Diabète et cancer
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Diabète et cancer
RéfleXions 38 mars 2010 Tome 7 Congrès Dossier Hormonothérapie (HT) dans le cancer du sein après la ménopause : où en sommes- nous après San Antonio (SABC) 2009 ? Diabète et cancer Soins de support Nutrition thérapeutique en oncologie : épidémiologie, physiopathologie et conséquences de la dénutrition Savoir prescrire Savoir Prescrire : Arixtra ® Onco-gynéco ISSN : 1767-655X Intérêt de la résection chirurgicale des métastases ovariennes de cancers colorectaux : revue de la littérature Coordination scientifique : François Goldwasser 4 Crédits FMC par an JBH santé De l’information à la formation du spécialiste en médecine oncologique Editorial François Goldwasser Cancérologie, GH Cochin, Paris Diabète et Cancer : histoire d’un rapprochement inéluctable. D e plus en plus de patients ont un cancer ET un diabète. Nous voyons et verrons de plus en plus de patients atteints de manière concomitante d’une pathologie maligne et d’un diabète. Ce simple fait impose un rapprochement des cancérologues et des diabétologues : la mise en route d’un traitement pour une maladie ne doit pas exposer de risques liés à la seconde. Le traitement anti-tumoral peut déséquilibrer le diabète dangereusement, le traitement antidiabétique peut exposer à des hypoglycémies pendant la période de traitement anti-tumoral, et la prise en charge du diabète ne doit pas retarder celle d’un cancer. Ce besoin de rapprochement, s’il ne devait couvrir que les risques réciproques des deux traitements, pourrait se limiter à des échanges de pratiques et des recours accessibles de manière réactive en cas de besoin. Mais d’autres faits émergent : • de plus en plus de cancers apparaissent épidémiologiquement liés au diabète et des données suggèrent que le développement du diabète participe à la carcinogenèse de plusieurs cancers. • Le traitement anti-diabétique n’est pas neutre sur le contrôle de la maladie tumorale : la metformine peut avoir in vitro, in vivo et en clinique, un effet anti-tumoral dans certaines circonstances. Inversement, certains traitements anti-tumoraux altèrent l’équilibre diabétique, d’autres sont développés pour agir précocement sur la diabétogenèse : imatinib, sunitinib. Les approches thérapeutiques préventives visent des facteurs de risque communs, qui apparaissent de plus en plus comme une voie commune partagée par cancer et diabète : obésité, syndrome métabolique, athérosclérose. L’objectif thérapeutique comporte dans les deux cas, une éducation thérapeutique, beaucoup plus structurée à ce jour en diabétologie qu’en cancérologie, et une éducation diététique, qui devront à terme être partagées dans un même environnement clinique d’action globale sur les risques et d’autonomisation de la personne malade. L’intervention diététique s’est avérée pouvoir induire une réduction du risque de rechute dans le cancer colo-rectal de stade III et le cancer du sein RH+, d’amplitude comparable aux médicaments, et additionnelle aux bénéfices de ceux-ci. Comment expliquer les chevauchements croissants dans la physiopathologie et la biologie moléculaire des deux maladies ? Nous sommes en train d’évoluer encore dans le concept de cancer : nous découvrons, étourdis, la puissance d’un nouveau paradigme : • autrefois, le cancer était défini comme une prolifération incontrôlée, la réponse thérapeutique logique devait être un antimitotique. • par la suite, le cancer fut défini comme une accumulation de mutations somatiques, la réponse thérapeutique fut d’abord d’associer les cytotoxiques pour surmonter des résistances, le modèle de chimiorésistance de Goldie et Coldman faisant écho aux mécanismes génétiques de résistance bactérienne. • Lorsque les mêmes altérations moléculaires furent mises en évidence dans la carcinogenèse et dans les mécanismes de résistances aux cytotoxiques, le concept de thérapies ciblées s’imposa. Il fallait développer des médicaments agissant sur les altérations moléculaires directement en cause ou vitales, dans le processus malin. • Tandis que de nouvelles thérapeutiques ciblées sont envisageables, en particulier dans les sarcomes, et plus généralement lorsque le processus tumoral est lié à peu d’évènements moléculaires, une autre approche a montré son intérêt en clinique : abandonner la cible au sein de la cellule cancéreuse, trop complexe et de comportement trop aléatoire, pour s’attaquer à l’environnement tumoral. Les médicaments anti-angiogéniques ne sont pas des thérapies ciblées (il n’existe pas de relation pour le moment entre une cible identifiée avant le traitement et l’efficacité du traitement, rendant possible d’individualiser celuici). C’est la raison de l’ efficacité des anticorps monoclonaux anti-VEGF, dans des cancers biologiquement aussi éloignés que le cancer colo-rectal, le cancer du sein, le cancer pulmonaire non à petites cellules, le cancer du rein. Après la néoangiogenèse, dont la régulation nous est encore largement inconnue, d’autres actions thérapeutiques peuvent viser les relations hôte-tumeur dans l’avenir. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 3 • Actuellement, le nouveau paradigme dont l’importance s’amplifie chaque année au congrès de l’American Association for Cancer Research (AACR), est le concept de métabolisme énergétique de la cellule. La croissance du compartiment de cellules tumorales implique la captation de substrats énergétiques (02, glucose, triglycérides, acides aminés) et la production efficace d’ATP. Cette croissance se fait longtemps de manière infra-clinique puis, lorsque la consommation énergétique devient très élevée, se répercute sur l’état général et explique l’apparition progressive d’une dénutrition, d’autant plus rapide que la maladie est rapidement proliférative. Cette consommation de substrats énergétiques est exploitée pour faire des scintigraphies au 18FDG à nos patients. Dès lors qu’agir sur le métabolisme énergétique des cellules cancéreuses devient un objectif thérapeutique, les regards se tournent nécessairement sur les conséquences sur la croissance tumorale de tout excès de substrat énergétique, donc d’une hyperglycémie chronique, d’un hyperinsulinisme, d’une hypercholestérolémie, mais également ce que l’on peut attendre d’agir sur ces facteurs ainsi que sur des enzymes du métabolisme énergétique, et bien sûr l’action directe de modifications de l’alimentation. L’exercice physique apparaît également comme une action thérapeutique en puissance, bien connue en prévention, qui devient très intéressante à étudier au stade de maladie, tant pour ses répercussions positives bien connues sur l’hyperinsulinisme, que pour celles induites par une redistribution des dépenses énergétiques vers les muscles. Ce nouveau concept a le mérite d’être parlant pour le clinicien qui voit bien qu’un malade atteint de cancer maigrit et que cette manifestation clinique est constante au cours des évolutions défavorables! Approfondir ces recherches devrait avoir pour conséquence de développer de nouvelles approches thérapeutiques, pas nécessairement toutes médicamenteuses, et d’aborder la prise en charge clinique sur un mode plus global. Pour toutes ces raisons, je conclurai en disant que l’année 2010 est l’an 1 du rapprochement entre diabète et cancer, et ce rapprochement va rapidement s’accélérer par nos connaissances en biologie et dans nos pratiques cliniques. Bulletin d’abonnement RéfleXions en Médecine Oncologique Je m’abonne pour un an. 4 Crédits Déductible de vos frais professionnels Médecin 1 an : 50 € 2 ans : 80 € Institution 1 an : 70 € 2 ans : 120 € Interne/Etudiant (joindre un justificatif ) 1 an : 30 € 2 ans : 55 € Etranger (Dom-Tom inclus) 1 an : 63 € 2 ans : 100 € FMC par an Nom : ............................................................................ Prénom :................................................................................. Adresse : ......................................................................................................................................................................... ......................................................................................................................................................................................... Email : ............................................................................................................................................................................. Règlement : Chèque à l’ordre de JBH Santé Créditez votre FMC : Abonnez-vous En application de l’arrêté de juillet 2006 portant homologation des règles de validation de la FMC, un abonnement à un périodique médical répondant aux critères de qualité définis par les CNFMC donne droit à 4 crédits FMC/an, dans la limite de 40 crédits sur 5 ans. Le critère retenu pour marquer la démarche volontaire du médecin est le paiement d’un abonnement. Cet abonnement doit être prouvé par une facture. Carte bancaire (VISA exclusivement) N° : Cryptogramme : Date d’expiration : Signature : Bulletin à retourner à : JBH Santé, 53, Rue de Turbigo - 75003 PARIS Une facture justificative vous sera adressée 4 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique SOMMAIRE RÉDACTEURS EN CHEF François GOLDWASSER, Cochin, Paris Mario DI PALMA, IGR, Villejuif COMITÉ SCIENTIFIQUE Philippe ANRACT, Cochin, Paris Marie-France AVRIL, Cochin, Paris Daniel BRASNU,HEGP, Paris Xavier BERTAGNA, Cochin, Paris Jean-Yves BLAY, Lyon Roland BUGAT, Centre Claudius Régaud, Toulouse Charles CHAPRON, Cochin, Paris Stanislas CHAUSSADE, Cochin, Paris Bernard CORTET, Lille Bertrand DOUSSET, Cochin, Paris Nicolas DUPIN, Cochin, Paris Daniel DUSSER, Cochin, Paris Sylvie GISSELBRECHT, Institut Cochin, Paris Loïc GUILLEVIN, Cochin, Paris Aimery de GRAMONT, St Antoine, Paris Martin HOUSSET, HEGP, Paris Axel KAHN, Institut Cochin, Paris David KHAYAT, La Pitié Salpêtrière, Paris Jerzy KLIJANIENKO, Institut Curie, Paris Jean LACAU-SAINT GUILLY, Tenon, Paris Paul LEGMANN, Cochin, Paris Jean-François MEDER, St Anne, Paris Jean-Louis MISSET, St Louis, Paris Françoise MORNEX, Lyon Luc MOUTHON, Cochin, Paris Stéphane OUDARD, HEGP, Paris Philippe POURQUIER, Centre Bergonié, Bordeaux Pascal PIEDBOIS, Henri Mondor, Créteil Eric PUJADE-LAURAINE, Hôtel Dieu, Paris Philippe ROUGIER, Ambroise Paré, Boulogne Christian ROUX, Cochin, Paris Michèle SALAMAGNE, Paul Brousse, Villejuif Daniel SERIN, Avignon Eric SOLARY, Dijon Jean TREDANIEL, St Louis, Paris Jean Michel VANNETZEL, Hartmann, Neuilly COMITÉ DE LECTURE Jérôme ALEXANDRE, Hôpital Cochin, Paris Hervé CURE, Reims François GOLDWASSER, Hôpital Cochin, Paris Loïc GUILLEVIN, Hôpital Cochin, Paris Jean-Louis MISSET, Hôpital St-Louis, Paris Jean-Yves PIERGA, Institut Curie, Paris Eric RAYMOND, Hôpital Beaujon, Paris 3 Edito : Diabète et Cancer : Histoire d’un rapprochement inéluctable — F. Goldwasser DOSSIER Diabète et cancer 6 9 12 16 Diabète et Cancer : des liens de plus en plus étroits —— François Goldwasser Chimiothérapie chez le diabétique ——————————— Helen Mosnier-Pudar Procédures accompagnant la chimiothérapie anti-tumorale chez un patient atteint de cancer et diabétique ————————— François Goldwasser et coll. TP53 : Rôle dans la résistance aux anti-tumoraux et dans l’insulino-résistance ——————————— Pascaline Boudou-Roquette Congrès 21 Hormonothérapie (HT) dans le cancer du sein après la ménopause : où en sommes- nous après San Antonio (SABC) 2009 ? ——— JM. Vannetzel Onco-gyneco 23 Intérêt de la résection chirurgicale des métastases ovariennes de cancers colorectaux : revue de la littérature —— Paul Berveiller, Nicolas Veyrie, Olivier Mir S avo i r p r e s c r i r e 26 Savoir Prescrire : Arixtra ® ———————————————— Mansouriah Merad Soins de support 29 Nutrition thérapeutique en oncologie : épidémiologie, physiopathologie et conséquences de la dénutrition Pascal Crenn, Jérôme Alexandre, Philippe Rougier 11,19,31 Rencontres... 4 Abonnement UNE ÉDITION J.B.H. SANTÉ 53, rue de Turbigo - 75003 Paris Tél. : 01 44 54 33 54 - Fax : 01 44 54 33 59 Site : http ://www.jbhsante.fr Directeur de la publication : Dr Jacques HALIMI Secrétariat de rédaction : Yaëlle ELBAZ Maquette : Clémence KINDERF Service commercial : Véronique GUILLOT Secrétariat et abonnements : Louise ASCOLI ([email protected]) Imprimerie GYSS ISSN : 1767-655X - Commission paritaire : T 85255 Dépôt légal : 1er trimestre 2010 Adhérent au CESSIM Les articles de “Réflexions en Médecine Oncologiques” reflètent l’opinion des auteurs et n’engagent en aucune façon la responsabilité de la Société éditrice. Aucun article publié dans ce numéro ne peut être reproduit quels que soient la forme et les procédés sans l’autorisation expresse de l’éditeur. COMITÉ DE RÉDACTION Jérôme ALEXANDRE, Cochin, Paris Bertrand BILLEMONT, Cochin, Paris Alberto BOSSI, IGR, Villejuif Stéphane de BOTTON, IGR, Villejuif Pierre Régis BURGEL, Cochin, Paris Paul-Henri COTTU, Institut Curie, Paris Pascale DIELENSEGER, IGR, Villejuif Julien DOMONT, IGR, Villejuif Hassan IZZEDINE, La Pitié-Salpétrière, Paris Pierre KHALIFA, Paris Olivier MIR, St Vincent de Paul, Paris Hélène de La MENARDIERE, Cochin, Paris Mansouriah MERAD, IGR, Villejuif Thibaut de la MOTTE ROUGE, IGR, Villejuif Florence RABILLON, Cochin, Paris Eric RAYMOND, Beaujon, Paris Olivia RIBARDIERE, IGR, Villejuif Laurent ZELEK, Avicenne, Bobigny Eric ZERBIB, Saint-Cloud N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 5 Dossier DIABÈTE ET CANCER Diabète et Cancer : des liens de plus en plus étroits François Goldwasser Cancérologie, GH Cochin, Paris Introduction résumé Plusieurs études épidémiologiques suggèrent que le diabète ou les conditions associées à celui-ci (syndrome métabolique, obésité) est associé à un risque accru de nombreux cancers. Le rôle du syndrome métabolique, de l’hyperglycémie chronique, de l’hypersinsulinémie chronique, des IGFs, est fortement suggéré. Chez l’animal et en clinique humaine, on observe que le médicament anti-leucémique et antiGIST, l’imatinib, a un effet antidiabétique et préserve la survie des cellules bêta du pancréas et la sensibilité à l’insuline. Le cancérologue fait l’expérience des variations de glycémie sous sunitinib. Ces données auront des répercussions sur le suivi des patients, leur traitement, et les organisations de soins. mots-clés Cancer, Diabète, IGFs, Imatinib, Sunitinib 6 Les cliniciens observent de plus en plus de patients souffrant de manière concomitante d’un diabète et d’un cancer. Ils connaissent le risque infectieux accru des chimiothérapies chez le patient diabétique et les risques de décompensation diabétique liés en particulier aux utilisations répétées de corticoïdes à fortes doses en cancérologie. Cet article souligne des données épidémiologiques, de biologie, et cliniques récentes qui suggèrent l’intrication croissante des deux pathologies. Diabète et risque de cancer : rôles probables du syndrome métabolique et du système des IGFs Plusieurs études épidémiologiques ont montré chez les patients diabétiques, une augmentation d’un facteur supérieur ou égal à deux des risques de cancers colorectaux, mammaires, de l’endomètre, mais également rénaux à cellules claires, des carcinomes hépatocellulaires et pancréatiques (1). La question de savoir si le diabète de type 2 doit être considéré comme un facteur de risque indépendant, spécifique de cancer, est désormais évoquée. Ce lien pourrait s’expliquer par l’intolérance au glucose et l’hyper-insulinémie. Dans une revue, le rôle de l’hyperglycémie chronique et/ou de l’hyper-insulinémie chronique, apparaissent comme des facteurs plausibles associés à un risque accru de cancers. Il faut cependant noter que l’essentiel de l’augmentation du risque survient pour des élévations de ces paramètres au sein de la normale de patients non-diabétiques. De plus, dans plusieurs cas, la relation entre diabète et cancer et d’analyse incertaine en raison du rôle propre d’anomalies associées à l’obésité dans la carcinogenèse de certains cancers, tels que les cancers de l’endomètre ou du rein. Dans le cas particulier du cancer du pancréas, la place de l’hyperglycémie et de l’hyperinsulinisme dans la survenue d’un cancer pancréatique demeure controversée. De plus, ces anomalies peuvent également apparaître comme conséquence du cancer. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Diabète et Cancer : des liens de plus en plus étr oits Le carcinome hépatocellulaire (CHC) est la cause de décès qui augmente le plus rapidement aux Etats Unis. A côté des CHC liés à une infection virale hépatique (HBV ou HCV), et ceux liés à l’alcool, la plupart des séries de CHC retrouvent jusqu’à 30% de patients sans facteur de risque viral ou toxique connu. Ces CHC sont désormais attribués aux conséquences d’atteinte d’hépatite stéatosique non alcoolique, une manifestation du syndrome métabolique. Le syndrome métabolique est une constellation d’anomalies regroupant l’insulino-résistance, l’obésité, l’hypertension artérielle, et les dyslipidémies. On retrouve de plus en plus d’études reliant tout ou partie de ces éléments constitutifs du syndrome métabolique avec certains cancers. Ils augmentent le risque de cancer et altèrent le pronostic du cancer. Le syndrome métabolique devrait conduire à pour une large part à l’augmentation d’incidence du CHC dans les prochaines décennies (2). De nombreuses études de biologie cellulaire et d’études clinico-biologiques viennent en soutien des études épidémiologiques. • Dans le cancer de la prostate, nous connaissons bien le rôle des facteurs de croissance androgéniques sur le tissu prostatique sain et tumoral. D’autres facteurs de croissance, non androgéniques participent à la croissance tumorale, parmi lesquels l’IGF-1. Il semble que des taux élevés d’insulinémie sont plus particulièrement associés aux formes agressives, avec score de Gleason élevé (3). • Dans le CHC, il existe une association entre le polymorphisme génétique du système des insulin-like growth factors (IGFs). Les IGFs peuvent augmenter la prolifération cellulaire et inhiber l’apoptose, et favoriser la transformation cellulaire des hépatocytes en cellules de CHC. Dans une étude Clinique de type cas-témoin, 102 patients atteints de CHC et 306 patients témoins ont été inclus pour une étude du polymorphisme génétique des IGFs, par technique de PCR-RFLP. Les auteurs ont mis en évidence une différence significative (p = 0.02) entre les groups cas et témoins, dans la fréquence de distribution de certains polymorphismes de l’IGF-2. L’analyse, en utilisant un modèle de régression multiple, a montré que la présence de AA ou AG sur IGF-2R pourrait avoir un effet protecteur contre l’hépatite C [odds ratio (OR) = 0.35, IC95% = 0.15-0.82]. La combinaison du génotype IGF-2 +3580 AA et du génotype IGF2R GG était associée avec une réduction du risque de CHC (OR = 0.20, IC95% = 0.05-0.87). Ainsi, le système des IGFs pourrait participer à la susceptibilité de développer un CHC (4). • Le rôle de l’obésité et des conditions de métabolisme et d’inflammation associés à l’obésité fait encore l’objet d’études contradictoires. Une association entre poids et risqué de rechute et survie a été trouvée dans certaines études. Les contradictions entre études semblent liées à l’interaction complexe entre mesure d’adiposité, inactivité physique, et apports caloriques par l’alimentation. Certains facteurs pourraient avoir une valeur pronostique d’après des études observationnelles, et mériteraient d’être évalués au cours d’études randomisées : le taux de C-reactive protein (CRP), d’insulin-like growth factor (IGF), et d’ insuline (5). En cas de confirmation, cela ouvrirait la voie à des études d’intervention sur le syndrome inflammatoire et le syndrome métabolique. E n a t t e n d a n t d e t e l l e s é t u d e s , i l e s t p a r t i c u l i è re m e n t remarquable que durant le développement de la cachexie cancéreuse, apparaît une insulino-résistance et sur les modèles de rat Walker, l’introduction d’insuline en association aux inhibiteurs de prostaglandines permet d’inverser la tendance métabolique et favorise une reprise pondérale (6). Les inhibiteurs de tyrosine kinase améliorent le contrôle du diabète (7-17) Chez des rats Sprague-Dawley nourris par un régime hyperlipidique (60% de graisses pendant 8 semaines), les effets de l’imatinib sur la sensibilité à l’insuline et la glycémie, ont été étudiés (7) . Durant les 10 derniers jours du régime, les rats recevaient également soit du sérum salé, soit de l’imatinib (50 ou100 mg/kg) par jour par gavage. La dose la plus élevée d’imatinib a provoqué une diminution de la graisse mesurée en regard du psoas. Les rats présentaient des concentrations augmentées d’ insuline et une hyperglycémie. Les doses faibles d’imatinib (50 mg/kg), mais pas les doses fortes (100 mg/kg), normalisaient la sensibilité à l’insuline et la glycémie, sans modifier le métabolisme du glucose sur des rats témoins nourris par des rations pauvres en graisses. Les doses modérées d’imatinib se sont donc révélées capable de s’opposer à l’insulinorésistance induite par les repas riches en graisses, ameliorant l’action de l’insuline dans les muscles et les tissus graisseux. Les auteurs concluaient que l’imatinib pourrait être un médicament utile à déveloper pour le traitement du diabète de type 2. Dans une autre étude, l’imatinib pouvait induire la rémission de diabètes sur des souris db/db et améliorer l’insulinorésistance. L’imatinib augmentait la tyrosine-phosphorylation de l’ Insulin receptor substrate-1 et la phophorylation d’Akt après administration d’insuline. L’imatinib réduisait les concentrations sériques d’aminotransférases, et les concentrations hépatiques en triglycérides. La masse pancréatique en cellules bêta était augmentée par imatinib, Les auteurs concluaient que l’Imatinib ou des analogues pourrait être développés pour le traitement du diabète de type 2 et pour le traitement du syndrome métabolique. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 7 Diabète et Cancer : des liens de plus en plus étr oits L’effet anti-diabétique de l’imatinib et d’autres ITKs, concerne non seulement les souris diabétiques non-obèses, mais également, les souris atteintes de diabète induit par la streptozotocine, les souris db/db mice, les souris soumises à des régimes riches en graisses, et les patients atteints de diabète de type 2 (7-12) . Le mécanisme d’action de l’imatinib semble faire intervenir la protection contre la mort des cellules bêta et l’amélioration de la sensibilité à l’insuline. Dans ces conditions, il est possible que l’imatinib ou des dérivés, puisse être utilisés pour le diabète de type 1 lors de son apparition, pour sa prévention chez les patients à haut risque de diabète de type 1, et pour traiter les formes avancées de diabète de type 2. Cependant, dans une étude rétrospective de la Mayo clinic, reprenant les cas de patients traités pour LMC par imatinib, et atteints de manière concomitante d’un diabète de type 2, les auteurs n’ont pas mis en évidence d’effet anti-diabétique net dans cette population. De manière assez similaire, les patients traités par sunitinib, pour un cancer du rein métastatique ont de manière reproductible une diminution de leur glycémie pendant les 4 semaines de traitement et une re-ascension durant les deux semaines de pause de chaque cycle thérapeutique. Ceci justifie un suivi attentif de la glycémie (16,17). Si les ITKs peuvent avoir un effet anti-diabétique intéressant, cependant, l’effet anti-angiogénique peut être associé à des effets délétères dans les formes avancées de diabète, associées avec une atteinte microvasculaire. Ainsi, des nécroses distales ont été décrites chez des patients diabétiques sévères traités par sunitinib (18). Conclusion En conclusion, le lien entre diabète, syndrome métabolique et cancer se précise, tant sur le plan épidémiologique qu’au laboratoire. En clinique, même si les études manquent encore pour l’affirmer ou le recommander définitivement, on peut prédire que le syndrome métabolique des patients atteints de cancer va devenir un aspect important à considérer dans la prise en charge thérapeutique. Parallèlement, les intrications en thérapeutique entre diabète et cancer vont se multiplier : i n h i b i t e u r s d e t y ro s i n e k i n a s e s , i n h i b i t e u r s d e l ’ I G F 1 (19)...L’éducation thérapeutique du patient atteint de cancer devrait sans doute bientôt s’élargir aux mêmes considérations qu’en diabétologie, en soulignant la place de la diététique, de l’exercice physique, bref la place croissante de l’action sur le mode de vie. Conflits d’intérêts : aucun RÉFÉRENCES 1-Grote VA, Becker S, Kaaks R.Diabetes Mellitus Type 2 - An Independent Risk Factor for Cancer? 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Lancet Oncol. 2010;11(2):129-135. 8 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Dossier DIABÈTE ET CANCER Chimiothérapie chez le diabétique Helen Mosnier-Pudar Hôpital Cochin, Service des Maladies Endocriniennes et Métaboliques Paris résumé Le traitement du cancer comporte de multiples aspects. La prise en charge des co-morbitidés, dont le diabète de plus en plus fréquent, est un de ces aspects. Reconnaître le diabète et ses complications est important. En effet la présence de complications, en particulier cardiaque et rénale, peut nécessiter une adaptation des traitements par chimiothérapie. D’un autre côté, le cancer, le stress engendré, la chimiothérapie et ses traitements adjuvants sont sources de déséquilibre du contrôle glycémique. Des ajustements thérapeutiques peuvent être nécessaires : modifications des antidiabétiques oraux, du schéma d’insuline, insulinothérapie transitoire. Pour améliorer le pronostic du cancer un traitement efficace oncologique et du diabète sont nécessaires. Ceci nécessite une bonne coordination de tous les acteurs de soins et, au mieux, l’intervention d’une équipe multidisciplinaire incluant des spécialistes du diabète. mots-clés Diabète, Chimiothérapie, Néphropathie, Cardiomyopathie, Equilibre glycémique, multidisciplinaire. e diabète et le cancer sont aujourd’hui deux des causes les plus fréquentes de mortalité et de morbidité. Ainsi la prévalence du diabète chez des patients nouvellement diagnostiqués pour cancer est relativement importante et, selon les études, se situe entre 8 et 18 % (1). En dehors de son rôle dans la carcinogenèse, le diabète peut modifier la prise en charge du cancer, en particulier dans la prescription de la chimiothérapie. Ces modifications sont expliquées par les co-morbidités qui peuvent accompagnées le diabète comme l’insuffisance rénale, la présence d’une neuropathie, l’atteinte cardiovasculaire… qui conduisent à des adaptations des schémas thérapeutiques et des posologies avec une possible réduction des taux de rémission et / ou guérison. D’un autre côté, la présence d’un cancer, peut inciter les médecins, y compris les diabétologues, à être moins agressifs dans le contrôle de la glycémie et des autres facteurs de risque, ce qui à son tour va influencer la morbi-mortalité liée au diabète. Malgré ce constat, peu d’études se sont intéressées à la relation diabète – chimiothérapie. Notre objectif va être de décider quel bilan il faut réaliser avant le début d’une chimiothérapie chez une personne diabétique, quels conseils donnés pour la gestion du diabète pendant la chimiothérapie et quelle surveillance instituée. L Que faire avant la chimiothérapie Avant le début de la chimiothérapie, il est important de refaire le point sur les complications du diabète qui peuvent interférer avec le choix et la posologie des agents utilisés. Il s’agit de contrôler la fonction rénale, et de rechercher une neuropathie périphérique chez les personnes présentant un diabète de type 1 ou de type 2. L’insuffisance cardiaque sera plus particulièrement recherchée en cas de diabète de type 2 (2). Environ 25 à 40 % des sujets diabétiques de type 1 développent une néphropathie diabétique tandis que la prévalence serait plus faible, de l'ordre de 10 à 20 % chez les diabétiques de type 2 et le diabète représente la première cause d’insuffisance rénale terminale. Son dépistage est systématique, une fois par an par mesure de l’excrétion urinaire d’albumine et dosage de la créatinémie. Plus que la valeur de la créatinémie, c’est l’estimation de la clearance (formule de Cockcroft ou MDRD) qui permet d’évaluer la fonction rénale. Les agents néphrotoxiques devront, alors, être administrés avec prudence et leur posologie adaptée à la fonction rénale N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 9 Chimiothérapie chez le diabétique Les atteintes cardiaques sont fréquentes et sévères chez le diabétique. L’insuffisance cardiaque est sous-estimée dans le diabète. Les mécanismes conduisant à la dysfonction ventriculaire gauche sont nombreux, l’insuffisance coronaire en est le principal, la myocardiopathie en est un autre. Elle concerne 12 % des diabétiques de type 2 , et 39 % de ceux qui ont plus de 65 ans. Au delà de la recherche des symptômes classiques, un dépistage avant le début de la chimiothérapie est nécessaire, car nombre de patients sont asymptomatiques. L’échographie cardiaque est l’examen de dépistage le plus souvent utilisé. Une alternative peut être de doser le taux de BNP (Brain Natriuretic Peptide), qui augmente en cas d’insuffisance cardiaque et n’est pas modifié par la présence d’une hyperglycémie. Chez les patients avec insuffisance cardiaque, la prescription d’agent de la classe des anthracyclines doit être prudente et s’accompagnée d’une surveillance de la fraction d’éjection ventriculaire gauche. L’estimation de la prévalence de la neuropathie chez les personnes diabétiques est variable selon les études, mais s’élève jusqu’à 60 %. Le dépistage se fait par un examen des pieds, en particulier la recherche d’une perte de sensibilité, par une mauvaise perception du monofilament 10 g. Dans ce cadre l’utilisation d’agent neurotoxique, comme le cisplatine, paclitaxel et vincristine, peut exacerber la symptomatologie douloureuse nécessitant une prise en charge spécifique, mais justifiant parfois une réduction de dose. En plus de ce bilan à la recherche d’éventuelle complication, il est important de faire le point sur le traitement du diabète. Pour les patients diabétiques de type 1 ou diabétiques de type 2 sous insuline, vérifier le schéma, s’assurer qu’il sera compatible avec les contraintes de la chimiothérapie. Il est primordial d’éduquer le patient à l’adaptation des doses d’insuline. La réalisation d’une autosurveillance glycémique quotidienne, l’interprétation des résultats, l’identification des facteurs de déséquilibre, comme la corticothérapie, et la conduite à tenir dans ces situations fait partie des acquis que le patient doit pouvoir maîtriser. Dans le cas contraire, l’intervention d’une équipe spécialisée en diabétologie peut être nécessaire. Pour les patients qui reçoivent des antidiabétiques oraux , un certain nombre de précautions doivent aussi être prises. Certaines sont du domaine uniquement des médecins, comme la surveillance de la fonction rénale qui peut conduire à l’arrêt de la metformine en cas d’insuffisance rénale, ou l’arrêt d’une thiazolidinedione (pioglitazone et rosiglitazone) en cas d’insuffisance cardiaque. Il s’agit ici de respecter les règles de bon usage et les contre-indications de ces traitements D’autres précautions sont plus du domaine du patient, en particulier adapter la posologie des médicaments insulino-secréteurs (sulfamide et glinide) en fonction des apports alimentaires et des résultats glycémiques. Il s’agit, aussi, d’éducation du patient, qui grâce à l’autosurveillance, à la connaissance des situations à risque d’hypo ou d’hyperglycémie peut ajuster 10 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique son traitement. Il peut être nécessaire avant ou en cours de chimiothérapie de recourir à une insulinothérapie, soit pour des problèmes de déséquilibre ou d’effets secondaires ou de contre-indication. L’indication, le choix du schéma le plus approprié est affaire de spécialiste et un avis diabétologique doit être proposé. Gestion du diabète pendant la chimiothérapie Au cours de la chimiothérapie, de multiples facteurs peuvent venir déséquilibrer le contrôle glycémique. Au delà du stress et de l’anxiété que génère le diagnostic d’un cancer et son traitement, les agents de la chimiothérapie ou les traitements adjuvants, les effets secondaires sont source de déséquilibre. La corticothérapie et la somatostatine sont deux traitements qui peuvent fortement déséquilibrer le diabète. Il est alors nécessaire d’ajuster le traitement, augmenter les doses d’insulines ou d’antidiabétiques insulino-secréteurs, lorsque ces traitements sont administrés. Sous corticothérapie, le recours à l’insulinothérapie transitoire peut être nécessaire chez les patients qui ne sont pas insulinotraités. L’hyperglycémie, surtout si elle est majeure, peut aggravée la déshydratation ou d’autres effets secondaires de la chimiothérapie. La gestion des traitements à risque d’hypoglycémie ( insuline, agent insulinosecréteur) doit être adaptée à l’appétit des patients. Vomissement et anorexie peuvent être à l’origine d’hypoglycémie. En plus de l’adaptation du traitement du diabète, il est important que le patient reconnaisse ses symptômes d’hypoglycémie et sache prendre les mesures nécessaires à leur correction et à leur prévention. Certaines études ont montré que les patients diabétiques sont plus sujets à développer certains effets secondaires : leucopénie, thrombopénie, augmentation de la créatinémie, hypocalcémie (2), infection (1)… Surveillance en cours de chimiothérapie d’un patient diabétique Le maître mot est la surveillance de la glycémie, plus particulièrement de la glycémie capillaire de façon pluriquotidienne au cours et juste après les séances de chimiothérapie. Cette surveillance sera d’autant plus intensive qu’interviennent des facteurs pouvant aggraver le contrôle du diabète, comme une corticothérapie. La participation active des patients est primordiale dans cette autosurveillance, elle seule permettra Chimiothérapie chez le diabétique d’optimiser et d’adapter le traitement du diabète. La surveillance de la fonction rénale, de la fonction ventriculaire gauche, de l’apparition d’une neuropathie, sera encore plus attentive chez le patient diabétique. En conclusion, nous pouvons retenir que le nombre de patients en chimiothérapie qui présente un diabète est important, et qu’il risque de continuer de croître compte tenu de l’augmentation de la prévalence du diabète, en particulier du diabète de type 2. La présence d’un diabète doit conduire à un bilan attentif des fonctions rénales et cardiaques, elle peut nécessiter un ajustement du traitement du diabète et de la chimiothérapie. Une prise en charge multidisciplinaire (3) avec l’intervention de spécialistes en diabétologie doit être encouragée ou au moins proposée chaque fois que nécessaire. Conflits d’intérêts : aucun lié à cet article RÉFÉRENCES 1. Barone BB, Yeh HC, Snyder CF et coll. Long-term all-cause mortality in cancer patients with preexisting diabetes mellitus. A systematic review and meta-analysis. JAMA 2008; 300: 2754–2764. 2. Richardson LC, Pollack LA. Therapy Insight: influence of type 2 diabetes on the development, treatment and outcomes of cancer. Nat Clin Pract Oncol 2005; 2:48-53. 3. Ko C, Chaudry S. The need for a multisdisciplinary approach to cancer care. J Surg Res 2002; 105:53-57. R E N C O N T R E S . . . Firmagon®, 1er antagoniste de la GnRH dans le traitement du cancer de la prostate Le Laboratoire Ferring a annoncé le lancement en France de Firmagon® (dégarélix), premier antagoniste de la GnRH indiqué dans le traitement du cancer de la prostate avancé, hormono-dépendant. Un mode d’action innovant, issu de la recherche Ferring (San Diego, USA) est donné à Firmagon®, (dégarélix) décapeptide de synthèse, qui avec un profil pharmacologique opposé à celui des agonistes de la GnRH, se fixe de façon compétitive et réversible sur les récepteurs de la GnRH et les bloque immédiatement. Firmagon® est efficace en monothérapie, sans nécessité d’association à un anti-androgène, permettant une suppression rapide, profonde et durable de la sécrétion de testostérone (chez 97 % des patients à 1 an). L’étude clinique de phase III publiée dans le British Journal of Urology par Klotz et al. en 2008 (étude pivot du dossier d’AMM de Firmagon®), a comparé dégarélix à la leuproréline, un agoniste de la GnRH. Cette étude internationale multicentrique et randomisée, conduite en ouvert en groupes parallèles, a été menée pendant 12 mois chez plus de 600 patients atteints du cancer de la prostate tous stades. Les résultats d’efficacité en ITT et en PP ont montré la non infériorité significative de Firmagon® par rapport à la leuproréline sur le critère principal. Des résultats significativement plus favorables ont été observés pour Firmagon® sur les critères secondaires. Dès la 1ère injection et en monothérapie, Firmagon® comparativement à l’agoniste de la GnRH, provoque une castration significativement plus rapide sans pic de testostérone. D’autre part, une chute de la valeur du PSA, marqueur biologique de la croissance tumorale, est observée dès l’instauration du traitement et est maintenue à 95 % durant tout le traitement. Les événements indésirables les plus fréquents sont des conséquences prévisibles de la suppression de la sécrétion de testostérone : bouffées de chaleur dans 25 % et prise de poids dans 7 %. Des réactions au site d’injection sont survenues essentiellement lors de la phase d’initiation du traitement (seulement 4 % lors des injections suivantes). L’ensemble de ces effets secondaires ont été le plus souvent transitoires, d’intensité faible à modérée et n’ont conduit que très rarement à l’arrêt du traitement (<1%). Le vaste programme d’études cliniques de phase III de Firmagon® portant sur plus de 2000 patients se poursuit à travers le monde mais aussi en France où plusieurs études sont en cours pour évaluer l’efficacité de Firmagon® en traitement néo-adjuvant à la radiothérapie et son utilisation dans le traitement intermittent. Firmagon® est administré par injection SC dans l’abdomen à raison d’une dose d’initialisation de 240 mg (2x120 mg) puis d’une dose d’entretien mensuelle de 80 mg. D’après une conférence de presse de Ferring N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 11 Dossier DIABÈTE ET CANCER Procédures accompagnant la chimiothérapie anti-tumorale chez un patient atteint de cancer et diabétique J A l e x a n d r e (1), H M o s n i e r - P u d a r (2), J P D u r a n d (1), e t F G o l d w a s s e r (1) 1 : Cancérologie, 2 : Endocrinologie, Groupe hospitalier Cochin, Paris Avant le début du traitement anti-tumoral résumé Le vieillissement de la population et le partage de facteurs causaux parmi lesquels l’obésité, expliquent en partie l’accroissement du nombre de patients ayant simultanément besoin d’une chimiothérapie pour cancer tandis qu’ils sont diabétiques. Leur diabète peut être connu et récent, ou ancien et déjà associé à des complications, ou découvert fortuitement à l’occasion des examens qui précèdent la mise en œuvre de la chimiothérapie. Cette population est particulièrement exposée à un risque de complications infectieuses, et de décompensation diabétique. Nous exposons des procédures de soins mises en œuvre avant chimiothérapie hors cadre de l’urgence et en accompagnement du traitement antitumoral. mots-clés Cancer, Chimiothérapie, Diabète, Glycémie 12 Si possible faire un bilan complet > apprécier l’équilibre glycémique : il repose en particulier sur le dosage de l’hémoglobine glyquée, HbA1c. Le dosage de la fructosamine est indiqué en cas d’anomalie de l’hémoglobine ou d’anémie importante ou toute autre raison pouvant modifier HbA1c. Le dosage de la glycémie à jeun, et, chez le diabétique connu, lorsqu’il la pratique déjà, l’autosurveillance glycémique (réalisation d'un profil en 4 points: à jeun, 1h30 à 2 heures après le début de chacun des 3 repas principaux) apporte des renseignements complémentaires importants. > Il est utile de prévoir une consultation avec le diabétologue si : • le patient ne réalisait pas d'auto-surveillance, pour le choix et l’éducation à l'utilisation du matériel. • l'équilibre glycémique est mauvais (HbA1c élevée), d'autant plus qu'il existe des signes cliniques d'hyperglycémie, pour adaptation du traitement anti-diabétique. > Evaluer l’existence de complications du diabète : • en particulier recherche de néphropathie diabétique : microalbuminurie (sur urines des 24 heures), créatinine sérique (évaluation de la clearance selon formule de Cockroft) ; • ECG • Les autres retentissements possibles sont à envisager, mais pas forcément avant le début du traitement anti-tumoral, et en tenant compte du rythme habituel de surveillance du diabète du patient. > Evaluer les connaissances diététiques, en particulier revoir avec le patient la conduite à tenir en cas de vomissement ou d'intolérance alimentaire : reconnaître les glucides, savoir choisir les aliments glucidiques en cas d'inappétence, les glucides à fort index et le rythme d'absorption en cas de vomissements…° N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Procédures accompagnant la chimiothérapie anti-tumorale chez un patient atteint de cancer et diabétique > Evaluer les connaissances du patient concernant la conduite à tenir en cas d'hypo- et d'hyperglycémie, surtout en cas de traitement par insuline : recherche d'une cétonurie et conduite à tenir dans ce cas. Une éducation insuffisante du patient concernant ces points, devra conduire si possible avant le début de la chimiothérapie à une "réinduction éducative", dont les modalités sont à définir entre les différentes équipes. Bilan d’extension Lors du bilan d'extension, surtout si des examens avec produit de contraste iodé sont utilisés: sautée. Si la glycémie est inférieure à 1,4 g/L, une perfusion sera mise en place G 5 % à raison de 250 ml/h, on utilisera du G10 % si la glycémie est inférieure à 0,8 g/L. Si une perfusion est mise en place, les antidiabétiques oraux peuvent être pris. • si le patient est sous insuline, l'insulinothérapie ne doit jamais être arrêtée, et une perfusion est donc toujours réalisée : selon le même rythme que décrit précédemment: G 5 % : 250 ml/h (G 10 % si glycémie inférieure à 0,8 g/L). La dose d'insuline peut être adaptée: si le patient reçoit un mélange préétabli d’insuline rapide et d’insuline lente: seule l’injection d’insuline s’impose ; • s'assurer avant de déperfuser le patient que sa glycémie est supérieure à 0,8 g/L, qu'un repas sera pris dans les délais les plus brefs, au mieux prévoir une collation avant son départ de l'hôpital, surtout s'il est sous insuline. Les risques sont : • l'insuffisance rénale en cas de diabète très déséquilibré ou de déshydratation; • l'acidose lactique en cas de traitement avec la metformine; Ces risques sont faibles aujourd'hui avec l'utilisation des nouveaux produits de contraste iodés, mais reste théoriquement possibles et doivent être pris en compte ; • l'hypoglycémie si une période de jeûne est nécessaire avant réalisation de l'examen Les précautions à prendre comprennent : • demander au patient de boire suffisamment la veille de l'examen, s'il n'y a pas de contre-indication, on peut lui conseiller de boire 1 à 2 l de Vichy Célestin; • réaliser le lendemain de l'examen un dosage de la créatinine plasmatique, demander au patient de prendre contact en cas d'anurie ; • en cas de traitement par metformine, arrêter le médicament 48 heures au mieux, 24 heures au minimum et reprendre 48 heures après la réalisation de l'examen selon procédure en annexe. Tout examen devant être fait en urgence, le sera malgré l'utilisation de la metformine, en s'assurant d'une bonne hydratation, vérification de la reprise de la diurèse et réalisation d'un dosage de la créatinine. > Si le patient doit être à jeun : • prendre si possible un rendez vous le plus tôt possible dans la journée pour éviter les longues périodes de jeûne (attention au scanner de 17h00 réalisé en retard à 21h00 et qui entraîne un jeûne long !) • si le patient est sous antidiabétiques oraux et sa glycémie à l'heure où le jeûne commence est supérieure à 1,4 g/L, sauter la prise de médicaments concernant le repas non pris, et les reprendre lors du repas suivant. Ne pas rattraper la dose Lors de la mise en place de la chimiothérapie La mise en route d'une chimiothérapie expose à un risque de déséquilibre du diabète : • hyperglycémie, du fait du stress que le diagnostic de cancer et la mise en route de la chimiothérapie entraînent ; du fait de certains médicaments utilisés, en particulier les corticoïdes, du fait du risque de déshydratation en rapport avec des vomissements ou une diarrhée chimio-induits ; • hypoglycémie du fait du jeûne qui peut être imposé au patient pour les examens paracliniques, des vomissements, de l'anorexie qui suit souvent la chimiothérapie. Le patient doit être prévenu de ces risques et apte à y faire face, ou avoir en sa possession notice explicative, téléphone d'urgence … tous les éléments nécessaires pour faire face au déséquilibre du diabète. > Certains médicaments déséquilibrent le diabète ou faussent les résultats des examens de surveillance : • les corticoïdes peuvent déséquilibrer le diabète, l'importance de leur impact est imprévisible et variable d'un patient à l'autre, le déséquilibre qu'ils entraînent peut se prolonger après l'arrêt de la prescription. Leur prescription doit toujours s'accompagner d'une surveillance glycémique rapprochée par autosurveillance. Leur utilisation à visée anti-émétique doit être pesée dans ce contexte car il existe désormais des alternatives. • Les autres médicaments qui peuvent entraîner une décompensation du diabète sont nombreux: progestatifs, Estramustine…. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 13 Procédures accompagnant la chimiothérapie anti-tumorale chez un patient atteint de cancer et diabétique > Certains médicaments interfèrent avec les méthodes de surveillance : • L’uromitexan (Mesna), médicament vésicoprotecteur, prescrit en association à l’ifosfamide, donne une fausse cétonurie à la bandelette, dont il ne faut pas tenir compte ! • l'ifosfamide (Holoxan) peut entraîner par tubulopathie, et donc une glycosurie sans hyperglycémie ; > du fait de la toxicité rénale du cisplatine, il est recommandé d'arrêter un traitement par metformine 48 heures avant le début du traitement. On peut ainsi en pratique quotidienne, distinguer différentes circonstances. Corticoïdes non indispensables C’est le cas le plus fréquent. La chimiothérapie prévue n’est ni hautement émétisante, ni fortement allergisante. Dans ce cas, nous conseillons : • Perfusion de base accompagnant la chimiothérapie : glucosé à 2,5% ou sérum physiologique (mais attention à la surcharge sodée) pour les volumes supérieurs à 250 ml. Si le volume de perfusion est inférieur à 250 ml, on peut utiliser du glucosé à 5% ; • Traitement antidiabétique : poursuivre le traitement habituel • Surveillance de l’équilibre glycémique : poursuivre la surveillance habituelle si le patient réalise une autosurveillance. Sinon instaurer une auto-surveillance (glycémie au réveil et une glycémie post-prandiale), le jour de la chimiothérapie et les 2 jours suivants. Corticoïdes indispensables, mais on peut tolérer un certain déséquilibre du diabète C’est une situation assez fréquente, en cas d’utilisation de taxanes toutes les trois semaines par exemple. On peut conseiller pour obtenir l’effet anti-allergique, de limiter l’utilisation des corticoïdes en choisissant des protocoles de prémédication restreints à une administration juste avant la perfusion de paclitaxel. > Perfusion : glucosé à 2,5 % ou sérum physiologique (attention à la surcharge sodée) pour les volumes supérieurs à 250 ml. En cas de volume inférieur à 250 ml, on peut utiliser du glucosé à 5 % ; > Traitement antidiabétique : poursuivre le traitement habituel > Surveillance de l’équilibre glycémique : intensifier ou instaurer autosurveillance : 4 glycémies par jour (glycémie au réveil et une glycémie post-prandiale après chacun des 3 repas 14 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique principaux de la journée) le jour de la chimiothérapie, et les 3 jours suivants. > Mesures à entreprendre : En l’absence de déséquilibre majeur: poursuivre le traitement anti-diabétique inchangé, mais la surveillance s’impose à chaque cure. En cas de constat de déséquilibre du diabète : correction du déséquilibre grâce à des rajouts d’Humalog réalisé selon prescription. Cela imlique qu’un protocole a été établi, donner et expliquer au patient, qu’il a une ordonnance et qu’il est capable et a appris à utiliser un stylo d’insuline. Une telle situation devra toujours s’accompagner d’une intensification de la surveillance glycémique. Le patient doit pouvoir joindre à tout moment l’équipe soignante. Pour les cycles suivants, il convient de prévoir une consultation spécialisée de diabétologie, pour adaptation du traitement. Cette adaptation pourra être un renforcement du traitement par antidiabétiques oraux ou souvent le passage à une insulinothérapie transitoire. L’apparition de signes d’insulinopénie, ou d’une glycémie supérieure à 3 g/L, justifient une consultation en urgence et si besoin une hospitalisation. Corticoïdes indispensables, mais un déséquilibre du diabète n’est pas acceptable Cette situation comprend en particulier les chimiothérapies hautement émétisantes, par exemple comprenant du cisplatine. L’administration de corticoïde doit être aussi limitée que possible, mais est souvent nécessaire à visée anti-émétique. > Perfusion :glucosé à 2,5 % ou sérum physiologique (attention à la surcharge sodée) pour les volumes supérieurs à 250 ml. En cas de volume inférieur à 250 ml, on peut utiliser du glucosé à 5 % ; > Traitement antidiabétique : la metformine doit être arrêtée si elle est utilisée par le patient, 48 heures avant l’injection de cisplatine. Il est préférable d’utiliser un autre antidiabétique oral pour toute la durée du traitement. Les sulfamides peuvent être utilisés, mais il existe un risque de surdosage en cas d’insuffisance rénale et un risque d’hypoglycémie par défixation protéique du sulfamide. L’apparition d’une insuffisance rénale, modérée à sévère doit faire arrêter les antidiabétiques oraux et conduit à instaurer une insulinothérapie ; > Surveillance de l’équilibre glycémique : Intensifier ou instaurer l’autosurveillance : 4 glycémies par jour (glycémie au réveil et une post-prandiale après chacun des 3 repas principaux de la journée) le jour de la chimiothérapie et les 3 jours suivants. > Mesures à entreprendre : comme mentionné précédemment. Procédures accompagnant la chimiothérapie anti-tumorale chez un patient atteint de cancer et diabétique Hospitalisation entre les cures Elle peut être motivée par : > une hyperglycémie majeure, des signes d’insulinopénie, une cétose • Elle nécessite une adaptation du traitement (insulinothérapie transitoire dans le type 2, par exemple) • le retour au traitement anti-diabétique efficace avant la chimiothérapie est à rediscuter à la fin de celle-ci ; > une acido-cétose, un coma hyperosmolaire , une acidose lactique • l’hospitalisation en service spécialisé voire en réanimation, pour insulinothérapie (voir annexe) • puis une adaptation du traitement du diabète doit être faite jusqu’à la fin du traitement (insulinothérapie transitoire dans le type 2 par exemple) • le retour au traitement d’avant chimiothérapie est à rediscuter à la fin de celle-ci ; > une impossibilité à s’alimenter (vomissements incoercibles, mucite sévère) chez les patients avec risque d’hypoglycémie (traitement par sulfamide hypoglycémiant, glinide ou insuline) • l’hospitalisation est nécessaire pour perfusion de sérum glucosé (prévention des hypoglycémies et hydratation) • dans tous les cas une insulinothérapie transitoire sera prescrite jusqu’à reprise d’une alimentation suffisante ; • le retour aux antidiabétiques oraux sera discuté en fonction du risque de récidive, sinon une insulinothérapie transitoire sera instaurée jusqu’à la fin du traitement anti-tumoral. Le « régime diabétique » • Le patient atteint de cancer présente fréquemment une dénutrition et un dégoût des aliments, aggravé par la chimiothérapie. Chez ces patients, la priorité est de pouvoir garder des apports caloriques et en nutriments essentiels, suffisants. • Le régime hypoglucidique n’est pas indispensable, en particulier si le patient reçoit un traitement anti-diabétique. • Le régime hypocalorique est à proscrire. • Le patient doit pouvoir manger « ce qui lui fait plaisir », en particulier s’il est anorexique • Eviter autant que possible les collations constituées uniquement de sucres rapides (gâteaux, confiserie, confiture…) • Dans tous les cas on essaiera d’adapter la prescription des traitements du diabète aux habitudes alimentaires du patient, en particulier les schémas insuliniques devront tenir compte des préférences des patients, surtout concernant les horaires des repas. Conclusion La fréquence de l’association concomitant d’un diabète et d’une indication de chimiothérapie anti-tumorale fait émerger le besoin d’une structuration systématique d’une collaboration étroite entre le médecin diabétologue et le médecin cancérologue. Ces échanges réciproques, enrichissants pour les médecins, permettent d’optimiser la qualité du traitement du patient et de prévenir des complications graves et évitables. Conflits d’intérêts : aucun Le patient en fin de vie ou présentant des défaillances viscérales • L’objectif est alors d’éviter les symptômes liés au diabète (amaigrissement asthénie, polyuro-polydipsie du fait de l’hyperglycémie – hypoglycémie due au traitement). Cela suppose un objectif de glycémie autour de 2 g/L à jeun, 2,4 g/L en phase post-prandiale. • Le traitement de choix est l’insulinothérapie. La metformine est contre-indiquée du fait du risque d’acidose lactique, les sulfamides le sont également, du fait des défaillances viscérales et du risque d’hypoglycémie ; on choisira un schéma à 1 ou 2 injections d’insuline intermédiaire (type NPH), le plus souvent réalisées par une infirmière à domicile. Spécialités à base de metformine EDDIA GLUCOLESS GLUCOPHAGE GLYMAX METFIREX METFORMINE STAGID doivent être arrêtée 48 heures avant et jusqu’à 48 heures après une injection d’iode (scanner) ou un traitement par cisplatine. RÉFÉRENCES 1. Richardson LC, Pollack LA. Therapy Insight: influence of type 2 diabetes on the development, treatment and outcomes of cancer. Nat Clin Pract Oncol 2005; 2:48-53. 2. Ko C, Chaudry S. The need for a multisdisciplinary approach to cancer care. J Surg Res 2002; 105:53-57. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 15 Dossier DIABÈTE ET CANCER TP53 : Rôle dans la résistance aux anti-tumoraux et dans l’insulino-résistance Pa s c a l i n e B o u d o u - R o q u e t t e Cancérologue, Paris résumé TP53 est aujourd'hui considéré comme LE gène suppresseur de tumeur car il est le gène le plus souvent muté dans les cancers (plus de 50% de la totalité des cancers). Des données contradictoires concernant l’association entre les mutations de TP53 et la réponse aux cytotoxiques ont été publiées, retardant l’utilisation du statut du gène TP53 en clinique. Des études suggèrent un rôle de la « famille p53 » dans la réponse à la chimiothérapie. L’activité de résistance aux agents chimiothérapeutiques passerait par une suppression des fonctions apoptotiques de la protéine p73 par la p53 mutante (7). A côté de son rôle de « gardien du génôme », p53 semble être un acteur important dans la réponse et dans la régulation du stress métabolique (16). L’inactivation de TP53 se traduirait par une diminution de l’expression des cytokines proinflammatoires (TNFα, IL-6 et IL-8) et une amélioration significative de l’insulinorésistance. Mieux comprendre le rôle de p53 dans la régulation du métabolisme et dans l’insulino-résistance pourrait fournir des cibles attractives pour le développement de nouvelles thérapies anticancéreuses (18). mots-clés Statut p53 , Mutations, Réponse à la chimiothérapie, Insulino-résistance 16 Rôle dans la résistance aux antitumoraux Pour être efficace, une chimiothérapie doit s'appliquer à une population tumorale maligne qui prolifère et qui a la propension à apoptoser. p53 tient une place essentielle dans ces processus puisque, en réponse à un stress génotoxique, elle peut diriger la cellule maligne soit vers l'arrêt du cycle cellulaire, soit vers l'apoptose, voire la sénescence. L'effet cytostatique de p53 est médié par l'activation transcriptionnelle de p21 CIP1, et GADD45, alors que l'effet apoptotique est médié par l'activation des médiateurs Noxa, Puma, IGF-BP3, PIG3, Bax, et survivine; quant à la participation de p53 dans la sénescence induite par un traitement, elle est actuellement très peu élucidée (1). TP53 est aujourd'hui considéré comme LE gène suppresseur de tumeur car il est le gène le plus souvent muté dans les cancers (plus de 50% de la totalité des cancers) (2). Les mutations les plus souvent observées affectent le repliement de la protéine ou son interaction directe avec les sillons de la molécule d’ADN. Dans les carcinomes invasifs des voies aérodigestives supérieures (cancers ORL, œsophagiens) et bronchiques, TP53 est muté dans 42% et 38% des cas, respectivement (2). Dans les cancers des voies digestives inférieures, tels que les cancers colorectaux, les mutations de TP53 sont observées dans environ 43% des cas. Dans les cancers du sein, les mutations sont détectées dans environ 25 % des cas. Les cancers du col de l’utérus, des testicules, les mélanomes malins représentent une catégorie de cancers dans lesquels les mutations de TP53 sont rares (fréquence des mutations = 5 %) (2). Il est donc probable que p53 est inactivé dans la plupart des tumeurs humaines, soit par altération génétique, soit par inactivation fonctionnelle. Des données contradictoires concernant l’association entre les mutations de TP53 et la réponse aux cytotoxiques ont été publiées, retardant l’utilisation du statut du gène TP53 en clinique. La principale raison de cette apparente contradiction est que la majorité des études a utilisé l’accumulation tumorale de la protéine p53 détectée en immunohistochimie (IHC) comme marqueur de mutations de TP53. Cela est source d’erreur car de nombreuses tumeurs avec des mutations de TP53, n’entraînent pas d’accumulation intratumorale de p53. C’est le cas en N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique TP53 : Rôle dans la résistance aux anti-tumoraux et dans l’insulino-résistance opposée (7). p63 et p73 sont capables de coopérer avec p53 pour induire l’apoptose suggérant qu’il existe un réseau d’interactions complexes entre les produits de ces trois gènes. Figure 1 : La suppression de la croissance tumorale et la chimiosensibilité sont contrôlées par le gène p53, via l’activation de l’arrêt du cycle cellulaire, la réparation de l’ADN, l’inhibition de l’angiogenèse et l’apoptose en réponse à un stress (4). particulier des mutations « frameshift » (avec décalage de lecture), non-sens et d’épissage. Par ailleurs, toutes les mutations de TP53 n'entraînent pas une accumulation détectable en IHC. Depuis une dizaine d’années maintenant, le séquençage du gène TP53 est utilisé pour identifier des mutations du gène. Il est alors apparu clairement que les mutations de TP53 sont associées non seulement à un phénotype agressif mais aussi à une chimiorésistance dans plusieurs tumeurs malignes et lignées cellulaires (3-6). Ce phénomène est dû en partie à l’activation du gène codant pour MDR-1 (Multi Drug Resistance-1) par TP53 muté et à l’interférence avec l’apoptose (4,6). Des effecteurs de p53, tels que APAF1, caspase 6 et Bid seraient ainsi impliqués dans la sensibilisation des cellules tumorales à la chimiothérapie et dénommés « gènes de chimiosensibilité » (4). Le premier de ces 3 gènes à être identifié comme une cible de p53 a été APAF1, gène éteint dans le mélanome par hyperméthylation. La restauration de l’expression d’APAF1 conduit à l’activation de la caspase 9 et à la mort cellulaire chimio-dépendante. Le deuxième exemple concer ne la caspase 6 : la combinaison d’une surexpression de p53 et d’une exposition à l’adriamycine conduit à une activation très efficace de la caspase 6 et à l’apoptose. Le troisième gène concerné est Bid : les fibroblastes Bid -/- sont résistants à l’exposition au 5-fluouracile et à l’adriamycine (4). Des études suggèrent également un rôle de la « famille p53 » dans la réponse à la chimiothérapie. Deux homologues de p53 ont été découverts, p63 et p73 (7). Ils expriment de nombreuses isoformes suite à une utilisation alternée de promoteurs de transcription et d’épissages alternatifs. L’activité de résistance aux agents chimiothérapeutiques passe par une suppression des fonctions apoptotiques de la protéine p73 par la p53 mutante (7). Les isoformes longues sont capables de transactiver les mêmes gènes cibles que p53 et induisent l’apoptose alors que les formes courtes ont une activité Irwin et coll. ont montré qu’un grand nombre d’agents génotoxiques (camptothécine, étopiside, cisplatine, doxorubicine et paclitaxel) pouvaient induire une accumulation de protéine p73 dans des lignées de cellules tumorales (8). De la même manière, l’équipe de Crook a montré que la doxorubicine, le cisplatine, le taxol et l’étoposide induisaient une accumulation de protéine p73 et une induction de la transcription du gène AIP (apoptosis induced protein), confirmant ainsi que p73 est une composante importante dans la réponse des cellules aux agents cytotoxiques (9). Deux exemples ont largement été étudiés en clinique, concernant l’association de mutations de TP53 avec la chimio et la radio-sensibilité. Il s’agit du cancer du sein et des tumeurs des voies aéro-digestives supérieures. Des données précliniques dans le cancer du sein ont suggéré que le choix du traitement de chimiothérapie devrait dépendre du statut de p53 : chimiothérapie avec anthracyclines pour les tumeurs dont le gène TP53 est de type sauvage ou avec taxanes pour les tumeurs dont le gène TP53 est muté (4). Les résultats d’études cliniques (10) semblent conforter ces données précliniques, suggérant que les tumeurs dont le gène TP53 est muté seraient résistantes aux anthracyclines. Toutefois, d’autres études, utilisant des doses d’anthracyclines plus élevées, montrent à l’inverse que les tumeurs p53 mutées seraient très sensibles à ce type de chimiothérapie (11). Ces résultats n’autorisent pas actuellement de conclusions définitives applicables en clinique. Récemment a été publié dans le Journal of Clinical Oncology un essai étudiant l’efficacité du cisplatine en néo-adjuvant chez des patientes suivies pour cancer du sein triple négatif. Il n’y avait pas d’association significative entre la présence d’une mutation p53 et une bonne réponse à la chimiothérapie (p=0,64). Cependant la présence de mutations non sens ou « frameshift » de p53 étaient significativement corrélés à un meilleur taux de réponse (p=0,01) par rapport aux mutations faux-sens (12). Les résultats d’une large étude multicentrique (EORTC 10994/BIG 00-01), permettront de répondre à la question de la valeur prédictive du gène p53 dans le cancer du sein en néo-adjuvant. Dans les tumeurs des voies aéro-digestives supérieures, les mutations de p53 sont fréquentes. Un gène p53 fonctionnel est nécessaire pour l’apoptose chimio- et radio-induite. Ainsi, la présence d’une mutation de p53 serait un facteur de radior é s i s t a n c e : l e r i s q u e d e re c h u t e l o c o r é g i o n a l e a p r è s radiothérapie est significativement plus élevé chez les patients ayant une mutation de p53 (13). De même, la réponse à la chimiothérapie d’induction varie selon le statut de p53 (14,15). N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 17 TP53 : Rôle dans la résistance aux anti-tumoraux et dans l’insulino-résistance Les données de la littérature conduisent à considérer la nature des agents de la chimiothérapie et la dose administrée, le type de tissu cancéreux, ainsi que la réponse histologique. Les acteurs moléculaires des processus de sénescence, de cytostase et d'apoptose impliqués dans la réponse cytotoxique des cellules cancéreuses sont en voie d'élucidation. TP53 et insulino-résistance Bien que des modifications du métabolisme aient été observées dans le cancer depuis près d'un siècle, les mécanismes soustendant ces modifications n'ont été identifiés que récemment, ainsi que la prise de conscience de l'importance des transformations métaboliques. Dans Nature Reviews Cancer, Vousden et Ryan passent en revue la réponse de p53 aux changements métaboliques et son influence dans diverses voies de signalisation. p53, à côté de son rôle de « gardien du génôme », semble être un acteur important dans la réponse et dans la régulation du stress métabolique. La capacité de p53 à supprimer la glycolyse et à promouvoir la phosphorylation oxydative aident à prévenir le flux glycolytique associé à la croissance tumorale, et représente ainsi une autre manifestation de ses propriétés de gène suppresseur de tumeur. A contrario, p53 a des fonctions qui semblent conduire aux changements métaboliques associés aux cancers. Le rôle de p53 dans l’activation de la voie pentose-phosphate pourrait par exemple aider à protéger les cellules tumorales des taux toxiques de radicaux libres et promouvoir l’anabolisme, qui est nécessaire à la croissance de la tumeur. Selon leur résumé, « les contributions de ces activités à la suppression de tumeur sont complexes et, potentiellement, plutôt surprenantes : certaines reflètent la fonction des niveaux de base de p53 ne requérant pas une activation explicite et d'autres peuvent même promouvoir, plutôt qu'inhiber, la progression des tumeurs » (16). Le syndrome d'insulino-résistance se caractérise principalement par une résistance périphérique à l'action de l'insuline se traduisant par une augmentation progressive de la sécrétion insulinique pour forcer le barrage à l'entrée du glucose dans les cellules. Cette phase initiale, lors de laquelle la glycémie reste normale, est suivie par une inadaptation puis un épuisement de la sécrétion insulinique par le pancréas qui aboutissent à l'augmentation de la glycémie et finalement à un diabète de type II. L’obésité est une cause majeure d’insulino-résistance. Minomino et al. ont proposé que le lien entre l’obésité, le vieillissement et la dérégulation du métabolisme était p53 (17) . La sénescence cellulaire correspond à l’arrêt irréversible de la 18 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique croissance cellulaire. Cette sénescence peut être programmée génétiquement (raccourcissement des télomères) ou induite accidentellement par le stress oxydatif. La sénescence cellulaire se traduit au niveau de l’organisme par le vieillissement des tissus. Pour établir le lien entre vieillissement et insulinorésistance, ils ont choisi comme modèle animal la souris Ay, sujette à l’augmentation de la prise calorique et par voie de conséquence à l’insulino-résistance et au diabète. Ils ont constaté une augmentation du stress oxydatif dans le tissu adipeux de ces souris obèses par rapport aux souris de poids normal du même âge et comparable à celui retrouvé chez des souris plus âgées. Le mécanisme de sénescence cellulaire semble être la survenue de lésions géniques consécutives au stress oxydatif, entraînant une activation du gène TP53 à l’origine d’une sénescence indépendante du télomère. Le lien avec l’insulino-résistance a été démontré par inactivation de l’activité de TP53 chez ces souris, qui se traduit par une diminution de l’expression des cytokines pro-inflammatoires (TNFα, IL-6 et IL-8) et une amélioration significative de l’insulinorésistance. A l’inverse, l’up-régulation du gène est à l’origine d’une réponse inflammatoire et d’une insulino-résistance accrue (17). Dans les cancers pour lesquels l’obésité viscérale est un facteur de risque (cancer colo-rectal, du sein, de l’endomètre, de la prostate), le syndrome d’insulino-résistance apparaît comme le mécanisme privilégié, entrant dans le cadre de la promotion des cancers (18). L’obésité abdominale ou viscérale est un des éléments du syndrome d’insulino-résistance, qui se caractérise par ailleurs par une hyperinsulinémie, une insulino-résistance, une altération des paramètres lipidiques et des hormones stéroïdiennes, une diminution de la sex hormone binding globuline(SHBG) qui entraîne une altération de la régulation de l’IGF-1, avec notamment diminution de sa protéine liante (IGFBP-3) résultant en une augmentation des taux d’IGF-1. On pense actuellement que ces taux élevés d’IGF-1 résument le rôle du syndrome d’insulino-résistance dans la promotion des cancers. IGF-1 est un puissant mitogène, également capable de bloquer l’apoptose. La réalité de ce syndrome comme facteur de risque a été attestée par la mise en évidence d’une association entre risque de cancers et taux circulants d’IGF-1, spécifiquement pour le cancer du côlon, du sein et de la prostate (18). Le syndrome d’insulino-résistance s’accompagne d’une augmentation du taux de l’IGF-1 qui résulte d’une augmentation de la synthèse, mais aussi d’une altération de la régulation avec notamment diminution de sa protéine liante (IGFBP-3) résultant en une augmentation des taux d’IGF-1. Par ailleurs, l’IGFBP-3 est un médiateur de l’effet suppresseur de p53 sauvage, donc sa diminution dans ce syndrome favoriserait aussi la prolifération tumorale. TP53 : Rôle dans la résistance aux anti-tumoraux et dans l’insulino-résistance Conclusion La protéine p53 et son gène TP53 jouent un rôle central dans le contrôle de la vie et de la mort des cellules exposées aux agents génotoxiques. L’altération des voies de régulation du métabolisme peut participer à la transformation maligne, les cellules cancéreuses deviennent alors dépendantes de ces changements. Le syndrome d’insulino-résistance apparaît comme le mécanisme privilégié, entrant dans le cadre de la promotion des cancers colo-rectal, du sein, de l’endomètre et de la prostate. Mieux comprendre le rôle de p53 dans la régulation du métabolisme et dans l’insulino-résistance pourrait fournir des cibles attractives pour le développement de nouvelles thérapies anticancéreuses (18). Conflits d’intérêts : aucun RÉFÉRENCES 1. Levine AJ, Oren M. The first 30 years of p53: growing ever more complex. Nature Rev Cancer 2009; 9 : 749-758. 2. www-p53.iarc.fr Petitjean A, Mathe E, Kato S et coll. Impact of mutant p53 functional properties on TP53 mutation patterns and tumor phenotype: lessons from recent developments in the IARC TP53 database. Hum. Mutat. 2007; 28 : 622-629. 3. Bergh J, Norberg T, Sjogren S et coll. Complete sequencing of the p53 gene provides prognostic information in breast cancer patients, particularly in relation to adjuvant systemic therapy and radiotherapy. Nature Med. 1995; 1 : 1029-1034. 4. El-Deiry WS. The role of p53 in chemosensitivity and radiosensitivity. Oncogene 2003 ; 22 : 7486-95. 5. Lu C, El-Deiry WS. Targeting p53 for enhanced radio- and chemo-sensitivity. Apoptosis 2009; 14 : 597-606. 6. Bush JA, Li G. Cancer chemoresistance: the relationship between p53 and multidrug transporters. Int J Cancer 2002; 98 : 323-330. 7. Lunghi P, Costanzo A, Mazzera L et coll.The p53 Family protein p73 provides new insights into cancer Chemosensitivity and Targeting. Clin Cancer Res 2009; 15 : 64956502. 8. Irwin MS, Kondo K, Marin MC et coll. Chemosensitivity linked to p73 function. Cancer Cell 2003 ; 3 : 403-410. 9. Bergamaschi D, Gasco M, Hiller L et coll. p53 polymorphism influences response in cancer chemotherapy via modulation of p73-dependent apoptosis. Cancer Cell 2003 ; 3 : 387-402. 10. Geisler S, Lonning PE, Aas T et coll. 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L’autorisation d’Iressa® recouvre toutes les lignes de traitement et inclut la première ligne. Iressa® inhibe l’enzyme tyrosine kinase de l’EGFR, bloquant ainsi la transmission de signaux impliqués dans la croissance et la propagation des tumeurs. Les mutations activatrices de l’EGFR se retrouvent chez environ 15 % des patients caucasiens atteints d’un cancer du poumon. Plusieurs études ont montré que ce type de tumeurs est particulièrement répondeur à Iressa®. Cette autorisation est fondée sur deux études pivots de phase III comparant Iressa® à la chimiothérapie, IPASS et INTEREST, dont les résultats ont depuis été confirmés par un étude parue en décembre 2009. Ces essais ont notamment montré que les patients porteurs d’une mutation de l’EGFR et traités en première ligne par Iressa® bénéficiaient d’une réduction de plus de moitié du risque de survie sans progression avec des médianes supérieures à neuf mois. D’après une conférence de presse de AstraZeneca N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 19 Congrès Hormonothérapie (HT) dans le cancer du sein après la ménopause : où en sommes- nous après San Antonio (SABC) 2009 ? J M Va n n e t z e l - Président de l’Institut du sein Henri Hartmann - Clinique Hartmann / Neuilly sur seine (Membre du global steering comittee et investigateur principal pour la France de l’essai TEAM) ette année comme l’an passé, le congrès s’est ouvert sur l’HT adjuvante et contrairement à ce qui pourrait être conclu après une analyse rapide du résultat « négatif » (de la TEAM) il semble qu’ il apporte des informations importantes au clinicien en matière de prescription d’une HT dans le cancer du sein de la femme ménopausée. C montrent toutes de façon cohérente une réduction significative du risque de rechute par les IA sans modification significative de la survie (dans l’essai TEAM portant sur près de 10 000 patientes, on n’enregistre au bout de 5 ans que 5% en tout de décès par cancer du sein. La survie (OS) n’est ainsi jamais le critère principal des essais, qui privilégient la survie sans récidive (DFS). > Les données acquises avant SABC 2009 > L’HT est le seul des traitements adjuvants à avoir la capacité de diminuer de façon très significative le risque de rechute du cancer du sein : rechutes homo, contro latérales et métastatiques. Le Tamoxifène (TMX) administré 5 ans réduit le risque de rechute de 47%, le risque de décès de 26% (2) . Ceux qui utilisent quotidiennement Adjuvant! Online sont familiers avec le fait que le gain induit par l’HT est souvent aussi important que celui de la chimiothérapie en terme de prévention des rechutes métastatiques en risque cumulé sur 10 ans. > Les inhibiteurs de l’aromatase (IA) font mieux que le TMX : l’ATAC, la BIG 1-98, l’analyse précoce de la TEAM En matière de tolérance : tous les essais sont cohérents pour attribuer: • Au TMX : davantage de problèmes gynécologiques (y compris le cancer de l’utérus) de bouffées de chaleur, de thromboses veineuses • Aux IA : davantage de perturbations du bilan lipidique, de problèmes ostéoarticulaires (ostéoporose et fractures) et ligamentaires qui en sont la principale cause d’arrêt. Il n’existe pas jusqu’à aujourd’hui d’étude comparative au plan de la « safety » entre les 3 IA disponibles en per os. Les données de SABC 2009 > L’étude de L’IES a été actualisée avec 8 ans de recul et c’est le seul essai qui montre un bénéfice en OS, en faveur de l’exémestane (EXE) contre le TMX. I l e s t re m a rq u a b l e d e n o t e r q u e l e bénéfice est acquis pour les patientes exclusivement par le biais d’une diminution des métastases osseuses. Par ailleurs cette étude confirme pour l’EXE l’effet rémanent (« carry over effect ») déjà connu pour le TMX. > L’essai TEAM (3) est l’étude la plus importante d’hormonothérapie adjuvante (10 000 patientes) qui a été actualisée (follow up médian de plus de 5 ans) pour SABC 2009. Le résultat peut apparaître comme négatif si l’on en juge par ce qu’il montre, une quasi parfaite superposition des courbes de DFS et d’OS pour évaluer l’effet du « switch » du TMX par l’EXE au bout de 2,5 ans. Il signifie en fait que l’important est de donner au moins 2 ou 3 ans d’IA pour obtenir une protection efficace, le complément d’HT à 5 ans pouvant être décidé en fonction de la tolérance de l’IA ou du TMX. > L’enjeu majeur de l’hormonothérapie r i s q u e d ’ ê t re d a n s l e s a n n é e s q u i v i e n n e n t l e p ro b l è m e d e l a d u r é e , davantage que celui des modalités, d’autant qu’à partir de l’été 2010 les IA vont commencer à être génériqués, ce qui va considérablement modifier les motivations de recherche qui sont aujourd’hui l’initiative de l’industrie pharmaceutique. Paul Goss a su réactiver l’intérêt pour l’étude MA17 (4) en étudiant le sous groupe des femmes entrant dans son essai en n’étant pas ménopausées N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 21 Hormonothérapie (HT) dans le cancer du sein après la ménopause…San Antonio (SABC) 2009 ? étaient surtout des femmes âgées, ayant une petite tumeur, un faible envahissement ganglionnaire, un grade faible et peu ou pas de chimiothérapie. D’un prescripteur à l’autre, la non adhérence a pu varier de 16 à 67%, elle a été de 34% pour les oncologues médicaux et de 47% pour les radiothérapeutes. Il n’y pas de données concernant les chirurgiens. Il faudra bien en arriver à s’interroger sérieusement sur les causes de cette mauvaise compliance de l’HT qui avait déjà été largement commentée lors de SABC 2008, il y aurait là une marge de progrès importante en terme de résultats pour nos patientes… mais ça, c’est une autre histoire. Ce qu’il faut retenir Figure 1 • l’important est de délivrer au moins 2,5 ans d’IA • l’HT recommandée reste classi(889 patientes) comparativement à celles qui étaient déjà ménopausées (4227 patientes) (il ne s’agit donc pas d’un essai randomisé.) Ces patientes initialement pré-ménopausées bénéficient, même tardivement, après 5 ans de TMX, de l’introduction d’un IA (Létrozole), par rapport à celles qui étaient ménopausées en commençant l’HT. > Le problème de la compliance a été abordé de façon très claire par les canadiens (5) : 4592 patientes traitées par IA ou TMX ont été identifiées dans la base de donnée en Colombie Britannique entre 2005 et 2008. La non adhérence au traitement (au moins 80 jours sans traitement) a été de 42% pour les patientes sous TMX et 37% pour les IA !!! Les patientes « non adhérentes » quement de 5 ans. • en cas d’intolérance (tolérance ostéo-articulaire) il est faisable de changer de classe d’IA puis de passer au TMX. • l’option de commencer par le TMX peut être le choix de la patiente ou du praticien • la non observance de l’HT reste un enjeu majeur non résolu. Conflits d’intérêts : aucun RÉFÉRENCES (1) (2) (3) (4) (5) 22 L’actualité du Breast Cancer Symposium 2008 : site PubliClin’ J. Gligorov Tamoxifen for early breast cancer: an overview of the randomised trials. Early Breast Cancer Trialists’ Collaborative Group. Lancet 1998 May 16; 351 (9114): 1451-67. Bliss JM et coll. Abs 12 SABC 2009. Goss PE et coll. Abs 13 SABC 2009. Chan A et coll. Abs 36 SABC 2009. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Onco-gyneco Intérêt de la résection chirurgicale des métastases ovariennes de cancers colorectaux : revue de la littérature Pa u l B e r v e i l l e r (1), N i c o l a s Ve y r i e (2), O l i v i e r M i r (3) 1 : Service 2 : Service de Gynécologie-Obstétrique, Hôpital Saint-Antoine, Assistance Publique Hôpitaux de Paris, Université Pierre et Marie Curie, Paris. de Chirurgie Digestive, Hôtel Dieu, Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, Université Paris Descartes, Paris. 3 : Service H é r a u l t , D é p a r t e m e n t d e M é d e c i n e , I n s t i t u t G u s t a v e R o u s s y, V i l l e j u i f . Introduction En 2008, le cancer colorectal (CCR) représentait le troisième cancer en termes de fréquence et de mortalité par cancer dans les pays développés (1). Les principaux sites métastatiques sont le foie, les poumons et le péritoine. Les ovaires sont le siège de métastases dans environ 4 à 8% des CCR (2,3). Ces métastases ovariennes sont synchrones dans un peu moins de 50% des cas, et bilatérales dans 60 à 80% des cas (3) . Les principaux cancers primitifs causant des métastases ovariennes sont les cancers du sein et les CCR2 (avec une nette prédominance de l’atteinte de la charnière recto-sigmoïdienne) (4). Concer nant le traitement médical, l’association de chimiothérapies telle que le 5-fluorouracile et l’oxaliplatine ou l’irinotecan (5,6) apportent un bénéfice en termes de survie globale dans les CCR métastatiques. De plus, la chimiothérapie peut également rendre résécables des métastases ovariennes qui ne l’étaient pas initialement, comme cela a été fait dans le cadre de métastases hépatiques de CCR (7). La place des nouvelles molécules actives dans les CCR (panitumumab, cétuximab ou bévacizumab) (8-10) est encore incertaine dans les maladies métastatiques à l’ovaire. Cependant, les métastases ovariennes pourraient présenter des réponses moindres à la chimiothérapie que les autres métastases (11,12) relevant donc d’un traitement local. étaient : «metastases, ovaries, resection, surgery, colorectal cancer, o v a r i a n m e t a s t a s e s » . Les articles relatifs à l’ovariectomie prophylactique ont été exclus de l’analyse. Résultats Concernant le traitement chirurgical, certains auteurs plaident ainsi en faveur d’une prise en charge chirurgicale agressive, qui pourrait améliorer la survie (13-15) . Dès lors, afin de mieux apprécier le bénéfice éventuel d’une métastasectomie ovarienne chez les patientes ayant un CCR, nous avons réalisé une revue systématique de la littérature anglo-saxonne. Méthodes Nous avons identifié pour cette revue les publications de langue anglaise (1983-2010) décrivant des séries d’au moins 20 patientes ayant bénéficié d’une résection chirurgicale de métastases ovariennes de CCR. Ces publications ont été identifiées via l ’ u t i lisation des bases de données PubMed, Embase et Web of knowledge. Les mots-clefs utilisés Douze articles évaluant la survie après résection chirurgicale de métastases ovariennes de CCR ont été rapportés dans la littérature (12,15-25), décrivant 586 patientes (Tableau 1). Toutes ces études sauf une (15) étaient monocentriques (en centres spécialisés). Seules 2 études ne mentionnaient pas la durée de suivi (15,17) . Concernant le geste chirurgical, seules 9 études distinguaient une qualité de résection de type « R0 » (pas de maladie résiduelle) ou « R1-R2 » (marge positive microscopiquement/maladie résiduelle macroscopiquement). Trois études n’indiquaient pas l’existence ou non de facteurs confondants comme la réalisation d’une chimiothérapie adjuvante, le stade tumoral de la tumeur primitive, ou encore l’intervalle de temps sans maladie pour les lésions métachrones. N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 23 Intérêt de la résection chirurgicale des métastases ovariennes de cancers colorectaux : revue de la littérature Mortalité postopératoire Seule une étude documentait la mortalité postopératoire dans les 30 j o u r s (23), q u i a t t e i g n a i t 5 % ( s u r 3 5 patientes). Survie globale Sur ces 12 articles, 10 ne mentionnaient pas si la mortalité postopératoire ou si les patientes perdues de vue étaient exclues de l’analyse de survie (18-25). La survie globale à 5 ans des patientes ayant bénéficié d’une métastasectomie ovarienne n’était documentée que dans 6 études, avec une survie médiane à 5 ans de 22% (extrêmes : 4-50%) (12, 16-17, 22, 24-25) . Cinq études seulement rapportaient une survie à 5 ans pour les patientes bénéficiant d’une résection de métastase ovarienne de type « R0 » versus une résection de types « R1/2 » (16-17,19,24-25) . La survie à 5 ans variait de 15 à 51% des patientes ayant bénéficié d’une chirurgie R0, tandis que cette survie était comprise entre 0 et 6% pour les patientes ayant subi une chirurgie R1-2. Il était possible d’identifier une survie médiane dans 4 articles (18,20,23,25) qui variait de 31 à 48 mois pour les patientes bénéficiant d’un geste chirurgical « R0 », contre 7 à 15 mois pour les patientes ayant subi une chirurgie R1-2 (Tableau 1). Facteurs pronostiques Quatorze facteurs pronostiques ont été étudiés dans l’ensemble des articles publiés sur ce sujet. Il s’agissait de l’âge, du statut ménopausique, de l’indice de Karnofsky, des caractéristiques de la tumeur primitive (TNM, stade, grade histopronostique), des caractéristiques des métastases (taille, caractère uniou bilatéral), de la présence d’ascite au moment du diagnostic, des autres sites métastastiques (nombre, envahissement ganglionnaire, présence de nodules péritonéaux), du caractère synchrone ou métachrone des métastases ovariennes, des marqueurs tumoraux préopératoires (ACE ou CA-125), du résidu tumoral après chirurgie, et de l’administration éventuelle d’un traitement adjuvant. Seule une étude présentait les résultats d’une analyse multivariée, identifiant la taille des métastases ovariennes comme seul facteur pronostique de survie chez 103 patientes opérées (16). En ce qui concerne les autres études, elles ont identifié plusieurs facteurs i n f l u e n ç a n t l a s u r v i e : l e c a r a c t è re unilatéral des métastases ovariennes, l’existence de métastases uniquement confinées au pelvis, une résection chirurgicale complète, l’absence de métastase péritonéale, l’absence de Tableau 1 : Caractéristiques des 586 patientes (12 études) – Survie globale et survie à 5 ans des patientes ayant bénéficié d’un traitement chirurgical de leurs métastases ovariennes de CCR. Abréviations : Réf : références, n : nombre de patientes, SD : déviation standard, MO : métastase ovarienne, RI : résection chirurgicale incomplète, - : non précisé. 24 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Intérêt de la résection chirurgicale des métastases ovariennes de cancers colorectaux : revue de la littérature maladie métastatique extra-ovarienne (Tableau 1). Le fait que la métastase ovarienne soit synchrone ou métachrone ne semblait pas influencer la survie dans la plupart des séries publiées. Le stade de la tumeur primitive, la présence d’ascite au moment du geste chirurgical, et le taux des marqueurs tumoraux ne semblaient pas influencer la survie. L’âge n’apparaissait pas être significativement corrélé au pronostic hormis dans une étude (21) . Le fait de réaliser une chimiothérapie adjuvante ne semblait pas influer de manière favorable sur le pronostic des patientes (12,16,20,23-24). Discussion L’incidence des métastases ovariennes (3-10% dans la littérature) est probablement sous-estimée. En effet, une série autopsique a montré que la moitié des ovaires métastatiques ne présentaient aucun critère macroscopique pouvant le faire supposer (26). Concernant la physiopathologie de survenue des métastases ovariennes, plusieurs explications sont plausibles. Une implantation directe des métastases à partir du côlon ou du rectum par contiguïté a été évoquée (4). Une dissémination lymphatique par voie rétrograde (secondaire à l’obstruction tumorale des vaisseaux lymphatiques péricoliques) ou une dissémination par voie hématogène (suggérées par l’existence de métastases ovariennes bilatérales) ont également été proposées. Concernant le pronostic des métastases ovariennes, il est considéré comme péjoratif (22), avec une survie à 5 ans (tous p r i m i t i f s c o n f o n d u s ) d e l ’ o rd re d e 12% (27). Ceci a amené certains auteurs à penser qu’un traitement chirurgical agressif n’était pas justifié (28). Cette revue présente plusieurs limites du fait du caractère rétrospectif des articles disponibles, et portant sur des effectifs faibles. De plus, les populations de patientes à l’étude étaient difficilement comparables (patientes présentant des métastases synchrones et métachrones, des métastases localisées résécables et des métastases disséminées). On identifie néanmoins au travers de cette analyse plusieurs concepts pouvant influencer la pratique clinique : • la survie à 5 ans des patientes présentant des métastases ovariennes opérées est estimée entre 4 et 26%. Cependant, pour les patientes qui ont bénéficié d’une résection R0 de ces métastases, la survie à 5 ans variait de 15 à 51%. Ainsi, une prise en charge chirurgicale agressive d’un sous-groupe de patientes sélectionnées augmenterait la survie à moyen terme. • Concernant le versant palliatif de la prise en charge chirurgicale (notamment afin d’éviter un syndrome compressif a b d o mi na l l o rs q ue l a t a i l l e d e c e s m é t a s t a s e s a u g m e n t e d e m a n i è re importante), celui-ci n’a pas clairement été évalué dans les études disponibles, en particulier son effet sur la survie. • Le concept de « zone sanctuaire » évoqué par plusieurs auteurs (11,12), que représenteraient les métastases ovariennes de CCR lors de l’utilisation de chimiothérapie semble plausible devant les résultats disponibles dans cette revue, mais cette interprétation doit être prudente compte tenu des biais susmentionnés. De futures études prospectives sont donc nécessaires afin d’identifier les patientes présentant des métastases ovariennes de CCR bénéficiant d’un traitement chirurgical agressif, et de juger de l’impact de la chimiothérapie post-opératoire. Conclusion Cette revue systématique de la littérature confirme qu’un geste chirurgical “R0” peut améliorer la survie de patientes atteintes de métastases de CCR, avec des taux de survie à 5 ans de la chirurgie pouvant atteindre 50% dans certaines séries. Cependant, les données disponibles sont issues d’études très hétérogènes avec des effectifs qui restent faibles. Cette revue ne permet donc pas de formuler des recommandations de pratique clinique, la décision de traitement chirurgical devant donc être prise au cas par cas. Enfin, le rôle de la chirurgie palliative reste à définir avec plus de précision dans de futures études prospectives. Conflits d’intérêts : aucun Références en page 28 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 25 S avo i r p r e s c r i r e Savoir Prescrire : Arixtra® Mansouriah Merad Praticien Spécialiste des Centres de Lutte Contre le Cancer - Institut Gustave Roussy - Villejuif Introduction L’Arixtra ®, ou Fondaparinux (sodique), commercialisé en France en 2005, est le premier agent entièrement synthétique à inhiber, sélectivement une enzyme clef dans le processus de la coagulation, le facteur XA, alors que les autres traitements (héparine de bas poids moléculaire et héparine non fractionnée) sont d’origine animale et que leur action s’exerce que sur de multiples cibles dans la cascade de réaction que constitue la coagulation. Ce résultat anti-thrombotique lié au Fondaparinux est donc lié à l’inhibition sélective du facteur X A par l’antithrombine 3. En se liant sélectivement à l’antithrombine 3, le Fondaparinux potentialise l’inhibition naturelle du facteur X A. L’inhibition de ce facteur va interrompre la cascade de la coagulation en inhibant aussi bien la formation de thrombine que les développements du thrombus. Le Fondaparinux n’inactive pas la thrombine (le facteur 2 activé) et n’a pas d ’ e ff e t s u r l e s p l a q u e t t e s . C e q u i explique en partie pourquoi il n’existe pas de réaction croisée entre le Fondaparinux et le sérum des patients ayant une thrombopénie induite par l’héparine, et ce traitement ne modifie pas en principe, les tests de coagulation tels que le Temps de Céphaline Activée (TCA) sauf en cas d’administration 26 d’Arixtra à doses élevées, ce dernier peut être modifié mais de façon modérée, le Temps de Coagulation Activé (ACT), le Taux de Prothrombine (TP), l’International Normalized Ration (INR), ou le temps de saignement, ou l’activité fibrinolytique. Indication et posologie Le Fondaparinux se prescrit dans le cadre de l’AMM dans la prévention des évènements thromboemboliques veineux chez le patient jugé à haut risque d’évènement thrombo-embolique veineux, alité pour une infection médicale aigüe et dans le traitement curatif des thromboses veineuses prof onde s a ig üe s e t de s e mbo l ie s pulmonaires aigües, qu’il s’agisse d’un patient cancéreux ou non cancéreux (1). Pour le traitement curatif au long cours, il n’y a pas d’étude publiée à ce jour avec l’héparine non fractionnée ou le Fondaparinux à doses curatives, que ce soit chez le patient cancéreux ou non. La tendance actuelle en cancérologie est la prescription de Fondaparinux en préventif et au long cours chez le patient cancéreux à risque de complication t h ro m b o e m b o l i q u e ( c a n c e r c o n n u thrombogène, traitement thrombogène), mais il n’existe à l’heure actuelle aucune N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique recommandation dans cette indication, en sachant que si la décision de mise en route d’un traitement par Arixtra est prise il faudra mettre en balance bénéfice et risque encouru par le patient (2). La posologie recommandée d’Arixtra dans le traitement curatif des thromboses veineuses profondes aigues et des embolies pulmonaires aigues est de 7,5 mg une fois par jour en sous cutanée pour les patients dont le poids est compris entre 50 et 100 kg, et de 5 mg pour les patients dont le poids est inférieur à 50 kg, pour les patients dont le poids est supérieur à 100 kg la posologie est de 10 mg. En préventif des événements thrombo emboliques veineux chez le patient à haut risque la posologie recommandée est de 2,5 mg une fois par jour en sous cutanée. Données pharmacologiques cliniques Après une injection unique sous cutanée de 2,5 mg d’Arixtra, la concentration plasmatique maximale est obtenue 2 h e u re s a p r è s l ’ a d m i n i s t r a t i o n . L a cinétique du Fondaparinux est linéaire et l’état d’équilibre des concentrations plasmatiques est obtenu en 3 à 4 jours. Savoir Prescrire : Arixtra Selon la posologie de Fondaparinux administrée fonction du poids du patient, l’exposition au produit reste similaire. Le volume de distribution du Fondaparinux est faible. Il n’existe pas de liaison significative, aux protéines plasmatiques (y compris le facteur plaquettaire) à l’exception de l’antit h ro m b i n e 3 . I l n ’ y a d o n c a u c u n e interaction avec d’autres médicaments par déplacement de la liaison protéique. Le Fondaparinux n’inhibe pas les cytochromes P450. L’élimination est essentiellement rénale, dans 64 à 77 % des cas, la demi-vie d’élimination est d’environ 17 heures chez le sujet jeune, et 21 heures chez le sujet âgé. Compte-tenu de ces données, la dose d’Arixtra ® doit être adaptée en cas d’altération de la fonction rénale et le sujet âgé compte tenu de la possibilité d’une fonction rénale altérée liée à l’âge. d’Arixtra ® doit être réduite à 1,5 mg en prophylaxie, et doit être utilisée avec précaution en curatif. La durée de son traitement ne doit pas excédée 7 jours (durée évaluée dans les études cliniques). Chez les patients ayant une clearance de la créatinine sup à 50 ml/mn aucune adaptation de posologie n’est recommandée. Chez les patients ayant une thromboc y t é mi e i nd ui t e p a r l ’hé p a ri ne , e n principe il n’existe pas de réaction croisée avec les patients qui présentent une thrombopénie induite car le Fondaparinux ne se lie pas au facteur IV plaquettaire. Néanmoins l’efficacité et la tolérance du Fondaparinux n’ont pas été étudiées de façon formelle, pour le moment, la prudence est néanmoins recommandée chez ces patients, en attendant l’évaluation d’études cliniques plus complètes portant sur des échantillons plus importants de patients… (4). Mode d’administration et contre-indication Interaction médicamenteuse et effets indésirables Le Fondaparinux doit être injecté par voie sous cutanée profonde. Les sites d’injection doivent être alternés au niveau de la ceinture abdominale. Les contre-indications seraient une hypersensibilité connue au Fondaparinux ou à l’un de ses excipients, un saignement cliniquement significatif, une endocardite bactérienne aigüe chez les patients à risque hémorragique élevé (sujet âgé et/ou faible p o i d s c o r p o re l e t / o u i n s u ff i s a n c e rénale). L’insuffisance rénale sévère est une contre indication à l’utilisation d’Arixtra® si la clearance de la créatinine est inférieure à 20 ml par minute pour la forme préventive, ou inférieure à 30 ml par minute pour la forme curative. Si clearance entre 30 et 50 ml/mn la dose Interaction Le Fondaparinux ne doit pas être utilisé avec un autre traitement susceptible d’accroître le risque hémorragique : Desirudine, agent fibrinolytique, antagoniste du récepteur GP2B/3A, les héparines standards ou de bas poids moléculaires, agents anti-agrégants plaquettaires ainsi que les anti-inflammatoires non stéroïdiens. En p ri n c i p e l ’a s s o c i a t i o n a v e c l e s anticoagulants oraux est possible, il n’existe pas de modification des paramètres pharmacocinétiques de Fondaparinux en cas d’association. Effets indésirables Une attention particulière est requise pour les patients en postopératoire ou ® le risque hémorragique est fréquent, les patients en milieu médical. Le saignement est l’effet indésirable le plus relaté. Le risque d’accident vasculaire hémorragique avait été rapporté au tout début de la commercialisation du Fondaparinux, ces accidents vasculaires ont été mis en évidence chez des patients âgés de plus de 75 ans et ou insuffisants rénaux. Dans la majorité des cas rapportés, l’utilisation de Fondaparinux à été réalisé hors AMM, notamment dans le traitement des thromboses veineuses superficielles, de thrombopénie induite par l’héparine et chez des patients chez qui ce traitement avait été mis en route pour des troubles du rythme cardiaque (5). L’administration de doses d’Arixtra ® supérieures à celles recommandées peut conduire à l’augmentation du risque du saignement et il n’existe pas d’antidote connu au Fondaparinux. De rares cas de thrombopénie induite à l’héparine associés au Fondaparinux ont été décrits (6) activation Ac anti PF4 plaquettaire ? Pour le medecin Avant la mise en route d’un traitement par Fondaparinux, il est indispensable de réaliser un dosage plasmatique de créatinine avec calcul de la clearance de créatinine. Une surveillance de l’hémogramme est actuellement peu recommandée devant le faible risque de thrombopénie induite à l’héparine. Absence d’indication de surveillance de l’activité anti-facteur 10 activé. Un accident hémorragique sous Arixtra® doit conduire à l’arrêt du traitement. En cancérologie la survenue d’une thrombopénie notamment en cours de chimiothérapie est un phénomène fréquent, l’administration concomitante d’un traitement anticoagulant augmente le risque hémorragique. Il n’existe pas de recommandation claire concernant le Fondaparinux, à l’inverse des HBPM, N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 27 Savoir mais nous pouvons imaginer que les recommandations restent identiques (arrêt du traitement anticoagulant chez les patients présentant une thrombopénie inférieure à 50 000, demi-dose entre 50 000 et 100 000, reprise du traitement lorsque les plaquettes sont supérieures ou égales à 100 000/mm3. Cette attitude bien sur doit être discutée au cas par cas en fonction de la gravité de la maladie thromboembolique, de la Prescrire : Arixtra profondeur et de la durée présumée de la thrombopénie. Pour le patient Prévenir le patient des risques hémorragiques, en lui demandant de rester vigilant sur un saignement visible, hématurie, hémoptysie, hématome, saignement gingival… et de se mettre en contact avec son médecin traitant ou ® référent en cas de saignement même minime. Possibilité d’une petite douleur au point d’injection. Attirer son attention sur les interactions médicamenteuses pouvant aggraver le risque hémorragique notamment les anti-inflammatoires non stéroïdiens. Conflits d’intérêts : aucun RÉFÉRENCES 1- Recommandations AFSSAPS – décembre 2009 2- Prevention of venous thromboembolism in hospitalized patientes with cancer. Francis CW. J Clin Oncol. 2009 oct 10;27 (29) : 4874-80 3- International recommendations for the prevention and treatment of venous thromboembolism associated with cancer. P. Khosravi-Shahi, G. Perez-Manga. Clin Drug Investig.2009;29(10):625-33. 4- Fondaparinux and the management of heparin-induced thrombocytopenia : AM. Blakmer, MD Oertel, JM Valgus. Ann Pharmacother.2009 oct;43 (10) : 1636-46 5- Major bleeding, mortality, and efficacy of Fondaparinux in venous thromboembolism prevention trials. JW Eikelboom, DJ Quinlan, M. O’Donnell Circulation. 2009 nov 17 ; 120 (20) : 2006-11 6- Heparin-induced thrombocytopenia associated with Fondaparinux. TE Warkentin, BT Maurer, and al. NEJM 2007 june 21 ; 356 (25) : 2653-5 RÉFÉRENCES DE L’ARTICLE DE LA PAGE 23 Intérêt de la résection chirurgicale des métastases ovariennes de cancers colorectaux : revue de la littérature 1. Jemal A, Siegel R, Ward E, et al. Cancer statistics, 2008. CA Cancer J Clin 2008;58:71-96. 2. Mir O, Berveiller P, Veyrie N. The commonest primary sites for metastatic disease to the ovary. J Surg Oncol 2007;96:639-40. 3. Chung TS, Chang HJ, Jung KH, Park SY, Lim SB, Choi HS, Jeong SY. Role of surgery in the treatment of ovarian metastases from colorectal cancer. J Surg Oncol 2009,1;100:570-4. 4. Scully RE. Secondary (including hematopoietic) tumors. In Scully RE,Young RH, Clement PB, ed.Tumors of the ovary, maldeveloped gonads, fallopian tube, and broad ligament. Washington, DC: Armed Force Institute of Pathology,1998:335-72. 5. Saltz LB, Cox JV, Blanke C, et al. Irinotecan plus fluorouracil and leucovorin for metastatic colorectal cancer. Irinotecan Study Group. N Engl J Med 2000;343:905-14. 6. 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J Surg Oncol 1981;17:33-8. 28 N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Soins de support Nutrition thérapeutique en oncologie : épidémiologie, physiopathologie et conséquences de la dénutrition Pa s c a l C r e n n (1) , Jérôme Alexandre (2) , Philippe Rougier (1) 1 : U n i ve r s i t é Ve r s a i l l e s S a i n t Q u e n t i n e n Yve l i n e s , H é p a t o - g a s t r o e n t é r o l o g i e e t O n c o l o g i e D i g e s t i ve , Hôpital Ambroise Paré (APHP), Boulogne 2 : Université Paris Descartes, Oncologie médicale, Hôtel-Dieu (APHP), Paris Résumé Les cancers sont une indication fréquente à l’assistance nutritive et à la nutrition thérapeutique du fait de l’extrême fréquence des anomalies métaboliques et nutritionnelles. En effet près de 50% des patients, tout particulièrement en cas de tumeur des voies aérodigestives supérieures, de l’estomac, du poumon, du pancréas, des ovaires et en hématologie lourde, sont amaigris et potentiellement dénutris. La physiopathologie des anomalies nutritionnelles fait essentiellement intervenir l’anorexie et un syndrome de détournement métabolique. Les conséquences principales de la dénutrition sont l’augmentation de la morbidité des traitements, la détérioration de la qualité de vie et l’augmentation de la mortalité, en partie indépendamment du stade de la tumeur. es cancers sont une cause majeure d’amaigrissement et de dénutrition. Cette dernière est facteur de fragilité et de vulnérabilité supplémentaire notamment chez les patients les plus âgés. Le risque nutritionnel est augmenté dans certains sites tumoraux, notamment quand il entraîne une gêne ou une obstruction alimentaire. Les critères de gravité nutritionnelle sont maintenant bien diffusés mais encore peu connus des cliniciens (1) . L’évaluation nutritionnelle doit être précoce, régulière et suivie. Une prise en charge adaptée, notamment en situation périopératoire, peut améliorer la faisabilité des thérapeutiques oncologiques et diminue certaines complications des traitements antinéoplasiques. L La dénutrition liée au cancer : épidémiologie et physiopathologie La prévalence de l’amaigrissement, et de la dénutrition qui en est la conséquence, est élevée chez les malades atteints de cancer, proche de 50% (2, 3) (Tableau 1). Elle concerne 60 à 90% des cancers des voies aérodigestives supérieures (ORL, œsophage), de l’estomac, du pancréas, du poumon et dans une moindre mesure les cancers de l ’ o v a i re e t c e r t a i n e s h é m o p a t h i e s malignes. Elle est plus rare notamment dans les tumeurs coliques ou prostatiques. Ces chiffre n’ont pas vraiment changé depuis 25 ans. En oncologie digestive une étude récente de l’AGEO Tableau 1 : Prévalence de l’amaigrissement en oncologie (hors ORL) D’après Dewys et al, 1980 mots-clés Dénutrition, Cachexie, Complication des traitements N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 29 Nutrition thérapeutique en oncologie : épidémiologie, physiopathologie et conséquences de la dénutrition Figure 1 : Physiopathologie simplifiée de la dénutrition et des anomalies métaboliques en oncologie PIF : proteolysis inducing factor; LMF: lipid mobilizing factor - DER: dépense énergétique de repos - CACS : cancer associated cachexia syndrome (Association des Gastroentérologues O n c o l o g u e s ) (1) a a i n s i m o n t r é , e n utilisant des critères divers dont notamment la perte de poids involontaire, chez 353 patients en cours de chimiothérapie et/ou radiothérapie pour cancer digestif, une prévalence de la dénutrition à 72% dont 25% sévère, le plus souvent méconnue du clinicien, l’indice de masse corporelle restant le plus souvent dans les limites « normales ». Les chiffres de malades dénutris atteignaient ainsi 85% pour les cancers de l’estomac (perte de poids de 20% en moyenne) et 74% (-15%) pour les cancers du pancréas. La physiopathologie de la dénutrition du malade atteint de cancer est complexe et multifactorielle (Figure 1), faisant intervenir : • une anorexie –facteur majeur, présent dans 40 à 80% des cas en présence d’une dénutrition. Cette perte d’appétit d ’ o r i g i n e m u l t i p l e , p s y c ho g è n e e t organique (avec une implication de divers médiateurs au niveau h y p o t ha l a mi q ue : ne u ro p e p t i d e Y, mélanocortine), reste un défi en cancérologie • et dans les formes plus évoluées, des facteurs liés à la présence de la tumeur (réponse immune et inflammatoire de l’organisme -TNF, IL6…- et produits de s é c r é t i o n t u m o r a l e d o n t l e P I F, proteolysis inducing factor, et le LMF, 30 lipid mobilizing factor) (4) qui favorisent respectivement le catabolisme protéique musculaire, par en particulier une activation du système ubiquitineprotéasome (5) , la lipolyse du tissu adipeux et finalement un syndrome de détournement métabolique. Ce syndrome est le principal contributeur de la cachexie néoplasique. • les altérations du goût, de l’odorat, avec ou sans candidoses oropharyngées, la satiété précoce et les effets secondaires digestifs qui sont communs lors de certaines chimiothérapies, en partie gérables par les traitements spécifiques. La dénutrition, notamment au stade de cachexie cancéreuse (ou CACS : cancer associated cachexia syndrome, qui crée une sorte de cercle vicieux, l’anorexie aggravant la dénutrition et précipitant vers la cachexie métabolique), est globale avec une fonte musculaire associée à celle de la masse grasse. Contrairement à ce qui est observé dans de nombreux modèles animaux, la dépense énergétique, exprimée par kilogramme de masse maigre (masse non grasse), est normale, ou plus rarement peu élevée, dans la plupart des tumeurs malignes humaines sauf celles à forte masse tumorale évolutive (6) et lors d’agression et de syndrome septique (notamment en postopératoire). N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique Lesconséquences de la dénutrition chez le patient oncologique La dénutrition diminue la qualité de vie des patients (7). Elle s’accompagne de plus de conséquences médicales objectivables : retard de cicatrisation et troubles trophiques, immunodépression cellulaire (lymphopénie globale) et humorale, faiblesse musculaire (muscles striés, lisses et diaphragmatique). La dénutrition aggrave clairement les conséquences de tous les gestes chirurgicaux. De plus elle entraine une augmentation du risque de la toxicité des traitements de chimiothérapie et notamment leur toxicité médullaire (8), une diminution de la réponse à la chimiothérapie et de la survie médiane des patients (2). L’asthénie est d’origine multifactorielle (anémie, traitement, psychologique). La dénutrition y participe habituellement. La dénutrition est une comorbidité rendant plus difficile la faisabilité des traitements et elle obère donc la possibilité d’utiliser la stratégie anticancéreuse optimale tant en terme de geste chirurgical qu’un terme de dose et d’espace inter cure pour la chimiothérapie. Ainsi, et ceci en partie indépendamment du siège et de l’extension de la tumeur, la dénutrition est un facteur péjoratif du pronostic des cancers (2). Nutrition thérapeutique en oncologie : épidémiologie, physiopathologie et conséquences de la dénutrition La correction de la dénutrition, si tant est qu’elle soit possible et précoce, permet en partie de pallier à ces inconvénients. En toute rigueur le bénéfice n’est néanmoins à l’heure actuelle prouvé (grade A) que lors des traitements chirurgicaux (nutrition périopératoire), notamment en oncologie digestive (9). La renutrition avant radiothérapie ou chimiothérapie permet probablement un bénéfice mais doit tenir compte des risques propres de la technique et de la possibilité d’accroissement de la masse tumorale en l’absence de traitement spécifique (10). Implications Un traitement nutritionnel doit permettre l’optimisation du traitement antican- céreux mais n’est bien entendu jamais suffisant à lui seul. On estime dans divers modèles statistiques que la dénutrition serait par elle-même et ses complications directes responsable de 20% des décès des patients ayant un cancer (11, 12) d’ou l’importance de son dépistage, du diagnostic de sa gravité et de sa prise en charge. Conflits d’intérêts : aucun RÉFÉRENCES 1. Attar A, Malka D, Lecomte T, et al. La dénutrition n'est pas diagnostiquée en oncologie digestive. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:A118. 2. Dewys WD, Begg C, Lavin PT, et al. Prognostic effect of weight loss prior to chemotherapy in cancer patients. Eastern Cooperative Oncology Group. 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Effentora® , une nouveauté dans la prise en charge de la douleur sévère chez les patients cancéreux Janssen-Cilag France, en contrat exclusif avec Cephalon, met à notre disposition une forme galénique innovante d’un antalgique de palier III déjà utilisé chez les patients cancéreux : le fentanyl. Commercialisé sous le nom d’Effentora®, ce nouveau traitement se présente sous forme de comprimés gingivaux bénéficiant d’une technologie de délivrance innovante, OraVescent®, qui augmente l’absorption du principe actif via la muqueuse buccale. Facile à administrer, Effentora® est indiqué dans le traitement des accès douloureux paroxystiques chez les patients souffrant de cancer dont l’état nécessite une prise en charge rapide et efficace de la douleur en association à un traitement de fond morphinique. D’après un communiqué de presse de Janssen Cilag et Cephalon N°38 - Tome 7 - mars 2010 - RéfleXions en Médecine Oncologique 31