100 ème anniversaire du scoutisme

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100 ème anniversaire du scoutisme
100 ème anniversaire du scoutisme
Scoutisme et identité bretonne : les scouts
Bulletin No 6 - Automne 2007 / Kannadig Niverenn 6 - Diskar Amzer 2007 5,00 €
TUDJENTIL BREIZH : 2 straed Sant-Alfons, 35000 ROAZHON, Email : [email protected]
Site INTERNET : http://anb.asso.free.fr Cotisation annuelle : 15 €
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(le retour de Tristan : dessin de Xavier de Langlais pour
le camp des Scouts Bleimor de 1946 à Plomelin)
Numéro spécial : 100ème anniversaire du scoutisme
Bulletin No 6 - Automne 2007
Kannadig Niverenn 6 - Diskar Amzer 2007
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Sommaire
Kannadig Niverenn 6
Editorial
page 5
Semper Parati
par Gérard de Boisboissel
O Lo Lê, un journal illustré pour les petits Bretons
par Christophe Carichon
Yann-Ber Kalloc’h (Bleimor)
page 6
page 15
page 24
par Jean-Jacques Gauthé
Scoutisme et identité : les scouts Bleimor
Epreuves du brevet Bleimor
page 27
page 43
Essai sur les devises familiales en langue bretonne
par Tanguy Bouchaud
par Jacques-Youenn de Quelen
Initiation au Code de la Chevalerie (suite)
Vie de l’Association
page 48
page 53
page 56
gant Hervé Prat
Banniel TUDJENTIL BREIZH
Le Billet d’Arthur : l’Association de la Noblesse Française fête ses 75 ans …
Un scout Bleimor …
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page 59
page 62
Editorial
Pennad-Stur
En cette fin d'année 2007, nous tenions à commémorer à notre façon le centième anniversaire
du scoutisme en consacrant ce bulletin au thème scoutisme et identité bretonne à travers cette
expérience originale que constitua dans la période après-guerre la création des Scouts Bleimor
qui revendiquant l'héritage d'une culture bretonne voire celtique l'ont mis en pratique dans le
cadre du scoutisme voire plus tard (avec succès pour certains d'entre eux) dans celui de la
renaissance de la musique bretonne avec notamment le plus célèbre scout Bleimor Alan Stivell
qui fut membre du comité de parrainage pour la visite en Bretagne du Pape Jean-Paul II à Auray
en Septembre 1996 ...
Pour raconter l'histoire des Scouts Bleimor nous avons fait appel à Jean-Jacques Gauthé, historien
du scoutisme, pour qui l'aventure des Scouts Bleimor trouve sa filiation dans la revue bretonne
pour enfants O lo Lê créée pendant la seconde guerre mondiale par Herri Caouissin, secrétaire
particulier de l'Abbé Perrot, fondateur de la revue Feiz ha Breiz (Foi et Bretagne). Christophe
Carichon, membre du Centre de Recherche Bretonne et Celtique, et auteur d'une thèse sur le
scoutisme en Bretagne, nous racontera donc à son tour l'aventure d'O lo Lê et la rencontre après
guerre des fondateurs des Scouts Bleimor Perig et Lizig Géraud-Keraod avec le fondateur d' O lo
Lê.
Perig et Lizig Géraud-Keraod feront à leur tour entrer en 1962 les Scouts Bleimor dans la
fédération naissante des Scouts d'Europe dont certaines troupes en Bretagne font encore passer
le Brevet Bleimor telle la 1ère Marine de Landerneau qui en a listé dans ce bulletin les épreuves.
Ainsi grâce à ce germe Bleimor entretenu par les Scouts d'Europe on peut espérer à terme un
regain de la pratique de ce scoutisme identitaire breton d'autant plus qu'il pourrait recruter dans
ce nouveau vivier bretonnant que constituent les 12.000 enfants scolarisés en Bretagne dans les
filières bilingues (dont plus de 4000 enfants dans la seule filière bilingue catholique Dihun) à
l'image symbolique de cette sizaine de louveteaux de la 5ème Rennes des Scouts d'Europe Jean
Paul II où l'on retrouve un élève de la filière bilingue catholique rennaise, un fils d'un membre de
notre association et un jeune joueur de bombarde ...
Jacques de Poulpiquet
NB : nous remercions Michel Audrain, photographe à Saint-Nazaire et ancien Scout Bleimor, de
nous avoir autorisé à illustrer les différents articles de ce bulletin par ses photos (dont celle de
couverture) extraites pour la plupart du livre de Christophe Carichon « Scouts et Guides en
Bretagne » qui vient de paraître chez Yoran Embanner.
L’insigne aux 3 têtes de loups
des Scouts Bleimor
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Semper Parati par Gérard de Boisboissel
(responsable de la 5 ème Rennes Scouts d’Europe)
Telle est la devise internationale du scoutisme, immense mouvement de jeunes international, car
il compte 25 millions de membres déclarés dans le monde, et 67 000 en France. Etre généreux et
charitable envers son prochain, tel est le principe pour lequel ces scouts ou guides restent
toujours prêts.
Mais un rappel d’histoire pour commencer :
Robert Baden Powell, officier britannique, fut envoyé en Inde en tant que jeune officier
spécialisé dans la reconnaissance, le relevé topographique et le rapport. Il y utilisa des
méthodes qui n'étaient pas orthodoxes pour l'époque: la création de petites unités ou
patrouilles travaillant ensemble sous les ordres d'un chef avec une récompense spéciale aux
méritants. Il remettait à ses élèves un badge ressemblant au symbole traditionnel du nord de la
boussole.
Il se trouva en Afrique du Sud pour participer à la défense de Mafeking durant un siège qui
dura 217 jours, au début de la guerre des Boers. Ce siège se révéla un test crucial pour les
méthodes scoutes de Baden-Powell. Le courage et l'habileté montrés par les garçons
messagers à Mafeking l'impressionnèrent fortement.
Il remarque alors que lorsqu'on fait confiance à de jeunes garçons, ils peuvent faire des
merveilles. Il publie en 1899 un livre intitulé « Aids to Scouting » destiné aux éclaireurs de l'armée
britannique. Plus tard, il est surpris de constater que son ouvrage est utilisé par des jeunes gens
qui n'ont rien de militaire. Il décide alors d’effectuer un camp expérimental avec seulement
une vingtaine de garçons en 1907 sur l'île de Brownsea, près de Poole, en Angleterre, se basant
pour ses méthodes éducatives sur ses nombreuses expériences de garçon et de soldat.
Ce camp remporta un immense succès et prouva à son organisateur, Robert Baden-Powell,
que ses méthodes et sa formation plaisaient aux jeunes et donnaient des résultats.
En janvier 1908, il publia son premier "Scouting for Boys" ou « Eclaireurs ». Ce fut un succès
immédiat. Baden-Powell avait simplement eu l'intention de proposer une méthode de
formation pour les garçons susceptibles d'être adoptée par des organisations de jeunes déjà
existantes.
Il définit alors les 5 buts du Scoutisme (Santé, Sens du Concret, Personnalité, Service, Sens de
Dieu), puis les 10 articles de la loi scoute, fondamentalement positifs, n'engendrant aucune
interdiction, et qui proposent au garçon une règle de vie que ce dernier promet de mettre en
pratique de son mieux.
Baden Powell démissionne de l'armée en 1910 pour se dévouer au scoutisme. Comme emblème
du Scoutisme, Baden Powell choisit la fleur de lys, comme symbole de pureté et de paix, mais
surtout parce qu'elle indique la bonne direction (le haut, la nord sur les vieilles cartes) sans tourner
à droite ni à gauche. Elle est aussi dans ses armes.
La même année il a l’idée d’une branche cadette et fonde les louveteaux (8 à 11 ans), en
1916 les guides et en 1917 les Routiers (17 ans et plus). Le roi d'Angleterre, impressionné, prend
dès lors le mouvement naissant sous son patronage dans son pays.
Baden Powell fut élevé à la pairie héréditaire en 1929.
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Du côté de la France quelques pasteurs protestants lancent les premières troupes d'Eclaireurs et
obtiennent vite le succès. Mais les évêques catholiques, eux, commencent par rejeter le
scoutisme, arguant qu’il provient d'un protestant (fils de pasteur), militaire et général de l'armée
anglaise, et prétendu issu de la franc-maçonnerie (ce qui s'avérera être faux), tout comme le
soutient le père jésuite Henri Caye dans la revue Etudes, en 1913.
Le père Jacques Sevin, d'origine lilloise, va sauver la situation : encore étudiant jésuite, il fait
pendant l'été un voyage d'étude en Angleterre pour se rendre compte par lui-même. Sur place, il
partage la vie de camp des boy-scouts, rencontre la hiérarchie catholique et se lie d'amitié avec
Baden-Powell autour d'une tasse de thé. Dans sa pensée et dans son cœur, il forme la résolution
de fonder les scouts catholiques en France, ce qu’il fait en 1920.
Il fait prendre corps à l'intuition que cette pédagogie, si décriée dans les milieux ecclésiastiques
de l'époque, correspondait en profondeur à une vision chrétienne de l'homme. Il conçoit alors le
dessein, non seulement de proposer la vie scoute à des jeunes pour en faire des adultes
chrétiens, mais de développer leur foi et de les intégrer profondément à l'Eglise catholique par
cette même vie scoute : combien de vocations sacerdotales, religieuses, laïques, prendront
naissance dans un tel terreau de vigueur spirituelle et de générosité éducative !
Il choisit pour emblème du scoutisme français la croix potencée, qui était aussi la croix de
Godefroy de Bouillon ("d'argent à la croix potencée d'or cantonnée de quatre croisettes du
même", créée pendant les croisades) à laquelle il rajoute la fleur de Lys.
Le père Sevin se bat, et défend vigoureusement devant les autorités ecclésiale le scoutisme. Il
dément à Rome qu'il soit protestant, ni encore moins Franc-Maçon. Il définit un esprit scout
particulier, et voit très loin. Il envisage même un monde scout, avec création d'école et entraide
sociale, ordres religieux, et un des meilleurs moyens de s'opposer au socialisme très anti-religieux. Il
fut alors très critiqué par ses collaborateurs ce qui conduisit à son renvoi en 1933, après avoir été
10 ans mestre de camp à Chamarande. Il l'accepta avec humilité. Son procès de béatification
est en cours.
Puis vint la guerre durant laquelle le scoutisme catholique français, considéré comme une
dangereuse école de liberté, est interdit en zone occupée.
La période d’après guerre, est une période où le scoutisme s’établit profondément dans la
société. Néanmoins, l’unité du mouvement sera vite mise en échec pour cause de divergences.
François Lebouteux prend la tête du commissariat national éclaireurs des scouts de France et
sera l’artisan d’un certains nombres de réformes. Plusieurs actions au plan national, mènent petit
à petit, à la spectaculaire réforme Rangers/Pionniers de 1964 : séparation de la branche
éclaireurs 12-17 ans en deux branches : les Rangers (12-14 ans) et Pionniers (14-17 ans), à qui l’on
donnera comme modèle l’homme des chantiers (l’idéal chevaleresque n’est plus tendance),
nouvel uniforme plus voyant, fin du système des patrouilles façonné par BP (et fin du chef de
patrouille), modification de la loi et des traditions catholiques, jeu remplacé par le chantier, perte
du rôle éducatif de la nature au profit de celui de la cité.
Il est proposé une direction égalitaire de la patrouille et de la troupe, et l’apprentissage du jeune
par lui-même dans tous les domaines. Il n'est plus accordé de place préférentielle à l’adulte
référent ou au CP à prendre en modèle et qui transmet les connaissances
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Ces changements seront une des causes de l’éclatement du scoutisme catholique français
En parallèle, en Août 1952 se créent en Autriche les Europa-scouts qui pour la première fois
veulent dépasser les frontières nationales.
De là se crée en 1956 la Fédération du Scoutisme Européen après une intervention de Jean
Claude Alain qui croyait à l'idée d'un scoutisme Européen pouvant dépasser les frontières de
façon à éviter les erreurs du passé et de la guerre. Lui même fonde en Juillet 1958 l'association
française des "Scouts d'Europe". D'autre pays, Grande-Bretagne et Belgique notamment, suivent
rapidement et forment leurs associations.
Le 21 Août 1962, en Bretagne, le mouvement scout de Perig Géraud-Keraod, la "Communauté
Scoute Bleimor", rejoint celui des Scouts d'Europe. Périg devient le Commissaire Général et va
pouvoir donner à l'association une impulsion nouvelle. Il va réformer les textes, le directoire
religieux, et l'ambition européenne du mouvement, lui donnant véritablement un nouveau
souffle.
Ce que veulent les scouts d'Europe à ce moment là : mettre l'idéal du scoutisme au service
d'une unité européenne non pas politique, mais fondée sur le christianisme et les idéaux
chevaleresques, avec aussi des unités et des activités distinctes entre scouts et guides.
Certains également essayent au sein des Scouts de France de promouvoir l'idée de la
coexistence d'un scoutisme traditionnel, qui fut baptisé « unitaire », en référence à la volonté de
ne pas séparer en deux la branche éclaireur.
Cependant, la volonté des Scouts unitaires de rester au sein des Scouts de France rencontra trop
d'obstacles,et en 1971 fut créée l'association des Scouts Unitaires de France (SUF) fidèle à la croix
potencée du baussant des Scouts de France et à la pédagogie traditionnelle, pratiquée
jusqu'aux changements de 1964.
Scoutisme et Chevalerie
Baden-Powell s'est beaucoup inspiré de la chevalerie pour mettre en place les différents
éléments qui allaient constituer le mouvement scout, et ainsi nombre de scouts ont pu associer à
l’idéal chevaleresque la pratique de l’idéal scout. On en trouvera un parallèle dans la tableau
page suivante.
La veillée de promesse (peu usitée de nos jours) est par exemple une tradition scoute qui tire son
origine de la veillée d'armes de la chevalerie.
Les futurs chevaliers passaient une nuit entière à se préparer dans la réflexion et la prière, pour
leur adoubement qui allait avoir lieu le lendemain. Les pieux chevaliers qui s'engageaient dans les
Croisades pour aller défendre ou reprendre les lieux saints au périple de leurs vies, consacraient
leur dernier soir avant le départ pour réfléchir et prier Dieu de les protéger dans toutes leurs
actions. Les chevaliers se retiraient donc seuls dans un lieu tranquille et restaient éveillés toute la
nuit pour prier et méditer.
Citons également que le scoutisme d’avant guerre institua une distinction pour les plus anciens
scouts, en vue de les faire progresser. L’insigne qui consistait en un casque héraldique de
chevalier brodé en soie jaune sur fond vert surmontant l’insigne de première classe. On procédait
alors à une cérémonie d’adoubement décrite en détail dans le Cérémonial.
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Chevalerie
Scoutisme
Le chevalier s'engage à servir Dieu, l'Église Le scout et la guide s'engage à servir Dieu,
et sa patrie
l'Église et sa patrie
Le don de soi et la gratuité du service sont à
la base de la chevalerie. (défendre la veuve
et l'orphelin)
Le chevalier acceptait d'abandonner terres
et foyers pour aller défendre la Terre Sainte.
Le scout et la guide recherche des services à
rendre aux autres. (B.A)
Le scout et la guide accepte d'abandonner
caprices et confort pour mieux servir son
prochain.
Le chevalier a un code d'honneur: les 10 Le scout et la guide a la Loi qui contient 10
serments du chevalier
articles
L'épée du chevalier est déposée sur l'autel La croix de promesse du scout et de la guide est
et béni
bénie
L'adoubement est le rituel qui fait le
chevalier. Il y reçoit son armure. Il est
adoubé par son suzerain.
L'armure du chevalier est aux couleurs de
son suzerain ou de son pays
Le scout et la guide reçoit sa croix de promesse,
son uniforme et son foulard. La promesse est
faite à son chef.
L'uniforme montre son appartenance au
mouvement et le foulard à son unité.
Le chevalier porte la croix du Christ comme Le scout et la guide porte la croix du Christ
insigne.
comme insigne.
Chevalier pour la vie.
Scout ou Guide un jour, scout ou Guide toujours
La chevalerie est universelle
Le scoutisme est une organisation mondiale.
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Le cœur du scoutisme : La pédagogie
La pédagogie exposée ici est reprise de celle des scouts d’Europe, mouvement dont j’ai la
charge et l’honneur d’être chef de groupe sur Rennes.
Le scoutisme, est un mouvement d’éducation, complémentaire de la famille, fait pour les jeunes
(et pour tous les jeunes) et par les jeunes. De par la diversité des garçons et filles qui la
composent, c’est un mouvement d’éducation populaire.
La méthode scoute consiste, non pas à enseigner, mais à mettre le jeune en situation d’agir par
lui-même. Il apprend ainsi à devenir responsable du développement équilibré de toutes les
composantes de sa personnalité. Il fait l’expérience d’une large autonomie, l’apprentissage
concret de la liberté, en même temps que des exigences de la vie communautaire. Il impose
aussi de respecter l’environnement et de protéger la nature.
La plupart des mouvements sont des mouvements chrétiens, bien que d’autres soient de
confessions différentes, notamment dans les pays extra européens. Ils invitent tous leurs membres
à se comporter en frères de tout autre scout.
Je citerai 10 principes de cette pédagogie
1) Le but du scoutisme : il est d’aider chaque jeune à devenir un homme ou une femme libre et
responsable, à réussir sa vie et à être capable de jouer un rôle utile dans le monde qui l’entoure.
La vie scoute n’a de sens que si elle débouche sur le service des autres. « Toujours prêt » est la
devise de tous les scouts du monde. Elle exprime bien cette volonté de servir.
2) Le développement harmonieux de la personnalité qui s’appuie sur cinq objectifs indissociables
2.1) La santé et le développement physique
Même au 21e siècle, il faut toujours apprendre à un enfant à se laver, à être propre, à
s’approprier les règles d’hygiène. Si le sport s’est considérablement développé dans notre
société, nombreux sont les enfants et les adolescents qui manquent de tonus, d’énergie,
d’endurance, de souplesse. La vie au grand air permet de retrouver un équilibre de vie en
harmonie avec la nature. Respecter son corps, c’est aussi le maîtriser, en apprenant aux jeunes à
lutter non seulement contre l’usage du tabac, de l’alcool, mais aussi contre la banalisation de la
toxicomanie ou celle des expériences sexuelles précoces.
2.2) La formation du caractère
Par les exigences de la vie communautaire, à l’école de la nature, le scoutisme développe les
qualités nécessaires à la construction d’une personnalité solide : le courage, la volonté, la
persévérance, le dépassement de soi. Il conduit chaque enfant à prendre progressivement
confiance en lui. Il enseigne aussi la joie de vivre et invite chacun à une bonne humeur
contagieuse. Il cherche aussi à apprendre à des jeunes surinformés à faire preuve de
discernement, à développer le jugement et le sens critique. C’est là un des objectifs essentiels de
la pédagogie des conseils.
2.3) Le sens du concret
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À côté de la formation scolaire, intellectuelle et théorique, le scoutisme insiste sur le
développement de la créativité, l’habileté manuelle, l’esprit pratique, le travail de ses mains. Loin
du virtuel, le scout crée et construit.
2.4) Le don de soi
Le scoutisme est une école de service et de don de soi. Il vise à développer, à amplifier, à
traduire en actes les capacités de générosité des jeunes. Il fait progressivement découvrir que le
véritable bonheur, c’est le don de soi et le service.
2.5) Le sens de Dieu
Le scoutisme veut aider chaque jeune à savoir où il va, à trouver le sens de sa vie ; il veut être une
occasion pour chacun de découvrir la présence de Dieu dans sa vie, en lui et dans les autres, de
mieux le connaître, d’éclairer sa vie à la lumière des valeurs de l’Évangile.
3) Une progression au rythme de chacun
L’éducation différenciée des filles et garçons qui rend la liberté d’être soi-même. Les Guides et
Scouts d’Europe ou les Scouts Unitaires ont choisi de permettre aux garçons et aux filles
d’exprimer et d’affirmer leur identité spécifique. Leurs besoins physiques et psychologiques, leurs
centres d’intérêt, leurs modes d’affirmation de la personnalité sont différents.
Les trois tranches d’âge, louveteaux ou louvettes, scouts ou guides, routiers ou guides aînés
permettent de progresser au rythme de sa tranche d’âge.
4) Un uniforme
L’uniforme nivelle les différences. Il permet une unité et marque l’appartenance à une même
communauté et le partage d’un même idéal.
5) Une méthode active fondée sur la confiance :
Le scoutisme prend le jeune au sérieux et lui fait confiance. Par des démarches adaptées à son
âge, il le considère toujours capable de s’engager et de prendre des responsabilités vraies et à
sa mesure.
5.1) La responsabilité
Parce qu’il croit en sa parole, le scoutisme fait grandir chaque jeune en lui donnant des
responsabilités à sa mesure, de façon progressive et adaptée à son âge, à ses compétences, au
sein de petits groupes dont l’autonomie va croissante dans chaque tranche d’âge.
5.2) L’autonomie et la vie en équipe
L’autonomie est progressive. Le principe fondamental est l’organisation permanente en petits
groupes autonomes de 6 à 8 jeunes, appelés patrouilles, et dirigés par l’un d’eux (le chef de
patrouille ou CP).
L’autonomie est réelle. Les responsabilités assumées par les scouts ou les guides ne sont pas
symboliques, mais bien réelles : préparer les menus, acheter l’intendance, organiser les
transports, confectionner les repas, gérer un budget, entretenir le matériel, mais aussi
préparer les activités, construire des jeux, déterminer des itinéraires, rechercher et installer
un bivouac.
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Mais l’autonomie est contrôlée : l’encadrement des chefs s’assure du bon esprit et de
l’enthousiasme ; les chefs veillent à sa formation à travers des activités spécifiques et
contrôlent l’organisation et le déroulement des activités. Les patrouilles sont réunies au sein
d’ensembles plus vastes (les troupes pour les scouts, les compagnies pour les guides) qui
favorisent la stimulation, l’émulation par l’organisation d’activités inter-patrouilles. Les
activités sont toujours préparées au sein de conseils associant les CP ; un bilan est effectué
avec eux.
6) L’engagement : la loi scoute
Il n’est possible de donner de telles responsabilités à des jeunes que parce que tous adhèrent et
s’engagent à suivre une même règle du jeu : la loi scoute ou guide. Elle n’interdit rien, mais
affirme des valeurs, énonce des propositions positives. Plus qu’une règle du jeu, c’est une
véritable charte de vie, qui définit l’idéal et le style scouts.
Par la promesse, chaque jeune s’engage volontairement et librement à respecter la loi et à servir
les autres. C’est cet engagement de chacun sur l’honneur qui donne sa force au scoutisme.
La loi scoute
Le scout met son honneur à mériter confiance.
Le scout est loyal à son pays, ses parents, ses chefs et ses subordonnés.
Le scout est fait pour servir et sauver son prochain.
Le scout est l’ami de tous et le frère de tout autre scout.
Le scout est courtois et chevaleresque.
Le scout voit dans la nature l’œuvre de Dieu : il aime les plantes et les animaux.
Le scout obéit sans réplique et ne fait rien à moitié.
Le scout est maître de soi : il sourit et chante dans les difficultés.
Le scout est économe et prend soin du bien d’autrui.
Le scout est pur dans ses pensées, ses paroles et ses actes.
7) Les activités : l’aventure en pleine nature
Le jeu et l’aventure pour les scouts se vivent dans la nature.
Les scouts sont de vrais bâtisseurs ! Au camp, on vit de façon rustique, avec des moyens simples :
pas d’eau chaude, ni de douche, sauf si les scouts ont fait preuve d’ingéniosité ; pas de
cuisinière, mais des feux qu’il faut allumer et entretenir par tous temps.
8) Le service des autres
Le scoutisme veut former des citoyens utiles aux autres. Il prépare les enfants et les jeunes par des
actions individuelles (la fameuse BA, bonne action quotidienne) et des activités collectives : on
peut ainsi voir les guides et scouts donner un peu de joie dans un hôpital ou une maison de
retraite, nettoyer les plages souillées par la pollution, replanter les forêts dévastées, nettoyer les
maisons inondées, etc.
9) Des moyens simples
Pour être accessible à tous, le scoutisme se contente de moyens simples. Il montre aux enfants et
aux jeunes qu’on peut vivre heureux, même sans confort. Un sac à dos, de bonnes chaussures,
de la bonne humeur suffisent pour une activité scoute.
10) L’encadrement:
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L’encadrement se compose de chefs jeunes, très jeunes parfois, bénévoles et enthousiastes !
Une formation de qualité leur est dispensée, mais les parents ne remercieront jamais assez leur
dévouement.
Les grands scouts dans l’histoire
On juge l’arbre à ses fruits me direz vous, alors quels sont les grands scouts qui nous ont marqués ?
Permettez moi de n’en citer que quelques uns
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Neil Armstong qui était scout, a envoyé sur la lune l’insigne du scoutisme mondial.
Guy de Larigaudie : il sillonne le Canada et les Etats-Unis, pays qu’il traversera par trois
voies principales : la route d’est en ouest, de New-York vers Los Angeles; la route des Bois
Rouges le long des côtes du Pacifique ; la route du Nord, par la grande Prairie (les
Américains pensaient la chose infaisable). Mais surtout, entre août 1937 et mars 1938, il
réalise la première liaison automobile entre Paris et Saïgon, parcourant une distance de
22.000 km avec son ami scout Roger Drapier, dans une vieille Ford T. Il meurt en mai 1940, à
32 ans « J'avais tellement la nostalgie du ciel et voilà que la porte va bientôt s'ouvrir .
J'avais rêvé de devenir un saint et d'être un modèle pour les louveteaux, les scouts et les
routiers. » trouvera-t-on sur son corps.
Marcel Callo. qui fit sa Promesse en 1934. arrêté pour trop catholique Il sera conduit dans
les camps de concentration 10 ans plus tard à cause de sa foi, où il apportera une lumière
dans la nuit de chacun. Il fut béatifié par Jean-Paul II.
Père Guy Gilbert et Madeleine Delbrel qui ont voué leur vies sur le terrain.
Serge Dalens, Jean Louis Foncine célèbres pour leurs romans et Pierre Joubert pour ses
magnifiques dessins à la gloire de la jeunesse.
Sans oublier les magnifiques vocations de tout ordre que le scoutisme à fait naître, les garçons
sauvés de situations difficiles etc.
Et demain, vers quelle forme de scoutisme ?
Aujourd’hui, on peut presque dire que le scoutisme n’est pas uni. Il s’oppose même entre
mouvements chrétiens en France : pourquoi ?
Car le débat actuel a son fondement dans la crise du scoutisme qui débute après guerre et qui
voit s’affronter deux modes de présence au monde des catholiques. Œuvrer en scout chrétien
revient d’abord pour les uns à améliorer la vie matérielle de son frère avant de lui annoncer le
Christ, pour les autres à le former spirituellement avant tout.
Le scoutisme laïque lui, qui veut se différencier du scoutisme catholique, s’appuie sur la première
forme en voulant former un individu conforme au modèle social, plutôt qu’un individu
responsable de ses actes, capable d’agir librement et en conscience.
S’ajoutant à cela la perte des valeurs chrétiennes en France, la montée de l’Islam, le
déracinement des jeunes d’origine étrangère, vous obtenez une diversité d’origine, de milieux et
de religion pour les jeunes, qui je le rappelle sont tous appelés à être scouts.
Alors, faut-il réformer et adapter une pédagogie qui a fait ses preuves pour des millions de jeunes,
car elle semble inadaptée au monde de demain ?
En conclusion
Et pourquoi le monde de demain ne devrait-il pas s’adapter aux valeurs du scoutisme ?
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Don Bosco disait : occuper vous des jeunes, sinon ce sont eux qui s’occuperont de vous. Le
scoutisme de demain doit donc s’ouvrir au monde qui l’entoure, et éviter l’isolement de la
catégorie sociale (qui est un risque aujourd’hui): Il doit ouvrir le jeu scout aux jeunes et surtout à
ceux qui vivent dans des quartiers difficiles.
Il doit aussi continuer à l’œuvre de la construction de l’Europe et du monde en resserrant les liens
entre les jeunes des différents pays, à travers des échanges, des jumelages, des camps
internationaux.
L’éducation scoute propose une alternative au mal de vivre, à l’incivilité et à l’individualisme qui
gagnent la société actuelle. En valorisant le sens des responsabilités, le service des autres et le
souci du bien commun, la vie en équipe, il facilite l’apprentissage des règles de la vie sociale et
prépare les jeunes à y jouer un rôle actif.
Tous les jeunes y sont appelés. Et c’est à nous, parents et anciens scouts de les y conduire, fort de
notre expérience pour leur permettre de recevoir ce que le scoutisme nous a transmis : comment
devenir un homme ou d’une femme libre, responsable, oeuvrant pour Dieu, et qui reste tout au
long de sa vie « SEMPER PARATI » !
Fraternel Salut Scout
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Gérard de Boisboissel
O Lo Lê, un journal illustré pour les petits Bretons
par Christophe Carichon ( Centre de Recherche Bretonne et Celtique)
Introduction
En novembre 1940, le premier numéro d’O lo Lê “ journal illustré des petits Bretons ” sort de
l’imprimerie des Éditions du Léon à Landerneau dans le Finistère. Les trois syllabes de son nom,
bientôt célèbre dans toute la Bretagne et au-delà, sont la reprise du cri de ralliement des petits
pâtres de Haute Cornouaille qui, de collines en vallées se répondaient en gardant leurs
troupeaux1. Les fondateurs, Herri et Ronan Caouissin, sont des nationalistes bretons connus. Ce
sont eux qui vont faire du journal un véritable emblème pour la foi et la Bretagne tout au long des
132 numéros de cette publication sans pareil. Original en effet car O Lo Lê est un journal
régionaliste pour enfants comme il n’en exista pas ailleurs en France. Original aussi car
davantage qu’un illustré, O Lo Lê, comme Cœurs vaillants, donnera naissance à un mouvement
de jeunes. Original enfin car le projet d’O Lo Lê lui survivra bien après la disparition de l’illustré.
Pour comprendre l’histoire d’O Lo Lê, il faut tout d’abord à reposer rapidement les enjeux du
mouvement breton avant-guerre en insistant sur sa variante catholique ; puis, nous décrirons le
premier O Lo Lê au travers de la personnalité de son principal rédacteur, de l’idéologie qu’il
propage et de l’Ordre de l’espérance de Bretagne qui en est issue. Enfin, se pose la question de
la survivance du journal après la guerre2.
Herri Caouissin (à gauche) à Pont-L’Abbé en 1946
Genèse
À la veille de la Deuxième guerre mondiale, ce que l’on appelle le “ mouvement breton ” est
divisé en de nombreuses chapelles, l’on n’ose dire cryptes, qui l’affaiblissent. Régionalistes,
séparatistes, fédéralistes, autonomistes, nationalistes, de droite et de gauche ; catholiques,
anticléricaux ou païens, tous luttent en tout cas contre une influence française et républicaine
1
Voir O Lo Lê, n° 1, 15 novembre 1940, p. 1 et n° 2, 1er décembre 1940, p. 3.
2
Plusieurs mémoires de maîtrise ont été consacrés à O Lo Lê : LE GUEN Roland, O Lo Lê, un périodique nationaliste et
chrétien pour les jeunes Bretons, Brest, Université de Bretagne occidentale, 1984, RAT Isabelle et LE TEXIER A.H, O Lo Lê,
Université de Vannes, 1989 et FOUCRÉ Gwenaël, Les frères Caouissin, Bretons sans entrave. Sur la route au but lointain,
Rennes, Université de Haute Bretagne, 1990. Voir aussi DENNI Michel, “ O Lo Lê un illustré breton sous l’occupation ”, Le
collectionneur de bandes dessinées, n° 83, été 1997, p. 32-39.
15
qu’ils jugent trop présente. Tous travaillent à la défense d’une identité retrouvée : celle de la
Bretagne. Aux côtés de la déjà respectable Union Régionaliste Bretonne (URB) fondée à
Morlaix en 1898 par des lettrés et des notables, de jeunes militants ont lancé, dans les années
1920-1930, un certain nombre de groupuscules beaucoup plus engagés politiquement. Parmi
ceux-ci, le Parti National Breton (PNB), formé en 1931, est l’un des plus radicaux et celui dont
l’audience est la plus importante. Parallèlement aux partis et groupes politiques, un certain
nombre de militants bretons préfèrent œuvrer dans le domaine culturel et linguistique. Bien sûr,
il n’y a pas de cloisonnement entre les politiques et les culturels et les échanges sont nombreux.
La priorité des uns et des autres n’est cependant pas toujours la même.
Ici, un homme se distingue : l’abbé Jean-Marie Perrot (né en 1877), fondateur en 1905 du
Bleun-Brug (Fleurs de bruyère), une manifestation culturelle pour la diffusion de la langue et de
la culture bretonnes, et directeur de la revue bretonnante Feiz ha Breiz (Foi et Bretagne) est la
figure emblématique du mouvement catholique breton. Si l’abbé Perrot est en contact avec
toutes les familles du mouvement breton, il n’en reste pas moins prêtre catholique avant tout.
Cela n’empêche pas son évêque Mgr Adolphe Duparc, pourtant favorable à la matière de
Bretagne, d’entretenir avec lui des relations souvent conflictuelles. En 1930, nommé recteur de
Scrignac, petite paroisse “ rouge ” reculée des Montagnes d’Arré, il en fait le quartier général
de son action catholique et bretonne.
C’est en 1932 que le bouillant recteur de 55 ans rencontre deux jeunes celtisants qui ont le
projet de rendre accessible aux plus jeunes la culture bretonne renaissante. Herri et Ronan
Caouissin, respectivement âgés de 19 et 18 ans, arrivent de Paris où ils ont découvert, en exil,
leurs racines et la bande dessinée en livrant quelques dessins pour Cœurs vaillants. L’abbé
Perrot est tout à fait séduit par l’enthousiasme des deux garçons et note avec intérêt leurs dons
artistiques dans le domaine de l’illustration. Très vite, Herri devient le secrétaire particulier de
l’abbé et à deux ils lancent une publication bretonnante pour la jeunesse : Feiz ha Breiz ar
vugale (Foi et Bretagne des enfants) dans laquelle le jeune dessinateur propose la première
bande dessinée en langue bretonne : Per ar c’holin (Pierre Le lapin). L’audience de cette
petite revue, d’un tirage d’environ 2 000 exemplaires, reste cependant limité au diocèse de
Quimper et Léon. En 1937, le jeune homme réussit un bon tour en publiant avec Léone Calvez
un virulent pamphlet contre l’héroïne française de La Semaine de Suzette : Bécassine vue par
les Bretons3. Enfin, les frères Caouissin ont racheté une imprimerie à Landerneau, utile moyen
de diffusion de leurs productions.
L’Armistice de juin 1940 range la Bretagne dans la zone occupée. Ce bouleversement
géopolitique majeur a des conséquences importantes sur l’ensemble du mouvement breton.
Beaucoup d’entre les militants voient dans l’effondrement de la République et dans
l’avènement du régime de Vichy une chance pour la Bretagne : la politique des “ petites
patries ” défendue par le maréchal Pétain convient aux régionalistes. D’autres, minoritaires,
jugent que ce n’est pas suffisant et optent sans état d’âme pour une collaboration active
avec l’Allemagne. C’est dans ce contexte, à l’automne, que les frères Caouissin lancent un
nouveau journal pour enfants et adolescent. Toutefois, si l’esprit est le même que Feiz ha Breiz
ar vugale, les imprimeurs de Landerneau veulent cette fois-ci toucher la masse des petits
Bretons et non plus seulement les bretonnants.
L’illustré des petits Bretons
Davantage que son frère Ronan, Herri Caouissin est le principal maître d’œuvre d’O Lo Lê4. Bien
introduit dans la presse enfantine chrétienne, le militant culturel breton entretient des relations
cordiales avec l’abbé Courtois et plusieurs dessinateurs connus à Cœurs Vaillants dont Benjamin
3
Pleyber-Christ, Edition Ronan, 1937.
4
Pour les détails biographiques, voir TRANVOUEZ Yvon, “ Herry Caouissin ”, dans LAGRÉE Michel (dir.),
Dictionnaire du monde religieux de la France contemporaine, La Bretagne, Paris-Rennes, Beauchesne-Institut culturel de
Bretagne, 1990, p. 68-69 et LE NAIL Jacqueline et Bernard, Dictionnaire des auteurs de jeunesse de Bretagne, Gourin, Éditions
des Montagnes noires, 2001, p.39-41. Nous utilisons aussi les entretiens qu’Herri Caouissin nous a accordés entre 1999 et 2001.
16
Rabier, Étienne Le Rallic et Hergé. En Bretagne, malgré son jeune âge, il est le secrétaire du
respecté abbé Perrot et se trouve tôt mêlé au mouvement des Seiz Breur (les sept frères), une
confrérie d’artistes et d’artisans œuvrant pour un renouveau artistique populaire breton entre
tradition et modernité5. Caouissin s’intéresse à bien d’autres domaines dont la littérature, le
cinéma le théâtre6 et même la mode féminine. Ce touche à tout génial prend aussi le temps de
se marier avec une jeune infirmière de deux ans sa cadette, ancienne Guides de France mais
aussi militante active du Parti national breton, Jeanne-Louise Leclerc, qui lui assure un soutien sans
faille dans toutes ses entreprises.
C'est en profitant de la perte de vitesse et de la disparition de nombreux titres de la presse
enfantine française dans les kiosques et en bénéficiant de la bienveillance des autorités
d’occupation pour le régionalisme breton en général, que Caouissin peut imprimer et vendre O
Lo Lê. Ce premier numéro de quatre pages inaugure plusieurs rubriques qui, pendant quatre ans,
font la joie de milliers d’enfants : Des histoires courtes en bande dessinée, un conte régional en
rapport avec le temps liturgique, plusieurs histoire en épisodes, une vie de saint breton, des
reportages et quelques jeux. Si les textes ont de l’importance, O Lo Lê est surtout un illustré et c’est
par l’image que Caouissin veut conquérir son public. Dès ce numéro, le Breton s’adjoint le
concours de son ami Étienne Le Rallic. Ce dernier, en illustrant Une grande et belle histoire, celle
de notre Bretagne entame alors une collaboration qui ne cessera qu’à la fin du journal. Pour
Caouissin, Le Rallic et Benjamin Rabier sont ses meilleures cartes de visite : dessinateurs connus et
non marqués politiquement en Bretagne, ils sont le “ miel7 ” qui doit attirer les petits lecteurs et
rassurer les évêques et le clergé dont une bonne part se défie d’un nationalisme trop radical. Le
Rallic, dessinateur maison d’O Lo lê, prête volontiers sa plume et ses couleurs à de très
nombreuses histoires inédites propres à séduire garçonnets et fillettes comme Corsaire des îles
(1941) Gaït la cavalière du Texas (1941), les loups de Coatmenez (1940-1941), Goneri, le filleul de
Cadoudal (1941-1944) et La croisade des loups (1943-1944) sans compter les histoires plus courtes,
les couvertures et les publicités.
Vendu en kiosque jusqu’à Pâques 1941, O Lo lê est ensuite uniquement servi par
abonnement individuel ou groupé. Comprenant entre 2 et 8 pages, le journal a un rythme de
publication et un tirage irréguliers : si la plupart des numéros sortent des rotatives de Landerneau
à 3 000 exemplaires, certains numéros spéciaux (Pâques, Noël, Saint-Yves, Sainte-Anne) tirent à
plus de 10 000 exemplaires. Pour Caouissin, “ aucune ville, aucun village, aucun hameau ne doit
ignorer Ololê8. ” Le journal tient en particulier au soutien du clergé enseignant et des évêques.
Conscients également du profit que ceux-ci peuvent tirer d’O Lo Lê, plusieurs d’entre eux
affirment publiquement leur soutien dans les pages du journal : ainsi Mgr Roques, archevêque de
Rennes, assure t-il O Lo lê de sa “ sympathie (…) pour l’œuvre entrepris auprès de l’enfance
bretonne9” tandis que Mgr Duparc, évêque de Quimper et de Léon, nomme un censeur
ecclésiastique auprès d’O Lo lê qui, fort de ce blanc seing, acquiert une respectabilité au-delà
de ses espérances10. L’abbé Courtois lui-même encourage personnellement l’entreprise d’Herri
Caouissin persuadé qu’O Lo Lê rempli en partie le vide laissé par Cœurs Vaillants en zone nord11.
De plus, l’imprimerie des Caouissin édite plusieurs ouvrages des aventures passées dans le
5
Voir LE COUÉDIC Daniel et VEILLARD Jean-Yves, Ar Seiz Breur 1923-1947, la création bretonne entre tradition et
modernité, Rennes, Terre de Brume/Musée de Bretagne, 2000.
6
Il suit quelques temps les activités des Comédiens routiers de Léon Chancerel (1886-1965), disciple de Jacques Copeau,
à l’origine de “ l’Art dramatique scout ” ou “ théâtre scout ”, forme d’expression théâtrale très particulière puisant son inspiration
aussi bien dans le Moyen Age chrétien que dans les techniques les plus modernes (jeux d’ombres et de lumières, décors
minimalistes).
7
Entretien avec Herri Caouissin, Lorient, 17 avril 1999.
8
O Lo lê, n° 63, 8 mars 1942, p. 4.
9
O Lo lê, n° 33, 27 juillet 1941, p. 3.
10
À grand renfort de publicité, O Lo Lê annonce la nouvelle à toutes les directions des écoles catholiques de Bretagne.
Voir le fac-similé du courrier dans LE GUEN Roland, op.cit, annexe I.
11
Entretien téléphonique avec Herri Caouissin, 2 novembre 1999.
17
journal : à la fin de l’année 1943, une douzaine de livres sont proposés aux lecteurs12. Enfin, O Lo
Lê se voit attribuer une émission radiophonique épisodique sur les ondes de Rennes-Bretagne13.
La série “ Une belle histoire, celle de notre Bretagne ” contée par Herri Caouissin et illustrée
par le Rallic donne un bon résumé de l’idéologie prônée par O Lo Lê. Loin de la vision jacobine
officielle, Caouissin veut remettre les choses à leur place, c’est à dire raconter l’histoire cette fois
du point de vue breton. La Bretagne d’O Lo Lê est d’abord celle d’un âge d’or perdu, des
guerriers et des saints du temps jadis : C’est la Bretagne du roi Arthur et de sa cour légendaire, de
Warrok comte de Vannes repoussant les Francs et les contraignant à “ respecter la Bretagne14 ”,
de Nominoë “ Père de la Patrie ” écrasant les troupes de Charles Le Chauve à la bataille de
Ballon (845), d’Alain Barbe-Torte reprenant Nantes et chassant les Normands de la péninsule. Puis
la longue guerre de succession de Bretagne (1341-1365), plus qu’un simple épisode de la guerre
de cent ans, est le conflit qui permet aux Bretons de recouvrer leur indépendance pendant plus
d ‘un siècle jusqu’à la cruelle défaite de Saint-Aubin du Cormier (1488) et le rattachement du
duché aux hermines au royaume des lys en 1532. De la Bretagne “ province ”, Caouissin et Le
Rallic retiennent les marins Porzmoguer, Cartier, Duguay-Trouin ou René Madec, qui font
connaître le nom breton au-delà des mers, les missionnaires Le Nobletz et Maunoir et les
défenseurs des libertés bretonnes que sont les révoltés au bonnet rouge, les conjurés de
Pontcallec et les chouans de Cadoudal. Enfin de l’époque contemporaine on relève Surcouf,
Laënnec et Chateaubriand, les gueux de l’armée de Bretagne sacrifiée par Gambetta au camp
de Conlie en 1871 et les celtisants Luzel, Brizeux, Le Gonidec, La Villemarqué et La Borderie qui
font renaître une culture enfouie depuis longtemps.
Mais pour O Lo Lê, la Bretagne ne se résume pas seulement à un passé révolu, si glorieux
soit-il. Caouissin, on l’a dit, est proche du courant artistique des Seiz Breur qui veulent redonner
une place à la culture bretonne “ entre tradition et modernité ”. Alors, pour ses petits lecteurs, il
complète son tableau historique par un panorama du renouveau breton initié par les collecteurs
du siècle dernier et confirmé par les artistes des années 1930. Au fil des numéros, à côté des
chants anciens, des contes et des légendes, les Ololeiz (lecteurs d’O Lo lê) découvrent la
musique traditionnelle pour biniou et bombarde, la lutte bretonne, la mode, là encore dans un
esprit totalement “ art nouveau ” si l’on juge par les costumes bretons “ modernes ” proposés à la
confection des couturières en herbe. Enfin, le combat pour la langue bretonne prend une
dimension toute particulière dans ce journal dont c’est l’un des principaux chevaux de bataille.
Engagé certes, contre-révolutionnaire sans doute, O Lo Lê ne peut cependant pas être
considéré comme une courroie de transmission du Parti national breton ni un Téméraire
armoricain à la solde de l’occupant15. C’est par rapport aux autorités de Vichy que l’illustré se
doit en tout cas d’être prudent et d’adopter une ligne éditoriale irréprochable. L’école libre en
Bretagne et les évêques ne le permettraient pas. O Lo Lê se fait l’écho de déclarations du
maréchal Pétain et la photo du chef de l’État est même reproduite plusieurs fois. Au printemps
1941, le journal ne manque pas l’occasion d’inciter ses lecteurs à souhaiter une “ Bonne fête
Monsieur le Maréchal ” à l’occasion de la Saint-Philippe tandis que les rédacteurs eux-mêmes se
font les portes-parole de “ 10 000 petits Bretons ” en faisant parvenir sur une carte bilingue en
onciales d’or “ leurs vœux d’heureuse fête au grand Maréchal Pétain, chef vénéré et bien-aimé
de la France ” tout en l’assurant, l’intérêt de la cause n’étant pas perdu de vue, de leur
“ confiance dans la renaissance de leur chère province de Bretagne, espérant bientôt
apprendre avec joie à l’école l’histoire et la langue de leurs aïeux16. ” Car bien sûr, ce qui
intéresse O Lo Lê dans la politique de Vichy n’est pas tant la France que la résurrection des
petites patries. Quelques numéros plus tard, l’illustré va encore plus loin en affirmant sans rire qu’
“ O Lo Lê a été créé pour répondre au désir du Maréchal Pétain de refaire la France dans
l’épanouissement des provinces17. ” La lecture de cette prose, trop servile pour être honnête, ne
12
O Lo lê, n° 117, 15 décembre 1943, p. 3.
13
O Lo lê, n° 66, 29 mars 1942, p. 3.
14
O Lo Lê, n° 2, 1er décembre 1940, p. 4
15
ORY Pascal, Le petit nazi illustré, Vie et survie du Téméraire (1943-1944), Paris, Éditions Nautilus, 2003.
16
O Lo Lê, n° 20, 27 avril 1941, p. 1 et n° 21, 4 mai 1941, p.1.
17
O Lo Lê, n° 33, 27 juillet 1941, p. 7.
18
trompe personne dans le Landerneau nationaliste et Caouissin reconnaîtra bien volontiers 60 ans
plus tard avoir fait un “ coup ” médiatique et politique.
S’adressant à des enfants, O Lo Lê veut offrir à ses lecteurs plus de joie que de peine en
ces temps troublés. Mais, la guerre rattrape les bons sentiments. Dans plusieurs numéros, les Ololeiz
sont invités à participer au “ Noël des prisonniers bretons18 ; ” puis ce sont les réfugiés de Nantes,
Rennes ou Brest qui retiennent l’attention du journal qui apporte son soutien à ces petits Bretons “
loin du nid19. ” Les autres évènements internationaux, en revanche, s’ils n’ont pas de rapport avec
la Bretagne ou la religion sont occultés. Roland Le Guen, dans son mémoire de maîtrise sur O Lo
Lê précise que, sur certains points idéologiques, O Lo Lê était sans originalité par rapport à la
presse française de droite traditionnelle : anticommunisme classique avec la publication en
épisode, à partir du printemps 1942, de “ Tintin et Milou au pays des soviets ” déjà paru en 1930
dans Cœurs vaillants ; anglophobie accentuée par l’image du britannique ennemi héréditaire et
l’évocation de la résistance irlandaise des années 1910-1920; antisémitisme bien réel, sans être
toutefois obsessionnel, dans certaines histoires20.
À partir de 1943, le journal se fait plus militant : la guerre est présente dans toute sa
brutalité. Les bombardements alliés qui touchent les villes bretonnes et tuent les enfants “ à huit
mille pieds dans le ciel bleu21 ”, “ (les) inutiles massacres d’innocents, (la) traîtrise des coups portés
dans le dos d’adversaires désarmés, (les) assassinats froidement prémédités, (les) prétendus actes
de guerre sans gloire et sans grandeur22 ” sont dénoncés sans détour. La virulence du propos ne
doit pas étonner. Le 12 décembre 1943 en effet, au retour de sa messe dite au matin en une
chapelle de sa paroisse de Scrignac, accompagné de son seul enfant de chœur, l’abbé YannVari Perrot est tombé sous les balles d’un militant communiste. Cette mort est comme un coup de
tonnerre dans le microcosme celtisant. Herri Caouissin, son fils spirituel, va aussitôt en faire un
“ apôtre ” et un “ martyr ”23 et le modèle à suivre pour les jeunes lecteurs.
L’ Urz Goanag Breiz
Revenons quelques années en arrière : En 1935, Herri Caouissin et l’abbé Perrot avaient été
reçus au Pays de Galles par l’Eisteddfod, organisation culturelle similaire au Bleun-Brug breton. Là,
ils s’étaient rendu compte de la force du renouveau celte chez leurs frères de Cambrie24. Surtout,
ils avaient rencontré un groupement fort de 20 000 enfants sensibilisés à la culture de leurs pères,
l’Urdd Gobaith Cymru (l’Ordre de l’espérance du Pays de Galles)25. Très impressionnés, ils avaient
rêvé de lancer un mouvement similaire en Bretagne mais cela n’avait pas été possible avant la
guerre. L’aventure d’O Lo Lê allait donner corps au projet des deux amis. À Noël 1940, O Lo Lê
commence la publication d’un roman d’aventure de Gilles Le Denays (pseudonyme de Jeanne
du Guerny dite aussi Jeanne Coroller-Danio), Les Loups de Coatmenez, qui raconte la quête de
jeunes Bretons à la recherche du trésor des Ducs de Bretagne et la découverte de leurs racines.
L’intérêt de l’intrigue, les dessins de Le Rallic et aussi la force de persuasion des rédacteurs en
font succès immédiat : les enfants s’identifient aux héros de l’histoire. Incités à se réunir en équipe
de “ loups ” pour les garçons et “ d’hermines ” pour les filles, beaucoup se transforment en
propagandistes actifs de Feiz ha Breiz. Quelques années plus tard, le phénomène est tel que
18
Voir par exemple O Lo Lê, n° 90, 29 novembre 1942, p. 2.
19
O Lo Lê, n° 65, 22 mars 1942.
20
Roland Le Guen, op.cit, p. 215 sq.
21
O Lo Lê, n° 102, Sain-Yves 1943, p. 4.
22
O Lo Lê, n° 129, 4 mai 1944, p. 44. Il s’agit en fait d’une reprise d’un article de Yann Fouéré, directeur du quotidien
régionaliste La Bretagne.
23
O Lo Lê, n° 118, 25 décembre 1943 et tous les numéros suivants.
24
Voir POISSON abbé Henri, L’abbé Jean-Marie Perrot, fondateur du Bleun-Brug (1877-1943), Rennes, Plihon, 1955, p.
174-175.
25
Entretien avec Herry Caouissin, Lorient, 17 avril 1999. Voir aussi “ Chez nos Frères les Gallois, Urdd Gobaith
Cymru ”, O Lo Lê, n° 122, 15 février 1944, p. 1-2.
19
Caouissin lance très officiellement dans le numéro de la Saint-Yves 1943 un mouvement de jeunes
de 8 à 17 ans dont le nom est directement copié sur celui de l’œuvre galloise : L’Urz Goanag Breiz
(Ordre de l’espérance de Bretagne). Son but : “ inculquer à la jeunesse bretonne la conscience
et la fierté de son âme, de sa race, de sa langue et de ses traditions ancestrales26. ” À cette
époque, l’administration militaire allemande a depuis longtemps interdit les associations de
jeunes affichant un caractère trop patriotique (scoutisme par exemple) et même si ceux ci
subsistent clandestinement au sein d’associations sportives, ils n’ont plus pignon sur rue. L’ Urz
Goanag Breiz, qui revendique un attachement à la Bretagne et des activités culturelles, ne peut
être considéré comme un mouvement dangereux par l’occupant.
Pour être admis dans le mouvement, que Caouissin ambitionne comme un authentique “ ordre
de chevalerie celtique27 ”, il faut réunir un certain nombre de conditions : être Breton, lecteur ou
lectrice d’Ololê, prononcer la “ Promesse de saint Yves ” et passer un “ examen culturel breton. ”
La réussite des deux dernières conditions donne le droit au port des insignes: une croix celtique
blanche herminée auréolée d’or en métal et un écusson en tissus marqué Urz goanag Breiz et O
Lo Lê. Plusieurs équipes naissent en Bretagne et ailleurs chez les réfugiés (à Angers, La Flèche,
Paris, Le Mans). Chacune se donne le nom d’un héros ou d’un saint breton : Anne, Yves, Corentin,
Malo, Richemont, Calloc’h, Cadoudal. Après la mort de l’abbé Perrot, quelques équipes se
recommandent du martyr de la cause catholique et bretonne. Il est difficile de connaître avec
précision le nombre de membres de l’Ordre de l’espérance de Bretagne mais il est certain que la
plupart des villes bretonnes ainsi que de nombreux bourgs ruraux eurent leurs loups et leurs
hermines. Pour réunir et stimuler ses troupes Caouissin envisage de tenir un camp d’été. Un officier
de marine, ancien chef scout, membre du Comité consultatif de Bretagne, le capitaine de
corvette Robert Le Masson prépare le programme du camp28. Une fervente militante nationaliste,
la comtesse Béatrix de Rohan-Chabot accepte avec joie de recevoir les jeunes gens dans le
parc de son château de Bonnefontaine à Antrain-sur-Cousnon (Ille-et-Vilaine). L’artiste Xavier de
Langlais, dont les enfants sont membres du mouvement, dessine un bel uniforme : chemise verte,
culotte ou jupe noir, foulard blanc, mais le tissu manque pour le réaliser en quantité29. Mais,
devant les risques de bombardement sur les voies de chemin de fer et les agglomérations, les
parents prennent peur et le camp est annulé. L’Ordre de l’espérance de Bretagne ne résiste pas
à cet échec.
Quant au journal, il ne survit que quelques mois encore. La méfiance de la population vis à vis des
thèses nationalistes de plus en plus extrêmes, la difficulté d’O Lo Lê à se démarquer des plus
radicaux, les problèmes matériels permanents (panne d’électricité, manque de papier, aspect
financier) sont aussi en prendre en compte. En mai 1944, le dernier numéro d’O Lo Lê était
distribué gratuitement aux enfants et deux mois plus tard, Jeanne du Guerny, qui avait donné à
O Lo Lê Les Loups de Coatmenez et La croisade des Loups, était assassinée par des résistants
après plusieurs autres militants bretons. L’étau se resserrait sur les celtisants. À la Libération,
l’imprimerie de Landerneau est mise sous séquestre, les frères Caouissin sont arrêtés, internés,
jugés mais, finalement, bénéficient d’un non-lieu. Ils sont tout de même contraints de s’exiler avec
leurs familles et s’installent en région parisienne.
26
Journal officiel, 25 juin 1943. Les statuts avaient auparavant été déposés à la préfecture de Quimper le 27 mai 1943.
Document communiqué par Jean-Jacques Gauthé.
27
O Lo Lê, n° 102, Saint-Yves 1943, p. 7.
28
Robert Le Masson (1900-1952), ancien élève de l’école polytechnique, sert sur le Dunkerque pendant la guerre. En
poste à Lorient en 1943-1944, il est alors connu comme un proche des nationalistes. État général des services du capitaine de
vaisseau Le Masson, Service historique de la marine, Vincennes.
29
D’autres noms représentant les tendances les plus diverses du mouvement breton sont repérés au fil du courrier des
lecteurs d’O Lo Lê : la fille de Yann Sohier (1901-1935), instituteur laïc fondateur d’Ar Falz (La faucille), partisan de
l’enseignement du breton dans les écoles publiques; le fils ( ?) de Yann Bricler, premier militant nationaliste breton abattu par la
résistance en 1943, les enfants des famille du Guerny, Chevillotte, de Kermenguy proches du PNB.
20
La survivance
C’est de Paris, des cercles bretons de l’émigration, que va venir la renaissance de l’esprit Feiz ha
Breiz pour les jeunes30. Le cadre va cependant être très différent puisque c’est au sein cette fois
du scoutisme catholique qu’un nouveau projet prend corps. En janvier 1946, un jeune homme
d’origine bretonne et son épouse, Pierre et Lucienne Géraud, chef et cheftaine aux Scouts de
France, créent le Centre scout d’expression bretonne ou Urzh Skouted Bleimor ( Ordre des scouts
Bleimor ) bientôt connu sous le simple nom de Bleimor (Loup de mer), qui fut le pseudonyme du
poète bretonnant Yann-Ber Calloc’h (1888-1917). Le couple fréquente assidûment les milieux
bretons de la capitale et recrutent quelques garçons et filles de plus de 17 ans avec lesquels ils
s’initient à la danse, au chant, à l’art dramatique et tout ce qui peut se rapporter à la matière de
Bretagne. Cette même année, lors d’une représentation théâtrale, ils rencontrent Caouissin et son
épouse. Ceux-ci, intéressés par le projet y voit “ la relève, la reprise du flambeau31” d’autant plus
que les Géraud sont des inconnus et ne sont pas compromis dans le mouvement breton où ils
s’empresseront de les introduire. Pour les chefs scouts, qui furent abonnés à O Lo Lê dès 1942,
Caouissin représente un allié de poids et un modèle pour leur entreprise. Cependant, même si les
similitudes et les rappels sont volontairement nombreux, il n’y a pas de filiation effective entre les
deux œuvres32. L’initiative des Géraud n’est cependant pas isolée et en Bretagne même, on
constate que les chefs et cheftaines du scoutisme catholique font beaucoup d’efforts pour
sensibiliser leurs jeunes à la culture bretonne.
Tout en accompagnant le scoutisme Bleimor pendant quelques années, Herri Caouissin
retrouve du travail dans la presse enfantine chrétienne (Cœurs vaillants, Lisette…). Passionné par
le cinéma, il est aussi devenu conseiller breton sur le tournage de Dieu a besoin des hommes de
Jean Delannoy et assure les mêmes fonctions au niveau religieux pour Lucrèce Borgia de
Christian-Jacques. Avec ses frères, il fonde enfin la première firme cinématographique bretonne,
Brittia-Films, en 1952. La société réalise deux longs métrages (Le mystère du Folgoët, L’enfance de
Théodore Botrel) et quelques courts-métrages mais disparaît au bout de quelques années.
Pendant de longues années le nom d’Herri Caouissin n’est associé à aucun grand projet
culturel jusqu’à cette année 1970 où, à la demande d’amis et d’anciens, il ressuscite O Lo Lê sous
le nom de L’appel d’O Lo Lê, illustré culturel des jeunes et des familles de Bretagne. Toujours
engagé pour la cause bretonne, le nouveau journal, ouvre davantage son lectorat aux autres
cultures celtes et épouse les combats de son époque. Aux Pâques sanglantes de Dublin (1916) a
succédé la guerre civile en Ulster et L’Appel d’O Lo Lê vient en aide aux enfants traumatisés de
Belfast33. Le combat pour la protection de la nature et la lutte contre la pollution tiennent aussi
une large place dans le nouvel O Lo Lê qui part en guerre contre l’abatage outrancier des talus
et les marées noires à répétition qui, depuis la fin des années 1960, endeuillent les côtes
armoricaines. Renouveau de la culture celte oblige, la revue est aussi sur les fronts de la musique
bretonne, de la langue et de la défense du choix des parents à donner des prénoms bretons à
leurs enfants. Enfin, plus polémiste, L’appel d’O Lo Lê intervient dans le débat du rattachement
de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Le militantisme reste cependant prudent car la rédaction
n’oublie le contexte particulièrement tendu depuis la reprise des attentats autonomistes par le
Front de libération de la Bretagne (FLB) et l’enfermement des militants politiques bretons.
Pour Caouissin, les anciens de la première génération ont répondu présent si l’on en croit le
courrier des lecteurs et les listes de donateurs ou l’on reconnaît les noms de Béatrice de RohanChabot qui offre plus de dix abonnements par an, de Xavier de Langlais, de Yann Fouéré, ancien
directeur de La Bretagne, du chanoine Mevellec, directeur du Bleun-Brug et de nombreuses
autres familles. Si les Bretons de l’émigration soutiennent assez franchement O Lo Lê, il n’en va pas
30
Sur la communauté bretonne de la capitale, voir CALVÉ Armel, Histoire des Bretons de Paris, Spezet, Coop Breizh,
1994.
31
CAOUISSIN Herry, Souvenirs de Bleimor, notes dactylographiées, s.d., p.1
32
Pour approfondir ce point, voir l’article très documenté de GAUTHÉ Jean-Jacques, “ Scoutisme et identité bretonne : les
scouts Bleimor, d’Ololê à Sturier ”, dans TRANVOUEZ Yvon (dir.), Scoutisme en Bretagne, Scoutisme breton ?, Brest, Centre
de recherche bretonne et celtique, 1997.
33
L’appel d’O Lo Lê, n° 15, 1er trimestre 1972, p. 2 et n° 17, 2e trimestre 1972, p. 13.
21
de même des militants de Bretagne franchement marqués à gauche et pour lesquels les thèmes
défendus par le journal ne correspondent aucunement à leur vision du monde et de la Bretagne.
Amers et déçus, Caouissin fustige “ les indifférents, les satisfaits d’eux-mêmes, les “ rêveurs ”, les
palabreurs, (…) qui n’ont pas fait don à Ololê d’un gwenneg (d’un sou) 34 ” et regrette “ un rêve
qui aurait du être réalité, ” celui de 100 000 lecteurs proclamant leur foi en Feiz ha Breiz35. Mais ce
vœu était sans doute d’un autre temps.
Conclusion
Retiré à Lorient, dans les années 1970, Herri Caouissin vivait au milieu de ses souvenirs et ses
archives. Son frère Ronan décédé en 1986, son épouse Jeanne-Louise en 1992, il restait l’un des
derniers témoins du vieux Feiz ha Breiz de l’abbé Perrot dont le portrait peint par Xavier de
Langlais trônait au- dessus de son bureau et dont la cape sanglante du 12 décembre était
conservée comme une insigne relique. La Bretagne contemporaine avait tout de même fini par
reconnaître l’œuvre du vieux lutteur et l’Institut culturel de Bretagne l’avait décoré du collier de
l’Ordre de l’Hermine en 1993. Quelques années plus tôt, le célèbre groupe de folk breton Tri Yann
avait même repris le refrain O Lo Lê pour une chanson de l’un de ces albums36. Mais dans les
dernières années de sa vie, l’une des grandes joies d’Herri Caouissin fut la réédition de plusieurs
des productions d’O Lo Lê après sa rencontre avec Michel Gurnaud un éditeur d’origine franccomtoise installé en Bretagne spécialisé dans la littérature enfantine chrétienne. Celui- avait été
séduit par ce “ miel ” qui avait fait le délice des petits Bretons cinquante ans auparavant. En 1995,
La gazette de l’Orme rond, revue de liaison de l’éditeur, commençait donc la publication de
l’histoire de Bretagne illustrée par Le Rallic. La même année, sortait le roman phare d’O Lo Lê, Les
Loups de Coatmenez puis suivaient L’Histoire de notre Bretagne de Jeanne Coroller-Danio et
Jeanne Malivel (1997) et La croisade des Loups (2000) tandis que de nombreux contes d’O Lo Lê
retrouvaient une nouvelle jeunesse37.
Incontestablement, par sa qualité, sa modernité et ses engagements, O Lo Lê a marqué
plusieurs générations de celtisants et a représenté une des plus intéressantes productions du
mouvement catholique breton. Cependant, l’illustré et ses rédacteurs ont aussi fait l’objet de
jugements critiques aussi bien de la part de leurs ennemis naturels que de membres du
mouvement breton. C’est là tout le problème de ces catholiques engagés en politiques qui selon
les termes d’Yvon Tranvouez, complétant les réflexions de Maurice Merleau-Ponty, “ ont été et
seront sans doute toujours des nationalistes ambigus38. ” Herri Caouissin, dont le vœu était d’être
“ un chevalier combattant avec dans le cœur Jésus, Marie, et le Gwenn ha Du, ” fut
certainement l’un de ces représentants les plus emblématiques39.
Christophe Carichon, Centre de Recherche Bretonne et Celtique
34
L’appel d’O Lo Lê, n° 9, 1er trimestre 1971, p. 2.
35
L’appel d’O Lo Lê, n° 26, 1er trimestre 1974, p. 2.
36
TRI YANN, “ Sur la fosse au boulot ”, Belle et rebelle, Phonogram, 1990.
37
Tous ces ouvrages sont disponibles aux Éditions Elor, 56 350 Saint-Vincent-sur-Oust.
38
TRANVOUEZ Yvon, “ Les catholiques et la question bretonne ”, dans BOUGEARD Christian (dir.), Bretagne et
identités régionales pendant la Seconde Guerre mondiale, Brest, CRBC-UBO, 2002, p. 302.
39
Herri Caouissin est décédé le 12 janvier 2003. Voir La gazette de l’orme rond, n° 76, septembre 2003 et Le Monde, 21
mars 2003, p. 19.
22
23
Yann-Ber Kalloc'h (Bleimor) 1888-1917
« Yann-Ber Kalloc'h est né à l'île de Groix le 21 Juillet 1888 dans une famille de marins-pêcheurs.
Poète chrétien et barde breton (sous le nom de Bleimor), il écrivit ses premiers textes au petit
séminaire de Sainte-Anne d'Auray. Dès les premières parutions de Dihunamb en 1905, il y apporte
son active collaboration, en faisant paraître, outre une partie des poèmes qui composent Ar en
deulin, des articles, des études historiques et des oeuvres dramatiques écrites en dialecte
vannetais.
A la déclaration de guerre de 1914, Yann-Ber Kalloc'h s'engagea. Nommé aspirant, puis souslieutenant, il trouva la mort le 10 Avril 1917 à l'entrée d'un abri dans une tranchée du bois
d'Urvilliers (près de Saint-Quentin). Criblé d'éclats d'obus, il fut tué sur le coup et enterré au
cimetière de Cerisy. Le 8 juillet 1923, son corps fut ramené à Groix, où il repose désormais.
Pour n'être pas très abondante, l'oeuvre de Kalloc'h, dont le grand intérêt réside dans l'emploi de
la langue et dans un lyrisme admirable, a attiré sur la littérature bretonne l'attention des lettres du
monde entier. Aussi, peut-on considérer Ar en deulin (trad : à genoux) comme l'un des chefsd'oeuvre de la poésie bretonne. » (Présentation de “Ar en deulin” - Editions Kendalc’h, 2003 )
Sul Vask 1917/ Dimanche de Pâques 1917
Cette lettre écrite du front par Yann-Ber Kalloc'h (et traduite du
vannetais en français) est la dernière lettre qu’il ait envoyé à son
ami Yves Le Diberder : il devait mourir en effet deux jours plus tard
le 10 Avril 1917…
« La semaine la plus dure que j'ai passé à la guerre est cette Semaine sainte. Ni maison, ni toit,
sous un temps si rude. Au cours de soixante heures j'ai dormi une heure, et encore nous avons été
réveillés par le froid, toute l'armée couverte de neige. Nous sommes fatigués à en mourir. Quand
finira cette vie ?
Je vous écris du fond d'un bois, sur lequel tombent les obus serrés comme pluie.
Peut-être y a-t-il là-bas, loin, oh si loin, des villages, des foyers. Ici nous ne savons pas, nous ne
pensons plus ...
Dieu merci, nous avons la force de nous traîner et de rire de notre misère.
Au revoir Yves, la guerre est laide, voyez-vous ! Celui qui commande notre régiment et qui
devrait intercéder pour nous quand nous sommes las, a répondu hier que nous étions frais. Que
voulez-vous ? Il n'est jamais avec vous. »
A galon, Yann
24
Me halon zo é Breih-Izél (“Ar en deulin”)
Me halon zo é Breih-Izél
Ne vern 'men 'ma er horv-man,
Me horv skuih énnon peb ezél.
Tro 'n dé, tro 'n noz é harman:
Me halon zo é Breih-Izél
Me halon n'é ket aman.
Aman é teil er gér vraz é kreska bleu er boén,
Poénieu er peur divroet, dèbro 'hrant me spered :
Me halon e zo du-zé ar dreuz en ti karet
Léh ma hunvréér é peah 'tal en nor goudé koén.
Aman ar énéanùeu un avél yein e hud,
Peb unan 'hra aveiton, ne sella dén ged dén :
Me halon e zo é bro en truéieu kristén,
Me halon e zo du-zé émesk ré tuemm me zud.
Aman 'ma toull er péhed. El loned ar me zro,
Mouéhieu en droug e gleùan o hudadenneu louz :
Me halon e zo du-zé én ilizieu didrouz
Léh ma teulina gréduz marteloded mem bro.
Aman 'ma strih ar un dén : Er rabinieu digor
Hirvoud 'hran d'en aod ken braù, 'n é wiskemant lanneu
El un énézenn vihan draillet ged en tonneu,
Me halon e zo du-zé é chajelleu er mor !
Pell du-zé penn ér Gornog na mar karet moned,
En turall d'er manéieu ha d'en aodeu bourruz,
O ! hwi e wélo marsé, dianvézour euruz,
Er vro léh 'ma me halon, er vro 'n-des men ganet.
O énézenneu Hellas, énézenneu Hellas,
Ken pinùig ho liorheu ha peurbadel ho héol,
Emesk en énézenneu, brudet oh dreist en oll
Ha telenneu eur mil barh dré er bed ho meulas.
Ha neoah mond devadoh biskoah n'em-es hoantet,
Béùein énnoh ne hrehen eid argant nag eid eur,
Rag me halon zo du-zé, én énézegi peur
E gleùér 'mesk o herreg yéh santel er Gelted.
Yann-Ber Kalloc'h, Pariz 1913.
25
Mon coeur est en Basse-Bretagne (extrait de « Ar en deulin »)
Mon coeur est en Basse-Bretagne
N'importe où est ce corps-ci,
Mon corps dont chaque membre est lassé.
Tout le jour, toute la nuit je crie:
Mon coeur est en Basse-Bretagne
Mon coeur n'est pas ici.
Ici, sur le fumier de la grande ville croît la fleur de l'angoisse,
Les angoisses du pauvre en exil me rongent l'esprit,
Mon coeur est là-bas sur le seuil de la maison aimée,
Ou l'on rêve en paix après souper près de la porte.
Ici un vent froid hurle sur les âmes,
Chacun ne s’occupe que de soi, personne ne regarde les autres,
Mon cœur est au pays des pitiés chrétiennes,
Mon cœur est là-bas parmi les cœurs chauds des miens.
Ici c’est l’antre du péché. Comme des bêtes autour de moi
J’entends les hurlements impurs des voix du mal.
Mon coeur est là-bas dans les églises silencieuses,
Ou s'agenouillent, fervents, les marins de mon pays.
Ici c'est étroit sur l'homme; dans les avenues ouvertes,
Je soupire après la côte si belle dans son habit de lande,
Comme une petite île rongée par les vagues,
Mon coeur est là-bas dans les mâchoires de la mer.
Loin là-bas, cap à l'occident, si vous voulez aller,
De l'autre côté des montagnes et des côtes agréables,
Oh ! vous verrez peut-être, étranger heureux,
Le pays où est mon coeur, la pays qui m'a enfanté.
O îles de la Grèce, îles de la Grèce,
Aux jardins si riches, au soleil éternel,
Entre toutes les îles vous êtes renommées,
Et les harpes d'or de mille poètes vous ont louées par le monde.
Et cependant jamais je n'ai désiré aller vers vous,
Vivre en vous je ne pourrais ni pour argent, ni pour or,
Car mon coeur est là-bas dans les pauvres archipels,
Ou l'on entend parmi les roches le saint langage des Celtes !
Jean-Pierre Calloc'h, Paris 1913
26
Scoutisme et identité bretonne : les scouts Bleimor, d’ OloLê à Sturier
Par Jean-Jacques Gauthé Animateur régional Nord-Pas-de-Calais, branche scouts de 1982 à
1989. Adjoint de la région scoute Nord-Pas-de-Calais de 1990 à 1997. Animateur de 1907, réseau
interdisciplinaire de recherches sur le scoutisme et les mouvements de jeunesse.
Le 10 avril 1917, un obus explose à Urvillers, petit village de l’Aisne devant un jeune lieutenant de
28 ans qui emmène ses hommes à l’assaut d’une position allemande. Jean-Pierre Calloc’h, le
grand poète breton vient de mourir. Il laisse derrière lui un bref recueil de poèmes, Ar en deulin,
écrit sous le nom de Bleimor, le loup de mer [1]. En 1946, un groupe de Scouts de France parisien
prenait ce nom. C’est ainsi que débutait l’étonnante aventure des scouts Bleimor.
Bleimor, un projet de scoutisme breton
C’est le 9 janvier 1946 que se crée à Paris le Centre scout d’expression bretonne, le centre scout
Bleimor qui prend le nom de d’Urz Skatoued Bleimor. Il regroupe à ce moment des routiers et des
guides ainées. Son premier camp a lieu en août 1946 à Plomelin (Finistère). Les buts de Bleimor
sont ainsi définis dans le numéro 1 de son bulletin Stur Va Bleimor (Le poste de pilotage Bleimor)
qui paraît en novembre 1947 : « Action chrétienne, expression celtique, service social, formation
spirituelle, culturelle et folklorique des scouts routiers, cheftaines et Guides de France d’origine
bretonne ».
Un homme, Pierre Géraud-Kéraod, chef de clan routier Scouts de France et son épouse Lizig,
cheftaine des guides-aînées des Guides de France, sont à l’origine de cette initiative qui va
connaître de multiples développements [2]. En avril 1950, les statuts de la Communauté scoute
Bleimor sont officiellement déposés auprès de la Préfecture de Police de Paris [3]. Le but de
l’association est ainsi défini : « Pratique du scoutisme et des activités d’expression culturelle,
danse, chant choral, musique populaire, jeu dramatique ». On remarquera l’absence de
références tant aux Scouts de France-Guides de France qu’à la Bretagne, ce dernier point
s’expliquant par le contexte de l’époque. Le début des années cinquante est peu favorable au
mouvement breton, du fait de son image de marque, liée à l’époque de l’Occupation.
Messe au 1er camp de Plomelin (1946)
Perig ha Lizig Géraud-Keraod
27
Parallèlement aux scouts Bleimor, Pierre Géraud-Kéraod lance au printemps 1947 la revue
Sked [4]. Celle-ci, tirée à un millier d’exemplaires paraîtra jusqu’en 1954. Il ne s’agit pas
uniquement d’une revue scoute mais d’une vraie revue culturelle de haut niveau, bien imprimée,
souvent illustrée de bois gravés de Xavier Haas. Le n°1 s’ouvre sur un hommage à Jean-Pierre
Calloc’h « prophète de la résurrection celto-chrétienne ». Il comprend un important article de
Pierre Géraud-Kéraod « Scoutisme et celtisme » [5]. Celui-ci sera repris en 1958-59 dans Sturier,
revue des Scouts Bleimor. Et en 1974, Maîtrises, revue des chefs Scouts d’Europe en publiera
encore une citation sur sa couverture [6]. Ce texte définit en fait les caractéristiques du scoutisme
Bleimor.
La thèse générale est la suivante : Baden Powell, bien que né dans le Suffolk, était gallois et donc
d’origine celtique [7]. L’histoire de l’Occident est faite de l’affrontement du monde celte et du
monde latin. « C’est lui (le monde latin) qui a créé l’opposition fictive du corps et de l’esprit, de
l’homme et de son cadre naturel, de l’individu et de la communauté. C’est l’idéalisme cartésien
qui a déchaîné le matérialisme en religion, le naturalisme en art, le sensualisme en morale, le
libéralisme en économie, l’individualisme en politique ». L’esprit latin est coupable de tous les
maux. Cette idée se retrouve d’ailleurs dans d’autres textes du mouvement breton [8]. Le
scoutisme est l’illustration de toutes les vertus celtiques. Vécu dans la nature, il est « un civisme à
l’école des bois », ce qui l’a rendu suspect à la culture latine. Il est une réaction salvatrice à
« notre supercivilisation née dans la cité romaine et devenue celle des villes » [9]. Le modèle du
routier proposé par Pierre Goutet après-guerre dans Humanisme routier est pour Pierre GéraudKéraod celui du celte : un homme d’honneur qui lutte contre l’individualisme. Le camp est la plus
belle expression du sens communautaire cher aux celtes. « C’est en fils de Celtes que Baden
Powell a créé une nouvelle chevalerie. (...) Fondé par un Celte britannique, le scoutisme est
aujourd’hui reçu par le monde entier. Les deux premiers messages de portée humaine lancés par
des Celtes ont été la spiritualité druidique et la chevalerie chrétienne. Le scoutisme sera-t-il le
troisième ?(...) Les scouts comme les Celtes sont les soldats du Créateur. C’est à deux titres que les
scouts de sang breton sont mobilisés dans la guerre de Dieu. Puissent-ils entendre sans trembler
l’appel de cette double vocation ! » [10] Sked publiera dix numéros thématiques (« Noël de
28
Celtie », « Moines, soldats, artisans », « Jeunesse et tradition bretonne »...) d’une réelle tenue
intellectuelle, souvent rédigés en français, parfois en breton, toujours axés sur la défense et
l’illustation de la culture celto-chrétienne. On notera également dès 1948 un article « Scoutisme et
langue bretonne » qui sera également repris plus tard dans Sturier [11]. « Le scout breton choisit le
breton.(...) La langue bretonne est pour toi le complément indispensable du camp. Elle
correspond à ce qu’est la vie de plein-air sur le plan physique » [12].
Bleimor désire donc vivre intensément un scoutisme breton tout en souhaitant constituer un projet
d’ensemble pour la jeunesse bretonne. On trouve dans ce scoutisme les activités traditionnelles :
sorties, jeux, camps, activités de plein-air. Voici que qu’écrit en 1957 Gwenolé Le Menn, l’un des
cadres scouts Bleimor : « Je pense qu’il est inutile de vous faire un discours pour vous montrer
combien est absurde un scoutisme qui vivant dans un pays en méconnaît l’âme profonde » [13].
Le scoutisme des scouts Bleimor est évidemment catholique, leur aumônier sera de 1948 à 1965 le
Père Chardronnet, omi [14]. Celui-ci écrira dans chaque revue de Sturier. On notera l’accueil très
favorable réservé aux débuts du concile Vatican II [15]. À Paris, les scouts Bleimor sont dans la
mouvance de la Mission bretonne d’Ile-de-France [16]. Celle-ci avait été créée en 1947 par
l’abbé Élie Gautier pour fournir une aide spirituelle et sociale aux bretons émigrés à Paris. Les
scouts Bleimor participent à ses multiples activités dont les pardons aux arènes de Lutèce qui
réuniront jusqu’à 10 000 bretons dans les années soixante. Le bagad Bleimor y recueille ses
premiers grands succès publics.
Que représente Bleimor en terme d’effectifs et d’influence au sein des Scouts de France ? En fait,
peu de monde. Le noyau est essentiellement parisien où il recrute dans les milieux de l’émigration
bretonne [17]. À l’émigration économique, s’est ajoutée aprs 1945 une émigration politique de
militants nationalistes bretons assignés à résidence en région parisienne à la suite de la guerre.
Anna Youennou, veuve du leader nationaliste François Debauvais, raconte dans ses mémoires
comment en 1948 son fils fait connaissance des scouts Bleimor par l’intermédiaire d’Henry
Caouissin, autre personnalité du mouvement breton, assigné à résidence à Asnières et lié à
Bleimor [18]. En 1962, Paul Gaignet, ancien cadre du Parti national breton sous l’Occupation,
devient responsable de la structure regroupant les amis et les anciens de Bleimor [19]
Les scouts Bleimor naissent par les branches aînées, routiers et guides-aînées [20]. En 1949, leur
sont affiliés la communauté Bleimor de Paris (un clan routier, un feu de guides-aînées, une troupe
d’éclaireurs, une ronde de jeannettes), la communauté Bleimor de Rennes (un clan, un feu) et le
clan routier de Saint-Brieuc. En 1960, la structure parisienne se complète par une unité dans
chaque branche masculine et féminine (louveteaux, jeannettes, guides, éclaireurs, routiers,
guides-aînées), une structure d’extension [21] (Bleimor-Sana), une chorale, un bagad, une
formation de harpistes et un cercle d’études pour les chefs et les aînés, le FRAMM (Fraternité
d’action des minorités métropolitaines, ou Front de rénovation régionale et d’action pour le
maintien des minorités) créé en 1959 [22]. En 1962, les scouts Bleimor regroupent 215 membres [23]
dont la majorité est à Paris. Quelques petites unités existent en Bretagne à Rennes, Quimper,
Vannes et Quintin.
Le scoutisme Bleimor est en marge de celui des Scouts de France et des Guides de France
auxquels il appartient. Les activités nationales des Scouts de France sont rarement évoquées
dans les revues Bleimor. la crise de la Route évoquée dans toute la grande presse de l’époque ne
l’est pas dans Sturier [24]. La hiérarchie des Scouts de France se méfie manifestement des
initiatives de Bleimor. Christophe Carrichon note le même phénomène à propos des Guides :
« Nos rapports avec les Guides de France (...) étaient plutôt hiérarchiques (...) Notre spécificité
bretonne les gênait et n’était pas prise en compte » [25]. L’auteur de ces lignes, Joëlle Renault,
cheftaine de guides Bleimor, évoque également « l’esprit français » de base et « l’intolérance aux
questions bretonnes des Guides de France ».
Un thème revient à différentes reprises dans la presse des scouts Bleimor, celui des kibboutz,
baptisés kendrev en breton [26]. Le parallélisme est en effet tentant entre le jeune État d’Israël
29
fondé en 1948 par des militants venus du monde entier qui ont fait revivre une langue disparue et
ont contruit un pays à partir d’un désert, et le combat des militants bretons. Dès 1957, les scouts
Bleimor rencontrent à l’École des Cadres d’Orsay les Éclaireurs israélistes de France autour de leur
chef Léon Askénazi [27]. Pierre Géraud-Kéraod en tirera plusieurs conclusions : « Il n’y a pas de
fidélité historique destructrice des nations ni de sens de l’histoire qui ne puisse être renversée par
l’action déterminée de quelques hommes ». D’autre part, « (...) ce qui fait la grandeur d’une
nation, c’est avant tout sa fidélité intérieure et sa vie spirituelle, son instinct de conservation et sa
volonté d’accomplir sa mission jusqu’au bout. » Enfin, « si une poignée d’individus dispersés par le
monde a réussi à ressusciter un État anéanti depuis 2 000 ans, à remettre en usage une langue
morte, à reconquérir le sol d’une patrie, de quels succès, de quels miracles ne devons-nous pas
être capables ? (...) » [28]
Bien des années plus tard, en 1984, Maîtrises, revue des chefs Scouts d’Europe, rappellera les
rencontres scouts Bleimor-Éclaireurs israélites de France des années 50 en insistant sur les points
communs des deux mouvements : rassembler des peuples dispersés et sauvegarder l’identité de
sa jeunesse [29]. Cette admiration des kibboutz de l’État d’Israël se retrouve dans d’autres
journaux bretons à la même époque [30]. Les Scouts Bleimor vont également s’intéresser aux
minorités nationales de France [31] et d’Europe, telles les Basques [32], les Géorgiens et les
Flamands.
La découverte de la Bretagne sous tous ses aspects tient évidemment une place essentielle chez
les scouts Bleimor : camp sur place ou dans les pays celtiques, tel en Écosse en 1952, musique,
danse, spectacle, exploration. La langue bretonne tient une place de premier plan. Le système
des examens de niveau de langue et de culture bretonne créé dans les années 30 par le
mouvement Ober est en honneur chez les scouts Bleimor [33]. Ceux-ci sont membres de la
fédération Kendalc’h créée en 1951 [34] ainsi que du Kuzul ar Brezhoneg, fédération créée en
1958 et regroupant les associations bretonnes militant en faveur du breton unifié [35]. La lecture
de la revue Sturier créée en 1957 est significative [36]. On y trouve de multiples articles sur tous les
aspects de la Bretagne : culture, histoire, géographie, langue. Des articles publient par exemple
la traduction bretonne des termes de matelotage [37]. On y apprend comment le nœud de
chaise, le nœud plat, de carrick ou de cabestan, les brelages droits et croisés et bien d’autres se
nomment en breton. On y remarque aussi de nombreux développements sur le drapeau breton :
drapeau à bandes noires et blanches dessiné en 1925 ou bannière blanche à croix noire que
défend ardemment Pierre Géraud-Kéraod [38].
La culture bretonne est particulièrement illustrée par la pratique de la musique celtique où les
scouts Bleimor vont très vite s’imposer. Dès 1950, au Bleung-Brug de Saint-Pol-de-Léon, une
représentation oublique de leur bagad a lieu. Parmi les scouts qui jouent dans cette formation
musicale, l’un va devenir célèbre : il s’agit d’Alain Cochevelou, devenu penn sonner (chef
sonneur) du bagad Bleimor en 1961 après Gwenolé Le Menn et Loeiz et Donatien Laurent. En
1966, Alain Cochevelou devient Alan Stivell et commence une carrière de grand artiste [39]. Le
bagad Bleimor va désormais être présent dans de très nombreuses manifestations bretonnes, tant
à Paris qu’en Bretagne. Il est sacré champion de Bretagne des bagadou en 1966, 1973, 1980 et
1987. Toutefois, en raison du travail demandé aux musiciens, le bagad va progressivement se
détacher des scouts Bleimor et finalement se constituer en association indépendante en
novembre 1967 [40]. Cette formation existe d’ailleurs toujours [41].
Parallèlement au bagad, une chorale a été créée ainsi qu’une formation de harpistes, la Telenn
Bleimor. Georges Cochevelou, père d’Alan Stivell, avait en effet ressuscité à partir de 1953 la
harpe celtique dont son fils se mit à jouer. Au sein des guides Bleimor, se forme alors un ensemble
de harpistes dont fait notamment partie Brigitte Géraud-Kéraod, fille de Pierre et Lizig GéraudKéraod. Plusieurs de ses membres sont devenus des artistes connus. Ces formations musicales se
produisent notamment au cours des arbres de Noël pour les petits Bretons de région parisienne.
Cette fête instituée par les scouts Bleimor dès 1947 rassemblera chaque année pendant plus de
vingt ans plusieurs centaines d’enfants de l’émigration bretonne qui redécouvriront ainsi leurs
30
racines. Elle permet aussi aux scouts Bleimor de se faire connaître dans les milieux bretons et de
recruter guides et scouts.
Ar Simbl (ici un sabot autour du cou) : Photo de Michel Audrain
« Le symbole était autrefois cet objet que l’on accrochait autour du coup des élèves surpris à
parler breton à l’école. Nous, nous faisions le contraire : il était interdit de parler français au cours
de certains repas et ceux qui transgressaient cette interdiction étaient affublés du « symbole ».
Bien sûr, cela plongeait quelques-uns d’entre nous dans l’embarras, car ils ne pouvaient plus dire
un mot. Mais beaucoup se sont ainsi familiarisés avec tout un vocabulaire. Spécifique certes, mais
c’était un point de départ comme un autre » (Alan Stivell, ancien Scout Bleimor)
L’amour de la Bretagne ne se limite pas à des activités culturelles. Pour les routiers, il se traduit
aussi par des actions nettement plus militantes. En janvier 1948, le clan n’hésite pas à aller
occuper les locaux du journal La Bretagne à Paris à la suite d’un article rendant compte de
l’arbre de Noël des petits Bretons de région parisienne et évoquant « la dissidence larvée des
scouts bretons [42] ». En 1952, le clan Bleimor perturbe la fin d’un meeting organisé par le journal
Témoignage chrétien en faveur des époux Rosenberg condamnés à mort aux États-Unis pour
espionnage au profit de l’URSS. Il réclame la libération d’un autre condamné à mort, le militant
nationaliste breton André Geoffroy, condamné en 1951 après avoir été, vraisemblablement à
tort, accusé d’avoir livré deux agents secrets anglais aux Allemands en 1942. Le père
Chardronnet, aumônier des scouts Bleimor, jouera un rôle important dans la campagne
31
internationale pour la libération d’André Geoffroy. Celui-ci sera gracié en 1952, libéré en 1954
mais son procès ne sera jamais révisé [43].
Le militantisme nationaliste de Bleimor se traduit aussi par l’insertion dans Sturier d’autres bulletins
bretons qui ne sont pas directement scouts. C’est ainsi qu’à partir du n° 13 (1960), Sturier-Bleimor
fusionne avec Yaouankiz (Jeunesse), bulletin créé par Erwann Evenou qui a fondé en 1958 KAVY,
l’Association des jeunes bretonnants. À l’occasion de cette fusion, il devient Sturier-Yaouankiz
désormais sous-titré Périodique des jeunes bretons [44]. D’autres bulletins seront insérés dans
Sturier, illustrant sa volonté d’être à l’écoute de différentes composantes du mouvement breton.
On y trouve ainsi Ar bed Keltiek (Le monde celtique), bulletin du Congrès celtique international
édité d’Irlande par Roparz Hémon (Sturier n° 5, 1958) ou Le Militant breton, organe des jeunes du
Mouvement pour l’Organisation de la Bretagne (MOB) [45] (Sturier n° 14 et 15, 1960).
C’est dans le souvenir de l’abbé Perrot que culmine le militantisme breton des scouts Bleimor. Ce
prêtre fut l’une des grandes figures du mouvement catholique breton. Fondateur du Bleun-Brug
en 1905, nommé en 1942 membre du Conseil consultatif de Bretagne, il est assassiné par la
Résistance le 12 décembre 1943. Sa mort marque une rupture profonde dans le mouvement
breton, au point qu’une minorité, autour de Célestin Lainé, choisit la collaboration armée aux
côtés des Allemands en créant un groupe de combat, le bezenn Perrot. Sked et Sturier vont
publier de nombreux articles rappelant le souvenir de l’abbé Perrot [46]. Régulièrement, les scouts
Bleimor participent au pèlerinage de Koat-Kéo qui depuis 1953 réunit sur la tombe de ce prêtre le
lundi de Pâques les militants du mouvement breton. Des promesses scoutes sont prononcées à
cette occasion en ce haut lieu du souvenir breton [47]. De même, des fanions d’unités Bleimor
sont consacrés en leur faisant toucher la cape portée par l’abbé Perrot au moment de sa mort et
conservée à l’abbaye de Boquen [48].
Bleimor, un héritage
En apparence, Bleimor constitue en 1946 une création entièrement nouvelle. En fait, un examen
attentif du mouvement et de sa presse montre que celui-ci procède de racines plus anciennes.
Celles-ci sont à rechercher dans le journal pour enfants Ololê créé en novembre 1940 par Henry
Caouissin. Cette revue est fondée au moment où Cœurs Vaillants ne paraît plus en zone Nord et
où le scoutisme est théoriquement interdit par l’occupant. Il s’agit d’un bimensuel pour enfants,
chrétien et nationaliste breton. Certains numéros sont tirés à 20 000 exemplaires. Il paraîtra jusque
fin mai 1944. Les lecteurs s’organiseront au sein de groupes des Loups et des Hermines. À partir de
1943, un mouvement sera créé, l’Urz Goanag Breiz, l’Ordre de l’espérances de Bretagne, très
inspiré du scoutisme, au moins dans ses formes extérieures [49]. Plusieurs anciens scouts ou guides
de France figurent parmi ses promoteurs. C’est le cas du capitaine de vaisseau Le Masson,
ancien commandant en second du cuirassé Dunkerque, ancien du mouvement nationaliste Breiz
Atao, membre du Comité consultatif de Bretagne, rédacteur des statuts de l’Urz Goanag Breiz.
C’est le cas de l’épouse d’Herry Caouissin, Janig Corlay, ancienne chefaine de jeannettes et de
guides-aînées. Herry Caouissin, cheville ouvrière d’Ololê, s’occupera dans les années cinquante
et soixante des scouts Bleimor à Paris en plus de ses nombreuses activités culturelles bretonnes. Il
peut apparaître comme le lien entre l’époque d’Ololê et celle des scouts Bleimor. L’Urz Goanag
Breiz n’aura qu’une existence limitée en raison des circonstances et disparaîtra à la
Libération [50].
Différents éléments marquent nettement dans Sturier cette filiation avec Ololê et l’Urz Goanag
Breiz. C’est ainsi que seront repris dans Sturier des articles d’Ololê [51]. De même, le roman de
Jeanne Coroller-Danio Les loups de Coatmenez paru dans Ololê de décembre 1940 à mai 1941,
édité en livre par le journal en 1942 est réédité en 1963 par les scouts Bleimor avec la mention
« Comment fut fondée la lère Bleimor Corlay » [52] ce qui entend manifestement marquer la
filiation entre le roman et Bleimor. Quelques articles dans Sturier firent d’ailleurs explicitement
référence à Ololê. En 1957, Gwenolé Le Menn rappelait les clubs de lecteurs d’Ololê (Les Loups et
Hermines) afin que Sturier s’en inspire pour étendre l’influence de Bleimor, celui-ci ne restant
32
qu’un petit groupe [53]. En 1960, Herry Caouissin rappelle dans Sturier le 20ème anniversaire de la
fondation d’Ololê [54].
Cette filiation Ololê-Urz Goanag Breiz-Bleimor est en fait logique. Dès 1935, l’abbé Perrot avait
envisagé de créer un grand mouvement de jeunesse breton sur le modèle du mouvement gallois
Urdd Gobbaith Cymru, l’Ordre de l’espérance du Pays de Galles, également très inspiré du
scoutisme. Si l’on précise qu’Herry Caouissin fut durant plusieurs années l’un des principaux
collaborateurs de l’abbé Perrot, la filiation intellectuelle (mais non organique) de ces
mouvements apparaît nettement [55]. Yann Bouessel du Bourg, l’un des premiers scouts Bleimor,
écrivait d’ailleurs peu de temps avant sa mort : « Bleimor a pris d’une certaine façon sa suite
(celle d’Ololê) mais de façon plus structurée » [56].
L’évolution des scouts Bleimor
Au début des années 60, les scouts Bleimor ont atteint leur vitesse de croisière. Estimés dans les
milieux bretons, ils sont l’illustration de l’idée selon laquelle les cercles celtiques sont après 1945
« des écoles du civisme breton » [57]. En raison du climat de suspicion pesant sur l’ensemble du
mouvement breton après-guerre, les activités culturelles sont les seules admises par les pouvoirs
publics. Les cercles celtiques occupent le terrain et « l’Emsav se reconstitue derrière le paravent
culturel » [58]. Les scouts Bleimor confirment le propos de Michel Nicolas : « On imagine assez bien
l’atmosphère régnant dans les cercles celtiques, proche d’une sorte de scoutisme où les B.A. en
faveur de la Bretagne constituent pour les jeunes à la fois une règle de vie et un comportement
militant » [59]
Un thème cheminait dans le mouvement breton depuis quelques années, celui de l’Europe. Dès
le début des années cinquante, Joseph Martray, l’un des animateurs du CELIB (Comité d’étude
et de liaison des intérêts bretons), est secrétaire général de la fédération bretonne de l’Union
fédéraliste des communautés européennes, association voulant regrouper les minorités ethniques
autour d’un projet fédéraliste européen. Bleimor s’est également intéressé au sort des minorités
nationales en Europe [60]. Il n’est donc pas surprenant que sa route croise en 1962 celle d’un
petit mouvement scout voulant dépasser les frontières, les Scouts d’Europe. Une minuscule
section française de 100 membres a été créée en 1958 par le romancier scout Jean-Claude
Alain [61]. Le mouvement existait aussi en Belgique, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Se
réclamant de l’oecuménisme chrétien, cette association avait à ce titre fait l’objet d’une
semonce par l’Église de France dès 1959, « la méthode qu’elle préconise n’étant pas en
conformité avec une saine pédagogie de la foi » [62].
D’autre part, la position des scouts Bleimor chez les Scouts de France devenait difficile. Pour la
première fois, Sturier n° 20 (Noël 1961) publiait un texte critiquant directement l’équipe nationale
de cette association. Il s’agit d’une lettre dénonçant vivement la réforme administrative que
préparent les Scouts de France. Ceux-ci veulent faire disparaître les anciennes provinces scoutes
pour leur substituer les régions administratives où notamment Nantes et Rennes sont séparées.
Cette réforme est en fait une illustration de la volonté des Scouts de France de rompre avec
l’esprit d’un Moyen Âge plus ou moins imaginaire qui l’animait depuis sa fondation en 1920 et de
s’inscrire de plain-pied dans le monde contemporain. Cette réforme administrative est pour ses
promoteurs le premier volet d’une profonde réforme pédagogique de l’association [63]. La lettre
paraît dans Sturier avec l’en-tête du FRAMM et affirme notamment : « Nous ne pensons pas que
ce soit le rôle des Scouts catholiques de travailler à nous imposer des divisions contre nature qui
tendent à faire disparaître les noms d’origine et les traditions historiques de millions de Bretons, de
Languedociens, de Bourguignons, de Savoyards, de Flamands sous des appellations baroques
qui ne relèvent que des élucubrations des planificateurs et des calculs des technocrates » [64]
Au cours de l’été 1962, des négociations se déroulent entre scouts Bleimor et Scouts
d’Europe [65]. . Le principe de l’adhésion de Bleimor aux Scouts d’Europe est arrêté lors du
Congrès interceltique de Tréguier en août 1962 et l’adhésion est effective le 28 octobre 1962. La
Bretagne est reconnue comme une nation à part entière. Ce point a manifestement eu une
33
grande importance pour entraîner l’adhésion des scouts Bleimor aux Scouts d’Europe [66]. Au
même moment, les Euro-scouts, groupe de scouts flamands rejoignaient la FSE [67]. L’idée d’un
scoutisme des minorités nationales fait son chemin chez les Scouts d’Europe. Mais les événements
s’accèlèrent. À la faveur d’une crise interne aux Scouts d’Europe, l’équipe issue des scouts
Bleimor prend le contrôle de l’association en décembre 1962. Jean-Claude Alain est écarté et
part créer le Mouvement scout européen qui végétera avant de disparaître tandis que Pierre
Géraud-Kéraod devient secrétaire national des Scouts d’Europe. Et le 4 février 1963, la
Communauté scoute Bleimor devient Bleimor, association bretonne des scouts d’Europe [68]. En
même temps, les Scouts d’Europe modifiaient leur directoire religieux et devenaient une
association uniquement catholique.
Parallèlement, les Scouts de France entament leur réforme pédagogique. Dans le mouvement
général des années soixante, ils souhaitent ouvrir leur scoutisme sur le monde [69]. Cette évolution
ne se fait pas sans heurt et des oppositions se manifestent à partir de 1965 [70]. Les Scouts
d’Europe apparaissent alors comme une structure d’accueil possible pour les Scouts de France
contestant l’évolution de leur association. Les Scouts d’Europe qui n’étaient que 350 en 1965 se
développent alors très rapidement. En janvier 1967, ils sont 500, 1 600 en décembre 1967, 2 000 en
juin 1968, 5 800 en juin 1969, 7 500 en avril 1970 [71]. Il est clair qu’à ce moment, la spécificité
bretonne de Bleimor ne peut plus être la priorité des Scouts d’Europe. Bleimor risque de se noyer
au sein des Scouts d’Europe. La priorité est désormais de supplanter les Scouts de France avec
l’appui discret du réseau des catholiques traditionalistes de la Cité catholique. La dimension
bretonne va subsister de manière ambiguë.
Une stratégie originale est alors développée. Les unités Bleimor continuent à vivre leur vie. Au plan
national, la revue Scout d’Europe est publiée pour les enfants. Les unités Bleimor reçoivent cette
revue sous le titre Sturier, le contenu de la revue Scout d’Europe étant complété de douze pages
bretonnes. Officiellement, les deux revues s’ignorent. Celle des Scouts d’Europe n’évoque jamais
Bleimor. Dans la revue bretonne, l’idée du scoutisme européen des minorités nationales
s’estompe au profit d’un scoutisme strictement breton, aux côtés des associations nationales de
Scouts d’Europe, notamment belges et allemandes. L’exercice est toutefois difficile puisque
qu’une même association développe deux logiques. Fin 1968, avec son numéro 48, Sturier cesse
de paraître. En 1967, le bagad avait déjà pris son indépendance. Il devient impossible à Pierre
Géraud-Kéraod d’animer simultanément Bleimor tout en portant à bout de bras le
développement continu des Scouts d’Europe [72]. Bleimor va continuer sous forme de quelques
troupes spécialisées de Scouts d’Europe, de stages de chefs, quelques numéros de Sturier étant
publiés en Bretagne [73].
34
Quel bilan ?
Les scouts Bleimor ont donc vécu et développé un scoutisme breton original. Sa difficulté
permanente sera celle du lieu où ce projet pourra se développer. Dans une association
nationale, telle les Scouts de France, ou supranationale, telle les Scouts d’Europe, un scoutisme
de minorité nationale aura toujours beaucoup de mal à trouver sa place. Cette difficulté n’est
pas sans évoquer les stratégies contradictoires de l’action catholique en Bretagne soulignées par
Michel Lagrée [74] : action catholique transculturelle au sein des mouvements français ou action
catholique bretonne particulariste.
En ce qui concerne la qualité des activités bretonnes, les militants de l’Emsav ne s’y sont pas
trompés. Plusieurs d’entre eux ont publié des jugements très flatteurs sur l’action des scouts
Bleimor. Yann Fouéré évoque « l’effort remarquable de Bleimor pour l’éducation bretonne de la
jeunesse » [75]. Olier Mordrel détaille l’action culturelle et musicale des scouts Bleimor et conclut :
« Ce n’est pas de la propagande politique mais c’est peut-être plus grave et la loi est
désarmée » [76]. Yann Bouessel du Bourg qualifie Bleimor de « miracle » [77]. Armel Calvé le réduit
plus simplement à « un bagad précurseur » [78]. Henry Coston évoquera également Bleimor dans
un article de son Dictionnaire de la politique française consacré à l’autonomisme breton en le
mentionnant parmi les promoteurs du renouveau culturel breton [79].
Deux termes paraissent pouvoir définir l’action des scouts Bleimor un carrefour et un creuset.
un carrefour : la lecture des revues est révélatrice à cet égard. De multiples noms de l’Emsav
s’y retrouvent. Des anciens du PNB, tel Paul Gaignet ou Alan Le Louarn [80], des militants culturels
tel Herry Caouissin, des artistes tels Alan Stivell ou Thérèse Miniou [81], des membres du
Mouvement pour l’organisation de la Bretagne ou de la Mission bretonne de Paris.
un creuset : toute une génération de militants bretons, en tous domaines, sont issus de Bleimor.
Alan Stivell, Yann Bouessel du Bourg, Donatien Laurent, directeur du Centre de Recherche
bretonne et celtique, Gwenchlan Le Scouezec [82], fondateur entre autres de Strollad ar Vro, Per
Denez, président du Congrès celtique international et fondateur de Ar Vro [83], et d’autres
militants moins connus. On trouvera aussi dans le bulletin KAVY encarté dans Sturier les noms de
quelques-uns des futurs fondateurs de l’Union démocratique bretonne en 1963 : Rouan Le Prohon,
Erwan Evenou [84].
Les Scouts d’Europe semblent avoir quelques difficultés à évoquer leur filiation avec les scouts
Bleimor. Quelques brèves mentions à leur sujet sans explication seront trouvées ici et là dans les
revues [85]. Les tableaux chronologiques sur l’histoire de l’association ne mentionnent même pas
leur nom [86]. Il est probable que cette discrétion a été à l’époque des polémiques avec les
Scouts de France le moyen d’éviter de leur part des critiques de type politique. Elle visait
également certainement à faire apparaître les Scouts d’Europe comme une création
entièrement nouvelle et non comme une scission des Scouts de France.
Aujourd’hui, les scouts Bleimor sont morts. Une graine a été semée. Elle a pris des chemins bien
surprenants. « Si le grain tombé en terre ne meurt pas, il reste seul. S’il meurt, il porte beaucoup de
fruit » [87]. Au regard du mouvement breton et du scoutisme, on peut décidément dire que
Bleimor a porté beaucoup de fruits [88].
Jean-Jacques Gauthé
NDLR : cet article reproduit avec l’accord de l’auteur est initalement paru dans les Actes du
Colloque "Scoutisme en Bretagne, scoutisme breton ?" Université de Bretagne Occidentale, Brest
Revue Kreiz n°7, 1997
[1] Sur Jean-Pierre Calloc’h, voir le volume « Bretagne » du Dictionnaire du monde religieux dans
la France contemporaine, Paris, Beauchêne, 1990, p.66. Jean-Pierre Calloc’h est l’auteur d’une
35
lettre datée du 12 octobre 1915 envisageant que soit organisée en Bretagne, après la guerre,
notamment parmi les combattants qui auront survécu, une grande pétition réclamant
l’enseignement du breton et de l’histoire de la Bretagne dans les écoles. Voir Alain Deniel, Le
Mouvement breton, Paris, Maspéro, 1976, p.49-50
[2] A ce titre, il faut regretter que leurs biographies ne figurent pas dans le Dictionnaire du monde
religieux dans la France contemporaine, op. cit., ni dans le récent Dictionnaire biographique des
militants de l’éducation populaire et de l’action culturelle, Paris, L’Harmattan, 1996.
[3] Journal Officiel, 23 avril 1950, p. 4388
[4] Sked (Rayonnement) est également l’anagramme de Sevel Keltia Evit Doue. Il s’agit de l’une
des premières revues bretonnes qui reparaissent après la Seconde Guerre mondiale. Voir Michel
Nicolas, Histoire du Mouvement breton, Paris, Syros, 1982, p.170. C’est, semble-t-il le manque de
temps de Pierre Géraud-Kéraod et son coût financier qui firent disparaître cette revue.
[5] Sked n°1, p. 9-23. Concernant J.-P. Calloc’h, le n°5 de Sked publiera un long article
« Comment Calloc’h était royaliste ».
[6] Voir Sturier-Bleimor, n°5, 1958, n°6, 1958, n°9, mars 1959. Voir Maitrises n°28, décembre 1974
[7] Voir E. E. Reynolds, Baden-Powell, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé, 1945, p.5 :« Le nom de
Baden-Powell suggère une origine galloise, mais rien ne le prouve ». Dans le même sens, voir Tim
Jeal, Baden-Powell, Londres, Hurchintson, 1989, p.23. L’idée même des origines celtiques de Baden
Powell existe toutefois depuis longtemps dans les milieux celtisants. La revue ésotérique de Paul
Lecœur Atlantis à laquelle renvoie l’article « Scoutisme et celtisme », s’en était fait l’écho dans son
numéro 55, « Scoutisme et Atlantide », septembre-octobre 1934, dans une contribution de Philéas
Le Besgue « Scoutisme et chevalerie ».
[8] Voir Michel Nicolas, Le séparatisme en Bretagne, Brasparts, Beltan, 1986, p. 95-96. « Cette
démonstration conduit à un objectif politique immédiat : l’État français prenant à son compte
l’héritage de l’oppression romaine et latine, seule l’émancipation politique de la Bretagne peut
lui permettre un retour à sa spiritualité réelle ».
[9] Art. cit. p. 18
[10] Art. cit. p.23
[11] Sturier n°11, octobre 1959
[12] Sked n°4, 1948, p.135. Michel Lagrée dans Religion et cultures en Bretagne, 1850-1950, Paris,
Fayard, 1992, a bien montré l’importance et la fonction de la langue bretonne en matière
religieuse.
[13] Cité par Christophe Carrichon dans son DEA, Le scoutisme en Bretagne, des origines à nos
jours, Université de Bretagne occidentale, 1995, p. 84
[14] Le Père Chardronnet est notamment l’auteur d’une Histoire de la Bretagne, Paris, Nouvelles
Éditions Latines, 1965, dans laquelle il évoque brièvement la revue Sked.
[15] Sturier-Yaouankiz n°23, octobre 1962, p. 301-302, n°24, Noël 1962, p.320-321
[16] Sur la Mission bretonne, voir Pierre Laurent « Les Bretons de Paris et l’abbé Gautier :
témoignage » dans Bretagne et religion, Rennes, Institut culturel de Bretagne, 1990, p.91-97, Armel
Calvé, Histoire des Bretons à Paris, Spézet, Coop Breizh, 1994, p.103-106 et « La Mission bretonne à
Paris », AR Men, n°83 ; février 1997, p. 50-60. Les statuts des scouts Bleimor en 1956 prévoient que
36
leur local d’activités soit situé 152, boulevard de la Gare, à Paris. C’est l’adresse de la Mission
bretonne.
[17] Entre 1954 et 1962, la Bretagne a perdu 54 000 habitants par mouvement migratoire. 47,8%
d’entre eux se sont installés en région parisienne. Voir Jacqueline Saintclivier, La Bretagne de 1939
à nos jours, Rennes, Ouest-France, 1989, p.172-174.
[18] Anna Youennou, Fransez Debauvais et les siens, tome 6, autoédité, Rennes, 1982, p7.
[19] Voir Sturier n°24, Noël 1962, p.334 et 339 et Bertrand Frélaut, Les nationalistes bretons de 1939
à 1945, Brasparts, Beltan, 1985, index p.320. Yann Bouessel du Bourg, ancien responsable Bleimor,
écrit de son côté : « C’est ainsi que Bleimor va reconstituer rapidement avec cette troupe de
réprouvés l’élite saine et enracinée dans la tradition dont notre peuple condamné avait besoin
pour survivre. » Gwenn Ha Du n°111, octobre-novembre 1995, p.16.
[20] Les routiers sont les scouts de 17-19 ans. Ils sont organisés au sein d’un clan de 15 à 20 scouts.
Les guides-aînées regroupent les filles de 17-19 ans organisées au sein d’un feu de 15 à 20 guides.
[21] Le scoutisme d’extension est destiné aux handicapés. Il est apparu dès les années 30.
L’action de Bleimor-Sana est essentiellement une action culturelle par l’animation de la
bibliothèque bretonne par correspondance Ar Stivell (la source) au sanatorium de Champrosay
en Seine-et-Oise à partir de 1952. Présentation de l’action de Bleimor-Sana dans Sturier n°14, juin
1960, p. 50. la bibliothèque Ar Stivell existait encore en 1973 selon La Bretagne réelle n°347 bis
« Panorama du mouvement breton », p. 16.
[22] Voir Sturier n°12, décembre 1959, p.240-241. Le FRAMM est fondé le 13 décembre 1959, date
anniversaire de la mort de l’abbé Perrot. Des représentants de différentes minorités nationales de
France sont présents ou représentés (Alsace, Flandres, Occitanie, Bretagne) ainsi que des
délégués du Pays Basque et de Catalogne. Michel de Penfentenyo, de la Cité catholique, y
expliqua comment la doctrine sociale de l’Église défendait la décentralisation.
[23] Selon Maîtrises n°34-35, juin-juillet 1976, p.2, « Ses chefs, ses cheftaines, ses aumôniers
contrôlent alors 10 unités ».
[24] Voir Sturier n°5, 1949 à propos du congrès routier d’Ile-de-France, et Sturier n°7, 1958, rendant
compte des Journées nationales des Scouts de France à Jambville. De manière plus étonnante,
Sturier n°5, 1958, reproduit un article de Jean-Louis Moynot paru dans la revue Dialogues et
consacré aux fiançailles. Or Dialogues n’est autre que la revue publiée par les démissionnaires de
l’équipe nationale Route. Jean-Louis Moynot, routier Scouts de France, aura par la suite
d’importantes responsabilités au sein de la CGT. Voir Philippe Laneyrie, Les Scouts de France,
Paris, Cerf, 1985, p. 262, et Lionel Christien, Nova et vetera, Vincennes, Ocelot, 1996, p. 208.
[25] Christophe Carichon, op. cit., p. 84
[26] Voir Sturier-Bleimor n°3, juillet-août 1957, p.53-55, Sturier-Bleimor n°9, mars 1959, SturierYaouankiz n°14, juin 1960, p.45, Sturier-Yaouankiz n°16, décembre 1960, p.110, Sturier-Yaouankiz
n°18, juin 1961, p.167-168.
[27] Léon Askénazi, totémisé Manitou, fut l’un des maîtres de la pensée juive en France. Il est
décédé à Jérusalem le 21 octobre 1996. Voir sa biographie dans Le Monde, 25 octobre 1996.
[28] « Sur les traces de Calloc’h, la Bretagne écoute Israël », Sturier-Bleimor n°3, juin-juillet 1957, p.
53-55.
[29] Voir Maîtrises n°64, juillet 1984, p.44-46, article « Les israélites et nous ».
37
[30] Dans Ar Vro par exemple. Voir Michel Nicolas, Le séparatisme en Bretagne, op. cit., p. 94.
[31] Sked n°6, 1949, p. 208, annonce ainsi longuement le lancement de la revue nationaliste
normande Viking-Cahiers de la jeunesse des Pays Normands. L’article est signé JM. Il s’agit très
probablement de Jean Mabire, fondateur de cette revue qui disparaîtra en 1958. Sturier n°5,
1958, p. 20, publie d’ailleurs une lettre de Jean Mabire (« de Viking ») à propos du drapeau breton
dans laquelle il prend parti pour le drapeau à croix noire défendu par Bleimor contre celui à
bandes blanches et noires. Voir également Sturier-Bleimor n°4, 1957.
[32] Voir Sturier-Yaouankiz n°14, juin 1960, qui publie l’oraison funèbre de Jose Antonio Aguirre,
président de la république autonome basque au moment de la guerre d’Espagne.
[33] Voir par exemple Sturier-Yaouankiz n° 15, octobre 1960, p.79, sur les succès des scouts Bleimor
au Trec’h Kentan (Premières victoires).
[34] Une antenne parisienne est créée en 1957. Son bulletin Kendalc’h Paris présente les scouts
Bleimor dans son numéro de janvier 1960. Il est inséré dans Sturier n° 12, décembre 1959.
[35] Le Kuzul est à l’origine lié aux milieux de l’ancien Parti national breton et prolonge l’action de
l’Institut celtique créé en 1941 par Louis Nemo, alis Roparz Hémon, réfugié en Irlande depuis 1945.
Le Kuzul est aussi très lié aux milieux catholiques. Voir Michel Nicolas, Histoire du mouvement
breton, op. cit., p. 182-184. La question de l’orthographe du breton revient à différentes repises
dans KAVY, l’association des jeunes bretonnants. Voir par exemple Sturier-Yaouankiz n° 17, mars
1961, p. 136 (qui annonce le départ de KAVY du Kuzul à l’été 1960], n° 19, octobre 1961, p. 19 ou
n° 22, juillet 1962, p. 280.
[36] Sturier-Bleimor est la revue des scouts Bleimor alors que Sked était une revue culturelle
beaucoup plus large.
[37] Sturier-Bleimor n°5, 1958, p. 104-105.
[38] VoirSturier n°4, décembre 1957, p. 79-82, Sturier-Yaouankiz n°14, juin 1960, p.51, SturierYaouankiz n°15, octobre 1960, p.60-61.
[39] Voir Sturier-Yaouankiz n°17, mars 1961, p. 135, qui publie des textes de chansons en breton
d’Alain Cochevelou. Voir aussi le n°18, juin 1961, p. 169 et 173. Dan ar Braz fit partie de l’orchestre
d’Alan Stivell avant de devenir lui aussi une vedette. Voir Yann Brékllien, Alan Stivell ou le folk
celtique, Quimer, Nature et Bretagne, 1973, p.53, p.56 et p.88.
[40] Journal officiel, 18 novembre 1967, p. 11264. La vie d’artiste éloigne les membres du bagad
des exigences du scoutisme.
[41] Ses disques sont édités par Keltia Musique. Voir par exemple le CD paru en 1990 « Bagad
Bleimor, sonerezh geltiek musique celtique celtic music ». Le Monde (5 août 1997) évoque la
présence du bagad Bleimor au Festival interceltique de Lorient.
[42] Voir le compte rendu très satisfait de cette action dans Stur Va Bleimor n° 2, 1er trimestre
1948, p. 5
[43] André Geoffroy avait été condamné une première fois à dix ans de prison en février 1945
notamment pour avoir participé en juillet 1944 à une attaque contre un maquis de la région de
Scribans aux côtés des Allemands, ceci afin de venger l’assassinat de l’abbé Perrot. Voir Rouan
Caerléon Au village des condamnés à mort, Paris, La Table ronde, 1970, p. 167-168. À propos de
l’action du père Chardronnet en faveur de sa libération, voir p. 20, p. 205 et p. 331, ainsi que son
témoignage dans Gwenn Ha Du n° 92, août-septembre 1992, p. 23.
38
[44] KAVY publié dans Sturier n° 14, juin 1960, p. 38, donne l’effectif de ce mouvement. 48
membres en janvier 1959, 60 en septembre, 76 en mars 1960, 93 en juin 1960. Dans Sturier n° 15,
octobre 1960, p. 67, on note l’apparition dans KAVY de Jean-Yves Veillard, l’un des futurs
fondateurs de l’Union démocratique bretonne. Voir infra, note 84.
[45] Sturier n° 16, décembre 1960, p. 105, précise que désormais Le Militant breton paraît
indépendamment de Sturier-Yaouankiz. « Sa direction, assumée par notre kile (membre de KAVY)
R. Le Prohon est donc en de bonnes mains ». Pierre Géraud Kéraod signale dans le n° 18, juin
1961, p. 173, que Le Militant breton est remplacé par la rubrique « An Emsav hag ar Vro » (l’Emsav
et le pays).
[46] Voir Sked n° 2, p. 52, Sturier-Bleimor n° 3, 1957, p. 64, Sturier-Bleimor n° 4, 1957, p. 73-74, SturierBleimor n° 6, 1958, p. 114, Sturier n° 18, juin 1960, p. 170-173, Sturier n° 35, 4° trimestre 1965, p. 29-30,
Sturier n° 25, mars 1963, p. 5. Ce dernier texte est intéressant car il s’agit d’un hommage par
l’abbé Jean-Marie Gantois, leader nationaliste flamand dans le Nord. Celui-ci avait été
condamné en décembre 1946 à cinq ans de travaux forcés pour collaboration et interdit de
séjour dans le Nord de 1949 à 1962. Voir Dictionnaire du monde religieux dans la France
contemporaine, volume « Lille-Flandres » par André Caudron, Paris, Beauchesne, 1990, p. 249-251,
et Pascal Ory, Les collaborateurs, 1940-1945, Paris, Seuil, 1976, p. 171-174. La lettre de lecteur qui
paraît dans Sturier n° 26, juin 1963, p. 53, signée « J.M. G. (Flandre) » est également très
probablement de l’abbé Gantois. L’auteur félicite la revue pour la qualité de son information sur
la Flandre et son courage intellectuel. Les publications de lettres de Jean Mabire ou de l’abbé
Gantois dans Sturier montrent bien l’intérêt des militants des minorités nationales françaises, en
général proches,à l’époque,de l’extrême-droite, pour les scouts Bleimor. Sur les circonstances de
la mort de l’abbé Perrot, voir l’enquête de Thierry Guidet, Qui a tué Yann-Vari Perrot ?, Brasparts,
Beltan, 1986 (réédition revue et corrigée, Spézet, Coop Breizh, 1997).
[47] Voir Ar Vro n° 20, août 1963, cité par Michel Nicolas, Le séparatisme en Bretagne, op. cit, p.
75-76.
[48] Gwenn Ha Du n° 100, décembre 1993, p. 14 et n° 111, octobre-novembre 1995, p. 17, Sturier
n° 36, 4° trimestre 1965, p. 28.
[49] Sur la famille Caouissin, Ololê et l’Urz Goanag Breiz, voir le volume « Bretagne » du
Dictionnaire du monde religieux dans la France contemporaine, op. cit., p. 68-70, ainsi que les
maîtrises d’histoire de Roland Le Guen, Ololê, un périodique nationaliste et chrétien pour les
jeunes bretons, Université de Bretagne Occidentale, 1984, d’Isabelle Rat et A.H. Le Texier, Ololé,
Université de Vannes, 1989, et de Gwenaël Foucré, Les frères Caouissin, bretons sans entrave. Sur
la route au but lointain, Université de Haute-Bretagne, 1990. On pourra y ajouter le livre de PierrePhilippe Lambert et Gérard Le Marrec Partis et mouvements de la Collaboration, Paris 1940-1944,
Paris, Jacques Grancher, 1993, p. 225-231, ainsi que le roman de Janig Corlay et Herry Caouissin,
Le glaive de lumière, éditions Janig Corlay, 1993.
[50] Herry Caouissin lancera en 1970 L’appel d’Ololê, revue bimensuelle pour enfants se situant
explicitement dans la suite d’Ololê. Le journal disparaîtra en 1973 après 22 numéros.
[51] Reprise effectuée probablement au moyen de stencils électroniques. Voir par exemple la
bande dessinée de Le Rallie et Cloarec, Goneri fils de Cadoudal, initialement parue dans Ololê
de novembre 1941 à avril 1944. Elle reparaît dans Sturier jusqu’en juin 1963. Voir également Sturier
n° 15, p. 80 (dessin du chevalier), n° 16, p. 114 (avec l’indication et très probablement la
typographie d’Ololê) ou n° 23, p.303 (conte de Georges Toudouze dans la typographie d’Ololê).
[52] Sturier-Bleimor n° 28, décembre 1963, p. 108. Le n° 9, mars 1959, p. 192, avait déjà qualifié ce
livre « d’instrument de propagande ». La couverture de la réédition de l’ouvrage en 1963 aux
éditions du Coelbren est d’ailleurs illustrée par une guide Bleimor en uniforme. C’est à partir de ce
feuilleton que les lecteurs d’Ololê s’organiseront en groupes de Loups et d’Hermines. Une
39
réédition de cet ouvrage a été effectuée en 1995 par les éditions BSI-Elor. Il s’agit d’une version
expurgée de celles de 1942 et 1963. Celles-ci comprenaient en effet de multiples allusions
antisémites. Dans cette aventure, les voleurs sont deux juifs, Isaac et Jacob « dont l’accent est
étranger (...) et le nez n’est pas chrétien » (Ololê, 19 janvier 1941, p. 2 et édition 1963, p. 10).
L’édition de 1963 a toutefois systématiquement fait disparaître le mot « youpin » remplacé par
« voleur ». Il s’agit manifestement d’une déclinaison des poncifs classiques de l’antisémitisme
catholique beaucoup plus qu’une volonté d’imitation du nazisme.
[53] Sturier-Bleimor n° 4, décembre 1957, p. 78.
[54] Sturier-Yaouankiz n° 15, octobre 1960, p. 83-84. « 15 novembre 1940, il y a 20 ans, naissait
Ololê ».
[55] Sur l’Urdd Gobaith Cymru, voir Sked n° 4 qui présente longuement ce mouvement et MarieClaude Blanchet, Lord Baden Powell of Gilwell, éditions Bader-Dufour, 1947, p. 201 où l’auteur note
la proximité de cette association avec le scoutisme.
[56] Gwenn Ha Du n° 111, octobre-novembre 1995, p. 16. Yann Bouessel du Bourg est décédé le
24 mai 1996.
[57] La formule est de Polig Monjarret, fondateur en mai 1943 de la BAS (Bogadeg Ar sonerien,
l’Assemblée des Sonneurs), selon Kaierou an Emsaver Yaouank (Les Cahiers du jeune militant de
l’Emsav), n° 12, 15
[58] Michel Nicolas, Histoire du mouvement breton, op. cit., p. 163. L’Emsav désigne, en breton,
l’ensemble du mouvement breton.
[59] Michel Nicolas, Le séparatisme en Bretagne, op. cit, p : 93.
[60] À l’occasion de son camp de 1948, Bleimor publia pour ses membres un document de travail
comprenant 21 questions sur « Le rôle européen de la Bretagne ». Outre des questions sur la
nécessité de la renaissance celtique en France, il était demandé « Avons-nous un rôle plus
particulier à jouer vis-à-vis des autres minorités européennes : gallois, frisons, flamands. Lequel ? »
[61] Journal officiel, 11 septembre 1958, p. 8476. Ce mouvement s’appelle aussi Fédération du
scoutisme européen (FSE).
[62] Déclaration de la commission permanente de l’Assemblée des Cardinaux et Archevêques,
26 juin 1959.
[63] Les scouts Bleimor sont-ils conscients de ce dernier point en 1961-62 ? Certains d’entre eux
l’affirment aujourd’hui mais rien ne le prouve dans leur presse, dans leurs textes de l’époque, tel
celui de Sturier, n° 20, ou dans l’important article « Le film du ralliement », Sturier n° 24, Noël 1962,
p. 334. Les scouts Bleimor sont certainement conscients de l’évolution pédagogique qui s’amorce
chez les Scouts de France. Mais celle-ci apparaît comme secondaire dans les raisons de leur
départ de cette association face à la reconnaissance de la nation bretonne par les Scouts
d’Europe. Le discours visant à expliquer leur départ par la réforme pédagogique des Scouts de
France constitue manifestement une justification a posteriori. Voir par exemple Maîtrises n° 34-35,
juin juillet 1976, p. 3 qui fait même remonter l’opposition des scouts Bleimor à l’orientation des
Scouts de France à la crise de la Route en 1956-57 et affirme « qu’en août 1962, il lui est impossible
d’ignorer qu’il s’agit là du tournant décisif d’une évolution irréversible vers un néo-scoutisme
progressiste. »
[64] Les archives des Scouts de France conservent une photocopie de la lettre originale
manuscrite, reçue le 1er décembre 1961 et signée par Pierre Géraud-Kéraod et André Sournac,
son beau-frère. Elle comporte quelques variantes par rapport au texte publié.
40
[65] C’est l’abbé Antoine Le Barzh qui eut le premier contact avec les Scouts d’Europe. Voir le
témoignage de Yann Bouessel du Bourg dans Gwenn Ha Du n° 111, p. 16-17. Ce prêtre sera
impliqué dans le Front de Libération de la Bretagne au début des années 70.
[66] L’article précité « Le filin du ralliement » signale que Jean-Claude Alain annonce « la
naissance d’une nouvelle forme de scoutisme européen pour les jeunes de Bretagne "du groupe
linguistique bretonnant" : la langue bretonne fait son entrée officielle dans la Fédération. Elle y est
admise dans le cérémonial des Scouts d’Europe. Les unités bretonnes jouissent « d’une sorte
d’extraterritorialité », tout au moins en France, et sont rattachées directement à la Province
Bretonne (district de l’Émigration). » Même idée dans Sturier n° 23, octobre 1962, p. 299-300 : « Le
scoutisme européen est prêt à accorder un statut à des pays tels que l’Écosse ou la Bretagne
(...) ». Même idée également dans l’ouvrage de Yann Fouéré, Histoire résumée du mouvement
breton, Quimper, Nature et Bretagne, 1977, p. 78 : « Les scouts Bleimor étendent leur action et
vont être reconnus en 1962 comme section autonome du scoutisme européen. » Voir également
Sturier n° 25, mars 1963, p. 30 : « Ce parallèle entre la Flandre et la Bretagne (à propos de l’entrée
des Euro-scouts flamands au sein des Scouts d’Europe) prouve que nos frères scouts d’Europe
prennent conscience du nouveau champ d’action qui s’ouvre pour la FSE dans les
communautés culturelles actuellement dépourvues de structures politiques mais désireuses de
prendre part tout de même à la grande promotion de la Jeunesse d’Occident. » Sturier n° 32,
Noël 1964, reproduit également un article en anglais écrit par le commissaire des scouts gallois et
probablement extrait d’une revue galloise, intitulé « Voice of the people » qui affirme
notamment : « Donc, il apparaît de façon de plus en plus nette depuis l’année dernière, que la
FSE devrait avoir à réunir les petits pays d’Europe et les communautés ethniques luttant pour
sauver leur culture et leur personnalité. C’est pourquoi la FSE tendra de plus en plus à devenir un
mouvement pour les provinces d’Europe. La Bretagne a été la première de celles-ci à obtenir le
statut d’une province FSE le 18 octobre 1962 par les chefs de la FSE ». Les Scouts de France
n’apprécient guère la scission des scouts Bleimor et le font savoir en se référant notamment aux
critiques formulées par l’Église envers les Scouts d’Europe en 1959. Riposte de Pierre GéraudKéraod dans Sturier n° 24, Noël 1962, p. 321.
[67] Sturier n° 25, mars 1963, p. 8.
[68] Journal officiel, 17 février 1963. Le même jour, conséquence de la crise qu’ils viennent de
traverser, les Scouts d’Europe modifient leur intitulé pour devenir les Scouts d’Europe, Europascouts de la Fédération du scoutisme européen.
[69] Pour une présentation de la réforme et de son application chez les préadolescents, voir
Jean-Jacques Gauthé, « Les trente ans de la branche Rangers » dans l’ouvrage collectif Le
scoutisme, sous la direction de Gérard Cholvy et Marie-Thérèse Cheroutre, Paris, Cerf, 1994, p.
205-224.
[70] Analyse détaillée dans l’ouvrage de Lionel Christien reprenant son mémoire de maîtrise Nova
et vetera, l’éclatement du scoutisme catholique en France, 19641971, Vincennes, Ocelot, 1996.
[71] Lionel Christien, op. cit., p. 164.
[72] Preuve supplémentaire de leur succès, ceux-ci sont agréés au plan national, après plusieurs
péripéties, par le ministère de la Jeunesse et des Sports le 19 novembre 1970.
[73] À partir de 1982, Sturier est republié sous forme d’une revue régionale des Scouts d’Europe de
la province de Bretagne sous l’impulsion de Yann Bouessel du Bourg. La revue, issue de Kroaz
Hent (La Croix du chemin, n° 1 en 1979) débute d’ailleurs symboliquement en commençant sa
numération par le n° 49. Le souvenir des scouts Bleimor est toujours vif. Durant l’été 1996, prés de
80 anciens se sont retrouvés à Combrit pour fêter le 50ème anniversaire de la fondation en 1946.
[74] Religion et cultures en Bretagne, 1850-1950, op. cit., p. 274-275.
41
[75] Yann Fouéré, op. cit., p 74.
[76] Olier Mordrel, Breiz Atao, Paris, Alain Moreau, 1973, p. 440-441. Olier Mordrel est l’une des
grandes figures du nationalisme breton. Il fut condamné à mort à la Libération.
[77] Gwenn Ha Du n° 11 l, octobre-novembre 1995, p. 16.
[78] Armel Calvé, op. cit., p 252.
[79] Henry Coston, Dictionnaire de la politique française, tome 1, 1967, p. 73.
[80] Voir Sturier-Bleimor n° 7, été 1958, p. 152 ou Gwenn Ha Du n° 99, octobre novembre 1993, p. 8.
Il s’agit toutefois plus dans ces cas de rencontre ou d’aide ponctuelle à un compatriote, militant
nationaliste actif, que d’une appartenance à Bleimor.
[81] Artiste des milieux bretons de Paris avant guerre, elle est trésorière des scouts Bleimor au
moment de leur constitution en association en 1950. Voir Amnel Calvé, op. cit., p. 259.
[82] Voir par exemple Stur Va n° 3, octobre-novembre 1948, p. 13 où il est présenté comme le
responsable du bulletin.
[83] Voir Sturier-Yaouankiz n° 20, Noël 1961, p. 209-211, n° 21, mars 1962, p. 231-234,
[84] Voir Sturier n° 15 et 16 pour R. Le Prohon, Erwan Evenou écrivant dans presque tous les
numéros. Sur les origines de l’UDB, voir Michel Nicolas, Histoire du mouvement breton, op. cit., p.
190-193 et p. 299-310. Celle-ci est à rechercher parmi les étudiants du MOB qui publient à partir
de 1959 Kaierou an Emsaver Yaouank. L’auteur signale, p. 191, parmi eux Gwenolé Le Menu,
autre scout Bleimor. Dans Le séparatisme en Bretagne, op. cit., p. 94, Michel Nicolas situe
également Erwan Evenou dans ce même groupe des étudiants du MOB. Sa biographie publiée
par Gwenn Ha Du n° 94, décembre 1992 janvier 1993, p. 21, n’évoque toutefois pas cet épisode.
L’UDB est une organisation nettement marquée à gauche alors que les scouts Bleimor sont parfois
présentés comme proches de l’extrême-droite. Voir Michel Nicolas, Le séparatisme en Bretagne,
op. cit., p. 307.
[85] Voir Maîtrises n° 41-42, mars-avril 1978, « Quinzième anniversaire », p. 25-26, Scout d’Europe
n° 85, octobre 1981, p. 42 et n° 137, janvier-février 1992, p. 39.
[86] Voir Maîtrises n° 37, février 1977 « Histoire du mouvement », p. 12-13, le manuel Pistes, édition
1986, p. 7-8. Un important article historique « La dimension Europe » dans Maîtrises n° 34-35, juin
juillet 1976, p. 1-6, réussit à ne jamais citer une seule fois le nom des scouts Bleimor simplement
qualifiés de « promoteurs inattendus » et de « Guides et Scouts catholiques » permettant de
relancer les Scouts d’Europe en pleine crise. Les manuels plus récents des Scouts d’Europe
insistent essentiellement sur leur filiation avec l’histoire générale du scoutisme tant en GrandeBretagne qu’en France. Voir Tiens ta place, éditions des Scouts d’Europe, 2ème édition, 1993, p. 2331, qui n’évoque que les Scouts de France et les Guides de France ou La patrouille t’attend,
éditions des Scouts d’Europe, 1988, p. 11-16. Le nom même des scouts Bleimor n’y figure pas.
[87] Évangile selon Saint-Jean, XII, 24-25.
[88] La collection de Sked et de Sturier est consultable à la bibliothèque municipale de Rennes
(cote : 109156 pour Sked, celle de Sturier étant incomplète), à la bibliothèque de l’abbaye de
Landévennec, (collections complètes), à la Bibliothèque Nationale de France (cote : 4° Jo 16579
pour Sturier). Je remercie Lionel Christien qui m’a prêté sa collection de Stur Va et les numéros de
Sturier qui me manquaient.
42
Epreuves du Brevet Bleimor
(photos de Michel Audrain)
Mise à jour par la 1ère Marine de Landerneau (Scouts d’Europe)
Cette version du brevet Bleimor, entièrement refondue, se propose de tenir compte des
préférences de chacun au moyen de spécialisations, qui permettent d'aller plus avant dans
la connaissance de tel ou tel domaine. Il s'attache aussi à ne pas produire une surcharge
d'épreuves aux âges louveteau et scout: l'effort de l'enfant ou de l'adolescent est guidé
vers des épreuves qui lui sont déjà proposées dans une progression "normale", bien qu'elles
soient ici précisées dans le sens qui nous intéresse. Cela nous évite aussi de trop nous
éloigner de la pédagogie propre à chaque tranche d'âge.
Triskell
Il s'agit des épreuves autorisant à chaque tranche d'âge le port du triskell aux trois loups (insigne
de foulard). Ces épreuves communes doivent être complétées par l'approfondissement
d'une spécialité, concrétisé par le choix d'un brevet, qui permettra le port de la bande
bleimor (insigne de poitrine, porté à gauche au-dessus de la croix de promesse). Les scouts
marins les vivront à leur façon, ayant leur propre artisanat, leur musique, etc.
Brevets
BREVET D'ARTISAN
La mémoire de l'Artisan breton passe par ses mains. De l'orfèvrerie celtique jusqu'aux oeuvres
des Sept Frères (Seiz Breur), en passant par le mobilier breton et la broderie, aucun art ne lui
est étranger, et ses mains retrouvent les gestes qui ont embelli l'univers domestique et le
paysage breton.
BREVET DE BARDE
Le Barde trouve sa force dans les mélodies qu'il fait entendre. II élève les coeurs quand ses
chants honorent les hauts faits d'un personnage, saint ou guerrier. II fait tour à tour rire,
pleurer, danser et prier ceux qui l'écoutent II est de toutes les festivités profanes ou religieuses.
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BREVET DE BRETONNANT
La langue est le support privilégié de la pensée. La langue bretonne véhicule un esprit
particulier, qui donne toute sa vitalité à la culture bretonne, loin de tout folklorisme
poussiéreux... Apprendre et maîtriser le breton, c'est un chemin sans égal pour accéder aux
racines profondes de la Bretagne.
BREVET DE CONTEUR
Le Conteur est un personnage éternel de la société bretonne. Mémoire vivante du pays, il
connaît son histoire et sait faire revivre au coin du feu les récits les plus anciens, où réalité et
légende se confondent.. Le Conteur d'aujourd'hui sait aussi puiser dans les livres tout ce qui
peut alimenter son verbe magique.
BREVET DE REDER-BRO (FOLKLORISTE)
Le Reder-bro est un vagabond, littéralement : celui qui "parcourt le pays". II a traversé la
Bretagne et le monde en tous sens, toujours curieux des us et coutumes de chaque lieu. II
reconnaît chaque pays à ses particularités d'alimentation, de costume, d'habitat, de
toponymie, etc. Il est partout chez lui.
Puis une épreuve au choix :
O Constituer une collection à thème breton classée avec ordre. Faire des échanges et enrichir
sa collection, en tenant un registre. Présenter sa collection à la meute / clairière en donnant
toutes les explications nécessaires (brevet collectionneur).
O Connaître 5 oiseaux de Bretagne par leur vol, leur plumage, leur silhouette, leur bec, leurs
pattes, leur chant (brevet ami des bêtes).
O Savoir faire des crêpes (brevet cuisinier).
Scouts et guides
TRISKELL
O Diriger une prière sur un saint breton en patrouille (2è cl. rouge mission).
O Réaliser un objet simple ou un motif inspiré de l'art celtique ou breton.
O Savoir chanter 10 chansons bretonnes avec un carnet, 5 en français et 5 en breton.
O Savoir dire le chapelet en breton (aspi jaune 11è, 2è cl. jaune vie chrétienne). Connaître
bénédicité et grâces en breton.
O Connaître les grandes dates de l'histoire de Bretagne des origines à nos jours. Savoir qui
étaient Nominoë, Anne de Bretagne, Georges Cadoudal, l'abbé Perrot, Perig GéraudKeraod.
O Avoir des notions sommaires sur les distinctions des pays bretons et de leurs parlers.
Brevets
ARTISAN
O Réaliser un carnet de motifs celtiques ou bretons sur le papier, en couleurs, en frise,
44
en carré, en cercle, et un motif animal, végétal ou humain (2è cl. jaune art).
Puis 2 épreuves au choix:
O Réaliser un objet utile à la liturgie au camp à partir de motifs celtiques ou bretons (2è cl.
jaune art).
O Calligraphier un texte court (10 lignes) en onciales celtiques. Illlustrer dans un style celtisant un
poème, un livre ou le livre d'or de sa patrouille (1è cl. jaune art).
O Aménager et décorer complètement le coin de patrouille dans un style celtisant (1è cl. jaune
art).
O Restaurer ou construire un calvaire (1è cl. rouge pionniérisme).
BARDE
O Jouer correctement d'un instrument utilisé couramment en musique celtique (Harpe celtique,
flûte traversière ou whistle, violon, bombarde, biniou, cornemuse écossaise, uillean pipe, caisse
de bagad ou bodhran, clarinette ou treujenn-gaol, guitare en accord ouvert, etc. et même
chant: gwerz ou kan ha diskan).(2è cl. jaune art, 1è cl. jaune art).
O
Participer avec son instrument aux cérémonies liturgiques et aux veillées (2è cl. jaune art).
Puis une épreuve au choix:
O Connaître 7 danses bretonnes et en enseigner une à sa patrouille (2è cl. rouge expression).
Localiser le pays d'origine de ces 7 danses.
O Faire partie d'un bagad, d'un groupe ou d'une chorale bretons (2è cl. rouge expression).
O Savoir chanter 20 chants bretons avec un carnet, 10 en breton et 10 en français (1è cl. jaune
art, rouge expression). Enseigner un chant en breton à ta patrouille ou ta troupe (1è cl. rouge
expression).
O Connaître et interpréter de façon satisfaisante un répertoire (au chant ou à l'instrument) de 5
danses et 5 marches, mélodies, gwerzioù ou cantiques.
BRETONNANT
O Prendre des cours de breton (dix leçons au moins). Si l'on ne peut faire mieux, il est toujours
possible de prendre des cours par correspondance.
O Composer un texte, une prière, une pièce ou un poème en breton et les exprimer (2è cl.
jaune art).
Puis une des trois séries d'épreuves au choix:
1.
O Tu connais par coeur la loi et les principes en breton (aspi jaune 9è).
O Tu connais par coeur la cérémonie (réponses seulement) de la promesse en breton (aspi
rouge 12è).
2. O Tu sais par cceur le je crois en Dieu et le je confesse à Dieu en breton (2è cl. jaune vie
chrétienne).
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O Connaître les actes de foi, d'espérance et de charité en breton (2è cl. vert connaissance de
la foi).
O Savoir baptiser en breton (2è cl. rouge mission).
3.
O Tu connais les points cardinaux en breton (aspi vert 1ère).
O Avoir des notions de toponymie bretonne (2è cl. vert hommes et histoire).
O Réaliser un panneau sur la faune et la flore de Bretagne, avec les noms en breton et français.
CONTEUR
O Connaître les grandes lignes de l'histoire de la Bretagne (2è cl. vert hommes et histoire).
O Connaître la vie et l'oeuvre d'un saint breton de portée européenne (2è cl. vert hommes et
histoire) ;
ou bien : raconter l'histoire d'une personnalité bretonne de portée européenne (2è cl. vert
hommes et histoire).
O Retracer par un tableau mural l'histoire des princes de Bretagne (blason et généalogie)
jusqu'en 1532 (2è cl. vert hommes et histoire) ;
ou bien: tracer à grands traits, sur un panneau, l'histoire de l'évangélisation de l'Europe par
les saints bretons et irlandais (2è cl. vert hommes et histoire).
O Représenter un personnage historique ou légendaire breton en inventant les accessoires et
le costume (2è cl. rouge expression) ;
ou bien : raconter ou faire jouer une histoire ou un conte à un groupe (2è cl. rouge
expression).
O Avoir lu la vie d'un saint missionnaire breton ou irlandais (2è cl. vert connaissance de la foi).
Au cours d'une veillée de patrouille, raconter un ou plusieurs épisodes de la vie de ce saint
(2è cl. rouge mission).
O
Lire un roman au moins sur le cycle Arthurien et organiser un jeu pour sa patrouille ou un jeu
scénique avec sa patrouille à partir de ce roman.
REDER-BRO
O Tu as participé au Tro Breiz ouvert à tous ou à un pardon local (2è cl. jaune vie chrétienne).
O Connaître et savoir expliquer quelques particularités de sa ville (2è cl. vert hommes et
histoire).
O Connaître et savoir expliquer les grandes particularités de son pays et de la Bretagne (2è cl.
vert hommes et histoire).
CI Connaître la signification des trois bannières bretonnes : d'hermine plain, Kroaz Du, Gwenn ha
Du (2è cl. vert hommes et histoire).
46
O Avoir des notions de toponymie bretonne (2è cl. vert hommes et histoire).
Puis 3 épreuves dans une de ces deux séries : 1.
O Tu commences l'étude de 5 arbres parmi les plus répandus en Bretagne (aspi vert 6è, 2è cl.
vert nature).
O Connaître 5 oiseaux parmi les plus courants en Bretagne (2è cl. vert nature).
O Connaître 5 espèces de poissons, de crustacés et d'oiseaux marins coutumiers des rivages
bretons, sur lesquels tu réalises photos ou dessins pour ton carnet de chasse (2è cl. vert nature).
O
Récolter et reconnaître 5 roches ou minéraux du sol breton (2è cl. vert nature).
O Connaître parfaitement la vie d'un animal parmi les plus courants en Bretagne (1è cl. vert
nature).
2.
O Connaître et observer la faune et la flore de Bretagne (1è cl. vert nature).
O Avoir un correspondant au choix en Irlande, Ile de Man, pays de Galles, Cornouaille, Ecosse,
Galice, et correspondre dans sa langue (2è cl. vert hommes et histoire).
O Entretenir une correspondance régulière avec des scouts d'une unité étrangère en pays
celtique (Irlande, Ile de Man, Ecosse, Cornouailles, Pays de Galles, Galice). (1è cl. vert
communication).
O Connaître les principales fondations religieuses de Bretagne (1è cl. vert hommes et histoire).
O Présenter avec l'aide de la patrouille une documentation (panneau, projection) sur les
coutumes, les costumes, l'habitat, la musique ou la danse, les navires... en Bretagne (1è
cl. Rouge expression).
O Préparer un plat breton, par exemple: Kig ha Fars, Crêpes, Kouign amann, Quatrequart, Far. Ou bien encore : faire du beurre salé, faire son cidre.
Routiers et guides aînées
TRISKELL
O Avoir participé à un W.E. BLEIMOR.
O Réaliser un objet simple ou un motif inspiré de l'art celtique ou breton.
O Connaître 10 chants bretons (5 en bretons, 5 en français) et 5 danses bretonnes.
O Prendre des cours de breton (dix leçons au moins). Si l'on ne peut faire mieux, il est
toujours possible de prendre des cours par correspondance. Connaître le chapelet en
breton, l'Angélus, le bénédicité et les grâces en breton.
O Connaître les grandes lignes de l'histoire de la Bretagne.
O Avoir participé au Tro-Breiz ou à un pardon local. Connaître l'histoire et la signification des 3
bannières bretonnes (d'hermine plain, Kroaz Du, Gwenn Ha Du).
47
Essai sur les devises familiales en langue bretonne, apanage de
l’ancienne noblesse de l’occident breton par Tanguy Bouchaud
Cet article initialement publié dans le numéro 226 de Juillet-Août 2007 du Lien des Familles de
France (et reproduit ici avec l’autorisation de son auteur et de cette revue) complète l’article de
Tepod Gwilhmod paru sur le même sujet et publié dans notre bulletin no 5 au Printemps 2007.
1. Généralités
L’histoire des devises familiales n’est pas facile à appréhender. Le sujet a peu inspiré les
spécialistes de la noblesse : la plupart du temps les devises sont juste mentionnées dans les
armoriaux et nobiliaires, après la définition des armoiries, dont elles constituent une partie40, qui
sont codifiées avec un vocabulaire spécifique, des règles de compatibilité et surtout leur contrôle
et enregistrement régulier par les fonctionnaires royaux. Apanage des maisons aristocratiques les
plus anciennes, l’adoption des devises s’est vite propagée aux villes, corporations et ordres
religieux. Ainsi Nantes, ancienne capitale du duché breton, a-t-elle eu deux devises : tout
d’abord « Oculi omnium in te sperant Domine » (Les yeux de tous se tournent vers toi et espèrent,
Seigneur), puis « Neptunus favet eunti » (Neptune favorise les voyageurs). De nos jours, les devises
se confondent souvent avec le slogan, en particulier par l’usage qui en est fait dans certaines
universités écoles, collèges ou, dans la sphère commerciale, par les entreprises. Seuls les papes
semblent perpétuer la tradition, imités, consciemment ou non, par quelques individus qui
choisissent pour eux mêmes des devises personnelles relevant plus de la « règle de vie ».
Historiquement, les familles régnantes en Europe ont toutes adopté des devises. Du « Nec
pluribus impar » (« au-dessus de tous ») des Rois de France et de Navarre ( Louis XIV, repris par
Louis XV et Louis XVI), au « Ik zal handhaven » (« je maintiendrai ») de la maison d’Orange
(toujours régnante aux Pays-Bas), ou encore le non moins fameux « Dieu et mon droit », en
français, des Rois d’Angleterre, depuis Henri VI.
La devise des ducs de Bretagne, « Potius mori quam foedari », a été reprise par la duchesse
Anne (1477-1514), en plus de ses devises personnelles (« Non mudera » et « A ma vie »). Selon la
légende, la devise des ducs aurait pour origine l’attitude d’une hermine lors d’une scène de
chasse : elle aurait préféré la mort plutôt que de se salir. La devise se traduit par « Plutôt mourir
40
Avec les supports, couronnes, timbres et cris.
48
que se salir (se déshonorer) » (en breton « Kentoc'h mervel eget en em saotrañ »). Cette devise
semble avoir été reprise par plusieurs familles bretonnes depuis…
L’illustre maison de Rohan, seule famille ducale bretonne subsistante au XXIéme siècle, a
toujours pour célèbre devise « Roi ne puis, prince ne daigne, Rohan suis », qui résume à la fois leur
puissance et un programme politique.
2. Noblesse bretonne et langue bretonne
La noblesse bretonne, dont l’ancienneté et le caractère prolifique41 ont été maintes fois
abordés par de nombreux auteurs - de Jean Meyer à Jean de Saint-Houardon, plus récemment –
est parvenue pour un petit nombre à traverser les siècles. En effet, l’écrasante majorité des
familles issues de la chevalerie a disparu, par extinction « naturelle » ou à la suite des nombreuses
guerres qui ont ravagé le duché puis la France. « L’ impôt du sang » se révélant particulièrement
lourd au sein de ces familles jusqu’en 1918. De plus, le renouvellement de ces antiques maisons
s’est définitivement tari avec la suppression du second ordre.
A partir de quelques ouvrages, il est possible d’effectuer une courte promenade quasi
sentimentale, grâce aux devises des familles de la noblesse bretonne.
Quelques rappels généraux s’imposent : il convient de retenir qu’a priori seules les plus
anciennes familles ont adopté des devises : cet usage correspondait à une époque, un rang et
reliait, d’une certaine façon, à la chevalerie et à ses combats. Aussi ce sont surtout les familles
« nobles d’extraction » (celles dont la qualité se perd dans la nuit des temps, par opposition aux
anoblis, qui pourtant peuvent remonter à Henri IV) qui en étaient les titulaires. Ces familles
arborant une devise constituent donc une minorité, dont la majorité a aujourd’hui disparu.
En Bretagne, trois langues ont été usitées pour les devises, parfois successivement : le latin,
le breton et le français. Le latin renvoie aux temps le plus ancien, une sorte de « brevet
d’ancienneté » apparente, c’est la langue du clergé et de la papauté. La langue française a
l’avantage d’être comprise plus largement, par les puissants et ceux qui le sont moins, au sein
d’un ensemble plus vaste que le Royaume de France (à la Cour, mais aussi au sein des cours
étrangères, sur les champs de bataille des marches, voire sur mer), c’est la langue du pouvoir
séculier. Le breton, quant à lui, ne se rattache qu’à l’ancien duché de Bretagne, et plus
particulièrement à une ère géographique limitée à sa frange la plus occidentale, sa singularité
est là.
Avant d’aborder quelques devises de ces anciennes maisons, interrogeons-nous sur ce
que peut signifier, pour une famille l’adoption d’une devise en langue bretonne. En effet, cette
dernière, bien qu’unique langue parlée par l’essentiel des habitants de la Bretagne occidentale
pendant des siècles, a - avec une constance seulement démentie par le romantisme du XIX éme
siècle - été présentée comme la langue du peuple (« des paysans et des pêcheurs ») non celle
des élites - urbaines ou non - ou du pouvoir. Aussi, le fait de retenir la langue bretonne, pour un
symbole social lié à l’apparence comme la devise familiale, confirme-t-il l’enracinement et la
singularité revendiquée d’une frange de l’ancienne noblesse bretonne. Celle-ci, attachée plus
que tout à ses origines - qui sont, pour certaines familles, quasi-claniques en les rattachant, selon
des légendes, à l’immigration en provenance des îles britanniques - se distingue en cela
fortement de la noblesse française.
Il convient aussi de relever, qu’outre leur ancienneté et leur enracinement (à quelques
exceptions prés), la localisation de ces familles relève essentiellement des quatre évêchés de
Basse-Bretagne, ou Bretagne bretonnante. La carte jointe permet de les localiser : Le Léon
(région de Saint-Pol de Léon, partie nord du Finistère actuel), la Cornouaille (vaste région centrée
sur Quimper) et le Trégor (partie ouest des Cotes d’Armor contemporaines) et le Vannetais
(Morbihan et pays guérandais). Les autres évêchés - Dol, Saint-Malo et Saint-Brieuc - ainsi que
ceux où siégeait le pouvoir politique - Nantes, ville du château des ducs, du gouvernement et de
la chambre des comptes de Bretagne, et Rennes, siège du Parlement de Bretagne - sont peu ou
41
Un adage parmi d’autres ne disait-il pas « Tape dans un buisson il en sort un Kersauson, soulève un caillou, tu trouveras
un Kergariou » ?
49
pas représentés. Les familles de Haute-Bretagne ont toujours adopté le français pour leurs devises
- mentionnons ici le glorieux « Mon sang teint les bannières de France » de la famille
Chateaubriand, dont nul ne contestera pourtant le caractère breton. Cela ne doit pas
surprendre car la suprématie du français était aussi la règle chez les Bas-Bretons eux-mêmes,
certaines devises pouvant être le fruit de traductions du breton.
3. Une singularité affichée
Que nous inspire ces devises en breton, que sous-entendent-t-elles ?
Géographiquement, la domination des familles léonardes est écrasante, viennent ensuite
les familles du Trégor et de Cornouaille. Les « sudistes » vannetais sont néanmoins bien
représentés. Une famille est originaire d’Ile de France : Les Lamarche, qui avaient aussi une devise
française.
Parmi les quelques soixante-quatorze familles identifiées avec une devise bretonne, seulement
quatorze subsisteraient en 2007. Il s’agit des Boisguéhenneuc, Cadoudal, Kerhalic (Le Gonidec
de), Poulpiquet (de Brescanvel et du Halgouet), Kerautem, Kermadec (Huon de), Kertanguy
(Salaün de), Kerret, Kerouartz, Kersauson (de Pennendreff et du Vieux-Chatel), Parscau (du
Plessix), Penguern, Quélen et Rodellec.
Thématiquement parlant, plusieurs «types» de devises cohabitent :
Certaines devises rappellent la place de Dieu et de la chrétienté dans l’espace breton. Douè
(Dieu en breton) revient onze fois. C’est un « marqueur » fort de l’identité bretonne la plus
ancienne. La Bretagne est le pays des sept saints fondateurs, du Tro Breizh, des moines venus
d’Irlande ou du Pays de Galles et des nombreux saints inconnus ailleurs. La référence à Dieu est
cependant, aussi, très courante dans le reste de la France. Dans cette « famille », nous trouvons :
- « Doué ha membro », (Dieu et mon pays), Cadoudal (de), anoblie en 1815, subsistante au
XXIéme siècle,
Vannetais.
- « Da vad é teui » (Tu viendras à bien ) et « Mar car Doué » (S’il plait à Dieu), Chastel (du), Léon et
Cornouaille et Kerlec’h (de), Léon.
- « Ioul Doué » (la volonté de Dieu), devise des Gonidec de Kerhalic (le), subsistante au XXIéme
siècle, Trégor
et des Kerliviry (de), Léon.
- « Ped bepret » (Prie sans cesse), Guernisac (de), Léon.
- « Mardar Doué » (Tout pour Dieu), Kerautem (de), Cornouaille.
- « En christen mad, mé bev en Doué » (En bon chrétien, je vis en Dieu), Kergoët (de), Léon.
- « Doué araog » (Dieu avant), Kermavan (de), Léon et Vannetais.
- « Pa garo Doué » (Quand il plaira à Dieu), Kerriec (de), Vannetais. C’est semble-t-il aussi le cri de
la famille
Kerouartz (de), subsistante au XXIéme siècle, Léon, dont la devise est en français.
- « Doué hag ar vro » (Dieu et le pays), Lamarche, Ile de France et Léon.
- « Doué da guenta » (Dieu d’abord), Penguern (de), subsistante au XXIéme siècle, Cornouaille.
- « Ioul Doué, sel petra ri » (La volonté de Dieu, prends garde à ce que tu feras) et « War vor ha
war zouar »
(sur terre et sur mer), Portzmoguer (de), Léon.
- « Caret Doué, meuli Doué, enori Doué » (aimer Dieu, louer Dieu, honorer Dieu), Richard de Kerriel,
Trégor.
Les valeurs liées autrefois au code de la chevalerie sont aussi souvent évoquées. Aux cotés de la
loyauté (léaldet ou léal) reviennent la notion du temps, de la fidélité (amzer, amzeri, bépret pour
toujours) ou encore la franchise et l’honneur. Une des familles a pour devise « Carantez ha
Guirionnez » (amour et vérité), qui n’est pas sans rappeler la lettre aux familles du pape Jean-Paul
II…Le cœur (calon, galon) est relevé plusieurs fois. Ainis, notons-nous :
- « Carantez ha guirionnez » (amour et vérité), Boisguéhenneuc (du), subsistante au XXIéme siècle,
Saint-Malo
50
et Nantais.
- « Dinam » (sans tache), Bourblanc (du), Saint-Brieuc et Trégor.
- « Calonec a drec’h bep tra » (l’homme de cœur surmonte tout), Charuel du Menez et de
Guerlesquin, Trégor.
- « A galon vad » (de bon cœur), Coëtanscours (de), Trégor.
- « Bepret » (toujours), Coëtivy (de), Léon.
- « Beza é péoc’h » (être en paix), Coëquelven (de), Léon.
- « Mad ha caër » (bon et beau), Cosquer (du), Trégor.
- « Enor ha franquiz » (honneur et franchise), Harscouët de Saint-George, Trégor.
- « Atao da virviquen » (Toujours à jamais), Huon de Kermadec, subsistante au XXIéme siècle,
Léon.
- « Endra bado birviquen... » (Tant qu’elle durera jamais…), Huon de Kérèzélec, Léon.
- « Graz ha spéret » (Grâce et esprit), Kerroz (de), Léon.
- « Amzéri » (Temporiser), subsistante au XXIéme siècle, Parscau du Plessix (de), Léon.
- « A bep pen léaldet » (loyauté partout), et « En diavez » (à découvert), Penancoët (de), Léon.
- « Mad ha léal » (bon et loyal), Rodellec du Porzic (de), subsistante au XXIéme siècle, Léon.
- « Guir ha léal » (Franc et loyal), Salaün de Kertanguy, subsistante au XXIéme siècle, Trégor.
Plus rarement, le nom de famille est mentionné, soit en « jeu de mots », sur la base de sa
signification bretonne, soit par simple insertion « mettant en scène » le nom de la famille
concernée (Quélen, Breton, Gaëdon, Le Douguet, Gentil, Lesquiffiou, Keranraiz, le Déauguer).
Cette pratique se rapprochant ainsi des armoiries parlantes, parfois attribuées à certaines
familles, ou des devises en langue française telles que le « M qui t’M » (aime qui t’aime) des
Kergos ou « En Jouan, point de soucis » des Kervenoael. Mentionnons dans cette catégorie :
- « Breizad bepred » (Breton toujours), Breton (Le), Saint-Brieuc.
- « Var an tré ha var al lano, Castelfur eo va hano » (au jusant comme au flux, Chateaufur
est mon nom), Chateaufur (de), Léon.
- « Dleet eo ar guir dan déauguer » (le droit est du au dîmeur), Déauguer (le), Léon.
- « Den a galon a zo doujet » (l’homme de cœur est redouté), Douget (Le),Léon.
- « Pa zoun ar c’horn e sailh ar gedon » (Quand le cor sonne les gaëdons (lièvres) se lèvent),
Gaëdon, SaintMalo.
- « Gentil d’an oll » (Gentil pour tous), Gentil de Coatanfroter (le), Saint-Brieuc.
- « Raiz pé bar » (Ras ou comble), Keranraiz (de), Trégor et Cornouaille.
- « Quémer ar c’hoat ha les ar c’hiffiou » (Prends le bois et laisse les souches), Lesquiffiou (de),
Léon.
- « Gric da Molac » (silence à Molac), Molac (de), Vannetais.
- « E peb amzer Quélen » (en tout temps Quélen), Quélen (de), subsistante au XXIéme siècle,
Cornouaille.
- « Ractal Troplong» (sur le champ Troplong), Troplong de Rumain (de), Trégor.
A contrario, nous relèverons l’absence de mention de la Bretagne, en tant qu’entité, alors que la
France est parfois évoquée dans les familles des autres régions françaises, voire bretonnes (cf. les
Chateaubriand supra).
Certaines devises, non dénuée d’intérêt se rapprochent de la règle de vie, du conseil ou de
l’adage :
- « Mad é quélen é peb amzer » (un conseil est bon en tout temps) - Alléno de Saint-Alouarn,
Vannetais et
Cornouaille.
- « Var va Buez » (Sur ma vie), – Barbier de Lescoet, Léon.
- « Bépret crenv » (Toujours fort), Botdéru (du), Vannetais.
- « Comzit mad » (Parlez bien), Buzic, Cornouaille.
- « En kichen rein éman ret kemer » (après donner, il faut prendre), Caméru (de), Vannetais.
- « Red é vé » (il faudrait), Coëtudavel (de), Léon.
51
- « Né zeus pesk hep é zréan » (il n’est poisson sans arête), Drénec (du), Léon.
- « Ker guen hag haléguec » (Blanc comme du saule), Halegoët (du), Trégor avec la variante
« Kerguen ha
Haleguer » (Blanc comme du saule), Poulpiquet de Brescanvel (de) et Poulpiquet du Halgouët,
subsistante au
XXIéme siècle, Léon.
- « Arabat » (il ne faut), Hamon de Pénanru, Léon.
- « Mar couez, en em saff » (s’il tombe, il se relève), Heusaff, Léon.
- « Pa c’helli » (Quand tu pourras), Keraëret (de), Léon.
- « Laca evez » (Prends garde), Keranguen (de), Léon.
- « Mervel da véva » (Mourir pour vivre), Kerérault (de), Cornouaille et Léon.
- « Red eo mervel » (il faut mourir), Kerjar (de), Léon.
- « Araog, araog ! » (En avant, en avant !), Kerlouët (de), Cornouaille.
- « Sot ouc’h sot » (sot contre sot), Kermorial (de), Cornouaille.
- « list, list » (laissez, laissez), Kerouzéré (de), Léon.
- « Tével hag ober » (se taire et agir), Kerret (de), subsistante au XXIéme siècle, Léon.
- « Pred eo, pred a vo » (il est temps, il sera temps), Kersauson (de), subsistante au XXIéme siècle,
Léon.
- « Maguit mad » (Nourissez bien), Lescoat (de), Léon.
- « Ober tinel vad » (Faire bonne chère), Liscoët (du), Trégor.
- « Ober ha tével » (Faire et taire), Méné (du), Cornouaille et Trégor.
- « Emé-t-hu » (Dites-vous), Mésanven (de), Léon.
- « Cuz ha tao » (Dissimule et te tais), Pavic, Léon.
- « Red eo » (il faut), Penhoët (de), Léon.
- « Prest vé » (il serait à propos), Penmarc’h (de), Léon.
- « Heb chench » (sans varier), Pont-L’Abbé (du), Cornouaille.
- « Heb rémed » (sans rémission), Quilimadec (de), Léon.
- « Sel pétra ri » (Prends garde à ce que tu feras), Rouazle (du), Léon.
- « Pé brezel, pé carentez » (ou la guerre ou l’amour), Roux de Kerninon (le), Trégor.
- « Martézé » (Peut-être), Traonélorn (de), Léon.
- « Ha souez vé ! » (quelle surprise ce serait), Trédern (de), Léon.
Sources : Armorial et nobiliaire de Bretagne de Pol POTIER de COURCY, La noblesse bretonne de
Jean de SAINT-HOUARDON, l’annuaire héraldique de 1902, le catalogue de la noblesse de Régis
VALETTE.
Tanguy BOUCHAUD, mai 2007
52
Initiation au Code de la Chevalerie :
Théorie et pratique de l'esprit et du
comportement chevaleresques :
« Le comportement dans l’adversité »
Jacques-Youenn de Quelen développe dans ce numéro l’Article 5 de son code de la Chevalerie
(paru en Décembre 2005) sur le thème du comportement dans l’adversité :
5 – Le comportement dans l'adversité.
5.1. A quelle question l'Article 5 veut répondre
Quand la situation nous est contraire et qu'il faut faire face à un adversaire ou à un ennemi, qu'il
soit en nous (défauts, maladies, blessures) ou hors de nous (contradiction ou attaque injustes),
quelle est l'attitude chevaleresque ?
5.2. Les mauvaises réponses
Accuser Dieu, lever le poing vers le ciel, en criant à l'injustice :
- "pourquoi cela m'arrive-t-il à moi !?"
On entend parfois :
- "mais qu'est ce j'ai fait au Bon Dieu ?!".
Dieu n'y est pour rien. Il n'est jamais la cause du mal, car le Christ nous apprend qu'il est Amour
absolu, et ne sait rien faire d'autre qu'Aimer, sans conditions, chacun d'entre nous.
5.3. Le principe de la réponse
Autrefois, l'ennemi des chevaliers croisés, c'était le Sarrasin ou le Turc : pas question de reculer !
Aujourd'hui, on peut répondre plus globalement qu'il s'agit d'une épreuve que la vie, ou les
autres, nous envoient.
Et Dieu nous accompagne, là aussi, comme partout et toujours, et il nous soutient : il est AVEC
nous.
5.4. Les contraires du principe
Ce serait le découragement, la débandade et la fuite. Et insulter Dieu.
5.5. Idéal et réalités
Face à l'ennemi et au mal, le comportement chevaleresque est de faire face, de ne pas reculer.
Parce que l'idéal de la vie, ce n'est pas le bout de la vie terrestre, quelle que soit sa durée, pour
tomber dans le néant, mais le passage à la vraie Vie en Dieu, le Dies natalis, le jour de la Vraie
naissance dans le Royaume de Celui qui nous aime et nous attend.
5.6. Quelques pistes pour réfléchir et discuter
Quel est le sens du mal ? :
Quel est le sens du mal que je fais, souvent malgré moi ? C'est parce que nous ne sommes pas
"naturellement bons" mais instinctivement mauvais, à cause du péché dit "originel" lorsque
53
l'homme a utilisé sa liberté pour céder à la tentation de prétendre se faire l'égal de Dieu et de se
passer de Lui, de l'exclure de sa vie.
Quel est le sens du mal que les hommes infligent à d'autres hommes ?
Sans la Loi enseignée par Jésus-Christ, les hommes se détruisent.
Et cette Loi c'est d'aimer Dieu et son prochain comme soi-même.
D'autres religions, non chrétiennes, enseignent aussi l'harmonie et la paix, mais leur efficacité est
limitée : elles sont un reflet de la Lumière ; mais la source de la Vérité, la Vraie Lumière, c'est JésusChrist qui est venu sur terre pour Révéler la Bonne Nouvelle de sa Paix.
Quel est le sens du mal "de la nature"… La Bible nous enseigne que la nature a été créée
imparfaite, pour que les hommes puissent co-opérer à son perfectionnement. La nature n'est ni
bonne ni mauvaise; elle est neutre.
Par exemple, le feu : il éclaire, il réchauffe et il cuit les aliments, mais aussi il brûle et détruit.
On peut réfléchir de la même manière à propos des catastrophes naturelles, par exemple : la
mer, qui est riche pour nourrir les hommes, mais elle fait aussi des tempêtes et des raz-de-marée…
Quel est le sens de la souffrance ?
Ceci est ce qu'on appelle un mystère, car nous ne savons pas. D'ailleurs, Jésus, dans l'Évangile,
n'en parle nulle part.
Mais soulager la souffrance à chaque occasion, ça il savait faire !
Et puis lui-même a souffert sa Passion. Pourtant il avait prié pour que cela lui soit, si possible,
épargné.
Mais sa prière se terminait, en d'adressant à son Père : "Non pas comme je veux,
mais comme tu veux !" (Mt 26, 39).
Et il a offert sa Passion pour que nous soyons tous rachetés du péché et sauvés.
Si nous sommes confrontés à la souffrance, la révolte ne sert à rien. Ce qui est utile, c'est de l'offrir
à Dieu, en union confiante avec la Passion du Christ.
Selon les aumôniers d'hôpitaux, face au malade qui souffre, il faut porter sur lui le regard du Christ.
Seul vaut d'abord le silence. C'est au malade de le rompre selon son désir. Ce silence est un
"cadeau précieux de l'amour qui patiente."
Quel est le sens de la mort ? Là aussi se trouve le mystère, que nos intelligences sont trop limitées
pour comprendre. Pour bien saisir l'impossibilité dans laquelle peut se trouver la raison humaine
d'expliquer clairement un "mystère", l'exemple suivant a souvent été utilisé : si on plante une
pomme, elle pourra devenir un pommier ; c'est vrai ; alors, imaginez un homme qui n'a jamais vu
ni arbre ni pommier, et entreprenez de lui décrire ce bel arbre, simplement à partir d'une pomme
que vous lui montrez sur la paume de votre main…
La mort d'une personne âgée ("rassasiée de jours" dit la Bible), passe encore !
on dit que c'est naturel ; et pourtant, l'entourage aimant dit souvent :
- « on l'aurait bien gardé encore un peu…».
Mais la mort de quelqu'un de jeune, la mort d'un enfant, comment supporter ?
Parfois on "improvise" une tentative d'explication du genre : c'est sans doute pour lui éviter
quelque chose de bien plus terrible. Ou alors, à la manière des sagesses de l'Orient, on dit : sa vie
s'est terminée là parce que sa mission sur terre était accomplie. Là aussi Sagesse de Dieu. Qui
sommes-nous pour savoir, et exiger de comprendre ?
La routine populaire dit : "c'est la vie…".
Eh oui ! c'est comme pour les maladies, les accidents et les catastrophes… c'est la nature. Parfois
aidée par les bêtises des hommes, il faut bien le dire aussi ! (exemple, hélas ! de villes entières
bâties sur des terrains inondables et protégées par des digues dont on sait pourtant bien que les
ouragans peuvent les détruire.)
Sur le suicide : on a trop vu, dans les hôpitaux, de "TS" (Tentatives de Suicide), et par exemple de
personnes qui se sont parfois même jetés d'un septième étage (cela s'est vu, mais ils ont rebondi
54
sur le toit d'une voiture !), tout cassés mais vivants, pour savoir que ce n'est pas à l'homme de
décider de l'heure de sa mort.
Qui sait pour quelle minute de notre vie nous avons été créés ? Nous avons reçu le cadeau de la
vie sans l'avoir demandé ; ce n'est pas à nous de décider à quel moment il faudra le rendre.
Et, inversement, le Christ nous suggère qu'en vérité il n'y a pas là un problème qui soit en notre
pouvoir de résoudre : (Lc 12, 25) "Qui d'entre-vous peut par son inquiétude prolonger tant soit peu
son existence ?".
Face à la perspective de sa mort, on ne devrait avoir rien à modifier du cours de sa vie. C'est ce
que répondit, enfant, saint Louis de Gonzague, enfant, à son précepteur lui demandant, lors
d'une récréation, ce qu'il ferait si on lui annonçait la fin du monde pour dans un quart d'heure :
- « Je continuerais à jouer du ballon ! »
Sur les "transcendantaux" :
L'ennemi du Beau c'est la laideur. Préférer la courtoisie du beau geste ; et l'élégance plutôt que
le négligé et la servilité du "comme tout le monde", qui semble avoir comme uniforme : T-shirt,
blue-jean et casquette de baseball. Chacun sa personnalité, que diable !
L'ennemi du Bien c'est le mal et il est aussi en nous : par l'égoïsme et surtout par l'orgueil.
L'ennemi du Vrai c'est le mensonge sous toutes ses formes.
5.7. Exemples d'action concrète
On connaît la réponse d'un Chrétien à un incroyant, qui lui montrait un homme pendu par les
Nazis dans un camp de concentration, en lui demandant :
- « C'est tellement injuste… alors, dis-moi maintenant… Où est-il, ton Dieu ?»
Le Chrétien répondit, en montrant l'homme pendu, image de Jésus crucifié par la méchanceté
des hommes :
- « Là !»
D'autre part, on prête au cardinal Ratzinger, futur pape Benoït XVI d'avoir fortement exprimé
cette certitude : l'enfer est là où Dieu n'est pas.
La Foi, la confiance absolue en Dieu, nous aide à ne pas reculer, à faire face, à offrir, à consoler,
souvent dans un simple silence, au côté de quelqu'un qui souffre.
5.8. Énoncé de l'article
c'est ainsi qu'est donc rédigé le cinquième article du Code de la Chevalerie :
Article 5 : Tu ne reculeras jamais devant l'ennemi.
5.9. Explications complémentaires.
Nos prédécesseurs en chevalerie avaient la volonté de s'efforcer de vivre "sans tache ni macule".
C'était leur "honneur", la très grande idée qu'ils avaient de leur dignité de fils et de filles de Dieu.
Reculer devant l'ennemi, c'était la honte et l'opprobre assurés.
"Collaborer" avec l'ennemi, pour survivre, aussi.
5.10. Limites et sauvegarde
A l'exemple du Christ, on a bien le droit de prier, de demander d'être épargné, et de ne pas
rencontrer d'ennemi !
Mais Dieu sait bien mieux que nous ce qui est bon pour nous. Avant même qu'on exprime nos
demandes, il les connaît déjà ! Et Il répond toujours, de manière appropriée.
55
Et puis, il y a ce diction populaire : "il ne faut pas tenter le Diable"
Et, plus sérieusement, Jésus, tenté au désert, renvoie le Démon à ses ténèbres en lui disant :
(Mt 4, 7) : - "Tu ne mettras pas à l'épreuve le Seigneur ton Dieu".
5.11. Armement : se préparer, être prêt
Alors il faut être prêt. "Sans peur et sans reproche" était la devise du chevalier Bayard, lui qui
adouba un roi ( François 1er, sur le champ de bataille de Marignan, en 1515).
Ne pas se laisser surprendre.
Savoir, dans les difficultés ou les revers de fortune, se souvenir des moments heureux. Et penser,
dans les moments heureux, qu'il y aura des jours plus difficiles.
Saint Paul (Ph 4, 12) montre l'exemple : "Je sais vivre dans la gêne, je sais vivre dans
l'abondance…"
Savoir prier le Notre Père "…que ta volonté soit faite", bien avant l'épreuve, afin d'être en mesure
d'accepter et d'être prêt à offrir sa souffrance, pour qu'elle ne soit pas inutile.
5.12. Applications possibles
Au plan religieux : l'ennemi est le Démon, le tentateur et le diviseur, qui essaie de nous embobiner
dans ses mensonges.
La réponse de saint Paul (Ph 1, 21-22 ) est claire, toute d'ouverture et de disponibilité :
"Pour moi, vivre, c'est Christ, et mourir m'est un gain. Mais si vivre ici-bas doit me permettre un
travail fécond, je ne sais que choisir…"
Au plan de la charité : notre ennemi privilégié est la souffrance des plus déshérités, pauvres et
malades.
Au plan de l'unité des Chrétiens : ne jamais considérer un autre Chrétien comme un ennemi.
Extrait de "INITIATION AU CODE DE LA CHEVALERIE
– Théorie et pratique de l'esprit et du comportement chevaleresques"
(de Jacques-Youenn de Quelen. 2005. Ed Publibook.com )
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VIE DE L’ ASSOCIATION
Participation au Tro-Breiz 2007 de Dol à Vannes (29 Juillet au 4 Août)
Notre ami Loik véhiculé en Joellette
Départ de ND du Roncier (Josselin)
Rassemblement familial du 18 Août 2007 à Fouesnant (Penn-ar-Bed)
L'apéritif sous le crachin breton ...
Bravant une météo capricieuse une centaine
de personnes se sont retrouvées le Samedi 18
Août
dernier
à
Fouesnant
pour
le
rassemblement familial organisé par TUDJENTIL
BREIZH : l'apéritif ayant été pris sous un typique
crachin breton nous avons du finalement nous
abriter dans les sous-bois de Coat-Veil-Mour
pour pique-niquer sur des tables improvisées.
Heureusement le temps s'étant dégagé en
début d'après-midi nous avons pu partir à pied,
drapeaux Gwen-ha-Du et Kroaz-Du en tête vers
la plage du Cap-Coz en longeant les étangs
puis l'anse de Penfoulic.
Le long de l'anse de Penfoulic (Fouesnant)
Le départ pour la marche : biniou et drapeaux en tête
57
Théâtre à Rennes les 2 et 3
février 2008
Après le succès de la pièce de théâtre
(comédie Tovaritch) organisée par TUDJENTIL
BREIZH en Janvier 2006 (450 spectateurs) La
Troupe du Bruit qui Court revient à Rennes les 2
et 3 Février 2008 pour jouer une comédie
(affiche ci-contre) au profit de 2 associations
soutenues par TUDJENTIL BREIZH : Enfants du
Mékong (association d’aide à l’enfance du
Sud-Est asiatique) qui fêtera ses 50 ans en 2008
et DIHUN 35 (filière bilingue de l’enseignement
catholique d’Ille-et-Vilaine)
Organisation : TUDJENTIL BREIZH
Ouverture d’une nouvelle filière bilingue catholique à Vitré
12/06/2007 « J'ai le très grand plaisir de vous annoncer l'ouverture officielle de la filière bilingue à
l'école Jean XXIII pour la rentrée 2007 ! Anne Beaugendre, la directrice de l'école, nous a fait part
aujourd'hui de la décision de l'inspecteur d'académie et du directeur diocésain: Il y aura bien
une filière bilingue breton/français en septembre prochain ! La façon dont les classes seront
organisées et les enfants répartis, cela appartient à Mme Beaugendre et nous lui souhaitons bon
courage pour organiser tout ça !
Je remercie tout particulièrement le Collectif de parents , à l'initiative de ce projet, Dihun 35,
association de parents d'élèves bilingues qui nous a aidé à soutenir et finaliser notre requête, et
notamment son président Jacques de Poulpiquet, Madame Beaugendre et l'équipe éducative
de Jean XXIII qui ont accueilli cette idée avec enthousiasme, ainsi que Monsieur Pannetier,
directeur Diocésain, qui, dès la journée porte ouverte à l'école Jean XXIII s'est dit ouvert à ce
projet et prêt à créer un poste d'enseignant bilingue pour le mettre en oeuvre. »
Gaëlle Buteau, membre du Collectif des parents pour l'enseignement multilingue à Vitré
Projets de TUDJENTIL BREIZH pour le Tro-Breiz 2008
Lors de l’Assemblée Générale du 27 Octobre 2007, deux projets concrets ont été évoqués pour
participer de manière plus active à l’édition du Tro-Breiz 2008 (Vannes-Quimper) qui aura lieu du
Dimanche 27 Juillet au Samedi 2 Août :
- Assurer durant ces 7 jours de marche la distribution d’eau aux 1500 pèlerins
- Assurer le transport des personnes handicapées en Joellette (illustration en page 57)
Nous recherchons à cette fin une dizaine de personnes pour assurer un roulement entre ces 2
activités (contact pour ces deux projets : [email protected])
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Communiqué de TUDJENTIL BREIZH du 17 Juillet 2007
Rennes/Roazhon le 17/07/07: Communique de TUDJENTIL
BREIZH à Ouest-France et à l'Agence Bretagne Presse
Association de la Noblesse Bretonne : Non au projet de
réforme de la carte judiciaire en Bretagne
TUDJENTIL BREIZH, Association de la Noblesse Bretonne (ANB), proteste contre le projet de réforme
de la carte judiciaire en Bretagne qui envisage de placer sous la juridiction de la Cour d'Appel
d'Angers les tribunaux de Grande Instance de NANTES et de ST NAZAIRE qui placés jusqu'à
présent sous la juridiction de la Cour d'Appel de Rennes représentaient un des derniers symboles
de la Bretagne historique à cinq départements et donc de la Bretagne ducale.
Outre le fait de méconnaitre le passé historique de la Bretagne ce projet apparaît comme une
provocation du gouvernement contre le souhait de réunification administrative de la Bretagne
émis par la majorité des bretons à travers plusieurs sondages et relayé à plusieurs reprises par les
élus du Conseil Régional de Bretagne d'une part et ceux du Conseil Général de Loire-Atlantique
d'autre part.
TUDJENTIL BREIZH demande donc non seulement l'abandon de ce volet de la réforme de la carte
judiciaire de la Bretagne mais réclame sur la question de la réunification administrative de la
Bretagne une consultation démocratique par référendum des populations concernées.
Une victoire symbolique à Rennes !
TUDJENTIL BREIZH était présente le 29/09/07, devant l'ancien Parlement de Bretagne, à la
manifestation pour défendre la carte judiciaire de la Bretagne historique à cinq départements
9 NOVEMBRE 2007 : Au cours de son intervention à Rennes, la garde des Sceaux Rachida Dati à
confirmé que le TGI de Nantes et la Loire-Atlantique resteront dans la juridiction de Rennes :
Extrait du discours concernant l'ensemble des 5 département bretons :
"La cour d'appel de Rennes comptera 13 tribunaux d'instance, à Dinan, Guingamp,
Saint-Brieuc, Brest, Morlaix, Quimper, Redon, Rennes, Saint-Malo, Lorient, Vannes,
Nantes et Saint-Nazaire"
59
Assemblée générale du 27 Octobre 2007
Suite au succès et à la curiosité suscités par la présence de notre bannière à la manifestation du
29 Septembre à Rennes (cf communiqué et photos page précédente) de nouveaux outils de
communication ont été soumis lors de notre assemblée générale à l’approbation des adhérents :
-
-
Un drapeau pour notre association qui puisse permettre d’assurer une visibilité de l’ANB lors
de manifestations à venir : la proposition du vexillologue Hervé Prat a été retenue
moyennant quelques demandes de modifications mineures (cf article ci-contre)
Parmi les devises proposées celle de Loik « Bretagne oblige » a fait l’unanimité.
Sur notre nouveau logo notre chevalier breton possède désormais un bouclier orné de la
Kroaz Du (Croix noire) qui était celle qu’arboraient nos chevalier bretons lors des croisades
en Terre Sainte.
Dans les nombreux points abordés au cours de l’après-midi nos relations (ou plutôt l’absence de
relations) avec l’ANF ont fait l’objet d’une discussion qui a inspiré notre chroniqueur Arthur dans
son billet en fin de ce bulletin.
A l’issue de l’Assemblée Générale, trois nouveaux membres ont été élus au Conseil
d’Administration de TUDJENTIL BREIZH (qui comporte désormais 10 membres) :
- Mériadec de Gouyon-Matignon dont la tâche est de susciter un cercle d’adhérents à Paris
(20 % de nos membres y résident)
- Arnaud de Servigny dont la tâche est de susciter un cercle d’adhérents à Londres où il
travaille depuis plusieurs années.
- Loic Denis , Docteur en droit et membre du conseil national du Collectif des Démocrates
Handicapés (CDH) en charge des relations avec les élus.
BRETAGNE OBLIGE !
ABALAMOUR DA VREIZH !
Drapeau de l’ANB et drapeau dit de Saint-Yves
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Banniel TUDJENTIL BREIZH gant Hervé Prat
23 septembre 2007 : c’est l’inacceptable remise en cause de quelque mille ans de notre histoire
par le projet fou, profondément anti-social et déracinant de réforme de la Carte judiciaire
bretonne qui est à l’origine de ce nouveau signe de ralliement à toutes les justes causes
défendues par l’ANB.
Me voici donc devant le Parlement de Bretagne. Parmi les omniprésents Gwenn-ha-Du, quelques
Croix Noires et drapeaux du Pays de Rennes, de nombreux drapeaux nantais, je remarque une
banderole frappée d’un logo de style héraldique accompagné d’une inscription : Tudjentil Breizh,
Association de la Noblesse Bretonne. Curiosité de vexillologue aidant, c’est ainsi que j’entre en
contact avec Jacques de Poulpiquet, pour parler emblèmes et drapeaux.
Quelques jours plus tard, j’envoie trois propositions au président de l’association, qui me répond
qu’elles feront l’objet d’un vote à l’occasion de l’A.G. du 27 octobre 2007.
Début novembre, je reçois un courriel m’annonçant que la proposition n°1 a été adoptée,
moyennant quelques modifications souhaitées, ce qui au final nous donne un Kroaz Du, drapeau
national breton historique et étendard de la Chevalerie bretonne au temps des Croisades,
chargé en son centre du logo remanié de l’association (recto du drapeau page précédente et
verso en couleurs sur le dos de couverture du bulletin). Selon les règles de la vexillologie, j’ai donc
apporté les modifications suivantes à l’emblème central : suppression des inscriptions (un bon
drapeau parle de lui-même), le chevalier est tourné face à la hampe, donc face au vent, et
symboliquement sus à l’adversaire. Un gentilhomme ne tourne pas le dos. Enfin, et sur une
suggestion de Jacques de Poulpiquet inspirée de ma proposition n°3 ou j’avais fait figurer notre
chevalier sur fond jaune-orangé en canton de la croix noire, et afin de le rendre plus lisible, notre
preux défenseur des valeurs et de la cause bretonnes se détache sur fond orangé. L’association
du noir et de cette couleur rappelle la bannière armoriée de la famille Hélouri de Kermartin, ou
drapeau de Saint-Yves (Fig.2), Patron des Bretons et avocat des pauvres…et pourquoi pas des
causes défendues par l’ANB ? C’est de plus une couleur très solaire qui peut représenter la
lumière, l’aube, le réveil, la foi…
Je formule le vœu que bientôt, et en vertu de l’usage vexillaire originel, ce nouveau drapeau
flotte longtemps en signe de reconnaissance et de ralliement sur les champs de bataille des
Tudjentil Breizh.
Hervé Prat, membre de la Kevarzhe Vannielouriezh Vreizh (Société Bretonne de Vexillologie)
Blog : http://drapeauxbretagne.canalblog.com/ Coordonnées de l’association en page Accueil
Fondée le 23 juin 1996, la Société Bretonne de Vexillologie, membre de la FIAV (Fédération
Internationale des Associations Vexillologiques) depuis 1997, rassemble des passionnés de
drapeaux et d'histoire. Ses buts principaux sont :
- Faire la compilation la plus exhaustive possible des drapeaux des villes, pays, associations et institutions
de Bretagne, passés et présents.
- En assurer l'information au public et la sauvegarde pour la postérité, par la publication d'un bulletin; Ar
Banniel.
- Proposer aux municipalités, institutions et associations bretonnes la création de drapeaux
vexillologiquement corrects;
- Lutter de toutes ses forces contre la logomanie, véritable cancer de la vexillographie en Bretagne;
- Apporter sa contribution à la sauvegarde et au développement du patrimoine culturel national breton.
Ouvrage de référence : Les drapeaux bretons des origines à nos jours, Philippe Rault, Coop-Breizh.
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LE BILLET D’ ARTHUR
L'Association de la Noblesse Française (ANF) fête ses 75 ans ...
Née en 1932 l'ANF est une vieille dame qui a atteint l'âge respectable de 75 ans : si elle a fait ainsi
la preuve d'une belle longévité elle est cependant restée enfermée depuis sa fondation dans son
statut d'association d'entraide créée certes dans un but louable mais comportant le risque
inhérent de repli sur soi dès lors que cette entraide a été limitée aux seuls membres de l'ANF. Au
tournant de ce siècle la grande majorité des membres de l'ANF n'a pas su non plus saisir
l'occasion de mener à bien les réformes que prônait alors la direction de l’ANF : cette dernière
ayant été désavouée en 1999 au terme d’une crise importante qui vit s’affronter durant deux ans
un clan conservateur contre un clan réformiste avec au final l’élection d’une nouvelle direction
hostile à tout changement.
Faut-il dès lors s'étonner de la création dans les cinq années qui suivirent de nouvelles associations
de noblesse en France fondées par des personnes qui ne se reconnaissaient résolument pas dans
le manque d'ouverture de l'ANF : l’Institut Saint-Georges pour la Noblesse (ISGN) puis l' Association
de la Noblesse Bretonne (ANB) sans compter la mystérieuse Association de Défense de la
Noblesse Française et Etrangère (ADNFE).
Si aujourd'hui l'ANF n'a plus de ce fait le monopole de la noblesse en France elle continue
cependant à s'affirmer contre vents et marées comme la seule dépositaire des valeurs de la
noblesse française en déniant toute reconnaissance officielle aux nouvelles associations de
noblesse française. Ainsi au prochain Congrès de la CILANE qui aura lieu à Versailles en
Septembre prochain, le seul visage de la noblesse française qui sera présenté aux autres
associations de la noblesse européenne sera celui de l'ANF , son Président n'ayant en effet pas
donné suite aux demandes réitérées de l'ANB et de l'ISGN d'y voir conviée une (modeste)
délégation composée d'un ou deux de leurs membres.
L’ANB ou l’ISGN seraient-elles moins européennes ou moins porteuses de valeurs que l'ANF ? Ou
alors ne seraient-elles pas fréquentables : la Présidente de l'ANF Bretagne n'a-t-elle pas ainsi un
peu hâtivement qualifié d' ”autonomistes” les membres de l'ANB alors que ces membres de
vieilles familles bretonnes ne font que remplir leur devoir chevaleresque en défendant activement
une langue bretonne en grave danger de disparition.
L'absence de site INTERNET pour une association qui revendique plusieurs milliers de membres
n'est-elle pas révélatrice du manque de communication (et d'ouverture) de l'ANF ?
Sa branche JNF a bien créé un site http://www.anf-jnf.eu mais qui tout comme celui de la CILANE
http://www.cilane.eu sont tous deux d'accès réservés à leurs seuls membres (à l’inverse des sites
publics de l’ISGN et de l'ANB) : n’a-t-on pas là l'illustration d'une noblesse repliée sur elle-même ?
La JNF et la CILANE n'ont-elles donc rien à communiquer au grand public (et en particulier à la
jeunesse de nos pays européens) sur les valeurs de la noblesse ? Nous lançons donc un appel à la
fois solennel et amical aux jeunes de l'ANF et de la CILANE pour les encourager à ouvrir leurs sites
INTERNET respectifs en cette année 2008 qui verra à l'automne prochain un rassemblement à
Versailles des noblesses européennes (dont fait assurément partie la noblesse bretonne ...)
Arthur
NB : nous invitons nos sympathisants (et les nombreux amis que nous comptons au sein de l'ANF
Bretagne) à réagir auprès de la direction de l'ANF contre l'exclusion de fait de l'ANB et de l'ISGN
du prochain congrès de la CILANE en envoyant un mail de protestation à [email protected] avec
copie à [email protected] pour garder une trace de votre soutien !
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ISBN13
978-2-9527116-3-0
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