Eliane Elias : la diva
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Eliane Elias : la diva
saverne sarre-union Q SAMEDI 15 AOÛT 2015 35 SAVERNE Portrait Un couple de troubadours Conteurs et musiciens, Catherine et Sylvain Piron-Paira sillonnent l’Alsace et la Lorraine depuis une dizaine d’années. La rencontre de ces deux passionnés devait être écrite, tant ils s’accordent et se complètent pour mieux servir leur âme d’artiste. Q uelques pas de danse esquissés ou un morceau de musique à répéter : Sylvain et Catherine Piron-Paira ont toujours un spectacle à inventer. Dans leur demeure savernoise, de récents travaux sont venus faciliter ces expériences artistiques. Entre un plan de travail en tuiles et des murs faits de vieilles poutres et de pierres, le cadre invite au spectacle. Cet espace entièrement restauré a ainsi déjà accueilli à plusieurs reprises amis et connaissances pour une représentation intimiste. Artistes aux multiples facettes, les deux Savernois se sont fait une réputation, écumant les planches d’Alsace et de Lorraine, ensemble ou en solitaire. Elle, passionnée d’histoires à raconter, lui, féru d’instruments en tous genres. Ils étaient faits pour se rencontrer… « dans un supermarché », se souvient Sylvain en souriant. « Souffler dans un vélo, ça peut être très théâtral » Catherine et Sylvain emploient la musique pour donner vie aux contes. Catherine a toujours baigné dans les mots. Enfant, elle entendait la langue maternelle de sa mère anglaise et écoutait « la musique des mots sans la comprendre », se rappelle-t-elle. L’amour des histoires s’est transmis de génération en génération. Son arrière-grand-mère écrivait, et sa grand-mère lui récitait des contes. Parmi ces histoires, certaines l’ont marquée. Par exemple celle-ci : une grand-mère a trois petits-enfants et garde du riz dans un bol. Elle voit que quelqu’un mange une partie de sa nourriture. Alors elle demande à ses petits-enfants de chanter une chanson, en se tenant au beau milieu d’une lagune située à proximité de la maison. Lorsque l’un d’eux chante, la lagune se met en colère : c’est lui qui a volé le riz. Dans un mouvement de remords, la grand-mère veut le sauver, plonge, mais les cheveux de l’enfant glissent et il meurt. « De là viennent les premières lignes dans les mains. » Ce conte d’enfance, elle le transmet à son tour. Histoire de générations Très jeune, Catherine s’est passionnée pour les histoires et la danse. Au souvenir d’un stage à Chapeau cornu, un château situé entre Lyon et Grenoble, son regard s’illumine. Elle n’avait que 12 ans et cela a sans doute eu l’effet d’un déclic pour la jeune fille qu’elle était. Pourtant, malgré son amour de PHOTO DNA – A-C G. la danse, la musique restait un art auquel elle n’osait se confronter, considérant qu’il y a deux catégories de personnes : les musiciens et les non musiciens. Et, selon elle, elle faisait forcément partie de la seconde catégorie. C’est sa rencontre avec Sylvain qui l’a fait changer d’avis : « Sylvain m’a donné un instrument, même si je ne jouais pas très bien », sourit-elle. Catherine ne cache pas son admiration pour le jeu de Sylvain : « Il ne se contente pas de la manière traditionnelle de jouer. Il emploie par exem- ple l’archet comme percussion. » Instruments d’antan Tout comme les contes sont transmis depuis des générations, les deux artistes se retrouvent dans une affection commune pour les instruments venus d’autres âges. Catherine apprécie le son délicat du psaltérion, instrument à cordes datant du Moyen-Age. D’autres fois, elle préfère accompagner la narration d’un conte à l’aide d’une étrange petite mallette renfermant un soufflet : la « shruti box ». Et des instruments hors du commun comme ceux-ci, elle et Sylvain en ont encore beaucoup. Ingénieur du son à la retraite, Sylvain connaît une passion sans limite pour la musique depuis l’adolescence, où il chantait Georges Brassens avec ses amis. Son instrument fétiche : l’accordéon diatonique. De l’imagination, Sylvain en a aussi pour détourner des objets du quotidien et les métamorphoser en instruments de musique. À partir d’un simple gant et d’un tuyau : voilà une cornemuse. Un vieux guidon de vélo et voici qu’apparaît une flûte. « Souffler dans un vélo, ça peut être très théâtral, assure-t-il. Je voudrais trouver une vieille sonnette à accrocher sur le guidon. » Si l’on en croit cet autodidacte, tout semble pouvoir devenir un instrument de musique, même… des légumes. Dans une séance de contes sur le thème des végétaux, Sylvain avait ainsi métamorphosé carottes et radis. La capacité d’invention de ces deux artistes réunis promet donc encore de nombreuses découvertes inattendues. Catherine et Sylvain aiment aussi transmettre leurs passions, notamment à travers des ateliers de danses traditionnelles. Un moyen de faire vivre le patrimoine alsacien, auquel Sylvain, originaire de Normandie, s’est totalement converti. Si bien qu’il lui arrive parfois de chanter en alsacien. ANNE-CLAIRE GROSS R Q Sylvain participera le 23 août à un spectacle de contes au musée Lalique de Wingen-sur-Moder à 16 h. Q ON EN PARLE P LA PETITE-PIERRE Au grès du jazz INSOLITE Archers de Hanau-Lichtenberg De garde pour protéger le château Eliane Elias : la diva Eliane Elias a tenu bon. Malgré le vent qui par moments soufflait très fort, l’artiste brésilienne a donné son concert devant des fans ravis qui l’ont ovationnée debout. SES CHEVEUX LONGS ET BLONDS au vent, Eliane Elias Deux membres de la troupe des Archers de Hanau-Lichtenberg sont de garde aux portes du Haut-Koenigsbourg. DOCUMENT REMIS Le château du Haut-Koenigsbourg accueille les Archers de HanauLichtenberg, troupe de reconstitution historique professionnelle (1480/1490). Depuis le 8 et jusqu’au 16 août, deux soldats sont de garde aux portes de la forteres- se afin d’accueillir les visiteurs, nombreux à cette période de l’année. Une bonne occasion de converser, de prendre des photos et de découvrir l’armement et la protection des gens d’armes au XVe siècle. EN BREF MONSWILLER Trop sec, pas de lanternes magiques En raison des risques d’incendies F06-LSS 01 dus à la sécheresse, le comité des fêtes, par mesure de sécurité, a décidé l’annulation du lancer de lanternes magiques prévu samedi dans le cadre du messti. s’est accommodée de la météo qui a fait s’envoler les partitions des musiciens et a obligé le technicien du son à de nombreux réglages pour caler la voix de la pianiste. Souriante et aimable avec son public, elle a réussi à instaurer une communication malgré la barrière de la langue. Bossa nova et samba Le Brésil était donc à l’affiche jeudi soir. Eliane Elias a livré une prestation intimiste sur des rythmes de boss et samba. Elle était entourée de Raphaël Barata à la batterie, Mark Johnson à la basse et Rubens de la Corte à la guitare, visiblement des complices de la dame. La pianiste a entraîné son public vers un jazz cool, par moment mélancolique avec néanmoins un toucher de piano énergique. Elle a déployé un réel talent pour l’improvisation, sans en faire des tonnes. avec le public même si l’anglais et le portugais ont vite repris le dessus. La pluie tant redoutée a finalement sagement attendu le dernier rappel pour déverser Cocktail rafraîchissant OÙ EST PASSÉE LA PHOTO ? Les trois autres musiciens sont à l’avenant et laissent libre court à leur imagination pour servir aux spectateurs de vrais moments de grâce musicale. Le batteur a livré un solo absolument époustouflant où il a réussi à recréer, à lui tout seul, l’ambiance enflammée du carnaval de Rio. Des accents de blues, du swing, de la salsa : c’est un cocktail réussi et rafraîchissant qu’a goûté un public ravi. Entre compositions personnelles et reprises de classiques de maîtres du genre, Gilberto Gil pour n’en citer qu’un, Eliane Elias a agrémenté plusieurs de ses chansons de sa voix chaleureuse de Carioca. Elle a fait l’effort de communiquer en français ses trombes d’eau sur La Petite-Pierre, rendant le retour un peu compliqué sur les routes sinueuses des Vosges du Nord. S.G. R C’est bien connu, les artistes ont leur caractère. Certains sont abordables, tolérants, savent composer avec la notoriété et cultivent un sain détachement par rapport à leur image. D’autres ont plus de mal à jouer le jeu. C’était le cas jeudi soir d’Eliane Elias, qui a exigé de voir et de valider les photographies de presse avant publication. Aux DNA de Saverne et de Sarre-Union, comme dans nombre de rédactions, la ligne éditoriale a toujours été très claire à ce sujet : on ne soumet pas nos articles pour une quelconque relecture ou validation avant publication. Il n’y a donc aucune raison pour appliquer un traitement différent à nos photos. Le photographe de presse est aussi un journaliste, il a son regard, il tente de traduire la vérité de l’événement, au niveau international comme au niveau le plus local. Puisque l’artiste a malgré tout décidé de camper sur ses positions, nous avons fait de même, d’où la publication inhabituelle de ce compte rendu sans illustration. Notre photographe sur place a perdu son temps, mais c’est son travail que nous défendons. Nous ne sommes pas le seul média à déplorer ces conditions qui se multiplient dans l’exercice du travail des photographes de presse. Précisons enfin que la direction du festival Au grès du jazz n’est en rien responsable de cette situation, qui la met vraisemblablement dans l’embarras autant que nous. EMMANUEL VIAU