Frédéric Serrière - Maison Innovergne
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Frédéric Serrière - Maison Innovergne
1 Frédéric Serrière Guide du Marché des 50 ans et plus 2 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Depuis 1999, Senior Strategic est l'expert reconnu du marché des Seniors et Baby boomers. Les composantes de notre groupe : - La société d'études et de conseil en Stratégie et Marketing de référence sur le marché des Seniors depuis 1999. - Age Strategic, le département de Senior Strategic auprès des directions générales d'entreprises qui veulent profiter du vieillissement démographique. - Un réseau international - Un groupe média de sites d'informations sur le vieillissement dans le monde dont par exemple leMarchedesSeniors.com, theMatureMarket.com. Plus d'informations : www.seniorstrategic.fr Coordonnées : 22 rue Docteur Greffier, 38000 Grenoble Téléphone : 33 (0)9 52 63 36 36 email : [email protected] 3 Frédéric Serrière Membre des experts internationaux des questions liées au vieillissement démographique et des marchés des Seniors, il conseille depuis 1999 les directions générales des entreprises et des organisations. Il apporte une vision stratégique et prospective des impacts du vieillissement de la population. Il est l’auteur de plusieurs livres, études et essais sur le sujet dont : Conquérir le marché des Seniors (2010), Conquérir le marché des Baby boomers, 101 innovations on the 50 plus market, 60 successful strategies for the mature market, vieillissement démographique : enjeux pour l'entreprise... En 2010, il co-fonde Senior Strategic, une agence spécialisée de conseils en stratégie et marketing sur le marché des Seniors, avec un réseau international. En 2009, il développe des prestations de conseils pour les directions générales qui souhaitent mieux comprendre et profiter du vieillissement démographique comme source de croissance (voir Age Strategic) Ses conférences, formations et interviews dans les médias lui permettent d'expliquer la révolution et les enjeux que représente le vieillissement démographique. Il est le conseiller auprès de plusieurs directions de groupes nationaux et internationaux. Il intervient également pour d'autres sociétés de conseils et d'études. L'ensemble est appuyé sur un groupe médiatique international de portails professionnels : 4 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 leMarchedesSeniors.com, theMatureMarket.com, mercadodelosmayores.com... Plus d'informations : www.seniorstrategic.fr & www.fredericserriere.com Coordonnées : 22 rue Docteur Greffier, 38000 Grenoble Téléphone : 33 (0)9 52 63 36 36 email : [email protected] 5 Frédéric Serrière – Senior Strategic Guide du Marché des 50 ans et plus 6 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Sommaire Introduction Les entreprises françaises en retard ? Avoir une vision globale V VI IX 1 Un marché en mutation 1 Le changement démographique 2 Comprendre le vieillissement 7 L’effet du vieillissement de la population sur la consommation 10 Vers un recul de la vieillesse 11 Vers la maturité psychologique 13 Les conséquences économiques du vieillissement de la population 16 Les conditions économiques des Seniors 19 Les baby-boomers : la génération qui va tout changer 21 Évolution de la consommation 23 Impacts du vieillissement de la population par domaine d’activité 28 2 Les tendances 33 La santé devient plus importante 33 La volonté de ne pas vieillir 38 La naissance du 4e âge 41 L’augmentation des peurs 45 Vers un ralentissement de la société ? 48 Plus de personnes seules et plus de femmes 50 Des Seniors toujours actifs avec plus de temps libre 51 Les relations intergénérationnelles 57 Vers une migration géographique avec le départ en retraite ? 62 Vers plus de simplicité 66 L’exemple du tourisme 70 L’exemple de la banque 75 L’exemple de l’alimentation 78 7 3 Les Seniors, une cible hétérogène Senior à quel âge ? Une cible très hétérogène Segmenter ce marché et choisir ses cibles Pas de segmentation miracle Segmentation en fonction des âges Segmentation en fonction des générations Segmentation en fonction des valeurs Les autres segmentations En conclusion 81 81 83 84 85 86 86 91 97 98 4 Les stratégies pour conquérir le marché des Seniors 101 Les entreprises face à l’arrivée des baby-boomers 102 Pas de recette miracle, mais une stratégie globale 105 La vision globale 107 Exemple d’une stratégie globale dans une station touristique 107 Stratégies générationnelles 110 Stratégies transgénérationnelles 117 Stratégies intergénérationnelles 119 Adaptation des produits 121 Des programmes tarifaires pour cibler les Seniors 126 La distribution 128 Communication 132 Les ressources humaines 132 5 Les médias et les Seniors Les Seniors et la télévision Les télévisions Seniors Les Seniors et la radio Les Seniors et la presse La presse Senior Cinéma Internet Les annonceurs prêts à cibler les Seniors ? 137 137 139 141 142 142 144 145 147 La communication Senior Cibler les Seniors ? Les Seniors et la publicité La matrice Com’GI Les publicités générationnelles-générationnelles Les publicités générationnelles-intergénérationnelles : 149 150 150 154 156 6 8 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 l’exemple de Libra de Tena Les publicités intergénérationnelles-générationnelles Les publicités intergénérationnelles-intergénérationnelles Les attentes des générations Les effets du vieillissement L’âge subjectif Doit-on appeler un Senior « Senior » ? Des ambassadeurs Seniors ? Le publi-reportage 157 159 160 161 162 163 165 166 167 Au contact des Seniors Le commerce et la distribution La vente à distance (VAD) Le marketing direct et les Seniors Les Seniors et Internet 171 172 173 174 177 Conclusion Remerciements 179 181 7 9 Introduction En 1999, avons créé Senior Strategic, agence de conseil en stratégie et marketing qui est maintenant un réseau international d’experts du marché des Baby boomers et des Seniors. Nous sommes tous d’accord sur un point : le vieillissement de la population est une opportunité unique…..unique pour les entreprises qui veulent trouver des relais de croissance. Durant les trente prochaines années, le vieillissement de la population sera l’une des préoccupations principales des leaders politiques et sociaux, comme des dirigeants d’entreprises, qu’elles soient industrielles ou de services. Pour la première fois, la majorité des habitants des pays développés a atteint ou dépassé l’âge adulte, c’est-à-dire un âge auquel les forces de motivation liées au « développement propre » deviennent plus importantes que les comportements et les apparences. Autrement dit, pendant la première partie de sa vie, chacun s’efforce de s’accomplir par rapport aux autres. Le milieu de la vie est un tournant crucial : on se tourne alors vers soi-même, on devient moins sensible aux modes, aux tendances et à l’apparence. Pourquoi – au moment où les premières personnes de la génération du Baby boom atteignent l’âge de 60 ans - estil important pour les entreprises de comprendre ce changement profond ? 10 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les stratégies de la plupart des sociétés sont développées par des jeunes, pour des jeunes, selon des méthodes adaptées aux jeunes. Or, ces derniers seront bientôt moins nombreux que les « adultes » – que nous appelons, dans ce livre, les Baby boomers et les Seniors. Dans les quinze prochaines années, le nombre des 50 ans et plus va croître de 59 %, alors que la population des moins de 50 ans sera stable. Une question se pose : que va-t-il arriver aux entreprises qui continuent de cibler uniquement les jeunes, population de moins en moins nombreuse et moins aisée ? Les entreprises françaises en retard ? Dans les années passées, le marché des Seniors a souvent été cantonné à la communication destinée aux plus de 50 ans. Il s’agit en fait d’un phénomène plus global. L’expression américaine de « Mature Market » est plus juste. Elle correspond mieux à une société dans laquelle le nombre de personnes ayant atteint la « maturité » est particulièrement important. Le marché des 50+ n’est pas celui des « vieux », mais celui des personnes « matures » : de ceux qui ont plus d’expérience, qui se connaissent mieux, qui ont atteint une plus grande sérénité et qui savent mieux ce qui est important pour elles. « Le marché des Baby boomers et des Seniors est en train de démarrer en Europe », expliquent plusieurs directeurs marketing. Pour faire le point sur ce sujet, le réseau international SeniorStrategic a lancé, avec le site professionnel theMatureMarket.com, un baromètre, le « Mature Market’s Report », appelé en France le « Baromètre du marché des Seniors 2010 », dans cinq pays d’Europe, au Japon, en Australie, au Canada et aux États-Unis. L’objectif était de mesurer l’avancée des entreprises sur le marché des Seniors. Dans le Monde, 500 des plus grosses entreprises ont été interviewées et leurs stratégies décortiquées. Il s’agissait de mesurer l’ensemble des compétences, du domaine des études en passant par les stratégies et la communication, ou encore les politiques commerciales. Les résultats sont riches d’enseignements : d’une manière générale, les entreprises européennes sont légèrement en retard par rapport à celles du Japon et des États-Unis. C’est dans ce dernier 11 pays que nous trouvons le plus de recherches, d’études et d’actions liées au marché des Seniors mises en place par les entreprises. L’exemple du Japon mérite que l’on s’y attarde, car c’est le pays dont la population est la plus vieille du monde. Les plus de 65 ans représentent déjà 17 % des habitants, proportion qui, à l’horizon 2015, devrait atteindre 25 %. Depuis 2012, le nombre de décès dépasse celui des naissances. Une étude récente de l’agence de communication Dentsu attribue 50,4 % des dépenses de consommation aux plus de 50 ans. Pour la première fois, les babyboomers ont contribué à plus de 50 % des dépenses. Les entreprises ont déjà pris conscience de l’ampleur du phénomène et ont commencé à proposer des produits et des services destinés aux Seniors. Shinjiro Yukawa, chef de produit chez Nissan explique que « les plus de 50 ans vont devenir la génération la plus importante dans les années à venir » (source : asahi.com). De son côté, la société de télécommunication DoCoMo commercialise le téléphone Raku-Raku dont les baby-boomers sont le cœur de cible. D’autres domaines sont touchés, comme les centres de fitness, qui proposent des activités aux Seniors, ou encore celui des « alicaments » et celui des services pour le 4e âge. Cela dit, beaucoup reste à inventer et à mettre en place, comme le confirme Toru Matsumura, chercheur au NLI Research Institute. « Les entreprises du Japon doivent non seulement mieux se préparer au vieillissement de la population, mais également à sa diminution » (source : asahi.com). Aux États-Unis, les entreprises sont en avance pour des raisons légèrement différentes. L’intérêt qu’on y montre pour le marché des Seniors peut s’expliquer par le fait que le vieillissement de la population y est à la fois plus important et plus progressif. En effet, une différence importante existe entre la pyramide des âges des États-Unis et celle de la France : l’arrivée des baby-boomers a été plus brutale en Europe à cause d’une baisse des naissances beaucoup plus importante pendant la Seconde Guerre mondiale. De son côté, la population des États-Unis vieillit rapidement, mais de manière plus continue. C’est pourquoi les entreprises américaines ont dû s’intéresser plus tôt aux Seniors. L’autre raison de la prise en compte du vieillissement de la population par les entreprises américaines peut s’expliquer par la 12 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 présence de l’AARP (American Association of Retired Persons). Cette association de retraités américains représente, avec ses 35 millions de membres, le plus gros lobby de ce pays. Les entreprises l’ont bien compris et ont développé des programmes à destination de ses membres. Rares sont les chaînes d’hôtels, les agences de voyages ou les compagnies aériennes qui n’offrent pas des réductions ou des services spécifiques aux Seniors. C’est, par exemple, le cas de la chaîne d’hôtels Choice, qui a conçu des chambres « Premium » pour les Seniors. De son côté, Whirlpool cible les Seniors aux États-Unis avec son nouveau lave-linge DreamSpace. En Australie, les entreprises commencent à s’intéresser au marché des Seniors mais « la majorité des responsables marketing pensent que le vieillissement accentue la fidélité aux marques » explique Gill Walkern directrice de l’agence australienne de communication Evergreen et « donc ont tendance souvent à encore négliger les plus de 50 ans ». Il y a d’autres raisons qui explique que les entreprises australiennes sont encore réticentes à cibler les plus de 50 ans. « Comme partout dans le Monde, les salariés des agences de publicité sont jeunes (la moyenne d’âge est de 33 ans) » indique Gill. L’autre raison est le faible taux d’emploi des plus de 50 ans dans l’industrie. Au Danemark, nous pouvons faire le même constat comme l’explique Chris Evers, fondateur de l’agence Inspirum marketing et ancien directeur de l’association de marketing « Il y a deux ans j’ai donné une conférence sur le marché des Seniors à plus de 450 dirigeants. Nous avons eu énormément de retombées médiatiques mais il n’a pas eu d’effet sur les stratégies des entreprises ». En France, 73 % des entreprises déclarent ne pas s’intéresser aux plus de 50 ans. 46 % veulent absolument éviter d’avoir une image « vieille » et nient tout intérêt pour ce marché. Seulement 21 % ont réalisé une étude sur cette population ces quatre dernières années. Ce constat doit cependant être nuancé. L’étude montre que certaines entreprises n’ont rien à envier à leurs consœurs américaines, même si le fossé est en train de se creuser entre le groupe d’entreprises en avance et les autres. Dans les entreprises françaises en tête, nous retrouvons les mêmes depuis 13 plusieurs années : Audika, la Banque des Seniors, Avis, Optic 2000, Aviva Direct, Libra de Tena, Nivea, Monoprix, etc. Dans le domaine de la vente à distance, nous pouvons citer Daxon, Afibel, Bleu Bonheur et Damart. Dans le secteur du tourisme, Vacances Bleues et Vacanciel font figure de leader. Les raisons de ce désintérêt de la majorité des entreprises françaises et européennes sont nombreuses. En voici quelquesunes. La peur de « vieillir » l’image d’une marque est manifeste chez les dirigeants d’entreprises. Certaines stratégies risquent inévitablement à ce résultat. C’est le cas par exemple des marques dont les jeunes sont le cœur de cible et qui décident brusquement de cibler les Seniors. La clientèle d’origine a tendance à s’en détourner. « Les Seniors consomment comme les autres. » C’est une remarque que nous retrouvons dans beaucoup d’études et d’enquêtes. L’idée est de dire que les Seniors ont appris à consommer d’une certaine manière quand ils étaient plus jeunes et qu’ils vont continuer à le faire. Cette affirmation est très souvent fausse. Les comportements de consommation changent au cours d’une vie. Les études sur le marché des Seniors sont encore assez de nombreuses, particulièrement en Europe, où elles sont plus rares qu’aux États-Unis. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui poussent certains professionnels du marketing à s’intéresser au marché américain. Mais il s’agit de faire attention, car les Seniors français sont différents des Seniors américains. Des échecs retentissants font peur à beaucoup de responsables. Nous verrons plus loin que ces échecs sont essentiellement dus à l’application de mauvaises stratégies. « Le thème des Seniors n’est pas très sexy. » Nous trouvons cette opinion chez une partie des professionnels du marketing et des créatifs d’agences de communication aussi bien en Europe qu’en Amérique du Nord. Certaines de ces agences ont d’ailleurs du mal à motiver leurs employés à travailler sur des campagnes de publicité destinées aux plus de 50 ans. La jeunesse des professionnels du marketing ne les aide sans doute pas dans l’analyse du marché des Seniors. Si un trentenaire éprouve des difficultés à comprendre un jeune de 15 ans, il devra 14 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 certainement fournir beaucoup d’efforts pour se « mettre dans la peau » d’une personne de 60 ans. On demande de plus en plus souvent aux responsables des entreprises de produire des résultats à court terme. Mettre en place une stratégie sur le marché des Seniors demande du temps et ses résultats ne sont pas toujours immédiats. La réussite sur le marché des Seniors est significative lorsque les directions générales s’impliquent directement dans les stratégies. Nous pourrions certainement trouver d’autres explications au manque d’enthousiasme des entreprises à l’égard des Seniors. Mais on remarque un changement complet d’attitude des responsables marketing lorsqu’ils commencent à s’intéresser à ce marché et qu’ils en découvrent tout le potentiel. Les entreprises doivent s’occuper rapidement des Baby boomers et des Seniors. Il s’agit d’une opportunité unique de trouver des vecteurs de croissance pour la plupart d’entre elles. C’est aussi une question de survie pour d’autres. Le baromètre du marché des Seniors a néanmoins mesuré un « intérêt » pour ce marché de la part des dirigeants. Ceci devrait se traduire par des actions concrètes dans les années ou les mois prochains. Avoir une vision globale Alors, comment faire pour réussir à bien s’implanter sur le marché des Seniors ? La réponse tient en trois points fondamentaux : reconnaître qu’il s’agit d’un marché complexe, avoir une vision globale et éviter les solutions miracles en vogue ces dernières années, comme appeler un Senior par le terme « Senior ». Toutes les stratégies sont valables, mais dépendent du contexte, des objectifs et des ressources. Certaines consistent à acheter une société déjà implantée sur le marché des Seniors, d’autres à développer un produit spécifique, ou encore de prendre en compte les attentes des plus de 50 ans ou 60 ans pour enrichir les gammes existantes. Avoir une vision globale nécessite de comprendre les Seniors, de connaître la grande hétérogénéité de cette population, d’adapter les produits, les ressources humaines, la communication, les infrastructures, la relation client, etc. Comment peut-on espérer vendre des téléphones portables aux Seniors si on ne forme pas les 15 vendeurs pour qu’ils comprennent leurs attentes ou si ces téléphones ont été conçus pour les jeunes ? Il ne s’agit pas de se concentrer exclusivement sur les Seniors et d’oublier les jeunes, mais de considérer l’ensemble des générations. Les Seniors vont changer. La notion même de « vieillesse » évoluera à mesure que la population vieillira. On a observé que la société amérindienne des Cuiva ignore, en quelque sorte, cette notion de vieillesse. Les personnes âgées de ce peuple ne constituent pas un groupe particulier et ne sont exclues d’aucune activité sociale. Développer des produits pour les personnes « matures », ce n’est pas les stigmatiser, mais au contraire les intégrer dans une société plus intergénérationnelle. Ce livre a été écrit avec le concours de nombreuses personnes et entreprises françaises et étrangères. Il s’appuie également sur l’expérience des experts de SeniorStrategic. Il s’agit aussi d’un travail personnel de réflexion, de recherche et de veille stratégique durant plusieurs années. Il n’a pas pour ambition d’être exhaustif, mais plutôt d’apporter des éléments nécessaires à la conquête du marché des Seniors. En le lisant, vous connaîtrez mieux les stratégies les plus appropriées et actuellement utilisées par les entreprises pour cibler les Seniors. Vous serez informés sur les typologies existantes et vous comprendrez la nécessité d’acquérir « cette vision globale » à l’aide de nombreux exemples dans le Monde. 16 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 1 Un marché en mutation Les plus de 50 ans sont actuellement 20 millions en France et devraient être plus de 28 millions en 2030. Ce vieillissement de la population sans précédent est dû à trois phénomènes : la baisse du nombre de naissances, l’allongement de l’espérance de vie et l’arrivée massive des baby-boomers à la retraite. Ces derniers ont profité du plein emploi dans leur jeunesse et de la large diffusion des grandes innovations technologiques. Ils forment la génération la plus nombreuse et la plus riche, génération dont dépend l’avenir de nombreuses entreprises. En effet, les 50 ans et plus représentent un poids économique grandissant. Leur pouvoir d’achat, estimé à 2500 milliards d’euros dans le Monde, est un véritable moteur de croissance à long terme pour les entreprises correctement positionnées sur ce marché. Le nombre d’entreprises ciblant les Baby boomers est encore faible ; nous l’avons dit en introduction et nous aurons l’occasion d’y revenir. Cette politique de l’autruche pourrait bien être fatale à plusieurs d’entre elles. Pour autant, les sociétés déjà implantées sur le marché des Seniors ne sont pas à l’abri d’un revers de fortune et devront s’adapter : la nouvelle génération du Baby boom a des attentes et des comportements d’achat fort différents 17 de ses aînés. Elle va changer radicalement notre vision même de la retraite et de la vieillesse. Ainsi, le vieillissement de la population doit être pris au sérieux par les dirigeants d’entreprises, qu’elles soient déjà sur le marché des plus de 50 ans ou qu’elles ne ciblent actuellement que les jeunes. Le changement démographique La population française actuelle D’après l’Insee, la France comptait 61,4 millions d’habitants au 1er janvier 2010. 15,6 % avaient moins de 20 ans, 36 millions entre 20 et 64 ans, et 9,9 millions plus de 65 ans. Les plus de 50 ans sont près de 20 millions, soit 33 % de la population. D’autre part, la France compte 12 819 centenaires en 2010. Nous assistons à une diminution légère des naissances, principalement due à la baisse du nombre de femmes en âge de procréer. En effet, les femmes du baby-boom sont progressivement remplacées par des générations moins nombreuses, le nombre des femmes de 20 à 40 ans étant en train de diminuer. En 2012, l’espérance de vie est de 75,7 ans pour les hommes et de 82,8 ans pour les femmes, et gagne trois mois par an depuis plusieurs décennies. Le nombre de grands-parents est de 12,6 millions, dont 2 millions sont également arrière-grands-parents. D’après l’Insee, la moitié des personnes de 56 ans sont grands-parents. Cette proportion est à son maximum chez les personnes de 70 ans, avec un taux de 80 %. Les grands-parents sont de plus en plus nombreux et leur nombre va continuer d’augmenter. Concernant la situation familiale, EuroStat indique que les veufs représentent un peu plus de 6 % de la population en France. D’après l’Insee, ce taux augmente avec l’âge pour dépasser les 80 % chez les plus de 65 ans. 18 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 La France dans l’Europe Concernant le vieillissement de la population, la France se situe dans la moyenne européenne avec 21,3 % de plus de 60 ans contre 21,5 % dans la communauté européenne (source : Eurostat). En 2002, les plus de 65 ans représentaient 17,7 % en France, contre 18,7 % dans l’Europe des quinze (source : Eurostat, Le Marketing Book Senior 2002, TNS Secodip). Les 50-64 ans représentent 16,1 % des Français, contre 17,8 % pour les Européens. Dans les années à venir, le France devrait rester dans la moyenne, ce qui n’est pas le cas de l’Espagne, qui sera sans doute le pays le plus vieux d’Europe et du monde en 2050. Projections à l’horizon 2030/2050 Les projections de la démographie à l’horizon de 2030/2050 ont été élaborées par l’Insee et présentées dans un document de juillet 2010 intitulé « Projections démographiques pour la France, ses régions et ses départements (horizons 2030/2050) ». Si on en retient le scénario central, la population française devrait atteindre 64,5 millions en 2040, contre 58,7 millions en 2000, et retomber à 64 millions en 2050. La population devrait croître jusqu’en 2035, puis diminuer à partir de 2040 en raison d’un solde migratoire insuffisant. Les plus de 60 ans seront 21 millions en 2035, contre 12 millions aujourd’hui, ce qui représente une hausse de 75 %. Cette forte croissance est due à l’arrivée massive des personnes de la génération du baby-boom. Évolution de la France métropolitaine de 2000 à 2050 Année Population au 1er janvier (en millions) Part des 0-19 ans (%) Part des 20-59 ans (%) Part des 60 et plus (%) 2000 58,7 25,6 53,8 20,6 2015 61,9 23,2 51,5 25,3 2035 64,3 20,9 46,3 32,8 2040 64,4 20,6 45,9 33,5 19 2050 64,0 20,1 44,8 35,1 Source : Insee, Projections de la population française à l’horizon 2050, Insee première n° 762. Les premières d’entre elles ont actuellement 57 ans. La croissance de la proportion des plus de 75 ans et des personnes âgées de 85 ans est encore plus importante. Le nombre de ces derniers serait multiplié par plus de 4. La baisse de la proportion des moins de 20 ans continue : elle doit passer de 25,6 % en 2000 à 20,1 % en 2050. Les moins de 20 ans étaient 15 millions en 2000, ils ne seront plus que 12,8 millions en 2050. Seule la part des plus de 60 ans augmente, rapidement jusqu’en 2035, puis plus lentement. La population en âge de travailler va continuer de croître pendant quelques années pour ensuite diminuer. C’est ainsi que le nombre de personnes âgées entre 18 et 64 ans augmentera jusqu’en 2011. Ensuite, les scénarios sont plus difficiles à prévoir. Au niveau régional et départemental, l’évolution de la population devrait être inégale : la population devrait diminuer dans les régions du Nord-Est et augmenter dans le Sud de la France. En outre, le vieillissement toucherait plus particulièrement les départements peu urbanisés du centre de la France, de l’Ouest et du Massif central. Il serait moins important dans le Sud-Est et surtout en Île-de-France. Le vieillissement des populations des régions est fortement nuancé par le poids des migrations passées et futures. En 2030, si les échanges migratoires se maintiennent, la part des plus de 60 ans variera de 23,2 % en Île-de-France à 40 % dans le Limousin. Le département le plus vieux serait le Cantal, avec 47 % de plus de 50 ans. Les trois raisons principales du vieillissement de la population sont les suivantes : La baisse de la fécondité a été régulière durant les deux derniers siècles. Ce phénomène s’est accéléré entre 1960 et 1999. Ainsi, le nombre d’enfants par femme est passé de 3 en 1990 à 1,8 en 2000 (mais on relève une remontée du nombre de naissances depuis 2000). Un nourrisson de l’an 2000 peut espérer vivre 90 ans. Cet allongement de l’espérance de vie trouve en partie son explication 20 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 dans les progrès de la médecine, et surtout dans les progrès réalisés en matière d’hygiène alimentaire. Ces progrès ont fait chuter la mortalité infantile, ce qui a entraîné une augmentation de la moyenne de l’espérance de vie. Ainsi, une personne de 50 ans en 1990 pouvait espérer vivre encore 24 ans ; une personne qui souffle ses 50 bougies en 2006 peut prétendre vivre encore 30 ans. Le fameux baby-boom s’est produit après la Seconde Guerre mondiale. Le taux de fécondité, de 2 enfants en 1940, a fait un bond à 3 en 1946. Ensuite, il s’est maintenu à un niveau supérieur à 2,8 jusqu’en 1960. La pyramide des âges s’en est trouvée profondément marquée. C’est cette vague de naissances, durant cette période, qu’on appelle le baby-boom. Les premiers babyboomers ont 60 ans en 2006. Précisons qu’il y a deux baby-booms. Le premier, dont nous avons parlé, intéresse le plus les industriels et concerne les personnes nées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le second baby-boom, dû à la baisse des naissances pendant la Première Guerre mondiale, est représenté par les personnes qui ont actuellement entre 80 et 85 ans. Ce second groupe de population à fort taux de croissance intéresse plus particulièrement les acteurs de la santé des personnes très âgées, comme les maisons de retraites, les services à domicile, etc. Le vieillissement de la population est un phénomène mondial Au niveau mondial, le vieillissement actuel de la population est un phénomène inédit dans l’histoire de l’humanité. L’accroissement de la proportion des plus de 60 ans s’accompagne d’une baisse de la proportion des moins de 15 ans. D’ici à 2050, le nombre de personnes âgées dans le monde dépassera celui des jeunes, pour la première fois dans l’histoire du genre humain (source : theMatureMarket.com). Actuellement le nombre de personnes de plus de 60 ans est estimé à 630 millions. Il devrait atteindre les 2 milliards vers 2050. C’est en Asie que vivent 54 % de la population âgée, 24 % vivant en Europe. La moyenne des âges – ou âge médian – de la population mondiale est actuellement de 26 ans, le Yémen étant le pays le 21 plus jeune (16 ans), et le Japon, le plus vieux (41 ans). Dans les régions développées, les personnes de 60 ans et plus représentent actuellement près du cinquième de la population. D’ici à 2050, elle devrait en constituer le tiers. Dans les régions en voie de développement, les plus de 60 ans ne représentent actuellement que 8 % de la population, mais ils en représenteront près de 20 % en 2050. En 2050, l’âge médian de la population mondiale devrait passer à 36 ans. C’est alors le Niger qui aurait la population la plus jeune, avec un âge médian de 26 ans. L’Espagne serait le pays le plus vieux avec un âge médian de 55 ans. La classe d’âge qui connaît actuellement la progression la plus rapide au monde est celle des personnes les plus âgées, c’est-à-dire les plus de 80 ans, dont le taux de croissance annuel est de 3,8 %. Elle représente 12 % du nombre total de personnes âgées. L’Union européenne est la région du monde qui compte la plus forte proportion de personnes âgées. Les plus de 65 ans y représentent 15 % de la population, contre 14 % au Japon et 13 % aux États-Unis. Les plus de 65 ans sont actuellement 105 millions, ils devraient être 147 millions en 2025 et 172 millions en 2050. Le vieillissement de la population est plus important dans les régions du Sud de l’Europe. En 2050, 32,5 % de la population du Sud aurait plus de 65 ans, contre 25 % dans le Nord. Le Japon, le pays le plus vieux du monde actuellement L’étude de ce qui se passe au Japon peut être intéressante pour les gouvernements, mais aussi pour les entreprises. Le vieillissement de la population y est préoccupant : depuis 2012 le nombre de décès est supérieur au nombre de naissances. Le Japon est le pays où l’on vit le plus vieux (84 ans pour les femmes et 77 ans pour les hommes), mais c’est aussi un des pays qui vieillit le plus vite. Le pourcentage de Japonais de plus de 65 ans est passé de 7 % en 1970 à 17 % en 2000. Cette tranche d’âge devrait représenter 22 % de la population en 2010 et 25 % en 2025. Parallèlement, on assiste à un recul de la natalité, avec un taux de 1,38. 22 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les conséquences de ce vieillissement accéléré sont nombreuses. Au poids financier de la prise en charge d’une population de plus en plus âgée s’ajoutent les risques déflationnistes liés à la réduction de la population et à son vieillissement. Depuis 1998, la proportion des plus de 65 ans est plus grande que celle de moins de 15 ans. Les personnes âgées étant moins enclines à consommer, leur nombre grandissant risque de contribuer à réduire les profits des entreprises. L’exemple de la Chine : vieille avant d’être riche ? Régulièrement, nous entendons que la Chine est une menace économique pour l’Europe et de l’Amérique du Nord. L’avenir nous le dira mais je pense que c’est oublier un élément important : la démographie. Le changement de la Chine en ce qui concerne le profil de sa population risque d’être dramatique. Durant la prochaine décennie le nombre des plus de 65 ans va augmenter très fortement, accompagné d’une chute de la population en âge de travailler, ce qui va impacter fortement l’économie. « La vitesse de vieillissement de ce pays sera plus rapide que dans aucun autre pays du Monde » explique Allien Moore, fondateur et éditeur du magazine asiatique Adsia lors d’une conférence sponsorisée par theMatureMarket.com. Le ratio du nombre de personnes en âge de travailler est actuellement de 8 pour un retraité. D’ici à 2030 il va chuter à 2. D’ici là, le nombre de personnes âgées sera plus important que celui des USA. Comprendre le vieillissement L’espérance de vie L’espérance de vie en France a fortement progressé dans les dernières décennies en raison de la baisse de la mortalité infantile, des progrès dans les domaines alimentaire et de l’hygiène, et des progrès de la médecine. Selon les résultats des enquêtes santé de l’Insee et du Credes, en 1981 et 1991, 23 l’espérance de vie en bonne santé a progressé de 3 ans, contre 2,5 ans pour l’espérance de vie à la naissance. On constate de grandes inégalités dans l’espérance de vie et l’état de santé des Seniors. Les différences sociales expliquent en partie ces inégalités. L’espérance de vie à 60 ans d’un ouvrier est de 17 ans, de 19 ans pour les employés et monte à 23,5 ans pour les cadres de la fonction publique. Au fil des années, ces inégalités ont tendance à s’accentuer. Les facettes du vieillissement Le vieillissement transforme un adulte en bonne santé en un individu plus fragile, plus vulnérable à de nombreuses maladies, et dont le pouvoir de concentration et les réserves d’énergie diminuent. Comment fonctionne le processus du vieillissement ? Pour simplifier, on peut dire que les cellules du corps se renouvellent sans cesse. Or les nouvelles cellules, qui ne sont que des copies des cellules originelles, sont à chaque fois « moins » bonnes, ce qui engendre une dégradation cellulaire générale. Celle-ci est programmée génétiquement, mais elle est aussi influencée par notre mode de vie. De nombreux facteurs entrent en compte : la pratique du sport, l’alimentation, le niveau social, la profession, la réaction face aux émotions et au stress. Il y a plusieurs âges : il y a l’âge chronologique, inventé par l’homme, qui n’est qu’un repère dans le temps, l’âge biologique (notons que ce concept n’est pas encore bien défini), qui indique le degré « d’usure du corps », et l’âge subjectif, qui correspond à l’âge que l’on pense avoir. En ne s’intéressant qu’à la sénescence (le vieillissement biologique), on fait l’impasse sur d’autres aspects importants du vieillissement : ses aspects psychologiques et sociaux. Des travaux du psychologue Carl Jung (A Life of Jung, Ronald Hayman, 1999) nous expliquent que dans la première partie de sa vie, l’homme s’efforce de créer une image de soi témoignant de son importance sociale et de son accomplissement dans la société. Le milieu de la vie d’un individu est un tournant crucial, où il peut enrichir sa personnalité. Moins préoccupé par sa place dans le monde extérieur, il peut faire émerger son « soi » profond par le processus 24 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 « d’individualisation ». L’issue est essentiellement de trouver en soi les forces pour accomplir son propre développement (source : Jean-Claude Henrard, directeur du Réseau fédération de recherche ; RFR, Santé Société et Solidarité ; Credes). Malheureusement, il est difficile de respecter ces cycles de vie dans une société « utilitariste » comme la nôtre. Le refus du vieillissement conduit à conserver le plus longtemps possible des attitudes et des activités dites « jeunes ». Pour remédier à ce décalage, certains se « fabriquent » un masque pour se protéger du monde extérieur. C’est le cas d’une grande majorité des babyboomers, ce qui explique en partie le nombre d’études concluant que les membres de cette génération sont « comme les jeunes », ce qui est fondamentalement faux. La dimension sociale du vieillissement est aussi essentielle pour comprendre les Seniors. Vieillir a une signification différente selon les groupes sociaux, mais également selon les sexes. Dans nos sociétés, le statut traditionnel de l’âge dépend de l’emploi productif chez l’homme et des événements du cycle de reproduction chez la femme. L’avancée en âge des femmes et le début de la ménopause entraînent souvent une diminution de l’estime de soi. Cependant, la génération du baby-boom tend à réduire ces différences entre les hommes et les femmes. Les capacités intellectuelles selon les âges Est-on moins agile intellectuellement lorsqu’on arrive à la cinquantaine ? Rien n’est plus faux. Au contraire, dans certains cas, un cinquantenaire possède des facultés intellectuelles supérieures à celles d’un jeune de 25 ans. Comment cela s’explique-t-il ? Contrairement à une idée reçue, ce n’est pas à 25 ou 30 ans que nos capacités intellectuelles sont le plus développées. À 55 ans, on est tout aussi capable d’apprendre une langue étrangère, par exemple, que n’importe qui d’autre. Selon les études récentes sur le sujet, la capacité linguistique est à son meilleur niveau à 46 ans et ne décline vraiment qu’à l’âge de 61 ans. Quant à la capacité d’orientation, elle atteint son apogée à 53 ans et commence à décliner à 61 ans. À la cinquantaine, la capacité de déduction reste stable, avec cependant un léger déclin. Là encore, c’est à partir de 25 l’âge de 60 ans que cette faculté se dégrade (source : Arbeitsamt Deutschland). Ce constat sur les capacités intellectuelles rejoint les études faites sur la mémoire. L’efficacité du cerveau n’est pas liée à sa dimension. Ce n’est pas parce que l’on a un cerveau plus gros que l’on est plus intelligent. La preuve : des scientifiques ont constaté que le cerveau d’Anatole France était étonnamment plus petit que la moyenne. En fait, ce qui compte, ce sont les connexions entre neurones. Plus les connexions neuronales sont nombreuses, plus les capacités de mémorisation sont grandes. Comment se développe le réseau neuronal ? Les nouvelles informations stimulent et sollicitent les neurones et leurs connexions qui sont ainsi amenées à se développer. Plus ils ont de contacts entre eux, plus l’information peut circuler rapidement et emprunter divers chemins. Mais attention ! L’évolution inverse est également possible. Si le cerveau n’est plus sollicité par l’information, le réseau neuronal tend à se détériorer et avec lui les capacités intellectuelles. On peut donc dire que si l’on est en bonne santé, la mémoire tend à être plus efficace à l’âge de 60 ans qu’à celui de 25. Il ne faut pas oublier non plus que certaines fonctions physiologiques (l’acuité visuelle, l’audition, la vitesse de traitement de l’information) s’altèrent avec l’âge. C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles les Seniors euxmêmes croient que leurs capacités intellectuelles baissent. Effectivement avec une acuité visuelle ou auditive déficiente, la réceptivité du cerveau est entravée. Mais ceci n’a rien à voir avec ses capacités intrinsèques. L’effet du vieillissement de la population sur la consommation Jusqu’à une période récente, les études montraient que la retraite signifiait une baisse de la consommation. Le pic de consommation, qui était atteint vers 49 ans en 1995, s’est déplacé régulièrement pour se situer aujourd’hui à 54 ans en 2012. D’une manière générale, la prospective sur la consommation des plus de 50 ans doit prendre en compte deux paramètres importants : les effets de l’âge et les effets de génération. Selon les études sur les 26 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 premiers, la consommation a tendance à baisser avec l’avancée en âge, et c’est ce que nous avons noté par le passé. De son côté, l’étude des générations met en lumière une grande variété des comportements de consommation parmi les personnes de cohortes différentes. Par exemple, nous savons que les baby-boomers consomment plus que les Seniors actuels ne le faisaient au même âge. Les études ont montré qu’une baisse de la consommation accompagnait l’avancée en âge. Les effets d’âge ont un impact réel sur la consommation pour plusieurs raisons : une réduction des besoins, une moindre envie de consommer, une plus grande peur de la dépendance, qui pousse les plus âgés à économiser davantage. C’est ainsi que la vente à distance enregistre une forte chute de la consommation après 77 ans (jusqu’à – 50 % sur 1 à 2 ans). Cela dit, nous devons également tenir compte des effets de génération. À âge égal, les générations ne consomment pas de façon équivalente. L’étude des générations, menée par Senior Strategic Consulting, aide à comprendre ce phénomène. Il apparaît que l’histoire de la vie d’une personne influence grandement son attitude par rapport à la consommation. Les personnes qui ont vécu leur adolescence pendant des périodes difficiles de guerre ou de restriction ont tendance à développer un comportement de consommateur plus prudent. La génération des « Grands Seniors » (personnes âgées de plus de 80 ans) n’a jamais vraiment participé activement à la consommation telle que nous la connaissons de nos jours. La génération de Masters (50-60 ans) a une histoire complètement différente. Les baby-boomers ont vécu leur adolescence après la période de restriction qui a suivi la Seconde Guerre mondiale. Ils ont ainsi pu se consacrer plus facilement à leurs propres besoins. De plus, ils ont pleinement bénéficié de la société de consommation créée par les générations précédentes. La frénésie de consommation des baby-boomers devrait continuer dans les années à venir, sauf s’ils craignent que leur niveau de vie ne baisse significativement à l’avenir. La génération des « Jeunes Seniors » (57-67 ans), quant à elle, a un rapport à la consommation qui pourrait être qualifiée d’intermédiaire. Nous remarquons, depuis plusieurs années, que 27 cette génération consomme de plus en plus, comme si on leur avait dit : « Pendant votre vie, vous vous êtes souvent occupé des autres, il est temps maintenant de penser à vous. » Vers un recul de la vieillesse Parmi la génération née en 1800, seul un tiers a dépassé 60 ans, et 6,8 % seulement ont atteint 80 ans. Parmi la génération née en 1900, plus de la moitié (54 %) étaient encore vivants à 60 ans, et 26 % ont atteint 80 ans. Autrement dit, avoir 60 ans signifiait au 19e siècle atteindre l’âge de la vieillesse : ceux qui y parvenaient étaient des « survivants », à l’espérance de vie limitée. C’était déjà plus courant un siècle plus tard et la très grande majorité des babyboomers va connaître la soixantaine. S’agit-il toujours de vieillesse, quand certains d’entre eux auront encore au moins l’un de leurs parents à 60 ans ? Si vieillir signifie que l’on se rapproche de la mort, est-on vieux lorsqu’une génération, au sens familial du terme, nous en sépare, et que l’on peut espérer vivre encore de longues années ? La nouvelle place des sexagénaires dans l’ordre familial constitue un autre changement majeur. Il était autrefois exceptionnel qu’un adulte eût déjà des petits-enfants tout en ayant encore au moins l’un de ses parents ; aujourd’hui, c’est beaucoup plus courant. À quel âge est-on considéré comme vieux et à quel âge se considère-t-on comme vieux ? Pour répondre à cette double question, certains définissent l’âge du vieillissement non plus à partir d’un critère d’âge fixé une fois pour toutes (souvent en référence à l’âge légal de la retraite), mais d’une façon « glissante », au cours du temps, en tenant compte des données épidémiologiques objectives : l’âge de la vieillesse est, selon cette définition, le moment où l’on commence à souffrir de réelles incapacités. Mesuré ainsi, l’âge de la vieillesse n’a jamais cessé de reculer : d’environ 60 ans pour les hommes et 65 ans pour les femmes en 1930, il passe, au début des années 2000, à 73 ans pour les hommes et 79 ans pour les femmes. Selon cette définition, la proportion de personnes dites âgées aurait baissé, passant de 10 % de la population en 1980 à 6,5 % en 2000. Suivant les mêmes 28 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 calculs, l’âge de la vieillesse va continuer de progresser pour atteindre 82 ans en moyenne en 2040. La vieillesse semble, en quelque sorte, s’être déplacée et ce mouvement est appelé à se poursuivre dans les années qui viennent. Quant à la perception de notre propre vieillissement, les études sur l’âge subjectif montrent qu’elle évolue sans cesse, qu’en vieillissant les personnes se sentent plus jeunes. En moyenne, une personne de 60 ans « pense » À partir de quel âge peut-on dire qu’une personne est vieille ? Âge Réponses des moins de 50 ans : Réponses des plus de 50 ans : 50 7 % 1 % 55 3 % 1 % 60 11 % 2 % 65 8 % 5 % 70 23 % 14 % 75 10 % 13 % 80 13 % 22 % 85 4 % 7 % 90 8 % 23 % Source : SeniorStrategic Consulting, 2010. ainsi en avoir entre neuf et douze de moins. Ce mouvement s’accélère au cours du vieillissement pour ralentir aux alentours de 70 ans. À cet âge, nous notons une certaine rupture. Nous avons mené une étude début 2012 sur la perception de la vieillesse en posant la question suivante : « Pour vous, à partir de quel âge peut-on dire qu’une personne est vieille ? » Les résultats montrent que l’on situe l’âge de vieillesse non seulement beaucoup plus tard par rapport aux études précédentes, mais aussi de plus en plus tard à mesure que l’on vieillit. Une personne est dite vieille à 70 ans pour 23 % des moins de 50 ans. Les plus de 50 ans sont 23 % à penser qu’on est vieux à partir de 90 ans 29 Ces résultats montrent une dissociation très nette entre l’âge chronologique et l’âge subjectif. Autrement dit, bien que les effets du vieillissement soient tangibles, on se construit mentalement une image différente de son propre vieillissement. Comme nous le verrons dans le Chapitre 6, cette différence est d’ailleurs très importante pour les publicitaires. Vers la maturité psychologique Pour la première fois, la majorité des Français ont atteint ou dépassé l’âge adulte, ce moment de la vie où les forces de motivation liées à son « propre développement » deviennent plus importantes que les comportements. La pyramide des besoins selon Abraham Maslow explique ce phénomène : les motivations de chacun résultent de l’insatisfaction de certains de ses besoins. Les travaux de Maslow permettent de classer les besoins humains par ordre d’importance en plusieurs niveaux, la satisfaction des besoins d’un niveau engendrant les besoins du niveau suivant. L’idée de Maslow est qu’on ne peut agir sur les motivations « supérieures » d’une personne, qu’elle soit adulte ou enfant, qu’à la condition expresse que ses motivations primaires (besoins physiologiques et de sécurité) soient satisfaites. Parcourons rapidement les différents niveaux de besoins. Du niveau inférieur au supérieur, nous trouvons les besoins physiologiques, les besoins de sécurité, les besoins d’appartenance, les besoins d’estime et les besoins d’auto-accomplissement. Les besoins physiologiques sont des nécessités vitales à l’être humain, comme respirer, se nourrir, dormir et se loger. Les besoins de sécurité proviennent de l’aspiration de chacun d’entre nous à être protégé physiquement et moralement. Ce sont des besoins complexes dans la mesure où ils recouvrent une part objective – il nous faut assurer notre sécurité et celle de notre famille – et une part subjective liée à nos craintes, nos peurs et appréhensions, qu’elles soient ou non rationnelles. Les besoins d’appartenance sont les besoins d’amour et de relations avec les autres. Ce sont les besoins d’appartenance à un groupe, qu’il soit social, relationnel ou statutaire. Le premier groupe d’appartenance d’une personne est la famille. Les besoins 30 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 d’estime correspondent aux désirs de considération, de reconnaissance et de gloire. La mesure de l’estime de soi peut aussi être liée aux gratifications qui nous sont accordées. Le besoin d’auto-accomplissement est le besoin de se réaliser, d’exploiter et de mettre en valeur son potentiel personnel dans tous les domaines de la vie. Ce besoin peut prendre des formes différentes selon les individus. Pour certains, ce sera les études, l’apprentissage, le développement des compétences et des connaissances, etc. Ces différents besoins sont satisfaits successivement. D’après Maslow, ce processus prend en moyenne cinq ou six décennies. Maintenant que les personnes de plus de 40 ans sont devenues majoritaires, les professionnels du marketing doivent s’intéresser aux notions d’auto-accomplissement. À ce niveau de besoin, on ne ressent pas les choses et on n’agit pas comme quand on était jeune. Nos exigences sont bien souvent plus précises. Avant le milieu de la vie, le « soi sociétal » domine nos comportements. Mais autour de l’âge de 40 ans, si nous avons satisfait nos besoins « élémentaires » (physiques, sécurité, amour), nous commençons à découvrir notre « soi réel ». Le « soi réel » est plus introspectif, plus individualiste (moins sujet à l’influence des autres et des événements) et plus autonome. C’est l’une des raisons qui explique que les plus âgés sont moins sensibles aux publicités actuelles. Avant que le « soi réel » émerge, il est difficile de se rendre compte de l’importance de son « rôle ». Dans ce sens, le jeune âge des responsables marketing et de leurs collaborateurs dans les agences de communication et de marketing va poser de plus en plus de problèmes. L’apparition du « soi réel » peut se faire doucement ou de manière explosive. Les personnes pratiquant une forme ou une autre de développement personnel sont en avance sur ce chemin. Certains d’entre nous ressentent fortement ces tensions et se réveillent simplement un matin, surpris de voir comme le monde a changé. Beaucoup de personnes de plus de 50 ans dans notre société de consommation sont à des « niveaux » plus complexes que certains professionnels du marketing, conditionnés par une focalisation extrême sur le marché des jeunes, ont du mal à comprendre. Résultat : la grande majorité des stratégies publicitaires sont 31 adaptées aux moins de 50 ans et ne correspondent pas aux Seniors. Les distances sont telles que certains Seniors, même jeunes, ne comprennent même plus les publicités. Lors d’une étude, une personne de 64 ans nous disait : « Je n’arrive plus à comprendre la majorité des publicités. Elles vont trop vite et sont tellement en décalage que je ne fais plus d’efforts maintenant. » Les chiffres sont là : 86 % des plus de 50 ans pensent que la publicité ne leur est pas destinée ! Ces différences importantes dans les « cycles de la vie » sont également développées par le célèbre psychologue Milton Ericksson. Ce qu’ignorent les professionnels du marketing : leurs idées, telles que « les Seniors acceptent leurs âges », « les Seniors aiment les nouveautés », « les nouveaux Seniors ont les mêmes comportements que les autres » (exemples issues d’études récentes sur les Seniors) sont tout simplement des généralisations fausses. Bien sûr nous pourrons toujours trouver des contre-exemples. Lorsqu’ils travaillent sur les Seniors, certains professionnels du marketing s’interrogent : ils trouvent ces clients « mystérieux ». Les méthodes de recherche traditionnelles sont impropres à les éclairer sur les comportements si étranges des Seniors. Le directeur marketing d’un grand groupe pharmaceutique nous a appelés récemment pour se plaindre : « Nous faisons des études sur le marché des Seniors comme nous le faisions avant, et les résultats sont moins bons. » Après enquête, la cause de ce dépit était simple : les études étaient menées par des jeunes ou des personnes avec une « vision jeune » qui ne correspondait pas à l’état d’esprit des Seniors. Nous disons souvent que nous ne réalisons pas d’études sur les Seniors avec les méthodes appliquées aux plus jeunes. Les comportements des personnes de moins de 40 ans sont souvent faciles à prévoir parce que leur vision du monde et leurs comportements sont fondés sur leur « soi social ». Les comportements d’un groupe de jeunes donnent généralement une bonne idée des comportements des individus du groupe. Avec les Seniors, ce n’est plus le cas. Ils ont tendance à être plus détachés de l’influence d’un groupe et sont donc souvent jugés plus difficiles à analyser et à comprendre. L’avancée en âge doit maintenant être perçue comme un chemin vers une plus grande maturité. Bien sûr, certaines 32 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 capacités sont théoriquement de moins en moins « opérationnelles » à mesure qu’on approche d’un « grand âge ». Mais les baby-boomers entrent seulement dans une autre phase de leur vie. Certains « maîtres spirituels » parlent d’un chemin de l’ego vers l’» être ». Les Seniors sont souvent plus réfléchis, plus posés et prennent plus de temps pour choisir. Cela n’a rien à voir avec de supposés effets du vieillissement. C’est au contraire le signe d’une plus grande maturité, d’une plus grande intelligence de ces valeurs. En quoi est-ce important pour les professionnels du marketing ? Ces derniers doivent prendre en compte cette notion du « développement » de la personne avec l’avancée en âge. Les conséquences économiques du vieillissement de la population Le nombre croissant de personnes âgées est bien souvent perçu comme une charge pour la société : augmentation des pensions de retraite, des frais médicaux, des risques de dépendance, etc. Tous les experts s’accordent pour dire que les conséquences de ce phénomène seront importantes. Mais les opinions divergent : certains pensent que l’économie va « s’écrouler », d’autres estiment au contraire que les gains de productivité et qu’une croissance économique plus forte vont permettre de payer les dépenses engendrées par le vieillissement de la population. Nous n’allons pas passer en revue tous les avis de ces experts, mais simplement présenter un bref aperçu des principales composantes du vieillissement global qui constituent de facto un ensemble d’indicateurs socio-économiques majeurs. Leur compréhension est importante pour quiconque est en charge de définir les stratégies de développement d’une entreprise pour les prochaines années. Selon l’OCDE, en 2001, les dépenses de retraite de ses pays membres représentaient en moyenne 7,5 % du PIB. Ces dépenses de retraite sont appelées à augmenter de 3 à 4 points de PIB d’ici à 2050. Les gouvernements pourront combler ces nouveaux besoins de financement avec un ensemble de mesures qui seront souvent jugées comme impopulaires mais indispensables. Parmi ces 33 mesures, citons l’augmentation des cotisations et des taxes, la diminution des dépenses et des prestations de retraite et de santé, les réductions d’autres dépenses et investissements publics. Ces dernières années, l’âge moyen de départ à la retraite a progressivement diminué. L’âge ouvrant droit à une pension de régime public est actuellement fixé, dans la plupart des pays de l’OCDE, à 65 ans. Font exception la Corée et la France, où l’âge officiel de la retraite a été fixé à 60 ans, et la Norvège, où il est de 67 ans. Plusieurs pays, dont la France, ont, dans le passé, mis en place des systèmes de départ anticipé à la retraite qui permettent aux travailleurs de prendre leur retraite de deux à cinq ans avant l’âge normal. Autrement dit, nous vivons de plus en plus vieux et partons à la retraite de plus en plus jeunes. Le relèvement de l’âge officiel de départ à la retraite est une mesure que certains pays ont commencé à mettre en place. Aux États-Unis, l’âge de la retraite est 67 ans. Au Japon, les salariés prennent leur retraite vers 69 ans. Des experts préconisent d’allonger encore la durée de cotisation nécessaire pour toucher une pension pleine. Certains pays ont développé des mesures pour décourager les départs anticipés à la retraite. Il sera en effet difficile d’augmenter l’âge effectif de départ à la retraite sans remettre en cause les mécanismes incitatifs qui poussent les salariés à prendre une retraite anticipée (ou poussent les entreprises à encourager leurs salariés dans ce sens). De fait, comment peut-on penser cotiser plus de quarante ans, en commençant à travailler à 25 ans et en étant écarté des entreprises à l’âge de 55 ans ? La situation n’est pas prête de s’arranger dans le très court terme pour les plus de 50 ans. En effet, 60 % des 300 directeurs des ressources humaines interrogés par la Cegos annoncent vouloir poursuivre leurs pratiques actuelles de retraites anticipées. Il est d’ailleurs surprenant d’entendre des cinquantenaires dirent aux plus jeunes « Je vous plains, vous n’aurez pas de retraites », alors que ce sont eux qui sont les premiers concernés ! Du côté des dépenses de santé, le Credes a publié en mars 2010 les conclusions de son étude dans le Bulletin d’information en économie de la santé. Il y a plusieurs scénarios, qui sont fonction de plusieurs paramètres, notamment la relation entre l’âge et les dépenses de santé, l’évolution future de la 34 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 morbidité (autrement dit de l’espérance de vie), etc. Le Credes est parti d’un scénario dans lequel l’augmentation de la part des personnes âgées dans la population se traduit par une augmentation des dépenses médicales par tête. Si l’allongement de la vie s’accompagne d’une amélioration de l’état de santé, nous assisterons alors à réduction des dépenses par tête. Par contre, si l’amélioration de l’état de santé est due à un accroissement de l’intensité des soins, alors l’augmentation de la proportion de personnes âgées pourrait se traduire par une forte augmentation des dépenses par tête. Le Credes conclut « que le vieillissement n’augmente pas fatalement la dépense, par un processus inéluctable, mais est largement affaire de choix et d’arbitrages sociaux ». De son côté, l’OCDE conclut dans une étude récente que les pressions budgétaires résultant du vieillissement démographique dans les pays de l’OCDE pourraient accroître d’environ 6 % du PIB les dépenses publiques liées aux personnes âgées (retraites et soins de santé) d’ici à 2050. Dans notre étude « Les baby-boomers en Europe », nous avons pris conscience que la manière dont les gouvernements annonçaient les réformes des systèmes de retraite pourrait bien avoir un impact fort sur la consommation des 50-60 ans. Bon nombre d’entre eux assurent que leur première préoccupation est le niveau de revenus qu’ils auront pendant leur retraite. La majorité des baby-boomers interrogés n’avaient pas fait de calculs particuliers. Par contre, ceux qui avaient simulé leur pension future étaient prêts à réduire leurs dépenses pour pouvoir économiser davantage. L’avenir du marché des Seniors et de l’économie en général dépend en grande partie du comportement des baby-boomers dans les années à venir. Les conditions économiques des Seniors Le pouvoir d’achat des 50 ans et plus en France, estimé à 132 milliards d’euros, commence à intéresser les entreprises. « Jamais les Seniors n’auront été aussi aisés », peut-on lire dans de nombreux articles et livres. S’il est vrai que les revenus des 50-64 ans sont les plus élevés de l’ensemble des ménages, il convient de regarder de plus près la situation pour en comprendre les raisons et 35 prendre conscience des disparités dans ces revenus. Aux USA le U.S. Census bureau dit que les 78 millions d’américains de 50 ans et plus contrôlent 28 milliards de dollars ou 67% des finances des USA explique Brent Green consultant américain spécialiste du marché des Baby boomers Les revenus actuels en France Si l’on prend les plus de 50 ans, nous avons une très grande variété de cas de figures. L’enquête emploi de mars 2002 réalisée par l’Insee indique que le taux d’activité des 50-54 ans est de 82,3 %. Il tombe à 61,2 % pour les 55-59 ans et à 16,1 % pour les 60-64 ans. Si l’on définit l’âge des Seniors à 50 ans, on mêle actifs et retraités. D’une manière générale, la période de « crise » que nous connaissons depuis le milieu des années 1970 a frappé essentiellement les jeunes et a en partie épargné les retraités actuels. C’est ainsi que les revenus individuels des plus de 60 ans ont progressé de 0,9 % par an, en euros constants (source : Insee). Cette hausse est due essentiellement à plusieurs facteurs : l’amélioration de la protection contre le risque-vieillesse jusqu’au milieu des années 1980, l’allongement de la vie professionnelle, en particulier chez les femmes, la hausse des qualifications et des salaires des générations de retraités les plus jeunes. L’Insee indique dans les Revenus et patrimoines des ménages 2002-2010 que les ressources des retraités les plus modestes ont plus progressées que la moyenne. Nous retrouvons les Seniors les plus aisés chez les 50-64 ans. Dans les tranches d’âges supérieures, les revenus ont tendance à baisser. En 2001, les retraités âgés de 60 ans ou plus ont perçu un montant mensuel total de pension, brut de prélèvements sociaux, égal en moyenne à 1 126 euros (source : Le Marketing Book Seniors, Secodip). Ces revenus (hors revenus du patrimoine) sont inférieurs de 17 % à ceux des actifs de moins de 60 ans. Si l’on y ajoute les revenus du patrimoine, le niveau de vie des retraités est presque égal. Si l’on parle des plus de 50 ans, la situation change, et c’est l’un des éléments importants à prendre en compte pour les années à venir. Les revenus des plus de 50 ans 36 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 incluant le patrimoine sont supérieurs de 31 % à la moyenne de l’ensemble des actifs. La génération des baby-boomers est la plus aisée. Même si 35 % d’entre eux possèdent le BEPC, un BEP ou un CAP, les diplômés de l’enseignement supérieur sont déjà nettement plus nombreux que dans la génération des jeunes retraités. Les baby-boomers ont connu la période faste des Trente Glorieuses et sont pour beaucoup à l’apogée de leur carrière. C’est aussi chez eux que nous retrouvons le plus grand nombre de femmes susceptibles de toucher des retraites confortables. Cependant, il s’agit d’une donnée toute relative, puisque les réformes des systèmes de retraites font craindre le pire à de nombreux économistes. De plus, la génération du baby-boom est frappée de plein fouet par les départs en préretraite et le chômage. Une forte disparité de revenus On constate une grande disparité dans les revenus des retraités, selon qu’ils sont d’anciens salariés ou d’anciens indépendants. Des différences significatives sont également fonction du sexe, de la durée de cotisation, du statut patrimonial, de l’âge et du système de retraite. En ce qui concerne le sexe, les ressources des femmes retraitées sont de 41 % inférieures à celles des hommes. Plusieurs explications sont avancées : des parcours professionnels moins remplis, des salaires inférieurs, etc. Concernant la durée de cotisation, les débats sur les réformes des systèmes de retraite ont mis en lumière les grandes différences de durée de cotisation entre les personnes. Ce sera une donnée importante à considérer dans les années à venir. Beaucoup d’études montrent que les 50-55 ans commencent seulement à prendre conscience de l’impact important des nouveaux modes de calcul sur leurs futures pensions. Dans de nombreux pays, plusieurs experts s’alarment du faible taux d’épargne des baby-boomers. Aux États-Unis, où, certes, le système de retraite est différent et moins favorable, déjà huit baby-boomers sur dix se disent prêts à travailler pendant leur retraite. La disparité entre les revenus des retraités est également importante en fonction des niveaux de patrimoine. Près d’un quart des retraités parmi les plus aisés possèdent la moitié du patrimoine 37 global des retraités, ceci en dépit de l’augmentation plus importante des revenus des retraités les plus modestes. C’est également chez les indépendants que nous trouvons les revenus issus du patrimoine les plus importants. Ces rétributions complètent des pensions de retraite souvent limitées. Notre système de retraite a permis de faire progresser les revenus des retraités les plus modestes. Ainsi, entre 1996 et 1999, les revenus individuels déclarés ont augmenté de 3 % chez les anciens agriculteurs, et de 2,4 % chez les autres indépendants. D’après l’Insee, 5 % des retraités étaient en situation de pauvreté en 1997, contre 28 % au début des années 1970. Chez les Seniors actifs, on trouve également des disparités. Le taux d’emploi des « salariés âgés entre 50 – 64 ans » est de 34,8 % (ce qui est le pourcentage le plus faible de tous les pays européens). Evolution politique Au moment où le parti des retraités a créé la surprise aux élections 2006 en Israel, en remportant, suffisamment de suffrages pour obtenir sept députés siégés à la Knesset, nous pouvons nous demander quel sera l'impact du vieillissement de la population sur la politique et notamment est-ce qu'il existe une tendance à plus voter pour les parties de droite. D’après, Jean-Philippe Viriot-Durandal, ( maître de conférences en sociologie à l’université de France-Comté, et membre du GEPECS, Université Paris V René Descartes - La Sorbonne Il) il semblerait que, contrairement à l’idée reçue, la plus grande sensibilité aux idées conservatrices ne soit pas imputable exclusivement à un effet d’âge. Vieillir ne pousserait pas inexorablement au repli sur des valeurs conservatrices. Le phénomène est assez complexe. Pour au moins trois raisons, dans le cas français. Il semblerait que le positionnement droitier des plus de 60 ans assimilé jusqu’à présent à l’augmentation du conservatisme avec l’âge ne soit pas immuable car en partie lié à des effets de structure et de génération. La structuration sociologique de l’électorat des plus de 60 ans change progressivement au profit de population plus favorables aux partis de gauche (moins d’agriculteurs, plus de salariés, moins de 38 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 catholiques pratiquants, travail des femmes, vote féminin moins à droite…). Les effets de la mortalité différentielle qui jouaient en faveur de la droite devraient aussi évoluer. Les femmes et les catégories sociales à plus forte espérance de vie votaient plus pour les partis conservateurs, mais cette tendance semble devoir se réduire. Des considérations d’ordre plus générationnel (apparition des cohortes du baby-boom) sont de nature à faire évoluer ce que l’on considérait jusqu’alors comme un invariant de l’effet d’âge sur le positionnement politique. Si l’effet d’âge existe probablement dans cette génération il n’est pas suffisamment puissant pour compenser son inclinaison pour les valeurs de gauche. La représentation du « pouvoir gris » comme force massivement de droite doit donc être tempérée par l’apparition progressive des baby-boomers dans les cohortes de plus de 60 ans, qui devraient mitiger l’orientation conservatrice du vote. Mais si on entend par conservatisme une attitude opposée à toute forme de changement et un repli systématique sur le passé et l’existant, peut-on vraiment identifier le virage à gauche des retraités comme un ancrage dans des attitudes plus progressistes? La dichotomie conservatisme / progressisme qui a profondément marqué les clivages politiques dans la génération des jeunes activistes des années 70 a-t-elle aujourd’hui le même sens et les mêmes connotations? Les défis politiques et sociaux du XXIème siècle qui passent sans doute par la réforme de l’État, de ses domaines d’action et de ses modes d’intervention peut impliquer la création de nouveaux dispositifs différents de ceux qu’ont connus les générations du Baby boom. Les lignes frontières entre les responsabilités individuelles, familiales et publiques pourraient ne plus ressembler au paysage familier de la seconde moitié du vingtième siècle et provoquer de la part de ceux qui ont été socialisés dans ce contexte des réactions hostiles. Le conservatisme « moderne » ne consisterait-il pas à refuser de se projeter dans de nouvelles formes d’organisation des solidarités pour s’en tenir exclusivement à la défense de modèles anciens connus et éprouvés? Mais en même temps, les évolutions actuelles dans l’architecture des solidarités publiques peuvent-elles faire l’économie du constat de l’amélioration considérable des conditions de vie des retraités intervenue au cours de ces 50 dernières années? C’est précisément de ces améliorations dont témoignent aujourd’hui une partie de la génération du Baby boom. Dépositaires de cette mémoire sociale dont les plus jeunes ne disposent pas nécessairement, les plus 39 engagés des baby boomers appréhendent les évolutions actuelles au regard de l’histoire de l’Etat providence qui a balisé leur existence (développement des maternités, des crèches, du système scolaire et universitaire, de la protection sociale….). C’est sur la base de cette conscience, à la fois historique et politique, qu’ils dénoncent un retour en arrière, avec le recul (présumé) de l’intervention publique, une remise en question des acquis sociaux et finalement la diffusion d’une insécurité sociale semblable à celle qu’avaient vécu leurs parents avant-guerre. Le progressisme offensif des années 70 porté par une partie de cette génération ferait-il place en définitive à un conservatisme défensif aujourd’hui ? Dans ces conditions, quelle sera l’attitude politique de la majorité des baby-boomers dans leur ensemble au-delà des plus engagés face aux réformes des politiques sociales dans lesquelles la politique de la vieillesse occupe une place centrale? Autant de questions qui ouvrent d’intéressantes perspectives pour l’analyse des systèmes de valeurs, des opinions politiques, et des comportements civiques et électoraux dans la décennie à venir. (Partie réalisé par Jean-Philippe Viriot-Durandal – extraite de Repenser le « Pouvoir Gris » dans l’espace public.) Les baby-boomers : la génération qui va tout changer La génération des baby-boomers est composée des personnes nées après 1946. C’est cette cohorte qui va fondamentalement changer la vision que nous avons de la retraite et de la notion même de la vieillesse. L’étude européenne SHARE indique que la retraite est vécue comme un soulagement par une majorité des européens : tel est le cas pour 59,1% des hommes et 57,4% des femmes. Environ 24 ,5% des hommes et 27,% des femmes ont un jugement plutôt neutre sur cette période de l’existence : ils considèrent le départ en retraite comme un évènement qui n’a été ni positif ni négatif. 9% des hommes et 7,7% des femmes jugent néanmoins cet évènement 40 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 négatif. (source Retraite et Société – CNAV - Janvier 2006) « Les Baby boomers pensent qu’ils ne seront jamais vieux » explique Myril Axelrod Président de Marketing Directions Associates à New York. « cette image qu’ils d’eux-mêmes aura beaucoup d’influence dans le choix de leur logement par exemple… les Baby boomers ne voudront pas aller en maison de retraite mais le présenteront comme une simple étape de leur vie ». Attardons-nous sur ce qui caractérise cette génération. Les baby-boomers sont environ 75 % à être mariés et ont en moyenne deux enfants à charge qui poursuivent leurs études ou travaillent. Mais, à y regarder de plus près, environ 10 % d’entre eux ont quatre enfants et plus et 22 % en ont trois. Des éléments quantitatifs relativement importants, dans la mesure où nombre d’entre eux lient une partie de leurs activités et leurs déplacements futurs à la situation de leurs enfants et de leurs petits-enfants. Les célibataires, pour leur part, sont environ 7 %, et les divorcés 12 %. Nous l’avons vu, la plupart des baby-boomers bénéficient de revenus « confortables ». Si l’accès à l’enseignement supérieur s’est fait dans les mêmes proportions pour les 45-49 ans et les 5054 ans, les seconds gagnent mieux leur vie que les premiers. Au sein de la population française, c’est même cette tranche d’âge qui bénéficie des revenus les plus élevés. Ils sont supérieurs de 38 % à la moyenne des ménages. Objectivement, les baby-boomers ont déjà vécu la moitié de leur vie (âge chronologique), mais ils se sentent plus proches des jeunes qu’ils ne le sont des Seniors actuels (âge subjectif). 92 % des jeunes de 18 à 36 ans sont optimistes quant à leur avenir, contre 77 % des baby-boomers et 41 % des Seniors. Quand on demande aux baby-boomers leur sentiment sur leur avenir, ils emploient des mots tels que « confiance », « espoir », « excitation ». L’étude « Les baby-boomers en France » réalisée en 2012 permet de comprendre comment les baby-boomers vivent aujourd’hui et à connaître leurs espoirs par rapport au futur. On leur a demandé de parler de leur vie en en détaillant cinq aspects en particulier : leurs relations avec leur famille et leurs amis, leurs revenus, leur travail, leur santé et leurs loisirs. On a cherché à 41 savoir comment ils se sentaient par rapport à ces cinq domaines et où ils en seraient dans cinq ans. On a également cherché à savoir où ils en étaient dans la réalisation de leurs « rêves » et quelles étaient les principales difficultés qu’ils rencontraient. Les conclusions de cette étude montrent que les babyboomers sont satisfaits dans beaucoup de domaines de leur vie. Ils envisagent généralement les prochaines années avec optimisme. Au moment où beaucoup d’entre eux pensent à l’avenir, une grande majorité attendent des améliorations dans trois domaines de leur vie : les loisirs, les revenus et la santé. Les baby-boomers ne sont apparemment pas encore très satisfaits de leurs loisirs et sont préoccupés par leurs revenus futurs. 68 % espèrent ainsi de grandes améliorations dans leurs loisirs et 71 % attendent une amélioration de leurs finances. La santé fait partie des trois points les plus importants que les baby-boomers veulent améliorer. Sans elle, les autres domaines de la vie sont compromis. « Si vous n’êtes pas en bonne santé, vous ne pouvez pas trouver de travail et vous ne pouvez rien faire », a remarqué l’une des personnes interrogées à Toulouse. Seulement un tiers des baby-boomers se disent très satisfaits dans le domaine des loisirs. Beaucoup voudraient pouvoir améliorer cet aspect de leur vie, même s’ils ne le considèrent pas comme aussi important que leur santé. Ceci indique que les babyboomers vont d’abord chercher à améliorer d’autres aspects de leur vie avant de s’occuper de leurs loisirs. La plupart des baby-boomers disent qu’ils pensent beaucoup à leur avenir, et avec optimisme (66 %). 69 % pensent que leur avenir dépend d’eux-mêmes. « Je pense que je peux encore changer tout ce que je veux à mon âge », explique une personne interrogée dans l’étude. 64 % des baby-boomers emploient le terme « espoir » quand ils évoquent leur futur. Ils sont 55 % à se déclarer « confiants », tandis que 22 % parlent d’» anxiété » et 21 % de « peur » quand ils évoquent leurs cinq prochaines années. Seulement 20 % des baby-boomers se disent très satisfaits de leurs revenus et 39 %, de leur travail. 20 % disent même que le niveau de leurs revenus est ce dont ils sont le moins satisfaits. 29 % d’entre eux considèrent que l’amélioration de leurs revenus est leur priorité dans les cinq prochaines années. De plus en plus 42 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 d’experts prédisent un avenir sombre à un grand nombre de babyboomers qui n’ont pas assez économisé pour leur retraite. Cette génération commence seulement à prendre conscience de l’ampleur des effets des réformes des systèmes de retraites. 64 % des baby-boomers sont largement satisfaits de leurs relations avec leur famille et leurs amis. C’est une bonne nouvelle, d’autant que 45 % d’entre eux disent que c’est le domaine le plus important de leur vie. Cette importance est sûrement due au fait que plus de la moitié des baby-boomers ont des enfants en bas âge. En même temps, les obligations familiales peuvent les amener à négliger d’autres aspects de leur vie, comme l’entretien de leur forme physique ou les loisirs. Mai 68 et son influence 1968 est une année singulière qui s'inscrit dans le temps long des années soixante et soixante dix où fleurit la contestation. Si 1968 ne se réduit pas au mois de mai, l'espace de protestation ne se limite pas non plus aux pavés parisiens. De Berkeley à Berlin, de Londres à Woodstock se dessine une aire de circulation des idées et des pratiques, une aire d'émergence et de révolte de la jeunesse. L'approche comparatiste et internationale s'avère nécessaire pour comprendre le renouvellement des rapports entre l'individu et la société à l'heure de la consommation de masse – à la fois triomphante et critiquée – et pour analyser les liens complexes entre la contestation culturelle et la contestation politique. Les scènes décalées de la lutte étudiante et ouvrière ainsi que l'ambivalence des réactions de l'État, hésitant entre répression et réappropriation du mouvement, sont ainsi mises en perspective par des essais de périodisation. «La crise de mai 1968 présente des aspects communs avec les révoltes sociales du passé. Mais, dans son déroulement et ses causes, elle est un moment profondément original : elle débute par un violent mouvement de protestation étudiante, entraîne une mobilisation des salariés et débouche sur une crise politique. Le mouvement étudiant français, assez analogue à ceux qui agitent alors les Etats-Unis ou la RFA, débouche dans l'hexagone sur une crise politique majeure.» 43 La génération qui fait 68 est une génération intermédiaire, puisqu’elle a un pied du côté de la guerre, que ses parents ont connue, et en même temps elle vit dans une étape historique où les sociétés sont économiquement développées, où les dimensions du sacrifice, de l’aventure politique, des grandes batailles du passé, sont en voie de disparition. Ce sont les enfants du baby boom, de l’expansion économique, du développement des biens de consommation. Il y a une espèce d’explosion vitale qui ne ressemble pas aux références du passé. La jeunesse existe et s’affirme fortement et publiquement comme telle. Les valeurs défendues dans la génération de 68 influencent toujours les Baby boomers actuellement. Dans différentes études nous notons que ces valeurs ont de plus en plus vivaces notamment la liberté et le coté rebel. Cela a impacté l’ensemble de la société au fur et à mesure que les Baby boomers ont grandi. Et cela va continuer à l’être dans les années à venir. Les Baby boomers vont révolutionner la retraite, le marché des Seniors et même l’image que nous avons de la santé et de la mort. Ce coté rebel des Baby boomers incitent même quelques agences de publicité à recommander à leurs clients d’abandonner l’idée même de faire de la publicité à destination de cette génération qui ne se laisse plus influencer ! Heureusement des solutions existent comme nous ne verrons dans ce livre. Une génération plus nostalgique C’est une équation simple. Plus les Baby boomers vieillissent plus nous allons voir apparaître toute sorte de produits, services et même publicités qui répondront à la nostalgie que peut aimer une partie des Baby boomers. La musique qu’ils ont connue quand ils étaient jeunes, les stars de télévision avec lesquelles ils ont grandies ou encore les films de leur enfance. Une récente étude américaine identique que les publicités utilisant le facteur de la nostalgie rappelant les 20 ans des Baby boomers déclenchent une plus grande émotion que chez les autres générations. Cependant le risque de déclencher des sentiments de frustration et de tristesse est un phénomène à prendre en compte. 44 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Une étude que Senior Strategic a menée dans 5 pays européens indique que la génération du Baby boomers est plus touchée par la nostalgie que les jeunes (ce qui se comprend facilement) et que les générations plus âgées. L’étude indique une raison principale : une partie des Baby boomers pensent que leur vie « était mieux dans les années 60 et 70 ». Ils expliquent que la facilité pour trouver un emploi, le sentiment de liberté, la révolution sexuelle durant cette période est préférée à leur vie actuelle. « notre vie actuelle nous montrent que nous vieillissons », « nous avons des amis qui sont sans emploi », « nous commençons à craindre notre avenir financier ». Dans le monde, les constructeurs automobiles utilisent plus souvent la nostalgie pour cibler les Baby boomers. Citons par exemple la « New Beetle » de Volkswagen ou encore la « British Mini » construite par BMW. En Amérique du Nord, General Motors a présenté son concept Camaro lors du salon international de Vancouver en 2006. Ce concept évoque une automobile connue des Baby boomers la Classic 1969 Camora Z28. Il est a noter que ce constructeur avait arrêté la production de la Camaro en 2002. De son coté DaimlerChrysler présente la Dodge Challenger qui évoque la voiture de 1970 en plus « musclée ». Les constructeurs s’intéressent de près au succès de Ford avec son dernier modèle de Mustang qui rappelle fortement l’originale des années 1960. Ford pense continuer sur sa lancée pour sortir en 2006 la Cobra Shelby GT. La nostalgie est une valeur intéressante pour cibler les Baby boomers sans leur rappeler directement leur âge – ce qu’ils n’aiment pas. Cependant certaines études indiquent que la génération du Baby boomers dans différents pays ne réagit pas de manière similaire à cette valeur. Les Baby boomers des pays asiatiques comme le Japon sont plus réticents. 45 Évolution de la consommation Nous sommes à un tournant Le vieillissement de la population est en train de faire évoluer l’âge médian des consommateurs. Autrement dit, les Seniors sont en train de devenir majoritaires en nombre, et le sont déjà en valeur dans beaucoup de secteurs. C’est un véritable basculement de l’équilibre des « masses de consommateurs ». Chaque jour, le nombre de Seniors progresse alors que celui des moins de 50 ans reste presque stable. Nous assistons également à un autre phénomène : le changement dans la consommation des Seniors avec l’arrivée des baby-boomers. Les personnes âgées d’hier n’ont pas grand-chose de commun avec les « nouveaux Seniors », comme certains les définissent. En d’autres termes, nous assistons à une deuxième modification des équilibres parmi les plus de 50 ans. L’arrivée massive des baby-boomers à la retraite est en train de faire changer l’image des Seniors, mais aussi leurs valeurs, leurs modes de consommation et leurs comportements. En terme de valeurs, la génération dite « de mai 1968 » est fort différente des générations plus anciennes. D’une société où le collectif avait beaucoup d’importance, nous évoluons vers plus d’individualisme. Nous le verrons plus loin, les baby-boomers et leurs aînés ont vécu leur adolescence dans des conditions complètement différentes. Ces différences sont telles que la génération du baby-boom a marqué la société tout au long de son évolution en âge. Cette génération est plus nombreuse et plus consommatrice que les retraités d’aujourd’hui. Les changements sont tels que même les entreprises qui sont présentes sur le marché des Seniors depuis plusieurs années doivent se remettre en cause. D’un côté, elles connaissent souvent parfaitement les retraités d’aujourd’hui et voient arriver de nouveaux clients plus jeunes, avec des valeurs, des envies et des attentes différentes. Il y a quelques années, une entreprise de vente à distance spécialisée dans le marché des Seniors décidait de changer de stratégie. Cette entreprise, vraisemblablement intéressée par le potentiel que représentaient les Jeunes Seniors décida de rajeunir ses produits. Ce fut un échec : les clients les plus âgés ne se retrouvèrent pas dans les nouveaux produits, et une 46 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 partie des jeunes clients ciblés pensaient, quant à eux, que l’image de cette entreprise ne leur correspondait pas et a continué d’ignorer ses produits. Depuis, cette société s’est repositionnée sur le marché des plus de 60 ans. Cette histoire donne un aperçu des difficultés que l’on rencontre avec les Baby boomers et les Seniors. La question que de nombreux directeurs marketing se posent est apparemment simple : Comment cibler à la fois les retraités actuels et les babyboomers ? « Nous sommes réellement à un tournant, les jeunes femmes Seniors sont très différentes de leurs aînées au même âge. Elles se sentent plus modernes et ont des attentes plus proches de celles des femmes de 40 ans », explique la très « active » Renate Gossard, présidente de l’association Les Panthères Grises (association de défense des retraités, composée de femmes mais aussi d’hommes qui ont la volonté de « bien vieillir » et qui veulent continuer de participer activement à la société). « Les entreprises vont devoir en tenir compte, s’adapter », poursuit-elle. Le marché des Baby boomers et des Seniors est beaucoup plus complexe que nous l’avons peut-être cru dans le passé. C’est un marché en pleine mutation. Les retraités d’aujourd’hui sont différents de leurs aînés. Les baby-boomers le sont encore plus. C’est tout le marché des Seniors qui change avec un basculement très net des équilibres entre les générations. Plus ou moins de consommation ? Les économistes ne sont pas tous d’accord sur les effets du vieillissement de la population sur la consommation. C’est surtout l’attitude de la génération des baby-boomers qui est incertaine. Cette génération (la plus aisée et la plus nombreuse, répétons-le) a été habituée à beaucoup consommer et on a tendance à penser qu’elle ne changera pas ses habitudes. Certains experts disent que les baby-boomers vont révolutionner la retraite et continuer à consommer sans retenue. Cependant, de plus en plus de signaux d’alerte, annonçant un autre scénario, font l’actualité de la presse spécialisée, qui évoque les risques possibles d’une chute de la consommation dans les années à venir parce que la génération des baby-boomers commencerait à épargner. En France les 50 – 60 47 ans surestiment leur retraite de 30%. En Grande Bretagne 50% d’entres eux pensent gagner le double de ce qu’ils auront réellement. Cette réflexion s’appuie sur le fait que les baby-boomers de beaucoup de pays n’ont pas assez économisé pour leur retraite. D’autre part, l’ensemble des gouvernements des pays industrialisés sont en train de réformer leurs systèmes de retraite. Nous nous orientons vers des baisses significatives des pensions de retraite dans les années à venir. La France va progressivement augmenter le nombre d’années de cotisation nécessaires pour percevoir une retraite pleine. À cause du chômage et des difficultés que rencontrent sur le marché de l’emploi les salariés Seniors (les baby-boomers), une partie importante des plus de 45 ans va voir son niveau de pension fortement diminuer. Comme la majorité des entreprises ne pensent pas changer leur politique des ressources humaines pour les plus de 50 ans, nous demandons en quelque sorte aux baby-boomers de travailler plus pour toucher une pension pleine sans donner la possibilité de travailler à un grand nombre d’entre eux. En France, cette situation est appelée à évoluer avec les aides que les gouvernements envisagent pour inciter les entreprises à conserver leurs salariés âgés. Une autre solution préconisée est de rendre plus difficile l’accès aux préretraites. Comme nous le voyons, des incertitudes planent sur le futur niveau de vie des baby-boomers. Dans certains pays, les ÉtatsUnis par exemple, la situation est encore plus critique. Déjà huit personnes de 50 ans sur dix déclarent envisager de travailler pendant leur retraite pour compléter leur pension. L’un des pires scénarios serait que les baby-boomers, prenant brutalement conscience de l’ampleur des effets des réformes des retraites sur leur futur niveau de vie, se mettent à réduire leur consommation et à économiser. Ce scénario engendrerait une baisse de la consommation qui pourrait être brutale, si on considère le nombre important de baby-boomers. Les scénarios les plus optimistes prévoient que les baby-boomers vont au contraire continuer à dépenser, que l’activité économique va redémarrer, ce qui devrait permettre de maintenir le fonctionnement des systèmes de retraite. 48 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Reste que le pouvoir d’achat des futurs Seniors restera élevé. C’est plus une redistribution des dépenses qu’il faut prévoir, avec une hausse de la consommation dans certains domaines tels que la santé, les loisirs, la dépendance, les assurances, et une baisse dans d’autres, comme l’aménagement de la maison, les déplacements, etc. Ces prévisions doivent elles-mêmes être relativisées. La baisse de consommation et les changements éventuels dans la structure de la consommation pourraient se faire en plusieurs étapes. Dans un premier temps, les baby-boomers continueraient de consommer. Ce ne serait que dans un deuxième temps, lorsque la peur d’un manque de revenus serait plus forte, qu’ils pourraient changer et réduire leur consommation. Des secteurs d’activité en hausse, d’autres en baisse Certaines entreprises commencent à réagir par rapport au vieillissement de la population : « Nous avons un problème. Nous ne pouvons pas réaliser suffisamment de profits sur notre clientèle habituelle, qui a entre 25 et 45 ans, pour atteindre nos objectifs de croissance dans la prochaine décennie. Il devient clair que nous devons maintenant cibler les clients plus âgés qui sont en train de dominer le marché », nous explique le vice-président d’un groupe alimentaire européen. Apprêtons-nous à entendre ce genre de propos de plus en plus souvent dans les prochaines années. Le vieillissement de la population est ainsi souvent perçu comme un problème, mais il s’agit en fait d’une opportunité de relais de croissance pour les entreprises. Rappelons-le : nous assistons actuellement à un choc démographique sans précédent. Pour plusieurs secteurs d’activités, ne pas miser sur le marché des Seniors pourrait bien se révéler fatal. Ce « déplacement démographique » va toucher l’ensemble des secteurs d’activités. Certains vont connaître des croissances exponentielles, d’autres risquent de voir leur activité diminuer. Parmi les secteurs qui pourraient en profiter le plus, nous pouvons citer l’habitat, les cosmétiques, une partie de l’alimentation, les loisirs, certaines branches des assurances et des banques, etc. Le domaine de la santé est l’un des secteurs qui va le plus profiter de la croissance du marché des Seniors. Les activités de la 49 pharmacie et de la biotechnologie sont promises à un bel avenir, de même que les services de soins à domicile, le matériel médical, etc. Pour connaître les secteurs susceptibles de connaître une belle croissance, il peut être intéressant de se pencher sur ce qui se passe en Bourse. En effet, il existe depuis plusieurs années des « sicav sur le marché des Seniors ». Celles-ci investissent dans les sociétés cotées en Bourse qui vont profiter de la croissance du nombre des Seniors. Parmi ces sicav, nous pouvons citer Senioractions, de la banque Eurofin (groupe HSBC). L’exemple de Senioractions Senioractions est une sicav composée d’actions internationales qui investit dans les valeurs qui profiteront de l’essor du marché des Seniors. Le secteur le plus représenté est celui de la santé (45,6 % du portefeuille) : technologies médicales, pharmacie, hôpitaux, soins à domicile, laboratoires d’analyses, biotechnologie, etc. Parmi les entreprises de ce secteur, nous trouvons Pfizer, Medidep, Orpéa, Unilabs, Medtronic. D’autres secteurs sont également représentés avec la distribution spécialisée (Marionnaud, Audika…), l’assurance-vie (CNP, Axa…), le tourisme et les loisirs (Pierre&Vacances, Bally…), le luxe et l’assurance santé. Il est intéressant de noter que les valeurs américaines sont majoritaires et représentent 51 % de ce portefeuille. Aux États-Unis les domaines d’investissement sont beaucoup plus divers qu’en Europe, car les préoccupations liées aux Seniors y ont été prises en compte depuis plus longtemps. Impacts du vieillissement de la population par domaine d’activité Le vieillissement de la population va avoir des répercussions sur l’ensemble des secteurs d’activités. Certains connaissent déjà une croissance soutenue comme les domaines des cosmétiques, de la santé, du luxe, des loisirs et des voyages, etc. Le marché des cosmétiques va profiter de l’avancée en âge des baby-boomers. Une grande partie des représentants de cette 50 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 génération se sentent plus jeunes et souhaitent retarder le plus longtemps possible les effets de l’âge. La progression annuelle moyenne du marché mondial des cosmétiques depuis 1990 est de 4,6 %. Des marques telles que Nivea Vital se situent au-delà, avec plus de 5,8 % pour les six premiers mois de l’année 2010. Le secteur du tourisme devrait croître dans les années à venir avec le départ en retraite des premiers baby-boomers qui ont 60 ans en 2006. Actuellement, le nombre de partants reste stable : 73 % des Français sont partis en vacances (cinq jours et plus) au cours des deux dernières années. La croissance du marché est essentiellement due à une multiplication des départs de la clientèle actuelle. Les baby-boomers sont plus aisés, ils sont habitués à consommer et à voyager. Une partie d’entre eux devrait profiter de son temps libre pour multiplier les séjours. L’industrie du tourisme va pouvoir en profiter. Il est cependant important de noter que les investissements pour répondre aux demandes d’une clientèle plus âgée sont importants. Ce point semble sous-estimé par une grande majorité des professionnels du secteur. Les professionnels du marché de l’alimentation ne s’attendent pas à une hausse de l’ensemble de ce secteur, mais plutôt à un rééquilibrage. En effet, le vieillissement de la population bouleverse actuellement les rapports des Français avec la nourriture. Avec l’âge, on se préoccupe de plus en plus de sa santé. La plupart des gouvernements lancent des programmes de sensibilisation à un meilleur équilibre alimentaire. L’étude SU.VI.MAX a également mis en lumière l’importance de cet équilibre, mais aussi celui de la consommation de fruits et légumes. Les années à venir pourraient bien voir augmenter la consommation de certains aliments tels que ceux qui contiennent des « antioxydants ». Certains experts prédisent déjà une baisse de la consommation de viande, de matière grasse et de biscuits. Certaines sociétés ciblent les plus de 45-50 ans : Danone, avec l’eau minérale Taliance, Candia avec Calcium Plus, ou encore Nutrition & Santé du groupe Novartis. Les banques et les assurances vont profiter du vieillissement de la population même si, comme nous le verrons, la plupart des dirigeants de ces secteurs disent ne pas vouloir faire plus d’efforts pour cibler les Seniors. Avec les réformes des retraites, les produits d’épargne devraient se développer au cours des 51 prochaines années. Les relations intergénérationnelles entre les petits-enfants et les grands-parents sont une source de développement de produits spécifiques, dont certains existent déjà. À noter que la SBE (Groupe Banque Populaire) a développé une marque spécifique : la Banque des Seniors. Les services à domicile sont promis à un bel avenir, mais tous ne sont pas encore rentables. Le secteur des soins à domicile semble présenter un des plus gros potentiels de développement. En effet, les coûts de santé augmentant, les gouvernements vont inciter les gens à rester le plus longtemps possible chez eux. Plusieurs entreprises se positionnent déjà sur ce secteur, comme la société Bastide Le Confort Médical. Celle-ci a pour activité la vente et la location de matériel médical destiné aux particuliers (personnes âgées, malades ou handicapées) et aux professionnels (médecins, collectivités). Les secteurs liés au 4e âge devraient connaître une croissance forte dans les années à venir. En effet, c’est le nombre des plus de 80 ans qui va croître le plus dans un futur proche. L’une des raisons de cette augmentation est le « mini » baby-boom dû au déficit de naissances pendant la Première Guerre mondiale. MSI International prévoit ainsi une augmentation de la capacité d’accueil des établissements pour personnes âgées de 6 % entre 2010 et 2007. Le secteur des transports présente manifeste aussi un certain intérêt pour le marché des Seniors. C’est le cas de la SNCF avec la carte Senior, qui a remplacé l’ancienne carte Vermeil. La RATP a lancé en 1996 plusieurs actions à destination des Seniors, dont des aménagements d’infrastructures ou les jeudis SeniorCité. Plusieurs entreprises sont déjà présentes sur le marché des Seniors depuis plusieurs années, à l’image de Vacances Bleues dans le tourisme, de L’Oréal avec Age Perfect ou le shampoing Elsève au Régénium. En voici quelques-unes. Le groupe Beiersdorf profite de la croissance du marché des plus de 50 ans avec sa gamme Nivea Vital. Il s’agit d’une gamme de produits de soins et de toilette du visage adaptés aux besoins spécifiques des peaux « matures ». Nivea Vital se situe toujours en tête des produits de Beiersdorf en ce qui concerne la progression de vente : +5,8 % pour les six premiers mois, malgré une conjoncture peu favorable. À noter que Nivea Vital a été la 52 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 première marque à diffuser des publicités avec un mannequin féminin de plus de 50 ans au milieu des années 1990. Essilor est le numéro un mondial de l’optique ophtalmique avec un chiffre d’affaires de 2,138 milliards d’euros en 2002. Il emploie 23 000 personnes dans le monde et possède des marques à forte notoriété : verres progressifs Varilux ®, verres en polycarbonate Airwear®, verres Crizal®. Le marché des verres correcteurs croît chaque année de 3 à 4 % avec plus de 800 millions de verres vendus dans le monde. Sur les dix dernières années, le groupe a affiché une croissance moyenne annuelle de son chiffre d’affaires de 9,5 % et une croissance moyenne annuelle de son bénéfice net par action de 23,7 % (source : LaVieFinancière.com, 23 mai 2010). Le marché devrait continuer de croître en raison de l’augmentation de l’espérance de vie et donc du nombre de renouvellements des lunettes. Il est aussi favorablement soutenu à la hausse en raison du nombre grandissant de presbytes. (On devient presbyte vers l’âge de 48 ans.) Fort d’un chiffre d’affaires de 156 millions d’euros pour un résultat net de 10,6 millions d’euros en 2002 et prévoyant un chiffre d’affaires de 186 millions d’euros en 2010, Orpéa est leader sur les trois segments les plus porteurs de la prise en charge de la dépendance : maisons de retraite, soins de suite, et rééducation fonctionnelle et psychiatrie. Cela représente plus de 8 000 lits répartis sur 85 sites. Le développement du groupe a été initialement axé sur la dépendance permanente, puis a été complété par celui de la dépendance temporaire pour répondre à l’ensemble des besoins. Le groupe est coté au Second Marché d’Euronext Paris depuis le 16 avril 2002. Avec près de 250 centres répartis dans 71 départements et 11 % de parts de marché, Audika est le premier réseau français de centres spécialisés dans le conseil et les solutions en correction auditive. Positionné sur le marché des Seniors, peu sensible aux variations de la conjoncture économique, Audika a vocation à renforcer son leadership sur un secteur encore très atomisé. Audika fait partie de Nextprime, de l’indice MidCAC et de l’indice du Second Marché. Au premier semestre 2010, Audika a enregistré un chiffre d’affaires de 25,1 millions d’euros, en progression de 31,6 % par rapport au premier semestre 2002. Son 53 chiffre d’affaires pour l’année 2010 devrait être d’au moins 51 millions d’euros. Maison France Confort est le premier constructeur français de maisons individuelles qui cible directement les Seniors avec le concept « Maisons Seniors ». L’idée est de proposer aux Seniors de construire une maison adaptée à cette nouvelle vie que représente la retraite. Plusieurs plans de maisons ont été conçus pour répondre aux attentes des Seniors sur plusieurs axes. Par exemple, l’architecte peut proposer la construction d’un studio accolé à la maison pour héberger les enfants et les petits-enfants. Autres exemples : les maisons sont de plein pied, les zones de circulation plus grandes, etc. D’autres services sont proposés : alarmes, motorisation des ouvertures, câblage Internet, etc. « Les Seniors qui achètent ce genre de produits peuvent avoir 50 ans. Ils mettent alors la maison en location pendant dix ans et l’habitent ensuite. D’autres, généralement âgés de 57 à 60 ans, la font construire pour l’habiter directement pendant leur retraite », explique Patrick Vandromme, PDG de Maisons France Confort. Dans l’avenir, l’offre va évoluer pour proposer un plus grand choix et permettre aux Seniors d’intégrer des options du « concept Senior » à d’autres maisons proposées par le groupe. En 2000, 8 % des clients de MFC avaient plus de 60 ans. En 2002, ce chiffre est monté à 12 %. Un site d’informations internationales sur le vieillissement de la population Créé en 2002, theMatureMarket.com est l’un des sites professionnels internationaux les plus importants parlant de l’actualité du marché des Seniors à destination des entreprises. Il propose de l’information et des services à la communauté des professionnels tout comme aux chercheurs, journalistes intéressés par les sujets liés au vieillissement démographique. 54 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 2 Les tendances La santé devient plus importante Il est souvent dit que les Seniors sont en bonne santé. Qu’en est-il réellement ? La santé des plus de 50 ans est très variable et doit être étudiée avec plus de précision. D’une manière générale, les Seniors sont en meilleure santé que les générations précédentes aux mêmes âges. Il y a cependant un décalage entre leur état de santé réel et la perception qu’ils en ont. En effet, même si différentes études décrivent les baby-boomers « jeunes dans leur tête », elles ne doivent pas pour autant faire oublier les effets du vieillissement. D’après l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes), qui a réalisé en 2002 un baromètre sur la santé des 45-59 ans et des 60-75 ans, les personnes âgées de 60 à 75 ans disent beaucoup plus souvent que leurs cadets de 45-59 ans souffrir de problèmes de santé physique. Elles sont près d’une sur deux à déclarer avoir une maladie chronique, contre un tiers seulement parmi les 45-59 ans. 22 % disent souffrir d’un handicap physique, contre 16,5 % des 45-59 ans. Les difficultés motrices rencontrées au quotidien, dans la montée d’un escalier, par exemple, sont aussi plus fréquentes chez les 60-75 ans. En 55 revanche, ceux-ci ne se plaignent pas plus que leurs cadets de douleurs physiques difficiles à supporter. L’étude laisse en outre apparaître que les 60-75 ans se disent en meilleure santé mentale que les 45-59 ans. Les études sur la santé des Seniors se heurtent souvent au fait que les personnes âgées n’aiment pas parler de leurs problèmes de santé. Les conclusions que l’on peut en tirer doivent donc prendre en considération ce constat. Les principales causes de décès chez les plus de 75 ans sont, chez la femme : les maladies vasculaires cérébrales, les cardiopathies ischémiques, les insuffisances et maladies cardiaques, la pneumonie et la broncho-pneumonie. Chez les hommes, les cardiopathies ischémiques arrivent en tête, suivies des maladies vasculaires cérébrales, des maladies cardiaques et des tumeurs malignes de la prostate (source : Inserm). Une grande disparité Les grandes inégalités dans l’espérance de vie et l’état de santé des Seniors s’expliquent en partie par les différences sociales. L’espérance de vie à 60 ans d’un ouvrier est de 17 ans et de 19 ans pour un employé. Elle monte à 23,5 ans pour les cadres de la fonction publique. Ces dernières années, ces inégalités ont eu tendance à s’accentuer. D’autres paramètres que le niveau social entrent en ligne de compte : le niveau de stress, l’alimentation, la consommation de tabac, d’alcool, etc. Une étude américaine récente tend à démontrer que c’est le stress qui a le plus d’influence sur l’espérance de vie, suivi de l’alimentation. Les personnes stressées auraient entre 3 à 4 années d’espérance de vie de moins que la moyenne. Les Seniors et leur propre perception de leur santé Les Seniors se sentent en grande majorité plus jeunes et en meilleure santé qu’ils ne le sont réellement. Dans une étude de Taylor Nelson Sofres Santé, on a posé la question suivante à un échantillon de 45-65 ans : « Actuellement, avez-vous des problèmes de santé ? ». Seulement 20 % des femmes et des hommes déclarent souffrir de problèmes de santé qu’ils qualifient de « très ou d’assez important ». Même les plus de 80 ans ne sont que 26 % à se juger en mauvaise ou très mauvaise santé. Non 56 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 seulement, les Seniors se sentent en bonne forme, mais une partie d’entre eux pensent également pouvoir rester jeunes plus longtemps. L’étude « Les Seniors en France » indique que les baby-boomers sont plus nombreux à vouloir tout faire pour rester jeune. 88 % des femmes et 82 % des 45-65 ans disent pouvoir retarder les effets de l’âge en prenant soin de leur santé. C’est aussi dans cette tranche d’âge que l’on nie le plus les effets du vieillissement. Au-delà de 62-65 ans, la tendance s’inverse : on accepte plus facilement le fait de vieillir. Nous avons également noté que les baby-boomers attachaient de l’importance à leur santé, mais aussi à leur « forme ». Chez les plus âgés, la santé proprement dite est jugée beaucoup plus importante. La maltraitance La maltraitance des personnes âgées est un sujet encore tabou. Françoise Busby, directrice de l’association Alma France (Allô Maltraitance des Personnes Âgées) explique que « les personnes âgées ne se plaignent pas, ne reconnaissent pas les maltraitances comme telles ». Certaines personnes âgées, voire très âgées, subissent pourtant diverses formes de maltraitance : psychologique, physique, médicamenteuse ou médicale, civique, etc. Depuis 1995, Alma France a enregistré environ 30 000 appels. En 2002, 2 733 « signalements » ont été faits aux antennes de l’association, 38 % en institution, 62 % à domicile. À domicile, les formes de maltraitances les plus répandues sont les maltraitances psychologiques (22,3 %), financières (18 %) et physiques (14 %). En institution, les négligences atteignent 39,8 %, les maltraitances psychologiques 15 %, physiques 11,5 %, financières 6,6 % et médicales 3,2 %. La ménopause Abordons le sujet de la ménopause et plus généralement des changements hormonaux qui se produisent aux alentours de la cinquantaine chez les femmes. Ces changements sont jugés importants par 73 % des femmes (source : Taylor Nelson Sofres Santé). L’âge moyen de la ménopause est de 51 ans, avec un vaste éventail d’âges allant de 45 à 60 ans. En France, neuf millions de femmes sont ménopausées et 400 000 le seront chaque année d’ici 57 2015. Ce moment est le début de changements importants chez les femmes. Les principales motivations pour suivre un traitement hormonal substitutif sont l’efficacité du traitement dans la prévention de l’ostéoporose (76 %), l’élimination des symptômes gênants de la ménopause (68 %) et la prévention des maladies cardio-vasculaires (35 %) (source : Sofres). Pour aider à lutter contre les effets de l’ostéoporose, plusieurs marques développent des produits destinés aux femmes de plus de 50 ans. C’est le cas de Candia avec Calcium Plus et Candia au Oméga 3, mais aussi de Danone avec l’eau minérale Taliance. L’exemple de Candia La société Celdilac Candia a lancé deux laits adaptés essentiellement aux Seniors : Calcium Plus et Candia au Oméga 3. Calcium Plus Vitamine D est un lait enrichi en calcium et en vitamine D pour améliorer l’absorption et la fixation du calcium. Ce produit répond à une attente de plus en plus importante des plus de 50 ans, mais aussi à une volonté des pouvoirs publics d’augmenter la consommation de calcium des Français. En effet, les études montrent que les plus de 50 ans présentent d’importantes carences en calcium, notamment chez la femme. Une des conséquences de ces carences est une fragilisation des os qui aggrave les risques de fracture du col du fémur en cas de chute. Par ailleurs, des études sur la consommation des Français mettent en évidence que leur consommation en acides gras essentiels est déséquilibrée et que leur régime alimentaire présente des apports insuffisants en « Oméga 3 », ce qui accentuerait le développement de pathologies cardio-vasculaires. C’est pour combler cette carence que Candia propose aux Seniors son lait Candia au Oméga 3. La dépendance en France La dépendance concerne essentiellement les Seniors les plus âgés. Sont fortement dépendants : 10 % des 75 ans, 35 % des 85 ans et 90 % des 95 ans. 25 % des 65-79 ans. D’autre part, 52 % des 80 ans et plus sont concernés par une incapacité. L’espérance de vie sans incapacité est de 65,6 ans pour les hommes et de 69,8 ans pour les femmes. 844 000 personnes de 60 ans ou plus sont dépendantes. Parmi elles, 330 000 personnes (soit 39 %) 58 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 présentent uniquement une dépendance physique, 295 000 sont à la fois dépendantes physiquement et psychologiquement, et 216 000 (soit 26 %) ont des problèmes d’orientation ou souffrent de troubles du comportement, sans lourde perte de leur autonomie physique (source : Seniorscopie). Entre 60 et 69 ans, seulement 2,1 % des personnes sont dépendantes, c’est le cas de 10,5 % des personnes de 80 ans, de 18,3 % de celles de 85 ans et de 30,2 % de celles âgées de 90 ans. Les maladies neurodégénératives Avec les tumeurs cérébrales et les maladies vasculaires, les maladies dégénératives constituent les affections les plus fréquentes du système nerveux central. Leur relative fréquence, la sévérité de leurs atteintes et les infirmités qu’elles engendrent les ont rendues tristement célèbres auprès du grand public : la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, la chorée de Huntington, la sclérose latérale amyotrophique, la sclérose en plaques ou encore la dystonie de l’enfant sont autant de termes appartenant au langage courant. Leur gravité, souvent liée à l’absence de thérapeutique, fait de ces maladies des fléaux redoutables qui, de par leur diversité, peuvent atteindre l’enfant comme l’adulte, la moelle comme l’encéphale, la motricité comme les fonctions supérieures. La maladie d’Alzheimer est la plus fréquente des maladies neurodégénératives ; elle sera, dans les vingt prochaines années, un problème de santé publique majeur. Touchant entre 350 000 et 600 000 personnes en France (ce nombre devrait doubler d’ici à 2020), elle se déclare le plus souvent chez les personnes âgées (5 % des Français de plus de 65 ans en sont atteints). Cette maladie sera un véritable fléau socio-économique à partir de 2010. L’avenir : une prise en compte plus importante de la santé L’espérance de vie devrait continuer de progresser dans les années à venir, à un rythme peut-être légèrement plus lent que celui que nous connaissons actuellement (3 mois par an). L’espérance de vie sans incapacité va également progresser. Sur ce sujet, toutes les études n’aboutissent pas aux mêmes 59 conclusions. Certaines prédisent que l’espérance de vie sans incapacité progressera moins vite que l’espérance de vie. D’une manière générale, nous pouvons avancer que les baby-boomers vont connaître un niveau de santé supérieur à celui des retraités actuels, en dépit du fait que la génération de l’après-guerre soit particulièrement stressée. La santé est également un enjeu important pour le secrétariat d’État aux Personnes âgées, qui a lancé en 2010 le programme « Bien vieillir » en partenariat avec le ministère des Sports. Le premier volet de ce programme est consacré à la promotion du bien-être par l’activité physique et sportive et une alimentation équilibrée. L’un de ses objectifs est de permettre au plus grand nombre de vieillir en bonne santé. La volonté de ne pas vieillir Le marché de l’» anti-aging » regroupe la cosmétique, les compléments alimentaires, la chirurgie esthétique ou encore les traitements « anti-vieillissement ». Il est estimé à 9 milliards d’euros en France (source : Les Seniors et les produits anti-aging). Les traitements cosmétiques tels que le Botox, les injections de collagène ou les traitements au laser sont déjà la plus grosse part du marché américain dans ce domaine et sont en augmentation constante en France. Les États-Unis sont largement en avance, en raison notamment de réglementations plus souples : on y trouve aussi bien de nombreuses cliniques proposant des traitements « antivieillissement » que des sites Internet entièrement dédiés aux phénomènes « anti-aging ». Quand être vieux était « à la mode » À la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, les « vieux », que l’on n’appelait pas encore les « Seniors », étaient traités avec respect. Il est vrai qu’à cette époque, beaucoup de jeunes vivaient en milieu rural et dépendaient directement ou indirectement des plus âgés. De plus, les théories « acceptées » sur le vieillissement ne sont apparues que vers le milieu du 19 e siècle. Alors la vieillesse était synonyme de bonne santé, de qualité de vie, de modération. 60 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’avènement de l’industrie a progressivement changé la donne : de plus en plus de jeunes ont commencé à travailler en ville. Le « jeunisme » était en train de naître. Pour être accepté par la société, il fallait désormais être ou paraître jeune. Aujourd’hui, les médias continuent à cibler majoritairement les moins de 50 ans. Mais cela pourrait bien changer à nouveau avec l’arrivée des baby-boomers à la retraite. Dans un premier temps, ceux-ci vont vouloir rester et paraître jeunes. Mais les mentalités évoluent bel et bien dans un sens qui devrait amener les entreprises à s’intéresser aux Seniors et encourager les médias à accorder plus de place aux plus de 50 ans. En attendant ce changement progressif, le marché de l’» antiaging » (anti-vieillissement) a encore de beaux jours devant lui. Le marché des compléments alimentaires La définition française des compléments alimentaires (ou suppléments nutritionnels) est donnée par un décret publié au Journal officiel du 12 avril 1996, qui indique : « Les compléments alimentaires sont les produits destinés à être ingérés en complément de l’alimentation courante, afin de pallier l’insuffisance réelle ou supposée des apports journaliers ». Les noms de certains de ces compléments sont connus : DHEA, sélénium, créatine, ginkgo biloba, etc. Aux États-Unis, les statistiques du gouvernement montrent que la moitié de la population adulte utilise des compléments alimentaires, appelés là-bas dietary supplements. Il est vrai que la réglementation y est différente. Le marché a été complètement dérégulé en 1994, quand le Congrès américain a exempté les compléments alimentaires du contrôle de la Food & Drug Administration (FDA). Depuis cette date, tout produit vendu comme complément alimentaire peut être mis sur le marché librement, même s’il est présenté comme ayant des propriétés thérapeutiques. Cette dérégulation a entraîné de nombreux abus et une explosion des ventes de produits divers, à l’origine et à l’efficacité douteuses, présentés comme des remèdes miracles. En France, où la réglementation est beaucoup plus stricte, l’étude « Les Seniors et les produits anti-aging » indique que 11,5 % des 50-64 ans prennent des compléments alimentaires régulièrement. 61 Parmi les industriels présents sur ce marché, il y a les laboratoires Innéov. Nés d’une joint-venture entre L’Oréal et Nestlé, ils se sont spécialisés dans « l’alimentation cosmétique ». Début 2010, ils ont lancé le complément alimentaire Innéov Fermeté, à destination des femmes de plus de 45 ans. Son rôle est de lutter contre le relâchement cutané en associant trois antioxydants : le lacto-lycopène (une forme particulièrement assimilable du lycopène), qui lutte aussi contre l’amincissement de l’épiderme, les isoflavones de soja, qui stimulent le renouvellement épidermique, et la vitamine C, qui favorise la synthèse du collagène. Citons aussi l’exemple des laboratoires Boiron, qui ont développé au début des années 1990 une gamme de compléments alimentaires nommée Bioptimum. Cette gamme se décline aujourd’hui en quinze références dont l’une, Bioptimum Senior, est destinée aux plus de 50 ans souffrant de fatigue physique ou intellectuelle. La cosmétique Le marché des cosmétiques vise évidemment un public potentiel important. 29 % des femmes de plus de 60 ans désirent lutter activement contre les effets du vieillissement. Elles aiment plaire et ne veulent surtout pas « faire leur âge ». Elles consacrent 17,7 minutes par jour en moyenne à la toilette et aux soins du visage (source : étude Taylor Nelson Sofres pour L’Oréal). Ce chiffre augmente avec l’âge : après 70 ans, elles y consacrent 20 minutes en moyenne. L’étude « Les ProfilsValeurs » révèle que les Seniors les plus intéressés par les produits de cosmétiques sont les Seniors Actifs, Sociables, et Originaux. Dans ce domaine, les acteurs qui ciblent les femmes de plus de 50 ans sont nombreux. Par exemple, la gamme Nivea Vital a été lancée en France en 1994 pour répondre aux besoins des « peaux matures », comme l’indiquent ses publicités. L’Oréal est un autre poids lourd du marché avec sa « gamme de soins pour peaux matures », notamment grâce à son produit Age Perfect. De leur côté, les laboratoires Vichy viennent d’élargir leur gamme de soins anti-vieillissement avec Novadiol, et Clarins commercialise un « Supra Sérum Haute Exigence Multi-Intensif » qui est le 62 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 premier produit d’une nouvelle ligne de soin spécialement conçue pour les baby-boomeuses. La chirurgie esthétique Le marché de la chirurgie esthétique augmente de 10 % par an et d’après une étude Ifop/Elle de juillet 2002, 6 % des Françaises y ont déjà eu recours. En France, sur environ 3 500 praticiens réalisant des opérations de chirurgie esthétique, seuls 500 sont des chirurgiens dont la qualification est reconnue par le Conseil national de l’Ordre des médecins (source : essentielsante.net). Le vieillissement de la génération des baby-boomers va faire augmenter le nombre de candidats à la chirurgie esthétique, comme le montre l’étude « Les baby-boomers en France ». Plus de 22 % des 45-54 ans pensent avoir recours à la chirurgie esthétique dans les années à venir et préfèrent manger équilibré et pratiquer des activités physiques. Avec l’arrivée des baby-boomers, le marché de l’antivieillissement a de beaux jours devant lui. Ces « Jeunes Seniors » aspirent à vivre plus longtemps, en meilleure santé et en meilleure forme. Beaucoup d’entre eux attachent de l’importance à leur apparence. Cependant, certains domaines, comme les compléments alimentaires, font encore peur. Deux tendances s’affrontent : d’un côté, les adeptes de « l’anti-aging », qui aspirent à rester jeunes, de l’autre, on trouve peut-être les plus âgés, qui vont préférer des produits qui les aideront à bien vieillir. La naissance du 4e âge La proportion des personnes de plus de 80 ans est celle qui va augmenter le plus dans les années qui viennent. Leur nombre va plus que tripler, passant de 2,2 millions aujourd’hui à 7 millions en 2040. Actuellement, la pyramide des âges de la France nous montre que nous sommes dans le « creux » de la Première Guerre mondiale. Autrement dit, il y a eu un déficit de naissance à cette période qui correspond actuellement aux personnes âgées entre 80 et 85 ans. L’industrie qui cible le 4e âge va, elle aussi, connaître un « boom » de sa cible. En Espagne, le vieillissement de la population est très rapide. Entre 1970 et 1990, le nombre des 63 personnes de 80 ans et plus est passé de 500000 à 1,1 million. Il devrait atteindre 2,9 millions en 2016. « Même si on constate que les handicaps concernent toutes les cohortes, il est clair qu’il existe une forte corrélation entre la prévalence et l’intensité des situations de dépendance d’une part et l’âge d’autre part (32% des plus de 65 ans souffrent d’un handicap, contre seulement 5% des moins de 65 ans) » explique Susana Barcelon Cobedo de l’Université Carlos III de Madrid Le marché de la dépendance et des maisons de retraite Les professionnels de santé recensent deux types de dépendance : la dépendance permanente et la dépendance temporaire. Elles ne concernent pas les mêmes catégories d’individus et impliquent des prises en charges particulières. Si l’espérance de vie augmente, l’âge moyen à partir duquel une personne âgée devient dépendante reste stable. Sont ainsi lourdement dépendants : 10 % des 75 ans, 35 % des 85 ans et 90 % des 95 ans. Selon l’enquête Dafsa « Les Seniors et la dépendance » (enquête menée auprès de 603 personnes âgées de 50 à 74 ans), plus de 80 % des Seniors choisiraient, en cas de dépendance, le maintien à domicile plutôt que le placement en maison de retraite, mais ils font une estimation très basse de son coût. D’où la nécessité de développer des solutions d’aide ou d’anticipation du coût de la prise en charge à domicile, notamment les contrats d’assurance dépendance. Pour cette cible, le marché compte plusieurs acteurs, notamment Médidep. Il s’agit d’un groupe français privé spécialisé dans la prise en charge globale de la dépendance. Son chiffre d’affaires était de 199,7 millions d’euros en 2002 et il emploie 55 000 personnes. Médidep est présent sur ce secteur par le biais d’établissements sanitaires pour les dépendances temporaires et par le biais d’établissements d’hébergement médicalisé de personnes âgées atteintes de dépendance dite permanente ou lourde. Via sa filiale Medicom, Médidep développe un réseau de maintien à domicile pour les personnes dépendantes. 64 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’étude « Les établissements d’hébergement pour personnes âgées » réalisée en 2010 par la société MSI International fait le point sur un secteur qui connaît des changements importants. Le nombre de places dans les établissements pour personnes âgées était de 674 076 en 2002, réparties dans quatre types d’hébergement : les maisons de retraites (63 % des places), les logements-foyers (23 %), les soins de longue durée (13 %) et l’hébergement temporaire (1 %). Le choix du type d’hébergement dépend de l’état de santé de la personne âgée, de ses ressources financières et du nombre de places disponibles. La capacité d’accueil a augmenté de 2 % entre 1998 et 2002 pour plusieurs raisons : la faible progression du nombre de personnes dépendantes, le développement des services de soins à domicile, la durée de séjour de plus en plus courte des personnes âgées en établissement. MSI prévoit une augmentation de la capacité d’accueil de 6 % entre 2010 et 2007, où l’on devrait compter plus de 7 130 000 places. Les maisons de retraite devraient représenter 66 % de l’ensemble des établissements, contre 63 % en 2002. Les facteurs qui vont influencer cette progression sont nombreux : réforme de la tarification, développement des services de soins à domicile et évolution du nombre de personnes âgées en situation de dépendance. Le marché des services Le développement des services suit le vieillissement de la population. Il peut s’agir d’aides ménagères, d’aides à domicile. Plusieurs raisons poussent à développer ces services pour un nombre grandissant de personnes de 4 e âge : d’un côté, un nombre très important de personnes âgées veulent rester le plus longtemps possible à leur domicile ; de l’autre, les séjours de convalescence en hôpitaux coûteraient plus cher que les séjours à domicile. Le conditionnel est de mise, puisqu’une étude de l’Université canadienne vient de montrer que le coût des services à domicile était au contraire plus élevé. 65 L’exemple du réseau Âge d’Or Services Dans le secteur des services, le réseau Âge d’Or Services fait figure de pionnier et préfigure déjà ce que pourrait être le domaine des services aux Seniors dans quelques années. Âge d’Or Services a vu le jour à Troyes en 1991, sur l’initiative d’un jeune entrepreneur, Fabrice Provin En douze ans, Âge d’Or Services est devenu le premier réseau privé français d’aide et d’assistance aux personnes âgées, handicapées et dépendantes, avec une gamme de prestations et de services personnalisés, délivrés en France (et en Belgique) grâce à 60 agences. Le réseau Âge d’Or Services embauche 200 personnes et compte 20 000 clients. En 2002, la CNP en devient l’actionnaire principal, avec l’ambition « de quadriller le plus vite possible le territoire national », explique Fabrice Provin. Les prestations sont l’accompagnement des personnes âgées ou handicapées « au bras » ou avec un véhicule, les services à domicile (entretien, bricolage, jardinage, aide administrative), mais aussi l’installation et la réalisation de services personnalisés liés à l’offre Téléassistance. D’autres partenariats ont été développés avec des acteurs du marché des Seniors, tel le spécialiste des séjours et voyages Seniors : Vacances Bleues. « Âge d’Or Services nous permet de proposer à nos clients de tous les âges des services complémentaires : des courses à domicile, la livraison des bagages lors du retour de vacances, etc. », explique Didier Bertrand, l’ancien directeur du marketing et de la communication, responsable de la stratégie de Vacances Bleues. Le marché de la santé à domicile est aussi en forte progression, et plusieurs acteurs sont déjà présents sur le marché. C’est le cas de la société Bastide, créée en 1977 et cotée en Bourse. Bastide propose la vente et la location de matériel médical à domicile et des prestations de services (livraison, installation et suivi) via ses 56 magasins en France. Les marchés de l’aménagement de la maison L’une des grandes volontés des Seniors et des personnes âgées est de rester le plus longtemps à domicile. Dans bien des cas, cela demande des aménagements plus ou moins lourds des habitats. 66 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’étude « Les grandes tendances Seniors et habitat » indique même que c’est l’un des secteurs qui va croître le plus vite dans les années à venir. Il peut s’agir de la réorganisation de l’aménagement intérieur, d’installer des sièges « monte-escaliers » ou d’automatiser certains éléments de la maison. Même si des sociétés telles que Somfy ne ciblent pas directement les Seniors, l’automatisation peut faciliter la vie des personnes âgées à domicile. Notre étude nous montre que c’est souvent les enfants qui sont prescripteurs de ce genre d’installation pour deux raisons : les Seniors âgés ont peut-être encore peur des pannes de ces appareils et les enfants sont mieux informés sur les possibilités offertes par la domotique ou l’automatisation. Parmi les pièces susceptibles d’être aménagées, l’étude cite, par ordre d’importance : la salle de bain, la cuisine et la chambre à coucher, avec des lits plus hauts. Dans la salle de bain, des fabricants tels que Premier proposent notamment des baignoires à ouverture latérale. Ce marché va s’inspirer des aménagements réalisés dans plusieurs chaînes d’hôtels aux États-Unis. Des groupes comme Choice ont beaucoup travaillé sur l’aménagement des chambres en tenant compte des effets du vieillissement, mais aussi des attentes des Seniors. Le « marché » de la dénutrition des personnes âgées Le phénomène de dénutrition est un problème de santé publique pour lequel le ministère de la Santé a lancé un plan d’action sur cinq ans. Le nombre de personnes souffrant de dénutrition est estimé entre 350 000 et 500 000 pour les personnes vivants à domicile et au minimum entre 100 000 et 200 000 pour celles vivant dans des institutions gériatriques. La dénutrition est source de pathologies secondaires, de retards de cicatrisation et d’une augmentation de la durée d’hospitalisation. Certaines études estiment qu’un tiers des personnes âgées vivant chez elles présentent un état de dénutrition léger ou sévère. Plusieurs industriels et laboratoires proposent des produits adaptés à ce problème : Nutricia, Nestlé, Abbott, Chiesi, Novartis, etc. (source : nutrisenior.fr). Par ailleurs, plus de 40 % des résidents en maison de retraite seraient atteints de dénutrition sévère (source : professeur Ricour, Hôpital Necker). Parmi les initiatives 67 intéressantes dans ce secteur, on peut évoquer le progiciel développé par Didier Buffet, expert en nutrition gériatrique, qui permet de détecter les cas de dénutrition en institution. L’augmentation des peurs La peur augmente avec l’âge Les personnes âgées s’inquiètent souvent plus que les plus jeunes. C’est l’une des particularités du troisième âge. Les facteurs de peur ou d’inquiétude sont nombreux : sans trop de surprise, les problèmes de santé viennent en tête du palmarès des idées noires chez les aînés. Plus précisément, 64 % ont identifié la santé parmi leurs premiers sujets d’inquiétude, même si près de 60 % d’entre eux disent être en bonne forme. Sur la liste des principaux sujets d’inquiétude viennent ensuite : les relations avec la famille et les amis (29 %), les relations interpersonnelles (26 %), les finances (26 %), les questions existentielles – la vie, la mort – (15 %) et l’avenir (14 %). Un nombre très important de Seniors âgés craignent de devenir un fardeau pour leur famille ou de devoir être pris en charge par des étrangers à cause de la détérioration de leur état de santé. Comme les thèmes d’inquiétude sont étroitement liés à la situation de vie (notons au passage que les étudiants universitaires s’inquiètent, dans l’ordre, pour les études, les finances, le travail et les relations amoureuses), ils changent avec l’âge, soulignent les chercheurs. Ainsi, l’avenir, le travail et l’argent préoccupent davantage les personnes de 55 à 64 ans que les plus âgés. Par ailleurs, les 75 ans et plus s’inquiètent moins des relations avec la famille et les amis que les Seniors un peu plus jeunes. Mince consolation à la vieillesse : ce sont les individus de 75 ans ou plus qui ont le moins tendance à s’inquiéter. Une hausse du sentiment d’insécurité D’autres études montrent une augmentation du sentiment d’insécurité chez les plus de 60 ans. Ce constat soulève un paradoxe, car ils sont en majorité moins exposés que les plus jeunes aux actes de délinquance. En effet, les Seniors sont plus 68 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 nombreux à vivre à la campagne dans un cadre de vie préservé. D’après l’Insee (« Le cadre de vie des plus de soixante ans – 2001 »), ils prennent moins de précautions pour garantir leur sécurité personnelle. De plus, les Seniors qui vivent en milieu rural sont peu exposés aux actes de malveillance. D’après l’Insee, 2 % d’entre eux ont été cambriolés, et 5 % ont déclaré un vol ou un cambriolage de leur véhicule. Cette réalité n’empêche apparemment pas le sentiment d’insécurité d’être plus important chez les plus de 60 ans. Parmi les raisons de ce paradoxe, une accentuation « naturelle » des peurs chez les personnes âgées, mais aussi la solitude d’un grand nombre de Seniors. Le sentiment d’isolement reste relativement élevé chez les plus de 60 ans. Une personne sur cinq déclare se sentir seule et cette sensation est d’autant plus importante que l’on est âgé. Les baby-boomers sont à un stade de vie différent et l’accentuation du sentiment d’insécurité chez eux prend sa source ailleurs. C’est principalement les peurs liées aux revenus qui arrivent en tête chez 42 % des 50-59 ans (source : « Les baby-boomers en France »). Les études montrent qu’avec les réformes des retraites et un taux de chômage élevé chez les plus de 50 ans, le sentiment d’insécurité augmente chaque année. Leurs revenus sont ce que les baby-boomers déclarent vouloir améliorer en priorité, mais ils estiment que c’est là une des attentes qu’ils ont le moins de chances de satisfaire. D’une manière générale, les baby-boomers sont l’une des générations les plus stressées. Actuellement, la préservation des biens qu’ils ont acquis est une de leurs grandes préoccupations. C’est ainsi qu’ils sont les premiers à demander des parkings clôturés dans les hôtels pour mettre à l’abri leur véhicule. Les 5059 ans semblent plus sensibles à la hausse « générale » de l’insécurité dans les pays industrialisés. Pour répondre au sentiment d’insécurité des Seniors, plusieurs secteurs apportent déjà des solutions. C’est le cas de la télésurveillance (ou télé-alarme, télé-assistance, télé-sécurité) et des services d’assistance à distance, qui relient un abonné aux services d’urgence. Les principaux acteurs de ce marché sont EuropAssistance, La Mondiale et Présence Verte. Créé en 1987, Présence Verte est aujourd’hui le premier service de télé-assistance en France par sa couverture géographique. Si la plupart des 69 personnes âgées disposant de faibles ressources ont eu la possibilité d’accéder à ce service via notamment les conseils généraux, les Seniors plus aisés ne sont encore que partiellement équipés. Cette situation et l’augmentation constante du nombre des plus de 80 ans laissent entrevoir des opportunités de croissance importante pour les acteurs d’un secteur de la surveillance qui, en outre, est susceptible de faciliter le maintien des personnes âgées à domicile. D’une manière générale, les acteurs intervenant auprès des aînés connaissent leurs principales préoccupations. « En étant plus attentifs à leurs inquiétudes et à leur niveau d’anxiété, ils pourront mieux orienter leurs interventions et ainsi diminuer la prescription de médicaments trop souvent utilisés auprès des gens de cette génération », expliquent des spécialistes dans une étude réalisée au Québec. Pour répondre à la principale inquiétude des baby-boomers, les assurances et les banques ont un grand rôle à jouer. Parmi les produits d’épargne qui sont susceptibles de satisfaire leurs attentes de sécurité financière, nous trouvons les produits d’épargne complémentaire. Quant aux assurances obsèques et aux assurances dépendances, elles sont très demandées par les Seniors les plus âgés, plus tournés vers l’avenir et souvent les plus inquiets. Vers un ralentissement de la société ? Il y a quelques mois, Ken Martin, le responsable du centre d’appel téléphonique HTA nous a exposé ses difficultés. Travaillant depuis plusieurs années pour une société ciblant les Seniors, il avait remarqué que la communication entre les hôtesses de la « hot line » et les clients âgés était particulièrement difficile. Il voulait comprendre pourquoi et trouver une solution. Le constat fut le suivant : la moyenne d’âge des personnes prenant les appels téléphoniques était de 23 ans. Celle des appelants dépassait 60 ans. Ce problème de communication entre personnes de générations éloignées est de plus en plus fréquent dans toutes les activités impliquant un contact avec la clientèle Senior. Dans le cas de la société de Ken Martin, on a résolu le problème en formant les hôtesses à mieux gérer leurs contacts avec les Seniors, en particulier par un ralentissement « général » 70 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 du tempo des conversations. Prendre plus de temps permettait d’améliorer les contacts entre les appelants et les hôtesses. Cet exemple illustre la différence importante de tempo entre une personne de 23 ans et une autre de 60 ans. Ces différences sont dues aux effets de génération et du vieillissement. Une étude d’une université américaine montre l’importance du ralentissement « général » du tempo lorsque l’on prend de l’âge. Ce ralentissement s’explique en partie par l’aspect plus « réfléchi » d’une prise de décision d’un Senior. Et si ce ralentissement de tempo avait pour conséquence de « ralentir » l’ensemble de la société ? Prenons des exemples. Nous savons maintenant qu’il faut une plus grande quantité d’informations pour aboutir à une prise de décision chez un Senior. Non que ceci soit directement lié à l’âge, mais il est normal que quelqu’un qui connaît mieux ses besoins cherche à savoir si un produit ou service correspond exactement à ce qu’il attend. Dans les années à venir, les entreprises cibleront directement les Seniors ou, du moins, prendront en considération leurs attentes. Les annonceurs vont ainsi devoir progressivement tenir compte de ce phénomène de « ralentissement » du tempo dans le développement de leurs campagnes de publicité. Autrement dit, nous allons vraisemblablement voir augmenter la durée des écrans publicitaires à la télévision, et leur tempo ralentir. C’est en somme l’inverse de ce qu’a fait l’Américain Tony Schwartz pour MTV au milieu des années 1980 : à l’époque, les publicités de trente secondes inventées en 1971 commençaient à paraître un peu lentes. Schwartz fut embauché pour réduire une série de spots publicitaires de trente secondes à huit secondes, sept secondes, puis cinq secondes. La théorie développée par Schwartz était bien adaptée à un public jeune de plus en plus habitué à zapper. Combien d’entre nous n’ont pas un jour été sommés d’arrêter de zapper par des parents à bout de nerfs ? Notre tempo de « jeune » était trop rapide pour eux. Prenons maintenant l’exemple de la circulation automobile. Selon une étude réalisée par Sociovision Cofremca pour la Prévention routière et la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA), on voit se confirmer le « caractère prudent et respectueux des règles de conduite [des Seniors] : ils sont 46 %, 71 contre 30 % de la population globale, à estimer inadmissible de ne pas respecter les limites de vitesse… ». La vitesse de conduite diminue avec l’avancée en âge. Même si certains gouvernements réfléchissent aux possibilités de limiter l’accès à la conduite des personnes très âgées, on peut estimer que le nombre d’automobilistes conduisant doucement ou plus lentement va augmenter dans les vingt prochaines années. Assistance téléphonique, publicité, automobile… La liste n’est pas close : qui n’a jamais vu une personne âgée en difficulté sur un tapis roulant ? Qui n’a pas déjà fait le lien entre un ralentissement à une caisse de supermarché et la présence de personnes âgées ? C’est bien l’ensemble du mouvement de la société qui pourrait ralentir dans les prochaines années avec la croissance du nombre de Seniors. Plus de personnes seules et plus de femmes Les conséquences du vieillissement de la population sont multiples, mais difficiles à mesurer : elles sont d’ordre économique (moins d’actifs), d’ordre social (plus de retraités, de malades, de dépendants, etc.), elles concernent le niveau de vie mais aussi les modes de vie, les relations sociales et probablement les modes de pensée. L’une de ces conséquences est l’aggravation du problème de la solitude dans notre société. En France, aujourd’hui, près de 20 % des sexagénaires, 30 % des septuagénaires et plus de 40 % des octogénaires vivent seuls. Certaines années, on a pu constater une réduction de l’écart entre l’espérance de vie des femmes et de celles des hommes. Les femmes continuent cependant à vivre plus longtemps. C’est l’une des deux raisons qui expliquent que l’on compte plus de veuves que de veufs. L’autre raison tient au fait que les femmes épousent souvent des hommes plus âgés qu’elles. En 2010, il y avait près de 4 millions de veufs et de veuves en France, soit 6,71 % de la population, dont 3,2 millions de femmes. Il y a donc cinq fois plus de veuves que de veufs. À 60 ans, une femme sur cinq vit seule, contre un homme sur dix. L’âge moyen du veuvage est d’environ 73 ans. 72 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Plus on est âgé, si l’on vit seul, plus on est « objectivement » isolé, mais aussi plus sensible au sentiment de solitude (il semble que cela soit particulièrement vrai des femmes, qui souffrent sans doute plus de la solitude). La perte d’un conjoint augmente le taux de mortalité (dans l’année suivant le décès) du survivant de 80 % chez les hommes et de 60 % chez les femmes. Une autre conséquence de la solitude est la chute importante de la consommation chez les femmes après 76-78 ans. Des Seniors toujours actifs avec plus de temps libre Après 60 ans, les Seniors sont confrontés aux mêmes mutations : la grande majorité d’entre eux ont cessé toute activité professionnelle, et beaucoup ont vu leurs enfants quitter le foyer familial. Seuls 11 % des 60-69 ans cohabitent avec au moins un de leurs enfants. À cet âge, les Seniors vivent une véritable transformation de leur statut social qui se traduit par une augmentation du temps libre et une plus grande disponibilité pour les loisirs. La hausse de l’espérance de vie et du niveau de vie ou les progrès technologiques ont été tels qu’avoir 60 ans aujourd’hui signifie moins approcher de la fin que commencer une troisième partie de leur vie, une nouvelle vie que leurs aînés n’ont pas connue. Quelles en sont les conséquences ? À quoi les Seniors consacrent-ils cette « troisième » vie, ce temps libre ? Quels sont les domaines d’activité qui vont en profiter ? L’arrivée à la retraite se faisait en France à 58,9 ans en moyenne avant la réforme du système de retraite. Progressivement celle-ci devrait se fera plus tard au cours des prochaines années avec l’allongement progressif de la durée de cotisation. Pour le moment, un retraité de plus de 60 ans dispose de 8 heures et 32 minutes de temps libre par jour, contre 3 heures et 19 minutes pour les actifs occupés (source : Insee). Cette augmentation soudaine du temps libre est plus ou moins voulue par les Seniors. Même si près des trois quarts des 45-55 ans aimeraient partir le plus tôt possible à la retraite, une partie des Seniors ont des difficultés à accepter le changement brutal qu’entraîne la cessation de toute activité professionnelle. C’est le cas notamment des Seniors 73 Actifs (voir le Chapitre 3), qui sont 87 % à souffrir d’un manque d’activité. Après une période de réflexion, les Seniors de ce profil se mettent finalement à pratiquer beaucoup d’activités. Quant aux Seniors Réfléchis, ils sont plus nombreux à apprécier un temps libre qui va leur permettre de se consacrer plus souvent à eux-mêmes, notamment pour se cultiver. ProfilsValeurs Perception de la retraite et du temps libre Seniors Actifs La retraite est très « théorique » pour les Seniors de ce type. Ils ont du mal à rester inactifs et vont continuer à pratiquer des activités sportives, associatives, etc. Seniors Sociables Ce sont ces Seniors qui souffrent le plus de la solitude. Rester en contact avec le reste de la société leur est vital. Nous les retrouvons souvent dans les associations. Seniors Réfléchis Ils font partie des Seniors qui acceptent le plus volontiers le temps libre. Ils en profitent pour se cultiver et aiment partir en voyage, à la découverte du monde. Seniors Enthousiastes Les Seniors de ce profil sont partagées. Certains apprécient que leur temps libre leur permette enfin de « s’amuser », de voir des amis. Cependant, près de 38 % disent avoir des difficultés à s’habituer à la retraite les premières années. Seniors Leaders Également très actifs, les Seniors de ce profil refusent bien souvent la retraite, car cela signifie pour eux appartenir à la « catégorie » des personnes âgées. C’est le profil qui refuse le plus de reconnaître son vieillissement. C’est pourquoi nous retrouvons beaucoup de ces Seniors à la tête d’associations, de comités d’animation, etc. Seniors Rigoureux Après une période d’adaptation difficile assez courte, les Seniors Rigoureux organisent leur temps libre de manière ordonnée. Ils s’occupent souvent à des tâches ménagères et domestiques. Seniors Inquiets Ces Seniors sont les plus inquiets par rapport à leur avenir. Après l’avoir « organisé » (assurance dépendance, obsèques, etc.), ils profitent souvent de la vie « avant qu’il ne soit trop tard ». 74 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Seniors Originaux Les Seniors Originaux retraités se sentent souvent seuls. Mais la retraite est aussi, pour beaucoup d’entre eux, le moment où ils peuvent enfin consacrer du temps à une passion : peinture, musique, etc. Les activités des Seniors « Les Seniors sont de plus en plus jeunes et de plus en plus actifs », dit-on souvent. Leurs activités varient fortement en fonction de l’âge et des études approfondies montrent qu’elles dépendent de facteurs liés au vieillissement, mais aussi de facteurs générationnels. On s’en doute, le vieillissement limite progressivement nos activités et réduit nos liens sociaux, en particulier après 73-75 ans. Plus intéressants sont les phénomènes liés aux générations qui permettent de mieux comprendre les activités des Seniors et de faire de la prospective. À âge égal, les Seniors d’aujourd’hui sont plus actifs que les générations précédentes : ils voyagent plus et pratiquent davantage d’activités sportives. Les activités des Seniors peuvent être analysées à un instant donné, mais aussi de manière plus dynamique, afin d’en comprendre les changements au fil des ans. Nous commencerons par parler des 50-60 ans, puis des retraités et, enfin, des plus de 75 ans. Les Baby boomers (50-60 ans) Il s’agit essentiellement de la génération des baby-boomers nés après la Seconde Guerre mondiale. Les plus âgés d’entre eux ont eu 57 ans en 2010 et une grande partie de cette cohorte est encore en activité. Leurs conditions de vie et leurs emplois du temps sont plus proches de ceux des jeunes actifs que des retraités actuels. L’activité professionnelle de cette génération est cependant faible en France, par rapport à celle des autres pays de l’Union européenne. Une grande partie des salariés Seniors sont écartés du monde de l’entreprise pour plusieurs raisons. Leur masse salariale est jugée trop importante, ou l’on craint qu’ils ne soient inadaptés 75 aux nouveaux modes de travail et aux nouvelles technologies. Ce phénomène de la vie professionnelle d’exclusion des plus de 50 ans devrait perdurer. D’après une enquête de la Cegos, qui a interrogé 300 DRH, les entreprises ne sont pas du tout prêtes à infléchir cette tendance. Interrogés sur le départ à la retraite annoncé des baby-boomers, les DRH reconnaissent que l’impact du phénomène devrait les pousser à modifier leur attitude, notamment avec des plans de remplacement. Mais 60 % d’entre eux déclarent vouloir poursuivre leurs pratiques actuelles de retraites anticipées ! C’est ainsi qu’une part de la génération des 50-60 ans est composée de préretraités, de chômeurs ou d’inactifs exemptés de recherche d’emploi. D’autre part, alors qu’aux États-Unis 86 % des 50-55 ans veulent (ou, plus souvent, doivent) continuer de travailler pendant leur retraite, les salariés français souhaitent s’arrêter le plus tôt possible. Une tâche plus difficile attend les baby-boomers avec la prise en charge de parents très âgés, parfois dépendants. Cette génération aura à soutenir non seulement ses enfants, mais aussi ses parents. Les femmes, dans cette activité réputée difficile, jouent souvent le rôle principal, c’est pourquoi certains experts attendent de l’État qu’il les aide activement à le remplir. Les retraités actuels Le primat du quotidien s’exprime à travers le temps consacré au sommeil et aux tâches domestiques, mais surtout à la suprématie de la télévision. Le gain de temps libre d’un retraité par rapport à un actif est en moyenne de 5 heures par jour. Il se reporte en grande partie sur les tâches domestiques et les besoins physiologiques. Mais il n’y a pas de règle. Pour la plupart des Seniors, la retraite entraîne est un réaménagement complet de leur emploi du temps, avec une plus grande variété d’activités, dont la télévision, à laquelle ils consacrent en moyenne trois heures et quart par jour, est l’une des toutes premières. Les retraités d’aujourd’hui appartiennent à la première génération qui va véritablement vivre cette troisième partie de vie en bonne santé et avec des moyens financiers élevés. Leurs aînés ont été moins nombreux à connaître cette chance. Cependant, cette 76 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 situation perturbe nombre de jeunes retraités. Perdant leurs points de repère, ils doivent véritablement « inventer » cette nouvelle période de leur vie. C’est l’une des raisons qui poussent beaucoup de Seniors à préférer un départ en retraite plus progressif. Les réformes des systèmes de retraite pourraient bien faire évoluer cette situation. Les personnes prenant leur retraite après 60, voire 65 ans, devraient être plus nombreuses dans les années à venir. La journée moyenne des Seniors Retraités Ensemble Hommes Femmes Hommes Femmes Temps physiologique 12 h 59 12 h 55 11 h 56 12 h 11 Temps domestique 3 h 49 5 h 05 2 h 24 4 h 23 Temps de loisirs 5 h 33 4 h 44 3 h 55 3 h 17 Temps de sociabilité (hors repas) 1 h 00 1 h 00 57 minutes 56 minutes Temps libre (loisirs et sociabilité) 6 h 33 5 h 34 4 h 52 4 h 12 Transports (hors trajets domicile-travail) 33 minutes 25 minutes 35 minutes 35 minutes Source : Le Marketing Book Seniors 2002 ; TNS Secodip. Bien que la majorité des Seniors se consacrent à des activités telles que le jardinage, le bricolage, le sport, etc., beaucoup se mettent aux voyages. On peut séparer les retraités en deux groupes : ceux qui voyagent (56 %) et ceux qui ne voyagent jamais (44 %). D’après l’étude « Les Seniors et le tourisme », 17 % partent une fois par an en voyage, 15 % deux fois et quelque 10 % font au moins quatre voyages par an. Ils partent le plus souvent en voiture ou en avion, ont une prédilection pour la découverte de la nature ou le tourisme dit « culturel ». Avec l’arrivée des baby-boomers, les voyages devraient prendre plus de place dans l’emploi du temps des Seniors. Cette idée n’est cependant pas toujours reprise par les experts. Certains d’entre eux prédisent qu’une grande partie des 77 Seniors qui ont beaucoup voyagé pour leur travail vont au contraire se « sédentariser ». Après 70-75 ans Au-delà de 70-75 ans, on constate chez les Seniors une baisse de la sociabilité et un début de repli sur soi qui a tendance à se développer avec le grand âge. Après la retraite, à mesure qu’elles vieillissent, les relations des personnes âgées avec leurs proches se modifient profondément. La perte des contacts professionnels est souvent compensée par le développement des relations avec la famille. Avec l’apparition de handicaps pénalisants et des événements comme le décès d’un conjoint, la sociabilité diminue fortement. Les femmes semblent plus touchées par ce phénomène que les hommes. L’étude sur les relations de voisinage lancée par la Fondation de France indique que le décès de proches est un moment particulièrement important à partir duquel le quotidien peut basculer. La perte d’amis « de son âge » est aussi à l’origine d’une prise de conscience du rétrécissement du réseau relationnel. En fonction des secteurs, la consommation commence également à diminuer avec l’avancée en âge. L’envie même de consommer diminue progressivement, renforcée par l’accentuation de peurs liées à la dépendance et au manque de ressources financières. Par exemple, les professionnels de la vente à distance notent une forte chute de chiffre d’affaires par tranche âge entre 76 et 78 ans. Les associations Près d’une personne âgée sur deux et 39 % des plus de 65 ans sont membres d’une association. Leurs principales motivations sont l’épanouissement personnel et la pratique d’activités communes. Les associations les plus courues sont les clubs de 3 e âge, les associations culturelles, sportives et musicales. Pour les retraités, c’est un moyen d’être inséré socialement et de palier le manque de relations sociales dû à la retraite : ceux qui participent à la vie associative ont en général davantage de relations amicales et sortent plus souvent. Les hommes fréquentent les organisations culturelles et artistiques (13,6 %) ou sportives (12,8 %), mais aussi 78 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 les associations syndicales ou politiques (7,8 %) (source : ministère de la Culture et de la Communication, Seniorscopie). Les Seniors les plus âgés participent plus volontiers à des associations tournées vers les autres et fondées sur une communauté d’intérêt ou un but humanitaire. C’est ici aussi une question de générations. Les Jeunes Seniors, plus centrés sur leurs propres besoins, se tournent plus souvent vers des activités relatives à l’épanouissement personnel. Chez les plus âgés, la valeur « du groupe » et de la collectivité est plus grande. L’exemple d’Ecti Ecti, association de cadres retraités bénévoles, a pour vocation d’apporter aide et conseil sur les plans économique et social aux entreprises. Anciens responsables issus de l’entreprise, de l’administration, des professions libérales, de l’artisanat, ces Seniors veulent rester utiles et disponibles en continuant une activité pendant leur retraite. « Ce qui est très important dans une association comme Ecti, c’est de permettre aux retraités de garder des contacts avec la vie active et de rencontrer des personnes qui ont eu des vies et des expériences complètement différentes des leurs », explique Georges Dupasquier, vice-président exécutif de l’association. L’expérience pratique des membres de l’association leur permet d’apporter aide et conseil aux PME/PMI, associations, collectivités locales, administrations, ONG et autres organisations internationales, en France et dans les pays émergents. « Lorsque nous faisons des interventions, nous demandons que l’entreprise paie les frais directs liés à la mission et une participation aux frais de l’association (sous forme de cotisation) », souligne Jean-Paul Wevers, en charge de la communication de l’Ecti. L’exemple de la Fiapa La FIAPA (Fédération Internationale des Associations de Personnes Agées) est une organisation internationale non gouvernementale (OING) créée à Paris le 26 septembre 1980 par quatre associations nationales de personnes âgée Sa croissance est, depuis lors, significative, puisque dès 1992, ses associations membres sont implantées dans 37 pays et rassemblent 100 millions d'adhérents. 79 Actuellement, elle est représentée sur les cinq continents et fédère 150 associations ou fédérations réunissant plus de 3 000 associations, ce qui représente environ 300 millions de seniors répartis sur une soixantaine de pays. Représentant leurs intérêts au plan international, elle est dotée du statut consultatif ou participatif auprès des plus grandes organisations internationales : ONU, UNESCO, OMS, Conseil de l'Europe, Union Européenne. L’avenir L’arrivée des baby-boomers à la retraite va très probablement changer radicalement ces données dans les années à venir. Chez les jeunes retraités, les activités de loisirs sont déjà plus diversifiées, en raison notamment de leurs habitudes de consommation. Les secteurs du voyage et des loisirs sont appelés à se développer fortement dans les années à venir. C’est déjà le cas pour celui du sport. Le nombre d’adhérents de la Fédération française de retraités sportifs (FFRS) est en très forte augmentation depuis plusieurs années. On peut également penser que l’usage d’Internet et des nouvelles technologies va se répandre chez les Seniors de demain. La génération de l’après-guerre s’adapte plus facilement et s’intéresse plus volontiers aux nouveaux produits. Les relations intergénérationnelles L’allongement de l’espérance de vie a des effets considérables sur les liens qui unissent les générations. Les familles qui étaient autrefois « horizontales » (avec beaucoup de frères et sœurs et moins de générations) deviennent progressivement « verticales ». C’est-à-dire que le nombre de générations dans une même famille est en hausse – on trouve des familles comptant cinq générations. Les premiers baby-boomers sont pour beaucoup d’entre eux grands-parents et deviennent une génération pivot : en plus de leurs enfants, ils doivent s’occuper de leurs parents vieillissants. Ces liens intergénérationnelles sont notamment caractérisés par des transferts financiers importants. 80 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les liens affectifs entre les générations Les liens affectifs sont toujours aussi primordiaux entre les générations, même si le nombre de personnes âgées seules est important. Plus de 40 % des couples mariés rendent visite à leurs parents au moins une fois par semaine et seuls 2 % ne le font jamais. Cette fréquentation est proportionnelle à la proximité géographique. D’autre part, les relations entre les générations ont évolué durant les dernières décennies. Autrefois, ces relations dépendaient de la position de chacun au sein de la famille. Le « patriarche » était détenteur de l’autorité. Maintenant, chaque membre aspire à plus d’indépendance. Autre fait important : le nombre plus élevé de divorces chez les baby-boomers et les jeunes générations fait que certains grandsparents ne voient plus leurs petits-enfants. D’après l’article publié dans Population et sociétés d’avril 2010 (Ined, avril 2010), « les personnes âgées d’aujourd’hui ont plus souvent divorcé avant d’atteindre 60 ans que leurs aînées, mais, passé cet âge, elles hésitent également moins à rompre leur union : durant ces dix dernières années, le nombre de divorces des 60 ans ou plus a augmenté de 28 % chez les femmes et de 39 % chez les hommes. » Cependant, cette croissance est plus importante chez les 50-60 ans, avec un taux de divorce qui a presque doublé. Et, contrairement à une opinion encore répandue, la retraite n’est guère une menace pour la stabilité des couples : le taux de divorce ne cesse de diminuer avec l’avancée en âge. En 2000, à 60-64 ans, seuls 2,9 hommes et 1,9 femme pour mille ont divorcé, c’est-à-dire beaucoup moins que chez les quinquagénaires et, à l’inverse, beaucoup plus que chez les septuagénaires (1 homme et 0,3 femme pour mille). Les aides financières entre les générations L’Insee estime à 33 millions d’euros les transferts financiers entre générations : ces aides vont essentiellement des grandsparents vers les enfants et les petits-enfants. L’» Étude comportementale sur les solidarités financières entre générations » menée par la société Panel On The Web en 2001 nous enseigne que les jeunes générations restent plus longtemps au domicile familial et sollicitent financièrement 81 leurs aînés plus souvent. Les Seniors se disent à 66 % prêts à financer les études d’un tiers. L’Insee indique par ailleurs que les couples de 60 ans consacrent 6 % de leurs revenus à aider les jeunes générations de leur famille. Les transferts financiers sont cycliques : avant 45 ans, on reçoit plus qu’après cet âge. Du côté des donateurs, ce sont les plus de 65 ans qui donnent le plus. Ces transferts peuvent servir à financer des dépenses ponctuelles : achat d’une voiture, aide pour la maison des enfants, financement d’une partie des études, mais aussi des projets de plus longue durée. C’est ainsi que la plupart des banques proposent des produits spécifiques (du type assurance vie) qui permettent aux générations les plus anciennes de constituer une épargne pour les plus jeunes. Dans les années qui viennent, nous allons vraisemblablement assister à une hausse des transferts des jeunes générations vers leurs aînés, les Grands Seniors étant de plus en plus nombreux à devenir dépendants. Cette dépendance a un coût élevé qui est en partie pris en charge par la famille. Les donateurs seront vraisemblablement la génération du baby-boom. L’exemple d’Accordages Partout en France, des habitants, bénévoles, associations, professionnels et élus oeuvrent au quotidien pour tisser des liens entre les générations. Tous les domaines de la vie en société sont concernés : habitat, services, culture, mémoires, éducation, formation, insertion, environnement, TIC… Ces actions sont facteurs de dynamismes individuels et de reconstruction des liens sociaux de proximité. De plus en plus, les pouvoirs publics, notamment les collectivités territoriales, perçoivent positivement l’impact de ces actions sur le développement économique, social et culturel. L’association Accordages (www.accordages.com) a été créée pour une démarche qualité appuyée sur des outils méthodologiques, l’évaluation des pratiques et la diffusion des initiatives innovantes et reproductibles afin de promouvoir l’éthique de l’intergénération. Appuyée sur une expérience de plus de 6 ans d’intervention sur le terrain, d’évaluation des pratiques et de production d’outils méthodologiques, Accordages accompagne les porteurs de projets (collectivités territoriales, CCAS, entreprises, associations, centres culturels, etc) dans la réalisation de leurs projets : conseil et étude, 82 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 conduite de projets et animation de groupes, formation au montage et à l’animation de projets, conception et organisation d’événements : colloque, concours.. Les grands-parents D’après l’Insee, la France compte 12,6 millions de grands-parents, dont 2 millions sont également arrière-grands-parents. Nous devenons grands-parents à 49 ans, moyenne qui devrait légèrement augmenter dans les prochaines années. Le nombre de grands-parents doit encore progresser, car la génération du baby-boom est plus nombreuse et devrait vivre plus longtemps. Les grands-parents baby-boomers vont vraisemblablement révolutionner la notion de « grand-parentalité » tout comme ils ont transformé la société en remettant tout en question à chaque étape de leur existence. Chaque année, ce sont près de 3 milliards d’euros qui sont dépensés par les grands-parents pour leurs petits-enfants. Mais qui sont ces nouveaux grands-parents ? En quoi diffèrent-ils des générations plus âgées ? L’étude « Les Seniors en France » apporte quelques éléments de réponses. En premier lieu, les grands-parents d’aujourd’hui sont plus aisés financièrement et ont un niveau d’études moyen supérieur à celui de leurs aînés. Ils sont plus nombreux à avoir un rôle actif vis-à-vis de leurs petitsenfants, mais sont aussi plus indépendants. « Je veux bien voir mes petits-enfants, mais quand je le veux », nous a expliqué une grand-mère de 56 ans. Les grands-parents semblent jouer un grand rôle au côté des parents. Ce rôle inclut l’enseignement des « valeurs » aux enfants, l’échange d’idées par la discussion, le partage de loisirs. Claudine Attias-Donfut, directeur de recherche sur le vieillissement à la Cnav, explique que les grands-parents sont de véritables compagnons de jeux pour leurs petits-enfants, au même titre que leurs camarades. 68 % des grands-parents déclarent voir leurs petits-enfants toutes les deux semaines et 24 %, une fois par mois. Les moyens de communication sont le téléphone pour 81 % des grands-parents, le courrier pour 12 %. Les grands-parents dépensent en moyenne 600 euros pour leurs petits-enfants chaque année. La plus grande partie va aux besoins 83 « élémentaires » des enfants. 52 % disent les aider pour les besoins liés à l’éducation et 45 % pour les besoins de la vie courante. Le rôle des grands-parents évolue lentement avec l’arrivée des Jeunes Seniors. C’est plus globalement les relations entre les différentes générations au sein même de la famille qui changent. Les nouveaux grands-parents jouent un rôle moins formel que les précédents. Les liens sont plus intenses et la notion d’amour est plus importante. Les modes d’éducation ont également changé, en particulier à l’égard des enfants de la génération de baby-boomers. L’éducation que cette cohorte a donnée à ses enfants est fort différente de celle qu’elle a elle-même reçue. Ces différences expliquent en partie que les relations entre petits-enfants et grandsparents aient fortement changé pendant les trente dernières années. Pour les entreprises, ces changements pourraient offrir de nouvelles opportunités. C’est d’autant plus vrai que les nouveaux grands-parents sont plus habitués à la société de consommation que les plus âgés. Certains professionnels parlent de « marketing des grands-parents ». L’agence de voyage américaine Grandtravel est spécialisée dans les voyages entre les grands-parents et les petitsenfants. Elle devient si populaire que d’autres tour-opérateurs, hôtels, compagnies de croisière et même ElderHostel ont développé des programmes pour répondre à la demande de ce marché. L’exemple de l’industrie du livre Il y a cinq ans, le client type des librairies indépendantes avait plus de 40 ans et consommait 40 % des livres. Aujourd’hui, les études montrent que les plus de 40 ans contrôlent plus de la moitié de ce marché. 63 % des achats de livres d’adultes sont réalisés par les plus de 45 ans. Ceux-ci achètent également 33 % des livres pour les jeunes. 28 % des livres pour enfants sont achetés par les plus de 50 ans. C’est 20 % de plus qu’il y a cinq ans. La grande majorité des plus de 50 ans sont maintenant grands-parents. Les études montrent qu’ils ne devraient pas forcément lire plus dans les prochaines années, mais acheter plus. Le secteur du livre pourrait bénéficier des relations que les grands-parents entretiennent avec leurs petitsenfants pour développer leurs ventes auprès des plus jeunes. C’est en tout cas ce que pense Katherine Khawae, experte américaine des relations intergénérationnelles. 84 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les baby-boomers : une génération pivot La génération du baby-boom représente les personnes nées après la fin de la Secondaire Guerre mondiale. Les premiers babyboomers ont eu 57 ans en 2010. Avec l’allongement de l’espérance de vie, le nombre de personnes partiellement ou totalement dépendantes est en très forte augmentation. D’un côté, cette génération de Jeunes Seniors va continuer d’aider ses enfants, mais elle va aussi devoir assister ses aînés. Cette situation nouvelle, par son ampleur, pourrait aussi influencer les relations entre les générations. Certaines entreprises l’ont bien compris, à l’image de ce groupe de maisons de retraite aux États-Unis qui cible les Grands Seniors via leurs enfants : « Offrez une place à vos parents dans nos résidences et vous vous sentirez soulagés de les savoir en sécurité », dit sa publicité. L’idée a d’ailleurs été reprise par une société spécialisée dans la télésurveillance. Les Jeunes Seniors et les générations au travail L’effet du vieillissement de la population salariée, conséquence de l’évolution démographique, devrait entraîner, au sein même de l’entreprise, le renforcement des différences entre les générations. La jeunesse des années 1960 a vieilli et a en grande partie atteint la cinquantaine. L’augmentation du nombre de salariés de plus de 50 ans devrait accentuer les conflits entre les générations. « La question du travail collectif entre Juniors et Seniors se pose alors clairement », explique Jean-François Michel, spécialiste du management intergénérationnel. « Il s’agit de savoir comment les différentes générations vont pouvoir collaborer de façon optimale. » Car les choses sont loin d’être simples. Chaque génération a son propre vécu, ses propres valeurs et sa propre histoire. 85 Vers une migration géographique avec le départ en retraite ? Leurs logements actuels Les Seniors sont plus nombreux à posséder leur propre logement, qui est pour la majorité d’entre eux une maison individuelle. 58,9 % des propriétaires ont plus de 60 ans. 13 millions des plus de 50 ans possèdent une maison individuelle et 5,5 millions un appartement. Seuls 25 % des plus de 50 ans sont locataires. L’étude Simm 2000 indique qu’un Senior sur quatre habite un appartement, contre un tiers de l’ensemble de la population. D’après l’Insee, une personne de plus de 75 ans sur dix réside en foyer-logement ou en institution (maison de retraite, hospice ou autre forme de communauté). C’est aussi le cas de deux personnes de plus de 80 ans sur dix. Le dernier recensement indique une hausse de 24 % du nombre de personnes en foyer-logement ou en institution. Type de logement des plus de 60 ans Domicile Institution Dont maison de retraite Entre 60 et 74 ans 94,3 5,7 3,3 Entre 75 et 79 ans 87,8 12,2 7,8 À 80 ans et plus 80,8 19,2 12,9 Source : Insee. Comme on peut le constater, même après 80 ans, une grande majorité des Seniors occupent encore leur domicile. Et parmi ceux qui vivent en institution, la plupart sont pensionnaires de maisons de retraite, les autres institutions étant des foyers-logements ou d’autres formes de communautés. Une opposition Nord-Sud… On observe une opposition entre une France du Nord plus jeune et une France du Sud et du centre plus âgée. Les départements les plus vieux sont la Creuse (34,4 % de sa population est âgée de plus de 86 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 60 ans), puis le Lot, le Gers, la Corrèze, la Dordogne et l’Aveyron. Les départements les moins âgés sont le Val-d’Oise, la Seine-etMarne, la Seine-Saint-Denis, les Yvelines, l’Oise, l’Ain et la HauteSavoie. Si on détaille par région, les plus de 60 ans sont plus présents dans le Limousin (29,4 %), le Poitou-Charentes, l’Auvergne, le Languedoc-Roussillon et la région Midi-Pyrénées (25 %). À l’inverse, l’Île-de-France (16,6 %) est, devant le NordPas-de-Calais, l’Alsace, la Picardie et la Haute-Normandie (19,5 %), la région où cette proportion est la plus faible. Cette opposition entre le Nord, plus jeune, et le Sud-centre, plus âgé, est due à deux phénomènes : les différences de fécondité et les migrations. Les régions les plus jeunes sont celles qui ont le taux de fécondité le plus élevé. Les régions les plus âgées connaissent une migration des jeunes foyers vers les agglomérations urbaines pour des raisons professionnelles, ce qui y accentue la proportion de personnes de plus de 60 ans. L’accroissement de la population des plus de 60 ans se fait surtout au profit de la grande couronne parisienne, les départements alpins et une partie de la Bretagne. Dans certains cas, le vieillissement de la population est en grande partie dû à l’arrivée de nouveaux retraités. C’est le cas du Var, où 15,6 % des plus de 60 ans sont de nouveaux arrivés, mais aussi de d’autres départements du Sud comme les Alpes-de-Haute-Provence ou les PyrénéesOrientales. Distribution ville-campagne Un quart des plus de 60 ans vivent en milieu rural avec un profil particulier : presque tous les ménages de cet âge occupent une maison individuelle dont ils sont propriétaires dans la plupart des cas, les trois quarts disposent d’une voiture (alors que 12 % ne disposent ni de véhicule personnel ni de transports en commun). 40 % des plus de 60 ans ruraux proviennent de familles d’agriculteurs ou ont exercé eux-mêmes cette profession (ce qui explique l’implantation relativement ancienne et stable de ces ménages) ; plus de 35 % occupent leur domicile depuis au moins trente ans. Les trois quarts des plus de 60 ans habitent en ville. Notons que la part des plus de 60 ans se réduit avec la taille de 87 l’agglomération où ils vivent et que les Seniors urbains habitent plus souvent dans le centre des villes qu’en banlieue. Pour le quart de ceux qui vivent dans des villes de moins de 20 000 habitants, l’habitat individuel est la norme. À l’inverse, les 20 % qui vivent dans l’agglomération parisienne habitent beaucoup plus fréquemment un appartement. Il faut cependant noter que par rapport aux moins de 60 ans, les Seniors urbains occupent plus souvent des maisons individuelles en agglomération ou dans des ensembles pavillonnaires. Les Seniors parisiens ont un profil particulier. Deux tiers d’entre eux disposent de revenus plus élevés que la moyenne. Ceci s’explique par une plus grande proportion d’anciens cadres ou de professions libérales. La moitié des ménages âgés en agglomération parisienne est constituée de personnes vivants seules et, dans 80 % des cas, ce sont des femmes. Vers une migration avec le départ en retraite ? Le déménagement des Seniors à l’âge de la retraite est de plus en plus courant. Le passage à la retraite est un moment important pour beaucoup de Seniors et 59 % d’entre eux déclarent qu’ils aimeraient changer de logement, alors que 31 % seulement des 45-55 ans disent avoir l’intention de déménager à leur retraite. D’ici 2030, le paysage démographique de la France aura bien changé, avec des zones d’émigrations situées au Nord et à l’Est et des zones d’immigration plus au Sud. Ces phénomènes migratoires concernent en partie les retraités et doivent être pris au sérieux, car ils auront des conséquences économiques importantes. D’après l’Insee, dans les trente prochaines années, si les tendances actuelles se maintiennent, la population continuera à se concentrer dans le Sud de la France. Au contraire, elle diminuera dans une large bande du quart nord-est du pays (sauf en Alsace), jusqu’au Massif central. Le vieillissement de la population affectera toute la France, mais touchera plus particulièrement la moitié nord du pays. L’Île-de-France restera sans doute la région la plus jeune. Connaître précisément le rôle joué dans ces phénomènes migratoires par les Seniors est encore difficile. Disons simplement 88 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 que ce rôle est important. En effet, il est difficile de séparer les effets dus au vieillissement de la population de ceux dus aux migrations. La France va vieillir de façon inégale Avec l’hypothèse du maintien de la fécondité à 1,8 enfant par femme, l’âge moyen des Français devrait augmenter de cinq ans d’ici 2030 et approcher les 44 ans. Les moins de 20 ans ne constitueraient alors plus que 21 % de la population, contre plus de 25 % actuellement. À part l’Île-de-France, toutes les régions seraient concernées par le vieillissement de leur population. Un vieillissement inégal selon les régions. Alors qu’en 2030 l’âge moyen des habitants d’Île-de-France ne devrait pas dépasser 40 ans, il devrait être de 47 ans dans le Limousin. Si les échanges migratoires des vingt dernières années se confirment, ainsi que les tendances de fécondité et de mortalité, l’Insee indique que c’est le département du Cantal qui recensera le plus grand nombre de personnes de plus de 60 ans, près d’une personne sur deux (47 %). En Île-de-France, la moyenne d’âge resterait en dessous de 40 ans. Les départements les plus âgés seraient le Lot, l’Aveyron, la Cantal, la Corrèze, la Creuse, la Dordogne, le Gers, etc. Vers plus de simplicité En un siècle, notre environnement a énormément changé et les « révolutions » technologiques ont été nombreuses. Il existe beaucoup d’études sur les rapports qu’entretiennent les Seniors avec les innovations technologiques, mais elles n’aboutissent pas toutes aux mêmes conclusions. D’après certaines, les Seniors sont réfractaires aux nouveaux produits, d’autres affirment le contraire. Si, dans l’ensemble, les Seniors les plus âgés sont plus réticents aux nouveaux produits, l’âge n’est qu’un critère parmi d’autres. La segmentation des ProfilsValeurs (voir le Chapitre 3) indique des différences très nettes entre les Seniors de même âge. Disons simplement que les innovations sont bien perçues par les Seniors si elles apportent un réel progrès et correspondent à leurs attentes et leurs besoins. 89 Cela semble évident, mais beaucoup de produits restent inadaptés à un grand nombre de Seniors. C’est le cas de la majorité des produits technologiques récents tels que les téléphones, les magnétoscopes ou encore les ordinateurs. Plusieurs méthodes pour développer des produits à destination de l’ensemble des générations, dont les Seniors, existent. Citons par exemple Design for All ou ErgoSeniors. Cette dernière méthode permet de considérer l’ensemble des points importants dans le développement de produits destinés aux Seniors. Elle est aussi utilisée pour concevoir des produits plus intergénérationnels tenant compte des attentes des plus de 60 ans. Dans le développement de produits à destination des Seniors, de nombreux critères sont à prendre en compte. Les modes d’utilisation de certains produits, par exemple, diffèrent selon les générations. C’est une donnée importante que l’on rencontre souvent dans l’emploi des appareils hi-fi ou informatiques. Chaque génération a « appris à apprendre et à utiliser » de manière différente. Or, actuellement, beaucoup d’appareils sont conçus pour les jeunes. Les plus âgés rencontrent des difficultés, non en raison de leur âge, mais à cause d’un mode d’apprentissage qui n’est plus adapté à la plupart des produits actuels. Il n’est pas facile pour un jeune de comprendre les difficultés que rencontre une personne de 70 ans dans l’emploi de ces produits. La société MHMC a ainsi créé une combinaison appelée Age Explorer qui simule les effets du vieillissement. En la revêtant, un jeune peut se mettre dans la peau d’une personne âgée. Elle permet donc à de jeunes designers et chefs de produits de mieux adapter leurs produits aux Seniors. Aux États-Unis, Ford utilise une combinaison analogue, appelée Third Age Suite. Les Seniors souhaitent en particulier que les produits soient simplifiés. Pour répondre à cette attente, l’opérateur de télécommunication japonais DoCoMo commercialise un téléphone portable simplifié sous le nom de Raku-Raku. Son cœur de cible est composé des plus de 50 ans atteints de presbytie, mais il est utilisé par l’ensemble des générations. Son design et son ergonomie (au sens de « facilité d’emploi ») ont été simplifiés (écran plus grand, loupe). 90 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Parmi les produits qui peuvent faciliter la vie des Seniors, on peut évoquer les « aides techniques ». Elles sont destinées à atténuer les gênes que les Seniors peuvent éprouver dans l’accomplissement de certaines tâches de la vie quotidienne (se laver, se nourrir, s’habiller…). C’est un marché estimé à 10 milliards d’euros, dont 1,2 milliard en Europe. Les 60-74 ans, tranche d’âge où les gênes quotidiennes s’accentuent, constituent le cœur de cible de ces produits. Parmi les acteurs présents sur ce marché, on peut citer la société française Serenis. Basée dans le Nord de la France, elle propose une gamme d’aides techniques sous la marque U-Grip. « Si de nombreux produits existent sur le marché, ils sont peu évolués. Ils sont souvent issus du milieu médical et leurs fonctionnalités sont techniquement bonnes, mais leur intégration dans un environnement normal n’est pas simple », explique Nicolas Vaillant, l’un des fondateurs de l’entreprise. Par exemple, pour répondre aux problèmes de sécurité dans les escaliers, cette société a imaginé des poignées à installer sur une main courante. Une fois fixées, elles servent de prise pour monter les escaliers ou d’appui pour sécuriser la descente. D’autres produits sont proposés, comme l’appui mural pour salles de bain et toilettes. Enfiler ses vêtements est de plus en plus difficile à mesure que l’on vieillit, en raison des effets physiologiques du vieillissement, notamment l’arthrose. Atteindre une fermeture Éclair, pour certains, est difficile, voire impossible. À tout âge, nous avons besoin de plaire et de nous sentir indépendant, par exemple en nous habillant seul. Soigner son « look » n’est pas évident pour les Seniors. « La plupart des fabricants de prêt-à-porter ignorent les effets du vieillissement sur la silhouette », explique Collette Wong, de l’institut de design Fashion Institute of Technology, qui a lancé dès 1999 un concours pour encourager les industriels à développer des lignes de vêtements pour les personnes ayant des difficultés à se vêtir (source : globalaging.org). Aux États-Unis, deux sociétés fabriquent des vêtements « faciles à porter » : Silvert’s Clothing Company et Wishing Wells Collections et la chaîne de distribution Talbots est présente sur ce marché. « Silvert’s a vendu ses vêtements aux personnes âgées exclusivement pendant des décennies », explique son fondateur Jeffrey Alter. Les vêtements sont conçus pour être faciles à 91 mettre, grâce à des boutons plus gros et des bandes Velcro. Ils sont maintenant réalisés en fonction de la mode pour plaire aux Jeunes Seniors. Dans le domaine de l’électroménager, Trilobite est le premier aspirateur autonome et automatique, lancé en France en 2002 par Electrolux. « L’idée était d’inventer un appareil capable de simplifier le travail de la ménagère en réduisant notamment la fréquence de passage de l’aspirateur », explique Anne Brocard, responsable du centre marketing Europe pour la marque Electrolux. Cet aspirateur ouvre une « piste » d’idées pour le développement de produits à destination des Seniors. Le ménage fait en effet partie des tâches déclarées les plus fatigantes par les plus de 50 ans. Lancé en 2010, le nouveau lave-linge DreamSpace de Whirlpool est un exemple de produit créé pour l’ensemble des générations mais qui tient compte des attentes des Seniors. L’idée remonte à l’année 2000. Whirlpool lance des focus groups composés de personnes représentatives de la population, dont des plus de 50 et 60 ans. « L’objectif était de définir le lave-linge idéal », explique Vincent Rotger, chef de produit lavage chez Whirlpool. Ces études ont permis de définir les demandes suivantes : une simplification à l’extrême, le meilleur lave-linge possible, une ergonomie étudiée et un design plus sympa. De ces constats est né DreamSpace, un lave-linge haut de gamme qui surprend par sa taille et sa hauteur. Le chargement du linge se fait à hauteur d’homme, l’utilisateur n’a plus à se baisser. La lisibilité est facilitée par des boutons plus gros et des instructions avec des caractères de grande taille. Le DreamSpace a été conçu pour l’ensemble des générations et il répond bien aux attentes des Seniors. Il est déjà à la 6e place des ventes de lave-linge en France. Qui sait encore que la télécommande, accessoire indispensable fourni avec chaque téléviseur ou magnétoscope, a été conçue à l’origine pour répondre aux besoins des personnes handicapés ? Qui se souvient que les trottoirs surbaissés ont été aménagés pour les personnes à mobilité réduite ? Tous les jours, la plupart d’entre nous utilisent une télécommande et empruntent ces trottoirs sans pour autant se sentir diminués. Le vieillissement de la population va entraîner la simplification progressive de nombreux produits, à commencer par les télécommandes, 92 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 devenues (paradoxalement) trop compliquées, et les appareils électroménagers. Ces progrès seront utiles à l’ensemble des générations. Suffit-il d’être jeune pour savoir programmer un magnétoscope ultra-sophistiqué ? C’est à se demander si certains fabricants ne jouent pas à celui qui proposera le produit le plus difficile à utiliser ! L’exemple de Boulanger Outre leur prix, la facilité d’emploi est le second critère de choix pour les appareils électroménagers et le premier pour les appareils « haute technologie ». Pour répondre à cette demande, la chaîne de distribution d’électroménager Boulanger a créé le label « 100 % facile». Celui-ci sélectionne les produits commercialisés qui répondent à un ensemble de critères portant notamment sur la facilité d’emploi. C’est ainsi que 180 produits sur une offre de 5 500 références ont été labellisés. Prenons l’exemple d’un magnétoscope « 100 % facile ». Celui-ci doit présenter les caractéristiques suivantes : une télécommande universelle, un réglage automatique des chaînes avec mémorisation dans le bon ordre, une programmation simplifiée grâce à une touche spécifique, une notice claire avec schéma de câblage, etc. D’après un sondage Boulanger/Ifop, les principaux éléments définissant la facilité d’emploi sont la simplicité d’installation (96 %) et d’entretien (92 %), une utilisation accessible à tous (93 %) et le gain de temps (90 %). Comme nous le disions plus haut, cette facilité d’emploi concerne l’ensemble des générations. Les études du Credoc montrent que cette exigence de simplicité reste stable tout au long de la vie, puisqu’elle est exprimée par 87 % des 3544 ans, 86 % des 45-54 ans, 87 % des 55-64 ans et 88 % des plus de 65 ans (source : document Boulanger). Le secteur du tourisme Le tourisme est l’un des premiers secteurs concernés par le vieillissement de la population. Dans ce domaine, les impacts seront beaucoup plus importants que ce que pensent les professionnels. 93 La cible Seniors des professionnels du tourisme n’est pas homogène, elle comprend les Jeunes Seniors encore en activité, les jeunes retraités et les personnes plus âgées. Le rapport qu’entretiennent ces catégories de Seniors avec les vacances et le tourisme varie selon l’âge et les effets du vieillissement, certes, mais il est aussi « culturel ». Pour beaucoup de Seniors, en particulier les plus âgés, les loisirs sont une invention récente. L’étude « Les Seniors et le tourisme » montre que les plus de 65 ans ont été moins habitués à partir en vacances (mais ces Seniors pensent de plus en plus à eux-mêmes et à leurs loisirs). Les Jeunes Seniors, par contre, ont un rapport aux vacances et au tourisme qui se rapproche de celui des jeunes. La consommation actuelle Il y a beaucoup de choses à dire sur le tourisme des Seniors. Voyons l’essentiel de ce que nous savons sur ce sujet. Dans l’ensemble, les Seniors préfèrent rester en France. Les plus âgés aiment particulièrement la campagne, les plus jeunes choisissent plus souvent le littoral (source : Insee). Mais parmi les gens qui partent à l’étranger, les plus nombreux ont entre 50 et 55 ans. La durée moyenne de leurs séjours est plus longue que chez les plus jeunes (ce que confirment les statistiques de l’industrie de l’hôtellerie et des loueurs de véhicules). Parler des lieux de résidence est aussi riche d’enseignements. 40 % des plus de 50 ans logent chez des amis. Seuls 12 % séjournent à l’hôtel, et 18 % dans une résidence secondaire (source : direction du Tourisme). À propos des modes de transports, disons simplement que les Seniors préfèrent largement la voiture, suivie du train et de l’avion. Le contenu des vacances « D’une manière générale, les Seniors recherchent des vacances qui ont du sens », explique Didier Bertrand, directeur du marketing et de la communication, responsable de la stratégie de Vacances Bleues. L’étude « Les Seniors et le tourisme » confirme qu’ils privilégient la découverte, la culture, les contacts avec les habitants. 94 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les baby-boomers demandent à la fois une grande flexibilité et un minimum d’aide à l’organisation de leurs voyages. Les Seniors les plus âgés ont besoin d’une plus grande prise en charge et voyagent volontiers en groupes. Les baby-boomers apprécient l’indépendance, mais sont lucides quant à leur avenir : plus de 73 % d’entre eux refusent actuellement les voyages entre Seniors exclusivement, tout en sachant que l’âge venant, ils en accepteront plus facilement le principe. Ce qui est proposé actuellement aux Seniors Même si beaucoup de professionnels du tourisme disent que les Seniors représentent pour eux un enjeu, les pratiques et les avis concernant les politiques à mettre en œuvre sont très diverses. Une partie des tour-opérateurs ne veulent pas directement cibler les Seniors, d’autres visent au contraire explicitement cette clientèle. C’est le cas de Sélectour et de Vacances Bleues. Des entreprises comme Mercure ont beaucoup travaillé sur le marché des Seniors avec la mise en place d’une « cellule de réflexion ». Actuellement, cette chaîne d’hôtels propose un programme de réduction aux plus de 55 ans intitulé « Venez à deux, payez pour un ». Dans le domaine de la location de voiture, Avis propose une carte spéciale de réduction et de services aux Seniors. Depuis 2002, Europcar a développé une « Offre Seniors » qui permet aux plus de 55 ans d’obtenir 20 % de réduction. Parmi les sociétés qui ne mènent aucune politique particulière pour cibler les Seniors, on trouve Havas, Club Med, Fram, etc. Ces entreprises ont des réflexions sur les attentes des Seniors, mais leur stratégie est, volontairement, de ne pas cibler ouvertement les Seniors. L’exemple de Vacances Bleues L’une des plus belles réussites françaises dans le domaine du tourisme des Seniors est celle de Vacances Bleues. Fondée en 1971 à Marseille, l’association Sud Vacances, devenue Vacances Bleues en 1979, servait à l’origine d’antenne aux organismes 95 sociaux tels l’OCCAJ, l’UCPA et VVF pour faciliter l’accès aux vacances des familles de la région PACA. En 1973, Vacances Bleues obtient la confiance des institutions de retraite et de prévoyance ARRCO, AGIRC et Organic pour gérer leurs résidences de vacances. Vacances Bleues devient alors le spécialiste des vacances des Seniors et est aujourd’hui leader national pour les séjours en hôtels-clubs. Parallèlement, l’évolution des comportements et des attentes des Seniors permet à Vacances Bleues de s’ouvrir à de nouvelles clientèles. D’abord celle des petits-enfants, que les Seniors emmènent avec Vacances Bleues dès le milieu des années 1980, puis celle des familles, qui séjournent dans les villages-clubs Vacances Bleues lors des vacances scolaires. Quelques chiffres : Vacances Bleues, c’est 70 destinations en France et à l’étranger, 60 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2010, 80 000 clients par an dont 85 % de Seniors retraités. « Les Seniors ne sont pas pour nous un phénomène de mode, mais une profonde motivation. Nous avons un rôle, une mission : donner aux Seniors et à leur famille la possibilité de mieux se réaliser à travers des activités de tourisme et des loisirs », explique l’ancien responsable de la stratégie. Vacances Bleues est l’une des sociétés les plus attentives aux attentes des Seniors. Didier Bertrand a développé l’Observatoire Marketing des Seniors et la commercialisation des voyages se fait en direct, essentiellement par marketing relationnel : « Nous avons identifié onze types de clients Seniors, ce qui permet d’entretenir une relation étroite avec nos clients. » Un autre élément de la recette du succès de Vacances Bleues est que cette société propose des vacances ouvertes sur le monde et accessibles aux autres générations, de façon à éviter les phénomènes de « ghettoïsation ». En 2012 Vacances Bleues a décidé de partir à la conquête des Baby boomers et des familles avec notamment un catalogue « Faites vous Plaisir ». Marianne Yung, l’actuelle responsable du service marketing et communication explique que « 20% de nos clients sont des familles qui sont venus par le biais des grandsparents, on s'ouvre donc à l'intergénération ». Vacances Bleues a également publié un catalogue proposant des randonnées avec comme partenaire Club Aventure pour les familles et les babyboomers. 96 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Hervé Saulnier, consultant, a travaillé sur la mise en place de prestations pour les Seniors en stations de sports d’hiver. Il s’agissait d’agir sur le fond de l’organisation touristique, au-delà du réceptif pur (autocars à la journée). Les axes essentiels de travail ont été : la mise à niveau qualitative et surtout la personnalisation des hébergements, adaptée aux attentes des Seniors ; informer les restaurateurs sur leurs rythmes de repas, les encourager à soigner la diversité et l’authenticité des plats servis et à adapter leurs menus aux problèmes de santé propres aux personnes âgées. Les prestations physiques et sportives ont été revues à la baisse en termes de difficulté (durée, réduction des risques de chutes, par exemple). Le contenu qualitatif a été amélioré : aménagement d’aires de repos de charme, matériaux choisis, points de vue… D’une manière générale, il a surtout fallu encourager les professionnels à adopter une approche commerciale différente. Par exemple : donner des explications techniques sur les éléments de qualité plutôt qu’insister sur l’image de marque pour justifier les prix, savoir communiquer sur un mode « affectif » ou évoquer des souvenirs personnels pour rendre vivant un site, consacrer du temps aux gens, et donner plus de place à l’écrit et moins à l’image. Des recommandations que bien des élus et des responsables ont encore du mal à prendre en compte, sans doute par crainte de vieillir l’image de leurs sites. L’avenir du tourisme Même si certains estiment que le marché des Seniors dans le domaine du tourisme n’est qu’une invention, l’arrivée des babyboomers à la retraite est un fait. Ils ont plus de pouvoir d’achat (beaucoup ont fini de rembourser leurs emprunts), du temps libre et n’ont généralement plus d’enfants à charge. Les attentes des Seniors, globalement différentes de celles des plus jeunes, sont aussi très hétérogènes. L’étude « Les grandes tendances Seniors – Tourisme » donne plusieurs pistes intéressantes. On peut penser que leurs exigences quant au contenu des vacances – découverte, santé et forme, nature – vont se renforcer dans les années qui viennent. Les séjours « intergénérationnels » sont aussi promis à un bel avenir. Il s’agit par exemple de permettre aux grands-parents de partir en vacances 97 avec leurs petits-enfants. L’agence de voyage américaine Grand Travel propose ce genre de séjour depuis plusieurs années. Autre attente : des « vacances intelligentes et ouvertes sur le monde ». Il peut s’agir de voyages associant sport, découverte et culture. Certains voyagistes aux États-Unis proposent ainsi des universités d’été pour les Seniors. L’aménagement des structures d’accueil est une nécessité qui semble encore sous-estimée. Le vieillissement de la population des baby-boomers sera assez brutal. Dans une quinzaine d’années, ils auront des besoins particuliers, notamment dans le domaine de l’hôtellerie. Le groupe américain Choice, en avance, propose déjà des chambres spécialement adaptées aux besoins des plus de 60 ans sous le label « Premium ». L’exemple de la banque La banque est un des secteurs dont le nombre de clients de plus de 50 ans est élevé. Actuellement, les Seniors possèdent 60 % du patrimoine privé français, ce qui est considérable. L’étude « Le marketing bancaire des Seniors » (octobre 2010) réalisée par la société d’étude Eurostaff fait le point sur les rapports entre la banque et les Seniors. L’un des constats surprenants de cette étude est que les établissements bancaires n’envisagent pas de faire des efforts supplémentaires pour cette clientèle, pourtant de plus en plus importante. Actuellement, à quelques exceptions prés, la clientèle que visent en priorité les banques est celle des jeunes. Pour les Seniors, les stratégies étudiées consistent plutôt à mettre l’accent sur la relation client en agence. Peu de produits Seniors Il y a relativement peu d’offres à destination des Seniors. Pourtant, il s’agirait simplement d’adapter les produits existants (destinés à toutes les tranches d’âges) aux Seniors : les Jeunes Seniors sont maintenant très habitués au crédit à la consommation. Ils l’utilisent sans état d’âme. Il existe néanmoins certains produits ou packages Seniors, proposés par exemple par La Banque des Seniors (filiale de la 98 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 SBE – Groupe Banque Populaire) ou le crédit municipal de Paris (avec le Prêt Senior). Du côté des crédits, nous retrouvons le crédit immobilier à usage locatif (loi Besson) dont les Jeunes Seniors sont le cœur de cible. La société Maisons France Confort, avec le concept « Maison Senior », propose aux personnes âgées de 50 ans un crédit pour acquérir une maison, la louer pendant dix ans pour ensuite l’habiter à l’âge de la retraite. Citons également les crédits immobiliers qui incluent des services tels que la télésurveillance, une garantie loyer impayé, etc. Ces produits sont généralement proposés par des banques spécialisées comme la SBE, Sofinco ou encore le Crédit Lyonnais avec son produit « Ligne de vie » qui permet des remboursements jusqu’à 90 ans. Les produits d’épargne Le domaine des produits d’épargne est le « paradis » des produits Seniors. Ces produits permettent de préparer sa retraite et de jouir de revenus réguliers pendant la retraite. Une autre catégorie de produits d’épargne, à vocation plus intergénérationnelle, permet d’aider ses enfants ou petits-enfants. Ces produits sont composés à la base de PEP, de comptes à terme et de contrats d’assurance vie. Certains sont ouverts au nom d’un petit-enfant et sont alimentés par les grands-parents. L’âge de la retraite : un moment clé L’étude « Le marketing bancaire des Seniors » propose aux banques des pistes d’action à destination des Seniors. Parmi celles-ci, un « bilan » financier pour les personnes à l’aube de la retraite, une période où l’on s’interroge sur ses futurs revenus, d’éventuels problèmes de dépendance, la gestion de son patrimoine, etc. Un tel bilan permettrait de faire le point sur l’ensemble de ces questions. Le conseil en gestion de patrimoine est l’un des domaines dans lesquels les banques peuvent accentuer leurs efforts à destination des Seniors. 99 Séduire les chefs d’entreprises Seniors Les chefs d’entreprises Seniors sont environ 30 000 à céder leur entreprise chaque année. Ce sujet est d’ailleurs de plus en plus d’actualité ; des experts s’inquiètent du nombre toujours plus grand de sociétés qui risquent de ne pas trouver d’acheteur et de cesser définitivement leur activité. Cette situation amène les banques à proposer des produits spécifiques de deux types : d’un côté, il s’agit d’assister ces Seniors dans toutes les démarches de cession, de l’autre, les banques s’intéressent aux « nouveaux » patrimoines de ces personnes. Par le nombre de personnes concernées, ce marché est assez limité, mais les responsables Seniors sont, dans la plupart des cas, des Seniors aisés, voire très aisés. L’exemple de La Banque des Seniors La Banque des Seniors est une marque commerciale de la SBE, filiale du Groupe Banque Populaire lancée en janvier 2002 à destination des plus de 50 ans. « Nous avons développé La Banque des Seniors, car aucune offre complète n’existait à destination des Seniors », explique Jean-Philippe Van Poperinghe, directeur marketing de la SBE. « L’offre de produits est principalement basée sur le crédit consommation qui présente l’avantage d’avoir un taux d’appel qui démarre à partir de 4,90 % », détaille Marc Bourret, chef de projet. Par ailleurs, un accord a été négocié avec un assureur afin qu’une simple déclaration de bonne santé suffise jusqu’à 21 500 euros. La Banque des Seniors propose des solutions de financement jusqu’à 80 ans (avec une date de remboursement du crédit et des taux de crédits identiques quel que soit l’âge). Elle propose d’autres produits, dont un contrat d’assurance vie intergénération : Plan Épargne Enfant, une avance sur épargne bloquée : Alizéo, un contrat d’assurance décès, un contrat obsèques, un contrat dépendance, etc. La communication de La Banque des Seniors affiche clairement la couleur avec l’emploi du mot « Seniors » et la photo décalée d’un surfeur de 64 ans aux cheveux blancs. Bien qu’à l’opposé des recommandations de certains experts, cette stratégie semble donner des résultats. 100 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 La Banque des Seniors prévoit de commercialiser ses produits via des partenaires tels que des caisses de retraite, des mutuelles, des associations de retraités, des compagnies d’assurances et de prévoyance. Des tests en marketing direct ont été lancés en 2002 et 2010 avec une campagne e-mailing ciblée, une campagne asile-colis, une campagne bus-mailing ciblée, une campagne SMS ciblée (service Mobile Gagnant d’Orange) et des campagnes de communication dans la presse spécialisée (Notre Temps). L’exemple de l’alimentation L’alimentation des Jeunes Seniors et des Seniors L’étude « Les Seniors et l’alimentation » montre que les Jeunes Seniors d’aujourd’hui sont beaucoup mieux informés et plus nombreux à savoir qu’il est important dans cette phase de vie d’augmenter certains apports – notamment en calcium –, et sont conscients de la diminution de leurs besoins énergétiques. Les valeurs affectives et sociales de l’alimentation en France restent très fortes chez les Seniors. À la question : « Quels sont les besoins nutritionnels qui évoluent à 50 ans ? », l’augmentation des besoins en calcium est la première réponse donnée, ce qui s’explique sans doute par les campagnes d’information sur l’ostéoporose. Sur ce point, l’étude « Les Seniors et l’alimentation » confirme l’étude de 1998 lancée par l’Observatoire Cidil de l’harmonie alimentaire (OCHA), « Les Jeunes Seniors et leur alimentation ». Pour les entreprises, le marché du calcium est important. Danone commercialise à destination des femmes de plus de 50 ans l’eau minérale Taliance. L’alimentation est toujours associée au plaisir, à la convivialité et à la forme physique. La prise en compte de la santé dans l’alimentation est très importante, surtout chez les femmes de plus 50 ans. Pour la plupart d’entre elles (85 %), une alimentation équilibrée permet de mieux vieillir. Environ 15 % des Seniors demandent à l’alimentation de « ralentir » leur vieillissement et sont naturellement consommateurs de compléments alimentaires. 101 Nous notons deux principales tendances. D’un côté, une grande majorité des Seniors (dont les plus âgés) aspirent à bien vieillir. Ils consomment des aliments plus sains, moins de graisses et plus de légumes. De l’autre, une partie des Seniors manifestent un « refus » du vieillissement. Ils ajoutent à leur alimentation des compléments alimentaires. Dans la presse et la publicité, le terme « antioxydants » apparaît de plus en plus souvent, preuve que la relation entre l’alimentation et la santé est bien comprise. De nombreux industriels sont d’ailleurs associés à l’étude SU.VI.MAX : Fruit d’Or Recherche, Candia, Lipton, Lu/Danone, L’Oréal, Sodexho, etc. Lancée le 11 octobre 1994, l’étude SU.VI.MAX (SUpplémentation en VItamines et MinérauxAntioXydants) constitue l’une des plus grandes études épidémiologiques jamais réalisées dans le monde dans le domaine de la prévention nutritionnelle et de la santé publique. Elle réunit actuellement en France 13 000 volontaires âgés de 35 à 60 ans. Son but est de tester l’impact de vitamines et de minéraux antioxydants à dose nutritionnelle sur la prévention des cancers et des maladies cardiovasculaires. Le 21 juin 2010, les responsables de SU.VI.MAX ont dévoilé les premiers résultats de cette étude. Cette dernière montre l’importance d’une alimentation équilibrée et du rôle des fruits et légumes. L’étude « Les Seniors Actifs et la restauration hors foyer » publiée en 2010 par l’Agence XXY est riche d’enseignements sur ce secteur dont l’évolution va être rapide. L’alimentation hors foyer va devenir le laboratoire de l’alimentation du futur, ce qui la place d’emblée comme « l’Alimentation d’avant-Garde ». Ainsi la problématique des industriels et des distributeurs qui étaient freinés dans leur développement, ne voulant pas ghettoïser leurs espaces ou connoter leurs produits. Lave-linge DreamSpace de Whirlpool L’exemple de la téléphonie au Japon Le téléphone mobile est devenu au Japon un produit que l’on se doit d’avoir. Du cadre jusqu’au collégien tous utilisent maintenant ces appareils. 102 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Cependant, la pénétration des téléphones mobiles atteint 70%. L’industrie du secteur s’intéresse maintenant aux clients qui rencontrent des difficultés avec les technologies, dont les Seniors, qui sont bien moins nombreux à posséder un téléphone mobile. Tu-Ka, propriétaire du second opérateur téléphonique japonais, KDDI, a lancé une gamme de téléphones mobiles à destination des personnes moins à l’aise avec la technologie. Il a lancé une campagne de publicité dans le but de toucher les clients âgées. KDDI lance également au mois d’octobre un téléphone de troisième génération avec une interface « facile » et avec une aide « audio » qui simplifie son utilisation. Cette action suit celle de NTT DoCoMo, le leader du marché, qui a mis sur le marché un téléphone mobile 3G avec une ergonomie simplifiée. Par exemple, dans le but de savoir quel bouton doit être appuyé, celui-ci s’allume automatiquement. Vodaphone, un plus petit acteur du marché, incorpore un « mode d’utilisation simple » dans beaucoup de ses mobiles. Certains fonctionnalités augmentent automatiquement la taille des caractères sur les écrans. Ces efforts réalisés par les opérateurs confirment deux grandes tendances qui sont communes à beaucoup de pays développés : le vieillissement de la population est en train de créer de nouveaux marchés et la barrière entre les personnes technophobes et technophiles s’agrandit. Une étude récente montre que 20% des japonais ont plus de 65 ans. En 2014, ce chiffre grimpera pour atteindre 25%.« Le japon est en train de devenir dominé par les personnes âgées au point que la publicité de Tu-Ka fait particulièrement attention à cibler correctement les Seniors » a expliqué un représentant de KDDI. L’intérêt porté aux Seniors vient également du fait que les opérateurs cherchent des relais de croissance. « Au Japon, si vous cherchez des opportunités de croissance, vous trouvez les Seniors » explique un représentant de Vodaphone. 103 3 Les Baby boomers, une cible hétérogène Le sujet de la segmentation de la cible Senior est discuté depuis longtemps. De nombreuses analyses ont été proposées par les chercheurs et experts, notamment aux États-Unis, et utilisées par les acteurs du marché des Seniors. Dans ce chapitre, nous allons tenter de voir en quoi les Seniors composent un groupe hétérogène. On y découvrira diverses orientations en matière de segmentation, dont quatre seront plus particulièrement décrites. Senior à quel âge ? L’une des premières questions que l’on se pose quand on commence à s’intéresser au marché des Seniors est la suivante : « À partir de quel âge est-on Senior ? » Pour l’Insee ou des entreprises comme la SNCF, il s’agit des plus de 60 ans, c’est-à-dire l’âge officiel de la retraite, mais la plupart des experts du marché des Seniors estiment qu’on l’est à partir de 50 ans, arguant que de nombreux changements se 104 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 produisent à partir de cet âge. Il est vrai que l’on parle encore souvent de « la ménagère de moins de 50 ans » et que de nombreuses études sur le « panier moyen de consommation » concernent les moins de 50 ans. D’autres sociétés, à l’image de Mercure ou d’Optic 2000, proposent des programmes pour les plus de 55 ans. Enfin, certaines entreprises ne parlent plus des Seniors, mais définissent des produits pour les plus de 45 ans. C’est le cas de plusieurs marques de cosmétiques ou de produits alimentaires spécialisées dans le domaine de la santé. Bref, il n’est pas facile de s’y retrouver. Mais est-il vraiment si important de définir un âge standard ? Chez SeniorStrategic Consulting, nous pensons que les Seniors sont ceux qui, en 2006, ont plus de 60 ans, c’est-à-dire les personnes nées avant la fin de la Seconde Guerre mondiale. En-deçà, il s’agit des babyboomers, dont la plupart ne veulent d’ailleurs pas être désignés par le terme « Seniors ». Notre estimation de l’âge des Seniors est évolutive. Autrement dit, les Seniors seront pour nous les plus de 61 ans en 2007, et les plus de 62 ans en 2008. La plupart des experts du marché des Seniors emploient maintenant le terme « marché des Seniors et des baby-boomers ». Nous adhérons volontiers à cette dénomination, qui nous semble plus juste. Nous utilisons également le terme américain « matures » pour désigner les personnes qui se sentent « adultes », c’est-à-dire, comme nous l’avons expliqué, qui sont entrées dans une phase de vie où l’» être » est plus important que le « paraître ». Ce passage à la « maturité » est progressif et se situe entre 40 et 55 ans. Si l’on demande aux plus de 50 ans à quel âge on peut être considéré comme Senior, on obtient une grande variété de réponses, non seulement de la part de personnes du même âge, mais aussi chez des représentants de différentes générations. En général, plus l’on prend de l’âge, plus l’on a tendance à « repousser » l’âge de la vieillesse et donc « l’âge Senior ». Définir un âge Senior standard n’a pas d’intérêt fondamental ; l’essentiel est de trouver une définition qui soit cohérente avec ses objectifs, ses produits et services. 105 Une cible très hétérogène L’une des principales erreurs d’appréciation concernant les Seniors, ces dix dernières années, a été de croire que cette cible était homogène. Aujourd’hui, tous les directeurs marketing et les experts du marché des Seniors s’accordent pour dire que l’hétérogénéité des plus de 50 ans est très forte. Des sociétés comme Vacances Bleues sont en avance sur ce sujet avec le développement d’une segmentation en onze profils. Utile dans le secteur du tourisme, cette segmentation précise de la cible des Seniors est peut-être trop précise dans d’autres domaines. Pourquoi est-il important de segmenter les plus de 50 ans, sachant que nous disposons déjà de segmentations simples ? Tout simplement parce que si les Seniors sont les plus de 50 ans, il y a un écart de plus de quarante ans entre les plus âgés et les plus jeunes ! Il est bien évident qu’un quinquagénaire et un septuagénaire ont des profils très différents. Les habitudes de consommation, l’état de santé, les besoins des Seniors sont donc très variés (comparez, par exemple, les modes de vie d’un couple de Jeunes Seniors avec encore un enfant à charge et d’une veuve de 77 ans). D’autre part, les revenus des plus de 50 ans sont très inégaux. Au sein de la population âgée, les niveaux de pensions sont très variables selon le sexe, l’âge, le statut matrimonial, la durée de cotisation, que l’on possède un patrimoine ou non, etc. Avec les réformes des systèmes de retraite, ces différences pourraient bien s’accentuer. Sur le plan des valeurs, même constat d’une grande diversité. D’où, comme nous le verrons plus loin dans ce chapitre, le « marketing générationnel ». On n’a pas le même système de valeurs selon qu’on a grandi pendant des périodes de guerre ou de restriction ou qu’on a passé son adolescence pendant les Trente Glorieuses. Nous ne pouvons pas parler de l’hétérogénéité de cette population âgée sans parler des effets du vieillissement, qui entraînent des différences extrêmement importantes. C’est vrai pour les personnes de générations différentes, autant que pour des individus de même âge. Pour certains domaines d’activités tels que les assurances, il serait important d’en tenir compte. 106 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Segmenter ce marché et choisir ses cibles Les professionnels du marketing parlent de marketing de ciblage, une démarche en trois temps parfois appelée « SegmentationCiblage-Positionnement ». Il consiste à segmenter le marché, c’est-à-dire le découper en sous-ensembles homogènes, significatifs et accessibles, avant de définir des cibles en évaluant l’attrait relatif de chaque segment pour choisir ceux sur lesquels il faut concentrer ses efforts. Le choix du positionnement vient ensuite : il permet d’imaginer la façon dont l’offre sera présentée à la cible. Certes, le marché des enfants et des adolescents aussi est hétérogène, mais celui des Seniors apparaît plus complexe : les Seniors ont acquis une expérience, une maturité qui les rend, par exemple, moins sensibles aux avis extérieurs. Quand une entreprise décide d’intervenir sur le marché des Seniors, elle admet généralement ne pouvoir s’adresser à tous les clients possibles. De même qu’il est inutile de proposer des couches d’incontinence aux 50-55 ans en utilisant le marketing de masse, il est difficile dans certains domaines d’activité, voire impossible, de cibler de la même manière à la fois les babyboomers et les retraités actuels. Les plus de 50 ans sont nombreux (rappelons les chiffres : 33 % de la population, soit 20,3 millions de personnes), dispersés et différents selon leurs attentes, leurs modes de vie, leurs valeurs, etc. Les comportements d’achat sont ainsi très divers, non seulement selon les générations, mais au sein d’une même génération. On peut choisir de nombreux critères de segmentation : géographiques, socio-démographiques, psychographiques, comportementaux, etc. Les critères géographiques servent à découper le marché en plusieurs unités territoriales. Certains acteurs du tourisme les utilisent pour cibler les Seniors parisiens, par exemple. Une segmentation socio-démographique définit différents groupes, identifiés sur la base de critères tels que l’âge, le sexe, la taille du foyer, le revenu, la nationalité ou la catégorie 107 socioprofessionnelle. L’âge est un critère souvent utilisé, mais qui pose de nombreux problèmes, comme nous le verrons plus loin. Les critères psychographiques (classe sociale, style de vie, personnalité, etc.) ont fait l’objet de nombreuses recherches sur le marché des Seniors aux États-Unis, avec notamment le professeur George Moschis. Ses travaux ont abouti à une segmentation des Seniors en quatre profils : frails (fragiles), healthy hermits (ermites en bonne santé), ailings (en mauvaise santé) et healthy indulgers (hédonistes en bonne santé) [source : The Maturing MarketPlace, George Moschis, 2000]. Les « ProfilsValeurs » que nous utilisons chez SeniorStrategic relèvent de ce type de segmentation psychographique. Le quatrième type de segmentation évoqué, basé sur les comportements, consiste à découper le marché des consommateurs en groupes homogènes du point de vue de leurs connaissances, attitudes et expériences à l’égard d’un produit ou de ses attributs. Pas de segmentation miracle Une fois définies les grandes classes de segmentation, laquelle utiliser ? Parlons un peu de l’histoire des segmentations aux États-Unis, où elles sont employées depuis longtemps. Les premières segmentations utilisées étaient basées sur le critère de l’âge. La typologie de Yankelovitch a ensuite donné naissance au marketing générationnel. Les segmentations psychographiques sont les plus récentes, avec les travaux de Moschis. De son côté, l’AARP, l’association des retraités américains, a développé une sous-segmentation des baby-boomers. Citons aussi la segmentation ValuePortraits de la division américaine spécialisée sur le marché des Seniors de J. Walter Thompson, développée avec Seniors Research Group. Dans cette catégorie, nous trouvons également les ProfilsValeurs de SeniorStrategic, également développés en France. Les segmentations psychographiques principalement basées sur les valeurs sont actuellement les plus employées. Elles permettent de s’affranchir de l’âge, ce qui est souvent un grand avantage sur le marché des Seniors. Les entreprises leaders sur le marché des Seniors l’ont bien compris : utiliser telle quelle une segmentation standard est une 108 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 erreur. Beaucoup d’entre elles ont adapté des segmentations existantes ou ont développé leur propre segmentation. Ne pas segmenter la cible des Seniors est risqué, appliquer une recette « miracle » l’est tout autant. Nous nous proposons maintenant de passer en revue trois types de segmentations. Le premier correspond à une segmentation basée sur le critère de l’âge, la deuxième concerne ce que nous appelons souvent le marketing générationnel. Nous finirons par la présentation des « ProfilsValeurs » qui correspondent à une segmentation psychographique. Encore une fois, il ne s’agit pas de retenir l’une de ces segmentations comme la meilleure. L’idée est de développer la segmentation qui correspond à son domaine d’activité et est compatible avec ses objectifs et ses ressources. Segmentation en fonction des âges L’âge a été l’un des premiers critères employés pour cibler les Seniors. Certaines entreprises l’utilisent encore en parlant des « plus de 60 ans », sans autre distinction. Ces stratégies ont donné des résultats pour certains produits dans le passé, mais ont rapidement été mises en question. Comme nous l’avons dit au Chapitre 2, il y a un décalage entre l’âge qu’une personne pense avoir (âge subjectif) et son âge réel (âge chronologique). Après l’adolescence, nous nous sentons souvent plus jeunes que ne le montre notre carte d’identité. L’écart entre âge subjectif et âge chronologique augmente à mesure que l’on vieillit. Une personne de 60 ans aura ainsi le sentiment d’en avoir entre 10 et 15 de moins (évidemment, cet écart varie sensiblement d’une personne à l’autre). Les segmentations basées sur l’âge ne tiennent pas compte de l’âge subjectif et présentent l’inconvénient de ne considérer que l’âge chronologique. Segmentation en fonction des générations Les ProfilsGénérations sont issus du marketing générationnel. Ils segmentent la population en générations, c’est-à-dire en groupes de personnes d’une même tranche d’âge. Pour simplifier, disons 109 qu’ils reposent sur l’idée que les personnes nées pendant la même période ont vécu pendant leur adolescence les mêmes événements et ont été marqués par les mêmes faits économiques, sociaux, politiques ou autres. Ils ont ainsi acquis des réflexes de consommation, au sens large, communs, qu’ils ont conservés. Autrement dit, quelqu’un qui a grandi pendant la guerre peut avoir été habitué à ne pas gaspiller et à ne consommer que le strict nécessaire, et ces habitudes ou réflexes de consommation influenceront son comportement d’achat tout au long de sa vie. Les événements vécus par une même génération, qu’on peut aussi appeler « références historiques », participent au développement d’un système de valeurs « sociétales » commun aux représentants d’une même génération. Aux États-Unis, Yankelovich utilise ainsi une segmentation qui divise les « matures » en deux sous-catégories et les babyboomers en trois sous-segments : trailing boomers, core boomers et leading boomers. En France, on s’est livré à des travaux analogues, tels ceux du sociologue Jean-Luc Excousseau, fondateur de l’Association du marketing générationnel. Les ProfilsGénérations Les ProfilsGénérations ont été développés au milieu des années 1990 et segmentent la cible des Seniors (ou des plus de 50 ans) en quatre grands groupes. Les baby-boomers : 47 à 57 ans, les Jeunes Seniors : 58 à 67 ans, les Seniors : 68 à 79 ans, et les Grands Seniors : les plus de 80 ans. À noter que les baby-boomers peuvent être sous-segmentés en plusieurs catégories, dont nous présenterons celle des « âgés ». Les baby-boomers Les baby-boomers, qui ont maintenant entre 47 et 57 ans, ont vécu leur première partie de leur vie durant les Trente Glorieuses. Ils ont pu ainsi profiter des résultats des efforts de leurs parents. Nés avec la télévision et la société de consommation, ils ont acquis une grande confiance en leur capacité de réussir leur vie. Cet optimisme a cependant été ébranlé dans les années 1970 par la crise économique qu’ont entraînée les deux chocs pétroliers successifs. 110 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les ProfilsGénérations Les grands Seniors Nés Âge en 2010 Avant 1923 Les Seniors Entre 1924 et 1935 Les Jeunes Seniors Entre 1936 et 1945 Les babyboomers Entre 1946 et 1956 > 80 ans 68-79 ans 57-67 47-57 23 000 28 000 41 720 54 900 Nombre en France Revenu annuel (en euros) Valeurs et Sécurité, préoccupations camaraderie, complicité entre amis. Religion, respect de l’autorité, histoire, tradition, rationalisme. Comportement Connaissent la Dépensent d’achat valeur des et épargnent choses. avec logique. Sensibles au Sensibles confort et aux aux prix et services qui au confort ; simplifient les grandes leur vie. marques les rassurent. Utilitarisme, Hédonisme, ordre, statut liberté, social, bénévolat, individualisme, innovation, vision libre pensée, globale. nostalgie, jeunesse. Consommateurs vigilants, privilégient le côté utile et pratique, recherchent la qualité. Les marques les rassurent. Sensibles à la qualité, aux nouveautés, à l’authenticité, aux services. Source : 50 + Marketing, Québec, 2010, adapté par SeniorStrategic 2010. Confiants, malgré tout, en leur avenir, les baby-boomers ont pu se concentrer sur eux-mêmes et sur la réalisation de leurs aspirations. Leurs valeurs sont : l’amélioration de soi, la liberté, l’individualisme, la volonté de réaliser ses rêves. Habitués à consommer, ils devraient continuer de faire les beaux jours de beaucoup d’entreprises. En tout cas, ce sera vrai pour celles qui les respecteront et répondront réellement à leurs attentes. 111 Les Jeunes Seniors C’est la génération qui est en train d’achever sa vie professionnelle et découvre la retraite. Les Jeunes Seniors sont aussi appelés « majorité silencieuse » par les experts américains : cette génération compte effectivement moins de personnalités fortes que la précédente. Ils sont dans leur très grande majorité sans enfant à charge. Les membres de ces générations ont vécu leur enfance pendant la Seconde Guerre mondiale et leur adolescence pendant la période de restriction qui a suivi. Ce sont des consommateurs vigilants qui privilégient le côté utile et pratique, autant que la qualité. Les marques les rassurent. Beaucoup de ces Seniors, qui ont en quelque sorte regardé les baby-boomers profiter des Trente Glorieuses, commencent à changer de comportement. Habitués à faire passer ceux des autres avant leurs propres besoins comme les générations précédentes, beaucoup prennent actuellement conscience qu’il est grand temps de s’occuper enfin d’eux-mêmes. Il n’est pas rare d’entendre des Jeunes Seniors dirent qu’ils prennent de « vraies » vacances pour la première fois. Les Seniors C’est une génération dont la majorité a pris conscience qu’elle entrait dans une autre phase de sa vie : celle du début de la vieillesse. Ces Seniors sont nés entre les deux guerres mondiales et une grande majorité d’entre eux ont vécu leur adolescence pendant la Seconde Guerre mondiale. Ils ont tendance à dépenser et épargner avec logique. Ils font partie des Seniors, ont envie d’être respectés et compris des générations moins âgées, même s’ils sont conscients qu’il y a entre eux et les plus jeunes un décalage important. Par exemple, l’étude « Les Seniors en France » réalisée en 2012 par Senior Strategic Consulting montre que beaucoup de membres de cette génération ne comprennent pas les publicités actuelles, dont le rythme trop rapide ne correspond pas à leurs codes culturels. C’est d’autant plus regrettable qu’il s’agit de personnes dont un grand nombre sont encore en couple et qui 112 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 consomment encore beaucoup. Ils ont fait les beaux jours de la vente à distance « Senior ». Les membres de cette génération ont souvent des enfants membres de la génération du baby-boom. Ces derniers auront à aider leurs parents quand ils prendront de l’âge et deviendront moins mobiles. Les Grands Seniors Les Grands Seniors sont aussi appelés la « génération de la crise ». C’est sans doute la génération qui consomme le moins, excepté les produits liés à la santé. Le groupe de cette tranche d’âge est celui dont la proportion va le plus augmenter dans les années à venir, en raison du déficit de naissances pendant la Première Guerre mondiale. Les plus âgés de cette génération ont connu les deux guerres et ont souvent vécu en milieu rural. C’est une génération constituée en grande majorité de femmes qui connaissent la valeur des choses et sont sensibles au confort et aux services qui simplifient la vie. Les limites du marketing générationnel Pour bien utiliser le marketing générationnel, il est important d’en connaître les limites. Beaucoup d’experts estiment dangereux et un peu simpliste de penser qu’il permet à lui seul de cibler correctement les Seniors. En effet, les comportements changent avec l’âge. Ces changements sont bien souvent propres à chacun. L’exemple des jumeaux est assez significatif : même si pendant leur enfance et jusqu’à un âge avancé, ils peuvent avoir des comportements proches, leur vie peut avoir tendance à accentuer leurs différences. A fortiori, les personnes d’une même génération ou du même âge peuvent avoir des comportements d’achat et des intérêts très divers. Autre indice de l’hétérogénéité des Seniors d’une même génération : les études menées sur le principe de l’âge subjectif montrent que la perception de son propre vieillissement varie considérablement entre les individus du même âge. Le développement du marketing générationnel peut buter sur un autre obstacle : beaucoup de directions marketing ne 113 s’organisent pas autour de « critères d’âge », mais plutôt par familles de produits. Le recours au marketing générationnel impliquerait dans ce cas de changer de méthode de travail. « Le marketing générationnel est un bon outil si l’on cherche à atteindre l’ensemble d’une génération, mais il n’est pas suffisant pour beaucoup de produits et de services. Les motivations de consommation des membres d’une génération sont très variées », explique John Milman, expert américain du marché des Seniors. L’acte d’achat et la prise de décision font appel à d’autres critères essentiels, tels les « valeurs ». « L’âge n’est ‘souvent’ pas assez précis pour comprendre les habitudes de consommation des Baby boomers » explique Andrew Walmsley, le Directeur Général de l’agence média anglaise i-level. « Utiliser uniquement l’âge introduit deux principales erreurs. La première est que l’on prend pour hypothèse que la consommation est la même pour les personnes du même âge. Deuxièmement on surestime les différences de consommation des médias de la part des différentes générations ». Segmentation en fonction des valeurs La segmentation ProfilsValeurs fait partie des typologies psychographiques. Elle est fondée, comme son nom l’indique, sur les valeurs, ce qui permet de s’affranchir du critère de l’âge et de segmenter les plus de 50 ans en fonction de leurs motivations réelles. D’abord développée aux États-Unis, elle a été affinée en Europe et en France. Commençons par définir ce que sont les « valeurs ». À la question « Qu’est ce qui décide du choix de vos vacances ? », certains vont répondre : la liberté, d’autres la sécurité ou encore le contact humain. Chaque réponse correspond aux valeurs de chacun. Ce sont ces valeurs qui vont définir les comportements, et donc les actes d’achat. Même si bien des valeurs sont universelles, leur hiérarchisation est différente selon les individus. Quelqu’un pour qui la sécurité est très importante sera plus susceptible de choisir un hôtel avec un parking clôturé pour protéger son véhicule. Il utilisera plus volontiers un produit d’épargne pour compléter sa retraite. Il fera aussi plus attention à son alimentation. 114 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les valeurs sont pour l’essentiel acquises pendant l’enfance et perdurent ; en cela, elles caractérisent chacun de nous. Les événements vécus dans notre vie sont également importants, mais ont une influence bien moindre sur nos comportements. Certains expliquent que les valeurs, au contraire, évoluent au cours de la vie. Les études en psychologie montrent que ce n’est pas le cas, à moins qu’un choc émotionnel important ne les modifie effectivement. Par exemple, il est probable que les systèmes de valeurs des témoins des attentats du 11 septembre 2001 à New York auront été modifiés, ou renforcés, par ces événements. Avec l’âge, on est de plus en plus conscient de ce qui importe le plus dans sa vie. Autrement dit, on connaît mieux ses propres valeurs. Les Seniors agissent plus en fonction de leurs valeurs que leurs cadets. Cela se traduit par un phénomène que nous avons tous observé : les Seniors sont bien souvent plus réfléchis dans leurs choix et dans leurs décisions, parce qu’ils savent précisément ce qu’ils veulent. C’est pourquoi il est essentiel pour les entreprises de bien comprendre les Seniors : ces derniers seront réticents à acheter un produit qui ne remplit qu’approximativement leurs besoins. Dans les campagnes publicitaires mettant en scène des personnes connues, les valeurs sont très importantes. C’est une stratégie souvent utilisée pour cibler les Seniors. Dans ce cas, il est primordial que les valeurs véhiculées par ces vedettes correspondent à celles des Seniors ciblés. ProfilsValeurs Les ProfilsValeurs sont le fruit de plusieurs années de recherche entre une université américaine et Mature Research, une agence marketing spécialisée sur le marché des Seniors. SeniorStrategic a repris ces travaux et les a développés aux États-Unis et en Europe, notamment en France. Les ProfilsValeurs Profils Caractéristiques principales % chez les plus de 50 ans en France 115 Les Actifs Plutôt carriéristes, ils bénéficient pour la plupart d’un statut social élevé. Leurs valeurs sont la réussite, la reconnaissance sociale. Ils attachent beaucoup d’importance à leur apparence. La retraite n’est qu’un mot pour eux, ils souhaitent travailler le plus tard possible. 14 % Les Enthousiastes Bons vivants, ils pensent que le temps présent est le meilleur, le plus beau et le plus agréable à vivre. Pour eux, le mot clé est « aujourd’hui », voire « maintenant ». Ils font partie de ceux qui ont le moins économisé pour leur retraite. Ils acceptent sans rechigner de vieillir, sont actifs et ont des projets plein la tête. Leur valeur principale est le plaisir. 11 % Les Originaux Les Sociables Les Inquiets L’important pour les Originaux est d’être différent des autres. Ce sont des personnes en décalage, qui attachent un grand intérêt aux marques et à leur apparence physique. Ils se distinguent également par leur goût prononcé pour le « beau ». 18 % Leurs relations avec les autres, plus particulièrement avec leurs petitsenfants, sont essentielles aux Sociables. Ils sont généreux, attentionnés et très attachés à la famille. Autant de traits de caractère qui les rendent naturellement émotifs. 13 % Ils sont soucieux de leur avenir, en particulier financier, et ont besoin d’être rassurés dans leurs prises de décisions. Ils sont néanmoins tournés vers l’avenir et attachent une grande importance à la loyauté et l’honnêteté. Ils sont francs et fidèles. 15 % 116 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les Rigoureux Les Leaders Les Réfléchis L’honnêteté, la rigueur, l’intégrité caractérisent les rigoureux. Ce sont des bosseurs endurcis qui font passer le travail avant les loisirs. Pour les séduire, le plus important est de leur apporter un maximum d’informations. 11 % Autoritaires, ils disent ce qu’ils pensent et sont peu sensibles aux arguments. Ils refusent la vieillesse et estiment pouvoir se débrouiller seuls. Peu émotifs, on trouve malgré parmi eux des individus capables d’aider les autres spontanément. 9% Ils sont solitaires et attachés aux activités individuelles. Ce sont eux qui prennent leurs décisions avec le plus de recul, après avoir étudié tous les faits. Leurs qualités sont la discrétion, le sens de l’analyse et l’érudition. 9% Source : SeniorStrategic Consulting 2010. Les ProfilsValeurs segmentent les plus de 50 ans en huit profils types : les Actifs, les Enthousiastes, les Originaux, les Sociables, les Inquiets, les Rigoureux, les Leaders et les Réfléchis. Chaque profil possède son système de valeurs, mais un certain nombre de valeurs importantes sont communes à tous. L’exemple du domaine du tourisme Le secteur du tourisme est appelé à fortement se développer avec l’arrivée des baby-boomers qui disposent de revenus supérieurs à leurs aînés et vont découvrir le temps libre. Les attentes en matière de vacances et de loisirs (lieux et activités de prédilection) varient grandement d’une personne à l’autre au sein d’une même génération. Les Seniors ne dérogent pas à la règle : les Seniors Actifs choisiront des vacances avec des activités sportives, alors que les Seniors Réfléchis opteront pour des programmes plus « reposants », mais orientés découverte. 117 La diversité des voyages proposés par des sociétés telles que le tour-opérateur Vacances Bleues répond en grande partie aux attentes des Seniors. D’autres agences comme GrandTravel sont plus spécialisées et seront particulièrement appréciées des Seniors Sociables, Enthousiastes ou Inquiets. Quant au secteur des croisières, il attire surtout les Seniors Originaux ou Actifs. Le tableau ci-dessous décrit plus précisément les attentes des Seniors dans le domaine du tourisme. ProfilsValeurs et tourisme ProfilsValeurs Critères importants Les Réfléchis Ils veulent apprendre, découvrir le lieu où ils sont, emportent de quoi lire. À leur menu : musées et autres activités culturelles. Ils fuient les lieux trop bruyants et aiment les moments de solitude. Les Actifs Ils veulent bouger et aller dans des endroits reconnus par les autres. Ils ont tendance à s’ennuyer rapidement ; si c’est le cas, ils ne reviendront pas. Ils attendent du personnel des hôtels rapidité et efficacité. Les Inquiets Ils ont besoin d’être rassurés et demandent des séjours « tout compris » durant lesquels ils n’auront pas de mauvaises surprises. Ce sont eux qui préparent le plus leurs vacances et acceptent le plus facilement de rester entre eux. Les Enthousiastes Ils veulent s’amuser, être joyeux. « Fun » est peut-être le mot qui décrit le mieux leurs vacances. Ils partent volontiers à l’aventure sans préparation, ils veulent être libres. Allergiques aux voyages organisés, ils partent souvent en transport individuel. Les Rigoureux Ce sont des personnes très attachées à l’ordre et à la propreté et qui n’iront pas deux fois dans un endroit mal tenu. Pour eux, les vacances doivent signifier « détente ». Les préparatifs seront toujours bien faits et ils demanderont à connaître tous les détails auprès de l’agence de voyage. 118 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les Leaders Un leader décide généralement des vacances pour son couple. Ils veulent bouger et rien n’est trop dur pour eux, ni trop loin. Sauf problème de santé, ils vont pratiquer des sports « plutôt intenses ». Ils font également partie des Seniors réticents à passer des vacances entre « vieux ». Les Sociables Les vacances, pour eux, sont synonymes de contacts avec d’autres personnes et d’amitié. Ils veulent partir entre amis et pratiquer des activités de groupe dans une bonne ambiance. Ce n’est généralement pas eux qui choisissent leurs vacances, mais plutôt leur entourage. Les Originaux Ils vont choisir des vacances qui sortent de l’ordinaire et des lieux réputés pour leur élitisme : croisières, petites stations de ski. Il n’est pas facile de leur faire apprécier leur séjour. Source : SeniorStrategic Consulting 2010. L’exemple des Seniors Actifs Les Seniors Actifs représentent 14 % des plus de 50 ans, soit près de 3 millions de personnes. Leur valeur principale est la « réussite », ce qui les a souvent poussés à rechercher un statut social élevé. La reconnaissance sociale est importante pour les membres de ce segment et ils attachent beaucoup d’importance à leur apparence pour être acceptés par les autres. Les femmes de ce profil sont les plus en phase avec les valeurs véhiculées par L’Oréal et sa gamme Age Perfect. Ils font partie des gens qui veulent travailler le plus tard possible et souffrent d’être écartés par les entreprises avant l’âge officiel de la retraite. Retraités, ils restent actifs, essentiellement dans les associations où ils peuvent appliquer ce qu’ils ont appris dans leur vie professionnelle. Ils font également partie des Seniors qui se sentent le plus jeunes : un Senior Actif de 60 ans pense avoir en moyenne moins de 35 ans ! 119 Ils ont souvent exercé les professions de conférencier, vendeur, cadre supérieur, animateur, avocat, acteur, directeur marketing, etc. Leurs revenus sont plus élevés que la moyenne des Seniors d’environ 28 %. Les Jeunes Seniors Actifs refusent le vieillissement. En fait, ils le nient et vont continuer à s’habiller et à consommer comme les « jeunes ». Inutile d’essayer de leur faire acheter un produit spécialement conçu pour eux, dont l’usage « trahirait » leur âge. Dans l’étude « Les Seniors en France », beaucoup de Seniors Actifs nous ont expliqué qu’ils pouvaient lire un magazine de la presse Senior, mais s’arrangeaient pour le cacher ! Ils comptent parmi les plus gros consommateurs de produits « anti-vieillissement » : chirurgie esthétique, compléments alimentaires, produits de beauté, etc. Cependant, ils sont très pragmatiques et connaissent les produits réellement efficaces et ceux dont les résultats sont médiocres. Les membres de ce profil ont paradoxalement des difficultés à prendre soin de leur santé. Ils nient souvent les désagréments et handicaps dus au vieillissement, jusqu’au moment où un problème sérieux les ramène à la raison. Nous pourrions dire que la valeur de la « forme » dans le but de plaire est plus importante que la santé proprement dite. Les limites des ProfilsValeurs Bien que la segmentation ProfilsValeurs ou d’autres segmentations du type psychographique soient performantes, les entreprises hésitent encore à les utiliser parce qu’elles sont généralement plus difficiles à mettre en place et ne correspondent pas forcément aux objectifs ou aux ressources disponibles. Néanmoins, elles servent de plus en plus de base au développement d’une segmentation plus adaptée à chaque cas d’entreprise. Les ProfilsValeurs ne sont pas conçus pour être appliqués tels quels dans les entreprises, mais pour donner des pistes. Ils ont été utilisés par sept entreprises en France en 2002 dans des domaines aussi variés que l’assurance, le tourisme ou l’alimentation. Les segmentations psychographiques sont souvent utilisées dans le cadre d’une campagne de marketing direct car elles 120 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 permettent d’augmenter très nettement son efficacité. L’idée est d’utiliser les valeurs « primaires » pour présenter ses produits et obtenir de meilleurs résultats. Les autres segmentations Il y a encore d’autres types de segmentation, comme celui basé sur les « stades de vie ». L’histoire personnelle des individus est marquée par des moments clés qui influent sur leurs comportements, sur leurs modes de consommation et sur leurs relations avec les autres. Ces moments peuvent être : la naissance, l’étape des 50 ans, le départ en retraite, le décès d’un ami cher ou du conjoint, etc. Les Seniors sont principalement marqués par le départ du dernier enfant du foyer familial, le passage à la retraite, le décès du conjoint, la naissance des petits-enfants, le premier incident de santé important. Une segmentation appelée les « ProfilsStadesdeVie » est quelquefois utilisée dans des cas bien précis. Exemples de ProfilsStadesdeVie Segments Grands-parents Description En moyenne, les Français sont grands-parents à l’âge de 49 ans. Les dons, les cadeaux aux petitsenfants commencent alors. ActiveDinks (les actifs double income Il s’agit des Seniors encore en no kid, c’est-à-dire avec deux activité dont les enfants sont partis revenus et pas d’enfants) de la maison. Ils ont en général de confortables revenus et disposent d’un pouvoir d’achat conséquent. Ils intéressent les fabricants de cuisine et l’ensemble des acteurs du domaine de la maison. FreeDinks (Les retraités double Il s’agit des anciens ActiveDinks qui income no kid, c’est-à-dire avec deux découvrent le temps libre avec la revenus et pas d’enfants) retraite. 121 NewSingles (ou nouveaux célibataires) Ces « nouveaux célibataires » sont les Seniors effectivement célibataires, mais surtout les veufs et les veuves – des femmes, en majorité. Source : SeniorStrategci Consulting 2010. Les CSP un facteur très important Nous avons vu plusieurs segmentations possibles. Après de nombreuses études il nous est apparu un élément dont nous avions peut-être sous-estimé le caractère vraiment primordial : les catégories sociaux professionnelles. Bien entendu, nous savions qu’il fallait en tenir compte mais maintenant il est clair qu’il s’agit d’une donnée incontournable. Dans certains secteurs et produits, la CSP est plus importante que l’âge ou même la génération. Par exemple, nos études montrent que l’esthétique, les couleurs, les formes sont beaucoup plus demandés par les Baby boomers aisés que par les CSP -. Les cartes de fidélité et le « fond » intéressent en priorité les CSP-. Lorsque nous menons une étude stratégique pour un client sur la France par exemple, nous prenons soin de prendre cette donnée. L’importance des CSP peut s’expliquer par le fait que les Seniors arrivant à la retraite ou y étant déjà ne pensent pas avoir la possibilité de changer radicalement de catégorie sociale. « nous avons accepté notre niveau de vie » expliquait une personne interrogée. En conclusion Ce chapitre sur les typologies de la cible Seniors n’est pas exhaustif, mais son but est de donner une vision globale des types de segmentation possibles. Définir une segmentation n’est pas absolument nécessaire ; certaines entreprises utilisent le marketing de masse en développant un produit ou un service et en le distribuant à l’ensemble des plus de 50 ans, comme par exemple la SNCF, avec la carte Senior. Si des entreprises choisissent d’ignorer la segmentation (marketing indifférencié), d’autres développent toute une variété de produits et de plans d’action adaptés aux différents besoins des 122 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Seniors (marketing différencié) et d’autres encore ne s’adressent qu’à certains segments (marketing concentré). Toutes sortes de solutions existent et donnent de bons résultats sur le marché des Seniors. Se représenter la cible des Seniors comme homogène ne peut que conduire à l’échec. Les plus de 50 ans sont l’une des cibles les plus diversifiées qui soient. Dans le chapitre suivant, nous verrons quelles sont les stratégies marketing qui sont actuellement employées pour mieux cibler le marché des Seniors. 123 Karting Photo : Franck Dieleman. 124 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 4 Les stratégies pour conquérir le marché des Seniors et des Baby boomers De plus en plus de dirigeants d’entreprises s’intéressent au marché des Seniors et sont conscients de l’opportunité qu’il représente pour leur activité. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les stratégies à appliquer. Faut-il acheter une entreprise déjà présente sur ce marché ? Est-il préférable de développer une marque de sa gamme ? Quand est-il plus intéressant de créer un nouveau produit ? Toutes ces questions sont légitimes. En effet, les risques sont nombreux. Certains ont peur de « vieillir » l’image de leur société et de faire fuir leur clientèle habituelle. D’autres, déjà sur le marché des Seniors, voient arriver avec les baby-boomers une nouvelle clientèle, dont les attentes sont différentes. Tout le monde est d’accord pour dire que le marché des Seniors est complexe. Peu étudié, il demande des connaissances et des compétences dans de nombreux secteurs. Les Seniors sont des clients aux modes de consommation, aux besoins et aux envies spécifiques, mais la plupart d’entre eux ne veulent pas être « ghettoïsés ». 125 Certains professionnels du marketing proposent des solutions simplistes parfois rassurantes. Issues d’expériences étrangères, elles conduisent à l’échec. Ainsi de la création de produits labellisés « Seniors ». Comme les résultats de cette démarche étaient supposés bons aux États-Unis, ils devaient l’être en France. Erreur ! La grande majorité des plus de 50 ans n’aiment pas être appelés « Seniors ». Même aux États-Unis, les directeurs marketing cessent d’employer ce terme. Autres solutions proposées : communiquer auprès des Seniors sans adapter ses produits. C’est oublier que les plus de 50 ans ont une grande expérience de la consommation. Les « artifices » du marketing habituellement utilisés pour les jeunes ne fonctionnent pas pour les Seniors. Il existe pourtant de nombreuses stratégies efficaces de conquête du marché des Seniors, qui varient selon l’objectif, la cible et les ressources disponibles. Position théorique de Senior Strategic A METTRE DANS LE SOMMAIRE Lorsque nous menons (Senior Strategic) une mission de conseil en stratégie pour un client nous nous posons une série de questions comme par exemple : Est-ce une structure de co-achat avec une disparité de consommation ou un ensemble homogène de prestations consommées ? Quel est le processus de prise de décision au sein d'une famille selon ces différents stades d'évolution, l'âge des enfants voir l'éclatement de la structure familiale traditionnelle ? Le modèle familial de Wells & Gubar est-il le modèle le mieux adapté à la compréhension des besoins ? Les sites touristiques doivent-ils se recentrer sur une de ces étapes ou élargir leur gamme de services ?... Le modèle de cycle de vie familiale de Wells & Gubar comme base de notre approche Nous adoptons assez régulièrement (en l’ayant adapté) le modèle proposé par D.Wells et G.Gubar « Life cycle concept in Marketing Research » Journal of Marketing Research novembre 1966. Nous privilégions ce modèle à celui de Murphy & Staples. Ce dernier prend mieux en compte les évolutions de la structure familiale, notamment avec les familles monoparentales, mais, par une notion plus floue sur l’âge des enfants, nous semble moins opérationnel 126 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 dans la plupart de nos activités étendues au monde de la famille. Voir P.Murphy & W.A.Staples « A modernized Family life Cyle Concept ». Nous proposons une variante concernant les structures familiales avec enfants du modèle de Wells & Gubar pour l’adapter aux changements sociétaires des 20 dernières années (baisse du nombre d’enfants et développement des familles monoparentales). Les structures de « nid » s’entendent donc dans une structure familiale quelle que soit la forme de celle-ci (mariage, union libre, famille recomposée). Nous avons mené des entretiens de groupe dans des secteurs comme : le jouet, la presse, les supports de promotion et de publicité, le tourisme. Nous en avons tiré comme information que la structure monoparentale implique une plus forte recherche de services associés mais est contrainte par un revenu disponible inférieur. Ceci la conduit à une structure de consommation (niveau de dépense, répartition du budget) proche d’une CSP inférieure à la sienne en termes socioculturels. Les trois capitaux définis par Bourdieu sont affectés par ce changement de statut : • Capital Financier : atteint par la dilution des revenus et l’augmentation des charges fixes (hébergement) par rapport au nombre d’individus du foyer. • Capital Social : la rupture du couple entraîne généralement un relâchement du lien relationnel notamment pour les femmes (femme seule peu invitée, contrainte de garde des enfants, retour d’invitation qui peut être dévalorisant si le logement est moins porteur de « standing »). • Capital Culturel : Celui-ci reste peut-être le moins affecté des trois. La contrainte de la disponibilité personnelle peut cependant réduire la vivification des bases culturelles issues du milieu d’origine. L’intégration des catégories senior au modèle; le modèle d’origine comporte les libellés suivants : • Célibataire • Jeunes couples sans enfants • Couples avec enfants de moins de 6 ans • Couples âgés avec enfants à charge 127 • • • • Couples âgés sans enfants à charge, chef de famille en activité Couples âgés sans enfants à charge, chef de famille retraité Personne âgée, seule, en activité Personne âgée, seule, retraité Notre réécriture proposée pour le modèle par D.Wells et G.Gubar part des faits suivants : La notion d’adolescents et le poids de ceux-ci influence très fortement la consommation en tant que prescripteur mais surtout en tant que consommateur. Nous constatons ce phénomène, notamment au travers d’une offre « jeune » hypertrophiée. Les familles monoparentales doivent être considérées selon l’âge des enfants (nid complet 1, 2 ou 3). La différence essentielle de comportement serait liée à une baisse de revenu et donc à des changements dans le choix de la destination (moins chère) par rapport à celle de l’environnement social de référence. Les contraintes d’organisation sont également plus grandes (un seul adulte pour plusieurs enfants). Étapes Caractéristiques Jeune Célibataire -35 ans, consommation très forte en loisirs, clientèle exigeante et peu fidèle Jeune Couple Sans enfant, consommation forte en loisirs, début des investissements en biens durables, clientèle exigeante Nid complet 1 Le plus jeune enfant à moins de six ans, forts engagements financiers (immobilier, ameublement, véhicule) et baisse du revenu utilisable en loisirs Nid complet 2 Le plus jeune enfant à plus de six ans Engagements financiers Nid complet 3 Tous les enfants sont entrés ou sortis de l’adolescence. 128 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Concernant spécifiquement les « Seniors » Baby-boomers Les enfants ont quitté le foyer ou exercent une profession en étant au domicile. Les parents exercent leur profession. Pouvoir d’achat fort, apparition des faiblesses physiques. Marqueur de vie : départ du dernier des enfants du foyer Temps libre important avec un bon niveau de revenu Seniors Marqueur de vie : arrivée à la retraite et sortie des contraintes d’emplois ou de recherche d’emplois Seuls ou en couples, ils sont affectés par les difficultés Grands Seniors physiologiques Marqueur de vie : Soit le décès d’un des membres, soit une contrainte de santé mortelle Les variantes en termes de comportement Baby-boomers En couple / Seuls Catégorie socio- professionnelle /avec /sans emploi Seniors En couple / Seuls Catégorie socio-professionnelle Grands Seniors En couple / Seuls Catégorie socio-professionnelle La notion de marqueur de vie Nous avons dérivé cette notion aux rites de passage définis en sociologie notamment par Van Genepp (1981). L’anthropologue les définit pour chaque société étudiée comme une suite 129 d’épreuves ou de processus formels « qui accompagnent chaque changement de lieu, d’état, de position sociale et d’âge ». Depuis la seconde guerre mondiale, les étapes traditionnelles et « ritualisées » de la vie sociale en France (et en Europe) se sont largement déconstruites : • Extension de la durée des études avec une arrivée dans le monde adulte retardé, • Arrêt de la conscription, • Changement de référence du contrat social du mariage, • Divorce • Chômage et notamment celui des plus de 50 ans. … Il n’en reste pas moins que le champ psychologique continue à montrer « l’impérieux besoin d’évolution et de changement de l’individu » : • Soit autour de la notion d’estime de soi et de reconnaissance (G.W.Hegel, W.Maslow mais voir aussi l’actualité de la recherche dans le N°spécial de Science Humaines N°131 octobre 2002), • Soit en référence au contexte socioculturel et à la nécessaire adaptation de l’individu en son sein (notamment L.Baugnet). Ainsi, ces rites de passages ont-ils perdus de leur sens commun et sociologique pour se réduire à une sphère individuelle dans le parcours purement personnel. Le marqueur de vie est pour nous une étape normale (au sens statistique) de la vie mais avec un caractère social pauvre et un sens rarement univoque. • Un social « pauvre » car il ne donne pas lieu à des éléments formels (même si le pot de départ à la retraite et l’invitation à boire le champagne au Bac du petit dernier reste vivace). • Un sens équivoque car la pression sociale n’exige plus de se réjouir de sa retraite et il est admis de s’y « emmerder ». Nos constats au travers du champ expérimental. 130 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Au travers des focus group menés pour différents commanditaires, nous avons systématiquement noté la charge émotionnelle lié à un changement de statut et les bouleversements perçus par les sujets. Ainsi une étude, sur l’habitat, nous montrait que le départ du foyer des enfants, entraîne des travaux pour mieux profiter de l’espace mais également pour ne pas laisser le foyer avec une empreinte trop forte des enfants partis. Des déménagements ont été effectués pour cette raison. En termes de cycle de vie et de perception émotionnelle, nous pourrions comparer la phase allant de 18 à 45-50 ans comme une progression avec un pic d’optimum atteint lorsque les enfants obtiennent le Bac ou un premier emploi valorisant avec également un habitat, un emploi et une structure familiale conformes aux normes sociales de référence. Après ce pic, même si les personnes apprécient l’amélioration de leur qualité de vie par la baisse des contraintes (financières et horaires), la suite de leur vie est perçue comme une « descente ». Chaque étape est alors plus vécue comme une déconstruction du référent sociétal que comme un processus de progrès. Facteurs de segmentation Ce classement s’appuie sur la thèse Marketing de Pierre ValetteFlorence (1992) « Corrélation relative des CSP, valeur et sociostyle sur la consommation des ménages ». Autre : La prééminence des comportements d’achat sur les motivations Facteurs primaires de segmentation et de ciblage Par ordre décroissant d’importance La catégorie socioprofessionnelle Elle est influente dans le sens des pratiques culturelles et notamment de l’accès aux sports d’hiver en tant que pratique acceptable dans son environnement social. 131 La structure familiale Voir ci-dessus le processus de décision familiale sur la base du modèle de Wells & Gubar Les valeurs Des valeurs générationnels Au système de valeur individuel (ex : valeurs de Uusitalo) Nous utilisons également des outils spécifiques d’aide à la décision comme la matrice ADEQUAT, COM-GI et des outils spécifiques pour des problématiques particulières qu’il est très difficile d’expliquer dans un cadre d’un livre Les entreprises face à l’arrivée des baby-boomers L’arrivée de la génération des baby-boomers à la retraite est une opportunité pour les entreprises déjà présentes sur le marché des Seniors, mais présente une difficulté qui peut être résumée ainsi : comment cibler ces « nouveaux » Seniors en plus des Seniors actuels ? L’arrivée des baby-boomers oblige nombre d’entreprises à se remettre en question. En effet, leur affluence pourrait bien être fatale à certaines d’entre elles. Cette jeune génération de Seniors est en décalage avec les retraités actuels. Beaucoup de baby-boomers se sentent plus proches des jeunes générations, tout en étant « matures ». Voyons quelles stratégies les entreprises peuvent actuellement appliquer pour prendre en compte cette nouvelle donne. 132 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Ne pas ghettoïser les Baby boomers Ne pas ghettoïser les Baby boomers est l’un des points les plus importants pour réussir une stratégie à destination des « nouveaux Seniors ». C’est tout du moins notre position à Senior Strategic confirmée par de nombreux études. Dans la suite de ce chapitre, vous allez comprendre les différents cas de figures mais insistons déjà sur ce point fondamental. Beaucoup nous demandent comment ils peuvent appeler les Baby boomers ? Cette question est pour moi hors de propos. Pourquoi vouloir appeler des clients par leur « nom de génération » pour les cibler. Le directeur général de SFR qui vient de sortir un nouveau téléphone « Simply » qui s’adresse notamment aux Baby boomers dit « pourquoi voulez-vous utiliser le mot Senior alors que même les jeunes ne veulent pas être appelés par le mot ‘jeune‘ ? Nous avons connu un échec, il y a quelques années, avec SFR jeune ». Effectivement, à Senior Strategic nous recommandons d’utiliser deux grandes solutions : utiliser les valeurs ou mettre en avant un avantage produit. Dans le premier cas, il est possible d’utiliser les valeurs de génération ou les ProfilsValeurs (voir chapitre sur les segmentations). C’est un moyen intéressant car les Baby boomers sont de moins en moins sensibles au « paraître ». Dans le deuxième cas, il est intéressant de parler d’un avantage du service ou produit comme par exemple : la facilité d’utilisation, le confort, le coté santé, la « zen attitude ». Ainsi votre produit a pour cœur de cible les Baby boomers mais aussi les autres générations qui sont intéressées par ces mêmes valeurs. Autre avantage : les risques de vieillir une marque sont réduits. Dans une étude menée par Senior Strategic sur la publicité et les 50 ans et plus fin 2012, il est intéressant de noter les différences très fortes en fonction de l’âge et des catégories sociaux professionnelles. Le graphique suivant indique les éléments importants que demandent les femmes de plus de 50 ans en fonction de ses deux critères. Nous pouvons par exemple noter que les femmes Seniors CSP+ sont plus fidèles aux marques que celles de la génération du Baby boom. Plus l’âge est élevé plus les publicités doivent prendre en compte les effets du vieillissement. A noter que les Baby boomers le demandent aussi « à demi-mot » !. 133 Source : Senior Strategic Consulting 2012 Rajeunir sa marque Certaines ont opté pour un « rajeunissement » de leur image pour répondre aux attentes des Jeunes Seniors et des baby-boomers. Le fossé qui sépare les valeurs des baby-boomers et celles des Seniors actuels rend cette tâche difficile. Comment cibler les plus jeunes sans perdre les clients plus âgés ? Certaines sociétés veulent conserver leur cœur de cible tout en rajeunissant leurs produits. D’autres décident de faire évoluer leur cœur de cible. Le choix d’une stratégie n’est pas facile et dépend de nombreux paramètres. Dans le domaine de la presse Senior, Notre Temps est un exemple intéressant. Ce mensuel, qui compte tout de même 4,5 millions de lecteurs par mois, a su évoluer pour s’adapter à ses lecteurs les plus jeunes. Depuis sa création, il y a 35 ans, ce journal a beaucoup changé. À l’automne 2002, il a dû rapidement évoluer. « C’est tout à la fois évident et étonnant, ce sont nos lecteurs qui nous y obligent ! Cette génération de Seniors évolue si vite, c’est à peine si nous arrivons à la suivre », 134 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 explique Patricia Cadorel, directrice de la rédaction. Il est vrai que ces « nouveaux » Seniors « ont une vision d’eux-mêmes beaucoup plus optimiste que la réalité qui figure sur leur carte d’identité », comme le dit Herbert Michaelis, directeur général d’Interdéco, la régie publicitaire de Notre Temps (source : Notre Temps). La nouvelle version de Notre Temps a un « look » plus discret, plus aéré, coloré et moderne. Le contenu a également évolué, avec une rubrique culturelle, un cahier santé-forme modifié, des photos plus grandes pour des offres de voyages, etc. La diffusion et le nombre de lecteurs semblent indiquer que cette évolution est réussie. Notre Temps a su s’adapter progressivement « sans bouleversement ni chambardement, mais avec juste ce qu’il faut d’évolution pour rester au plus près de ses lecteurs », commente Jean-Paul Bury, rédacteur en chef. Lorsque les changements sont plus rapides, les risques d’échec augmentent. La mésaventure d’un des acteurs de la vente par correspondance au milieu des années 1990 en témoigne. La direction de l’époque avait décidé de modifier ses produits et de lancer une ligne de prêt-à-porter plus jeune pour cibler les nouvelles générations de Seniors. Un an plus tard, la clientèle habituelle ne se retrouvait pas dans les nouveaux produits. Les clients récents, des Jeunes Seniors, n’étaient pas assez nombreux et une partie d’entre eux ne se retrouvaient pas dans l’image de ce vépéciste. Depuis, l’entreprise s’est recentrée sur les Seniors « modérés », tout en modernisant sa marque, ses produits et son catalogue. Non seulement les baby-boomers ont des attentes très différentes des retraités actuels, mais nous assistons à une évolution au sein même des Seniors. La génération des plus de 60 ans a souvent été tournée vers les autres. « Ce qui était important, c’était le pays, la famille, le groupe », explique Robert, âgé de 65 ans. Une partie de ces Seniors est en train de se rendre compte qu’il est important de penser un peu plus à soi, comme les babyboomers. Ces retraités sont en train de changer mais se distinguent toujours des baby-boomers. Des entreprises actuellement implantées sur le marché des Seniors ciblent plusieurs générations de Seniors, même si leur cœur de cible est plus spécifique. Certaines semblent bien réussir à la fois auprès des retraités et des baby-boomers, à l’image de 135 Vacances Bleues, qui utilise cependant un marketing relationnel avec une segmentation pointue. L’exemple de l’AARP L’AARP (association des retraités américains) a été créée dans les années 1950 par un professeur californien à la retraite qui, ayant perdu son assurance maladie (les citoyens américains de 65 ans et plus trouvaient alors difficilement des compagnies d’assurances prêtes à les assurer à des conditions satisfaisantes), s’est mis en quête d’une compagnie d’assurance qui l’accepterait. Aujourd’hui, l’AARP réunit plus de 35 millions de membres aux États-Unis et regroupe trois générations parmi ses adhérents ! Plus de 50 % d’entre eux exercent toujours une activité professionnelle. « Nous avons pour vocation première de défendre nos membres devant les différentes institutions nationales et internationales et de leur offrir de multiples services », explique Leigh Beiley, représentante de l’AARP en Europe (source : LeMarchedesSeniors.com). L’AARP a prévu il y a longtemps que l’arrivée des babyboomers allait changer la vision même de la retraite. Cette génération ne « se retrouverait » pas spontanément dans une association de retraités. « Avec l’arrivée des baby-boomers, nous sommes au début d’un des changements les plus importants de l’histoire des ÉtatsUnis. À l’AARP, nous avons l’intention de prendre part à ce changement », expliquait William Noveli, directeur exécutif de l’association. Le magazine AARP The Magazine, lancé cette année, est aujourd’hui le mensuel le plus lu par les Seniors dans le monde. Il remplace My Generation et Modern Maturity. La création de Modern Maturity remonte à octobre 1958. Ce mensuel ciblait les Seniors américains. Voyant la génération de baby-boomers arriver, l’ARRP avait lancé en mars 2001 un deuxième magazine, My Generation spécialement conçu pour cette génération fort différente des Seniors. AARP The Magazine, désormais seul magazine, cible l’ensemble des plus de 50 ans. L’AARP a lancé en 2010 des campagnes de communication à destination des baby-boomers pour poursuivre son développement. 136 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Pas de recette miracle, mais une stratégie globale Les échecs d’entreprises ou de marques ciblant les Seniors ne sont pas rares. Dans certains cas, la stratégie adoptée n’a pas donné tous les résultats escomptés. Peut-être êtes-vous directeur marketing et avez-vous vécu cette situation ? Votre produit était adapté à votre cible, les études montraient qu’il répondait à des attentes que vous aviez bien définies. Malgré cela, les résultats n’ont pas été à la hauteur de vos espérances. Dans d’autres cas, c’est la communication qui s’est révélée quelque peu décevante, à l’exemple d’une certaine eau minérale pour les femmes de plus de 50 ans : un bon produit, qui répond à des attentes bien définies, mais dont la communication a été un échec relatif. Des entreprises, dans le domaine de la téléphonie par exemple, ont développé des campagnes de publicité spécialement conçues pour les Seniors, mais n’ont pas adapté leurs produits aux attentes et besoins de cette cible. D’autres ont simplement appliqué en France, telles quelles, des méthodes employées aux États-Unis. Or, la France n’est pas les États-Unis, et les Seniors américains ne sont pas les Seniors français (en Europe même, tous les seniors ne constituent pas un groupe homogène). D’autres encore appliquent des solutions à première vue intéressantes, conseillées par des experts du marché des Seniors, avec là aussi, des résultats médiocres. Comment expliquer que certains réussissent là où d’autres échouent ? Qu’est-ce qui fait qu’une stratégie donne de bons résultats ? Comment analyser le fait que certaines sociétés réussissent dans le même domaine avec des stratégies différentes ? Avoir une vision globale pour définir une stratégie à destination des Seniors permet de prendre en compte l’ensemble des paramètres et d’éviter de nombreuses erreurs. Par exemple, près de 76 % des entreprises ciblant les Seniors utilisent des communications spécifiques sans que leurs produits (initialement destinés aux jeunes générations) et moyens de distribution soient adaptés (source : Baromètre 2010). Bien entendu, il y a des domaines d’activité dans lesquels le développement d’un produit spécifique pour les Seniors est à 137 éviter. C’est par exemple le cas de l’automobile. Personne n’imagine actuellement des voitures exclusivement conçues pour les Seniors ; on s’attend plutôt à une prise en compte des attentes des Seniors dans la conception de véhicules destinés à toutes les générations de conducteurs. Nous avons constaté lors de nos missions que les dirigeants d’entreprises étaient soumis à une pression de plus en plus forte. Il faut aller toujours plus vite, réduire les délais, rogner sur certains budgets, gérer des procédures d’achat lourdes que les directions opérationnelles ne maîtrisent pas, augmenter les responsabilités, mettre en concurrence les membres d’un même service, etc. Les responsables marketing doivent de plus en plus atteindre des résultats élevés et les échecs sont souvent fatals et sans appel. Tous ces constats ne facilitent pas le développement de stratégies marketing globales. Or, celles-ci sont vitales dans de nombreux marchés, dont celui des Seniors. Dans beaucoup de grands groupes, les responsables marketing doivent travailler avec des prestataires référencés par le service Achat. Ces sous-traitants n’ont, bien souvent, aucune connaissance précise du marché des Seniors, même si beaucoup prétendent le contraire. De plus, les métiers sont quelquefois tellement segmentés que les responsables marketing rencontrent des difficultés à faire la synthèse et à obtenir une stratégie cohérente entre tous les acteurs. La vision globale La vision globale dont nous parlons tout au long de ce livre permet aux responsables marketing de prendre en compte l’ensemble des paramètres importants dans leurs projets, des études à la définition du mix marketing, et à son application en communication et en distribution. Nous avons rencontré l’équipe de direction d’un groupe bancaire. Dans ce groupe, des initiatives avaient été prises pour cibler le marché des Seniors. Les produits existaient, mais les résultats n’atteignaient pas les objectifs prévus. Après analyse, le principal point de blocage était le manque de compétences des conseillers financiers. Ils possédaient l’expertise nécessaire, mais 138 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 rencontraient de réelles difficultés dans les relations avec la clientèle âgée. Autre cas : le responsable marketing « e-business » d’un touropérateur ne comprenait pas les mauvais résultats de son portail Internet chez les plus de 50 ans. Il avait lu dans plusieurs études que les Seniors étaient un groupe d’internautes à forte croissance. Après analyse, un de nos experts a noté que l’architecture du site lui-même n’était pas adapté au mode d’utilisation d’Internet des plus de 50 ans. Les Seniors, qui apprécient les modes de navigation linéaires, étaient perdus. Une agence Internet reconnue avait travaillé sur le sujet, mais n’avait pas su éviter cet écueil. Exemple d’une stratégie globale dans une station touristique L’exemple dont nous allons parler donne une bonne idée de ce que nous appelons « la vision globale » du marché des Seniors. Il concerne une des plus grandes stations touristiques de montagne en France. Les dirigeants de cette station étaient déjà sensibilisés au phénomène du vieillissement de la population. Ils avaient lancé plusieurs campagnes de communication à destination des Seniors dans des médias spécialisés et par marketing direct, campagnes qui ont entraîné une hausse de la fréquentation de la station par les Jeunes Seniors âgés de 50 à 60 ans. Cependant, le taux de rotation est apparu très élevé chez les Seniors. En dehors des propriétaires de logements dans la station, les plus de 50 ans ne revenaient pas les années suivantes. En 2002, les dirigeants de la station nous ont demandé d’étudier plus précisément les raisons de ce fort taux de rotation et les possibilités d’améliorer la situation. Ils voulaient développer le chiffre d’affaires sur les moyen et long termes avec une réelle politique stratégique. L’échec partiel des stratégies appliquées, limitées à des campagnes de communication, est assez évident pour un expert du marché des Seniors. D’après le « Baromètre du marché des Seniors 2010 », c’est la principale raison des échecs des actions marketing à destination des Seniors. Communiquer avec les Seniors sans adapter les produits est inutile dans la grande majorité des cas. Même certains tour-opérateurs ciblent les Seniors 139 dans leurs campagnes de communication ou de marketing direct sans adapter les séjours, prétextant que les Seniors sont de plus en plus jeunes et consomment comme les autres. C’est une contrevérité : si les Seniors se sentent plus jeunes, mais ils n’en ont pas moins des besoins et des attentes. Forts de ces enseignements, les dirigeants de notre station de ski voulaient adopter une vision plus globale. Un audit a été lancé sur l’ensemble de la station en prenant en compte plus 2 500 critères dans différents secteurs : produits, services, architecture, commercial, ressources humaines, etc. En parallèle, une cellule d’experts du marché des Seniors issus de différents métiers a été mise en place afin de définir des orientations et de suivre les différents travaux. Dans les stations touristiques de montagne, les services et les activités sont essentiellement développés pour les jeunes. Cette stratégie est cohérente pour certaines stations, mais dangereuse dont la une clientèle est plus large. Les plus âgés et les plus jeunes, certes, partagent certaines activités, mais les Seniors sont attirés par des activités répondant mieux à leurs envies : pratique de la raquette à neige, ski de fond, découverte culturelle et de la nature, etc. Pour attirer et retenir les Seniors, l’aménagement des infrastructures et de l’architecture de la station est nécessaire. Cet aspect est souvent écarté en raison de son coût. Mais quel est l’intérêt de construire actuellement des hôtels qui seront dans 10 ou 15 ans inadaptés à une population vieillissante ? Dans notre exemple, l’objectif est double : adapter la station aux attentes des Seniors en prenant en compte les effets du vieillissement, mais aussi en définissant une politique « d’aménagement intergénérationnel ». L’idée est de permettre à toutes les générations de cohabiter en harmonie. Que les jeunes puissent sortir le soir en discothèque, par exemple, tout en respectant la tranquillité des autres vacanciers et des plus âgés. C’est aussi prévoir l’aménagement des routes, des parkings, des trottoirs. Outre son coût, un tel aménagement des infrastructures peut faire peur pour une raison simple : si les aménagements sont trop visiblement destinés aux Seniors, les visiteurs n’auront-ils pas l’impression d’être dans un « village de Seniors » ? Cette crainte est compréhensible. Mais qu’est-ce qui empêche de choisir des 140 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 solutions discrètes ? Dans 10 ans, notre station touristique se sera progressivement adaptée à une clientèle plus âgée. Tous les changements apportés seront assez discrets pour que seuls des experts les remarquent. N’oublions pas que les trottoirs surbaissés ont été créés à l’origine pour les personnes handicapées et sont utilisés maintenant par tous. Un programme de commercialisation pour les Seniors a été mis en place. Il s’agit de proposer des « packages » plus adaptés aux différentes générations de Seniors, avec des programmes d’activités répondant à leurs attentes. Alors que les jeunes préfèrent agir librement, les plus âgés apprécient souvent qu’on leur propose des vacances « tout compris ». L’idée de tarifs spécifiques n’a pas été retenue et ne sera pas mise en œuvre pour deux raisons principales : il s’agit d’offrir plus de services au lieu de réductions et de maintenir la progression du chiffre d’affaires. Dans l’esprit de beaucoup des plus de 50 ans, « être Seniors » donne droit à des réductions. Ceci est en train de changer : les Seniors sont plus aisés qu’auparavant et nombreux sont les directeurs marketing qui préfèrent diminuer les réductions existantes et, en échange, proposer plus de services. Une stratégie concernant l’accueil et le contact avec la clientèle des Seniors a été retenue. Les études montrent que les Seniors apprécient un personnel expérimenté qui comprend leurs besoins. C’est une demande légitime, mais la moyenne d’âge des personnes en contact avec la clientèle des Seniors, dans le domaine du tourisme, est de moins de 30 ans. Pour réduire les risques d’éventuels « conflits de générations », certaines entreprises, comme General Motors ou Accor, forment leur personnel à mieux gérer leurs contacts avec les Seniors. Une autre solution consiste à embaucher des salariés Seniors (50-60 ans) à certains postes. En Grande-Bretagne, la chaîne de bricolage B&Q embauche 15 % de personnes de plus de 50 ans parmi ses vendeurs. En plus de l’amélioration du contact avec les clients, B&Q a noté une baisse de l’absentéisme, et des comportements plus « réfléchis » dans le travail. Aux États-Unis, Wal-Mart embauche également des plus de 50 ans et en fait même la promotion. Dans le cas de notre station touristique, on a décidé de former le personnel au contact de la clientèle Senior. 141 Ce projet est l’un des premiers en France à avoir été mené avec une vision globale dans une station de tourisme. Il devrait permettre de répondre aux attentes des Seniors et des babyboomers sans faire fuir les jeunes clients. C’est d’autant plus remarquable que les stratégies des stations de montagne sont très souvent tournées vers les jeunes. Stratégies générationnelles Développer une marque ou un nom de produit spécifiques ? Quand elles cherchent à définir une stratégie marketing pour cibler les Seniors ou une génération de Seniors, les entreprises doivent choisir une politique de marque. Doivent-elles développer une marque spécifique pour les Seniors ? Est-il préférable d’utiliser une marque existante ? Est-il judicieux d’employer le terme Seniors ? Sur ce sujet, les acteurs du marché des Seniors ont des positions très variées. À l’image de L’Oréal et de Tena, certaines entreprises ont développé des marques spécifiques (Age Perfect et Libra) ; d’autres préfèrent adapter une marque existante – c’est le cas par exemple de Vania Maxi et de Nivea Vital. Quelle est la meilleure solution ? À cette question, il n’y a pas de réponse toute faite. Les directeurs marketing qui ont une certaine expérience du marché des Seniors savent qu’il n’y a pas de solution miracle. Par le passé, certains ont cru que l’emploi du terme « Senior » était gage de réussite. Beaucoup ont vite déchanté, voire périclité. s’il n’y a pas de solution miracle, il y a des pistes à explorer. Voyons lesquelles. La création d’une marque nouvelle La création d’une marque spécifique aux Seniors est la solution adoptée par de nombreux acteurs du marché des Seniors. C’est le cas par exemple de la SNCF avec la carte Senior, destinée aux plus de 60 ans. Dans le domaine de la banque, la SBE (Groupe Banque Populaire) a créée la marque Banque des Seniors et le Crédit Municipal de Paris propose un « Prêt Senior ». La gamme de soin pour les peaux matures Age Perfect de L’Oréal et Libra de 142 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Tena sont des exemples de marques qui n’emploient pas le mot « Senior » et affichent malgré tout une belle réussite. Créer une nouvelle marque à l’attention des Seniors est délicat et implique des efforts de communication. La marque doit respecter les codes culturels de la cible visée et correspondre à leurs valeurs. Les différences entre une personne de 55 ans et une autre de 67 ans sont telles qu’il est parfois difficile d’utiliser une marque unique pour ces deux générations. L’étude « Les Baby boomers et la publicité 2012 » analyse plusieurs campagnes de communication ciblant les Seniors, dont celles des produits cosmétiques Age Perfect de L’Oréal. Le choix de l’anglais, dans le nom d’une marque, peut sembler risqué. En réalité, les « baby-boomeuses » auxquelles ce produit est destiné acceptent assez facilement les termes anglais (nous avons cependant noté une forte réticence chez les plus âgées et certains profils comme les Seniors Inquiets (15 %) sont beaucoup plus réticents) [sur les typologies, voir le Chapitre 3]. Dans de nombreux secteurs, il n’est pas utile de développer un marketing spécifique pour cibler les Seniors. C’est le cas de l’automobile. Dans ce secteur, les Seniors n’apprécieraient pas qu’une voiture leur soit exclusivement destinée. Dans le domaine de la distribution, il est déconseillé de développer une marque de produits estampillés « Senior ». Seule une vision globale permet de prendre en compte l’ensemble des paramètres importants, des études au service aprèsvente, en passant par la communication. Du côté des stratégies, nous verrons au Chapitre 6 qu’elles relèvent de trois types : générationnelles, trans-générationnelles et intergénérationnelles. Acheter une entreprise dont les produits sont consommés par les 50+ Choisir d’aller sur le marché des Seniors par croissance externe – c’est-à-dire en achetant une entreprise – est une stratégie intéressante. L’idée est de prendre le contrôle d’une société dont les clients sont majoritairement des personnes de plus de 50 ans. Le groupe allemand Quelle s’est ainsi emparé d’Afibel ; le groupe Emap a racheté le mensuel Pleine Vie, créé par Antoine Adam. 143 En 2010, un groupe américain nous a demandé de l’aider à évaluer les potentialités du marché des Seniors en Europe. Ce client cherchait des sources de croissance pour la décennie à venir. Après avoir racheté neuf entreprises aux États-Unis, ses dirigeants ont décidé de s’attaquer au marché européen. Pour éviter de répéter les erreurs commises de l’autre côté de l’Atlantique, ils ont sollicité nos conseils. Notre mission consistait à mesurer les performances d’entreprises dans les domaines de la santé, de l’alimentation et des services, susceptibles de connaître une croissance à deux chiffres dans les années à venir. Savoir avec certitude si une entreprise sur le marché des Seniors a un réel potentiel n’est pas aisé. Certaines entreprises peuvent réaliser des chiffres d’affaires importants avec une croissance soutenue depuis plusieurs années et néanmoins craindre de grandes difficultés pour les années à venir. C’est le cas de celles qui, très bien implantées sur le marché des Seniors, ont un portefeuille de clients trop âgés et risquent de voir leur chiffre d’affaires s’écrouler rapidement quand ceux-ci, prenant de l’âge, cesseront de consommer leurs produits. Nous l’avons dit : l’arrivée des baby-boomers sur le marché pourrait être fatale à un certain nombre d’entreprises. Faire évoluer une entreprise dont les clients ont plus de 60 ans vers la cible des baby-boomers n’est pas facile, voire économiquement dangereux. D’autres entreprises sont positionnées dans les secteurs à fort potentiel et ne seront rentables que sur le long terme. Notre client américain a connu une expérience douloureuse avec une société de services médicaux axés sur le 4 e âge. Cette société était financièrement saine, mais au vu de la démographie, son potentiel réel n’aurait pas été visible avant une dizaine d’années. Cette société ne pouvait pas garantir le taux de rentabilité nécessaire pour la croissance de ce client américain. « Le plus important dans l’achat d’une entreprise sur le marché des Seniors est de bien vérifier que celle-ci pourra atteindre les objectifs de l’acheteur potentiel », explique John Milman, expert du marché des Seniors aux États-Unis. Parmi les opérations rentables, nous pouvons citer le rachat de Pleine Vie par le groupe Emap. Le nombre de lecteurs de ce magazine est en effet en constante augmentation et son format est bien positionné pour profiter de 144 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 l’arrivée des lectrices de 50 ans (les « baby-boomeuses ») dans les années à venir. En juillet 2010, Nike a racheté la célèbre marque de baskets Converse. L’objectif était de trouver des relais de croissance sur un marché – celui de la chaussure de sport – que plusieurs experts qualifient de saturé. Cette marque, connue dans les années 1960 et 1970, devrait permettre à Nike de cibler les baby-boomers. Avec la vague « nostalgique » que les États-Unis connaissent depuis quelques années, Converse est redevenu à la mode. Le marché des vêtements de sport « rétro » était en progression de 11,4 % en 2002 aux États-Unis, d’après la Sporting Goods Manufacturers Association. L’exemple de Karting Créée en 1972 et basée à Grenoble, la société Karting s’est spécialisée dans les vêtements pour les femmes de plus de 50 ans. Avec un chiffre d’affaires de 16,8 millions d’euros, ses 180 employés et ses 950 points de vente, Karting fait partie des entreprises solidement implantées sur le marché des Seniors. Elle s’était fait remarquée dès 1976 par ses publicités avec Brigitte Bardot. En février 2010, la société est achetée par Mme et M. Lemoine qui veulent « continuer la stratégie de qualité et de service ». Développer une marque Plusieurs sociétés partent d’une de leurs marques pour développer un produit à destination des Seniors. C’est le cas de Vania, qui a lancé en 2002 Vania Maxi, ou de Nivea avec sa gamme Nivea Vital, créée en 1994. Une telle stratégie présente des avantages, notamment financiers : les coûts de développement sont relativement plus faibles. En effet la marque est souvent déjà connue de la cible. Cependant, le risque de « vieillir » la marque est grand si l’âge moyen de sa cible « originelle » est très inférieur à celui de la nouvelle cible. Il sera intéressant de suivre les prochains résultats de Vania. Créer à partir de cette marque connue pour ses serviettes 145 périodiques des couches d’incontinence est jugé risqué par certains professionnels du marketing des Seniors. Comment réagiront les jeunes consommatrices de Vania si leur marque est désormais associée aux problèmes d’incontinence ? L’histoire de Nivea est différente. Cette marque était déjà utilisée par des personnes plutôt âgées avant le lancement de ses différentes gammes pour Seniors. D’après l’un de ses responsables marketing, la gamme Nivea Vital (qui cible les femmes de plus de 50 ans) a même permis de rajeunir l’image de marque. La ligne de soins Supra Sérum Haute Exigence Multi-Intensif lancée par Clarins et destinée aux baby-boomeuses repose sur une stratégie intéressante, car beaucoup de clientes de cette nouvelle gamme connaissent déjà Clarins et ont déjà acheté ses produits. La gestion d’une image de marque est un exercice auquel sont rompus les directeurs marketing. D’une manière générale, chaque génération consomme ses propres marques. Les plus âgés peuvent, dans certains cas, être intéressés par des marques plus jeunes. L’inverse est rarement vrai, tant notre société souffre de « jeunisme ». Ceci doit évidemment être nuancé selon les contextes et les secteurs d’activités. Développer une offre de fidélisation Les offres de fidélisation sont nombreuses sur le marché des Seniors et émanent en majorité d’entreprises dont les produits ou les services ciblent l’ensemble des générations. Nous avons classé ce type de programme dans les stratégies générationnelles. En effet, même si les produits en question ne sont pas forcément adaptés aux Seniors, le programme, lui, est spécifiquement destiné aux plus âgés. La plupart des offres de fidélisation proposent des réductions aux plus de 50, 55 ou 60 ans, enclins à les considérer comme des « acquis ». Ainsi la carte AVIS Club Senior du loueur de véhicules Avis. Il s’agit d’une formule d’abonnement annuel, accessible aux plus de 55 ans. Elle offre à son titulaire des réductions tarifaires et des services en France métropolitaine. La carte Senior de la SNCF a remplacé l’ancienne carte Vermeil. Elle est destinée aux plus de 60 ans. Vendue 50 euros, elle propose des réductions (jusqu’à 50 %) sur les billets de train 146 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 et sur d’autres services, tels que le service Bagages à domicile. Des partenariats ont été créés entre la SNCF et le loueur de véhicules Avis, la chaîne d’hôtels Mercure ou encore la compagnie de ferries SNCM. Actuellement, on compte plus de 850 000 porteurs de cette carte. En 2012, la SNCF a modifié sa carte Senior en y ajoutant notamment le cumul de S’Miles (de la société Laser). Le porteur de la carte peut ainsi gagner 1 S’Miles pour 1 euro dépensé. Le cumul des points donne accès à des billets de trains ou à des cadeaux. A noter que la SNCF a également mis en ligne un site Internet spécialement dédié aux Seniors : www.senior-sncf.com Nombreuses sont les entreprises qui réfléchissent à la mise en place d’offres de ce type ou qui viennent de franchir le pas, à l’image du loueur EuropCar et, plus récemment, d’Air France. Dans le secteur du tourisme et des loisirs, la chaîne d’hôtels Mercure propose aux plus de 55 ans de « venir à deux et de payer pour un ». Les programmes de fidélisation sont pour certaines entreprises un moyen de cibler les Seniors sans pour autant adapter globalement leurs produits. C’est le cas des acteurs de l’hôtellerie qui, à part le groupe Choice aux États-Unis, se contentent de mettre en place ce genre de programme sans adapter leurs infrastructures. Autrement dit, la politique tarifaire est quelquefois la première étape d’une stratégie plus globale. C’est l’avis de Kirby Payne, CHA, présidente de The American Hospitality Management Company : « Les programmes de fidélisation sont souvent une première phase vers une stratégie plus complète à destination des Seniors. Même si les nouveaux Seniors se sentent plus jeunes, les entreprises devront, dans les années à venir, aller au-delà des simples programmes tarifaires. » Les programmes de fidélisation à destination des Seniors présentent divers avantages. En premier lieu, une grande majorité des Jeunes Seniors estiment qu’ils vont de soi. D’autre part, les stratégies de fidélisation sont généralement simples à mettre en place et demandent des investissements raisonnables. Certaines entreprises font l’erreur de penser que ces programmes de fidélisation sont suffisants. Or les Seniors veulent d’autres produits répondant à leurs attentes. Autre inconvénient de la fidélisation : on risque une « ghettoïsation » des Seniors. Lors 147 d’une étude pour une régie de transport de province, nous avons noté que 37 % des Seniors, en âge de bénéficier de l’offre de fidélisation, exprimaient des réserves : ils redoutaient d’être inclus dans un groupe particulier. Nous retrouvons ces réticences chez les baby-boomers qui, se sentant plus proches des jeunes générations, ne veulent pas être perçus comme « vieux ». Beaucoup des plus de 50 ans disent qu’ils sont prêts à utiliser des services spécifiques… si tout le monde fait de même ! C’est l’une des difficultés du marché des Seniors : répondre à leurs attentes sans les stigmatiser. L’exemple des Jeudis SeniorCité de la RATP À la RATP, 1996 marque le début d’un engagement auprès de sa clientèle Senior (plus de 55 ans) dans plusieurs directions : amélioration de l’accessibilité avec deux tiers des stations de métro équipées en escaliers mécaniques, places réservées dans les bus et métro, service d’accompagnement. Le plan du métro, très lisible, a été conçu à l’origine pour les Seniors. Au-delà de ces actions, la RATP a souhaité de répondre aux besoins de loisirs exprimés par les Seniors. D’où les « Jeudis Seniorcité ». Il s’agit de rendez-vous hebdomadaires autour de cinq activités : le multimédia, le cinéma, la littérature, la danse et la généalogie. Près de 10 000 Seniors ont fréquenté ces animations en 2002 et ils sont 42 000 à recevoir la Lettre Seniorcité de la RATP qui les informe et leur propose des offres dans le cadre de partenariats. Stratégies transgénérationnelles Les stratégies transgénérationnelles s’appliquent aux produits utilisés par toutes les générations, comme l’automobile. Le Baromètre 2010 du marché des Seniors souligne que les entreprises qui appliquent des stratégies transgénérationnelles sont nombreuses. Elles sont souvent très réticentes à reconnaître qu’une partie de leur clientèle a plus de 50 ans, toujours par crainte de « vieillir » leurs marques. Un acteur Internet dont les publicités mettent en scène des Seniors n’a pas voulu être présent dans ce livre de peur que l’on 148 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 sache que les Seniors représentent 16 % de sa clientèle. « Nous voulons les Seniors sans que cela se sache », admet un dirigeant d’un groupe alimentaire. Certaines entreprises comme Carrefour, Leclerc, Label Rouge, Fleury Michon, Maggi, etc., communiquent cependant dans la presse Senior. Vers un marketing sans âge (« ageless ») Après la vague du marketing générationnel, les partisans du marketing « sans âge » sont de plus en plus nombreux aux ÉtatsUnis. L’idée est de trouver des dénominateurs communs à l’ensemble des générations que l’on souhaite cibler. Dans une population très hétérogène, il est difficile de segmenter une population en fonction de ses comportements. Nous le savons depuis longtemps : nos valeurs et nos croyances définissent nos comportements, et non l’inverse. Les spécialistes du marketing « sans âge » s’appliquent à développer et positionner leurs produits selon les valeurs de leurs cibles. Cette stratégie est particulièrement utile pour cibler les Seniors, plus conscients de leurs propres valeurs que les jeunes. La société Yankelovitch, qui a « inventé » le marketing générationnel, présente les résultats de ses recherches sur les valeurs dans son rapport The Yankelovich Monitor. Ces résultats sont très proches de ceux des travaux de Maslow sur nos besoins pendant la « seconde partie de vie ». Le rapport de Yankelovitch montre que les consommateurs de plus de 50 ans, pragmatiques, ont atteint un degré de maturité qui les fait plus souvent agir en fonction de leur système de valeurs. Maslow était arrivé aux mêmes conclusions à propos des comportements des plus de 50 ans. Maintenant, même les 35-45 ans sont de plus en plus nombreux à présenter les caractéristiques des personnes plus « matures ». Tenir compte d’autres données que l’âge chronologique est d’autant plus important qu’il n’est plus un critère de segmentation suffisant pour comprendre les plus de 50 ans. SeniorStrategic travaille à partir de segmentations basées sur les valeurs pour faciliter le développement de produits destinés à plusieurs générations, par exemple aux baby-boomers et aux Seniors, ou aux baby-boomers et aux plus jeunes. 149 Le marketing « sans âge » est appelé à se développer pour les produits ciblant plusieurs cohortes. Il est à l’opposé des stratégies de segmentation de type « générationnel » et présente de nombreux avantages. Prise en compte des attentes des Seniors Les entreprises développant des stratégies transgénérationnelles intègrent les attentes et les besoins des Seniors dans leurs produits et leurs services. C’est le cas de nombreux constructeurs automobiles comme General Motors, qui simplifie les commandes de ses véhicules. Ford est aussi très en avance dans ce domaine. Ses designers et ingénieurs utilisent une combinaison appelée « ThirdAgeSuit » qui permet de simuler le vieillissement d’une personne de plus de 65 ans : diminution de l’agilité, affaiblissement des sens, etc. Dans le domaine de la distribution, l’une des enseignes les plus en avance est Monoprix. Elle a réalisé plusieurs études sur l’impact du vieillissement de la population dans le domaine du commerce et créer un groupe d’experts censés proposer des pistes d’actions. C’est ainsi que le merchandising de cette enseigne prend en compte les attentes des Seniors et que la lisibilité des affichages et des étiquettes a été particulièrement soignée. Il y a beaucoup de façons de prendre en compte les attentes des Seniors tout en respectant celles des autres générations. L’étude de tendance « Les Seniors et les appareils électroménagers » montre une orientation intéressante dans le domaine des appareils dits « technologiques ». Nous savons que les modes d’utilisation d’un produit et les modes d’apprentissage varient d’une génération à l’autre. L’emploi des télécommandes, d’Internet et des services de télévision par satellite de type Canal Satellite ou TPS, par exemple, doit faire l’objet d’adaptations selon les cibles. Une société américaine propose ainsi des télécommandes offrant plusieurs modes d’utilisation. Les téléspectateurs peuvent choisir leurs programmes de plusieurs manières et classer les chaînes selon leurs critères. « Cette prise en compte des différents modes de réflexion et d’apprentissage permet l’utilisation d’une même produit par un plus grand nombre de générations », explique Bill Gough, consultant américain en ergonomie. 150 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Stratégies intergénérationnelles Les stratégies intergénérationnelles consistent à cibler les membres d’une génération par l’intermédiaire d’une autre. Certaines entreprises ciblent les Grands Seniors en communiquant auprès de leurs enfants. D’autres s’adressent aux grands-parents pour atteindre les petits-enfants. Les exemples de ce type de stratégie sont de plus en plus nombreux et donnent de bons résultats. C’est le cas par exemple des téléalarmes, dénigrées par une grande partie des Seniors, même s’ils en ont besoin. Ils ne veulent pas admettre qu’ils deviennent peu à peu dépendants. Dans ce cas de figure, leurs enfants peuvent jouer un rôle de conseillers. Les baby-boomers servent de plus en plus de prescripteurs pour les jeunes et les plus âgés. Ils sont en train de se rendre compte qu’ils deviennent une génération pivot au sein même de leur famille. Ils sont nombreux à devoir aider leurs enfants et à s’occuper de leurs parents vieillissants. Cette génération est en quelque sorte un modèle pour les jeunes. Plusieurs d’études montrent qu’il existe une complicité particulière entre une mère de 55 ans et sa fille. Certaines études vont jusqu’à dire qu’il n’y plus vraiment de différence entre l’une et l’autre, ce qui est sans doute excessif. Reste que cette génération de Seniors sert bel et bien de modèle à ses propres enfants. Cette connivence entre les deux générations peut être utilisée par les entreprises pour toucher l’une ou l’autre. C’est le cas de l’industrie du textile, qui pourrait cibler les femmes de plus de 50 ans en jouant sur les goûts de leurs filles. Les baby-boomers sont de bons prescripteurs pour les générations plus âgées (leurs parents), notamment pour les produits liés à la dépendance. On le note déjà pour de nombreux produits comme la télésurveillance, les fauteuils relaxants, etc. Le groupe American Retirement Corporation, l’un des leaders dans le domaine des maisons de retraite et des services au 4 e âge aux États-Unis, l’a bien compris. Le groupe possède des établissements médicalisés et des centres de soins pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. La société s’occupe de 65 maisons de retraite avec une capacité de 14 500 places. Sa direction marketing communique depuis plusieurs 151 années auprès des filles de personnes de plus de 80 ans avec le message suivant : « En choisissant une de nos maisons de retraite pour votre maman, vous serez soulagées de la savoir en sécurité. » Cette stratégie est efficace et utilise deux critères générationnels : d’une part le stress de la génération des babyboomers et, d’autre part, le fait que beaucoup de gens en âge de rentrer dans une maison de retraite ne veulent pas prendre cette décision seuls. Le rôle des grands-parents Les grands-parents sont de plus en plus nombreux dans la génération des baby-boomers. Les entreprises qui veulent cibler les enfants ont besoin d’eux, les études montrant que les liens entre grands-parents et petits-enfants redeviennent importants. Certaines sociétés l’ont bien compris, en particulier dans le secteur bancaire. L’étude « Le marketing bancaire des Seniors » réalisée par Eurostaf a identifié de nombreux produits permettant aux grands-parents de financer les études de leurs petits-enfants. Certaines assurances-vie désignent même les petits-enfants comme « porteurs » alors que ce sont leurs aînés qui les alimentent. Au Japon, la société de télécommunications JSAFP vend aux grands-parents des coffrets contenant deux téléphones mobiles. L’un, leur est destiné et est adapté à leurs besoins (comme le RakuRaku commercialisé par DoCoMo, adapté aux Seniors) l’autre est utilisé et choisi par le petit-enfant. L’objectif est double : convertir les Seniors à la téléphonie mobile et renouveler le parc des téléphones mobiles chez les jeunes. Adaptation des produits Fin 2012, Senior Strategic Consulting a demandé aux Seniors ce qu’ils attendaient des produits et des services en général. Nous voulions savoir ce qui était vraiment important pour eux. Apprécient-ils les innovations techniques ? Que pensent-ils des produits qui leur sont directement destinés ? Qu’est-ce qui est important pour eux dans un appareil électroménager ? Jugent-ils 152 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 les produits existants adaptés à leurs besoins ? Préfèrent-ils les marques ou les produits génériques ? L’étude a révélé des différences très nettes entre les générations, mais aussi entre les différents secteurs d’activités. D’une manière générale, les Seniors demandent des produits qui, tout en répondant à leurs attentes, leur fassent « discrètement » oublier les effets du vieillissement. C’est pourquoi 74 % des 50-60 ans ne veulent pas de produits spécialement conçus pour eux, mais 82 % demandent qu’ils répondent à leurs attentes. Les plus âgés sont mieux disposés à accepter des produits spécialement conçus pour eux. Ceci varie fortement en fonction des secteurs d’activités. Dans le domaine de la restauration, 76,5 % des Seniors déclarent préférer des menus imprimés en gros caractères à condition qu’ils soient utilisés par tous les clients. Il s’agit donc de développer des produits pour l’ensemble des générations en tenant compte des difficultés que peuvent éprouver les Seniors à les utiliser. Ce qui est simple pour les plus âgés l’est généralement aussi pour les plus jeunes. C’est dans cette optique que la RATP a conçu le plan du métro parisien. Ce plan était conçu pour répondre aux difficultés des Seniors et des malvoyants. Il est maintenant utilisé par tous. À la question : « Qu’est-ce qui est important pour vous dans un produit ? », la réponse la plus courante est « la facilité d’utilisation » (68 % des Seniors). La « qualité » (durabilité et sécurité) vient ensuite. Les réponses varient selon les secteurs. Dans le domaine de l’électroménager, la facilité d’emploi est très importante. « Les progrès techniques sont tels que j’éprouve souvent des difficultés pour comprendre le fonctionnement d’un appareil », explique Alain, retraité, 64 ans. « Nous ne voulons pas de produits de «vieux», mais simplement que les fabricants comprennent que leurs téléphones portables sont trop petits, trop compliqués et possèdent des fonctions que nous n’utilisons pas. » Un grand nombre de Seniors pensent que les produits actuels ne leur sont pas destinés et qu’on leur demande de s’y adapter. « Je suis encore jeune, mais même à mon âge, je trouve que les télécommandes des télévisions sont trop compliquées », nous a confié un homme de 54 ans. Les Seniors ont tendance à « naviguer » de manière linéaire dans les menus alors que les jeunes le font de façon plus intuitive. 153 En règle générale, les plus de 50 ans sont réfléchis et pragmatiques dans leur choix. Ils apprécient les innovations à condition que celles-ci apportent un vrai avantage. « Consommer un nouveau produit parce que l’emballage a changé de couleur ou de forme ne présente pas d’intérêt pour moi », explique une personne interrogée. Cette affirmation résume bien l’opinion des Seniors vis-à-vis des innovations. Bien entendu, tous les Seniors ne font pas preuve de la même défiance. Les Seniors Originaux et Actifs se montrent plus ouverts aux innovations. Les Seniors Rigoureux, Réfléchis et Inquiets ne s’y intéressent pas spécialement. Très bien informés, ils prennent leurs décisions en fonction de leurs besoins et non en fonction des tendances ou des modes. L’exemple du label « 100 % facile » de Boulanger Après le prix, la facilité d’emploi est le second critère de choix pour l’électroménager et le premier pour les appareils « haute technologie ». Pour répondre à cette exigence, la chaîne de distribution d’appareils électroménagers Boulanger a créé le label « 100 % facile ». Celui-ci sélectionne les produits commercialisés en magasin qui répondent à un ensemble de critères, notamment la facilité d’emploi. 180 produits sur une offre de 5 500 références ont été labellisés. Prenons l’exemple d’un magnétoscope « 100 % facile ». Celui-ci doit respecter les critères suivants : avoir une télécommande multimarques ou universelle, un réglage automatique des chaînes avec mémorisation dans le bon ordre, une programmation simplifiée grâce à une touche spécifique, une notice claire avec schéma de câblage, etc. D’après un sondage Boulanger/Ifop, les principaux éléments définissant la facilité d’emploi sont la facilité d’installation (96 %), d’entretien (92 %), la possibilité d’utilisation ouverte à tous (93 %) et le gain de temps (90 %). Comme nous le disions plus haut, la facilité d’emploi concerne l’ensemble des générations. Les études du Credoc montrent que cette exigence de simplicité demeure stable tout au long de la vie, puisqu’elle est exprimée par 87 % des 35-44 ans, 86 % des 45-54 ans, 87 % des 55-64 ans et 88 % des plus de 65 ans (source : document Boulanger). 154 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’exemple de SFR Simply SFR a lancé en 2006 "Simply", un nouveau concept de téléphones mobiles très simples à utiliser. Il s’agit une offre spécialement destinée aux personnes qui veulent avant tout téléphoner. En France, 10 millions d'adultes de plus de 35 ans ne sont pas encore équipés en téléphonie mobile, dont 3 millions qui ne sont pas à l'aise avec la technologie. Par ailleurs parmi les utilisateurs actuels, certains estiment ne pas avoir un mobile adapté à leurs besoins. Intimidées par les multiples fonctions des mobiles, ces personnes attendent un mobile moderne et d'une simplicité absolue utilisable idéalement sans mode d’emploi et ne servant qu’à téléphoner et envoyer des Texto. SFR a souhaité répondre à leur besoin en lançant, pour la première fois en France, une nouvelle gamme de téléphones mobiles, baptisée "SFR Simply", au design moderne. L’ergonomie de ces mobiles a été repensée par SFR autour de la simplicité avec notamment trois touches d’accès direct aux fonctions essentielles et une page d’accueil réservée aux informations indispensables. L’exemple du téléphone japonais Raku Raku Le téléphone japonais Raku Raku (traduction de « facile – facile ») de Docomo est un téléphone portable facile à utiliser pour les personnes de plus de 50 ans moins familiarisées aux mobiles. Il cible également les personnes avec des incapacités physiques, par exemple, les personnes avec des incapacités visuelles. Ce téléphone n’a pas le « look d’un téléphone spécial vieux » mais au contraire présente un design moderne avec des touches légèrement plus grandes (sans excès) et un écran de taille plus importante. En le voyant, personne ne peut deviner qu’il s’agit d’un téléphone avec pour cœur de cible les Seniors. Il peut également être utilisé par les jeunes de part son look. Simplement Docomo a intégré des fonctionnalités qui intéressent principalement les 50 ans et plus, comme un 155 système de ralentissement de la voix de l’interlocuteur. Utile pour parler à ses petits enfants… Des produits pour les Baby boomers ou des produits pour toutes les générations ? Faut-il développer des produits pour les Seniors ou pour l’ensemble des générations tout en tenant compte des attentes des plus de 50 ans ? Au sein de notre Club du marché des Seniors qui est un lieu de veille et d’échange entre directeurs marketing, cette question déclenche bien souvent des débats très animés. D’après le Baromètre 2010 du marché des Seniors, moins d’un tiers des responsables marketing penchent pour la solution des produits spécifiques pour les Seniors Alors qu’en est-il ? Nous le disons souvent dans ce livre : les réponses simplistes ont fait beaucoup de tort dans le passé. Le choix de développer des produits spécifiques à destination des Seniors dépend de nombreux paramètres. Citons en quelques-uns : le secteur d’activité, le cœur de cible, l’objectif, la zone de commercialisation, etc. Répondre à de nouveaux besoins Au sein d’une même cohorte, les attentes et besoins des Seniors sont très variables. En étudiant les comportements des plus âgés, les différences deviennent évidentes. Le fait que les Seniors et les baby-boomers se sentent plus jeunes, ne doit pas faire oublier qu’ils ont des envies et des besoins spécifiques. Le vieillissement de la population fait apparaître de nouveaux besoins dans de très nombreux domaines. Certains concernent les effets du vieillissement et d’autres les « stades de vie » des personnes. Une question d’ergonomie Dans le développement de produits à destination des Seniors, l’ergonomie joue un rôle essentiel, en particulier si ces produits sont dits « technologiques ». Le sens que nous donnons ici à « ergonomie » est celui de l’emploi, ou de la facilité d’emploi. En effet, les modes d’apprentissages différents entre les générations. 156 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les Seniors ont le plus souvent un « mode d’utilisation » à dominante linéaire. Prenons l’exemple d’Internet. Une personne de plus de 50 ans aura tendance à regarder l’ensemble de la page d’accueil d’un site avant d’en sélectionner un élément. Si cet élément ne lui convient pas, il sera enclin à revenir directement à la page d’accueil. Une personne de 20 ans aura un autre mode de fonctionnement : il parcourra le site de lien en lien, de manière plus intuitive, n’hésitant pas à emprunter le même chemin plusieurs fois. S’il revient à la page d’accueil, ce sera souvent pour lancer une nouvelle recherche. Prenons un autre exemple : la mire des programmes de CanalSatellite. Pour ceux qui ne la connaissent pas, cette mire présente, sous forme de grille, vingt écrans de chaînes de télévision (il y a plusieurs grilles, contenant l’ensemble des chaînes). Avec la télécommande, le téléspectateur peut se déplacer d’écran en écran pour choisir une chaîne. Lorsqu’on choisit une chaîne, celle-ci occupe alors tout l’écran de télévision. Si l’on veut en changer, il est nécessaire de connaître son numéro d’ordre ou de revenir au début, sur la première mire. Ce type de fonctionnement est plus adapté aux personnes ayant un mode de répartition du temps appelé « temps arrêté ». Autrement dit, ces personnes préfèrent revenir au début d’un processus plutôt que de revenir là où elles en étaient à un moment donné. Les études montrent que les Seniors fonctionnent majoritairement sur ce mode de « temps arrêté ». Lors du développement d’un produit, son mode d’utilisation doit être adapté à la cible visée. Les produits à destination des Seniors doivent donc prendre en compte leurs modes d’utilisation. Les produits plus intergénérationnels présenteront les deux modes de fonctionnement ou un mode intermédiaire. Le design universel J’ai recommandé à plusieurs reprise de ne pas ghettoïser les Seniors. Une idée intéressante est l’utilisation du Design Universel qui permet de développer des produits ou des bâtiments qui sont adaptés à tous aussi bien aux Seniors qu’aux les personnes ayant un handicap. Ceci de manière totalement « intégrée », au point que les jeunes ne peuvent que difficilement se rendre compte que le 157 produit ou l’environnement est adapté. C’est une bonne idée pour les hôtels ou encore les appareils high-tech. En France le consultant en accessibilité universelle, Jean-Yves PRODEL propose aux entreprises un service dont le savoir faire réside en l’analyse, la réflexion, et le suivi dans la mise en place de projets de design industriel, architecturaux et environnementaux avec une orientation spécifique qui lui est propre : le design universel aussi appelé design pour tous. L’Université de Caroline du Nord aux USA a définit le design universel. Il s’agit d’un concept du design qui reconnaît, respecte et apprécie le plus large éventail possible d’aptitudes humaines, auxquelles il tente de s’adapter en relation avec la conception de tous les produits, environnements et systèmes d’information. Dans la pratique, cela nécessite une sensibilité à autrui, fondée sur une connaissance approfondie des personnes, de tous les âges et dotées d’aptitudes diverses. Il dépasse en même temps le concept du design de l’accessibilité, adaptable et à la disposition de tous, y compris les handicapés. Cette approche permet d’éliminer la nécessité de fonctions et d’espaces spécifiques ce qui, pour certaines personnes, dénote souvent un caractère blessant ou du moins embarrassant, un aspect différent et aussi généralement des coûts plus importants. Le design universel et le marketing Le design universel est un outil de marketing efficace en même temps qu’un concept de design, du fait que les produits et les espaces plus universellement utilisables font l’objet d’une commercialisation qui s’adresse à presque tout le monde. L’application des principes du design universel peut donc contribuer à la création d’un marché plus vaste des produits et des espaces de consommation. En outre, les produits dont le design devient plus universel sont fabriqués en masse, et leur coût diminue pour tous les utilisateurs, réduisant aussi le besoin de produits spéciaux ou de technologies d’assistance. Si le concept est adéquatement mis en oeuvre, le design universel est quasiment invisible, sûr, physiquement et émotionnellement accessible à la plupart des utilisateurs. Plus simplement, le design universel est conçu en fonction de l’utilisateur ; c’est, en soi, un "bon design." parce qu’il englobe les aptitudes et les besoins du plus grand nombre. Comparaisons avec le design de l'accessibilité 158 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les confusions sont fréquentes entre le design « universel » et le design « de l’accessibilité ». L’appellation « design universel » n’est pas un euphémisme désignant l’accessibilité ; elle n’implique pas la connotation de « à la disposition de tous, y compris les handicapés ». Ce n’est pas une expression accrocheuse ni un substitut aux normes du design de l’accessibilité, qui ont force exécutoire. Ces normes définissent un seuil minimum d’exigences qui, respectées, donnent à beaucoup de personnes la possibilité d’accéder à des programmes et à des activités, sans toutefois assurer une participation active et intégrale. Ces normes ne tranchent pas non plus la subtile question des différences entre l’activité sensorielle et l’activité cognitive, ni les changements auxquels le corps humain est soumis dans le temps. Cependant, les designers peuvent n’utiliser qu’un minimum de codes et de normes comme outils de référence, qu’ils doivent ensuite dépasser pour réaliser un design véritablement universel. Le design universel privilégie l’objectif crucial consistant à répondre aux besoins du plus grand nombre possible d’utilisateurs. Les designs peuvent s’adapter naturellement ; il est aussi possible de les adapter afin qu’ils répondent à des exigences individuelles diverses. Il est donc important que le design universel soit intégré à toutes les phases du processus de conception. En augmentant le nombre de personnes dont les différents besoins sont satisfaits par une même solution, le design universel encourage une approche inclusive plutôt que de multiples solutions distinctes. C’est le caractère inclusif de cette approche qui fait du design universel un outil économique et qui entraîne une plus grande participation individuelle aux activités de la société. Le design universel : pour qui? En définitive, le design universel bénéficie à tous. Des personnes n’ayant pas de besoin immédiat n’apprécient pas nécessairement la valeur du design universel, même s’il est possible qu’à un moment ou un autre de leur vie elles en retirent un bénéfice. Ceci se vérifie pour des produits d’usage quotidien dont l’utilisation est facilitée, comme les équipements ménagers et les automobiles, ou encore les sites Web avec option en mode texte. Pour la plupart des gens, le design universel passe inaperçu, bien que l’on remarque une plus grande facilité d’utilisation. En effet, la plupart des gens sont surpris de constater que le design universel propose des produits, des espaces ou des informations plus sûrs, dont 159 l’utilisation est plus confortable et plus conviviale. Pour les handicapés, l’adoption véritable du concept de design universel est capitale. Les bénéfices, sans limitation, en sont les suivants : - Disponibilité de produits plus utilisables, à des prix stables, et que l’on peut se procurer dans des circuits commerciaux de proximité ; - Accessibilité sans précédent aux équipements publics et commerciaux ; - Accès amélioré aux services, dont les services proposés par l’intermédiaire d’un support électronique ; - Reconnaissance du fait que le handicap fait partie de la condition humaine – les personnes affectées par des handicaps deviennent des clients et des participants, et ne sont pas seulement considérées comme des patients, des acheteurs ou les destinataires d’un service. Le design universel apporte aussi à d’autres personnes des produits et des environnements plus sûrs, d’utilisation plus confortable, plus conviviaux, ainsi que la capacité de rester chez soi en toute sécurité en cas d’invalidité temporaire, ou au fur et à mesure de la perte d’autonomie due au vieillissement. Les producteurs profitent d’un marché étendu pour des produits moins nombreux. Le design universel améliore l’indépendance, l’accessibilité des coûts, la qualité marchande, ainsi que l’image et l’identité de l’utilisateur. C’est une question multidimensionnelle et pluridisciplinaire nécessitant un changement du savoir, des stratégies et des procédures des designers, des fabricants, des constructeurs et du marketing dans tous les secteurs d’activité. Adaptation des packagings et emballages Le packaging n’échappe pas aux conséquences du vieillissement de la population. Les Seniors se plaignent souvent des emballages ; 76 % déplorent leur mauvaise lisibilité, beaucoup éprouvent des difficultés à les ouvrir. Prenons l’exemple de l’arthrose. Sa prévalence générale relevée par des dépistages radiologiques systématiques est de 52 % des adultes pour une seule localisation. Dans les tranches d’âge les plus 160 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 élevées, cette prévalence atteint 85 %. Dans la tranche d’âge 6575 ans chez les femmes, l’arthrose du rachis lombaire est présente dans 64 % des cas, celle de la main dans 75 %, du genou dans 35 %, de la hanche dans 10 %. Les études montrent que 28 % des 5064 ans souffrent de cette affection. Heureusement, certaines agences de l’industrie du packaging – encore trop peu nombreuses – commencent à prendre en considération ces chiffres et conçoivent des emballages dont la manipulation et l’ouverture sont plus aisées. Même les produits « jeunes » sont concernés. Lors d’un focus group, mené par Senior Strategic Consutling, une grand-mère de 62 ans nous expliquait qu’elle avait rencontré des difficultés avec la nouvelle boîte de chocolat en poudre d’une grande marque. « J’étais avec mes petits-enfants et j’ai rencontré des difficultés pour ouvrir la boîte de chocolat. Le problème est que la scène s’est passée devant mes petits-enfants et l’un deux a pointé ma difficulté ce qui m’a gênée », nous a expliqué Janine. Les difficultés rencontrées par les Seniors les plus âgés avec les emballages actuels sont bien réelles (la très grande majorité des produits alimentaires sont présentés dans des emballages qui leur posent problème). Les Seniors eux-mêmes évitent souvent de montrer leur embarras, certains refusent même de l’admettre. Selon l’Asnav (Association Nationale pour l’Amélioration de la Vue), 85 % des plus de 50 ans (soit 19 millions de personnes) ont des problèmes de vue, notamment pour voir de près (presbytie). Une fois passée la cinquantaine, tout le monde est presbyte. La presbytie est un petit handicap dont les Seniors souffrent tous les jours, notamment dans les rayons des magasins. Une partie des formations proposées par SeniorStrategic aux chefs de produits consiste à les mettre dans la peau d’une personne de plus de 60 ans, à l’aide de la combinaison Age Explorer, qui permet de simuler les effets du vieillissement et notamment la baisse de la vue. Ces formations permettent très souvent de faire prendre conscience aux chefs de produits que les derniers packagings qu’ils ont conçus sont tout simplement illisibles pour une personne de plus de 50 ans. Quand on sait combien l’information est importante pour les Seniors : les empêcher de l’obtenir est tout simplement le meilleur moyen d’interrompre le processus d’achat. Si une partie des 161 Seniors s’en tiennent aux produits qu’ils connaissent, c’est qu’ils ne veulent pas prendre de risque. D’une manière générale, les packagings à destination des Seniors doivent être adaptés aux effets du vieillissement et aux effets de génération (ainsi qu’aux codes culturels des générations visées). De grands caractères, un texte aéré, avec des couleurs choisies sont recommandés. Le principe récent de l’» ouverture facile » est un net progrès. Si l’approche du marché des seniors pose problème aux services marketing et aux agences de communication, il ne devrait pas en être ainsi pour l’emballage, à condition de privilégier les aspects fonctionnels de celui-ci. Mais c’est encore un exercice difficile en tant que tel aujourd’hui selon Annette Freidinger-Legay Expert International en Emballage et dirigeante de la société Côté Emballage. (www.coteemballage.com) Réputés comme expérimentés, les seniors succombent moins facilement aux artifices de la société de consommation dont ils ont été les piliers et mesurent mieux que les autres les progrès de l’emballage. Rappelons à titre anecdotique que le 1 er salon de l’Emballage est né en 1945 et les Oscars de l’Emballage en 1955. S’ils en mesurent les bienfaits, ils en constatent aussi les manques et les ratés. C’est ainsi qu’une étude réalisée par Facit pour Pro Carton en 2011 précise que 83% des plus de 60 ans jugent l’emballage très ou plutôt très important dans l’acte d’achat, mais que 19% seulement en sont vraiment satisfaits contre 31% des 2535 ans. Comme pour s’acheter une conduite vis-à-vis de l’environnement qu’ils laisseront à leur descendance, les plus jeunes des seniors souhaitent plus d’emballages biodégradables, comme le précise le sondage réalisée par MV2 pour le salon Europack en 2011, alors que les plus âgés revendiquent surtout des emballages plus pratiques. Il en va pour l’emballage comme pour la vie : « si tu veux connaître la vérité: demande aux anciens ». Les seniors énoncent ce que tout le monde pense sans oser ou prendre le temps de dire et constituent le meilleur panel à consulter pour améliorer les emballages. En effet, et à la différence des produits qu’on leur destine et qui possèdent de réelles spécificités porteuses de différences, il est difficile de croire que le bénéfice ergonomique apporté par l’emballage à cette cible ne puisse pas convenir à l’ensemble du marché. 162 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Ce qui convient aux seniors convient aux autres car ce qui ce comprend aisément s’adresse à tous, ce qui s’ouvre et se referme facilement ravit les paresseux et les gens pressés, ce qui se consomme de façon fractionnée est une réponse au nomadisme des autres et enfin, ce qui est sécurisé est une avance technologique pour tous. Croire que le développement des blisters aide mémoire n’a d’intérêt que pour les personnes âgées, c’est oublier le confort que l’on peut apporter à celles qui recourent à la pilule contraceptive où à ceux qui consomment des compléments de santé, c’est oublier que l’on a pu ainsi développer des traitements différenciés selon le moment de la journée. « Soit ce que tu veux paraître » énonçait Socrate. Les emballages pour baby boomers devront tempérer leur fonction marketing d’incitateur à l’acte d’achat par un statut de composant technologiquement optimisé. C’est une opportunité pour le cycle de vie de l’emballage en général, pour un design plus universel, et les arguments pour ce « passage en douceur » ne manquent pas. - La presbytie est un des premiers signes de vieillissement, mais le besoin de clarté est quasi universel. L’inflation d’informations légales ou volontaires sur les étiquettes plaide pour une plus grande lisibilité de la DLC, de l’origine du produit, de la composition, des signes de qualité, mais aussi de la présence d’allergènes, d’OGM... Ceci ne renvoie pas seulement à une taille de caractères raisonnable, à une typographie claire, à un contraste d’impression suffisant, ou une surface d’impression mate plutôt que brillante, mais bien à une organisation de l’information et à de nouveaux modes d’expression de celle-ci. - Choisir un petit format n’est plus un stigmate de la perte de force des plus âgés. La déréglementation des formats acceptée par les instances européennes pour certains produits permet de satisfaire à des lieux et des moments de consommation très variés. - Les seniors recherchent l’assurance, les autres consommateurs ont besoin d’être rassurés. Les différentes crises sanitaires ayant secoué les marchés et les polémiques sur l’efficacité de certains produits cosmétiques ont générés l’intérêt pour les cautions et les avis autorisés portés sur l’emballage 163 - les baby-boomers pratiquent les cyber-achats et contribuent au développement de ce nouveau mode de distribution auquel l’emballage doit s’adapter - L’âge avançant, le pousse garde plus de puissance que les autres doigts de la main et les capsules à charnières conviennent mieux aux aînés, tout comme à la « Thumb Generation ». - Les seniors seraient moins sensibles aux lots promotionnels selon une enquête consommation du Credoc en 2002 ; voilà une occasion de sortir du cercle vertueux des « 2 plus 1 » et des emballages gigognes qui, par leur omniprésence, deviennent achats malins et banalisent les marques. - Enfin, la cohabitation sur les marchés d’emballages à réelle ouverture facile, d’ouverture facile qui ne tienne pas leur promesse, d’ouverture réfractaire à tout sauf aux ciseaux , contribue à entretenir une défiance générale qui se pénalise globalement tout l’emballage et brouille le critère prix. Globalement donc l’emballage pour seniors s’appuie aujourd’hui sur des valeurs de praticité : ouverture facile par anneau plutôt que par languette, pelabilité améliorée, couple de dévissage des bouchons étudié, bouchon à vis agrippants ou à quart de tour, allégement des poids, diminution des formats, diamètre dimensionné pour la préhension, vernis mat non glissant, pompe délivrant la même dose quelque soit la force d’activation, notices courtes, opercules des blisters pharmaceutiques plus perforable… C’est un paradoxe, car tout changement de fonctionnalité sur un emballage bouscule les habitudes. Est-ce à dire que l’emballage découvre l’ergonomie intergénérationnelle mais que les marques ne destinent cet avantage qu’à une cible de consommateurs qu’elles considèrent comme physiquement déficiente, ou est-ce à dire que les âgées sont aptes au changement pourvu qu’il apporte un bénéfice tangible ? Peu de metteurs sur le marché français prennent en compte les critères ergonomiques en amont de la conception d’un couple emballage - produit. Les USA et la Grand Bretagne, plus 164 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 pragmatiques dans leur approche marketing, travaillent davantage ces critères et se sont dotés de structures d’observation et de préconisation pour « senior friendly packaging ». En témoigne cette étude de 2002 de Mona Doyle du Consummer Network qui quantifie sur une échelle de 1 à 5 la perception qu’ont les seniors des emballages de 60 produits différents. Evaluation des emballages en fonction de l’âge croissant (on www.branding.com) Légende : 5 : excellent, 1 : très mauvais Catégorie Verrines en plastique Cannette à ouverture facile avec anneau Poches type Stand up Blister pharmaceutiques / Capsules Flacon de ketchup Poches pour Thon Produits cuisinés 20-39 ans 4,1 3,9 40-59 ans 3,6 3,6 6074 3,6 3,4 +de ans 3,6 3,2 3,3 3,4 4,3 3,4 3,5 3,2 3,0 3,6 3,1 3,0 3,1 2,9 3,7 3,1 3,2 2,8 3,3 3,6 2,6 3,1 Alors pourquoi les innovations emballages pour baby-boomers et seniors prennent-elles autant de temps pour apparaître ? - La « ghettoïsation » reste un risque si l’on dote l’emballage d’attributs spécifiques à cette population que l’on considère de façon trop monolithique - Le coût est un frein au développement d’emballages spéciaux et les économies d’échelle ne peuvent pas être mettre mises en place si l’on raisonne en segmentation de marchés. - Le développement des ventes par le hard discount et les MDD ne tire pas ce marché - Les fabricants d’emballages sont suiveurs par rapport aux donneurs d’ordres. La hausse des matières premières et l’internationalisation des marques sur des marchés émergents à fort potentiel paupérisent leur créativité. 75 165 - enfin, « c’est avoir tord que d’avoir raison 10 ans trop tôt » Pour nous rassurer sur cette évolution, nous prêterons attention au devenir de quelques produits très récents avec une valeur ajoutée dans le packaging comme : le Bio Performance Super Lift Absolu de Shiseido, les soupes en boite Campbell, ou encore le Time Contrôle de Colgate. Des programmes tarifaires pour cibler les Seniors Les stratégies qui consistent à proposer des réductions spécifiques pour les Seniors sont très courantes aux États-Unis. L’AARP (l’association des retraités américains) y est pour beaucoup. Forte de ses 35 millions de membres et d’un magazine lu par 20 millions de personnes, elle a passé des accords avec la plupart des compagnies de transport, les hôtels et les tour-opérateurs afin d’obtenir des réductions pour ses membres. On trouve des réductions pour les Seniors dans tous les domaines d’activités : tourisme, automobile, transport, beauté, etc. Ces réductions peuvent atteindre des niveaux élevés, jusqu’à 50 %. Les cartes d’abonnement En France, la SNCF propose des réductions, avec la carte Senior spécialement, réservées aux plus de 60 ans (pour 49 euros par an, on peut obtenir jusqu’à 50 % de réduction sur des voyages et, avec des partenaires de la SNCF, d’autres avantages). La carte d’abonnement Avis Club Seniors permet aux plus de 55 ans d’économiser de 10 à 35 % en fonction des forfaits choisis pour la location d’un véhicule. De son côté, American Airlines a lancé en 1997 un club, « The Active American Traveler Club », pour les plus de 62 ans. Contre un abonnement de 40 dollars, les clients peuvent obtenir des réductions sur les vols, mais aussi dans les hôtels et certaines sociétés de location de voiture 166 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les réductions de tarifs Aux États-Unis, US Airlines propose des tarifs particuliers aux personnes de plus de 62 ans. Les taux de réduction sont généralement de 25 % et sont disponibles sur la plupart des vols. À noter que la compagnie propose également un tarif « Senior » aux personnes qui accompagnent les plus de 62 ans. Du côté des hôteliers, la chaîne américaine Choice offre 30 % de réduction aux plus de 50 ans. La réservation est obligatoire auprès d’un service téléphonique et est fonction des chambres disponibles. En France, Mercure propose aux plus de 55 ans de « venir à deux et payer pour un ». Ce dispositif fait également partie du programme « 2 pour 1 » de la chaîne Optic 2000. Les restaurants participant au programme de Marriott Hotel and Resort proposent 20 % de réduction sur leurs menus. Les stratégies basées sur les réductions suscitent des interrogations Ces stratégies sont-elles pertinentes ? Les Seniors d’aujourd’hui sont plus aisés que les leurs aînés. Ils ont vécu leur adolescence pendant des périodes moins difficiles et sont habitués à la société de consommation : ils font passer la qualité, le service, le choix avant les prix. Lors d’une conférence, organisée en collaboration avec theMatureMarket.com sur les Seniors à Chicago en décembre 2001, le directeur marketing du groupe hôtelier Choice confirmait de point (« C’est la valeur perçue de la prestation qui est importante. »), autant que l’étude « Les Seniors en France », qui montre que les Seniors cherchent avant tout des produits et des prestations de qualité. Ils sont généralement prêts à payer plus cher un produit offrant des services supplémentaires, pour peu qu’ils répondent à leurs besoins. C’est également ce que note l’étude « Le marketing bancaire des Seniors » de la société Eurostaff. Certaines assurances sont proposées avec des services qui facilitent la vie des Seniors. Ces produits sont souvent destinés aux Seniors les plus aisés. Autrement dit, la pratique des réductions pour Seniors est aujourd’hui quelque peu obsolète. L’âge minimal requis pour bénéficier de certains programmes de réduction est actuellement 167 réévalué à la hausse par un certain nombre d’entreprises. L’étude « les Seniors en France » montrent que les baby-boomers sont ceux qui acceptent le plus facilement ces changements. Autre constat, la baisse constante des prix inquiète une grande partie des Seniors : ils l’associent souvent à une baisse de la qualité des produits, notamment dans le domaine alimentaire. La distribution Sur le marché des Seniors, il est assez rare qu’un fabricant vende directement sa marchandise à l’utilisateur final. Entre le producteur et le consommateur, il y a une multitude d’intermédiaires. Certains de ces intermédiaires, comme les grossistes et les détaillants, achètent en leur nom propre la marchandise qu’ils revendent : ce sont des intermédiaires commerciaux. D’autres – les courtiers, les représentants, les attachés commerciaux – prospectent la clientèle et passent des contrats au nom du fabricant, mais ne s’engagent pas à titre personnel : ce sont des agents. D’autres encore, comme les compagnies de transport et les banques, facilitent la distribution sans prendre part à la négociation commerciale : ce sont des relais. Un circuit de distribution peut être caractérisé par sa longueur, autrement dit par le nombre d’intermédiaires qu’il comporte. Les acteurs du marché des Seniors utilisent les mêmes stratégies de distribution que dans d’autres secteurs, mais doivent les mettre en place avec un soin particulier. Les exemples de produits bien adaptés aux Seniors dont les ventes ne décollent pas à cause d’une distribution inadaptée ne sont pas rares. Nous avons récemment audité les différents circuits de distribution de téléphones portables pour le compte d’un opérateur téléphonique. Ses ventes aux plus de 50 ans souffraient de nombreux problèmes, dont l’un venait de la distribution. Les conseillers n’étaient pas formés à la vente aux Seniors. Ils rencontraient de telles difficultés que certains vendeurs négligeaient cette clientèle. 168 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 La commercialisation en direct De nombreux acteurs du marché des Seniors optent pour la commercialisation en direct. C’est le choix du tour-opérateur spécialisé Vacances Bleues. Didier Bertrand, son ancien directeur marketing expliquait ainsi ce choix : « Nous voulons être en contact direct avec nos clients et avons développé une grande expertise dans le domaine du marketing relationnel. » Il est vrai que les acteurs du tourisme qui sont au contact de leurs clients s’en sortent mieux que les autres en période de « creux » économique. Vacances Bleues possède un plateau téléphonique à Marseille et quelques boutiques à Lille, Paris, Lyon et Marseille. Damart, autre acteur du marché des Seniors, utilise également une commercialisation en direct avec plusieurs catalogues, plus de 60 magasins à son enseigne et un site Internet (damart.com). Ses magasins s’adressent à une clientèle plus âgée, tandis que le catalogue et le site Internet visent les 45-65 ans. Les deux principaux fabricants de fauteuils de relaxation, Everstyl et Variation, utilisent des stratégies proches, avec des encarts publicitaires contenant des coupons réponses dans la presse Senior (Notre Temps et Pleine Vie). Des représentants partout en France contactent directement les clients qui leur ont envoyé ces coupons et prennent rendez-vous pour une présentation du produit. Cette stratégie est efficace si le support publicitaire est adapté aux acheteurs de ce genre de produit, qui ont souvent plus de 75 ans. Le marketing direct auprès des seniors est si courant qu’il est souvent qualifié de surexploité. Les secteurs qui l’utilisent le plus sont les banques et les assurances, les œuvres de charité et, dans une moindre mesure, la presse Senior. Aviva-Direct est souvent cité comme l’un des meilleurs spécialistes du marketing direct sur le marché des Seniors. C’est d’ailleurs l’un des premiers acteurs sur le marché français de la vente à distance de produits de prévoyance avec un chiffre d’affaires de 184 millions d’euros en 2002 et plus de 400 000 clients. 169 La commercialisation par des intermédiaires Certains utilisent la distribution intensive. C’est le cas de L’Oréal (L’Oréal Grey, Elsève au Régénium ou Age Perfect). C’est aussi la stratégie de Nivea Vital, que l’on peut trouver dans l’ensemble des chaînes de distribution. D’autres utilisent des canaux de distribution exclusifs ou sélectifs. C’est le cas de la société Karting, qui a tissé un réseau de 950 points de vente indépendants, animés par neuf représentants exclusifs. Les Laboratoires Inneov commercialisent le complément alimentaire Inneov Fermeté par l’intermédiaire de visiteurs médicaux qui démarchent les dermatologues Le choix et la motivation des intermédiaires Tous les fabricants ne sont pas égaux quant au choix de leurs intermédiaires. Certains trouvent facilement des établissements qui acceptent de s’intégrer à leur circuit. Leurs propositions attirent plus de distributeurs qu’il ne leur en faut. C’est le cas des entreprises jouissant d’une bonne image ou produisant un produit apparemment rentable. Des marques comme Age Perfect ou Nivea Vital n’ont guère de difficulté à faire accepter leurs produits dans les chaînes de distribution. D’autres auront plus de mal à trouver des intermédiaires compétents. C’est le cas des entreprises nouvelles sur le marché des Seniors, mais aussi de celles dont les produits demandent de la part des intermédiaires des connaissances pointues et des compétences particulières. Le canal de distribution doit être adapté à la cible des Seniors. Les clients des magasins de produits médicaux pour le 4e âge ne sont pas ceux qui surfent sur les sites Seniors. C’est évident, et pourtant : le fabricant d’un produit destiné à des personnes de 75 ans et plus en faisait récemment la promotion sur un site Internet « Senior » dont les visiteurs ont en moyenne beaucoup moins de 60 ans. Certains acteurs de la distribution sont en avance. C’est notamment le cas de Monoprix, dont les magasins sont adaptés à la cible Senior. D’autres distributeurs disent ouvertement ne pas vouloir faire d’effort particulier pour répondre aux attentes des plus de 50 ans. L’une des difficultés que rencontrent les fabricants 170 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 est que des intermédiaires rechignent à aller sur le marché des Seniors. Certains ne veulent même pas référencer des produits jugés trop « marqués » pour leur enseigne. Si former et motiver les représentants est indispensable, ce n’est pas la priorité de beaucoup d’acteurs du commerce. Des vendeurs qui disent avoir des difficultés à comprendre les attentes des Seniors passent souvent plus de temps avec ces clients, ce qui dans certains cas réduit leurs commissions. Un des participants à l’une de nos formations de vente à destination des Seniors, âgé de 25 ans, vendait des téléphones mobiles pour un grand opérateur. Sa réaction était la suivante : « Les Seniors ne comprennent rien. Une vente demande cinq fois plus de temps et bien souvent ils reviennent le lendemain parce que le téléphone ne «fonctionne pas» ». Un exemple parmi d’autres d’une certaine forme de « conflit de générations ». Chaque nouveau franchisé du réseau Âge d’Or Services reçoit une formation. On leur apprend notamment à mieux comprendre les personnes âgées. Les Seniors ne sont pas des jeunes, ni des vieux mais tout simplement des personnes qui aiment être comprises comme chacun d’entre nous. Des entreprises telles General Motors ou le groupe Accor forment également leurs vendeurs à la vente aux Seniors. Communication Le nombre de publicités visant les plus de 50 ans croît chaque année. On en comptait 246 en 2002 (source : « Les Seniors et la publicité »). Plusieurs stratégies possibles Certains annonceurs s’adressent directement aux plus de 50 ans, d’autres le font de manière détournée. Certains utilisent le terme « Senior » ou font référence à l’âge. D’autres ne veulent pas cibler les Seniors mais, utilisent des leviers « intergénérationnels » : touchent les grands-parents via les petits-enfants, par exemple. La communication à destination des Seniors doit évidemment tenir compte des effets du vieillissement, ce qui n’est encore pas souvent le cas. Chaque génération réagit différemment aux 171 publicités. Les plus âgés sont de gros lecteurs de presse, les plus jeunes sont attirés par la télévision. Ces différences ont une influence sur les plans médias autant que sur la conception des publicités elles-mêmes. Les modes de lecture d’un document varient également entre les générations. Les ressources humaines Que viennent faire les ressources humaines dans les stratégies marketing ? Chacun d’entre nous a pu être le témoin ou la victime de difficultés de compréhension entre les générations, en famille, mais aussi dans les magasins, par exemple entre un vendeur et un client âgé. Être compris est l’une des plus demandes les plus pressantes des plus de 50 ans. Pour les Seniors, c’est souvent le côté relationnel qui prédomine. Les commerces, les restaurants, mais aussi les services d’assistance téléphoniques doivent en tenir compte. Une étude récente indique que 74 % des plus de 55 ans attendent du personnel (réceptionnistes, animateurs, commerciaux des agences de voyages, techniciens, vendeurs) qu’il comprenne leurs besoins et sachent y répondre. Malheureusement, ils ne sont que 34 % à estimer que c’est le cas. Et la différence d’âge entre le personnel et la clientèle Senior augmente. Comment un réceptionniste âgé de 30 ans peut-il facilement comprendre une personne de plus de 60 ans alors qu’il a lui-même du mal à s’entendre avec des jeunes de 20 ans ? Le marketing générationnel connaît bien ces phénomènes. Les solutions pour mieux servir la clientèle Senior existent et sont déjà employées par plusieurs entreprises. La première consiste à envoyer des salariés Seniors (50-60 ans) au contact de la clientèle Senior. La seconde consiste à former le personnel. Des salariés Seniors au contact de la clientèle Senior La première solution peut surprendre. En effet, s’il est vrai que les Seniors ne veulent pas être « ghettoïsés », qu’ils aiment généralement se retrouver avec les générations plus jeunes et 172 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 notamment leurs enfants et petits-enfants, qui, mieux que des salariés Seniors, peuvent comprendre la clientèle Senior ? Certaines entreprises l’ont bien compris. Wal-Mart, le leader mondial de la grande distribution, embauche déjà des vendeurs Seniors. Il y a 15 % de salariés Seniors parmi les conseillers de la chaîne anglaise de bricolage B&Q (source www.RHSeniors.com). En France, le groupe Caisse d’Épargne a placé des Seniors à ses guichets pour le passage à l’euro. On a pu constater que ces conseillers vendaient plus et mieux aux clients Seniors. Certains experts parlent de « synchronisation » : il s’agit de faire ressembler le vendeur au client. L’embauche de Seniors sera de plus en plus courante dans les années à venir, d’autant que l’Union européenne entend augmenter le taux d’emploi des plus de 50 ans. En outre, d’après B&Q, les salariés Seniors présentent des avantages pour l’entreprise : faible absentéisme, caractère plus réfléchi, plus grande expérience… Former les salariés au contact de la clientèle Senior Certains groupes hôteliers ont mis en place des modules de formation dans ce sens, à l’image de ceux que développe le département américain de formation de SeniorStrategic. L’idée est d’enseigner « la vie des Seniors » au personnel des entreprises. En effet, mieux communiquer avec les Seniors passe par une mise en cause de ce que l’on croit savoir de la vieillesse. Lors de ces formations, nous en abordons tous les aspects : effets du vieillissement, maladies, effets de génération. L’important est de bien comprendre les difficultés que rencontre le personnel avec la clientèle Senior. Il n’est pas toujours aisé d’aborder avec les clients certains sujets encore « tabous ». Les risques de blesser les Seniors sont réels. Des salariés Seniors chefs de produit de « marques Seniors » ? Quoi de plus logique que d’embaucher des plus de 55 ans aux postes de chefs de produit ou de directeurs marketing dans les entreprises qui ciblent les Seniors ? D’accord, c’est peut-être de la science-fiction. Cela implique une remise en cause de beaucoup de pratiques dans le domaine des ressources humaines. Mais n’est-ce 173 pas une idée à creuser ? Ces salariés se sentiraient plus proches de leurs clients. L’exemple de B&Q L’entreprise a été créée il y a une trentaine d’années. Elle appartient aujourd’hui au groupe Kingfisher. C’est le plus important détaillant en matériel de bricolage au Royaume-Uni et son expansion est rapide, l’entreprise prévoyant l’ouverture d’environ 40 nouveaux magasins au cours des prochaines années. Sa main-d’œuvre actuelle représente 23 000 personnes, dont 15 % ont plus de 50 ans et 10 % plus de 55 ans. B&Q est l’une des entreprises les plus en avance en GrandeBretagne en matière de recrutement de salariés de plus de 50 ans. À l’origine, B&Q voulait une main-d’œuvre plus stable pour réduire le turnover et l’absentéisme. La politique des ressources humaines actuelles est de recruter 15 % de personnel âgé de plus de 55 ans. Des sondages réalisés auprès des clients montrent que les salariés plus âgés répondent mieux à leurs besoins que les plus jeunes parce qu’ils possèdent souvent une expérience et des connaissances plus développées en matière de bricolage. Les responsables de B&Q expliquent en outre que les travailleurs plus âgés savent travailler en équipe, s’adaptent bien à la culture de l’entreprise et ont d’excellentes qualités relationnelles. Dans un de ses magasins, B&Q a décidé de ne recruter que des salariés de plus de 50 ans. Cette politique lui a permis d’augmenter de 18 % son profit, de réduire son taux d’absentéisme de 39 % et d’augmenter significativement le taux de satisfaction de ses clients. L’exemple de Grand Optical Certaines entreprises relèvent leur seuil d'âge au recrutement, voire engagent spécifiquement des salariés plus âgés comme Japan Airline. En France, Grand Optical par exemple, dont la plupart des salariés sont jeunes, a recruté en 2006 une cinquantaine de «seniors» dans le cadre d'un programme «priorité aux seniors» (en fait les plus de 40 ans, ndlr). L'entreprise a constaté un besoin de maturité dans les équipes et la nécessité d'avoir des employés plus 174 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 proches de la clientèle, ayant par exemple une expérience de la presbytie ou de tout autre problème de vision lié à l'âge. Plus largement, n'avoir que des salariés de même âge et de même ancienneté exacerbe la concurrence entre individus et rend difficile la gestion des promotions. 175 5 Les médias et les Seniors À de rares exceptions près, on ne peut pas dire que les médias fassent des efforts pour prendre particulièrement en considération les attentes des Seniors et des Baby boomers. « Toujours plus jeune » est souvent la stratégie employée pour répondre à la « pression » d’une grande partie des annonceurs. Or les Seniors sont de gros consommateurs de télévision, de presse et de radio. Dans ce cas, pourquoi ne pas prendre plus en considération leurs désirs ? Il est vraisemblable que rien ne changera tant que le nombre d’annonceurs ciblant les Seniors n’augmentera pas. En attendant, quelles sont les relations des Seniors avec les médias ? Existe-t-il des médias qui aient pour cœur de cible les plus de 50 ans ? Les 50+ et la télévision Les Seniors sont de gros consommateurs de télévision. S’ils sont près de 33 % de la population française, ils représentaient 36,2 % des personnes équipées d’au moins une télévision en 2002 (source : Médiamétrie). La durée d’écoute quotidienne moyenne par individu est de 258 min. La télévision est pour 74 % des Seniors le 176 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 premier média de distraction (source : Simm 2000). Nous le verrons dans le chapitre suivant, ils sont réfractaires à la publicité. Les plus gros téléspectateurs sont parmi les plus âgés, tandis que les 40-54 ans se rapprochent des plus jeunes dans leur manière de consommer les médias. D’après Médiamétrie, les programmes préférés des Seniors en 2002 sont : les journaux d’information, les émissions politiques, les fictions, les variétés, les jeux, les émissions sportives et les magazines. Les chaînes qui comptent le plus de téléspectateurs Seniors sont, dans l’ordre, France 3 avec 44 % de plus 60 ans, France 2 (41 %) et TF1 (32 %). Les chaînes M6 et Canal + s’adressent à un public plus jeune. Arte et La Cinquième sont très appréciées des plus âgés, 70 ans et plus (source : Le Marketing Book Seniors, 2002). Durée d’écoute de la télévision des plus de 50 ans Heures d’écoute Durée de l’écoute 3 h - 7 h 2 minutes 23 7 h - 10 h 9 minutes 12 h - 14 h 37 minutes 08 19 h - 20 h 26 minutes 06 20 h - 22 h 30 83 minutes 10 22 h 30 - 7 h 22 minutes 53 24 h - 7 h 7 minutes 43 Source : Médiamétrie. Face à la concurrence des nouvelles chaînes thématiques, les chaînes généralistes sont contraintes de cibler les moins de 24 ans. La grande majorité des publicitaires poussent également dans cette direction. Ce qui explique qu’en réalité, ces chaînes veulent retenir les plus de 50 ans, mais ne mettent pas en avant leurs audiences auprès de ce public : les annonceurs qui veulent cibler les Seniors sont encore assez rares. L’étude « Les Seniors et les médias » montre un réel décalage entre les attentes des Seniors et les 177 programmes actuellement proposés par les chaînes généralistes. Beaucoup des plus de 50 ans « subissent les programmes actuels ». Tout laisse à penser que les entreprises devront pourtant cibler plus franchement les Seniors. Ce sera, dans un avenir proche, vital pour certaines d’entre elles. Les annonceurs feront pression sur les chaînes de télévisions pour proposer des programmes plus adaptés à ce public. En effet, si celui-ci n’est destiné à devenir leur principale cible, la prise en considération des attentes de l’ensemble des générations semble bel et bien inévitable. Les télévisions Seniors Plusieurs projets de chaînes de télévision sont à l’étude depuis plusieurs années. Lors de l’appel de candidatures en 2002 à la TNT (Télévision Numérique Terrestre), deux de ces projets étaient en compétition : TéléSeniors (un projet né de l’expérience de Télé Mélody) et TELEGénérations. Aucun n’a été retenu par le CSA. Le groupe AB a annoncé, début 2010, un projet de chaîne pour les Seniors appelée AB4, pour la Belgique. Michel Drucker et Philippe Gildas, selon des articles de presse, semblent réfléchir à des projets de ce type. Un autre projet de chaîne, qui a d’ailleurs obtenu sa convention pour le satellite et le câble par le CSA, est celui de l’association SeniorClubTélé, dont le secrétaire général est Pascal Chicard. Ce projet est mené en collaboration avec la Confédération française des retraités (CFR). Pascal Chicard était déjà à l’origine, dans les années 1990, du projet de chaîne pour les Seniors connu sur le nom de Télé Soleil. SeniorClubTélé se distingue des autres, notamment par des objectifs et des programmes que l’on pourrait qualifier « d’intérêt général ». Les programmes donneraient notamment la parole aux Seniors et seraient proches des associations de retraités. Aujourd’hui, cependant, seule Télé Mélody a vu le jour. Le lancement d’une « télévision Senior » est une entreprise difficile, pour de nombreuses raisons. D’un côté, l’engouement des annonceurs qui veulent cibler les Seniors est encore relatif, de l’autre, il y a un grand risque de « ghettoïsation ». De plus, la 178 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 rentabilité des chaînes thématiques du câble est aléatoire, voire impossible à atteindre pour certaines d’entre elles. Télé Mélody présente l’avantage d’être « ouverte », avec un programme basé sur la musique qui permet de répondre aux attentes à la fois de son cœur de cible, les Seniors actifs, et d’une grande partie du public. L’exemple de Télé Mélody Lancée en 2001, Télé Mélody est actuellement l’unique chaîne de télévision musicale française ciblant les plus de 40 ans. Elle programme essentiellement des artistes des années 1960, 1970 et 1980, et plus spécialement les « valeurs sûres » qui ont marqué ces époques (Brassens, Sardou, Brel, Sheila, Claude François, Johnny Hallyday, Dalida…). Télé Mélody propose des émissions de variétés déjà connues des téléspectateurs : Palmarès des chansons, Numéro Un, Top à, Tête de bois, etc. « Notre objectif est de rejoindre le public adulte avec une chaîne musicale diffusant des programmes qui leur rappellent de bons souvenirs. La chaîne se veut positive, gaie, et ne veut en aucun cas cultiver la nostalgie. D’autre part, nous percevons une certaine lassitude à l’égard de nombreuses émissions tournant autour de la chanson et qui laissent parfois penser que tout le monde peut devenir chanteur professionnel en quelques semaines », dit Bruno Lecluse, fondateur de Télé Mélody. « Dans cet univers, Télé Melody souligne des valeurs d’authenticité en diffusant des chanteurs de talent, avec de vrais textes et accompagnés par de grands orchestres. Le plus surprenant est que depuis quelques années, avec l’apparition des formats «gold» à la radio, même les jeunes s’intéressent aux années 1960-1970 ! Cela traduit une tendance réelle de notre société, peu propice à la sérénité. » La programmation a été confiée à un professionnel de l’audiovisuel musical « adulte » : Christian Savigny, qui a travaillé pour les radios RFM, Europe 2, Chérie FM et Nostalgie. « Télé Mélody répond à une partie du grand public qui se sent totalement délaissée à la fois par les grandes chaînes généralistes, mais aussi par les petites nouvelles du câble et du satellite », explique-t-il. 179 Diffusée actuellement par satellite, la chaîne a une stratégie marketing qui permet le recrutement de nouveaux abonnés grâce à une location privilégiée de fichiers ciblés et à des partenariats avec d’autres acteurs du marché des Seniors, comme le vépéciste Afibel. Les 50+ et la radio La radio est le média complémentaire de la presse et, parmi les plus de 50 ans, ce sont les femmes qui l’écoutent le plus : 3 heures par jour en moyenne. Écouter la radio est essentiellement une activité matinale. L’après-midi, la télévision est le média le plus consommé. L’étude « Les Seniors et les médias » révèle que les Seniors préfèrent les radios généralistes et thématiques aux radios musicales, ce que confirment les résultats de l’étude « Conso AdVision » d’Aegis Média France. Les radios qui comptent le plus d’auditeurs Seniors sont en effet RMC, France Inter, Europe 1 et RTL. Du côté des musicales, on notera les bons scores de Radio Classique et de Nostalgie. Durée d’écoute de la radio 50-54 ans 55-59 ans 60-64 ans + de 65 ans Ensemble des Français Durée d’écoute en semaine <1h 31,4 % 26,3 % 22,1 % 20,4 % 31,7 % 1h-3h 35 % 36,8 % 40,6 % 39,2 % 36 % >3h 25,1 % 24,5 % 24,1 % 23,9 % 20,9 % Durée d’écoute le week-end <1h 30,5 % 26,4 % 24,3 % 24,3 % 30,4 % 1h-3h 23,3 % 26,4 % 29 % 26,2 % 25,2 % >3h 30,6 % 29,4 % 29,3 % 29,5 % 24,8 % Source : Le Marketing Book Seniors, 2002, TNS Secodip. 180 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Pour les radios aussi, il semble que l’on cherche à minimiser ces succès pour ne pas « déplaire » aux annonceurs. Au Québec, c’est le contraire, avec le lancement en 2010 par le groupe Astra Média du réseau de radio Boom FM. Cette radio cible ouvertement les baby-boomers sans pour autant les ghettoïser. Vis-à-vis des annonceurs, Boom FM affiche clairement qu’elle cible particulièrement les Jeunes Seniors. Les plus de 50 ans écoutent la radio pour l’information, les débats et les conseils pratiques. Nous retrouvons les mêmes attentes que pour la presse. L’étude « Les Seniors et les médias » montre que les Seniors accordent plus de crédibilité aux informations diffusées en radio qu’à la télévision. Les 50+ et la presse Les Seniors sont de gros lecteurs de presse. Ils sont nombreux à lire un quotidien régional et un titre national (de préférence Libération, Les Echos ou la Tribune pour les 50-59 ans ; Le Figaro et Le Monde chez les 60 ans et plus) [source : Le Marketing Book Seniors, 2002]. Le mode d’achat le plus fréquent des journaux et magazines est l’abonnement. D’après SIMM 2000, 36,4 % des plus de 50 ans lisent sept magazines différents chaque mois, ce qui est bien au-dessus de la moyenne (source : Emap Média). Les plus de 50 ans lisent les magazines pour y trouver des informations pratiques et des conseils. Si cette fonction est remplie, ils leur accordent leur confiance. Dans les années à venir, la presse quotidienne aura à prendre en considération les attentes de plusieurs générations, dont les Seniors. Certains quotidiens développent déjà des rubriques Seniors. C’est le cas du journal Le Monde. D’autres éditeurs ont développé des magazines de presse directement dédiés aux Seniors. La presse et les 50+ 181 Baby boomers Les Seniors Investir magazine 165 Notre Temps 262 Challenge 157 Pleine Vie 254 Le Particulier 157 L’Ami des Jardins 154 Mieux Vivre Votre Argent 150 Rustica 147 Enjeux les Echos 145 Maison Madame Figaro 136 Le Figaro Mag 147 Mon Jardin ma Maison 133 Le Point 146 Le Figaro Mag 153 Le Nouvel Obs 135 Le Point 153 La Tribune 138 Paris Match 138 Les Echos 137 Le Nouvel Obs 122 Rustica 154 Le Figaro 156 L’Ami des Jardins 154 Journal du Dimanche 126 Notre Temps 162 Marie France 146 Pleine Vie 154 Madame Figaro 136 Source : Sofres 2010 – Base indice 100. La presse Senior& Baby boomer La presse Senior est l’une des plus florissantes. Le groupe Bayard Presse est bien implanté dans ce secteur avec Notre Temps. « Notre titre, qui touche 4,492 millions de lecteurs, a un record de vente au numéro en septembre 2002 avec 161 000 exemplaires », explique Jean-Paul Bury, le rédacteur en chef. Bayard est également présent dans la presse Senior à l’étranger avec Plus- 182 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Magazine en Belgique et aux Pays-Bas, Vi Over 60 en Norvège, Lenz en Allemagne, Nuevos Tempos en Espagne, Choice en Angleterre, Good Times au Canada et Le Bel Âge au Québec. Dans ce pays, un nouveau magazine est né en 2010 : Vous. D’après Hélène Matteau, directrice de publication, Vous est le premier magazine québécois destiné aux 45-59 ans actifs, hommes et femmes. L’autre grand magazine de presse Senior en France est Pleine Vie, du groupe Emap. Il est plus féminin. Très en retard il y a plusieurs années, il a rattrapé et devancé Notre Temps en termes de « diffusion totale payée ». Ce titre est actuellement le premier mensuel français selon ce critère (Notre Temps reste en tête en nombre de lecteurs). Malheureusement, Vous s’est arrêté en 2012 Le troisième titre, Vivre Plus, est apparu en 2002, lancé par le groupe Média Participations, qui édite également Rustica. Son lectorat est plus jeune (assez proche de celui de Vous au Québec) et moins féminin. Il annonçait 100 000 exemplaires vendus par mois en 2011. Ce magazine a été racheté par Bayard Presse en 2012. Parmi les autres titres Seniors, citons par exemple L’Écho d’aujourd’hui, de la caisse de retraite Médéric, ou le magazine gratuit Dans l’air du Temps, présent dans plusieurs villes françaises. L’arrivée des baby-boomers, qui ont des valeurs différentes des Seniors actuels, est un beau défi pour Notre Temps et Pleine Vie. L’enjeu est de conserver les lecteurs d’aujourd’hui tout en fidélisant de plus jeunes. La difficulté n’est pas mince, ce qui n’a pas empêché Notre Temps de lancer en automne 2002 une nouvelle version avec cet objectif. L’exemple de Pleine Vie Pleine Vie, l'un des leaders de la presse senior, fait partie des belles réussites dans le domaine de la presse à destination des 50 ans et plus. Lancé en 1981 sous le nom Temps retrouvé, Pleine Vie est le premier mensuel français en termes de diffusion totale payée avec 1,12 million d’exemplaires, en progression de 85 % sur cinq ans. La vente moyenne en kiosque est de 135 000 exemplaires (source : Pleine Vie). 183 Pleine Vie est un généraliste à destination des femmes de plus de 50 ans. L’âge moyen des lectrices est de 58 ans et le taux de reprise en main (cible femme) est de 4,5. Son concept : « un magazine pratique et utile qui propose des solutions concrètes à la femme de plus de 50 ans pour vivre pleinement sa vie de femme et profiter de son temps libre ». En 1997, le mensuel Temps retrouvé inaugure une nouvelle formule, change de titre et devient Pleine Vie. En 1999, le groupe de presse anglais Emap le rachète. Pour tenir compte de l’évolution des lectrices et de l’arrivée des femmes issues du baby-boom, Pleine Vie lance une nouvelle édition de sa formule avec une maquette plus claire et plus moderne. Cette maquette est épurée, « plus calme et mieux balisée ». Pleine Vie évolue sur trois axes : plus féminin, plus de loisirs, plus d’actualité. En 2006, Pleine Vie évolue avec sa lectrice, la Vitanova, avec un contenu inédit qui s'adresse à tous les aspects de sa nouvelle vie. Le cœur du magazine est construit autour de trois thématiques : Droit-Argent, Nouvelle Vie et la santé. L’exemple de « Plus Women » Le groupe Roularta Média a lancé en 2012 un nouveau magazine en Belgique avec pour nom : Plus Women et pour base ligne « pour la femme mature qui assure ». Ce dernier s'adresse à un public de femmes matures de la génération du Baby boom. Les lectrices peuvent retrouver dans ce magazine des rubriques consacrées à la mode, la beauté, la gastronomie, la diététique et le bien-être. Le magazine est diffusé à 35.000 exemplaires en français et en néerlandais. Les annonceurs du premier numéro sont essentiellement du secteur de la beauté : Age Perfect, Innéov, Clarins… Le positionnement de Plus Women est très intéressant. Le groupe Roularta édite depuis plusieurs années un mensuel qui cible les Seniors « Plus magazine ». Comme beaucoup de magazines qui s’adressent à cette génération, le challenge est de conserver les lecteurs existants (essentiellement les plus de 60 ans) et d’attirer des lectrices plus jeunes âgées entre 50 et 60 ans. Il s’avère que ce n’est pas facile. D’où le lancement d’un magazine spécifique pour ces jeunes Seniors : Plus Women. 184 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Suivant la segmentation « ProfilsValeurs » décrite dans les chapitres précédents de ce livre, on peut imaginer que les Femmes actives, originales sont nombreuses à se retrouver dans ce magazine. C’est également celles qui « refusent » le plus leur âge et sont les plus grandes consommatrices de crèmes de soin. C’est une stratégie intéressante. (Source : www.lemarchedesseniors.com) L’exemple de « AARP The Magazine » Un autre exemple très intéressant de stratégie dans le presse Seniors aux USA. L’AARP est l’importante association de personnes de plus de 50 ans. C’est l’un des plus gros lobby – sinon le plus important – des USA avec ses 33 millions de membres. Jusqu’à l’année dernière, l’AARP éditait deux magazines : Modern Maturity et My Generation. Le premier ciblait les plus de 60 ans et le deuxième les Baby boomers essentiellement pour attirer de nouveaux membres. En 2012, l’AARP change de Président qui est un Baby boomer. La politique devient plus « commerciale ». Par exemple, le « R » de AARP qui est la première lettre de « Retired » n’est plus prononcé pour séduire les jeunes Seniors qui généralement ne veulent pas être considérés comme des vieux. L’AARP change aussi de stratégie en ce qui concerne ses magazines. My Generation et Modern Maturity sont remplacés par un magazine « AARP the magazine » ou plutôt devrais-je dire 3 magazines. Ces trois magazines se ressemblent fortement. Chacun cible une génération bien précise : Baby boomers, Jeunes Seniors et Grands Seniors. Le titre est le même, la couverture est la même, 60% du contenu est identique. Les 40% restant parle de sujets qui intéressent spécifiquement les générations concernées. C’est très intelligent : la version Baby boomers peut ainsi mettre de coté les sujets et les publicités dites « anxiogènes » qui ne s’adressent qu’aux Grands Seniors et être vendue en kiosque. Cela permet de moins ghettoiser les lecteurs âgés entre 50 – 60 ans. L’exemple de MORE aux USA 185 More est magazine qui cible essentiellement les femmes américaines du Baby boom. Il attire de nombreux importants annonceurs comme General Motors, P&G ou Revlon. Les femmes ciblées par ce magazine sont plus autonomes, plus en charge de leur vie que les générations précédentes. Il répond de manière intéressante au fait que les Baby boomers se pensent plus jeunes. Il aborde des sujets plus « directs » comme le sexe après 50 ans, les relations belle mère – genre… un peu comme la nouvelle version de Pleine Vie. L’exemple Dans L’Air du Temps Dans l’Air du Temps » est un magazine gratuit qui cible les 50 ans et plus. C’est en partant du constat que les seniors des grandes agglomérations de province n’avaient pas de médias spécifiques qui leur apportent toutes les informations locales qu’ils recherchent au moment même ou très souvent leur mode de vie change totalement, qu’ADT Communication a développé ce magazine. Il est présent dans plusieurs villes en France avec des franchises. Aujourd’hui la marque « dans l’Air du Temps » appartient au Groupe « Les Journaux du Midi » filiale du Groupe de presse « Le Monde ». Déjà présent dans plus de 10 grandes villes de province, l’objectif d’une couverture nationale dans 25 villes devrait être rapidement atteint. Cinéma À première vue, par rapport à d’autres classes d’âge, les Seniors fréquentent peu les salles de cinéma. D’après des données du Centre national de la cinématographie, les 50 ans et plus représentent moins de 25 % des entrées. Mais ils représentent 23 % des habitués et 22 % des réguliers. Près de 32 % des assidus sont des Seniors qui vont au cinéma au moins une fois par semaine. Ces derniers ont des préférences marquées pour les films à dimension historique d’auteurs français et européens. Ils représentent ainsi 48,6 % des entrées du Barbier de Sibérie, 52 % de celles de La Chambre du Fils, 44,7 % de celles d’Être et Avoir (source : Médiavision). Ils apprécient moins les films 186 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 humoristiques, de science-fiction ou policiers (source : SIMM, 2001, TNS Media Intelligence). Leur présence dans les salles dépend directement de la programmation. Médiavision a lancé un produit spécifique, Vision âge + qui permet aux marques de communiquer autour des films que les Seniors vont voir au cinéma. Il s’agit d’une communication grand écran, lancée à l’occasion de la sortie d’un ou de plusieurs films appréciés des Seniors. Internet Les Seniors sont moins nombreux sur Internet que les jeunes. Cela n’étonnera personne. Leur nombre ne cesse pourtant de progresser dans la plupart des pays développés. En France, on compte environ 17 % d’internautes de plus de 50 ans. Les babyboomers se sont plus vite habitués à Internet que les Seniors. Beaucoup d’entre eux l’utilisent pour leur travail. Internet sera bientôt un média intéressant pour cibler les Seniors. En France, on trouve des sites dédiés aux Seniors : SeniorPlanet.fr (le plus connu), NotreTemps.com (déclinaison Web du magazine de Bayard Presse), Vivre100ans.fr et AgeVillage.com. Parmi les entreprises qui utilisent Internet dans leur plan média, nous pouvons citer Libra de Tena. « L’objectif principal de nos campagnes Internet est d’obtenir les coordonnées des personnes intéressées par nos produits afin de leur envoyer des échantillons et des offres de remboursement », explique Sylvie Dervaux, responsable communication pour l’Europe du Sud. « Ces contacts entrent ensuite dans nos programmes de marketing direct et de fidélisation, programmes spécifiques à chacun des produits des gammes vendus en GMS et dans le circuit santé. » L’exemple de Danslairdutemps.com Si les jeunes ont été les premiers à s’approprier internet, les dernières études révèlent que la majeur partie de la croissance d’aujourd’hui est conduite par les plus de 50 ans. En 2012, en France, les 50 – 64 ans représentaient plus de 20% des internautes. On ne cesse pas de répéter que cette cible à un double intérêt bien connu : sa masse et son pouvoir d’achat. Mais 187 les plus de 50 ans ont des comportements de recherche d’informations et d’achat qui leur sont propres y compris sur Internet. L’expertise d’ADT Communication a justement permis de mettre enfin en ligne un site clair, lisible et qui répond aux attentes des 50 ans et plus en terme d’ergonomie. Danslairdutemps.com privilégie du contenu en proposant l’archivage par rubrique des articles du Magazine et répond aux multiples attentes des seniornautes. Tous les sujets sont largement, mais surtout comme le magazine c’est l’un des premiers sites Internet Seniors qui fournit des informations locales. La proximité, est le point fort du site. L’accent est mis sur les agendas spectacles, cultures, loisirs, sorties et divers rendez vous prés de chez soi dans toutes les villes ou le magazine est édité : Montpellier - Nîmes - Lyon - Grenoble Annecy - Toulouse - Bordeaux - Nantes - Lille - ClermontFerrand – Nice. Danslairdutemps.com propose des services spécifiques : rencontres, fête du jour, horoscope, recettes, sondages, essais automobiles, liens avec d’autres sites, moteur de recherche intégré, possibilité d’agrandir la police des textes ou de les envoyer par mail. www.danslairdutelmps.com . L’exemple de Agevillage.com Agevillage.com est devenu en six ans, le site de référence sue les sujets liés au grand âge. Le contenu est basé sur l'information, les conseils, les services locaux, du bien vieillir à l'accompagnement de la perte d'autonomie. Une version professionnelle, Agevillagepro.com, cible les acteurs de la gérontologie. Les chiffres : 800 000 pages vues par mois. 18 000 inscrits aux newsletters hebdomadaires Agevillage édite les premiers Guides du Grand Age (diffusé sur les salons Autonomic) et diffuse une Méthodologie de soins destinée aux soignants des malades Alzheimer. www.agevillage.com Ne pas se limiter aux médias Seniors L’ensemble des médias dits « Seniors » représente un bon moyen pour cibler les plus de 50 ans. Reste bien sûr à vérifier que les médias presse par exemple aient bien les lecteurs cohérents avec la 188 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 cible recherchée au minimum en terme d’âge. En effet à quoi bon utiliser un média éventuellement lu par les plus de 60 ans pour cibler les Baby boomers ? A la limite ceci serait logique en ne payant la publicité que pour l’audience représentée par les 50 – 60 ans comme c’est souvent le cas dans le domaine de la radio pour atteindre la ménagère de moins de 50 ans. Au-delà de la cohérence, il n’y a pas que les médias Seniors qui sont intéressants pour parler aux plus de 50 ans. Notamment pour la presse : certains titres Seniors sont plus encore présents sur les Seniors qu’ils ne le sont pour les Baby boomers. Ainsi en fonction du produit ou du service il peut être intéressant de choisir d’autres médias tels que les magazines pour atteindre les Baby boomers hommes CSP+. C’est également le cas pour certains annonceurs qui pensent que l’audience des sites Seniors n’est pas suffisante pour leurs objectifs. Autre risque à utiliser des médias Seniors pour une clientèle Senior : avoir sa publicité en face d’une autre annonce dit anxiogène comme les couches d’incontinence, les maisons de retraites ou encore la dépendance. Là comme dans beaucoup de cas, il s’agit de prendre du recul et d’éviter des solutions « miracles ». Les annonceurs prêts à cibler les Seniors ? Le Baromètre 2012 du marché des Seniors montre la réticence des annonceurs à cibler les Seniors directement. Cette réticence vient des entreprises elles-mêmes, mais aussi des agences de communication. Certains annonceurs hésitent encore à mettre les mensuels Seniors dans leurs plans médias. L’image du « Senior âgé » est encore dans les têtes et la peur de « vieillir une marque » est toujours présente. Nous avons exactement le même résultat en Grande Bretagne. « Sur les 22.000 personnes qui ont répondu à l’étude réalisée par Millennium Direct en 201, 86% estiment que les publicités actuelles de s’adressent pas à eux » explique Martin Smith président de la première agence anglaise spécialisée sur les Seniors. Cette situation est cependant en train d’évoluer. Les annonceurs ont dans leur grande majorité pris conscience de l’enjeu que représente les baby-boomers pour leurs activités. 189 L’étude « Les Seniors et la publicité » montre que c’est souvent les mêmes entreprises qui ciblent les Seniors : Libra de Tena, L’Oréal, Nivea, entre autres. L’écart se creuse entre ces « leaders » et la grande majorité des marques, encore frileuses. Beaucoup d’annonceurs pensent que les plus de 50 ans, une fois conquis, sont une cible acquise et se concentrent sur les 25-49 ans. Or cette prétendue fidélité propre aux Seniors n’a jamais été vérifiée. Au contraire, les baby-boomers d’aujourd’hui ont une consommation plus « hédoniste ». Ils n’hésitent pas à changer de produit ou de service. Ceci dit, le marché de la publicité des baby-boomers est en croissance. Tous les indicateurs le montrent. La peur de cibler les plus de 50 ans s’explique par un certain nombre de faits : les études sur les Seniors et la publicité sont peu nombreuses, beaucoup de données erronées ou incomplètes circulent, et de nombreux échecs ont fait parler d’eux. Pourtant, ces échecs ne sont pas dus au support publicitaire, mais bien souvent aux publicités elles-mêmes. Même si les Jeunes Seniors ressemblent ou « veulent ressembler » aux générations plus jeunes, les différences entre les générations sont bien réelles. 190 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 6 La communication Senior et Boomer La communication à destination des Seniors a déjà été l’objet de nombreuses études et recherches, notamment aux États-Unis. Les Seniors sont plutôt critiques à l’égard de la communication en général. La plupart des publicités actuelles ne respectent pas les effets du vieillissement, ni les effets de génération, et encore moins les différences entre divers codes culturels. Pourtant, le nombre de publicités ciblant directement les plus de 50 ans est en constante augmentation (en 2002, on en comptait plus de 150), preuve d’un intérêt grandissant de la part des annonceurs pour les Seniors. Dans ce chapitre, nous ferons le point sur ce que pensent les Seniors de la publicité avec l’étude menée par le Planning Stratégique de l’agence média Aegis Media France. Nous étudierons les différentes stratégies élaborées pour créer des publicités ciblant directement ou indirectement les Seniors. Nous évoquerons les critères à prendre en compte. Ce chapitre n’a pas la prétention d’être exhaustif sur ce sujet, mais de donner des pistes de réflexion pour développer une meilleure communication à destination des Seniors. 191 Cibler les Masters ? Développer des publicités qui ciblent directement des Seniors fait peur à beaucoup de professionnels du marketing et de la communication. Lorsque nous interviewons des entreprises pour le site LeMarchedesSeniors.com, nous nous heurtons souvent à des réserves : « Surtout, ne dites pas que nous ciblons les Seniors, ou que nos produits sont achetés par des Seniors. » Les raisons de cette réticence sont compréhensibles. Certains l’expliquent par le jeune âge des créatifs des agences de communication et des responsables marketing. C’est plutôt un certain état d’esprit vis-à-vis du marché des Seniors qui est en cause. La communication à destination des Seniors est complexe et il n’existe aucune recette miracle. Beaucoup de préjugés ont la peau dure, beaucoup de solutions « dogmatiques », parfois « importées » des États-Unis, se sont montrées inefficaces. L’emploi même du mot « Senior » est délicat. Dans le domaine des couches d’incontinence, la communication de la marque Libra de Tena est efficace parce qu’elle aborde franchement le sujet. Dans un autre domaine, une communication Senior trop « directe » pourrait poser problème. C’est le cas par exemple des centres de fitness. La société Club Med Gym propose aux plus de 60 ans la carte Temps Libre. Elle permet aux Seniors de bénéficier d’un tarif spécifique en échange d’un accès « horaire » restreint qui correspond aux attentes de la majorité d’entre eux. Actuellement, entre 3 et 4 % des adhérents de Club Med Gym détiennent cette carte. « Cet abonnement est proposé aux personnes de plus de 60 ans directement à l’accueil de nos salles », explique Patrick Rizzo, directeur marketing. « Communiquer à plus grande échelle présenterait plusieurs risques, notamment celui de considérer des Seniors comme une catégorie à part, ce que nous ne voulons pas », poursuit-il. Les plus de 50 ans représente 15 % de la clientèle de Club Med Gym et 21 % de celle des salles haut de gamme Waou. Les 50+ et la publicité Le planning stratégique de l’agence média Aegis Media France a réalisé un travail intéressant sur les Seniors et leur rapport à la 192 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 publicité, à partir de l’étude Simm 2001 de TNS Media Intelligence/Publilink (portant sur les 15 ans et plus). Les données relatives aux Seniors, présentées ci-dessous, en ont été extraites. La typologie de cinq profils a été définie, des plus positifs aux plus rétifs à la pub : les Captifs, les Enthousiastes, les Esthètes, les Pragmatiques et les Hermétiques. Cette typologie est placée sur une matrice à deux axes. L’axe vertical indique l’affinité avec la publicité : les personnes appréciant la publicité sont les Publi-Impliqués, celles qui la rejettent sont les PubliRésistants. L’axe horizontal mesure l’affinité par rapport au produit. Autrement dit, cet axe s’intéresse aux personnes sensibles au contenu des publicités et aux informations qu’elles apportent. Ce sont les Pub-Info. Les Pub-Culture sont attachées à la publicité en tant qu’objet esthétique. L’étude mesure le rapport avec la publicité, selon le média, des Seniors actifs ou inactifs (essentiellement retraités). Nous vous présentons les résultats pour les personnes âgées de 50 à 64 ans pour la presse et la télévision. Il y a deux niveaux de lecture de ces mappings : le pourcentage s’applique au nombre de personnes interrogées (exemple : 20 % de ces personnes interrogées peuvent être qualifiées d’Hermétiques), et l’indice (ind.) définit une surreprésentation ou une sous-représentation de cette cible (les Seniors) par rapport à l’ensemble de la population, sur une base moyenne de 100. (Exemple : un indice 113 indique une forte surreprésentation des Seniors dans une typologie, par rapport à une moyenne globale. Un indice 81 représenterait au contraire une sous-représentation des Seniors par rapport au reste de la population.) Sur ce mapping, on trouve une grande proportion de Seniors dans les typologies plutôt hostiles à la publicité (ind. 113 pour les Hermétiques, ind. 105 pour les Pragmatiques), malgré une bonne représentation dans les Enthousiastes (ind. 110). Avec seulement 14,7 % d’Esthètes (qui s’intéressent à la publicité comme à un objet culturel) et 24,9 % de Pragmatiques, le portrait brossé est assez fidèle aux enseignements classiques de la communication Senior en ce qui concerne la typologie Pragmatique (la plus importante et la plus surpondérée en termes 193 d’indice). Ce portrait confirme l’attrait des plus de 50 ans pour une forme différente de publicité, qui pourrait être le publi-reportage. Par rapport à la presse, la publicité à la télévision remporte moins les suffrages des 50-64 ans, de manière très nette. 62 % des Seniors sont plus ou moins réfractaires à la publicité télévisée, avec des sur-représentations importantes des Seniors dans les typologies Agacés, Mitigés et Blasés. Ce rejet a plusieurs explications. « Les Seniors ne se retrouvent pas dans les codes culturels de la plupart des publicités actuelles », d’après Thomas Jamet, du planning stratégique d’Aegis Media France. Dans cette partie, nous vous présentons succinctement les résultats d’une étude que nous avons menée en France auprès de groupes composés de Seniors CSP +, Seniors CSP –, Baby-boomers CSP + et Baby-boomers CSP –. Ce graphique présente les critères qui sont importants pour les Femmes de plus de 50 ans. 194 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’étude « Les Seniors et la publicité 2012 » révèle le même décalage entre les Seniors et la publicité actuelle. D’après cette étude, 86 % des Seniors pensent qu’elle ne s’adresse pas à eux. Dans des focus groups organisés en France avec des personnes de 50 à 64 ans, les avis sur la publicité sont souvent les mêmes : « La publicité ne s’intéresse qu’aux jeunes », « Elle ne répond pas à nos attentes », « Les publicités ne nous donnent pas suffisamment d’informations pour être intéressantes », « Les publicités ne sont pas destinées à notre génération », etc. Cependant, les mentalités sont en train d’évoluer et les annonceurs qui ciblent correctement les Seniors ou qui tiennent compte de leurs attentes sont de plus en plus nombreux. Les Baby boomers et la publicité ProfilsValeurs Critères importants Les Réfléchis Les Baby boomers Réfléchis font partie des consommateurs les plus aguerris. Ils ont besoin d’informations rationnelles et logiques pour prendre une décision. Généralement cultivés, ils veulent des faits. La publicité doit parler du produit. Les Actifs Les Baby boomers Actifs veulent savoir ce qu’ils vont pouvoir faire du produit. Ils font partie des plus sensibles à l’emploi « d’ambassadeurs » dans les publicités, à condition que ces personnalités soient jugées compétentes. Ces Seniors, auxquels convient souvent un tempo très rapide, apprécient les publicités claires et faciles à comprendre. Les Inquiets Les Baby boomers Inquiets sont particulièrement méfiants à l’égard de la publicité, notamment de la publicité télévisée. Ils savent être partiaux. Les publicités doivent les rassurer, par exemple par l’emploi d’une personne connue pour sa loyauté, ou en ne cachant pas les limites du produit. Ils sont généralement plus sensibles aux discours qu’aux images. 195 Les Enthousiastes La meilleure façon de faire fuir les Enthousiastes est de leur parler de problèmes. Plus que les autres, ils attendent qu’on leur parle d’espoir, de ce qui va bien dans leur vie. Les Rigoureux Les Rigoureux vont demander beaucoup de détails pour se faire une idée précise d’un produit. Ce sont généralement de gros lecteurs des publicités mailings. Avec eux, il est très important de savoir se montrer pragmatique. Les Leaders Les Leaders apprécient les messages directs et francs. Ils veulent des arguments rationnels. Les Sociables Une publicité sans mannequin n’a que très peu d’impact sur eux. Ils sont très sensibles aux publicités pour les dons. Les spots doivent présenter des interviews, des témoignages. Les Originaux Ils font partie de ceux qui vont d’abord juger de la valeur esthétique de la publicité, dont ils connaissent tous les « artifices ». Le côté émotionnel est important pour l’ensemble des Seniors, mais pour eux plus que pour les autres. Source : SeniorStrategic Consulting 2010. La matrice Com’GI La matrice Com’GI est un outil développé par SeniorStrategic qui sert de guide lors de la création d’une communication à destination des Seniors. Elle permet de définir une stratégie publicitaire selon deux axes : l’utilisation du produit et le type de cible visé. L’un et l’autre peuvent être générationnels ou intergénérationnels. L’utilisation est dite de type générationnel lorsque le produit est consommé par une seule génération. Au contraire, si plusieurs générations l’utilisent, on la qualifie d’intergénérationnelle. Par exemple, l’utilisation d’une automobile est intergénérationnelle, celle d’appareils auditifs est plutôt générationnelle. 196 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’autre axe de la matrice Com’GI concerne la cible de la publicité. Elle peut-être spécifiquement générationnelle ou spécifiquement intergénérationnelle. Dans le premier cas, la publicité cible une génération, dans l’autre, elle est destinée à plusieurs générations. La campagne de publicité de Mercure pour le programme « Venez à 2, payez pour 1 » est générationnelle (les Seniors en sont la cible), alors que la publicité institutionnelle de Danone est intergénérationnelle. Les stratégies pour développer des produits et des services pour les Seniors Une stratégie générationnelle consiste généralement à répondre à un besoin spécifique des membres d’une cohorte en développant un produit ou un service particulier. Il existe de nombreux exemples de tels produits ou services : les produits relatifs à l’incontinence, les assurances spécifiques pour les plus de 60 ans, la télé-assistance ou les télé-alarmes, les eaux minérales riches en calcium, etc. Les partisans des stratégies intergénérationnelles pensent souvent qu’il est nécessaire de ne pas enfermer les Seniors dans une catégorie particulière. Les produits répondant à ce type de stratégie sont également très nombreux : automobile, télévision, Internet, biens de grande consommation, etc. Les stratégies pour communiquer à l’intention des Seniors La stratégie générationnelle repose sur les publicités elles-mêmes, mais aussi sur le choix des médias utilisés. L’utilisation de la presse Senior et les publicités ne mettant en scène que des Seniors relèvent clairement d’une stratégie de communication générationnelle. La dernière campagne institutionnelle de la marque Evian, qui s’accompagne d’une version très consensuelle du morceau We will rock you de Queen, est au contraire intergénérationnelle. Les publicités générationnelles-générationnelles Les publicités de type G-G présentent un produit ou un service destiné aux Seniors via une publicité de type générationnel, 197 clairement adaptée aux attentes des Seniors, aussi bien sur la forme que sur le fond. Le type de support utilisé peut être la presse Senior. De nombreuses marques ont recours à ce genre de communication : Age Perfect, Nivea Vital, la carte Senior de la SNCF, Audika, etc. L’exemple de Nivea Vital Niveau Vital a été la première marque en France, au milieu des années 1990, à utiliser des mannequins femmes de plus de 50 ans dans ses publicités. L’étude « Les Seniors et la publicité » décrit les publicités de Nivea Vital comme les plus réussies des publicités de type G-G. Nivea Vital propose aux femmes « matures » une gamme de produits de soin et de toilette du visage. Il s’agit de produits de type générationnel destinés aux femmes de plus de 50 ans. La communication est générationnelle « Senior » par son support (la presse) et l’âge du mannequin. L’âge du mannequin respecte le principe de l’âge subjectif (âge que l’on pense avoir) tout en étant un peu trop élevé pour cibler les Jeunes Seniors. La publicité est crédible parce qu’elle met en scène une femme mature qui ne fait pas son âge. Les femmes de plus de 50 ans recherchent des produits de beauté qui donnent des résultats. L’âge du mannequin de la publicité peut être perçu comme gage de sérieux. Les publicités générationnelles-intergénérationnelles : l’exemple de Libra de Tena Les publicités de type G-I présentent un produit ou un service destiné aux Seniors via une publicité mettant en scène plusieurs générations. L’idée est souvent de dédramatiser l’image que certains produits peuvent véhiculer, tels les couches d’incontinence ou les appareils liés à la dépendance. Les Seniors se sentent ainsi moins considérés comme un groupe social particulier. La société SCA utilise ce type de publicité pour promouvoir ses serviettes d’incontinence Libra de Tena. Leader mondial et 198 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 européen, cette société fait figure d’exemple sur le marché des Seniors et présente une gamme complète de produits sous plusieurs marques : Tena propose des solutions spécifiques pour femmes et pour hommes (des protections anatomiques aux changes complets). Vendus en pharmacie, les produits de cette gamme sont aussi destinés aux maisons de retraite et aux institutions. Les marques Libra (serviettes) et Discreet (culottes) de Tena proposent en GMS des produits grand public. « Nous avons développé différentes marques en fonction de nos canaux de distribution », explique Sylvie Dervaux, responsable communication pour l’Europe du Sud chez SCA. Libra de Tena a été la première marque de protections pour fuites urinaires à s’afficher sur les écrans de télévision. L’incontinence est un sujet encore tabou, car souvent lié à la ménopause. Ce thème est difficile à développer en communication, mais Libra de Tena est performant dans cet exercice, comme le montre l’étude « Les Seniors et la publicité » en plaçant les publicités SCA parmi les plus réussies sur la cible des Seniors. Suivant le principe de la matrice Com’GI (positionnement de la campagne de publicité), les campagnes de publicité de Tena sont de type générationnel-générationnel pour Discreet et générationnelintergénérationnel pour Libra. C’est-à-dire que le produit est essentiellement générationnel, avec pour cœur de cible les plus de 50 ans, mais que sa publicité est à la fois générationnelle (celle de Discreet met en scène des plus de 50 ans) et intergénérationnelle pour l’ensemble des écrans publicitaires de Libra (emploi de mannequins de différentes générations). Les publicités de la marque « permettent de rassurer les personnes concernées en leur expliquant qu’elles ne sont pas les seules à utiliser ce genre de produit. Le problème des fuites urinaires peut se poser à tout âge, après un accouchement ou au moment de la ménopause », poursuit Sylvie Dervaux. Les films de Libra de Tena ont la capacité de « généraliser » le sujet des fuites urinaires. La communication intergénérationnelle utilisée présente les femmes Seniors comme étant partie intégrante de la société malgré leur petit handicap. C’est une approche qui plaît aux plus de 50 ans. 199 L’une des forces des nouveaux films de Libra de Tena est la dissociation du message et de l’émotion. Ce principe a été bien expliqué par le psychologue américain Erickson. Par exemple, il est possible d’aborder des thèmes « négatifs » en exprimant des émotions positives. Dans le film de Libra, les sensations (et émotions) générées sont positives : joie, sérénité, liberté, alors que la voix off parle concrètement des fuites urinaires. Le plan média des marques SCA comprend la télévision et la presse Senior, mais aussi le marketing direct et Internet. À la télévision, c’est sur France Télévision, qui présente le plus d’affinités avec la cible des plus de 50 ans, que les écrans de Libra et Discreet de Tena sont diffusés. En presse, elles communiquent dans les journaux féminins et Seniors et les magazines de programmes télévisés. Les publicités intergénérationnelles-générationnelles Les publicités de ce type (I-G) promeuvent auprès d’une génération en particulier, par exemple celle des Seniors, un produit ou un service utilisé par plusieurs générations. C’est le cas de certains acteurs du secteur de la distribution, qui conçoivent des publicités spécifiques pour les Seniors dans la presse spécialisée. Dans le numéro d’août 2010 du mensuel Notre Temps, la deuxième page de couverture est occupée par une publicité de 8 À Huit avec le slogan « 8 À Huit : la solution qui renoue le lien entre les modernes et les anciens ». Créé en 1977, ce réseau de supérettes appartient au groupe Carrefour et compte 778 implantations, ce qui en fait l’un des leaders de son secteur. La publicité est constituée d’un dessin mettant en scène un couple de « vieux » aux cheveux blancs dont l’homme tient une canne. À la femme qui lui dit : « Pff… On n’est plus chez nous ! Tous ces jeunes qui viennent dans notre 8 À Huit ! », l’homme répond : « Ça, c’est bien vrai ! Est-ce qu’on va dans leurs rave parties, nous ? » Cette publicité repose sur un humour généralement apprécié des Seniors, notamment de ceux qui ont pris du recul par rapport à leur âge. 200 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les publicités de ce type sont utiles. Cependant, ces communications ne respectent pas toutes les attentes et les besoins des Seniors. Certaines d’entre elles sont strictement les mêmes que celles destinées aux plus jeunes. Dans de nombreux cas c’est une erreur, car les motivations de consommation peuvent être différentes d’une génération à l’autre. Parmi les entreprises qui communiquent sur ce mode I-G, on peut citer la société Bjorg avec son Soja Cuisine. La publicité, dont le slogan est « 0 % cholestérol. Et bon comme de la crème ! », est présente dans Pleine Vie (septembre 2010) et met l’accent sur les valeurs de la santé et du plaisir. Le produit est destiné à toutes les générations et sa publicité est particulièrement bien adaptée aux plus de 50 ans. Citons aussi les fabricants de radiateurs Rothelec et Ecotherm. Ces deux marques communiquent dans la presse Senior et ont mis en scène des « ambassadeurs » Seniors : Carlos pour Rothelec et Alain Cabrol pour Ecotherm. La forme et le fond de ces publicités répondent clairement aux attentes des Seniors. La marque St-Yorre, quant à elle, est présente dans Pleine Vie sous forme de publi-reportage. Les publicités intergénérationnelles-intergénérationnelles Les publicités de ce type (I-I) promeuvent un produit ou un service auprès de plusieurs générations susceptibles de l’utiliser. Autrement dit, il s’agit généralement de prendre en compte les attentes des Seniors comme celles des plus jeunes pour développer une communication unique, diffusée dans les médias généralistes, et non de cibler les Seniors. Ce type de publicité est notamment plébiscité par les partisans du marketing « sans âge ». A priori, c’est le cas de la grande majorité des publicités ; pourtant, dans la plupart d’entre elles, les Seniors sont écartés : pas de mannequins de plus de 50 ans, pas de prise en compte de leurs besoins spécifiques, etc. Si certains annonceurs franchissent quand même le pas, comme nous l’avons vu avec Danone et sa publicité pour Evian, 201 qui met en scène une octogénaire, montrer une personne aussi âgée est encore très rare en publicité. Autre exemple évoqué : celui du fournisseur d’accès à Internet AOL, dont une publicité, diffusée sur les chaînes de télévisions généralistes en 2002, présentait une succession de témoignages de clients de différentes générations, dont un couple de Seniors (âgés de plus de 70 ans). Chacun y expliquait les qualités et avantages d’AOL, selon ses propres critères. Cette publicité ne ciblait pas non plus particulièrement les Seniors, mais toutes les générations. Une des difficultés des publicités intergénérationnelles est qu’elles ciblent des personnes dont les attentes et le « fonctionnement » sont très divers. En effet, comment répondre à l’exigence de « vitesse » des plus jeunes tout en respectant le tempo plus lent de la majorité des plus âgés ? Les modes de réception de l’information diffèrent d’une génération à l’autre. Nous n’assimilons pas de la même manière l’information. Les attentes des générations Toutes les générations n’ont pas les mêmes rapports avec les médias et la publicité. Les modes de réception et de compréhension de l’information sont propres à chaque génération et diffèrent même, au sein d’une même génération, selon ses membres. Les plus âgés ont grandi sans la télévision et n’ont connu que la radio et la presse dans leur adolescence. Il est évident que quelqu’un qui a grandi avec la presse a acquis des automatismes d’apprentissage différents de ceux des individus nés avec la télévision. La publicité à destination des Seniors doit prendre en compte ces différences pour être efficace et répondre aux attentes des plus de 50 ans. Chaque génération a développé des systèmes de valeurs qui lui sont propres. Nous avons expliqué dans le chapitre sur les segmentations que toutes les générations présentaient à la fois des caractéristiques communes et des valeurs particulières. Les publicités pour Age Perfect parviennent à être en phase avec les valeurs de la cible visée, les baby-boomeuses. Si chaque génération a en quelque sorte son ou ses propre(s) mode(s) de réception de l’information, c’est parce que nous 202 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 développons nos facultés de compréhension et d’apprentissage pendant notre enfance et notre adolescence. Ces facultés sont notamment influencées par les médias dominants à ces périodes. Les générations les plus âgées ont été habituées à s’informer en lisant la presse ou en écoutant la radio. Les générations d’aujourd’hui sont habituées dès le plus jeune âge aux outils dits « modernes » comme l’ordinateur et Internet. L’emploi d’Internet selon les générations est d’ailleurs instructif. Les plus âgés éprouvent souvent de grandes difficultés à s’adapter à ce média. Est-ce vraiment l’âge qui est en cause ? Les dernières études battent en brèche cette idée reçue et révèlent l’importance que jouent les différents modes d’apprentissage dans l’appréhension des médias. Jean-François Michel, (www.apprendreaapprendre.com), qui, en France, étudie de très près nos modes d’apprentissage, explique que « chaque personne a son propre mode d’apprentissage » et qu’il existe « de grandes différences selon les âges : tout le monde a pu faire l’expérience de difficultés de compréhension entre générations ». Certains publicitaires commencent à tenir compte de la diversité des modes de réceptions de l’information. Les effets du vieillissement La publicité doit tenir compte des effets du vieillissement pour atteindre ses objectifs. Si tous les plus de 50 ans ne sont pas également atteints par ces effets, il est indéniable que le vieillissement est cause d’altération des sens. Même les Seniors qui jouissent d’une bonne santé peuvent souffrir de déficiences sensorielles qui réduisent leur accès à la publicité, leur intérêt ou leur aptitude à recevoir et à assimiler l’information. On peut classer les effets du vieillissement dont la publicité doit tenir compte en deux catégories. Les changements au niveau sensoriel, en premier lieu. Un affaiblissement de l’acuité visuelle et auditive affecte la capacité de bien des personnes âgées à assimiler l’information. Ces changements se produisent rarement de façon brutale, mais plutôt de manière à peine perceptible. On peut commencer par éprouver des difficultés à percevoir distinctement un son s’il ne s’inscrit pas dans un certain registre ou s’il y a un bruit de fond. La capacité de 203 voir distinctement sous un faible éclairage peut diminuer, et les yeux devenir plus sensibles à l’effet de l’éblouissement. Les changements cognitifs, eux, agissent notamment au niveau de la mémoire, du raisonnement et de la pensée abstraite. Avant 80 ans, ils touchent peu de monde ; après, ils sont inévitables. Une communication attentive (répéter les points clés d’un message de différentes façons, s’assurer que l’on est bien compris) s’impose si l’on veut surmonter les éventuelles déficiences du public récepteur. En général, quel que soit l’âge, un esprit de tempérament vif aura tendance à le rester. Le traitement cognitif peut prendre un peu plus de temps et il est important de comprendre qu’il s’agit là d’une conséquence normale du vieillissement et non d’un signe de « sénilité ». Les conséquences des effets du vieillissement sur la publicité sont nombreuses autant sur le fond que sur la forme. Les règles à suivre concernant la forme sont connues. Citons en quelquesunes, publiées dans le Guide de la communication à destination des Seniors : utilisation de grandes tailles de caractères, respect des codes couleur, mise en page soignée des images et des textes, recours aux valeurs adéquates, etc. Seules 32 % des publicités ciblant les Seniors sur les six premiers mois de l’année 2010 respectent l’ensemble de ces règles. Les marques que vantent ces publicités sont toujours les mêmes : Mercure, Libra de Tena, Nivea, SNCF, etc. L’âge subjectif En 2002, Denis Guiot, professeur de marketing, en collaboration avec Interdéco-Expert, une étude d’après laquelle les Français se « rajeunissent » de 9 ans en moyenne, avec cependant de grandes disparités selon les classes d’âges. Pendant l’adolescence, on a ainsi tendance à se « vieillir » de 2 ans en moyenne. Ensuite, cette tendance s’inverse avec l’âge. Entre 50 et 64 ans, nous nous rajeunissons de 15 ans en moyenne, et de 19 ans à 65 ans ! Évidemment, toutes les personnes du même âge « chronologique » n’ont pas le même âge subjectif. Une étude menée aux États-Unis avec la typologie ProfilsValeurs révèle que les Seniors âgés de 60 ans appartenant au ProfilsValeurs des Enthousiastes se sentent plutôt dans la peau de jeunes gens de 30 à 204 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 35 ans. Les Seniors Inquiets, eux, se rajeunissent de seulement sept ans. Il semble que plusieurs paramètres entrent en ligne de compte, comme le rapport au temps, l’estime de soi ou encore le système de valeurs. Interdéco-Expert est allé plus loin en étudiant la relation entre l’âge subjectif et la consommation. Trois groupes ont été définis : les « objectifs », les « toniques » et les « précoces ». Les « objectifs » sont les personnes qui se rajeunissent de plus de 15 ans, les « toniques » entre 0 et 15 ans, et les « précoces » se vieillissent. Si l’on s’intéresse au marché de l’eau en bouteille, on remarque que les « toniques » sont plus nombreux à penser qu’il faut consommer ce type de produit pour des raisons de santé et en sont de gros consommateurs. L’impact de l’âge subjectif a été prouvé dans d’autres secteurs : la banque, l’alimentation, le tourisme, les nouvelles technologies, etc. Pourquoi prendre en compte l’âge subjectif dans la communication ? Nous nous référons souvent inconsciemment à notre âge subjectif pour savoir si une publicité nous cible. Autrement dit, une publicité ciblant les personnes de 60 ans devra choisir des mannequins âgés de 45 à 50 ans. Des publicités mettant en scène des mannequins plus jeunes seront jugées moins crédibles. S’ils sont trop vieux, ils provoqueront peut-être un rejet. Le cas des publicités mettant en scène des personnes connues est différent, en ce que les valeurs qu’elles véhiculent sont plus importantes que leur âge. Les publicités des marques de cosmétiques Nivea et L’Oréal reposent sur un emploi intéressant de l’âge subjectif. Elles mettent en scène des femmes « matures » qui ont plus de 50 ans mais ne « font pas leur âge ». Nous sommes ici légèrement au-dessus de l’âge subjectif recommandé pour la cible visée, ce qui apporte un peu plus de crédibilité au message. Doit-on appeler un Baby boomers « Senior » ? Cette question donne souvent lieu à des débats passionnés. D’une manière générale, l’emploi du terme « Senior » est délicat. L’étude « Les Seniors et la publicité 2010 » indique que 54 % des plus de 50 ans n’apprécient pas ce terme. Parmi eux, 205 un grand nombre de baby-boomers. Les personnes plus âgées l’acceptent plus facilement. En France, des entreprises emploient volontiers le mot « Senior ». On peut citer la Banque des Seniors, la SNCF et la carte Senior, Sélectour avec son catalogue « Senior Globe-Trotter », la sicav SeniorActions de la banque Eurofin, etc. D’autres évitent de le faire. C’est le cas du Club Med Gym avec sa carte « Temps Libre », de Nivea Vital ou d’Age Perfect. Aux États-Unis, l’emploi du mot « Senior » est peut-être plus courant dans les publicités, quoique certains experts américains commencent à le déconseiller. Il est important de comprendre que le mot « Senior » a plusieurs sens. En France, il renvoie souvent à des notions liées au vieillissement. Aux États-Unis, où il est souvent utilisé comme adjectif, il qualifie une identité. On parlera ainsi de Senior citizens, ce qui peut se traduire par « clients Seniors ». Sur le plan psychologique, ce n’est pas du tout la même chose de dire « Vous êtes un Senior » et « Vous êtes un client Senior ». La nuance est même fondamentale pour les professionnels de la communication. Dans le premier cas, « l’identité » de la personne est d’être un Senior, dans l’autre, elle est d’être client. On trouve aux États-Unis une autre définition du terme, qui fait référence à un niveau d’apprentissage et de réussite : on parle d’élèves seniors, de cadres seniors, etc. C’est une notion beaucoup plus positive, plus noble, moins courante en France. L’emploi du terme « Senior » doit donc être mûrement réfléchi. Il dépend du produit ou du service, du contexte et de la cible visée. Il est particulièrement délicat si l’on veut cibler les Jeunes Seniors ou les baby-boomers, plutôt réfractaires à ce mot. L’exemple de la Banque des Seniors est différent. Dans le nom même de la banque, le terme « Senior » est semble-t-il un atout pour se différencier des autres banques. Par contre, « dénommer nos produits par le mot Senior aurait été perçu trop négativement », explique Jean-Philippe Van Poperinghe, le directeur marketing de la SBE. 206 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Des ambassadeurs Seniors ? Les marques qui ciblent les Seniors emploient souvent des personnalités dans leurs publicités : Elsève Régénium de L’Oréal a mis en scène Catherine Deneuve, Age Perfect utilise maintenant les services de l’actrice américaine Dayle Haddon. Ecotherm a fait appel jusqu’en avril 2002 aux services de Laurent Cabrol pour mettre en avant ses appareils de chauffages. Son concurrent Rothelec fait apparaître Carlos dans ses dernières publicités. Dans le passé, Zuritel s’appuyait sur Éric Tabarly. Sur ce sujet aussi les avis divergent. Les études arrivent à des conclusions souvent contradictoires, essentiellement en raison de l’hétérogénéité de la cible Seniors. L’étude « Les Seniors en France » a révélé qu’une partie des Seniors, souvent parmi les plus âgés, préféraient des témoignages de mannequins anonymes. 38 % des 50-64 ans apprécient les publicités avec des personnalités, à condition que les valeurs véhiculées par ces dernières soient cohérentes avec le produit, mais aussi avec leurs propres valeurs. Nous retrouvons là l’idée que les Seniors sont particulièrement attentifs à leurs valeurs. Ils savent généralement plus facilement ce qu’ils veulent. Par conséquent, le recours à une personnalité est plus délicat quand on cible les Seniors que quand on cible les jeunes. Nous avons noté que les publicités de Rothelec utilisant l’image de Carlos avaient la préférence des Seniors du ProfilsValeurs des Enthousiastes. Au contraire, les personnes du ProfilsValeurs Rigoureux et Réfléchis y semblent réfractaires. L’exemple est intéressant, en ce que les Seniors Enthousiastes se retrouvent parfaitement dans les valeurs communément associées à Carlos (mais nous ignorons s’ils sont effectivement les meilleurs clients de Rothelec). Les dernières publicités d’Age Perfect de L’Oréal qui mettent en scène l’actrice américaine Dayle Haddon sont très bien perçues par les Seniors des profils Actifs, Sociables et Originaux. Les Seniors Actifs ont en effet des valeurs très proches de celles que véhicule l’Oréal. Toutes les marques n’utilisent pas dans leur communication une personnalité connue. C’est même rarement le cas dans certains domaines, les assurances et les banques par exemple, 207 secteurs dans lesquels les Seniors préfèrent des témoignages de personnes anonymes. Le publi-reportage Certains annonceurs s’interrogent à juste titre sur l’efficacité de la publicité à destination des Seniors. Ces derniers y sont en effet souvent réfractaires. Les effets d’âge ou de génération, à cause desquels 40 % des Seniors rencontrent de réelles difficultés de compréhension des publicités, n’expliquent pas seuls que les Seniors manifestent un certain rejet de la publicité. D’après l’ancien publicitaire canadien John Straiton, ils « n’achètent pas les journaux et les magazines pour les publicités. Plus votre publicité ressemble à de la publicité, plus les Seniors la rejettent ». Pour satisfaire les exigences des clients jeunes (dont une partie est également réfractaire à la « pub ») ou Seniors, les annonceurs utilisent de plus en plus le publi-reportage (« publirédactionnel », « communiqué »). Un publi-reportage ressemble à s’y méprendre à une page de magazine (photo, titre, sous-titre explicatif, signature), avec un article rédigé dans un style journalistique, avec de « vraies phrases » qui vantent un produit ou un service. Il s’assortit parfois de l’interview d’un spécialiste, comme le fait actuellement un publi-reportage de la marque Age Perfect de L’Oréal. Le publi-reportage essaie de se fondre dans la maquette du journal où il paraît. Ce type de communication publicitaire est en plein essor dans tous les secteurs et notamment à destination des Seniors. Le créneau du publi-reportage représente actuellement plus de 5 % des investissements publicitaires dans les magazines. Il n’y a qu’à parcourir la presse Senior pour se rendre compte que de nombreuses entreprises l’utilisent : SNCF, Whiskas, Age Perfect, PFG, Jordans, Fleury Michon, Daniel Kieffer. Il est vrai que les plus de 50 ans, par leur éducation, sont de plus gros lecteurs que leurs cadets. Pour cibler efficacement les Seniors, le publi-reportage doit également s’adapter à leurs attentes, leurs valeurs et leur logique de compréhension de l’information. Les plus de 50 ans recherchent une information « juste » et sont nombreux à faire confiance au publi-reportage. « Nous ne sommes pas dupes et 208 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 nous savons que ce genre de publicité n’est pas objective et donc nous sommes prudents », nuance une personne de 54 ans interrogée pour l’étude « Les Seniors en France ». Le publireportage aura de beaux jours devant lui sur le marché des Seniors s’il répond à la demande d’objectivité et d’honnêteté de la grande majorité des plus de 50 ans. Sur la forme, ce genre de communication doit, comme toute publicité, s’adapter aux modes de compréhension de l’information des Seniors. John Straiton, auteur du livre A Market of Millions of Dollars, l’explique bien. La façon dont on lit une publicité diffère d’une génération à une autre. Pour les plus âgés, le texte doit être aéré, et les photos entières, avec des sous-titres et des légendes. « Les Jeunes Seniors commencent le plus souvent par s’intéresser à la photo, alors que les plus âgés lisent directement le texte », précise John Milman, expert du marché des Seniors. Tous les Seniors d’une même génération ne lisent pas non plus de la même façon. Ainsi, pour reprendre la typologie des ProfilsValeurs, les Seniors Réfléchis et les Seniors Rigoureux chercheront des informations détaillées pour pouvoir prendre leur décision. Les Seniors Actifs, plus sensibles au « visuel », ont un tempo plus rapide. Ils vont d’abord regarder les photos, puis les titres et enfin le texte. L’étude « La publicité et les Seniors » a montré qu’un publireportage était plus efficace s’il tenait compte de cinq contraintes : il doit fournir une information riche, parler des gens, montrer un lieu, présenter des chiffres, le tout avec une impression de mouvement. Selon ces critères, l’un des meilleurs publi-reportages publiés dans la presse Senior en 2010 est celui de la marque Age Perfect. Le publi-reportage est particulièrement répandu dans la presse. Il n’est pas absent de la télévision, sous forme de publicités d’une durée allant de 30 secondes à 20 minutes. Ce type de publireportage, parfois appelé « infomerciale », répond à l’exigence d’informations sur un produit et un service des Seniors. Le principal objectif de l’infomerciale TV est de créer un contact, puis une vente, grâce à un numéro vert. Selon la réglementation du CSA, le renvoi à un numéro de téléphone apparaissant à l’écran doit permettre aux téléspectateurs d’obtenir des renseignements 209 complémentaires sur le produit, sans devoir obligatoirement le commander. Les annonceurs sont partagés quant à l’emploi de l’infomerciale. Parmi ceux qui l’utilisent pour cibler les Seniors, citons Audika, Rothelec, Avis. Les infomerciales TV sont généralement diffusées en journée, pour mieux toucher les plus de 60 ans et pour bénéficier de coûts de diffusion plus faibles. Le Design graphique et les Seniors : maîtriser les signes pour donner du sens. (Cette partie sur le design a été écrite en collaboration avec l’agence design graphique : Création d’Images : http://www.creation-dimages.fr) Le Design graphique (design en 2 dimensions) a pour but de construire et développer l'ensemble des signes émis par une marque, un produit ou une entreprise, pour qu'elle s'identifie et communique vers les autres. Le cœur de ce savoir-faire est bien sûr la sémiologie, c'est à dire l'étude des signes et leurs symboliques, connotations, compréhensions selon les cultures, les âges, les milieux sociaux etc… L'utilisation et l'application de ce travail permet aux Marques et entreprises de maîtriser et cibler leur langage visuel en amont, avant même que de communiquer. Par exemple pour définir un territoire d'expression qui leur soit propre, différent de celui des concurrents, qui exprime leurs valeurs, pour les adresser clairement ensuite aux consommateurs visés, sous forme d'identité visuelle, de packaging, de communication etc… L'émetteur s'assure ainsi non seulement de l'adéquation entre ses valeurs et les signes qu'il émet, mais aussi de la cohérence de son territoire de Marque, donc de sa lisibilité. « Dans un contexte hyper concurrentiel, ou chacun de nous est sollicité de toutes parts par une surabondance de messages visuels, ce travail de fond est aujourd'hui incontournable pour qui veut exister dans la durée » explique Yves Mourey, l’un des fondateurs de l’agence de design graphique Création d’Images dont un département est spécialisé sur le marché des 50 ans et plus 210 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Vers un langage visuel pour les seniors? Dans cette logique de maîtrise des signes et d'adéquation a un public visé, faut-il adapter le langage visuel d'une Marque a destination d’un public plus mature ? Considérons deux approches pour répondre à cette question vis a vis des "seniors" : a/ l'obligation de proposer des solutions graphiques pour répondre à des problèmes d'ordre physiologiques dûs à l'âge.( acuité visuelle par exemple ) b/ la volonté d'adapter le langage visuel de la Marque pour qu'il traduise clairement les bénéfices proposés dans un langage juste, non stigmatisant (ne pas leur parler de leur âge!) Un "langage visuel" est composé de l’ensemble des outils suivants: le message rédactionnel, les choix typographiques, les codes couleurs, les choix de mise en page, les codes photographiques, iconographiques, les codes matières, matériaux, les états de surface, le toucher, etc.… Comment l'adapter à la perception des Seniors? Au risque de répétition, rappelons d'abord quelques solutions pour répondre aux problèmes physiologiques évoqués plus haut : - Le message rédactionnel doit être clair, informatif ( pas de superflu ) il doit éviter les mots techniques. Mieux vaut éviter le langage "jeune" et démagogique… les Seniors sont en quête d'authenticité, de sincérité et de parler "vrai" (recul du temps, expérience…). Ceci peut se traduire par la mise en avant d’un avantage produit qui les concerne, sans exclure les autres, puique l’on ne parlera pas d’âge. - Prioriser la lisibilité (d’un packaging, d'une annonce-presse, d'un logotype…) De part leur âge et leur mode d'apprentissage, les Seniors ont un mode de lecture plus linéaire que les plus jeunes: par exemple les textes et photos doivent être séparés, pour être plus faciles à lire, à l'inverse des textes superposés à des images dont la perception sera plus confuse. Les titres, sous-titres, blocs de textes doivent être clairement hiérarchisés. (Aide à la lecture). Il est nécessaire de préférer les typographies en bas de casse (minuscules) plutôt qu'en capitale (majuscules), plus confortables à lire. Autre chose il est important d’éviter les mises en pages trop chargées, les signes superflus…ce qui est moins lisible est moins attractif pour les Seniors. 211 - Préférer les couleurs franches et positives aux couleurs difficiles à discerner par l'œil, trop sombres ou trop claires. Certaines teintes comme le vert et le bleu sont par exemple quasiimpossibles à discerner compte tenu du jaunissement de la rétine…mieux vaut le savoir avant de concevoir un packaging destiné aux Seniors. - Le choix des photographies, présentes dans le langage visuel a destination des Seniors, est primordial tant sur le fond que sur la forme: il implique en effet de montrer le Senior tel qu'il s'imagine et non tel qu'il est! De ce point de vue,il ne faut pas oublier , dans le choix des mannequins, de traduire la différence entre l'âge réel (ou âge chronologique) et l'âge cognitif (ou age perçu) , qui fait d'un sexagénaire un homme de 45 ans environ! Sur la forme, il faut des prises de vues qui privilégient la sincérité, le naturel…à l'inverse des photos trop " fabriquées" en studio ou issues de photothèques. (Attention à l'utilisation intensive de photos libres de droits, partagées entre différentes entreprises et ne permettant pas d'affirmer un territoire de Marque.) D'une manière générale, il faut aérer la présentation des informations pour privilégier le confort de lecture. Cette liste n'est pas exhaustive mais respecter ces quelques principes témoignent de l'attention portée à ce public grandissant. L’exemple d’un grand distributeur d’articles de sports Ainsi un grand distributeur d'articles de sports étudie avec l’agence de design graphique Création d’Images spécialisée sur le marché des Seniors la présentation en linéaires de produits a destination des Seniors. Cette enseigne a en effet adapté certains de ses produits pour une utilisation plus facile, confortable et en toute sécurité. Quel langage visuel utiliser en linéaire? Comment parler aux plus âgés sans les enfermer dans un ghetto? Sans rejeter les plus jeunes? La réponse sur ce type de problématique a été tout d'abord de prendre le parti positif de mettre en avant des avantages produit et non de parler d'âge. Ainsi un label a été créé, mettant en avant les mots clefs de Confort, Sécurité, Facilité, des mots qui, sans les nommer, parlent aux Seniors .En PLV, des couleurs très fraîches et positives soutiennent des informations très factuelles sur le produit (pas de blabla, du concret) dans une mise en page hiérarchisée facile à lire et a comprendre. 212 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 L’exemple d’un fabricant d’ordinateur Un fabricant d'ordinateur s'interroge actuellement sur les codes packagings du produit très ergonomique qu'il s'apprête à lancer en grande distribution. Là aussi les choix de communication porteront sur les bénéfices concrets attendus par les Seniors (recevoir et envoyer des mails aux enfants, petits enfants, réserver un billet de train via Internet etc.) en utilisant sur le pack des photos claires et explicites du bénéfice attendu, et non les traditionnelles données techniques mises en avant. Pas de discours technologique mais du bénéfice produit au service de plus de plaisir, d'émotion, de partage…Les codes colories et typographiques s'appuieront sur les règles graphiques définies plus haut. Les exemples seraient nombreux mais les principes énoncés restent les mêmes, le design graphique à destination des Seniors c'est bien de construire un langage visuel et de communication transgénérationnel qui "encapsule" leurs attentes sans les stigmatiser. Chaque cas est particulier et il convient d’étudier avec chacune des Marques qui souhaitent investir ce marché en s’adressant plus particulièrement aux Seniors comment communiquer et avec quels codes de langage. Seules les entreprises qui développeront une démarche d’empathie et un dialogue vrai et authentique avec ces consommateurs- citoyens d’expérience verront leurs Marques choisies et crédibilisées en retour. 213 7 Au contact des Seniors Tous les jours, de jeunes vendeurs, conseillers, techniciens et hôtesses de hotlines, etc., éprouvent des difficultés à communiquer avec les clients Seniors. C’est notamment le cas de ceux qui vendent des produits dits « technologiques », comme les téléphones portables, à des plus de 50 ans. Le contact avec la clientèle des Seniors doit faire partie intégrante de la stratégie marketing. En effet, que penser d’un produit qui répondrait aux attentes des Seniors, mais serait commercialisé via des intermédiaires qui ne s’intéressent pas aux plus âgés ? Que dire d’un produit ciblant les Seniors vendu par des commerciaux non formés ? Comment atteindre ses objectifs si un produit pour les plus de 60 ans est présenté au niveau inférieur des rayons ? La relation avec la clientèle Senior est déterminante dans la réussite d’une stratégie à destination des Seniors. Le sujet est complexe, nous n’ouvrons que quelques pistes, en abordant plusieurs domaines : le commerce et la distribution, la vente à distance, le marketing relationnel, Internet. 214 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Le commerce et la distribution Une étude de Datamonitor compare les canaux de distribution préférés des plus de 50 ans et fait des prévisions pour les cinq prochaines années. Les supermarchés arrivent en tête, devant les hypermarchés. C’est dans la tranche d’âge des 50-54 ans que l’on trouve le plus d’adeptes des hypermarchés. Plus l’on prend de l’âge, plus les supermarchés de centres-villes sont prisés. Le comportement des Seniors dans les années à venir dépendra essentiellement des effets du vieillissement et des effets de générations. Les baby-boomers sont plus habitués que leurs aînés à fréquenter les grandes surfaces et devraient continuer à le faire si leur mobilité le leur permet. Les effets du vieillissement ont tendance à pousser les Seniors vers les petites surfaces. Sur le long terme, les supermarchés devraient être les premiers à profiter du vieillissement de la population. Les principaux reproches faits aux hypermarchés par les plus de 60 ans sont la trop grande variété de produits, les espaces trop vastes, sans possibilité de se reposer, des rayons pas toujours adaptés, etc. Sur ce dernier point, le nouveau format de magasins de la chaîne hollandaise Albert Heijn est intéressant en ce qu’il réduit les distances à parcourir et améliore l’accessibilité aux rayons. Wal-Mart fait figure aussi de pionnier dans l’adaptation des magasins au marché des Seniors avec l’implantation de supermarchés de 4 000 m2 proposant moins de références. Les acteurs français ne sont pas en reste. Monoprix a une longueur d’avance, comme en témoigne l’agencement de ses magasins. Auchan a lancé une « chaire Auchan » avec l’école de commerce Reims Management School. Celle-ci développe plusieurs programmes, en particulier sur les attentes des Seniors dans la grande distribution. L’étude de tendances « Les Seniors et la grande distribution » lance des pistes de réflexion en faisant le tour de nombreuses initiatives dans le monde. S’adapter au vieillissement de la clientèle va nécessiter d’aménager les espaces extérieurs et intérieurs des magasins. La signalisation devra être plus claire et les places de parking plus grandes (elles sont jugées trop étroites par la majorité des Seniors). L’architecture intérieure des galeries 215 marchandes devra ménager des zones de repos avec sièges et fauteuils. Les allées sont à élargir et doivent être mieux éclairées. L’importance de l’aménagement des magasins est encore trop souvent sous-estimée. Or, les Seniors préféreront les enseignes qui prendront en considération leurs attentes. La livraison à domicile se développe à grande vitesse au Japon. Ce pays est un laboratoire intéressant à étudier. L’exemple d’ADEG 50+ C'est en Autriche qu'est né le premier supermarché entièrement dédié aux retraités. Le "Adeg Aktiv Markt 50+" a tout prévu pour faciliter les courses de ces derniers : prix écrits en grands, sol antidérapant, loupes à disposition, produits placés à des hauteurs facilement accessibles par tous... Mais ce nouveau concept n'est pas né par hasard : en effet, la population des plus de 50 ans devrait représenter le quart de la population autrichienne en 2025. De quoi intéresser la plupart des pays développés où la proportion des personnes âgées atteint un niveau encore jamais vu jusqu'ici. Quoi qu'il en soit, l'opération est un succès en terme de buzz : plus de 300 articles dans la presse du monde entier. Concrètement le succès est moins au rendez-vous car jugé comme un ghetto. La vente à distance (VAD) La plupart des Seniors apprécient la vente à distance. Ils sont clients de l’ensemble des catalogues. La VAD auprès des Seniors s’est beaucoup développée parce qu’elle pallie l’absence d’une partie des circuits de distribution de proximité, qui a explosé, notamment en termes de fidélisation et de fiabilité. Planifier ses achats, les sélectionner dans un assortiment de produits et services variés présente des avantages pratiques qu’une partie importante des Seniors apprécient. André Delbecq (consultant en stratégie spécialiste de la VAD, ancien directeur international de Damart) a établi cinq grandes catégories de catalogues qui s’intéressent à la cible des plus de 50 ans, soit exclusivement, soit principalement, soit encore parmi d’autres segments. Les catalogues de type « problèmes/solutions », destinés à faciliter la vie des Seniors et à résoudre leurs problèmes, liés aux handicaps de l’âge : 216 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 incontinence, perte d’acuité visuelle ou auditive, etc. Les « traditionalistes multi-gammes » portent essentiellement sur les textiles et s’intéressent surtout aux grandes tailles. C’est dans cette catégorie que nous trouvons les quatre principaux acteurs de la VAD Senior : Daxon, Damart, Afibel et Bleu Bonheur. Les catalogues « outdoor » et les catalogues « styles de vie » proposent des vêtements de détente et de loisirs, les accessoires pour la vie en plein air, etc. La catégorie « qualité de vie » est une niche surtout présente aux États-Unis, avec par exemple le catalogue Wine Enthusiasts, qui propose des produits liés au vin. La cinquième catégorie est « la mode de classe intemporelle ». Il s’agit de proposer une offre de prêt-à-porter, essentiellement classique, susceptible d’intéresser plusieurs tranches d’âge. En France, nous trouvons les catalogues dits « Senior populaire » : Afibel du groupe Quelle, Bleu Bonheur (3 Suisses), Damart, le seul indépendant, et Daxon de Movitex, filiale Redcats (groupe Pinault-Printemps-Redoute). Ce sont des multispécialistes avec une orientation sur le prêt-à-porter féminin. Chacun de ces acteurs annonce plus de 1 million de clients (2,5 millions pour Daxon, leader français). Dans cette catégorie, Damart est positionné en haut de gamme, alors que Bleu Bonheur est plus spécialisé dans les bas prix. D’autres catalogues sont plus sélectifs, voire élitistes : Witt Weiden, Ateliers Gabrielle Seillances, La Maison de Jersey ou encore ABG Nord. D’autres encore ne sont pas spécialement destinés aux Seniors, mais comptent beaucoup de plus de 50 ans dans leur clientèle : Maison du Café, Biotonic, etc. Les quatre plus gros acteurs de la vente à distance Senior, Affibel, Bleu Bonheur, Damard et Daxon sont présents depuis l’année 2002 sur Internet. « Daxon.fr a été conçu pour capter une clientèle plus jeune que notre clientèle traditionnelle sans s’éloigner pour autant de sa cible initiale », explique Christian Delabre, responsable du développement e-business, pôle Senior (source : LeMarchedesSeniors.com). L’ensemble des acteurs de la VAD doit faire face à l’arrivée des baby-boomers. Nous avons développé ce sujet dans un précédent chapitre. Plusieurs stratégies sont envisageables : développer plusieurs marques, comme le fait Motivex avec Daxon, Celaïa, Edmée. Le premier a la clientèle la plus âgée, 217 habitant souvent en milieu rural, alors que Celaïa cible essentiellement des femmes plus jeunes (45-50 ans) et citadines. Edmée occupe une place intermédiaire. Bleu Bonheur est sûrement celui qui a la clientèle la plus large en termes d’âge. Afibel, enfin, est également positionné sur les Seniors plus âgés. L’arrivée des baby-boomers à la retraite pourrait bien changer la donne et obliger ces catalogues à se moderniser pour répondre à des attentes nouvelles, différentes de celles des retraités actuels. Le marketing Direct et les seniors (attention au sommaire) Si l’on se place du coté des annonceurs et notamment des annonceurs pour lesquels cette cible Senior est une cible parmi d’autre dans leur stratégie marketing et commerciale, le Marketing Direct présente l’avantage du ciblage, de la précision et donc de la discrétion. Cela signifie que l’on peut communiquer sur la cible des seniors en Marketing Direct sans nécessairement toucher à son image institutionnelle. En arrivant directement dans les boites aux lettres postales ou email, en communiquant dans des magazines spécialisés (Pleine Vie, Notre Temps, Vivre plus), l’entreprise préserve son image généraliste tout en étant efficace sur cette cible spécifique. Quelques caractéristiques importantes du comportement des seniors pour le Marketing Direct - Ils sont INFOMANES, dans la mesure où ils aiment l’information. Le prix n’étant pas pour eux la composante déterminante dans le choix d’un produit ou d’un service, il est indispensable de montrer, de démontrer, afin de répondre à leurs exigences en terme d'informations et de soif de découverte Leur choix se fera davantage sur la qualité, la praticité, l’empathie, le SAV, la livraison, les services. 218 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Il faut ne pas hésiter à utiliser des fiches descriptives car dans leur grande majorité, ils estiment ne pas trouver dans la communication publicitaire les informations suffisantes. C’est pourquoi un mailing ne sera jamais trop long pour un senior, ils appréciera notamment les témoignages d’utilisateurs. On peut également choisir un mode d’expression à mi-chemin entre la publicité et l’information : l’annonce-presse ou le publirédactionnel qui permettent de délivrer un très grand nombre de faits et d’arguments, de répondre aux objections, d’aborder les freins à l’achat et surtout d’entrer dans une relation interactive avec la marque par courrier (via un coupon-réponse), par téléphone ou via le site Web de la marque . Pour la génération des baby-boomers, il faudra être à la fois concret et descriptif, tout en informant de façon claire et utile, en allant plus rapidement au but. - Ils sont PAPIVORES : Issus de la génération de la presse écrite, cette génération « Gutemberg », apprécie particulièrement le support papier. Les Seniors sont de gros lecteurs. Une enquête sur l’emploi du temps des Français révèle que les plus de 60 ans consacrent deux fois plus de temps à lire que l’ensemble des Français. C’est naturel, ils disposent de plus de temps libre. Ils ont vécu leur adolescence avant l’avènement de la télévision, quand les seuls médias disponibles étaient la radio et la presse. Ils possèdent donc une forte culture de l'écrit... Autant d'arguments qui font du courrier un outil de communication souvent efficace auprès des plus âgés. De plus, le marketing direct permet de personnaliser les contacts, ce qui laisse la possibilité aux annonceurs d'appeler chaque Senior par son nom et son prénom, évitant ainsi d'utiliser des appellations qui pourraient le déranger. Les qualificatifs suivants sont à proscrire : 3ème âge, 4ème âge, vieux, petits vieux, personnes âgées, aînés, vétérans, retraités, anciens, ancêtres, sages, inactifs, seniors, matures, papy boomers, silver…. Nous l’avons dit les Seniors apprécient la publicité informative, ils aiment avoir le temps de la réflexion avant d'acheter. Ils aiment aussi parler, être écoutés et poser des questions. L’interactivité que permet le Marketing Direct est une des clés du succès de cette technique de communication. Les applications sont nombreuses, numéro Indigo pour connaître l’état d’avancement d’une commande, service clients pour s’informer sur les caractéristiques techniques d’un produit, 219 possibilité de poser des questions par mail, de demander de l’information complémentaire en remplissant un coupon. - Ce sont des PROFESSIONNELS de la consommation : la notion de valeur s’exprime pour eux de cette manière, c’est : “Le rapport entre la qualité et l’argent dépensé” Les seniors sont des consommateurs avertis, n’oublions pas qu’ils consomment au moins depuis 40 ans et qu’ils ont connu le développement des grandes marques, et des distributeurs (Hypermarchés, centre commerciaux) Les baby-boomers encore davantage ! ils font partie de la génération « Que choisir » et « 60 millions de consommateurs ». Toute offre commerciale sera donc comparée et les décisions d’achat ne sont pas prises dans la précipitation ! Les conseils pour communiquer efficacement en Marketing Direct. Yves Riquet, directeur de l’agence Si-Senior et spécialiste du marketing relationnel à destination des plus de 50 ans explique les éléments à prendre en compte pour cibler ces générations. Bien choisir ses visuels Quelques règles essentielles : Eviter les décalages trop importants dans le choix du visuel ou du mannequin (trop jeune, trop âgé, trop branché, trop beau, trop populaire…). Il faut faire vrai et essayer de faire passer de l’émotion et de la sincérité dans les images. Eviter de montrer le senior tel qu’il est mais plutôt tel qu’il pense être. Rappelons que c’est à 65 ans que l’écart entre l’âge réel (chronologique) et l’âge cognitif est le plus important (- 16 ans). L’actrice Jane Fonda, 68 ans est la nouvelle égérie de la gamme de cosmétique Age Perfect de l’Oréal Paris. Ne pas prendre en considération ce principe est risqué pour une marque. C’est un double piège, celui de vieillir son image, mais aussi de ne pas atteindre la cible désirée. 220 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Pour les Baby-boomers, l’âge cognitif est encore plus sensible. Les Baby-boomers refusent en très grande majorité d’être assimilés à des « vieux ». Il sera très difficile de communiquer sur cette cible avec des mannequins âgés. Une exagération dans l’autre sens, avec des mannequins trop jeunes sera aussi mal appréciée. Les Babys Boomers sont sensibles à la sincérité des mannequins. Les visuels de famille transgénérationnels peuvent représenter un bon compromis (ou le senior est présent au milieu de 2 autres générations, enfants et petits enfants par exemple) Utiliser la caution d‘une célébrité « générationnelle », Le témoignage, l'apparition ou simplement la voix d'une célébrité dans une campagne permet de crédibiliser la marque en s'accaparant les qualités de la personnalité. La star devient l'ambassadrice de la marque auprès des Seniors. (Catherine Deneuve pour Yves Saint Laurent, Jacques Weber pour Danacol, Robert Hossein pour Audika…) Enfin attention aux banques d’images « Seniors » et aux photos libres de droits, qui sont utilisées par 3 ou 4 annonceurs pour des campagnes qui seront fatalement mal identifiées par les consommateurs. Adopter un discours positif et optimiste Les effets du vieillissement sont bien réels même à 55 ans et il s’agit donc de les prendre en compte et pas de les rendre tabous. Cependant, il est difficile de promouvoir un produit à destination des Seniors en leur parlant des difficultés liées à leur santé. Il faut trouver une manière positive mais objective d’en parler. Quelques pistes de communication possibles : communiquer en offrant des solutions montrer les seniors tels qu'ils se voient : actifs et séduisants jouer la carte de l'humour (mais jamais à leurs dépens). éviter tout ce qui rappelle la tristesse : le noir, le gris... un produit peut se suffire à lui-même sans être nécessairement présentés avec un mannequin senior en présentant les fonctionnalités spécifiques du produit. 221 Le testimonial est une bonne technique pour parler de manière positive et objective d’un produit ou d’un service. Attention car ce témoignage se doit d’être : crédible différencié en style rédactionnel du reste de la communication pragmatique Respecter l’évolution des sens L’espérance de vie en bonne santé progresse et les Seniors actuels se sentent plus jeunes que les générations précédentes, cependant les effets naturels du vieillissement existent. Ces effets influencent les capacités des personnes à recevoir l’information et donc les publicités. Le fond et la forme des communications à destination des Seniors sont donc à adapter La vue Dès 50 ans, la vue se détériore on constate baisse de l’acuité visuelle et une difficulté d’acclimatation au changement de luminosité. Au fur et à mesure du vieillissement, la capacité de l’œil à se focaliser sur des objets proches diminue. Cela rend difficile pour certains seniors de lire des textes écrits petits ou à distinguer des images de petites dimensions. Les solutions : Contraster les éléments visuels de communication, les pages trop chargées sont toujours moins lisibles pour les Seniors, et par conséquent moins attractives. Tenir compte du choix des couleurs, des codes couleurs. Durant le vieillissement, la lentille de l’œil à tendance à jaunir, cela a pour conséquence de filtrer certaines couleurs : violet, bleu, vert. Utiliser un corps de typographie plus élevé (corps 12 ou 14) L'audition L'ouïe se dégrade également, de façon moins sensible. 25-30% des plus de 65 ans souffrent de problèmes auditifs notamment de la perte des hautes fréquences : fusion générale des sons et difficulté à isoler les différentes tonalités 222 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Pour l’utilisation de spots radio, TV ou pour un centre d’appel : choisir une voix dont le timbre remédie à la perte des fréquences élevées réduire le débit de la voix et travailler l’articulation favoriser la lecture labiale (face caméra) éviter les confusions sonores (voix/musique) Les Fichiers pour toucher les seniors « Les seniors ne forment pas une cible homogène et les attentes d’un « baby boomer » arrivant à la retraite en 2006 sont très différentes de celle d’une personne de 75 ans vivant seule » explique Yves Riquet, directeur de l’agence Si-Senior. La richesse des fichiers d’adresses disponibles à la fois renseignés sur l’age mais aussi sur des profils de consommation permet aux entreprises désireuses de cibler les seniors de le faire de manière extrêmement ciblées Voici quelques exemples de fichiers adaptés à des seniors d’age et de profils différents FICHIERS BABY BOOMERS 50/60 ANS THEMES Presse majoritairement masculine Presse majoritairement Camping car magazine masculine Presse majoritairement Vieilles maisons françaises masculine Coté Femmes Presse Féminine Marie Claire Presse Féminine Comtesse du Barry VPC Gastronomique Becquet VPC Linge de maison Catalogue de l'homme moderne VPC Gadget L'objet du mois VPC (nouvel obs) Senior planet 1er site Internet pour les baby Golf seniors CSP+ CSP x x x x x x x x x x 223 Seniors Foto vista Laboratoire Yves Ponroy Celaia Mathon Cannelle Editions Atlas GLM Sedao Nicole Bernard FICHIERS SENIORS 65 ANS ET+ boomers Acheteurs en ligne sur le site pixmania VPC produits naturels VPC Prêt-à-porter Féminine VPC ustensiles de cuisine Magasins Prêt-à-porter VPC editions VPC editions VPC gadget, décoration… VPC Gastronomique THEMES Notre Temps Presse Pleine vie Presse Marianne Mélodie VPC musique Fibres Bernard VPC Prêt-à-porter Féminine Bleu bonheur VPC Prêt-à-porter Féminine Temps L VPC gadget, décoration… Café Paul Dequidt VPC Alimentaire Daxon VPC Prêt-à-porter Féminine Le Point Presse Le Pèlerin Presse La Redoute VPC généraliste Source : agence spécialisée sur le marketing direct et les plus de 50 ans : si-senior : www.si-senior.com Dans tous les cas la réussite d’une opération de Marketing Direct à destination des seniors nécessite la bonne combinaison entre la cible (quels fichiers ?), la création (quel visuel, quel contenu ?), le canal (Mailing, annonce presse, asile colis, email ?), l’offre (cadeau, service, remise ?). Cette alchimie n’est pas facile à réaliser sans l’aide de société spécialisée dans ce domaine. Certaines comme l’agence Si-senior sont à même de vous proposer un service à valeur ajoutée global qui peut vous faire x x x x x x x x x x CSP+ CSP x x x x x x x x x x x x x x 224 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 gagner en temps en efficacité et surtout à ne pas faire d’erreur. (Source : www.si-senior.com) Le marketing relationnel et les Seniors Les Seniors sont de gros lecteurs. Une enquête sur l’emploi du temps des Français révèle que les plus de 60 ans consacrent deux fois plus de temps à lire que l’ensemble des Français. Ils disposent de plus de temps libre. Ils ont vécu leur adolescence avant l’avènement de la télévision, quand les seuls médias disponibles étaient la radio et la presse. Ce goût pour la lecture est une des caractéristiques des Seniors. Les Seniors en activité (les babyboomers) ont moins de temps libre et ont grandi avec la télévision. Les études indiquent qu’ils consacrent pas mal de temps à la lecture, mais moins que les retraités actuels. Le marketing direct est souvent utilisé par les banques et compagnies d’assurances pour entrer en contact avec leurs clients Seniors. À peine retraités, les Seniors voient leurs boîtes aux lettres envahies de courriers publicitaires. Le marketing direct à destination des Seniors répond aux mêmes règles que le marketing relationnel à destination des plus jeunes. Il doit tenir compte, en plus, des effets de générations et des effets du vieillissement. Disposer d’un fichier cohérent Le fichier Seniors est très important dans toute campagne de marketing direct auprès des Seniors ; il doit être cohérent avec la campagne de mailing qui l’accompagne éventuellement : des évidences, qu’il est cependant bon de rappeler. Inutile d’essayer de vendre des fauteuils relaxants en utilisant un fichier de personnes âgées de 50 à 60 ans. Les acheteurs de ces produits ont en moyenne plus de 70 ans. Cet exemple peut paraître ridicule, mais il est pourtant réel (et n’a pas donné de bons résultats…). Le fichier doit être choisi en fonction des paramètres habituels, mais aussi de l’âge des personnes visées, des lieux d’habitation (la distinction Paris/province est importante), et éventuellement des centres d’intérêt et des valeurs des Seniors. 225 S’adapter aux effets du vieillissement Une campagne de marketing direct réussie tiendra compte des effets du vieillissement, notamment de la baisse de l’acuité visuelle. Cela doit se traduire par l’emploi de caractères adaptés à la cible visée, de couleurs respectant le spectre des personnes âgées, des textes et une mise en page aérés, des photos, etc. S’adapter aux effets de générations Chaque génération est plus ou moins réceptive au mailing. Le secteur des dons l’a bien compris. Les demandeurs utilisent souvent le marketing direct à destination des Seniors. Nos études sur le marketing direct à destination des Seniors montrent qu’ils sont plus réfléchis et qu’ils maîtrisent mieux leurs attentes et envies. Les plus âgés semblent bien souvent plus difficiles à convaincre. Pour contourner cet obstacle, il est nécessaire de leur prouver l’efficacité des produits proposés. Autre différence, les Seniors actuels demandent beaucoup d’informations et d’aide pour prendre leur décision. Les babyboomers veulent aussi de l’information mais ensuite la tranquillité pour avoir la liberté de choix. La nuance est importante. Le marketing générationnel peut venir en aide (voir chapitre sur les segmentations). Ils permettent de mieux maîtriser les attentes des Seniors par génération ainsi que leur âge. Les ProfilsValeurs permettent de connaître la ou les valeurs importantes qui « déclenchent » la prise de décision. Chaque profil a des attentes spécifiques en termes de « marketing direct ». L’exemple d’Aviva Direct Aviva Direct, anciennement Norwich Union Direct, fait figure de pionnier dans le domaine du marketing relationnel. Cette branche française du groupe Aviva s’est spécialisée dans le secteur des assurances à destination des Seniors sous la direction d’Alain Bride. En 1983, date de lancement de cette activité (sous le nom de Norwich Union), le marché des Seniors était encore quasi ignoré en France. Véritables pionniers, Alain Bride et son équipe sont allés étudier ce qui se passait alors aux États-Unis. Actuellement, l’âge moyen des nouveaux clients se situe entre 62 226 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 et 63 ans. L’âge médian des assurés (550 000 contrats) est de 68 ans. L’une des règles essentielles du marketing des Seniors est qu’il faut segmenter cette cible très hétérogène. La cible d’Aviva Direct est composée des Seniors MAPOU (Modestes, Âgés, Prévoyants, Ouverts à la VAD et Urbains). La commercialisation se fait par quatre canaux : le « couponing » dans la presse lue par les Seniors, le mailing, la télévision et dans une moindre mesure Internet. Du côté de la presse, Aviva Direct utilise les magazines télé, mais aussi France Dimanche, Ici Paris, Notre Temps et Pleine Vie. « Pour le publipostage, nous utilisons les fichiers des vépécistes tels que celui de Damart, mais aussi l’annuaire de France Télécom », souligne Alain Bride. À noter l’emploi d’un scoring original qui prend en compte les types d’habitation et les prénoms. Sur la forme, les courriers appliquent les règles d’or du marketing direct à destination des Seniors : démonstration en plusieurs points du produit et témoignages, en particulier pour « rassurer » le lecteur. À la télévision, les publicités destinées aux Seniors sont exclusivement diffusées en journée. C’est en effet en journée que les plus de 60 ans composent la majorité des téléspectateurs, surtout aux heures de diffusion de certaines émissions ou feuilletons tels que Derrick, La chance aux chansons, Amour, gloire et beauté. La chaîne la plus prisée des annonceurs est France 2. Les Seniors et Internet Il y a de plus en plus d’internautes de plus de 50 ans. Ils sont plus de 3,4 millions de connectés. Les Jeunes Seniors sont particulièrement attirés par Internet, mais les générations plus anciennes commencent à s’y intéresser. Depuis mi 2012 les Baby boomers sont ceux qui achètent le plus en volume sur Internet… devant les jeunes ! Les Seniors utilisent Internet essentiellement pour rechercher des informations et communiquer avec leurs amis et leur famille via les programmes de messagerie. Grâce aux Baromètres multimédia de Médiamétrie de mars 2002, il est possible de décrire les pratiques des internautes âgés de 227 plus de 50 ans. Les Seniors internautes sont attirés par le commerce électronique : 15,4 % des internautes de plus de 50 ans déclarent avoir réalisé récemment des achats en ligne, contre 11,7 % des internautes en général. Ceci peut s’expliquer de deux façons. Tout d’abord, les Seniors internautes surfent en général depuis longtemps : 33,2 % des internautes de plus de 50 ans surfent depuis plus de trois ans (contre 34,7 % pour l’ensemble des internautes), et 42,6 % utilisent le Net depuis un à trois ans, contre 33,7 % de l’ensemble des internautes. Expérimentés, les surfeurs du troisième âge se sentent à l’aise pour effectuer des achats en ligne. Autre facteur expliquant cette propension à la « cyber-consommation » : le haut débit. Selon les Baromètres multimédia, 20,7 % des internautes de plus de 50 ans disposent d’une connexion à haut débit chez eux, contre 19,8 % de l’ensemble des internautes. Cependant les dernières études indiquent que ce sont essentiellement les Seniors technophiles qui possèdent un ordinateur et qui sont branchés au web. Ceux qui ne le sont pas sont essentiellement les plus difficiles à convaincre. Une étude menée par Dick Stroud, Tête de Réseau Senior Strategic en Grand Bretagne, indique les raisons des Seniors pour ne pas être sur Internet : Internet ne m’intéresse pas, je n’en vois pas la plus-value (48%), Internet est plutôt pour les jeunes que pour moi (14%), Je n’ai pas d’ordinateur et je n’en achèterai pas (11%), Internet est trop complexe pour moi, je ne sais pas comment cela fonctionne (7%), c’est trop cher pour ce que c’est (5%), je n’ai pas le temps pour surfer (3%), je crois qu’il n’y a rien sur Internet qui soit susceptible de m’intéresser, Internet n’offre pas de bonnes conditions de sécurité : pirates, virus et je préfère attendre jusqu’à ce que cela perce vraiment (<1%). D’un autre coté voici les raisons pour commencer à surfer : pour avoir accès à l’information sans me déplacer (32%), pour communiquer plus facilement avec les autres et notamment la famille (20%), j’ai voulu apprendre quelque chose de nouveau (14%), par pure curiosité (10%), stimulé par les petits-enfants (7%), l’abonnement gratuit (6%), autres (5%) (principalement des raisons professionnelles), sur conseil d’amis/connaissances (3%), stimulé par les médias (2%), j’avais suivi un cours (2%). 228 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Les sujets qui intéressent les 50-60 ans : santé, tourisme, finance, technologie, actualité et information générale. Le principal reproche que les Seniors font aux sites porte sur leur manque de clarté. Beaucoup de sites proposent plusieurs types de navigation, multiplient les produits et les références sur des pages surchargées. Les logiques de navigation sur Internet varient selon les générations. Les Seniors naviguent de manière plus linéaire et « logique » que les jeunes qui eux sont plus « intuitifs ». L’âge et les effets du vieillissement n’expliquent pas seuls les difficultés que les Seniors rencontrent dans l’emploi des nouvelles technologies. Le problème, en réalité, est que la très grande majorité des sites Internet sont adaptés à un mode de navigation que maîtrisent les plus jeunes, non les Seniors âgés. Senior Strategic a réalisé plusieurs études sur le sujet d’Internet et les Seniors en 2012 suivant plusieurs protocoles : navigation libre, navigation avec une information à trouver, réalisation d’un site idéal. Les résultats ont été comparés à ceux des jeunes de moins de 30 ans. Il apparaît très clairement que le « style » de navigation entre les Seniors et les jeunes est très différent. Tout d’abord la plupart des 50 ans et plus utilise Internet avec un objectif précis et « surfent » beaucoup moins que les jeunes générations. Le style de navigation est différent entre les générations : cela vient essentiellement du fait que les jeunes ont le sentiment d’être « dans Internet » en surfant . Pour les 50 ans et plus, le web n’est qu’un média qu’ils lisent depuis « l’extérieur » comme un journal. Autrement dit, les jeunes se pensent comme un élément en tant que tel d’Internet alors que les Boomers sont psychologiquement en « dehors ». Cette différence psychologique est très importante dans la conception d’un site ou d’un emailing à destination des Seniors. L’étude menée par Senior Strategic indiquent également que les plus de 50 ans préfèrent les sites linéaires qui respectent leur mode de lecture de l’information appris durant leur jeunesse. Les 50 et plus ont besoin de sites Internet plus faciles, plus linéaires et avec moins de niveaux dans la structure. Bien sûr sans aller dans l’excès inverse en développant un site « pour vieux ». 229 Dans éléments sont à prendre en compte tels que le vieillissement psychologique et physiologique, l’âge subjectif, la baisse des mémoires spatiales et à court terme. 230 Guide du Marché des 50 ans et plus – 2012 Conclusion La plupart d’entre nous allons vivre plus longtemps que les générations précédentes. Dans les années qui viennent, le pouvoir, économique et politique, va définitivement passer aux mains des plus âgés. C’est tout l’équilibre entre les générations qui va être compromis, en particulier avec la « vague » des babyboomers, futurs « Seniors boomers ». Ces changements sans précédent dans l’histoire de l’humanité pourraient bien redistribuer les cartes dans plusieurs domaines d’activités et permettre aux entreprises qui en ont déjà pris la mesure de devenir leaders dans leur secteur dans les prochaines décennies. Réussir sur le marché des Seniors, c’est d’abord comprendre l’ampleur du phénomène. C’est un marché complexe, qui nécessite d’avoir une vision globale et de fuir les solutions miracles. Il n’est pas question de ne s’intéresser qu’aux Seniors et d’oublier les jeunes, mais de satisfaire les attentes des plus de 50 ans. Le vieillissement de la population est un « challenge » non seulement pour les entreprises qui veulent cibler les Seniors, mais aussi pour celles qui sont déjà implantées sur ce marché et qui voient arriver les baby-boomers. Ce livre n’a pas l’ambition d’apporter de solutions toutes faites. Les pistes qui y sont développées sont valables aujourd’hui, à la lumière des plus 231 récentes études sur le sujet. Gageons que le vieillissement de la population remettra également en cause certaines idées de ce livre, qui n’est certainement pas le dernier sur ce thème. Si notre société persiste dans le « jeunisme », une partie de plus en plus importante de la population attendra encore en vain que ses attentes soient satisfaites. Il n’est pas question pour autant d’inverser cette tendance au profit d’un « vieillisme » qui, sous la pression des baby-boomers, entraînerait sans doute bien des conflits de générations. Il faut plutôt espérer une société « intergénérationnelle », dans laquelle toutes les générations auraient leur place et qui encouragerait l’entraide entre « jeunes » et « vieux ». Le vieillissement de la population est un phénomène dont les effets seront beaucoup plus importants que nous ne le pensons. Les plus âgés sont, pour beaucoup, encore les « oubliés » de notre société. Peut-être arriverons-nous à faire en sorte que les Seniors soient un jour complètement intégrés dans une société intergénérationnelle, où les différences d’âge seront un atout, le gage d’une plus grande richesse.