côte d’Azur offrira
encore cette saison des moments culturels pour tous et pour chacun.
Christian Estrosi
Député-Maire de Nice
Président de la Métropole Nice Côte d’Azur
20 CONCERT
SEPTEMBRE
LE REQUIEM DE VERDI
BARBARA HENDRICKS À NICE
OCTOBRE & DÉCEMBRE
BRAHMS, SYMPHONIES
7 DÉCEMBRE
PROUST, CONCERT À THÈME
LA SAISON
DU CHŒUR DE L’OPÉRA
CALENDRIER
MUSIQUE DE CHAMBRE
& CONCERTS EN FAMILLE
30 BALLET
LE BALLET NICE MÉDITERRANÉE
OCTOBRE
VERSE US CRÉATION MONDIALE
DE DWIGHT RHODEN
POR VOS MUERO
GNAWA
DÉCEMBRE
SOIR DE FÊTE
PAS DE DIEUX
MARCO POLO À HONG KONG
38 JEUNE PUBLIC
LA GRANDE FABRIQUE DE MOTS
MARTIN ZELS
41 DIACOSMIE
VENTE DE COSTUMES
PUBLICATION TRIMESTRIELLE GRATUITE - SERVICE COMMUNICATION - OPÉRA NICE CÔTE D’AZUR
4 & 6 rue Saint-François-de-Paule, 06364 Nice, cedex 4 www.opera-nice.org 04 92 17 40 00 Location
et renseignements 04 92 17 40 79 Directeur de la publication Gérard Renaudo / Anne Ginesta-Valentin
Rédacteur en chef Véronique Champion Photos Dominique Jaussein / Opéra de Nice Infographiste
Patricia Germain Ont collaboré à ce numéro : Sylvie Bailet, Virginie Broquet, Anne-Christelle Cook,
Daniela Dominutti, Christian Vacher, Anne Stephant, Martine Viviano Licence d’entrepreneur de
spectacles 1-1068076 / 2-1068074 / 3-1068075 Impression NISPHOTOFFSET, Saint-Laurent-duVar 06 - septembre 2014 © Conception - réalisation : direction de la Communication de la ville de Nice
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CONFÉRENCES
LA PRESSE EN PARLE
LES PARTENAIRES
Cher Public,
Après une saison passionnante, qui a permis de découvrir des ouvrages inédits à Nice et d’entendre de nouveaux
artistes, vous découvrirez au fil des pages qui suivent la nouvelle saison 2014-2015 que vous propose votre
Opéra Nice Côte d’Azur : une saison chorégraphique, symphonique et lyrique riche et variée, où le plaisir,
l’émotion et la révélation seront au rendez-vous.
Le Ballet Nice Méditerranée sous la talentueuse direction d’Eric Vu-an, partagera avec vous autour de nombreux
rendez-vous, sa magnifique technique et son talent. Nouveauté, l’Orchestre Philarmonique de Nice accompagnera nos danseurs pour deux productions au lieu d’une, Pas de Dieux et Soir de fête pour la fin d’année, et
encore En sol et La Sylphide au mois de d’avril. La musique vivante, « live », ajoutera à la magie de ces soirées.
A l’invitation de son directeur musical Philippe Auguin, l’Orchestre Philarmonique de Nice accueillera pour
sa saison symphonique de prestigieux chefs et solistes tels György Ráth, Neeme Järvi, Jeffrey Tate, le jeune
Michal Nesterowicz, Barbara Hendricks ou encore Nelson Freire, Michael Barenboim ou encore Kristian
Zimerman. Un coup de projecteur particulier sur la soirée de gala du 17 avril. Des répétitions publiques, à la
création française de La Grande fabrique de mots du compositeur Martin Zels en passant par les nombreux
concerts de notre chœur d’enfants, nos portes s’ouvrent largement aux jeunes publics. Les concerts au foyer
et les concerts en famille du dimanche matin restent des moments privilégiés de rencontre conviviale.
Au fil de cette première année passée avec vous, j’ai pu petit à petit découvrir le cœur de notre ville, un cœur
qui fort de ses traditions bat au rythme de la curiosité. Vous retrouverez ce dualisme qui anime Nice, tout au
long de la saison lyrique que je vous propose.
En ouverture de la saison lyrique, une version concertante du grand opéra de Verdi, Les Vêpres siciliennes,
dans sa version française de la création. La distribution affichera notamment le grand ténor Michal Lehotsky
qui compte parmi les meilleurs interprètes d’aujourd’hui, placé sous la baguette de Marco Guidarini. Avec
Turandot, nous retrouvons la tradition de l’opéra italien et le charme immortel de la musique de Giacomo Puccini.
Pour cette œuvre inachevée datée de 1926, Luciano Berio a imaginé en 2001 un final très respectueux du livret
que nous vous invitons à découvrir mise en scène signée par l’italien Federico Grazzini et dirigée par Roland
Böer qui nous revient après le succès inoubliable d’Adriana Lecouvreur. Nice, ville marine, ne restera pas
insensible à la force de Peter Grimes, le premier des chefs-d’œuvre de Benjamin Britten. Dans cette partition
phare du XXe siècle résonnent à plusieurs reprises des mélodies puisant leur source chez Puccini et Moussorgski, mais si représentatives du génie créatif de Britten, qui font de cet opéra un ouvrage puissant et attachant.
Qui est Peter Grimes ? Un marginal, un criminel ou tout simplement un rêveur ? Aujourd’hui encore, le pêcheur
Peter Grimes reste une énigme… que le ténor John Graham Hall et le chef niçois Bruno Ferrandis s’attacheront
à révéler. Così fan tutte nous livrera un vrai « traité d’amour » que nous vous proposons en collaboration avec
l’Opéra de Magdeburg. Mozart et son librettiste vénitien Da Ponte y signèrent le troisième et dernier fruit de
leur collaboration. Così fan tutte brillera de tous ses feux, grâce à une distribution jeune et confirmée, sous la
baguette de Roland Kluttig qui fera sur notre scène ses débuts en France. C’est autour de Semiramide, de
Gioacchino Rossini que j’ai imaginé une nouvelle collaboration avec le duo George Petrou à la direction musicale et Jakob Peters-Messer à la mise en scène. Après le triomphe de Semele la saison passée, ils nous livreront leur interprétation de cette perle du belcanto rossinien sérieux.
Un grand opéra en début de saison et un autre pour la clore : ainsi après Les vêpres siciliennes, La Juive de
Fromental Halévy en coproduction avec le Staatstheater Nuremberg, terminera cette saison. Ce titre très peu
joué aujourd’hui, avait déjà charmé, lors de sa création en 1835, des personnalités telles Richard Wagner,
Marcel Proust ou Hector Berlioz. Sous la baguette de Frédéric Chaslin, cet opéra, marque le retour sur la scène
niçoise du ténor français Luca Lombardo et des sopranos Hélène Le Corre et Cristina Pasaroiu. Il mettra
particulièrement en valeur notre chœur sous la direction efficace et sensible de Giulio Magnanini, son directeur.
Une fois de plus, grâce à la complicité, à l’énergie et à l’enthousiasme de tous les personnels, de nos ateliers
de fabrication de décors et de costumes, de l’Orchestre Philharmonique de Nice et du Chœur de l’Opéra, du
Ballet Nice Méditerranée, de l’ensemble des personnels techniques et administratifs, et bien sûr également de
tous les artistes invités, l’Opéra de Nice Côte d’Azur sera source d’enchantement. Je me joins à eux pour vous
souhaiter une excellente saison 2014-2015.
Marc Adam
Directeur artistique de l’Opéra Nice Côte d’Azur
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OPÉRAS
OPÉRA
© Thinkstock
GIUSEPPE VERDI
LES VÊPRE S
SICILIENNES
OPÉRAS
5
Grand opéra en 5 actes
Livret d’Eugène Scribe et Charles Duveyrier
Création à l’Académie Impériale de musique,
Paris, le 13 juin 1855
Version de concert en langue française
OPÉRA
UN SOIR
[durée 3h10 env.]
Direction musicale
Marco Guidarini
Hélène sœur de Frédéric II d’Autriche
Anna Kasyan
Ninetta camériste d’Hélène
Sophie Fournier
Henri jeune Sicilien
Michal Lehotsky
Guy de Montfort Gouverneur de Sicile
Davide Damiani
Jean Procida médecin sicilien
Kihwan Sim
Thibault soldat français
Frédéric Diquero
Danieli Sicilien
Gianluca Bocchino
Mainfroid Sicilien
Aurelio Gabaldon
Robert soldat français
Bernard Imbert
Le Sire de Béthune officier français
Ziyan Atfeh
Le Comte de Vaudemont officier français
Daniel Golossov
Orchestre
Philharmonique
de Nice
Directeur musical,
Philippe Auguin
Chœur
de l’Opéra de Nice
Directeur du Chœur,
Giulio Magnanini
6
OPÉRAS
L’histoire du massacre des vêpres siciliennes s’est chargée,
de siècle en siècle, de mille légendes et mille anecdotes
plus ou moins fantaisistes. On prête parfois à Giovanni da
Procida, diplomate aguerri, un rôle de premier plan dans
l’instigation de la conspiration. Une rumeur locale voit
même en lui un lointain père médiéval de la mafia sicilienne
– Cosa nostra se pense en résistante nationaliste, mais les
historiens contemporains invalident globalement cette
hypothèse.
En tout état de cause, le livret d’Eugène Scribe pour
l’opéra de Giuseppe Verdi ne recherche pas la vérité historique du célèbre événement. Au moment de la création
des Vêpres siciliennes à l’Académie royale de musique –
soit l’Opéra de Paris – le 13 juin 1855, la presse française
enthousiaste remarque toutefois qu’il ne faut pas y chercher de leçon d’Histoire.
Si l’on retrouve le canevas général de l’insurrection sicilienne, les personnages et l’intrigue de l’opéra s’autorisent
de nombreuses libertés avec l’Histoire. Pourtant, Scribe
n’instaure pas de climat mythique et ne joue pas d’une
atmosphère de troubadour. Un certain réalisme guerrier
est entretenu, notamment par l’allusion aux phénomènes
de viols de masse en temps de conflit. Montfort a eu son
fils Henri par le viol d’une Sicilienne, et les paysannes enlevées par les soldats, à l’acte deuxième, montrent une
bonne volonté si peu crédible qu’elle n’impose qu’un maigre voile pudique sur une cruelle réalité. Le librettiste
construit un monde bien réel dans un passé de fantaisie,
et l’on peut se demander si c’est bien au XIIIe siècle sicilien
qu’il nous emmène vraiment. Au départ Eugène Scribe, le
poète incontournable que Verdi a exigé auprès de l’Opéra,
lui a en effet proposé un drame intitulé Le Duc d’Albe, écrit
en 1836 pour Halévy, retouché en 1838 pour Donizetti et
abandonné par tous deux. La pièce se déroule à Bruxelles
en 1573. Le compositeur italien, refusant d’avoir l’air de
récupérer les restes des autres, demande un changement
de titre et de thème, et accepte la proposition des vêpres
siciliennes. Sans être un prétexte, l’Histoire dans les Vêpres
siciliennes est convoquée pour son pouvoir d’autorité et
pour sa capacité à composer un effet de réel.
Le librettiste conçoit un monde assez atemporel pour se
faire passe-partout, et en choisissant un sujet à la mode
depuis trente ans, maintes fois traité et parodié sur les
scènes parisiennes, il convoque son public presque
davantage au temps de Napoléon III que sous Philippe le
Hardi. Les héros évoquent mieux ceux du Guépard dans
le roman que Lampedusa1 écrira bien plus tard, que les
dames et chevaliers de chansons de geste. La noblesse
et les rebelles ne possèdent pas les mêmes codes d’hon-
DE PÂQUES À PALERME...
Par Nathalie Gendrot
neurs, et sont condamnés à ne pas se comprendre. La
modernisation du cadre thématique permet au librettiste
de soigner l’effet d’identification des spectateurs aux
personnages et de nourrir la part intime du scénario. Car
la ligne de force de ce texte réside dans la balance dramatique entre la conscience politique et la vie intime, dans le
déchirement entre le cœur et la nation, mais aussi entre
l’amour d’une femme et l’autorité d’un père. Peu importe
où et quand. Le personnage pivot n’est pas un protagoniste historique des vêpres siciliennes, il est jeune, pauvre
et n’a pas de nom. La scène de l’acte IV où Montfort tente
d’arracher le mot de « père » à Henri est symboliquement
puissante bien qu’imparfaite en termes de structure. Henri
peut tout arranger s’il accepte de dire « mon père » ; cela
peut sembler dérisoire et constituer un enjeu trop faible.
Mais il faut se souvenir que son père a violenté sa mère,
qu’il maudit cet homme sans le connaître depuis sa naissance, et que son père est le chef des envahisseurs de
son pays. Gonflé d’émotion, Montfort attend de son fils
qu’il l’adoube en tant que père, comme les jeunes parents
guettant les premiers mots d’un bébé. L’envahisseur
implacable s’abandonne à un geste régressif, il requiert par
là : effaçons le passé, revenons au temps de ta naissance
et réécrivons l’Histoire ensemble. C’est une illusion, ils le
sauront à la fin, mais pour l’instant Henri chancelle, résiste
et cède. Le livret tout en dualité provoquera une musique
toute en duos : ceux d’Hélène et Henri, de Henri et Montfort. La masse chorale même se dédouble. Le double
chœur de l’acte II, avec d’un côté les convives du bal du
gouverneur sur le navire, de l’autre les Siciliens décontenancés par la scène du rapt de leurs femmes (deux
masses qui se développent indépendamment sur une
même métrique en 6/8) constitue un des sommets musicaux des Vêpres siciliennes.
Le sujet historique s’avère également un élément sine qua
non de la forme choisie par le compositeur, le grand-opéra
à la française. Codifiée dans les années 1820-30 à l’Opéra
de Paris, marquée par quelques apogées comme Robert
le Diable de Meyerbeer ou La Juive de Halévy, cette forme
impose des scènes grandioses, une scénographie imposante, des chœurs écrasants et des incursions de ballet,
mais surtout un livret en langue française. Lorsque
Giuseppe Verdi demande un texte à Eugène Scribe, il
réclame un cadre poétique d’une ampleur semblable à la
scène du couronnement dans Le Prophète de Meyerbeer.
VERSION DE CONCERT
EN LANGUE FRANÇAISE
OCTOBRE
VEN 3 20H
DIM 5 15H
L’enjeu est de taille pour le compositeur ; une création pour
le Grand Opéra n’est pas une mince affaire, et son œuvre
sera fort attendue. Bien que pestant sans cesse contre
l’institution parisienne qu’il nomme « la grande boutique »,
Verdi comme tous les autres rêve depuis longtemps d’une
consécration que seule l’Académie royale de musique peut
lui offrir. Donizetti, Bellini, Meyerbeer, Wagner : ils sont
passés par là. L’Opéra possède un rayonnement unique
en Europe et met en œuvre des moyens scénographiques
hors normes, permettant de mettre en valeur la musicalité
spectaculaire. En 1855, Verdi possède une aura établie, il
vient de créer presque coup sur coup Rigoletto, Il Trovatore
et la Traviata. Mais l’acmé parisienne d’une carrière ne
s’atteint pas d’un saut, c’est une lente ascension marquée
d’étapes obligées. Verdi commence à se faire connaître du
public parisien à travers le Théâtre-italien qui reprend Ernani
(titré Il Proscritto à Paris) en 1844 puis Il Trovatore en 1854.
Une Légion d’Honneur en 1852 fera grogner le musicien
mais aura le mérite de l’attacher assez à la France pour
que le public l’adopte. Avec la création des Vêpres, prévue
pour l’Exposition Universelle de 1855, Verdi entend marquer
de manière définitive le genre du grand-opéra français. Ce
sera le cas.
Le soir de la première, leurs Majestés impériales LouisNapoléon Bonaparte et l’Impératrice Eugénie assistent au
spectacle. L’événement mondain attire tant de curieux que
les loges s’emplissent de beaucoup plus de spectateurs
qu’elles n’en peuvent contenir. On se serre, debout entre
les sièges, sans se plaindre. Verdi est appelé à venir saluer
par deux fois, et le couple impérial ne quitte pas la salle
tant qu’il n’a reparu.2 La critique est déçue du livret, mais
s’extasie unanimement de la partition dont l’ouverture, le
deuxième acte et le De profundis final au pouvoir dramatique infaillible recueillent les préférences. Le raffinement
de l’instrumentation, l’ampleur des chœurs impressionnent
Paris et Giuseppe Verdi, bien qu’harassé par cette bataille
colossale, remporte le pari de confirmer définitivement sa
réputation en France. u
Nathalie Gendrot
Extrait du programme
des Vêpres siciliennes
donné à l’Opéra Nice Côte d’Azur,
les 3 et 5 octobre 2014
1 > Il Gattopardo (Le Guépard) paraît en 1958. Le célèbre roman conte les tourments des aristocrates siciliens fin de race face aux révolutionnaires du
Risorgimento, à partir de 1860. Luchino Visconti le portera au cinéma en 1963.
2 > Le sujet des Vêpres était pour le moins osé face à un public français, mais les précautions de Verdi, qui a demandé nombre de corrections à son librettiste, ont été payantes. Aucun camp, Français et Siciliens, ne s’avère par trop caricatural, chacun s’en sort avec honneur.
OPÉRAS
7
ENTRETIEN AVEC
MARCO GUIDARINI
Frais d’un été partagé entre
le Théâtre Bolchoï de Moscou
où il a dirigé Turandot et l’Opéra
de Glasgow où il a triomphé
avec Madama Butterfly,
nous avons rencontré
le Maestro Marco Guidarini,
ravi de retrouver l’Orchestre
Philharmonique de Nice
© Raphaëlle Durosselle
et l’Opéra Nice Côte dAzur
pour diriger la version concert
des Vêpres siciliennes
en octobre.
4 questions à un chef prestigieux
Les Vêpres siciliennes est une œuvre peu programmée,
que ce soit en français ou en italien. Quelles raisons
trouvez-vous à cela ?
Marco Guidarini : Les Vêpres siciliennes ont été composées par Verdi dans la période qui suit immédiatement la
« trilogie populaire ». L’immense succès du Trovatore, de
Rigoletto et de La Traviata avait révélé au monde non
seulement le talent immense d’un compositeur mais aussi
une conception esthétique du théâtre en musique qui était
centrée sur la vérité psychologique des personnages, bien
au-delà du contexte historique de référence ou de la rhétorique littéraire particulière aux livrets de l’opera seria. Les
Vêpres siciliennes marquent un passage vers une conception plus proche du grand opéra à la française, pour
l’extension de la partition, la conception architecturale des
scènes et le goût pour la « grandeur » théâtrale. L’esprit
pour ainsi dire, de tragédie bourgeoise, est encadré d’une
fresque plus vaste, celle du prétexte historique. Donc l’impact émotionnel est moins direct, il intègre aussi une narration qui est aussi liée aux événements extérieurs et aux
personnages. Pourriez-vous nous illustrer la distribution niçoise pour
cette version concertante ?
La distribution niçoise pour notre version des Vêpres est
certainement de toute première qualité, avec une synthèse
très équilibrée entre la dimension internationale indiscutable de Lehotsky ou Damiani et le talent de jeunes artistes
formidables comme Anna Kasyan et Kihwan Sim. La difficulté du style vocal qui se pose entre la technicité tardobelcantiste et la vérité expressive de la maturité verdienne
constitue d’ailleurs un autre grand défi de la partition.
8
OPÉRAS
Quels sont les liens qui unissent Les Vêpres siciliennes,
Jérusalem et Don Carlos, trois opéras de Verdi composés en français pour le public français ?
D’un point de vue général, je dirai que le lien commun est
la tentative de se rapprocher des goûts meyerbeeriens du
grand-opéra - mais sans perdre son identité, au contraire
en renouvelant son propre style à travers cette expérience. J’ai été toujours fasciné par cette capacité de Verdi
d’intégrer le goût et le charme français dans ses propres
ouvrages. D’ailleurs l’admiration verdienne pour la culture
française est primordiale, et elle est enracinée dans la littérature. Il suffirait de songer à son culte pour Victor Hugo.
Venons-en à vous. Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur pour l’avenir ?
Au-delà de mon activité de chef d’orchestre dans le
monde entier, et pour laquelle l’expérience des années
passées à Nice a été essentielle, tant sur le plan artistique qu’humain, j’ai l’intention de me dédier aux développements de projets interdisciplinaires, qui puissent
intégrer la musique avec d’autres formes artistiques et
de culture. Ma collaboration avec les musées, pendant
ma longue période niçoise, a été révélatrice. J’ai aussi
l’intension de construire des liens avec le monde universitaire et académique pour donner des opportunités
artistiques aux jeunes talents. C’est dans ce sens que
se situe mon travail avec l’Accademia de la Scala, l’Academia Placido Domingo de Valencia et bientôt avec le
CNSM de Paris, ainsi que le parcours de mon Concours
Bellini sur Paris. u
ENTRETIEN AVEC
SOPHIE FOURNIER
Par Christophe Gervot, le 4 août 2014
Elle est Ninetta
dans cette version
de concert
en langue française
Christophe Gervot : Les Vêpres siciliennes est le premier
opéra que Verdi a composé en français, pour l'Opéra de
Paris en 1855, bien avant Don Carlos en 1867. En quoi,
selon vous, la langue française transforme-t-elle la
musique de Verdi ?
Sophie Fournier : La langue française change énormément de choses, il y a une autre dynamique due en particulier aux accents toniques qui sont placés en début de
mot en italien, et à la fin en français. La couleur des
voyelles est différente d'une langue à l'autre. « Je frissonne » par exemple, prend une sonorité très particulière dans
la partition, même si la musique reste italienne. J'ai chanté,
à mes débuts, dans La Favorite de Donizetti, dans sa
version originale en français. Ce qui me semble intéressant, c'est que ces œuvres ont été commandées dans
cette langue et pour un théâtre français, ce qui montre l'invention des compositeurs, et les échanges, dans un art
profondément vivant. Je me souviens avoir chanté la
comtesse des Noces de Figaro dans une traduction de
Eric-Emmanuel Schmitt en 1997, au Théâtre Impérial de
Compiègne. Le texte était parfait et le traducteur a su
garder la dynamique de la langue française. Verdi a su
atteindre une telle cohérence.
Vous défendez énormément la musique française, et vous
avez participé à un film de Dominique Delouche, Denise
Duval revisitée ou la voix retrouvée, d’après La voix
humaine de Jean Cocteau et Francis Poulenc, avec
Alexandre Tharaud au piano et aux côtés de Denise
Duval, créatrice du rôle. Ce film est paru en DVD en
2009. Quel souvenir gardez-vous de ce travail ?
C'est un souvenir formidable et l'un des événements de
ma carrière. Je voulais chanter avec Denise Duval. C'est
une femme extraordinaire, entière et passionnée. Chacun vit
La voix humaine à sa façon. J'ai moi aussi connu de telles
attentes d'un appel téléphonique. Dans ce film, je chante
sur la scène de l'opéra comique, Alexandre Tharaud joue
et Denise Duval, installée en face de moi, me donne des
conseils. J'aime son authenticité, sa sensibilité et sa
passion pour l’œuvre. Elle et moi avons des choses en
commun. J'ai adoré les personnes qui l'entouraient, ses
amis et l'élégance de leur comportement. On chante aussi
avec notre culture et notre histoire. J'étais là pour écouter
Denise Duval et m'imprégner d'elle, et la rencontre m'a
énormément apportée. Elle me considérait comme une
artiste.
Parmi les nombreux opéras français que vous avez
chantés, vous étiez Colette dans La basoche de André
Messager – trop rarement représenté – en 1991 à
l'Opéra de Nantes. Vous avez aussi été, entre autres
figures, Blanche de La Force des Dialogues des carmélites à Nantes en 1996 et, depuis 2013 à l'Opéra de
Toulon, Mère Marie et Carmen à Ljubljana (en Slovénie),
Singapour et Tours. Vous avez également incarné
Metella de La vie parisienne dans une mise en scène de
Laurent Pelly à Toulouse et à Montpellier en 2010. Quels
sont les rôles dont vous vous sentez la plus proche dans
le répertoire français ?
Francis Poulenc est l'un de mes compositeurs de prédilection, à qui je me sens intimement liée. J'aurais aimé vivre
à son époque, et avoir la chance de le rencontrer. J'ai
notamment interprété le rôle de Blanche des Dialogues des
carmélites deux semaines après la disparition de ma sœur,
OPÉRAS
9
avec une ferveur toute particulière. L'un de mes premiers
rôles a été Conception de L'heure espagnole de Maurice
Ravel. Je garde un souvenir très fort aussi de La mort de
Cléopâtre, une tragédie lyrique de Hector Berlioz, en 2010,
à Lille et en tournée en Russie sous la direction de JeanClaude Casadessus. J'ai également adoré le rôle de Guilhen dans Fervaal, une rareté absolue de Vincent D'indy qui
date de 1897, à Berne en 2009, sur une idée de Marc
Adam. Ce sont des œuvres très différentes mais elles ont
en commun la finesse de la langue française. On doit les
chanter en s'efforçant d'être au plus près d'une déclamation, même dans Carmen. Il est important de garder une
prononciation qui n'enferme pas et qui permet de maintenir une projection. J'aime beaucoup l'air de la lettre de
Metella où les mots ont une telle importance.
Vous avez été l'élève de Régine Crespin au CNSM de
Paris. Quelles traces vous a laissé cette immense
artiste ?
Je garde le souvenir d'une femme hors du commun, et j'ai
eu beaucoup de chance de la rencontrer. Elle aimait que
les choses soient vivantes et qu'il y ait de la musique à
chaque fois que l'on chantait. J'ai découvert l'opéra assez
tard et finalement, à l'époque, rien ne me paraissait inatteignable. L'échange avec Régine Crespin a été très vif et
très fort. Elle m'a fait connaître tous les répertoires qu'elle
avait abordés, et ce n'était jamais banal. Elle m'a appris
cette articulation française, prononcée du bout des lèvres.
Il fallait toujours la séduire en chantant. Elle aimait avant
tout être touchée. Je me suis aperçue très vite de la
chance que j'avais eue de la rencontrer, et j'avais ensuite
envie de lui rendre hommage par mon chant.
Vous reviendrez à Nice en janvier 2015 pour le rôle de
Mrs Sedley de Peter Grimes de Benjamin Britten. Que
représente cet opéra pour vous ?
J'avais déjà interprété le rôle du chœur féminin du Viol de
Lucrèce de Britten, et je suis ravie de chanter pour la
première fois dans Peter Grimes. C'est un opéra magnifique, avec d'extraordinaires pages d'orchestre et un rythme
fabuleux dans les ensembles vocaux. L'orchestration est
éblouissante et l'histoire vraiment bouleversante. On ne
peut pas tout entendre en une seule fois tellement c'est
riche.
Quels autres compositeurs aimez-vous interpréter ?
J'aime beaucoup chanter Mozart. Sa musique m'évoque
la jeunesse, la joie et la spontanéité. Elle permet au chanteur, tout en restant un instrumentiste, d'être très théâtral.
Chaque figure de ses livrets est importante, et rend possible un réel échange sur le plateau. Le théâtre est toujours
présent, dans un bouillonnement de chaque instant. Il y a
de plus une vie incroyable, grâce aux ensembles et aux
récitatifs. L'un de mes premiers rôles a été Chérubin des
Noces de Figaro. J'ai aussi beaucoup interprété d'opéras
de Puccini. J'adore les élans de sa masse orchestrale, un
10 OPÉRAS
orchestre avec lequel il ne faut pas chercher à lutter, mais
plutôt se laisser emporter, comme sur une vague. C'est
pour incarner tous ces personnages qui meurent sur scène
que j'ai voulu chanter ce compositeur. Dès que je peux,
j'interprète aussi la musique de chambre de Debussy et la
chanson perpétuelle d'Ernest Chausson. Ces partitions me
touchent. Avec mon caractère assez extraverti, j'aime
servir ces œuvres qui demandent de l’intériorité.
Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur ?
Je vais chanter pour la première fois Nicklaus des Contes
d'Hoffmann à l'Opéra de Toulon en mars 2015. C'est une
œuvre que je connais bien, j'ai déjà incarné Giulietta et Antonia. J'adore les rôles de travesti, et je me sens très bien
dans la peau d'un jeune garçon. Mes premiers amours ont
été Siebel, Hänsel, Cherubin, Annio de La clémence de
Titus et le prince Orlofsky. Je me dirige toutefois petit à
petit vers des figures de femme mûre. Les choses évoluent,
mais tous les personnages sont intéressants et c'est un
vrai plaisir, avant tout, d'être sur scène. J'ai chanté Bertha
du Barbier de Séville à Tours avec bonheur. J'ai envie de
continuer dans des rôles de composition. Mais Nicklaus
n'a rien à voir avec ça, et je vais m'en donner à cœur joie,
et m'amuser.
Quels rôles rêveriez-vous d'aborder ?
J'aurais aimé interpréter du Wagner. Si l'occasion se
présente, j'en serai ravie. Il y a beaucoup de rôles qui
m'attirent, mais j'aimerais surtout chanter, si possible,
jusqu'au bout. Je me sens chez moi sur scène, avec les
gens du théâtre. C'est un univers qui me plaît. J'enseigne
aussi, et j'adore transmettre. Ce qui me touche avant tout,
c'est la vibration du chant, une sensation unique. J'ai
beaucoup de chance d'exercer un métier magnifique. J'ai
eu parfois des expériences humainement désagréables,
mais il y en a dans toute profession. Je ne regrette absolument rien.
Quel est votre souvenir le plus marquant dans votre itinéraire d'artiste ?
Je garde un souvenir très fort du rôle de Jenufa à Tours en
2003. Le caractère du personnage, sa générosité et son
pardon final me bouleversent. Cet opéra de Janacek m'a
permis d'atteindre une plénitude. Il y a eu aussi cette belle
rencontre avec Denise Duval qui m'a redonné foi en ce
métier. u
OPÉRA
GIACOMO PUCCINI
© Thinkstock
TURANDOT
« Dramma lirico » en 3 actes
et 5 tableaux
Finale de Luciano Berio, 2002
Livret de Giuseppe Adami
et Renato Simoni
d’après Carlo Gozzi
Création Teatro alla Scala de Milan,
le 25 avril 1926
[durée 2h10 env.]
Direction musicale
Roland Böer
Mise en scène
Federico Grazzini
Décors Andrea Belli
Costumes Valeria Bettella
Lumières Patrick Méeüs
Vidéo Luca Scarzella
Direction du Chœur
Giulio Magnanini
Turandot La princesse
Irina Rindzuner
Altoum L’empereur
Massimo La Guardia
Timur roi de Tartarie en exil
Mattia Denti
Calaf son fils
Alfred Kim
Liù une esclave
Ilia Papandreou
Ping Grand Chancelier de Chine
Alexandre Duhamel
Pang Grand Maître des provisions
Roberto Covatta
Pong grand Maître de la cuisine impériale
Alexander Kravets
Un mandarin
Richard Rittelmann
Orchestre
Philharmonique
de Nice
Directeur musical,
Philippe Auguin
Chœur de l’Opéra de Nice
Directeur du Chœur,
Giulio Magnanini
CONFÉRENCE >
5 NOVEMBRE 18H
ASSOCIATION POUR LE RAYONNEMENT
DE L’OPÉRA NICE CÔTE D’AZUR
12 OPÉRAS
OPÉRA
TURAND
JEUX DE LA MORT
Puccini meurt
le 29 novembre 1924.
Son disciple
Franco Alfano
achève l’ouvrage.
Le soir de la première,
à la Scala de Milan
le 25 avril 1926
sous la direction
d’Arturo Toscanini,
ce dernier pose
sa baguette
après la mort de Liù,
dernière page
écrite par Puccini.
NOUVELLE PRODUCTION
NOVEMBRE
MER 12 20H
VEN 14 20H
DIM 16 15H
MAR 18 20H
OT
ET DE L’AMOUR
Par Christophe Gervot
« C’est comme chez les grands artistes : il y a parfois
dans leurs poèmes des scènes si douloureuses
qui vous font mal ensuite toute votre vie
quand on se les rappelle, par exemple
le dernier monologue d’Othello,
Eugène aux pieds de Tatiana, ou bien la rencontre
du forçat évadé avec l’enfant, la petite fille,
dans la nuit froide, auprès d’un puits,
dans « les misérables » de Victor Hugo ;
cela vous perce le cœur une fois
et ensuite la blessure demeure à jamais »
Fédor Dostoïevski L’adolescent
Traduction de Pierre Pascal
Turandot est l’ultime opéra de Giacomo Puccini. Le compositeur s’est éteint en 1924, avant d’avoir achevé
l’orchestration de la dernière scène dont on a retrouvé
quelques esquisses. L’œuvre sera créée en 1926, et c’est
Franco Alfano, proche du mouvement vériste qui terminera
le duo final pour lequel Puccini voulait atteindre l’intensité
de celui de Tristan et Isolde de Wagner. C’est cette version
d’Alfano que l’on joue traditionnellement. Le compositeur
Luciano Berio (1925- 2003) a offert sa vision de la fin de
cet opéra, resté inachevé. Créée en janvier 2002 aux
Canaries, en version de concert, sous la direction de
Riccardo Chailly, cette nouvelle proposition a été ensuite
représentée sur scène, la même année, à Los Angeles et
à Amsterdam. Elle va être reprise à l’Opéra Nice Côte
d’Azur en création française, à partir du 12 novembre
2014, dans une nouvelle mise en scène de Federico
Grazzini.
Turandot trouve sa source dans un conte chinois et une
pièce de Carlo Gozzi, dramaturge vénitien du XVIIIe siècle,
dont s’inspirera aussi Sergueï Prokofiev pour son opéra
L’amour des trois oranges. Ferrucio Busoni (1866-1924),
à qui l’on doit un très intense Doktor Faust, a précédé
Puccini, en composant en 1917 une première Turandot.
La bohème avait connu une semblable réécriture puisque
Leoncavallo en avait offert sa version en 1897. Turandot
fait partie de trois opéras majeurs du XXe siècle, restés inachevés au moment de la disparition de leurs compositeurs.
Alban Berg, en s’éteignant en 1935, avait uniquement
terminé les deux premiers actes de Lulu tandis qu’Arnold
Schoenberg n’est jamais parvenu à composer le troisième
acte de Moïse et Aaron, créé en 1957, six ans après sa
mort. Quels indicibles secrets ces partitions explorent-elles
pour se figer ainsi au seuil d’un absolu inaccessible ? Ces
actes impossibles à finir restent une énigme, l’œuvre est
ouverte à tous les possibles.
FATALES ÉNIGMES
L’énigme est un motif central de Turandot. Dès le premier
acte, lors des retrouvailles entre Calaf et Timur, accompagné de Liù, le prince demande à la jeune esclave pourquoi
elle fait preuve d’une telle fidélité et d’autant de courage
pour affronter les chemins de l’exil auprès de son père, le
roi déchu. Liù lui répond, sur une mélodie d’une ineffable
beauté et un aigu extatique « Parce qu’un jour… dans le
palais, tu m’as souri » (« Mi hai sorriso »). Ainsi, la jeune
femme, portée par ce beau sourire, est prête à tout
supporter, dans un dépassement de soi de chaque instant.
Elle puise sa force dans un souvenir furtif, une image, ce
qui n’est pas sans rappeler l’amour qu’éprouve Tamino
dans La flûte enchantée, et qui n’a d’autre origine que le
portrait de Pamina dévoilé par les trois dames, d’où résulte
aussi une série d’épreuves. La beauté est une énigme. A
peine arrivé au royaume de la princesse de glace, Calaf est
violemment troublé par l’apparition fatale et perturbante de
Turandot. Alors que celle-ci se montre pour assister à
l’exécution du précédent prétendant, la vision de cette
femme au balcon exerce une fascination immédiate chez
le prince, « O beauté divine ! O Merveille ! O rêve ! » (« O
divina bellezza ! O meraviglia ! O sogno ! »), un choc amoureux rapide et brutal. Il demande immédiatement à résoudre les trois énigmes que la princesse pose aux audacieux
qui veulent la conquérir. S’il échoue, le candidat est mis à
mort, au terme d’un jeu où les forces d’Eros et de Thanatos se déchaînent. Timur et Liù le mettent en garde contre
cette attirance morbide, d’autant que la cruauté de Turandot est sans limites, et que ses épreuves sont impossibles
à gagner. La foule est pleine de compassion et de terreur
face à cette nouvelle victime annoncée. Ces avertissements évoquent Salomé de Richard Strauss, où le regard
s’avère tout aussi mortifère. Hérode éprouve une semblable attirance pour sa belle-fille. Hérodiade tente vainement
de le prévenir « Vous la regardez trop ». La similitude se
poursuit dans la mise à mort du candidat en cas d’échec.
Il est décapité. On pense à la décollation de Jokanaan, et
à la phrase de Salomé tenant la tête dans ses mains « Le
mystère de l’amour est plus grand que le mystère de
OPÉRAS
13
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la mort ». Dans l’ultime opéra de Puccini aussi, la mort
plane au dessus du désir et de l’amour. Les trois ministres
Ping, Pang et Pong, figures comiques qui créent un mélange des registres, tentent vainement de faire renoncer Calaf
à son projet, par quelques formules grinçantes d’un sombre réalisme « Ici est la porte du grand charnier », « jeune
dément » ou « Il y a l’ombre du bourreau là-bas ». Le prince
se montre inflexible, il fait retentir le gong pour répondre
aux énigmes. La foule, qui ne se fait aucune illusion sur
l’issue de cette nouvelle série d’épreuves, s’écrie « Déjà
nous creusons la fosse pour toi qui veut défier l’amour ! »
(« La fossa già scaviam per te che vuoi sfidar l’amor ! »).
Les ministres s’enfuient en éclatant de rire, à bout de mots.
dans ton cœur ? », Liù répond, sur une note suspendue
d’une beauté miraculeuse, « L’amour ». Les voix des deux
femmes s’enlacent quelques instants. Torturée par les
gardes, la jeune fille se suicide pour garder secret ce nom
qui lui est si cher. Cette mort trouble profondément Turandot et lui perce le cœur. Elle va permettre, dans le duo final
avec Calaf, sa lente acceptation de l’amour.
Pour la première fois, le scénario échappe à la princesse
de glace. Puccini n’est pas allé plus loin que cette mort de
Liù. Lors de la première de l’opéra le 25 avril 1926 à la
Scala de Milan, Arturo Toscanini, au pupitre, s’est arrêté
de diriger après cette scène poignante, et s’est retourné
vers le public en déclarant « Ici s’achève l’opéra. Le maestro en était là quand il est mort ».
D’UNE SCÈNE À L’AUTRE
LA VERSION DE LUCIANO BERIO
Au deuxième acte, Turandot explique les causes du massacre de tous ses prétendants. En prélude aux énigmes,
elle expose et hurle, dans un chant qui vient de très loin et
d’une difficulté redoutable, sa haine des hommes et son
refus du sentiment amoureux : « In questa reggia… »,
« Dans ce palais, il y a mille et mille ans, retentit un cri de
désespoir ». En s’adressant à Calaf, devant la foule assemblée, elle poursuit ainsi « Mon aïeule fut entraînée par un
homme semblable à toi étranger » puis « Je venge sur
vous, cette pureté, ce cri et cette mort ». Elle ajoute « Jamais
nul ne m’aura ! » et « Les énigmes sont trois. La mort est
une ! ». Sa souffrance est infinie. Ainsi, la princesse de
glace brandit, dans la démesure, son roman personnel et
familial et l’obsession du viol d’une ancêtre qu’elle veut
venger. Le passage est très théâtral. Turandot se met en
scène de manière très ritualisée. Ce n’est certainement pas
la première fois qu’elle fait ce monologue. Elle scénarise
sa vie, face à ses sujets apeurés et soumis. Tosca, déjà,
dans une semblable démarche, met en scène avec minutie
l’exécution de son amant, comme s’il s’agissait d’une
scène de théâtre, sur la terrasse du château Saint Ange
de Rome, avant d’être piégée par la réalité. Les deux héroïnes ont en commun une fuite du réel et de la condition
humaine et la tentation de faire de sa vie une œuvre d’art,
en l’esthétisant. Turandot le prouve en affirmant à son père,
après la victoire du prince, « C’est ta fille qui est sacrée »
puis, dans une ultime résistance, plus tard à Calaf « Je ne
suis pas chose humaine ». Elle ressasse inlassablement sa
névrose en lui apportant quelques variations. Ses excès,
son absence de tout compromis et son obsession de la
vengeance en font une sœur d'Electre. Sa métamorphose
s’accomplit cependant à l’issue d’un second choc traumatique. Il s’agit de la mort de Liù. La jeune esclave choisit la
mort plutôt que de révéler le nom de celui qu’elle aime,
dont la tête a été mise à prix. Il y a, dans cette figure du
sacrifice, d’émouvantes réminiscences de Mimi et de
Madame Butterfly. A la question « Qui a mis tant de force
Il semble que le duo final soit un sommet, une forme
d’absolu, que la mort de Puccini a rendu inaccessible.
Cette scène explore les ultimes résistances de la princesse, sa métamorphose et son acceptation de l’amour.
A l’époque de la création de la nouvelle version de Turandot
en 2002, Luciano Berio constatait, dans cet opéra ultime
de Puccini, « une conception plus éloignée du temps, plus
distanciée et plus complexe
que dans La bohème, où il est
plus quotidien ». Afin de bien
OPÉRA
caractériser cette temporalité,
PETER GRIMES
et peut-être aussi pour rendre
BENJAMIN BRITTEN
sensible un temps intérieur
18, 20, 22 & 24 JANVIER 2015
dans ce qui se joue entre les
deux protagonistes, des interCOSÌ FAN TUTTE
WOLFGANG AMADEUS MOZART
ludes séparent les duos entre
15, 17, 19 & 21 FÉVRIER 2015
Calaf et Turandot, et ménagent
des pauses. Il a fait quelques
SEMIRAMIDE
coupures dans le livret, mais
GIOACCHINO ROSSINI
aucun ajout. Puccini avait écrit,
18, 20, 22 & 24 MARS 2015
en marge de la partition, « Tristan ». Berio a beaucoup développé cette dimension wagnérienne que le compositeur
voulait atteindre. Au moment où les deux amants se touchent
pour la première fois, on songe à la septième symphonie
de Mahler. On entend aussi, dans toute la scène, un écho
de Liù, qui a joué un rôle déterminant dans leur rapprochement. Le final est plus simple, plus intériorisé, et il développe certains thèmes présents au premier acte. La fin se
termine sur un pianissimo, à l’inverse du déchaînement
orchestral et choral proposé par Alfano. En février 1991,
l’Opéra Bastille affichait la création française d’un opéra de
Luciano Berio, Un re in ascolto (Un roi à l’écoute). C’est à
une nouvelle écoute du dénouement de Turandot que
cette version de 2002 nous invite, au plus près des ultimes
désirs du compositeur. u
NE MANQUEZ PAS
OPÉRAS
15
OPÉRA
FEDERICO
GRAZZINI
ENTRETIEN
Par Christophe Gervot
Traduit de l’italien par Jean-Marc Quaranta
16 OPÉRAS
Christophe Gervot : Que représente pour vous Turandot
de Puccini ?
Frederico Grazzini : Je crois que pour un metteur en
scène, Turandot est une montagne particulièrement difficile à escalader. Elle l'a été en tout cas aussi pour moi.
Puccini lui-même a éprouvé beaucoup de difficultés dans
son propre travail de création qu'il n’a pas réussi à mener
à son terme. C'est un opéra compliqué à définir car très
particulier. Je crois que c'est une œuvre vraiment novatrice, dans la mesure où elle dépasse les catégories traditionnelles de la dramaturgie tout en demeurant une fable.
C'est cette ambiguïté, d'une grande modernité, qui fascine
tellement. Le thème est lui aussi très actuel car il parle
directement au public d'aujourd'hui. Calaf, le protagoniste,
lutte pour conquérir la part la plus secrète et la plus cachée
de son être. Il cherche à atteindre un amour qui ne repose
pas sur la domination ou la possession de l'autre, mais qui
est fondé sur la réciprocité et l'harmonie. Turandot est
l’histoire de cette recherche. Comment compareriez-vous la scène finale de la version
de Luciano Berio, choisie pour ces représentations
niçoises, avec celle de Franco Alfano et en quoi a-t-elle
des conséquences sur votre mise en scène ?
Nous avons choisi la version finale de Luciano Berio parce
qu'elle est plus proche de la dramaturgie musicale de
Puccini. Berio synthétise et supprime certains passages et
il réduit les parties de son invention à l'essentiel. Son travail
repose sur toutes les esquisses laissées par Puccini, grâce
auxquelles il est possible de retrouver les intentions du
compositeur. Alors qu'Alfano avait utilisé quatre esquisses
sur trente dans la première version, et cinq dans la seconde, Berio en prend en compte environ vingt-quatre, témoignant ainsi d’un grand respect pour Puccini. Dans la
version d’Alfano, il est difficile de trouver un projet dramaturgique précis autre que celui de conclure l’histoire sur
une fin heureuse et triomphante. Chez Berio en revanche,
il y a très certainement une plus grande cohérence
d'ensemble. Il propose un final très suspendu et dissout.
« Amour » reste le dernier mot , mais il n'y a pas de jugement moral ni de triomphalisme. Il efface quasi totalement
le désir de possession de Calaf, élimine le lieu commun de
la mort belle, et fait presque complètement disparaître le
thème de l'orgueil et de l'humiliation de Turandot. L’attention du spectateur est portée sur le travail intérieur et sur
la transformation de la princesse, ce qui est le plus important pour Puccini. C'est clairement une attitude plus
moderne en comparaison de celle d’Alfano. Berio fait plus
de place à l’implicite et laisse à la musique le soin de
développer tous les ressorts psychologiques. Pour restituer le mieux possible cet état de suspens sur scène, j’ai
décidé d’utiliser la présence du cadavre de Liù durant le
finale. La présence tragique de ce corps permet de
maintenir un troisième pôle dramatique, en plus de celui
de Turandot et de Calaf. Sur le plan symbolique, les opposés (Calaf et Turandot) se réunissent, mais le corps de Liù
reste à terre, effleuré par la lumière d'un jour nouveau :
chaque changement demande le sacrifice d'une partie de
nous-mêmes.
Comment présenteriez-vous la scénographie de votre
spectacle ?
Avec le scénographe Andrea Belli, nous avons voulu un
espace qui fasse vivre l'atmosphère de fable et la dimension symbolique de l'histoire. Le monde de Turandot est
dominé par la furie vengeresse, mais surtout par l'intellect,
par le logos, dans sa forme la plus cruelle et la plus sanguinaire. La princesse contraint les prétendants, par le
piège des énigmes, à un éternel bain de sang, et ses sujets
sont réduits à être les esclaves de la terreur. Dans notre
version, des princes morts sont transformés en têtes pétrifiées. Nous avons créé un lieu ambivalent qui puisse raconter, d'une part, l'évolution du cœur de Turandot et, d'autre
part, le voyage de Calaf dans son monde intérieur. Dans
cette proposition, l'indication du livret Pékin, au temps des
fables devient un lieu magique et ambigu où l'éros se
réconcilie avec le discours, un lieu sacré, un lieu de culte,
qui renvoie à l'intériorité et au mystère inspirés par les œuvres de l'architecte japonais Tadao Ando, forteresse mentale et tombe. L'espace se transforme par les vidéoprojections et la lumière. Les vidéos projetées sur les parois
deviennent une émanation magique du monde de Turandot
et en même temps le reflet du regard halluciné de Calaf
sur ce monde. Avec le vidéaste Luca Scarzella, nous avons
développé, dans la dramaturgie des vidéos, l'opposition
symbolique qui est à la base de cette histoire. Turandot est
la reine de l'obscurité, Calaf le porteur de lumière. Turandot
est un glacier lunaire, Calaf le feu et le soleil. Après la résolution des énigmes, la Lune est obscurcie par le Soleil. Ce
n'est qu'à la fin que la lumière et l'ombre parviendront à
s’entre-pénétrer. La lumière occupe justement une place très importante
dans vos mises en scène. Quelle fonction aura-t-elle
dans votre vision de Turandot ?
Un de mes maîtres disait qu’au théâtre, la lumière est
fondamentale, « Parce que sinon on ne voit rien ». Cela
semble banal mais c'est une grande vérité. Tout ce que
nous voyons sur scène n'existerait pas sans la lumière.
Dans ce spectacle, elle joue un rôle fondamental parce
que, en plus de peindre, elle raconte. Elle ne sert pas
seulement à construire une atmosphère mais elle a une
fonction symbolique bien précise. Elle est étroitement intriquée avec les vidéoprojections et elle devient même un
élément narratif en soi parce qu'elle définit le monde de
Turandot, un monde obscur fait d’ombres. Calaf est celui
qui apporte la lumière dans ce monde. Grâce à son intervention, la forteresse de Turandot sera envahie par l'aube
d'un jour nouveau. Cette transformation s’accomplit progressivement au cours des trois actes. Au début, c'est
comme une force extérieure qui pèse sur la scène. Pendant
l'air « Nessun dorma », cette pression atteint son paroxysme et au moment du baiser magique, dans le finale, cette
force se libère.
De quelle manière envisagez-vous la direction d'acteurs ?
Le travail avec les chanteurs est déterminant pour la réussite d'un opéra. Dans Turandot, il y a divers registres qui
sont imbriqués, le mode réaliste et dramatique pour Calaf,
Liù et Timur, le genre plus comique et grotesque pour Ping
Pong et Pang, ou encore un ton plus ritualisé et stylisé
pour le chœur, pour n'en citer que quelques-uns. Ces différents registres reflètent le cubisme dramaturgique de cette
œuvre et ils constituent le défi le plus grand à relever pour
réussir à mettre en scène correctement cet opéra. Pour
moi, il est essentiel que sur la scène, il y ait de la vie et que
OPÉRAS
17
les événements qui se produisent soient crédibles, même
si l’univers de la fable est fantastique et invraisemblable.
Je suis sûr que le casting d'exception avec lequel nous
allons travailler sera à la hauteur de cet enjeu.
Qu'est, pour vous, une mise en scène d'opéra idéale ?
Je ne crois pas qu’il existe une mise en scène d'opéra
idéale. Il existe des spectacles plus ou moins intéressants.
D’une façon générale, aujourd'hui, les mises en scène
d'opéra ont la responsabilité de présenter un point de vue
qui s'enracine dans le présent. Elles ont en particulier la
responsabilité de faire fonctionner et de faire vivre dans ce
présent des matériaux qui appartiennent au passé. Et cela,
on peut le faire d'une infinité de manières. Souvent, mais
pas toujours, ces œuvres qui appartiennent au passé sont
d'un très haut niveau artistique, ce qui demande à la mise
en scène un même niveau afin que le monde qui est construit sur scène puisse réellement dialoguer avec la
musique.
Vous allez reprendre en décembre 2014 votre vision de
Hansel et Gretel de Humperdinck à l'Opéra de Rouen.
Y-a-t-il des points communs entre vos choix visuels sur
cette adaptation d'un conte à l'opéra et ceux de Turandot, qui s'inspire aussi d'une légende ?
Hansel et Gretel est très certainement un spectacle au ton
beaucoup moins fort et pensé pour un public plus jeune.
L'histoire des deux enfants part d'une situation réaliste, y
compris dans la scénographie, et elle conduit graduellement le spectateur dans un monde magique où même les
objets sont animés et les forêts peuplées de créatures
fantastiques. Avec Turandot, le spectateur est projeté
immédiatement dans une réalité magique et symbolique,
par moments horrible. Le public est obligé de déchiffrer
les événements exactement comme le protagoniste, Calaf.
Le spectacle commence dans un rituel ambigu de mort
où se trouvent les têtes pétrifiées des princes que Turandot
a condamnés à mourir dans un mystérieux souterrain.
Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur ?
Ce sont les spectacles à venir. En art, on ne peut pas
revenir en arrière, même pas pour reprendre le fil interrompu.
Pourriez-vous citer un souvenir particulièrement fort
dans votre itinéraire artistique ?
Lorsque j'avais 16 ans, ma mère est venue me voir dans
une mise en scène scolaire de Beaucoup de bruit pour rien
de Shakespeare. Après le spectacle, elle m’a dit qu'elle
n'avait pas cru un seul mot de ce qu'elle avait vu sur scène.
Depuis ce jour, j'ai décidé d'essayer de m’améliorer. u
18 OPÉRAS
LE RÔLE EMBLÉM
Par Christophe Gervot
traduit de l’anglais par
Lucie Capdeville
Christophe Gervot : Vous avez chanté Turandot dans
plusieurs pays et de nombreuses productions à Santiago du Chili, New York, mais aussi Minneapolis et Saarbrücken. Que représente pour vous ce personnage ?
Irina Rindzuner : Ces dernières années, le rôle de Turandot
est devenu mon rôle emblématique. Chaque saison, je le
chante quelque part dans le monde. L’an passé, j’ai fêté
ma cinquantième interprétation. C’était au festival Domstufen d'Erfurt. J'espère que je fêterai assez vite la centième !
Quelles sont les difficultés du rôle ?
Les exigences du rôle sont énormes. Il comporte notamment des aigus redoutables, qui doivent dominer un grand
orchestre, et il nécessite une soprano dramatique, capable
de maintenir une très haute tessiture, et ayant une puissance lui permettant d’être entendue par delà une orchestration extrêmement dense. Il n’y a pratiquement pas de
notes intermédiaires et vous êtes en permanence dans les
hauteurs, dans une sorte de septième ciel, durant la
représentation toute entière. Le rôle de Turandot n’est pas
très long, mais il est si difficile que peu de chanteuses dans
le monde l’interprètent.
Quelles différences avez-vous constatées entre le final
traditionnel de Franco Alfano et la version de Luciano
Berio proposée à Nice ?
Je chante habituellement la version traditionnelle de Franco
Alfano. J'ai cependant participé à une production qui
s'achevait là où Puccini s'est arrêté, sur la mort de Liù. Je
vais aborder pour la première fois le final de Luciano Berio
et je suis, pour l'instant, toujours en train de le travailler. Il
me paraît très intéressant, mais je pense que je serai réellement en mesure de le comparer à l'autre une fois les
répétitions commencées.
Vous avez abordé l'an passé Senta du Vaisseau fantôme. Quelles émotions suscite en vous cet opéra de
Wagner ?
Senta a été mon premier rôle wagnérien. J’ai adoré le chanter
et le jouer, et c'est devenu un de mes rôles favoris. La
musique est si belle, et l’idée de rédemption par l’amour
si chère à mon cœur, que j'espère que cet opéra est pour
moi le premier d'une série d’autres figures de Richard
Wagner.
© DEVON CASS
ATIQUE D’IRINA RINDZUNER
Quels autres opéras aimez-vous interpréter ?
En dehors de Senta, j’aime interpréter Minnie dans La fanciulla del west, un autre opéra de Puccini, mais aussi Abigaille de Nabucco, Lisa de La dame de pique, Santuzza
dans Cavalleria Rusticana et Tosca. J’espère pouvoir un
jour ajouter à cette liste Lady Macbeth.
Qu'attendez-vous d'un metteur en scène ?
J'attends qu'il y ait une réelle collaboration et qu'il
comprenne les exigences vocales d’un rôle. C'est pour
moi essentiel.
Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur ?
J’ai quelques projets que j’attends avec impatience, mais
laissez-moi les garder secrets pour l'instant. Les chanteurs
et les acteurs sont très superstitieux vous savez...
Quel est votre souvenir le plus intense sur une scène
d'opéra ?
L'un de mes meilleurs souvenirs remonte à 2007, lors de
mes débuts au New York City Opera dans le rôle de Santuzza. Tout était réuni, un grand chef d’orchestre, des collègues merveilleux et une mise en scène intéressante. A l'issue
de l'une de mes grandes scènes, plus de deux mille spectateurs se sont mis à crier et à applaudir si fort que l’orchestre
ne pouvait commencer à jouer l’interlude qui suit. Cela a bien
duré cinq minutes ! Je me suis sentie durant quelques instants comme une star de rock, plus habituée à ce genre de
réaction. C’était aussi très important pour moi car à l'époque,
personne ne me connaissait. Si je suis capable de transmettre mes émotions à mon public, et que les spectateurs
parviennent à éprouver ce que je ressens, je me dis que je
fais correctement mon boulot. u
OPÉRAS
19
Chers Amis du Philharmonique,
C’est avec une grande joie que je me permets de vous inviter une fois de plus à nous accompagner
pour une nouvelle saison de rendez-vous musicaux -moments privilégiés de la vie qui nous permettent
de vivre plus intensément, d’être transportés vers d’autres horizons, de nourrir notre moi intime. « La
musique, battant comme un cœur momentané à la place de mon cœur », telle que la décrit Marcel
Proust, c’est l’expérience que nous voulons partager avec vous, et que seul peut générer le concert
vivant.
Au mois de septembre, une œuvre qui inaugura le romantisme français: La Symphonie fantastique
d’Hector Berlioz. En octobre, le Concerto pour orchestre de Lutoslawski. En novembre et décembre,
le cycle intégral des symphonies de Johannes Brahms. En janvier, la Cinquième symphonie de Dmitri
Chostakovitch. En février, la Cinquième symphonie de Prokofiev et la Symphonie n° 88 de Haydn. En
mars, la Cinquième symphonie d’Anton Bruckner, En avril, la Neuvième symphonie de Gustav Mahler.
En mai, la Quatrième symphonie de Schumann. En juin, un hommage à Pierre Boulez pour son
quatre-vingt-dixième anniversaire, avec son Livre pour cordes, mais aussi des œuvres dont sa vision
a marqué le siècle : les Quatre pièces pour orchestre de Béla Bartók et Jeux de Claude Debussy. Qui
dit mieux ?
Viennent s’ajouter à ces merveilleux chefs-d’œuvre qui permettront à la splendeur orchestrale de notre
Orchestre Philharmonique de se déployer dans une profusion de styles différents le talent de nombreux
solistes de renommée internationale :
Barbara Hendricks qui fera briller l’ouverture de notre saison avec son interprétation de la cantate
Herminie d’Hector Berlioz ; Nelson Freire dans le Deuxième concerto de Frédéric Chopin, Barry Douglas
dans le Concerto n° 25 de W. A. Mozart ; Krystian Zimerman dans le Premier concerto de Johannes
Brahms, dont la prestation légendaire depuis ses débuts avec Léonard Bernstein au Musikverein de
Vienne, il y a vingt-cinq ans. Michael Barenboim interprétera le Concerto pour violon d’Arnold Schoenberg, qu’il a récemment donné sous la direction de Pierre Boulez. Trois grands chefs, György Ráth,
Neeme Järvi et Jeffrey Tate se succèderont à la tête de notre magnifique phalange. Vous découvrirez
le jeune chef Michal Nesterowicz qui vient de brillamment débuter à la tête du Royal Philharmonic de
Londres.
Le tableau ne serait pas complet sans évoquer les « concerts en famille du dimanche matin », qui
- faut-il le rappeler ?- font fureur depuis maintenant trois ans en vous permettant de retrouver nos brillants solistes, les concerts éducatifs, les concerts de Noël qui réjouissent toutes celles et tous ceux qui
y participent que ce soit dans la salle ou sur la scène..., les concerts MANCA, les concerts « C’est pas
classique ». Un concert pas comme les autres : « Marcel Proust musicien », le dimanche 7 décembre
2014, avec la participation exceptionnelle du meilleur spécialiste de son œuvre, Jean-Yves Tadié, pour
découvrir différemment Wagner, Franck, Fauré, Debussy, avec en soliste le jeune et talentueux pianiste
niçois Jonathan Benichou.
Un nouveau venu, pour répondre au vœu émis par lui pour toujours plus de musique de qualité pour
toujours plus d’entre nous : le Concert du Maire, un concert exceptionnel à Acropolis déjà à noter sur
vos tablettes le samedi 2 mai 2015. La virtuosité orchestrale pour la joie du plus grand nombre, pour
un concert de fête !
La place manque, chères Amies, chers Amis du Philharmonique, pour vous dire quelle est notre joie
de vous retrouver à chaque nouvelle saison de concerts. Venez, revenez : pour vous qui nous découvrez
en lisant ces lignes, vous aurez raison de venir dès les grands concerts des 19 et 20 septembre !
Pour vous qui nous faites déjà l’amitié d’être des nôtres, soyez assurés de notre engagement total
pour vous emmener de nouveau découvrir, grâce à la musique, « l’essence derrière l’apparence ».
Bons concerts philharmoniques à toutes et à tous !
Philippe Auguin
Directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Nice
20 CONCERTS
CONCERTS DU PHILHARMONIQUE DE NICE
DIRECTEUR MUSICAL, PHILIPPE AUGUIN
CONCERT
13 SEPTEMBRE
VERDI, Requiem
soprano
Amber Wagner
REQUIEM
mezzo-soprano
Oksana Volkova
Par Gérard Dumontet
2 000 personnes sont venues
écouter le Requiem de verdi
au Théâtre de Verdure à Nice
ténor
Alexey Dolgov
basse
Richard Anderson
Chœur de l’Opéra
direction musicale
Philippe Auguin
les sources de son inspiration, allant jusqu’à dire qu’il
n’avait consulté aucun ouvrage à ce sujet. C’était un pieux
mensonge. Il avait « épluché » sans aucun remord les
requiem de Mozart, Cherubini et bien sûr de Berlioz.
Mais Verdi est avant tout un compositeur d’opéra ; il ne
pût s’empêcher de composer une œuvre dans laquelle les
analystes ne manqueront pas de remarquer des analogies
avec son opéra Don Carlos. Il reste fidèle à son style,
énergie dynamique, invention et générosité mélodique ; sa
technique musicale a évolué,
certes mais le requiem marque un aboutissement, un
sommet d’élégance et de
CONCERT PHILHARMONIQUE
raffinement. Verdi n’hésite pas
18 OCTOBRE CNRR DE NICE
à dire à son éditeur « cette
DVOŘÁK, BRUCH, LUTOSLAWSKI
messe ne doit pas être chanC’EST PAS CLASSIQUE
tée avec les mêmes phrasés,
ACROPOLIS
les mêmes accents qu’à
VEN 31 OCTOBRE
l’opéra mais il reste un comDIM 2 NOVEMBRE
positeur d’opéra malgré lui,
NE MANQUEZ PAS
© D. Jaussein
C’est le 22 mai 1873 que Giuseppe Verdi, alors au faite de
sa gloire, apprit la mort du grand écrivain Alessandro
Manzoni. Il en fut profondément bouleversé. Il faut dire
qu’il avait admiré en lui aussi bien l’artiste que le patriote.
Cette disparition le poussa à mettre en œuvre une idée qui
germait en lui depuis longtemps. Mais c’est en Italien aussi
bien qu’en patriote qu’il songe à une messe funèbre.
D’abord, à la mort de Rossini en 1868 à Paris, Verdi lance
le projet d’un hommage national et collectif. Un requiem
en treize mouvements offert par treize musiciens importants de la péninsule. Verdi se réserve le mot de la fin si
l’on peut dire ; un vaste « libéra me » domine, en souvenir
du Stabat mater de Rossini. Mais le projet de cette messe
ne verra jamais le jour et Verdi met sous le boisseau son
« libera me ».
C’est la disparition de cet autre grand artiste italien,
Manzoni, qui provoquera la composition du Requiem.
Manzoni était l’auteur de Promessi Sposi (Les fiancés) que
Verdi avait lu et relu lorsqu’il avait dix-huit ans. Verdi, aux
obsèques de l’écrivain, s’engage à écrire une messe de
requiem. Promesse qu’il tient l’année suivante.
Verdi n’était pas homme à se laisser impressionné par l’ampleur du projet, ni par les messes des requiem dormant
dans les bibliothèques de la musique occidentale. Il était
un peu « cachottier » ce Verdi et se gardait bien de citer
et certains, avec un peu
CONCERT À THÈME
d’ironie, n’ont pas hésité à
JAZZ ET SYMPHONIQUE
parler d’un opéra ecclésias15 NOVEMBRE OPÉRA
tique.
CONCERT PHILHARMONIQUE
L’œuvre fut créée en l’église
INTÉGRALE DES SYMPHONIES
San Marco de Venise le 22
DE BRAHMS
mai 1874. Cette création fut
PARTIE 1
une sorte d’opéra masqué,
21-22 NOVEMBRE OPÉRA
car sur une injonction épisFESTIVAL MANCA
copale, les choristes avaient
28 NOVEMBRE OPÉRA
dissimulé leurs visages sous
29 NOVEMBRE OPÉRA
un voile de deuil.
Profane ou sacrée, l’œuvre
est un chef-d’œuvre qui n’est
ni un ouvrage défroqué, ni un opéra déguisé, mais un
monument d’un humanisme grandiose et aussi paradoxal
que cela puisse paraître, son Requiem est une glorification
de vie. u
CONCERTS
21
BARBARA
“
Je suis quelqu’un
de curieux.
Je crois que
je suis née
comme cela...
© Mats Bäcker
”
CONCERT
HENDRICKS
INVITÉE PAR
LE PHILHARMONIQUE
DE NICE
19-20 SEPTEMBRE
BERLIOZ
soprano
Barbara Hendricks
direction musicale
Philippe Auguin
Par Christophe Gervot, le 15 juillet 2014
Christophe Gervot : Vous avez interprété Herminie au
cours d’un programme consacré à Hector Berlioz, les 19
et 20 septembre 2014, à l’Opéra Nice Côte d’Azur. Comment présenteriez-vous cette cantate ?
Barbara Hendricks : Je m’intéresse énormément à l’œuvre
vocale d’Hector Berlioz, et j’ai notamment chanté plusieurs
fois ses Nuits d’été au cours des vingt-cinq dernières
années. Il a tenté quatre fois le Prix de Rome mais ne l'a
gagné qu'une fois. J’aime explorer ses cantates qui n’ont
pas eu cette prestigieuse reconnaissance et ne sont pas
parvenues à toucher le jury. C'est comme si je leur donnais
une nouvelle chance. Il y a notamment eu Herminie en
1828 et La mort de Cléopatre en 1829. C’est finalement
pour Sardanapale que Berlioz a obtenu ce prix en 1830.
Le monologue de Herminie est un poème vocal avec airs
et récitatifs. Il y a trois ans, j’ai chanté Les Nuits d’été à
Nice sous la direction de Philippe Auguin. J’ai beaucoup
aimé ce travail avec lui et je lui ai proposé de revenir pour
Herminie. Après quarante années de carrière, j’aime toujours découvrir des répertoires nouveaux.
Vous avez toujours défendu la musique française. Vous
avez fait vos débuts à l’Opéra de Paris en 1982, en
incarnant Juliette de Roméo et Juliette de Gounod, dans
une mise en scène de Georges Lavaudant, et vous avez
notamment enregistré depuis des mélodies de Francis
Poulenc sous le titre Tel jour, telle nuit. Que représente
pour vous ce répertoire ?
C’est un répertoire essentiel sans lequel il y aurait un
manque énorme. Je m’efforce toujours de placer quelque
chose de français dans mes programmes et j’ai encore
chanté, en août dernier, des poèmes de Verlaine mis en
musique par Gabriel Fauré. C’est un univers qui m’enthousiasme, qui me touche et que j’ai envie de partager avec
le public. J’aime chanter cette langue, et c’est un luxe de
pouvoir interpréter ainsi cette poésie. C’est beau, ça
existe et ça va directement au cœur. J’ai eu la chance
d’avoir une vie poétique, alors que notre époque ne l’est
pas vraiment. Fauré me parle et j’essaie de transmettre
ce qu'il me dit, dans une véritable conversation. L’art nous
permet de vivre un peu mieux les uns avec les autres,
c’est essentiel.
Vous avez également proposé de nombreux concerts de
Lieder et on vous doit en particulier un enregistrement
de Winterreise de Franz Schubert. Quelles émotions
vous procurent ces formes intimes en récital ?
J’aime cette forme de récital avec piano. C’est un format
très direct entre nous et le public qui permet de chanter la
poésie. J’ai aussi interprété Die Schöne Müllerin. Ce sont
des poèmes d’hommes, mais c’est passionnant de se
mettre dans la peau d’un autre. Et puis, n’avons-nous pas
tous les mêmes émotions ? Les émotions n’ont pas de
sexe ! J’ai commencé à chanter des Lieder lorsque j’étais
étudiante, ce qui est une véritable chance. Si l’on aborde
ce répertoire après trop d’opéras, on est impressionné et
on se sent nu. Lors de mes débuts, les artistes avaient
encore le temps d’évoluer, et je suis toujours en évolution...
Vous avez abordé à l’Opéra de Nice le rôle de Tatiana
dans Eugène Onéguine de Tchaïkovski en 2000. Quel
souvenir gardez-vous de cette prise de rôle ?
C’est un souvenir à la fois formidable et effrayant. J’avais
souvent interprété auparavant des chansons russes,
accompagnée au piano, mais pas d’opéra. Au début, je
n'arrivais pas à trouver mes repères dans la partition et la
mise en scène m’impressionnait. De plus, la scène de la
lettre de Tatiana dure vingt minutes ! Mais j'avais aussi
envie de bien chanter le russe. Je garde malgré tout le
souvenir d'une période calme, et l’Opéra de Nice est un
lieu propice au travail.
CONCERTS
23
Vous avez exploré les répertoires les plus divers à l’opéra
(Cavalli, Mozart, Donizetti…), dans le monde entier et
sous la direction des plus grands chefs. Vous avez fait
vos débuts au Metropolitan Opéra de New York dans le
rôle de Sophie du Chevalier à la rose en 1986, rôle que
vous avez également enregistré. Quelles émotions particulières suscite en vous la musique de Richard Strauss ?
J’adore Richard Strauss et je viens de participer à un festival, à l’occasion des cent cinquante ans de sa naissance.
Il a écrit les Quatre derniers Lieder l’année de ma naissance, et composé deux d’entre eux à Montreux où j’ai
habité pendant vingt-cinq ans. J’ai l’impression qu’il les a
écrits pour moi ! J’ai un lien extraordinaire avec sa musique
en tous cas, et j’ai eu tout de suite envie de la chanter en
la découvrant. C’est un régal. Sophie du Chevalier à la rose
est un beau personnage. C’est une fille qui décide et ne
veut pas se marier avec celui que son père a choisi. Elle
refuse ce bouffon et choisit l'amour, c’est un caractère
déterminé. Ce n’est pas seulement une belle musique.
Vous êtes aussi une grande interprète de jazz. Quel
plaisir vous apporte cette forme musicale et en quoi
prolonge-t-elle votre exploration du chant ?
Le blues, ce sont mes racines. J’ai commencé à chanter
cette musique des esclaves dans l’église de mon père.
Toutefois, pendant longtemps, j’ai aimé le jazz de loin. J’ai
été contactée il y a une vingtaine d’années pour un concert
© Mattias Edwall
Vous vous montrez extrêmement curieuse dans vos
choix et vous interprétez aussi le répertoire contemporain, notamment Angels in America de Peter Eötvös,
d’après la pièce de Tony Kushner, au Châtelet en 2004.
Quelles traces ce spectacle vous a-t-il laissées ?
Peter Eötvös a travaillé avec nous en composant, et il
créait pour chaque voix et chaque intonation. De plus,
c’est un compositeur qui peut chanter toutes les notes de
sa partition. Le travail avec l’orchestre a été fascinant. La
musique de l’ange que j’interprétais est magnifique. Tony
Kushner, qui était très content du résultat, a eu ensuite
envie de m’avoir partout pour les reprises de sa pièce. Je
lui ai cependant expliqué que c’est la musique qui était
fantastique, avant tout. Ce qui était très fort, c’est que je
devais voler pendant tout le spectacle, ce qui m’angoissait
énormément. Je ne l’avais même pas dit à mes enfants.
La musique m’a aidée à oublier ça, et c’est une expérience
que j’ai beaucoup aimée.
24 CONCERTS
en hommage à Duke Ellington à Montreux. J’ai adoré cette
expérience et depuis, j’aime beaucoup interpréter ce
répertoire. C’est une musique de chambre. Le 13 août
dernier encore, j’ai chanté du blues à Lorgues, pas très
loin de Nice.
Votre carrière passe aussi par le cinéma. Vous étiez Mimi
de La bohème, dans le film de Luigi Comencini en 1987
et avez été membre du jury du Festival de Cannes en
1999. En quoi le septième art est-il un complément
nécessaire à votre itinéraire artistique ?
Le travail d’actrice et de comédienne me correspond bien
et coïncide avec ma façon d’évoluer sur scène. Je laisse
le personnage sortir de moi et mon approche est plus
cinématographique qu'opératique. Cette expérience au
cinéma m’a beaucoup enrichie. J’ai également participé
à un film en Suède, d’après The rake’s progress de
Stravinsky, en 1994, sous la direction musicale de EsaPekka Salonen. C’est un travail qui vient de l’intérieur,
comme pour un récital. Le cinéma m’a permis de faire plus
en profondeur ce que je faisais naturellement. Chaque
expérience me nourrit.
Votre engagement humanitaire est très important, et
vous avez notamment offert deux concerts pour la paix,
en 1991 à Dubrovnik et en 1993 à Sarajevo, en pleine
ex-Yougoslavie en guerre. Vous avez créé en 1998 la
fondation Barbara Hendricks pour la paix et la réconciliation. En quoi ces combats reconnus au niveau planétaire,
sont-ils une nécessité dans votre mission d’artiste ?
En tant qu’artiste, je me mets à la place de la souffrance
de l’autre lorsque je joue un personnage, mais je suis aussi
une citoyenne. Je fais juste mon devoir en défendant les
droits de l'homme. C’est aussi un chemin vers l’harmonie.
J’ai fait un concert à La Haye juste avant de venir à Nice
pour la défense des apatrides. La lutte pour l’égalité des
droits civiques aux Etats-Unis m’a montré l’importance du
respect humain. Je ne suis pas toujours tolérante, mais je
suis consciente de mon intolérance et j’essaie de la corriger, pour agir différemment. Je n’ai pas besoin de tuer la
culture de l’autre pour exister.
Quels sont les projets qui vous tiennent à cœur ?
C’est mon jardin, mon potager, mon petit-fils qui a deux
ans… et continuer à faire de la belle musique que j’aime,
aussi longtemps que je pourrai.
Quel est votre souvenir le plus fort dans votre impressionnante carrière ?
J’ai eu une carrière très riche mais je garde un souvenir
particulièrement fort des répétitions du concert de Sarajevo en 1993. Au début, les musiciens étaient maigres et
fatigués par la guerre. Peu à peu, je les ai vus se transformer sous l'effet de la musique. Leur jeu est devenu un
acte de résistance contre un conflit ridicule et pas nécessaire. u
>
REPÈRES BIOGRAPHIQUES
Citoyenne suèdoise née aux Etats-Unis, dans
l’Arkansas, Barbara Hendricks a obtenu sa licence de
musique à la Juilliard School of Music, élève de la
mezzo-soprano Jennie Tourel. Auparavant, à l’âge de
vingt ans, elle avait obtenu sa licence de mathématiques et chimie à l’Université du Nebraska.
En 1974, Barbara Hendricks fait ses débuts sur scène
aux Etats-Unis et en Europe pour ensuite se produire
sur toutes les scènes les plus importantes à travers le
monde, sous la direction des plus grands chefs comme
Herbert von Karajan, Leonard Bernstein et Carlo Maria
Giulini. Elle est parmi les artistes la plus aimée et respectée dans le monde.
Elle est considérée comme l’une des plus éminentes
et actives concertistes de sa génération ; elle est
accompagnée en récital, en musique de chambre
comme lors d’enregistrements par les plus grands
pianistes de notre temps. En 1994, elle a fait ses
débuts au Festival de Jazz de Montreux, et depuis
participe régulièrement à des festivals de jazz de
renommée internationale.
Barbara Hendricks a vendu plus que 14 millions de
disques, avec près de cent titres à son actif enregistrés
chez Sony, Decca, Deutsche Grammophon et EMI.
Depuis 2006, elle enregistre exclusivement pour son
propre label, Arte Verum. www.arteverum.com
Activiste des Droits Humains, elle a travaillé pour le
Haut Commissariat des Nations-Unies pour les refugiés
(UNHCR) comme Ambassadeur de Bonne Volonté
depuis 1987. Fin 1991 et 1993, elle donne, dans l’exYougoslavie alors dévastée par la guerre, deux concerts
de solidarité à Dubrovnik et Sarajevo. En 1998, elle
crée la Fondation Barbara Hendricks pour la Paix et la
Réconciliation afin de personnaliser sa lutte pour la
prévention des conflits dans le monde et de faciliter la
réconciliation et encourager la paix. En 2007, le HCR
la nomme leur seule Ambassadeur à Vie.
www.barbarahendricks.com
>
AUTOBIOGRAPHIE
Barbara Hendricks a publié
en novembre 2010
son autobiographie
Ma Voie - Mémoires
aux éditions Les Arènes.
CONCERTS
25
CONCERTS
21-22 NOVEMBRE
5-6 DÉCEMBRE
BRAHMS
direction musicale
Philippe Auguin
BRAHMS
OU L’ART
DU PARADOXE
CONCERT À THÈME
15 NOVEMBRE
BOLLING,
ELLINGTON...
sur une idée originale
de Claude Vié
direction musicale
Olivier Tardy
Par Gérard Dumontet
Le Philharmonique
de Nice donne
l’intégrale des
symphonies de Brahms
Johannes Brahms (1833-1897) pratiqua une sorte de retour vers le futur. Il est le
premier grand musicien dont la portée historique et la personnalité artistique ne
coïncide pas vraiment. En fait, ce n’est pas un musicien néoclassique, mais plutôt
un musicien qui introduit des nouveautés dans l’ordre classique. Il soumet son
attirance pour le non-dit, le mystérieux ou même l’égarement, aux lois de l’architecture. Dans ses symphonies écrites entre 1876 et 1884, il déplace souvent vers
l’exposition, la recomposition ou la coda, le centre de gravité qui, chez Beethoven,
culmine dans le développement. Il aime aussi, et cela fait souffrir les amateurs d’un
classicisme pur, les rythmes tertiaires et binaires juxtaposés. Cette liberté polyrythmique et polyphonique auront un effet libérateur, donneront une émancipation à
certains des meilleurs compositeurs du XXe siècle, comme Ives, Tippett, Schoenberg, Berg, Webern, Messiaen ou même Carter. Mais le compositeur en lequel
Maurice Ravel lui-même admirait un magicien de l’orchestre, était un grand connaisseur de la musique dite ancienne. L’art des grands polyphonistes de la Renaissance, Schütz, Bach, Couperin constituait une part importante de sa vie de
musicien. Il fut même, et cela est étonnant, le seul compositeur de son époque à
vouer une véritable admiration, un culte, à Joseph Haydn (1732-1809).
On lui opposa Berlioz, Liszt, Wagner, ensuite Bruckner, Mahler. Mais il ne cherchait
pas non plus à sacrifier à la mode du poème symphonique, du drame lyrique ou
même de la musique à programme. Au-delà des apparences, il est l’héritier de
Schubert autant que de Beethoven. Bien que Schoenberg n’ait pas hésité à appeler dans une conférence, Brahms « le progressiste », toutes ces comparaisons,
toutes ces analyses sont certes passionnantes, puisqu’elles permettent d’approcher d’un peu plus près l’art de ce grand musicien, mais il est des éléments peut
être plus importants qui fondent la grandeur et la pérennité de son œuvre, la spontanéité, le lyrisme, l’humanisme aussi qui imprègne chacune de ses compositions
et qui, aujourd’hui encore, envoûte et charme l’auditeur.
Nous l’avons dit, les Quatre symphonies ont été écrites en 1776 et 1884. Ce n’est
donc qu’à partir de quarante-trois ans que Brahms s’attaque vraiment à la composition orchestrale. En l’espace de quatorze ans à peine, il passe des Variations
sur un thème de Haydn au Double concerto pour violoncelle, violon et orchestre.
Dans le domaine orchestral, tout est dit ; lui qui s’était révélé un maître absolu
dans ce domaine n’écrira plus pour l’orchestre. u
26 CONCERTS
Jazz
et symphonique :
une histoire d’amour.
C'est un véritable
hommage
aux plus fameux
jazzmen
de l'ère du swing
tels que
Duke Ellington,
Benny Goodman,
Glenn Miller
mais aussi
Ella Fitzgerald
et Frank Sinatra.
L'autre grande
surprise
de ce spectacle
est la participation
du comédien
Clément Althaus
dans une mise
en espace de
Joël le Poitvin,
des artistes
aux talents multiples.
PROUST
MUSICIEN
L’ESSENCE DERRIÈRE
L’APPARENCE
CONCERT À THÈME
7 DÉCEMBRE
FAURÉ, FRANCK, WAGNER
DEBUSSY / R. KOERING
piano
Jonathan Benichou
direction musicale
Philippe Auguin
avec la participation de
Jean-Yves Tadié
Par Jean-Marc Quaranta
Pendant longtemps professeur à la Sorbonne et à Cambridge, Jean-Yves Tadié a dirigé l’édition de A la recherche
du temps perdu dans la Bibliothèque de la Pléiade, aux
éditions Gallimard, où il est également directeur de collections. Il a publié la dernière grande biographie de l’écrivain.
Dans Le Goût de la musique, Ariane Charton rappelle
que Baudelaire dit qu’il « ne sait pas la musique », bien
qu’il ait reconnu celle de Wagner « comme tout homme
reconnaît les choses qu’il est destiné à aimer ».
Jean-Marc Quaranta : Ce « Marcel Proust musicien »
dont vous allez nous parler avait-il un savoir musical ?
Jean-Yves Tadié : Proust avait un savoir technique plus
étendu sans doute que celui de Baudelaire. Il avait étudié
le piano et savait lire une partition, il consultait celles de
Wagner. Pourtant le vocabulaire qu’il utilisait n’était jamais
technique, ce qu’il considérait comme inadapté au caractère littéraire de son œuvre. Il l’employait parfois, avec humour, pour évoquer les cris de Paris qu’il rapprochait de la
musique médiévale et de celle de Moussorgski. Sa
connaissance technique faisait que son vocabulaire musical ne paraissait jamais inadapté, dérisoire ou vague. Il parvenait à rendre l’audition de la musique par les sentiments,
les images, la création d’une chaîne visuelle. On peut
écouter la musique en y projetant ses sentiments amoureux, comme Swann avec la Sonate de Vinteuil, mais
Proust considérait la musique comme un langage pur, détaché de toute anecdote personnelle.
En quoi ce concert est-il un concert « Marcel Proust » ?
Il s’agit de quatre compositeurs pour lesquels Proust avait
la plus grande passion. On ne pouvait pas trouver mieux,
à part peut-être Saint-Saëns dont la Première sonate pour
violon et piano a inspiré celle de Vinteuil. Mais Proust s’en
est détaché, comme d’une période sa de vie, celle de sa
grande passion avec Reynaldo Hahn. On observe la même
chose avec Anatole France. Chez ces deux artistes, même
s’ils avaient toutes les qualités du monde, Proust ne
trouvait pas un langage véritablement nouveau.
Il y a un admirable syncrétisme très habile chez Saint-Saëns,
mais on peut comprendre qu’il ne figure pas dans ce
programme qui, comme l’ensemble de la programmation
de l’Opéra de Nice, donne envie d’habiter cette ville !
De vos recherches sur Proust, quel souvenir reste particulièrement émouvant ?
Sans doute la première lecture des autographes de
Proust ! Des lettres, tout d’abord, au début des années
1960, puis les soixante-deux cahiers de brouillons1 que j’ai
lus à la suite, sans y comprendre grand-chose, il faut bien
le dire, car le classement ne correspondait ni à l’ordre de
rédaction, ni à celui de l’œuvre publiée. L’émotion fait naître
le désir du travail scientifique, la vocation l’appelle, mais
ensuite, il faut en faire abstraction. Lorsque j’ai écrit Proust
et le roman, j’ai fait taire la sentimentalité et le bavardage,
pour faire place au lecteur. Le chercheur, comme le chef
d’orchestre, ne doit pas être bouleversé par l’émotion : l’un
ne peut pas avoir de tremblement dans la plume, l’autre
doit se fier à la rigueur de la partition. La lecture d’un extrait
du Temps retrouvé par mon professeur de philosophie,
quand j’avais 16 ans, m’a donné envie de lire toute l’œuvre,
ce que j’ai fait sitôt rentré chez mes parents. Je retrouve
ce sentiment d’extraordinaire beauté quand je relis telle
phrase, stupéfiante par sa longueur et son sujet, du début
de Sodome et Gomorrhe, une phrase de plus d’une page,
authentiquement musicale.
Votre plus grand moment d’émotion musicale ?
On les trouverait par centaines ! Je me souviens avoir
entendu dans mon adolescence, à la radio, Le Sacre du
printemps qu’on n’entendait peu alors. Vers la même
époque, j’ai écouté l’intégralité de la retransmission du
Festival de Bayreuth. Je ne connaissais pas l’allemand, je
n’avais ni programme ni livret. Il y eut aussi la découverte
de Pelléas et Mélisande. Il en existait peu d’enregistrements et j’avais peu d’argent pour m’acheter des disques.
L’audition de cet opéra, précédée de toutes ces voix littéraires qui en ont parlé, m’a bouleversé. Il est resté un objet
d’admiration totale, comme les trois dernières sonates de
Beethoven découvertes à la même époque. u
1 > Consultables à partir de cette adresse : http://www.item.ens.fr/index.php?id=578147
CONCERTS
27
SIX TITRES LYRIQUES
& SIX DÉFIS...
A première vue, la saison lyrique 2014-2015 met les artistes du Chœur de l’Opéra Nice Côte
d’Azur à l’honneur. Giulio Magnanini, directeur du Chœur nous en dit plus en quelques mots.
Tout d’abord je me réjouis de constater qu’une fois de
plus le Chœur de l’Opéra de Nice sera mis à l’honneur
durant toute la saison lyrique. Effectivement, la saison
2014-2015 demandera beaucoup aux artistes du chœur,
car dans la plupart des ouvrages, il sera le protagoniste
principal. Je ne cesserai jamais d’exprimer la chance que
j’ai d’être à la tête d’un groupe d’artistes si généreux, toujours prêts à répondre avec enthousiasme aux nouveaux
défis artistiques proposés. Dès la rentrée, cette formation
sera sollicitée par un des ouvrages les plus pétillants, amusant et reconnu du public d’opérettes : La Veuve joyeuse,
lors de la XIIIe édition du Festival d’opérette de la Ville de
Nice qui, peu à peu, devient un rendez-vous très attendu
par les passionnées du genre.
Après un très grand succès
du Chœur de l’Opéra de Nice
aux Chorégies d’Orange lors
LES MARDIS
des productions de cet été
MUSICHŒUR
(Nabucco et Otello), nous
14 OCTOBRE
retrouverons le grand Verdi
9 DÉCEMBRE
pour une œuvre magistrale : le
24 FÉVRIER
Requiem. Sous de nombreux
21 AVRIL
aspects, cet ouvrage ressemLES MARDIS
ble à un opéra avec ses conDU CALM
trastes, sa musique fortement
25 NOVEMBRE
expressive et sa percutante
13 JANVIER
partie chorale.
17 MARS
Après cette « parenthèse »
14 AVRIL
symphonique, nous ouvrirons
LES MARDIS
la saison avec une version des
BAROQUES
Vêpres siciliennes toujours de
10 FÉVRIER
Giuseppe Verdi, en version de
19 MAI
concert. Ce grand opéra qui
nécessite une grande masse
chorale vous fera découvrir la
version française de ce magnifique ouvrage. Comme dans
la plus pure tradition de Giuseppe Verdi, à l’histoire collective (celle d’une révolte populaire de l'île de Sicile contre
la domination féodale du roi français Charles d'Anjou),
vient se greffer un dilemne personnel : choisir entre devoir
et amour. Un Sicilien, Henry, tombe amoureux de la
duchesse française Hélène. Le patriotisme de ce jeune
homme est contrarié car il apprend qu’il est le fils de Monfort, le gouverneur de l’ile.
NE MANQUEZ PAS
28 CONCERTS
Nous continuerons avec un classique incontournable pour
notre public niçois : Turandot. Nous ferons de nouveau
appel aux renforts des supplémentaires pour rendre à la
partition de Puccini toute la puissance mais aussi la violence de ses pages. Par le souffle sans précédent de
l’écriture chorale, Turandot demeure aujourd’hui le plus
important parmi les opéras de Giacomo Puccini.
Une première dans notre théâtre : Peter Grimes de Benjamin Britten trouvera sa place en début d’année 2015. Un
grand orchestre, de grands chœurs, tout y est pour
marquer la renaissance de l’opéra anglais.
Pour notre plus grand plaisir, un petit voyage en cours de
saison pour notre équipe afin de nous rendre, en collaboration avec nos camarades monégasques, à une représentation en version de concert, de Guillaume Tell au
prestigieux Théâtre des Champs-Elysées.
Pendant les festivités du Carnaval, Così fan tutte sera à
l’affiche. Les mozartiens raffolent de cet opéra bouffe en
deux actes où le chœur sera moins présent et laissera
place à cette merveilleuse musique qui est le troisième et
dernier volet de la collaboration Mozart/Da Ponte.
Un classique à redécouvrir, Semiramide de Rossini :
l’histoire de la reine meurtrière de Babylone est racontée
par des airs et des chœurs somptueux. Les artistes du
Chœur seront mages, soldats, princesses, babyloniens…
Du point de vue technique, la vocalité rossinienne est un
chapitre à part. La virtuosité de l'ornementation jusqu’à
l’exubérance est toujours au service du texte dramatique.
Pour clore cette saison riche et intense, La Juive d’Halévy.
Une vraie démonstration chorale pour cet opéra qui ne manquera pas de surprendre notre public. Produit typiquement
français, le grand opéra dont La Juive offre un modèle parfait, est un titre à redécouvrir car il marque plus qu’un autre
le triomphe du chant français grâce à un orchestre puissant,
un sujet émouvant mais surtout des chœurs importants.
En parallèle de cette saison bien chargée, les artistes du
Chœur et moi-même renouvelons le succès des Mardis
Musichoeurs. Forts et motivés par le grand succès que ce
cycle de concerts a obtenu la saison passée lors de sa
première édition au Foyer Montserrat Caballé, nous
revenons avec quatre nouveaux programmes…
Festino nella sera del giovedì grasso d’Andrea Banchieri et
une série de chansons françaises pour vous donner un
avant-goût ! u
CALENDRIER
CONCERT
EN FAMILLE
MUSIQUE
DE CHAMBRE
LES DIMANCHES MATINS À 11H
À L’OPÉRA
LES LUNDIS
« Johannes Brahms : amoureux pour la vie »
DIM 28 SEPTEMBRE
BRAHMS
À L’OPÉRA À 12H15
LUN 20 OCTOBRE
RAVEL, CHAUSSON
LUN 22 DÉCEMBRE
« Un dimanche matin avec les élèves du CNRR
et les membres de l’Orchestre Philharmonique
de Nice »
DIM 23 NOVEMBRE
SCHUBERT, MOZART, MENDELSSOHN
SCHUBERT, MOZART, DVORAK
« Professeur Lobinstein, le retour »
DIM 30 NOVEMBRE
WAECHTER
« Du jazz au tzigane »
« Autour des Quatre saisons de Vivaldi »
DIM 14 DÉCEMBRE 11H & 15H
NOËL À L’OPÉRA
AU THÉÂTRE DE LA PHOTOGRAPHIE
ET DE L’IMAGE
À 12H30
LUN 10 NOVEMBRE
SCHNYDER, RAVEL, PATRIX, DARMON
AU CNRR DE NICE À 18H30
LUN 6 OCTOBRE
JOLIVET, DEBUSSY, RAVEL, CHOSTAKOVITCH
LUN 24 NOVEMBRE
HAYDN, PROKOFIEV
AU MUSÉE CHAGALL À 20H
LUN 27 OCTOBRE
MOZART, BRODMANN, BRAHMS
LUN 8 DÉCEMBRE
CHOSTAKOVITCH
Robert Waechter,
violon solo de
l'Orchestre
Philharmonique
de Nice vient
d'enregistrer
les 3 Sonates
pour violon seul.
Le CD est
disponible
chez Amazon.fr.
Le Ballet Nice Méditerranée a désormais
BALLETS
acquis la réputation d’une compagnie à
même de proposer une diversité chorégraphique de haut niveau, aussi enthousiasmante pour le public que précieuse pour
ses danseurs en quête d’excellence. En
effet, si les spectateurs ont aujourd’hui la
réelle possibilité de découvrir un large choix
de ballets, les artistes ont, quant à eux, le
BALLET NI
MÉDITERR
privilège d’enrichir leur jeu d’interprète au
contact des œuvres des plus grands chorégraphes.
La saison 2014-2015 présente ainsi des
pièces ambitieuses aux multiples saveurs.
Une note cependant ressort de cette
programmation que nous sommes heureux
de vous dévoiler : une fraicheur vivifiante
due à la vigueur, à l’énergie et, reconnaissons le, à l’humour de certains ballets
proposés. Cet éventail a été élaboré à partir
de pépites du répertoire qui font revivre sur
scène la pureté et l’élégance de Balanchine,
le Broadway toujours en embuscade de
Jerome Robbins, le romantisme exquis de
Bournonville, les délicieux soirs de fête de
Léo Staats ou encore les jeux virils de
Robert North… Le talent qui grandit chaque
année au sein du Ballet Nice Méditerranée
m’emplit de fierté et de reconnaissance
envers ceux qui en sont les acteurs et je
vous invite à présent à rejoindre ses danseurs
pour vivre à leurs côtés de formidables
émotions chorégraphiques… à la fois captivantes, raffinées et inattendues.
Éric Vu-An
Directeur artistique du Ballet Nice Méditerranée
Quel plaisir pour
le Ballet Nice
Méditerranée
de débuter
cette saison
chorégraphique
par un programme
aussi prestigieux
et enthousiasmant
Eric Vu-An
Photos danse D. Jaussein
30 BALLETS
OCTOBRE
CE
ANÉE
DIRECTION ARTISTIQUE, ERIC VU-AN
VEN 17 20H
SAM 18 20H
DIM 19 15H
JEU 23 20H
VEN 24 20H
SAM 25 20H
CLASSES OUVERTES
MAR 14 12H
MAR 21 12H
MASTERCLASS
MER 22 10H
BALLETS
31
CRÉATION MONDIALE DE DWIGHT RHODEN
VERSE US
Chorégraphie Dwight Rhoden
Musique Nils Frahm
Philip Glass, Sven Helbig, Kristjan Järvi
Wolfgang Amadeus Mozart, Claude Debussy
Costumes Christine Darch
Lumières Michael Korsch
Figurant parmi les chorégraphes les plus
courtisés, Dwight Rhoden a enrichi
le répertoire du Ballet Nice Méditerranée
d’une pièce puissante et particulièrement
exigeante qui permet aux danseurs
d’exprimer toute l’étendue de leurs talents.
Pour ceux qui connaissent le travail
de Dwight Rhoden, la pièce Verse us
constitue un moment de danse d’une
intensité et d’une diversité remarquable. Eric Vu-An
Verse us que Dwight Rhoden a créé pour le Ballet Nice
Méditerranée reflète particulièrement bien ce savoir-faire.
Richesse et diversité sont une fois de plus au rendez-vous
dans cette pièce qui met en avant l’état pulsionnel du
corps. Cette création, qui vise parfois la déconstruction,
reflète nos multiples facettes et célèbre le chaos qui nous
définit. Dès lors, la danse saute d’une émotion à l’autre.
La dynamique du corps en mouvement interagit avec
l’éclectisme assumé de la musique et suit les nombreux
changements de partitions comme autant d’états affectifs
qui nous traversent. Verse us rappelle alors Cunningham
tant le lien entre la musique et la danse apparaît ici volontairement distendu. La danse s’autonomise et Dwight
Rhoden nous offre une chorégraphie nerveuse et précise
qui tient le spectateur en état d’alerte grâce aux nombreux
changements qu’elle impose aux danseurs. Ces derniers
entrent par vagues successives tandis que solos et pas de
deux s’intercalent comme des trouées lumineuses. Actions
et émotions font écho à la diversité rythmique, aux différentes couleurs et textures sonores pour évoquer cet organe
imprévisible et instable qu’est le cœur. Propulsés dans
cette réflexion, les danseurs donnent vie à une chorégraphie changeante et évolutive. S’ils apparaissent d’abord
en duos, c’est pour mieux éclore, s’étoffer en groupes et
donner naissance à des mouvements d’ensemble d’une
autre densité. Parfois le groupe se désagrège. Certains
danseurs quittent la scène et nous voici à nouveau plongés
dans l’intimité d’un pas de deux.
Mais déjà, une autre silhouette apparaît et déplace le
centre de gravité de la chorégraphie ; nouveau clin d’œil à
Cunningham qui a su briser la perspective à l’italienne de
la scène en disséminant l’action. Dwight Rhoden s’en inspire et maîtrise à l’évidence l’art de la transition. Rien n’est
brusque dans ces changements d’état. Les corps dessinent des courbes sensuelles, s’enroulent dans des plis harmonieux et décrivent une cinétique envoûtante.
Si Verse us, fait preuve de sensualité, c’est aussi une
démonstration éblouissante de précision et de rigueur
implacable exigeant de la part du danseur une physicalité
importante. Le ballet confirme ce que disent souvent les
interprètes à propos du chorégraphe : pour parvenir au
bout de ses pièces, le dépassement de soi est inévitable.
Après avoir longuement observé les danseurs avec qui il
s’apprête à créer, il s’en inspire, les magnifie et les sollicite
au-delà de toutes limites pour en tirer le maximum. Les chorégraphies de Dwight Rhoden sont donc souvent douloureuses, intenses et pleines de difficultés. Mais c’est toujours
pour les danseurs, qui ont l’occasion de travailler avec lui,
la certitude d’atteindre une forme d’intensité chorégraphique qui les fait se sentir au sommet de leur art. u
DWIGHT RHODEN chorégraphe
Rhoden est considéré par le New York Times comme
« l’un des meilleurs chorégraphes contemporains ».
Originaire de Dayton (Ohio), il a commencé la danse
à dix-sept ans et s’est produit dans des compagnies
américaines de renom. En 1994, il fonde, avec le danseur
mythique Desmond Richardson, la compagnie de danse
contemporaine Complexions, considérée comme
une « compagnie de danse multiculturelle originale
américaine », soucieuse de promouvoir l’innovation
par le biais d’un programme courageux et audacieux.
Pendant plus de dix-huit ans, les œuvres de Rhoden,
que ce soit pour sa compagnie ou pour d’autres
compagnies de renom, ont rempli quelques-uns
des théâtres parmi les plus prestigieux à travers le globe.
Notoirement connu comme un « chorégraphe de danseur »,
Rhoden a travaillé, coaché et créé pour quelques-uns
des artistes les plus divers dans le monde du ballet
et de la danse contemporaine. Attitré du Théâtre de danse
de la Caroline du Nord, il a également été artiste
en résidence dans des universités à travers les Etats-Unis.
Dwight Rhoden a reçu divers prix et distinctions incluant
la Fondation de New York comme récompense artistique,
le prix Choo San Goh pour la chorégraphie ainsi que
le prix Apex de l’Ecole Alvin Ailey – en guise de reconnaissance pour son immense participation dans le domaine
de la danse.
« Les deux œuvres
de Nacho Duato sont,
comme toujours chez
ce grand explorateur de cultures,
la garantie d’un dépaysement
de toute beauté.
Ces deux chorégraphies
sont aussi l’occasion
de rendre hommage à Tony Fabre
qui avait remonté ces ballets
NACHO DUATO
POR VOS
MUERO
Chorégraphie Nacho Duato
Musiques espagnoles des XVe et XVIe siècles
Lumières Nicolás Fischtel
Textes de Garcilaso de la Vega
[durée 25 mn]
pour la compagnie. » Eric Vu-An
En choisissant de s’enraciner dans l’Espagne du XVe siècle, Por
vos muero de Nacho Duato célèbre un âge d’or au cours duquel
la musique a accompagné l’expression d’une multitude de formes
de danses. Si la chorégraphie ne possède pas d’argument à
proprement parler, sinon le poème magnifique de Garcilaso De
La Vega qui s’égraine sporadiquement, elle
clame la joie sincère du corps en mouvement. A
la fois lumineuse et poignante, Por vos muero possède
une profondeur qui n’a d’égal que sa légèreté. Nacho
Duato ancre sa chorégraphie dans un entre-deux qui exprime
à la fois le bonheur d’exister et la résignation face aux derniers
instants. De la joie d’abord. Cette œuvre en déborde. Elle est
fiévreuse, espiègle. On s’agite, on se taquine. Pieds de nez et
claquements de main nous rappellent une Europe et une Espagne Baroque qui savaient se divertir.
Si Por vos muero nous donne à voir une danse festive et enjouée,
son titre évoque des sentiments plus douloureux et plus solennels. Nacho Duato se fait ici l’écho d’une tradition où le macabre
et la douleur ont eux aussi droit à la danse. La chorégraphie se
fait grave et spirituelle. La nervosité cède la place à une élévation
aux accents poignants et nous plonge dans une contemplation
apaisante. Pourtant, la danse ne renonce pas à sa sensualité. Au
contraire, celle-ci irradie chaque pas et chaque déplacement. [...]
Nacho Duato s’illustre par sa faculté à adoucir toute forme de
rugosité et tenir à l’écart la violence et ses effets faciles. Por vos
muero, qui en en est l’illustration parfaite, exige on s’en doute de
grandes capacités techniques et d’interprétation. Savoir retenir le
mouvement, se maintenir dans cette alliance fragile entre l’énergie
et l’épuisement, entre l’impulsivité et l’apaisement, entre l’échappée et la résignation. Les danseurs sont mis au cœur d’une danse
organique qui abolit le passé et l’avenir et nous offre un mariage
rare entre l’amour et la mort. u
A GAUCHE :
VERONICA COLOMBO DANS POR VOS MUERO
NACHO DUATO
NACHO DUATO chorégraphe
Né à Valence (Espagne) en 1957,
GNAWA
Nacho Duato commence la danse
Chorégraphie Nacho Duato
Musiques Hassan Hakmoun, Adam Rudolph
Juan Alberto Arteche, Javier Paxariño
Abou Khalil, Velez, Kusur, Sarkissian
Lumières Nicolás Fischtel
à New York auprès
[durée 22 mn]
le Nederlands Dans Theater.
à Londres, avant de rejoindre
Maurice Béjart à Bruxelles.
Il complète sa formation
de l’Alvin Ailey American
Dance Center. En 1980,
il est engagé au Ballet Cullberg
de Stockholm puis rejoint
Sa première chorégraphie,
Jardi Tancat, remporte le prix
Un plateau où règne une obscurité prometteuse, des bougies qui tremblent audevant de la scène et une musique dont les rythmes évoquent les rivages ensablés
de la Méditerranée. Il est des chorégraphies dont on sait dès les premiers instants
qu’un beau voyage commence. Gnawa est de celles-ci incontestablement.
Peu de gens connaissent les confréries gnaouas d’Afrique du Nord et encore
moins les mâallems, leurs maîtres musiciens autour desquels s’organisent la pratique de la transe. En revanche, nous savons tous, et ce quels que soient nos
goûts, ce que signifie être possédé par la musique. Qu’il s’agisse de l’extase que
procure l’écoute d’une symphonie, d’un accord rageur qui électrise nos sens, ou
encore du martèlement engourdissant d’un sample, musique et transe forment
un lien universellement reconnu et partagé. […] Avec Gnawa, voguant entre Espagne et Maghreb, le chorégraphe élargit notre perception des choses. L’exercice
est plus périlleux qu’on ne le croit car brasser dans un même souffle différentes
influences, c’est toujours prendre un risque. Là où certains tombent dans le piège,
Nacho Duato évite magistralement l’écueil. La réussite de Gnawa, est précisément
de ne pas donner l’impression qu’il y a une juxtaposition plus ou moins habile de
deux cultures. L’enchevêtrement est tel qu’à l’issue du spectacle nous comprenons que nous n’avons pas été vers l’Autre. Nous avons été l’Autre. Le grand
talent du chorégraphe est de savoir donner au folklore un sens élevé. Le folklore
n’est pas utilisé dans cette pièce comme un soin apaisant à nos humeurs maussades, parce qu’« ailleurs » et « avant » valaient mieux qu’« ici » et « maintenant ». Il
devient ici notre réalité affective. Il nous décille sur notre propre identité et révèle
en nous le multiple, l’altérité que le temps et notre curiosité déclinante ont arasée.
Pour provoquer cette prise de conscience, cette désorientation, Nacho Duato
conçoit sa danse comme un dialogue murmuré entre les corps. Les mouvements
d’ensemble sont exceptionnels. Ici, le groupe n’a pas pour fonction de grossir en
nombre le même mouvement à la manière d’un régiment. La ligne des danseurs
se brise et tandis que l’un d’entre eux initie le mouvement, les autres le reprennent
à la manière d’un canon, l’étirent, le répètent et le rendent sinueux comme le
mouvement d’un serpent. Puis les corps se croisent, s’aimantent, s’évitent, se
rejoignent à nouveau, s’amassent et se redéployent dans l’instant suivant. La
transe vient de là, de ce va-et-vient permanent qui donne à la chorégraphie son
souffle, sa nage, ses ondulations qui nous envoûtent et nous excitent également.
Car la transe n’est pas l’hypnose. Nos yeux sont écarquillés, ils ne sont pas mi-clos.
Cette chorégraphie sensuelle, Nacho Duato a su également la rendre nerveuse à
souhait. Les danseurs pirouettent, fauchent l’air, nous crient leur vitalité et c’est
au final de notre corps assis que la danse prend pleinement possession. u
du Concours international
de chorégraphie de Cologne
(Allemagne).
Tout en poursuivant
sa carrière d’interprète,
il crée une douzaine
de chorégraphies
pour la compagnie.
En 1988, il est nommé
chorégraphe résident
au Nederlands Dans Theater,
aux côtés de van Manen
et de Kylián. Ses ballets
ne tardent pas à figurer
au répertoire des plus grandes
compagnies dans le monde.
En 1990, il se voit confier
la direction artistique
de la Compañía Nacional
de Danza qu’il élève
au niveau international.
Nacho Duato est fait Chevalier
des Arts et Lettres (1995).
Le gouvernement espagnol
lui décerne la Médaille d’Or
des Beaux-arts en 1998
et il reçoit, en 2000,
le Benois de la danse
pour sa pièce Multiplicidad,
Formas de Silencio y Vacio (1999).
Textes
Jeanne Marga
Extraits du programme de salle
octobre 2014
BALLETS
35
BALLETS
À L’OPÉRA
DÉCEMBRE
JEU 11
classe ouverte 12H
MAR 16
masterclass 10H
MER 24 15H
JEU 25 16H
VEN 26 20H
SAM 27 20H
DIM 28 15H
MAR 30 20H
MER 31 18H
AVEC
L’ORCHESTRE
PHILHARMONIQUE
DE NICE
DIRIGÉ PAR
DAVID GARFORTH
PIANO
FRANCESCA TOSI
Les fêtes de fin d’année à l’Opéra
LÉO STAATS
SOIR DE FÊTE
Chorégraphie Eric Vu-An d’après Léo Staats
Musiques Léo Delibes
Lumières Patrick Méeüs
Chorégraphe apprécié par Balanchine, Léo Staats est une figure du monde de la
danse qui ne bénéficie pas de la mise en lumière qu’il mérite. Concurrencé en son
temps par les sulfureux Ballets Russes, il a été un maître de ballet brillant bien que
discret et surtout un grand pédagogue. Ses chorégraphies ont eu le mérite de s’être
attelées à un chantier alors considérable : la revalorisation du rôle du danseur que le
XIXe siècle avait réduit à celui de simple porteur. Avec Soir de Fête, œuvre de 1925,
on assiste de manière remarquable à cette renaissance du danseur bondissant et
évoluant librement aux côtés des danseuses. Cette chorégraphie illustre bien la fin
d’un antagonisme homme - femme contreproductif qui avait fini par assécher la danse.
GENE KELLY
PAS DE DIEUX
Chorégraphie Gene Kelly remontée par Claude Bessy
Musiques George Gershwin
Lumières Patrick Méeüs
Pas de Dieux raconte l’histoire d’Aphrodite et Eros qui
s’envolent vers la terre. Sur la plage où ils ont atterri,
l’ardente déesse et le dieu malicieux séduisent respectivement un maître nageur et sa fiancée. Les couples ainsi formés se prélassent dans les plaisirs de
l’amour. Au moment ou la belle Aphrodite danse
avec son prétendant, Zeus survient pour reconquérir
sa volage épouse et tout rentre dans l’ordre.
Les immortels réconciliés remontent vers les cieux
laissant les humains à leurs amours terrestres. Ce
ballet de Gene Kelly admirablement construit suit fidèlement les trois mouvements du concerto en fa de
Gershwin. La chorégraphie est percutante et pleine
de fantaisie. Chaque pas est un « gag ». Danser en
roulant les épaules, les genoux pliés et les pieds rentrés constitue peut-être un parti pris contraire à toutes
les lois esthétiques mais bien conforme à celle de
l’humour. Ce Pas de Dieux est en résumé un divertissement bien agréable.
MARCO POLO À L’ÉTRANGER
Le Ballet Nice Méditerranée au Festival
du French May de Hong Kong
Les danseurs et Eric Vu-An, leur directeur artistique ont fait des milliers de kilomètres pour aller à la
rencontre de l’Asie avec ce magnifique ballet Marco Polo, chorégraphié par Luciano Cannito. Ils
sont ainsi allés d’abord à Hong Kong, invités par le prestigieux Festival le French May, puis à Xiamen
en Chine dans le cadre du Festival Croisements. Cette année était effectivement l’année du cinquantenaire des relations franco-chinoises et notre Ballet a ainsi eu l’honneur d’incarner la culture
française et bien entendu le rayonnement de la Ville de Nice. Les danseurs ont également pu
approcher cette culture orientale et côtoyer les danseurs du Hong Kong Ballet qu’ils ont eu la
chance de voir répéter, sachant que ces derniers sont venus les voir danser à leur tour. De belles
rencontres et de beaux souvenirs ! Pour Eric Vu-An, cette œuvre « située au carrefour de la danse
classique et des danses orientales, permet aux danseurs d’exprimer un langage académique virtuose et de se fondre en même temps dans une gestuelle exquise évoquant de « lointains rivages
» et « exigeant beaucoup de qualités techniques et d’interprétation de la part des artistes ».
Librement inspiré du roman Les villes invisibles d’Italo Calvino publié en 1972, le célèbre explorateur vénitien est invité à la cour de l’Empereur Kublaï Khan afin qu’il lui raconte ses récents voyages. Une invitation au voyage, un dialogue entre un Empereur et un voyageur. u
Ballet en 2 actes,
librement inspiré
du roman
Les villes invisibles
d’Italo Calvino
Chorégraphie
Luciano Cannito
Musique
Marco Schiavoni
Décors, costume
& lumière
Jean-Pierre Laporte
Avec la participation
exceptionnelle
d’Eric Vu-An,
directeur artistique
du Ballet Nice
Méditerranée
BALLETS
37
BALLETS EVENEMENTS
Eric Vu-An, directeur artistique du Ballet Nice
Méditerranée
et trois danseurs
de la compagnie
s’envoleront
prochainement vers Cuba.
Invités par la célèbre
chorégraphe et danseuse
étoile cubaine, Alicia Alonso,
ils se produiront
les 29 octobre
et 1er novembre
dans La Pavane du Maure
de José Limon, dans le cadre
du Festival de danse
de La Havane.
DÉCOUVREZ LA CLASSE EN PLEIN AIR DU BALLET !
Les danseurs du Ballet Nice Méditerranée ont donné une classe
ouverte en plein air quai des Etats-Unis à Nice, le 6 septembre
dernier dans un décor de rêve, entre l’Opéra de Nice et la mer !
Eric Vu-An souhaitait présenter la nouvelle saison chorégraphique
2014-2015 à un large public. C’est fait ! Le public est venu nombreux et a ainsi pu voir et se rendre compte du travail quotidien
des danseurs que l’on connait moins. Travail à la barre, travail au
milieu, répétitions des ballets que la compagnie va donner en
spectacle, autant de technique, de discipline, de volonté que les
danseurs du Ballet Nice Méditerranée ont offert à leur public avec
un immense talent. Retrouvez-les dans un programme nécessitant toujours plus d’excellence, dans Verse us, une création mondiale de Dwight Rhoden et deux magnifiques chorégraphies de
Nacho Duato à partir du 17 octobre sur la scène de l’Opéra Nice
Côte d’Azur.
RENSEIGNEMENTS / RÉSERVATION
04 92 17 40 79 / www.opera-nice.org
38 JEUNE PUBLIC
RENCONTRE INATTENDUE À HONG KONG
Virginie Broquet était à Hong Kong pour quelques jours en
mai dernier dans le cadre de son projet de carnets des ambassades de France et la sortie de son roman graphique Suzy
Wong et les esprits… et a eu la surprise de « tomber » par
hasard sur le Ballet Nice Méditerranée qui se produisait au
prestigieux Festival du French May à Hong Kong. Elle a donc
croqué un peu de ce moment privilégié du bout du monde.
OCTOBRE
JEUNE PUBLIC
LA
GRANDE
FABRIQUE
DE MOTS
Dans le cadre des célébrations
du jumelage Nice-Nuremberg
SCOLAIRES
MER 1er 10H
TOUT PUBLIC
MER 1er 15H
SCOLAIRES premier degré
JEU 2 10H & 14H30
SCOLAIRES second degré
VEN 3 10H & 14H30
TOUT PUBLIC
DIM 5 11H
SCOLAIRES en allemand
MAR 7 10H & 14H30
TOUT PUBLIC & SCOLAIRES
second degré > tarif unique 5 €
La Grande fabrique de mots est
l’adaptation musicale du livre illustré éponyme de Valeria Docampo
et Agnès de Lestrade dans la version du théâtre lyrique de Martin
Zels destinée aux enfants de 8 ans
et plus.
ARGUMENT
L’histoire se déroule dans un pays
fictif et étrange dans lequel les
gens parlent peu car ils doivent
acheter des mots puis les avaler
pour pouvoir les prononcer.
Ces mots sont fabriqués dans La
Grande fabrique de mots.
Le jeune Philéas ne peut pas
acheter les mots avec lesquels il
souhaite exprimer son amour à
Cybelle, il ne dispose que des
trois mots qu’un autre a jetés.
On peut parfois trouver des mots
sans intérêt dans les poubelles ou
sur la route. Certains mots volent
et on peut les attraper avec un filet
à papillons.
En revanche, Oscar possède beaucoup de mots et il est également
amoureux de Cybelle.
Philéas avec ses trois mots :
« cerise, poussière, chaise » réussira tout de même à conquérir le
cœur de Cybelle car ses sentiments sont plus forts que tous les
mots du monde.
Et les actes, les regards et les
sourires parlent d’eux-mêmes.
JEUNE PUBLIC
39
ENTRETIEN AVEC
MARTIN ZELS
Mise en scène
Marcelo Diaz
Jeu / musique
Helwig Arenz
Beatrix Cameron
Irene von Fritsch
Johannes Reichert
Martin Zels
Direction artistique
Jürgen Decke
Direction musicale
Martin Zels
Composition musicale
Martin Zels
Scène
Andreas Wagner
Son Florian Kenner
Éclairage / technique
Sasa Batnozic
Florian Kenner
Nils Riefstahl
Costumière
Beatrix Cameron
Assistante costumière
Miriam Markl
Maquillage
Zuzana Radek
Assistante
du metteur en scène
Silke Wilhelm
Stagiaire
en mise en scène
Cornelia Götschel
Pédagogie du théâtre
Eva Ockelmann
Carolin Wollnik
Juliane Auer
Presse
et relations publiques
Ute Sander-Keller
Graphique
Wolfgang Keller
40 JEUNE PUBLIC
Compositeur
et directeur musical
de La Grande fabrique
de mots
Directeur du Théâtre lyrique au Theater Pfütze, Martin Zels raconte.
Dans la plupart des mises en scène du théâtre lyrique, la musique occupe le devant de la scène. Tous les autres arts impliqués tels que le drame, les costumes
et les décors, s’adaptent souvent à la musique. Le « jungeMET », le théâtre lyrique
du Theater Pfütze et du théâtre de la ville de Fürth veut toutefois souligner la dimension multimédia du théâtre lyrique et favoriser une interaction entre tous les arts.
Tous les arts impliqués doivent contribuer à un récit clair et intelligible. La musique
demeure naturellement la principale composante, mais elle est toujours imprégnée
et accompagnée d’éléments narratifs et d’expériences résultant de près de trente
années de théâtre parlé pour jeune public. C’est également le cas de la pièce de
théâtre lyrique poétique, La Grande fabrique de mots, que musiciens, comédiens
et autres artistes ont entrepris, en associant leurs différentes influences, de mettre
en scène ensemble. Grâce à cet opéra de chambre, j’ai réalisé un rêve en composant un opéra pour un contre-ténor, un registre pour des chanteurs masculins
dans la gamme alto-soprano. Pour le chanteur Johannes Reichert, La Grande
fabrique de mots est un défi sur le plan vocal. En tant que chanteur-narrateur, il
entraîne le public à travers l’histoire et chante pendant environ quarante minutes.
Au chant se joignent des instruments : un violoncelle, un violon et tout un ensemble
d’instruments à percussion. Deux particularités caractérisent les musiciens qui
jouent de ces instruments. D’une part, ils ne disparaissent pas dans la fosse
d’orchestre, comme c’est souvent le cas dans le théâtre lyrique, mais ils sont
présents sur la scène et visibles. D’autre part, ils ne se produisent pas uniquement
en tant que musiciens, mais incarnent également les rôles des trois personnages
principaux : Marie, Paul et Oskar. Leurs instruments leur permettent de communiquer les uns avec les autres et de montrer leurs différents caractères.
Dans cette mise en scène, la musique alterne les rôles. Elle joue le rôle d’accompagnement d’une musique de film muet pour ensuite se transformer en une narratrice autonome. La diversité de la musique se retrouve également dans les timbres
et les mélodies. Des doux duos du violon et du violoncelle, la musique s’envole
vers les rythmes puissants des percussions. Elle est alors renforcée par une « Loop
station » qui répète constamment les différents passages avec insistance et rend
la fabrique de mots audible.
Le Theater Pfütze a choisi la pièce La Grande fabrique de mots car cette œuvre
met en avant l’importance de la langue et la valeur des mots que nous utilisons
chaque jour. Cette pièce présente, d’une façon charmante, les rapports avec les
mots. Les mots produisent un bel effet lorsqu’on les respecte, les contenus se laissent transporter même sans parole et les mots vides de sens sont à l’affût. Cette
histoire d’amour poétique nous prouve que les actes sont parfois plus précieux
que des milliers de mots. u
DIACOSMIE
COSTUMES À VENDRE
L’Opéra Nice Côte d’Azur
a mis des costumes de scène
aux enchères
pour la première fois !
C’est une première, l’Opéra Nice Côte d’Azur a mis en vente des costumes de
scène, il y a quelques semaines sur le site agorastore.fr afin de gagner un peu de
place dans les allées de la réserve de costumes de la Diacosmie, le centre de
production de l’Opéra. François Remonenq et Janine Gregori qui « chouchoutent »
tous ces costumes depuis des années – entre l’envoi au nettoyage, le référencement
et la mise en place de codes-barres, la mise sous housse de protection, le rangement – ont également fait un travail remarquable de sélection pour cette vente. Cent
soixante-cinq costumes ont ainsi été proposés à un prix de départ plus qu’abordable,
de 5 à 20€, le but étant de rentrer un peu d’argent et surtout de donner une deuxième vie à ces costumes créés par les couturières de la Diacosmie. Les enchères
se sont bien passées, certains prix ont presque été multipliés par dix. Le retrait de
ces costumes s’est fait le 21 septembre à la Diacosmie, dans le cadre des Journées
Européennes du Patrimoine.
CALENDRIER
CONFÉ
RENCES
À L’OPÉRA
OCTOBRE
SAM 11 15H
> Le Ring de Bayreuth,
Hommage à Patrice Chéreau
et Pierre Boulez
Extraits du Ring,
par Renée et Anne-Marie Saurel
L’ASSOCIATION DES AMIS
DE L’OPÉRA
ET DE RICHARD WAGNER
SAM 25 16H > Le Sacré
dans l’Opéra français
par André Segond
CERCLE RICHARD WAGNER
RIVE DROITE
NOVEMBRE
MER 5 18H > Turandot
ASSOCIATION
POUR LE RAYONNEMENT
DE L’OPÉRA NICE
CÔTE D’AZUR
SAM 15 16H
> Richard Strauss
et Hugo von Hofmannsthal,
paroles et musiques
Concert / conférence,
création
de Denia Mazzola Gavazzeni
CERCLE RICHARD WAGNER
RIVE DROITE
DÉCEMBRE
SAM 20 15H
> Placido Domingo,
plus d’un demi-siècle de carrière,
l’artiste du siècle
De Mexico à Bayreuth
en passant par New York et
Nice,
par Renée et Anne-Marie Saurel
L’ASSOCIATION DES AMIS
DE L’OPÉRA
ET DE RICHARD WAGNER
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LA PRESSE EN PARLE
L’AVENIR COTE D’AZUR 13 juin 2014
La Côte d’Azur courtise la Chine
Retour sur quelques éléments de ces relations en plein développement, à l’occasion d’une mission,
économique et culturelle menée fin mai par une délégation azuréenne. [...] Le Ballet Nice Méditerranée
de l’Opéra de Nice, que dirige Eric Vu-An, accompagnait la délégation. C’est dans le cadre du French
May de Hong Kong, le plus grand événement culturel français à l’étranger qu’il a donné ses deux
premières représentations en territoire chinois un Marco Polo dont le style à mi-chemin entre les
cultures orientales et occidentales a émerveillé le public. Les retombées médiatiques et populaires ont
amené les organisateurs à proposer à l’Opéra de Nice de revenir à Hong Kong dans les années futures.
« la culture traduit le niveau d’excellence de Nice dans bien d’autres domaines et favorise l’attraction
de la ville », commente Christian Estrosi [...].
LE POINT.FR 28 mai 2014
« Dreyfus » opéra populaire signé Michel Legrand, en création mondiale à Nice
[...] L’affaire d’état du capitaine Dreyfus racontée tout en chansons et en légèreté ? Le tandem
Legrand-Cauweleart a réussi un pari plutôt osé, servi par une distribution mêlant interprètes de théâtre,
de comédie musicale et d’opéra. Des décors coulissants, époustouflants de prouesse technique,
permettent de suivre l’intrigue simultanément dans neuf univers superposés se présentant comme les
cases d’une maison de poupée. [...] Le metteur en scène, Daniel Benoin jongle non sans angoisse
avec 130 effets de lumière et 60 effets vidéo, qui doivent servir une histoire en 53 chansons sous les
accords de l’Orchestre Philharmonique de Nice. « C’est techniquement compliqué » admet-il. Le
librettiste Didier Van Cauweleart n’a pas choisi comme personnage principal le tragique capitaine
Dreyfus dont la seule action est d’écrire à sa femme. Il raconte l’histoire du point de vue inédit du traître
cabotin Esterhazy. Les auteurs du spectacle ont voulu « une alchimie entre le rire et l’émotion » car
sinon le message sur l’antisémitisme ne passe pas, résume Didier Van Cauweleart. [...].
NICE MATIN Vendredi 4 juillet 2014 Par Alain Maestracci
Une folle saison en prévision à l’Opéra
L’Opéra de Nice a présenté, hier sa programmation 2014/2015 : œuvres lyriques, concerts symphoniques, danse ou spectacles enfants. [...] « Nous avons eu cette année une saison réussie grâce à la
curiosité du public. Il n y avait ni Mozart ni Puccini mais le public a suivi. Celle-ci sera différente avec
le retour de ces classiques. Mais je revendique toujours cet éclectisme cette variété bien pensée ».
Voila donc les mots d’ordre de la programmation 2014/2015 de l’Opéra de Nice, lancés par son nouveau directeur artistique, Marc Adam. [...] Objectif cette saison : « Elargir encore » vise Marc Adam.
« Nous avons à Nice un public averti et c’est une chance. Mais il faut toujours aller chercher davantage
et jouer plus. » Pour ça, l’Opéra frappe fort. Et sur tous les fronts.
BALLET 2000 juillet 2014 Par Afio Agostini
Moderne sans risques à Nice
Le Ballet de l’Opéra de Nice est l’une des rares compagnies de France qui fait encore quelque chose
que l’on puisse appeler ballet. [...] Le premier petit chef-d’œuvre de Jiři Kylián, une pièce de Ben Stevenson qui sans être phénoménale est très connue et l’un des des plus beaux ballets d’Alvin Ailey.
Sinfonietta est la pièce crée par hasard en 1978 par laquelle Kylián se révéla internationalement [...] Il
suffit de dire que les danseurs de Nice ont paru convaincus dynamiques et épanouis comme jamais [...].
Trois préludes du chorégraphe anglais Ben Stevenson pour un couple de danseurs et une barre. [...].
Pour finir Night Creature nous a plongés dans le monde d’Alvin Ailey, le grand chorégraphe noir américain considéré de manière simpliste comme le génie de la jazz dance. Ce night creature depuis quarante ans est l’un des temps forts du répertoire de la compagnie d’Alvin Ailey, demeure une merveille
de fusion chorégraphique à l’américaine avec un rythme irrésistible [...] Chaya Masazumi tentait
l’entreprise impossible d’imiter les danseurs inimitables d’Alvin Ailey. Mais Eric Vu-An a bien raison de
viser haut dans ses choix chorégraphiques pour la compagnie qu’il dirige et pour son public.
MUSICOLOGIE.ORG Samedi 20 septembre 2014 Par Jean-Luc Vannier
C’est avec un programme « Hector Berlioz » que l’Orchestre philharmonique de Nice sous la direction
de Philippe Auguin effectuait le samedi 20 septembre, après un « concert dans la ville » la semaine
passée, sa rentrée dans les murs de l’opéra Nice Côte d’Azur. Un programme à la fois classique et
exceptionnel : classique avec, précédée du Carnaval Romain, une magnifique exécution de la Symphonie fantastique, opus 14, œuvre dédiée au Tsar Nicolas 1er de Russie […] Mais exceptionnel par
la présence de la soprano Barbara Hendricks dans Herminie, l’une des cantates obligatoires pour tout
candidat de l’époque au concours du Prix de Rome. […]
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SÉRIGRAPHIE MODERNE
Vers une filière textile 100 % française
Patron des sociétés Philea, Velcorex, Emanuel Lang et Tissage des Chaumes, Pierre
Schmitt, personnalité hors normes, créateur et repreneur d’entreprises est un
chevalier blanc du combat contre la liquidation un peu trop facile d’usines qui ont
un véritable capital de machines et de savoir-faire. En innovant avec des matières
premières tombées dans l’oubli comme le chanvre et l’ortie, il se bat pour
reconstituer une filière textile 100 % française. Diplômé de Sciences Po Strasbourg
et du Cesma de Lyon, il a occupé des fonctions commerciales et de création au
sein du groupe DMC à Mulhouse, avant de créer en 1998, avec Eliane Wolf, la
société Philea Textiles à Soultz dans le Haut-Rhin. Avec la reprise des trois autres
entreprises en 2010-2012 et 2013, il a créé une synergie technique et de créations
innovantes. Philea est organisé en trois pôles, technique, artistique et commercial,
qui travaillent ensemble pour créer des tissus pour les grandes marques de prêt-àporter comme 1-2-3, Sandro, Max Mara, Hugo Boss.
« L’ouverture vers la culture s’est faite par hasard, en fournissant des tissus en Nouvelle Zélande pour le tournage du film Le seigneur des anneaux, puis le tissu de la
robe d’Hélène dans le film Troie. Par la suite, des associations alsaciennes sont
venues nous demander des tissus pour leurs spectacles, et nous avons accepté
car c’était une manière de céder des stocks et nous faire connaître auprès des
consommateurs.
Actuellement, nous sommes mécènes de l’Opéra National du Rhin à Strasbourg,
de la Filature de Mulhouse, des Dominicains de Haute-Alsace, et d’autres encore.
Nous sommes très heureux de pouvoir bénéficier du dispositif de déduction fiscale
appliqué à nos dons, grâce à la loi Aillagon sur le mécénat. Avec l’Opéra Nice Côte
d’Azur, notre collaboration est due à une rencontre fortuite et un bon premier
contact. La convention qui nous lie est facile à mettre en place et à suivre, nous
offrons du tissu pour la confection des costumes et en échange nous obtenons un
récépissé Cerfa qui nous permet de déduire 60% du montant de notre don.
Pour nos collaborateurs, ils ont ainsi la possibilité de voir des spectacles auxquels
ils n’auraient pas eu forcément accès ou l’idée de voir : des créations mondiales,
des opéras, des pièces de théâtre, des rencontres de créateurs extérieurs au monde
de la mode dans nos ateliers. Tout cela est très positif pour l’esprit de l’entreprise.
A travers cette expérience très positive à tous points de vue, nous sommes convaincus que d’autres entreprises devraient avoir la même démarche d’aide à la culture
grâce au Mécénat et nous serions fiers que notre exemple puisse servir en ce sens.
Nous n’avons qu’un seul regret, la distance qui sépare Nice et l’Alsace, car nous
serions ravis de voir les belles productions de l’Opéra Nice Côte d’Azur avec des
costumes réalisés avec nos tissus. »
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