Faire face aux éliminations inappropriées chez le chat
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Faire face aux éliminations inappropriées chez le chat
PIC PIC PIC FAIRE FACE AUX ÉLIMINATIONS INAPPROPRIÉES CHEZ LES CHATS DR THIERRY BEDOSSA BRUNILDE RACT-MADOUX 21 juin 2013 www.avarefuge.com INTRODUCTION Troubles comportementaux ou comportements indésirables ? Propriétaires Perceptions différentes Interprétation subjective de ce qui est acceptable Comportements incompatibles avec leur mode de vie Chats Réponse adaptative à l’environnement Comportement « anormal » (origine médicale?) Comportement spécifique en réponse à un évènement aversif INTRODUCTION Comportement d’élimination 1/ émission selles et urines 2/ appareil digestif et urinaire 3/ vecteur de communication Elimination inappropriée Nombreuses explications dont certainement un signe d’anxiété ETAT ACTUEL DES CONNAISSANCES 1/ Etat actuel des connaissances et pratique en médecine vétérinaire Consultations les plus courantes (Bradshaw et al., 2012 ; Gagnon, 2012 ; Horwitz, 1997 ; Neilson, 2004). 1/ Troubles de l’élimination (projection d’urine et élimination inappropriée) 2/ Agressions envers congénères 3/ Agressions envers humains Association agression / trouble de l’élimination chez 51% des mâles et 37% des femelles (Hart & Cooper, 1984) ETAT ACTUEL DES CONNAISSANCES Les fonctions de communication du comportement de projection urinaire 1/ Informations sur le statut sexuel, par exemple, les mâles entiers et les femelles en chaleur ont plus tendance à marquer que les autres chats (Crowell-Davis, 2008) 2/ Informations sur la localisation du chat marqueur pour les autres chats ou pour le chat marqueur lui-même (Bradshaw et al., 2012) 3/ Permet l’évitement entre chats (Cooper, 1997) 4/ … ETAT ACTUEL DES CONNAISSANCES Différencier les projections urinaires des éliminations inappropriées: meilleures recommandations sur la gestion de l’environnement et l’hygiène Incidence des projections urinaires (Beaver, 2003) : o 25% pour un chat seul o 100% dans un foyer avec 10 chats ou plus o 5% des femelles / 10% des mâles castrés o Plus fréquent chez femelles en chaleur et mâles entiers Incidence des éliminations inappropriées (Beaver, 2003) : o 32 à 38% des cas: émission d’urines o 17 à 20% : fèces o 19 à 42% : les deux ETAT ACTUEL DES CONNAISSANCES Causes Médicales VS comportementales Comportementales VS médicales 38 à 55% des chats effectuant des éliminations inappropriées ont (eu) un problème médical (Horwitz, 1997; Beaver, 2003) ETAT ACTUEL DES CONNAISSANCES Causes médicales / comportementales : - Raison médicale = facteur déclenchant d’une affection comportementale non exprimée jusqu’alors (Gagnon, 2012). ex: prise de boisson ou nourriture excessive à cause d’une raison médicale, nécessité de se soulager plus fréquemment que d’habitude. Si l’accès à la litière n’est pas facile, il peut en résulter des troubles de l’élimination. - Réponse comportementale à l’environnement = influence le début ou le développement d’une maladie (Bradshaw et al., 2012). ex: le stress peut influencer la vulnérabilité aux maladies infectieuses. L’observation de l’état émotionnel du chat est importante pour détecter tout changement pouvant impliquer ce type de troubles (Beaver, 2003). CAUSES DES TROUBLES 2/ Causes du troubles des éliminations inappropriées Modifications hormonales et physiologiques: ex: arrivée à maturité sexuelle, période d’ œstrus, etc. Modifications physiologiques liées à l’âge: ex: difficultés motrices, déplacements, etc. Causes médicales (Gagnon, 2012): - urinaire : ITU (inflammation du tractus urinaire) ; polyuropolydipsie ; pollakiurie ; incontinence ; tumeur surrénalienne ; pathologie locomotrice algique ; affections neurologiques ; hyperthyroïdie - fécale : augmentation volume selles, ou du péristaltisme ; constipation, occlusion, obstruction ; incontinence ; pathologie locomotrice algique ; affections neurologiques ; causes iatrogènes ; MICI (maladie inflammatoire chronique des intestins) CAUSES DES TROUBLES Anxiété suite aux agents stresseurs de l’environnement : o changement de routine (déménagement, absence du propriétaire, arrivée d’un bébé, d’un nouvel animal ou d’un humain, etc.) ou instabilité o travaux dans le voisinage o changement des habitudes liées à la litière (lieu, substrat, entretien, hygiène) o aversion à la litière (lieu, substrat) o conflit entre chats (foyers multi-chats, voisinage) o conflit avec autre espèce (chien ou autre) o SSPT: Syndrome de stress post traumatique (disparition d’un chat, d’un autre animal ou d’un humain « très cher ») o maladie chez un partenaire familier (animal ou humain) o …. CAUSES DES TROUBLES Causes des comportements de projection urinaire dans des foyers multichats (Etude de Pryor et al., 2001) : DÉMARCHE CLINIQUE 3/ Démarche clinique o Connaitre les comportements de l’espèce o Considérer l’individu à part entière o Plusieurs facteurs peuvent être impliqués : génétiques, développementaux, environnementaux ou encore des facteurs internes. o Comprendre le mode de vie du chat o Déterminer ses besoins et ses frustrations o Diminuer son mal-être o Importance de considérer toutes les possibilités et de travailler en étroite relation entre scientifiques et vétérinaires. DÉMARCHE CLINIQUE 3/ Démarche clinique Diagnostic médical (baseline work up) o Examen clinique - examen du pénis ou de la vulve - palpation/pression reins et vessie o Examen des urines - aspect macroscopique (sédiments, couleur, …) - densité urinaire - cytologie et bactériologie - biochimie urinaire (glycosurie, cétonurie, …) - RPCU (protéinurie) o Examens complémentaires - bilan hématologique et biochimique COMPLET - radiographie abdominale face + profil - échographie abdominale DÉMARCHE CLINIQUE 3/ Démarche clinique Diagnostique médical effectué, si toute pathologie est écartée : Déterminer les agents stresseurs de l’environnement : o Seuil unique de tolérance aux stimuli aversifs Anxiété / agents stresseurs = diminution du seuil de tolérance o Influence du tempérament individuel Déterminer les aversions à la litière (Herron, 2010) o Mauvaise hygiène o Caractéristiques du bac/ du substrat o Mauvaise expérience o Lieu bruyant/ difficulté d’accès : DÉMARCHE CLINIQUE Schéma de diagnostic comportemental des éliminations inappropriées chez le chat (Herron, 2010) : ECOLOGIE ET ÉTHOLOGIE DU CHAT 4/ Ecologie et éthologie du chat Ecologie du chat (De Boer, 1977 ; Laundré, 1977 ; Liberg et al., 2000) : o Espèce solitaire o Adaptation à de nombreux milieux de vie o Existence de regroupements o Tolérance interindividuelle variable Regroupements (Natoli et De Vito, 1991; Liberg et al., 2000) : o Organisation spatiale et sociale très variables ex: degré de chevauchement des domaines vitaux ; relation de parenté +/- fortes ; interactions sociales ou tolérance ; densité des populations, groupe ressourcesdépendant ; etc. ECOLOGIE ET ÉTHOLOGIE DU CHAT Regroupements (Natoli et De Vito, 1991; Liberg et al., 2000) : o Capacité d’adaptation à la vie en groupe serait ressources-dépendant o Tolérance interindividuelle développée et accrue si abondance et large répartition des ressources (Fitzgerald & Karl, 1986). De façon générale : o Les chats se nourrissant de proies dispersées vivront de manière solitaire, o Les regroupements sont les plus denses dans les environnements urbains, où les chats se nourrissent des restes d’ordures ou de la nourriture que les humains leur apportent, o Les regroupements sont moins denses dans les environnements où l’humain a moins d’influence. ECOLOGIE ET ÉTHOLOGIE DU CHAT Chats de compagnie (Bernstein & Strack, 1996) : o Etude de l’utilisation de l’espace par 14 chats stérilisés vivant dans une maison o Résultats : Gestion de l’espace disponible : - les domaines vitaux des chats ont des tailles variables, - les zones de couchage préférées sont partagées dans le temps, - les chats utilisent un mode de communication permettant le maintien à distance (signaux de la position de la queue). Cohabitation pacifique qui peut s’expliquer par le nombre de sites de nourritures, de litières et de lieux de couchage qui sont à leur disposition Dynamique spatio-temporelle ECOLOGIE ET ÉTHOLOGIE DU CHAT Chats de compagnie (Barry & Crowell-Davis, 1999) : o Etude des interactions entre des chats stérilisés vivant en paires (mâle-mâle ; mâle-femelle ; femelle-femelle) dans des foyers exclusivement à l’intérieur. o Résultats : - Les chats passent 50% de leur temps hors de la vue des autres, - Pour 30% des observations, les chats gardent une distance de 1 à 3 m entre eux, - Contrairement à ce qui est observé dans la nature: les mâles et les femelles ont autant de comportements positifs entre eux , et ce sont les paires mâle-mâle qui passent le plus de temps à proximité. - Proximité forcée et espace réduit: les chats sont capables de vivre en harmonie, de gérer leurs comportements dans le temps et dans l’espace avec un minimum d’agressions. ECOLOGIE ET ÉTHOLOGIE DU CHAT Chats de compagnie (Bradshaw et Hall, 1999) : o Etude des comportements affiliatifs entre des chas apparentés ou non o Résultats : - Les chats apparentés passent plus de temps à proximité et ont plus de comportements affiliatifs (contact, allotoilettage) que les chats non apparentés, - Les liens peuvent s’établir pendant la période de socialisation (entre 3 et 8 semaines) et persistent entre les chats qui vivent toujours ensemble. o Etude et comparaison des comportements des chats de ferme et/ou de square lors des regroupements avec les comportements des chats de compagnie. Ces données peuvent aider à gérer les problèmes comportementaux et à améliorer l’introduction de nouveaux individus au sein du foyer contenant d’autres chats, avec précautions (Crowell-Davis et al., 2004). ex: Regroupements de chats libres: discrimination des individus familiers par rapport aux étrangers qui sont difficilement acceptés. ECOLOGIE ET ÉTHOLOGIE DU CHAT Chats de compagnie (Crowell-Davis et al., 2004 ; Rochlitz, 2005) : o Importance de connaitre le comportement des chats de compagnie, leur mode de vie, leur communication et leur tempérament pour savoir comment aménager au mieux leur lieu de vie, notamment s’ils vivent à plusieurs dans une maison, afin d’éviter toute confrontation entre eux. Prendre garde à la dynamique de vie des chats à la maison pour les maintenir dans les meilleures conditions de bien être. MODES DE VIE Le chat domestique est capable de s’adapter à des environnements très variés Modes de vie : - exclusivement intérieur ; - intérieur/extérieur ; - extérieur ; - refuge Animaux stérilisés ou non Cas concrets : certains chats sont capables de vivre dans plusieurs environnements différents au cours d’une vie, sans pour autant avoir des problèmes d’élimination inappropriée. Ils sont capables d’ajuster leurs comportements à leur milieu de vie. MODES DE VIE Exemple: mode de vie intérieur/extérieur Environnement d’origine - Félix, mâle castré, confié pour malpropreté. - Chanel, femelle, confiée pour malpropreté et agressivité. Nouvel environnement favorable problème résolu problème résolu sauf lors des chaleurs. - Melissa, femelle stérilisée, 9 mois, confiée pour agressivité. (la stérilisation n’a rien changé) problème résolu TRAITEMENTS 5/ Traitements A/ Thérapie comportementale (TRE, thérapie par restriction de l’espace) (Gagnon, 2012) : - confinement dans une pièce bien aménagée pour « rééduquer » à la propreté et limiter les contacts avec les évènements aversifs - rééducation en cage (grande et bien aménagée) - contre-conditionnement R+ et/ou P+ ; efficacité ?? B/ Chirurgie : 87 à 90% des chats mâles et 95% des femelles réduisent ou stoppent le comportement de projection urinaire quelques temps après la chirurgie (stérilisation/ castration) (Beaver, 2003 ; Neilson, 2004 ; Herron, 2010) TRAITEMENTS C/ Thérapie pharmacologique : Principaux médicaments prescrits dans les troubles avec projection d’urine (Gagnon, 2012) : Antidépresseurs tricycliques : Effets généraux : pas d’effet sur la mémoire à court terme. Ils améliorent le comportement social en facilitant les interactions positives. - Amitriptyline (Elavil®) : 0,5 à 1 mg/kg toutes les 12 à 24 heures - Clomipramine (Clomicalm®) : 0,5 mg/kg par jour Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine : - Fluoxétine (Reconcile®, Prozac®) : 0,5 à 2 mg/kg par jour - Paroxétine (Deroxat®) : 0,2-0,5 mg/kg par jour - Sertraline (Zoloft®) : 0,5 m/kg par jour Azapirone : Effets généraux : facilite les interactions sociales - Buspirone (Buspirone®) : 0,5 à 2 mg/kg par jour Benzodiazépines : Effets généraux : rendent le chat plus sociable, lèvent les inhibitions, incoordination motrice pendant les 3 à 4 premiers jours, ce qui serait un bon indicateur du succès thérapeutique. Le diazépam a été accusé en 1996 de provoquer des hépatites fulgurantes. Une analyse critique des cas a montré une surcharge pondérale sur les sujets décédés. Outre le diazépam (Valium®), on peut utiliser l’oxazépam (Seresta®) et le lorazépam (Temesta®). - Diazépam : 0,2 à 0,4 mg/kg Autres : - Cyproheptadine (Periactine®) : 2 mg toutes les 12 à 24 heures. - Zylkène® - Anxitane® Associer la mise en place d’une thérapie médicamenteuse aux modifications environnementales TRAITEMENTS D/ Aménager l’environnement du chat à la maison : Buts: - Améliorer le bien-être (physique/psychique) du chat - Lui permettre d’effectuer les comportements propres à son espèce - Eliminer les stimuli aversifs qui déclenchent les problèmes comportementaux (Turner, 1997). - La qualité de l’environnement est souvent plus importante que la quantité d’espace (Ellis, 2009). - Les modifications de l’environnement adéquates paraissent être la meilleure solution pour palier aux problèmes comportementaux (Heidenberger, 1997). - La tolérance à la restriction spatiale varie selon plusieurs facteurs. Un bon aménagement intérieur augmente cette tolérance et est efficace sur les troubles comportementaux (Pryor et al., 2001). AMÉNAGEMENTS Accès à l’extérieur - Les chats vivant exclusivement à l’intérieur sont plus enclins à développer des problèmes comportementaux, ils auraient jusqu’à 2 fois plus de troubles de l’élimination que les autres, sans doute à cause d’un environnement intérieur pauvre en stimuli (Bernstein, 2006). - Laisser un accès libre au chat: ils présentent moins de troubles comportementaux que ceux qui ont des horaires réguliers (Heidenberger, 1997). AMÉNAGEMENTS Accès à l’extérieur Permettre de nombreux comportements naturels - Installation de pare-vue : éviter la vue des chats/chiens du voisinage (Neilson, 2004). Permettre un accès à l’extérieur sans négliger l’aménagement intérieur... AMÉNAGEMENTS Déterminer les préférences individuelles du chat : - Caractéristiques et localisation du bac à litière - Type de substrat Hygiène du bac : - Entretien quotidien et nettoyage au savon hebdomadaire (Neilson, 2004 ; Herron, 2010). Foyer multi-chats : - Nombre de bacs varie en fonction du nombre de chats (règle du N+1). . AMÉNAGEMENTS Recommandations de base : - Bac à litière, eau, nourriture, lieux de repos disposés à distance les uns des autres - Nombre de ressources en fonction du nombre de chats - Encourager des comportements naturels (frottements faciaux et griffades): ex: bûche, bois entouré de sisal, griffoir artificiel AMÉNAGEMENTS Recommandations de base : Favoriser le nombre de lieux de repos AMÉNAGEMENTS Aménager le lieu de vie en 3-D : Créer un espace de vie plus grand et utiliser l’espace: ex: étagères, arbres à chats, … (Neilson, 2004) AMÉNAGEMENTS Réduire les agents stresseurs de l’environnement : - Accès à un lieu sécurisant pour se cacher de la vue et du contact des différentes sources de stress (chien, enfant, autre chat, etc). ex: placer une barrière qui interdit au chien ou à l’enfant en bas âge de suivre le chat (Herron, 2010). - Accès à un minimum de deux pièces (Mertens & Shär, 1988) - Lieu calme et sécurisant pour se soulager AMÉNAGEMENTS ANIMÉS 1/ Interactions positives avec les humains 2/ Avec les autres chats Et les autres espèces… selon tolérance du chat / importance de la familiarisation précoce AMÉNAGEMENTS INANIMÉS 3/ Objets nombreux jouets seul ou avec un humain, en fonction des préférences du chat boulette de papier ; ficelle + papier ; sac en plastique ; canne à pêche ; peluche ; etc. 4/ Alimentaire: cachettes, répartition nourriture, objets distributeurs Plusieurs sources de nourriture/ eau ; gamelle en hauteur ; pipolino ; puzzle feeder ; etc. AMÉNAGEMENTS INANIMÉS 5/ Aménagements sensoriels - visuel (accès aux fenêtres, télévision, miroir) - auditif (musique, radio) - tactile (ex: ipad) AMÉNAGEMENTS INANIMÉS 5/ Aménagements sensoriels - olfactif (catnip avec ou sans jouet, huiles essentielles, parfum, Feliway ®, etc.) - Réduction significative de l’incidence des projections urinaires avec l’utilisation de Feliway ® (Hunthausen, 2000). Le taux de succès varie entre 51,5 et 96,7% (Beaver, 2003). Meilleurs résultats avec élimination des facteurs stressants avant de démarrer le traitement. AMÉNAGEMENTS Propositions d’aménagements pour le chat 1/2 : http://sfcyno.com/html/video.php#video5 AMÉNAGEMENTS Propositions d’aménagements pour le chat 2/2 : http://sfcyno.com/html/video.php#video6 MERCI DE VOTRE ATTENTION PIC PIC PIC PIC PIC PIC www.avarefuge.com Contact: [email protected]