Mouvement de la traduction dans les pays du golfe (Koweit, Arabie

Transcription

Mouvement de la traduction dans les pays du golfe (Koweit, Arabie
Traduire en Méditerranée
TRADUIRE DES LANGUES DES PAYS DE L’UE
AINSI QUE DU TURC VERS L'ARABE DANS LES
PAYS DU GOLFE (ARABIE SAOUDITE, KOWEIT,
EMIRATS ARABES UNIS, QATAR, YEMEN, BAHREIN
ET OMAN)
Dans le cadre de l’état des lieux de la traduction en Méditerranée,
co-produit par la Fondation Anna Lindh et Transeuropéennes en
2010
Collecte des données, analyse et rédaction
Ali Hajji
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Préambule
La présente étude est réalisée par Transeuropéennes, Paris. Elle est une composante du
premier état des lieux de la traduction en Méditerranée que conduisent à partir de 2010
Transeuropéennes et la Fondation Anna Lindh (programme euro-méditerranéen pour la
traduction), en partenariat avec plus d’une quinzaine d’organisations de toute l’Union pour la
Méditerranée.
Partageant une même vision ample de la traduction, du rôle central qu’elle doit jouer dans
les relations euro-méditerranéennes, dans l’enrichissement des langues, dans le
développement des sociétés, dans la production et la circulation des savoirs et des
imaginaires, les partenaires réunis dans ce projet prendront appui sur cet état des lieux pour
proposer et construire des actions de long terme.
I- Bref historique des processus de traduction dans les pays du Golfe :
Les populations qui forment actuellement la région connue sous la dénomination
« monde arabe » ont des modes de vie et des cultures qui remontent à plusieurs siècles. Si
le croissant fertile, composé de l’actuelle Syrie, de l’actuel Liban, de l’Irak et de la Palestine
était plutôt habité par des populations sédentaires, qui vivaient grâce au commerce et à
l’agriculture, les populations de la Péninsule arabique (plus tard l’Arabie Saoudite, le Yémen
ainsi que les autres pays du Golfe) abritaient des populations nomades ou semi-nomades,
dont l’environnement climatique et géographique a déterminé le mode de vie.
La naissance de l’islam, au VIIe siècle, a laissé une empreinte durable sur la région et en a
modelé, de diverses façons, l’histoire, la culture et la langue. Si l’histoire des différents califats
qui ont régné sur l’ancien empire musulman est traversée par les efforts de traduction
entrepris par les intellectuels de l’époque, il n’en reste pas moins que l’arabe était plutôt la
langue source ou la langue intermédiaire de traduction et non la langue cible, à l’exception
de l’époque omeyyade et abbasside, qui a favorisé les traductions vers l’arabe1.
Les Etats du Golfe sont des pays jeunes, qui ont accédé à l’indépendance assez
tardivement – 1932 pour l’Arabie Saoudite, 1961 pour le Koweït, 1971 pour le Sultanat
d’Oman, les Emirats Arabes Unis, le Qatar et le Bahreïn, et 1990 pour le Yémen.
Le premier livre traduit dans les pays du Golfe l’aurait été en Arabie Saoudite, en 19552.
Mona Baker, Kirsten Malmkjær, Routledge Encyclopedia of Translation Studies, 1998, London & New York, 654
pages, p. 317.
2 Noura AL-NASSER, La traduction des livres vers l’arabe en Arabie Saoudite (étude bibliométrique), Bibliothèque
publique du roi Abdul-Aziz, Riyad, 1998.
1
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II- Méthodologie suivie :
L’impossibilité de se déplacer dans les pays concernés pour la présente étude a été
handicapante pour la collecte des données et la prise de contact avec les éditeurs, auteurs,
traducteurs et autres acteurs des mouvements de traduction. Nous avons donc privilégié les
prises de contact par courrier électronique et par téléphone, mis à part pour le Koweït, où
nous avons pu rencontrer, en juin 2010, des responsables des principales institutions
travaillant dans le domaine de la traduction.
Voici, dans le détail, les personnes / institutions rencontrées et/ou contactées :
1. Arabie Saoudite:
-
Le Prix International du Roi Abdullah de la traduction (Riyad, Arabie Saoudite).
-
Le Centre de traduction à l’Université du Roi Saoud (Riyad, Arabie Saoudite).
-
La bibliothèque nationale du Roi Fahad (Riyad, Arabie Saoudite).
-
La bibliothèque du Roi Abdelaziz (Riyad, Arabie Saoudite).
-
L’université Islamique de l’Imam Mohammed bin Saoud (Riyad, Arabie Saoudite).
-
La maison d’édition privée Khaled Bashmakh (Djeddah, Arabie Saoudite).
-
La maison d’édition privée Okaz (Djeddah, Arabie Saoudite).
-
La maison d’édition Saoudiya (Djeddah, Arabie Saoudite).
-
L’université du Roi Abdelaziz (Djeddah, Arabie Saoudite).
-
La maison d’édition privée Jarîr (Riyad, Arabie Saoudite).
-
La maison d’édition privée Almarrîkh (Riyad, Arabie Saoudite).
-
La maison d’édition privée Al-Obeikan (Riyad, Arabie Saoudite).
2. Koweït:
-
Le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres, Koweït. Mansour ALANEZI, directeur de la publication et de la diffusion– juin 2010.
-
La Fondation Koweitienne pour l'Avancée Scientifique, Koweït. Khaled ALROUBAYAAN, direction culturelle – juin 2010.
-
Le Centre de Recherches et d' Etudes Koweitien, Koweït. Abdallah Youssef ALGHUNAIM, président du Centre – juin 2010.
-
Le Centre Al-Babtain pour la traduction, privé, Koweït. Elias AL-BARRAGE,
directeur du Centre – juin 2010.
-
La maison d'édition privée Souad Al-Sabah, Koweït.
3. Emirats Arabes Unis:
-
Le Programme « Kalima » (Emirats Arabes Unis, Abou Dhabi).
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-
La Fondation Mohammed Bin Rashid Al Maktoum, programme « Tourjim » (Emirats
Arabes Unis, Dubaï).
-
Le Département de la Culture et de l'Information de Sharjah (Emirats Arabes Unis,
Sharjah).
4. Qatar:
-
Le Conseil National de la Culture, des Arts et du Patrimoine (Qatar).
5. Bahreïn:
-
Le Centre Culturel Kanou : Mahdi Abdullah et Farouq Amin, traducteurs du Bahreïn.
6. Sultanat d'Oman:
-
Le Cercle culturel omani, Abdullah AL-HOURASI et Ahmad AL-MUEINI, (Oman).
-
L’université du Sultan Qaboos (Oman).
7. République du Yémen:
-
Le Ministère de la Culture (Yémen).
-
La Commission Nationale Yéménite pour l’éducation, la Culture et les Sciences
(Yémen).
8. Autres institutions:
-
Le Bureau Arabe de l’Education pour les Pays du Golfe.
Sources des informations bibliographiques utilisées pour la présente
étude :

Institutions impliquées dans les processus de traduction, dans les
différents pays étudiés : Pour le Koweït, la majorité de ces institutions (citées
dans le corps de l’étude) nous ont fourni, à titre gracieux, les informations
bibliographiques demandées. Les rencontres effectuées sur place ont été, dans ce
sens, très bénéfiques. Les représentants des autres institutions du Golfe n’ayant pu
être rencontrées, les informations sont quelque peu parcellaires : nous avons utilisé
les fichiers mis en ligne sur Internet – lorsqu’il y en a – et ceux obtenus grâce à des
entretiens téléphoniques ou à des contacts par email. Il en a été de même pour les
grands prix de traduction de la région.
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
L’Index Translationum de l’UNESCO3 : cette base de données de
l’UNESCO se présente comme étant une « véritable bibliographie internationale des
traductions ». Créée en 1932, elle souffre du manque d’implications des délégations
des pays, qui ne fournissent pas toujours les informations complètes et exhaustives
concernant les traductions dans leurs propres pays. Une « immersion » dans le
secteur de l’Index (grâce à un stage effectué entre octobre 2010 et janvier 2011)
nous a permis de relever les difficultés rencontrées par l’Index : les transcriptions
des noms d’auteurs (arabes, dans le cas de figure qui nous intéresse) ne sont pas
toutes unifiées, ce qui crée une véritable difficulté pour le chercheur. L’autre grande
difficulté est le caractère incomplet de la base.

Bureau virtuel du projet « Traduire en Méditerranée », mis en
place par Transeuropéennes.
III- Les institutions centralisées :
Il existe des institutions étatiques qui se donnent pour mission, dans chacun des pays du
Golfe, de mettre en place des politiques de traduction de – mais surtout vers – l’arabe.
Nous y reviendrons plus loin, dans notre présentation détaillée des pays du Golfe.
Arrêtons-nous d’abord un instant sur une institution – la seule, à notre connaissance –
présente dans tous les pays du Golfe, et qui mène une politique de traduction plus ou moins
centralisée pour tous ces pays. Il s’agit du Bureau Arabe de l’Education pour les Pays
du Golfe4, qui dépend du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe. La mission
principale de cette organisation est la mise en place de nouveaux programmes de recherche
dans le domaine de la pédagogie, leur mise à jour ainsi que la création d’un centre
pédagogique d’apprentissage de la langue arabe. Dans ce cadre, il œuvre également à faire
évoluer la méthodologie d’enseignement de la langue arabe destinée aux arabophones, afin
qu’elle soit en adéquation avec les enseignements modernes d’autres langues. C’est ainsi que
les traductions « sponsorisées » par ce bureau relèvent généralement du domaine de la
pédagogie et de l’éducation5. Le Bureau possède par ailleurs sa propre imprimerie ; il
distribue auprès des bibliothèques des Etats du Golfe et de « leurs partenaires » ses
publications, dans le but avoué de les faire connaître du plus grand nombre.
www.uneso.org/culture/translationum
Arab Bureau of Education for the Gulf States: http://www.abegs.org/Aportal/ , consulté le 30 septembre 2010.
5 Les ouvrages traduits par le Bureau Arabe de l’Education pour les Pays du Golfe sont recensés dans le tableau
des ouvrages traduits dans les pays du Golfe, en annexe de la présente étude. Nous pouvons citer, à titre
d’exemple, la traduction d’un ouvrage de Rick Wormeli, L’art du résumé [Fann al talkhîs] en 2008.
3
4
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IV-
La situation par pays :
1. L’Arabie Saoudite :
Comme indiqué précédemment, l'Arabie Saoudite est le pays du Golfe qui dispose
du plus grand nombre de maisons d'éditions qui effectuent des traductions. Nous avons
contacté toutes ces maisons d'édition ainsi que les organisations qui traduisent.
Tableau numéro 1: le nombre de livres traduits en Arabie Saoudite de 1930 à 2005
(source : Mamdouh ALKHATIB, 2007).
Année
Nombre
Année
de livres
Nombre
Année
de livres
Nombre
de livres
1930-1954
0
1975
4
1990
15
1955
1
1976
14
1991
33
1956-1962
0
1977
12
1992
28
1963
1
1978
14
1993
13
1964
1
1979
15
1994
19
1965
1
1980
13
1995
28
1966
3
1981
29
1996
20
1967
0
1982
61
1997
29
1968
2
1983
41
1998
50
1969
0
1984
31
1999
70
1970
0
1985
23
2000
163
1971
0
1986
37
2001
29
1972
5
1987
44
2002
170
1973
1
1988
28
2003
56
1974
4
1989
43
2004
97
2005
12
1260
Total
Le tableau numéro (T1) nous montre que le nombre de livres traduits vers la langue
arabe en Arabie Saoudite en 75 ans, de 1930 à 2005, est de 1260 livres. Il faut savoir que ce
nombre correspond à celui des livres traduits, toutes organisations présentes en Arabie
Saoudite, gouvernementales ou privées, confondues. Ce tableau nous confirme que le
premier livre traduit était en 1955 donc 25 ans après la création de pays. A partir des années
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1990, le pays témoigne d'une progression au niveau de la traduction comme nous montre le
tableau (T1).
Cet autre tableau nous présente le pourcentage des différents livres traduits en fonction des
catégories:
Tableau numéro 2 (T2) : catégories des livres traduits de 1930 à 2005:
Catégorie
Nombre de livres
Pourcentage
Sciences Sociales
491
38.97
Sciences Humaines
252
20
Sciences Appliquées
218
17.3
Sciences de l'information
125
9.92
Sciences dures
114
9.05
Lettres et Arts
60
4.67
1260
100
et de la communication
Total
Le tableau numéro 2 (T2) nous montre que les livres de sciences sociales sont
classés premiers parmis les autres avec (38.97%), suivis par ceux de sciences humaines
(20%), puis les sciences appliquées (17%), ensuite, Sciences de l'information et de la
communication (9.92%). Le poucentage des sciences dures (physique, chimie…etc) est de
9.05%, enfin, nous retrouvons les livres de lettres et art en dernière position, avec un
poucentage de 4.67%.
Parmi les 1260 livres traduits, 95% l'ont été à partir de la langue anglaise et 5% d'autres
langues comme le français, le russe, l'allemand et l'ourdou6.
Il est à noter que l'Arabie Saoudite entreprend d'encourager la traduction d'ouvrages écrits
par des Saoudiens dans d'autres langues que l'arabe7.
Mamdouh ALKHATIB L'industrie de la traduction en Arabie Saoudite [sinâ'at al tarjama fil mamlaka al-'arabiyya alsa'oudiyya], Université du Roi Saoud, Riyad, 2007.
7 Bibliothèque Nationale du Roi Fahd, http://www.kfnl.gov.sa/idarat/pplo/Translatwd/pdf/fornt.pdf , consulté le 30
septembre 2010.
6
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Détail des branches traduites jusqu'en 2005 en Sciences Humaines en Arabie
Saoudite
Psychologie
25
Ethique
20
Philosophie
Patrimoine
15
Traductologie
Religion
10
5
Sc. Du
langage
Arts
Sport
Histoire
0
Géographie
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Psychologie
25
Ethique
20
Philosophie
Patrimoine
15
Traductologie
Religion
10
5
Sc. Du
langage
Arts
Sport
Histoire
0
Géographie
Source : d'après les chiffres avancés par Mamdouh ALKHATIB (2007)
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Détail des branches traduites jusqu'en 2005 en Sciences Sociales en Arabie
Saoudite
Sociologie
40
35
Economie
30
Sc. Politiques
25
Droit
20
15
10
5
Administratio
n
Sc. Militaires
Sc. de
l'éducation
Commerce
0
Us et
Coutumes
Source : d'après les chiffres avancés par Mamdouh ALKHATIB (2007)
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
Les maisons d'édition et bibliothèques:
Le tableau numéro 3 (T3) recense les différentes maisons d'édition et établissements
publieurs les plus importants en Arabie Saoudite ainsi que le nombre d'ouvrages traduits
entre 1955 et 2004 :
Etablissement
Ville
Ouvrages traduits
Université du Roi Saoud
Riyad
141
Bibliothèque nationale du
Riyad
8
Riyad
9
Riyad
10
Djeddah
12
Maison d’édition Okaz
Djeddah
16
Maison d’édition Saoudiya
Djeddah
17
Université du Roi
Djeddah
25
Maison d’édition Jarîr
Riyad
99
Maison d’édition Al-
Riyad
194
Riyad
275
Roi Fahad
Bibliothèque du Roi
Abdelaziz
Université Islamique de
l’Imam Mohammed bin
Saoud
Maison d’édition Khaled
Bashmakh
Abdelaziz
Marrîkh
Maison d’édition AlObeikan
D'après Mamdouh ALKHATIB (2007)
La maison d'édition Al-Obeikan à Riyad prend la première position avec 275 ouvrages
traduits sur 1260 livres traduits en Arabie Saoudite jusqu'en 2005. Cette maison d'édition
traduit des ouvrages culturels, politiques (c'est le cas par exemple de The Delhi Sultanate: a
political and military history de Peter Jackson, 1998) ainsi que des romans destinés à un public
généraliste. En deuxième position, avec 194 ouvrages traduits, vient la maison d'édition AlMarrîkh. Elle vise plutôt un public académique (suivant ou ayant suivi des études
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universitaires supérieures, professeurs, etc.…). L'université du Roi Saoud avec son Centre
de traduction se situe en troisième position, avec 141 ouvrages traduits fin 2004. Depuis
2004, ce nombre a augmenté et il est aujourd'hui de 247 livres traduits selon le site du
Centre8. Il déclare traduire des ouvrages de "tous domaines": littérature, psychologie,
sciences dures, nutrition, éducation, médecine, etc.. Le Centre de traduction de l'université
du Roi Saoud est un établissement non lucratif, son but est d'offrir l'opportunité aux
professeurs d'université de traduire des ouvrages récents pour "enrichir les bibliothèques
arabes". Pour encourager les traducteurs, le Centre leur offre une récompense. Les critères
de jugement sont la "valeur scientifique" et la "qualité de la traduction". La récompense varie
entre 16.000 [3.000 €] et 50.000 riyals saoudiens [10.000 €] et le montant dépend du
nombre de pages de l'ouvrage et de la qualité de la traduction. Cette décision est prise par
un comité spécialisé.
Concernant les droits d'auteur, le Centre de traduction de l'université du Roi Saoud prend
contact avec l'auteur ou la maison d'édition pour l'achat des droits qui varient entre 700 et
2200 euros. Une fois l'ouvrage traduit et diffusé, il est vendu à un prix symbolique. Le
Centre traduit également de la langue arabe vers d'autres langues des ouvrages concernant
le patrimoine et la culture arabo-musulmanes.
Notons que la maison d'édition privée Jarîr traduit de nombreux livres pour enfants,
comme les différents épisodes de la collection du Club des Cinq, écrites par Enid Blyton.
Selon Franck Mermier, les trois principales maisons d'édition privées en Arabie Saoudite
sont Al-Obeikan, Jarîr et Tihâma9.
Tous les ouvrages traduits en Arabie Saoudite sont présents dans les bibliothèques
nationales du pays; l'une de ces bibliothèques est la bibliothèque nationale du Roi Fahad à
Riyad. Cette bibliothèque ne traduit pas beaucoup d'ouvrages mais ce qui la distingue des
autres est qu'elle a une salle consacrée aux ouvrages ottomans et turques Al Salah Al
Othmaniyyah wa Al Turkiyyah. La bibliothèque est en train de les traduire vers la langue arabe.

La bibliothèque du Roi Abdelaziz (http://www.kapl.org.sa/index.php)
La bibliothèque du Roi Abdelaziz a été inaugurée le 27 Février 1987 par Le Roi Abdullah Bin
Abdelaziz. La bibliothèque se concentre surtout sur la langue arabe, sur le patrimoine
islamique et sur l'histoire du Royaume d'Arabie Saoudite.
http://www.ksu.edu.sa/sites/KSUArabic/aboutUs/Centers/TranslationCenter/Pages/default.aspx, consulté le 30
septembre 2010
9 Franck Mermier, Le Livre et la Ville, Beyrouth et l'édition arabe, Actes Sud, Arles, 2005, p. 110.
8
© Transeuropéennes, Paris - 2010

Le prix du Roi Abdullah pour la traduction (http://www.translationaward.org)
Le 31 octobre 2006, La bibliothèque a créé le prix international du Roi Abdullah pour la
traduction. Les domaines concernés par ce prix sont :
Le prix de traduction récompensant les efforts déployés par les organisations
-
encourageant la traduction.
Le prix de traduction des sciences humaines traduites de l'arabe vers d'autres
-
langues.
-
Le prix de traduction des sciences humaines traduites vers l'arabe.
-
Le prix de traduction des sciences naturelles traduites de l'arabe vers d'autres
langues.
Le prix de traduction des sciences naturelles traduites vers l'arabe.
-
La valeur de chaque prix est de 500.000 riyals [95.000 €]; un certificat et une médaille sont
également décernés aux gagnants.
o
Les buts déclarés du Prix du Roi Abdullah pour la traduction sont :
- Promouvoir les échanges interculturels et de savoir entre les langues.
- Encourager la traduction vers la langue arabe dans le domaine scientifique.
- Enrichir les bibliothèques arabes.
- Encourager les organisations et les maisons d'édition.
- Améliorer le niveau de la traduction.
2. Le Koweït :
Après notre visite au Koweït, nous avons pu rencontrer des responsables de différentes
organisations qui traduisent des livres. Nous allons présenter en détail la situation de chaque
organisation concernant la traduction. Ce travail est le seul que nous avons pu le faire sur
terrain. Cette méthodologie ne concerne donc pas les autres pays du Golfe.
La première organisation au Koweït qui a commencé à traduire des livres vers l’arabe
est le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres du Koweït. Les deux premiers
ouvrages traduits, respectivement en octobre et en novembre 1969,
sont un livre de
Manuel Galich10 (titre original non précisé) et le Jeanne d’Arc de Jean Anouilh.
A. Le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres au Koweït
(CNCALK) :
Ce Conseil National a été reconnu en 17 juillet 1973 par le gouvernement comme une
organisation qui diffuse la pensée du monde occidental en traduisant vers l’arabe des
ouvrages afin qu’ils soient lus par le plus grand nombre possible de lecteurs monolingues. Par
10
Le titre arabe de l’ouvrage de Manuel Galich est :"Samak Assir Alhadhm".
© Transeuropéennes, Paris - 2010
ailleurs, le CNCALK a d’autres fonctions comme protéger
la culture, les Arts et la
littérature du pays, préserver le folklore koweitien et la langue arabe, susciter l'intérêt dans
la lecture des livres, soutenir la créativité intellectuelle et artistique des culture et musique
locales.
Le CNCALK remplit notamment ces missions par le biais de la diffusion des revues
suivantes :
1. Revue « Alfonoun » [les Arts]: spécialiste des arts plastiques, du cinéma, de la
musique, de la photographie, du folklore populaire etc.
2. Collection « Alem al Maarefa » [le monde de la connaissance]: parution mensuelle
dont le premier numéro date de janvier 1978. Elle traduit et publie des textes de la
pensé contemporaine mondiale.
3. Collection « Ibdaat Alamiyya » [les chefs-d'œuvre internationaux]: publie tous les
deux mois un nouveau numéro contenant des textes traduits de théâtre et
littéraires. Le premier numéro date d'octobre 1969.
4. Collection « Almasrah al Alami » [théâtre international]: un nouveau numéro paraît
tout les deux mois et constitue la traduction d'une pièce de théâtre célèbre.
5. Revue « Alam alfikr » [le monde de la pensée]: parution trimestrielle dont le
premier numéro date de janvier 1970. Elle publie essentiellement des textes de
sciences humaines.
6. Revue « Althaqafa al’alamiyya » [la culture mondiale]: publiée tous les deux mois,
elle traduit des textes sur la culture contemporaine mondiale. Son premier numéro
date d'avril 1981.
Le Conseil National assure l’organisation de la foire du livre au Koweït tous les ans ainsi
que la participation à des foires du livre au niveau local et mondial. Le (CNCALK) gère la
Bibliothèque nationale du Koweït, qui a été créée dans le but de répondre aux besoins de
l'expansion de l'éducation dans l'enseignement supérieur et dans la recherche scientifique.
Elle entreprend les tâches suivantes :
1. Superviser le système de dépôt légal des œuvres.
2. Superviser la répartition du nombre de normes internationales pour les livres
imprimés localement.
3. Collecter, organiser, et préserver le patrimoine et la production intellectuelle de
milliers de livres, périodiques, en particulier ceux qui traitent de l'État du Koweït.
4. Coopérer avec les bibliothèques de recherche spécialisées à l'intérieur et à
l’extérieur du Koweït.
5. La Bibliothèque nationale du Koweït prend en charge le fonds des bibliothèques
privées, lorsque leurs propriétaires décèdent.
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Nous avons pu rencontrer M. Mansour Al Aneizi, directeur de la publication et la
distribution du CNCALK. Voici la teneur de l’entretien que nous avons réalisé avec lui :
Mansour Al Aneizi : « Le Conseil National de la Culture, des Arts et des
Lettres a pour tâche de traduire des livres vers la langue arabe. Nous
traduisons des ouvrages de littérature, de poésie, de théâtre, de sciences
sociales, de sciences humaines, mais très peu de sciences dures. Nous avons un
comité de rédaction qui se réunit pour la collection de livres. Le choix d’un
livre se porte sur le succès qu’il rencontre dans sa langue d’origine, et il
apporte un plus pour la bibliothèque arabe. Nous évitons bien sûr de choisir
des ouvrages spécialisés, car notre vision porte sur le grand public. Après avoir
choisi un livre, nous contactons l’auteur ou la maison d’édition pour avoir
l’accord de la traduction et obtenir les droits du livre en langue arabe ainsi que
le droit de censurer les passages qui ne conviennent pas à
notre culture
…etc.»
Q : Comment et selon quels critères choisissez-vous votre traducteur ?
R : « Nous avons un comité qui se réunit pour choisir le traducteur. Tout
d’abord, nous sommes très connus dans le domaine de la traduction de livres.
Cela fait 30 ans que nous travaillons et nous avons une liste de traducteurs qui
ont déjà travaillé pour nous tout au long de ces années. Pour donner la chance
aux jeunes diplômés, nous recevons au fur à mesure, des CV de différents
traducteurs venant de différents pays arabes ou les maisons d’édition avec qui
nous travaillons nous proposent des traducteurs. Les traducteurs choisis par le
comité passent un examen écrit ainsi qu’un examen oral. Nous sommes très
exigeants sur ce point car nous voulons effectuer un bon travail de traduction.
Nous n’avons pas le temps de former des traducteurs. Nous sommes plutôt
une organisation qui finance le projet.
Q : Quels sont les droits du traducteur ?
R : « Le traducteur est une sorte de petit auteur c'est-à-dire que son nom paraît
à coté de celui de l’auteur en tant que traducteur. Il a le droit de censure. Si le
livre traduit est réédité, il est prioritaire pour traduire plus de livres que les
autres traducteurs. Le traducteur dispose d’un délai de 6 mois à 1 an pour
traduire son livre. Après remise de la traduction, celle-ci doit être présentée
devant un comité de révision pour être lue et corrigée avant l’impression du
livre. Pour la première diffusion nous imprimons 40 000 exemplaires et le livre
est vendu 1 USD par exemplaire. Notre but n’est pas de faire du bénéfice, mais
de faciliter au lecteur arabe l’accès à de nouveaux ouvrages. Bien évidemment,
nos livres sont présents partout (librairies, bibliothèques, nous participons
également à des expositions du livre aux niveaux local et mondial). Les
Marocains lisent beaucoup ; nous envoyons donc beaucoup d’ouvrages au
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Maroc. Et nous en envoyons également en dehors des pays arabes, en GrandeBretagne et en France. Concernant le paiement du traducteur, si le livre fait
350 pages nous lui payons 1500 dinars (4000 euros) et si c’est une revue, nous
lui payons par mot, 20 fils (5 cents d’EURO) par mot.
Q : Décernez-vous des Prix pour la traduction ?
R : « Notre organisation ne décerne pas de prix, mais nous participons à la
remise de prix d’autres institutions. D’ailleurs, nous avons déjà gagné plusieurs
prix, celui de la Fondation du Koweït pour l'Avancement des Sciences, et celui
du Roi Abdullah pour la traduction ».
Q : Quelle est la langue la plus traduite vers l’arabe ?
R : « Nous pouvons mettre en première position l’anglais à 70%, ensuite, à 28%
trois autres langues : l’allemand, le français et le persan, et enfin, 2% d’autres
langues ».
Q : Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans votre travail de
traduction ?
R : « Il faut savoir que nous ne sommes pas la seule institution qui fait de la
traduction, nous avons des concurrents partout dans les pays arabes. C’est une
bonne chose mais malheureusement il n’y a pas de structures pour réunir tous
ces pays. Une autre difficulté à signaler est que les maisons d’édition des
auteurs que nous voulons traduire ne répondent pas toujours à nos
sollicitations. Enfin, le manque des traducteurs constitue également un
handicap.
Q: Avez-vous des livres bilingues?
R: Non, nous n'en avons pas.
Q: Comment vos livres sont-ils présentés? Avez-vous un mécanisme de
contrôle de la qualité des traductions?
R: Notre logo figure sur la couverture de nos ouvrages. Le titre arabe y figure,
ainsi que les noms de l'auteur et du traducteur. Le titre original de l'œuvre
figure sur la deuxième de couverture.
En ce qui concerne les mécanismes de contrôle des traductions, un comité
surveille de très près la qualité de la traduction.
Q: Quelle est la réaction des critiques par rapport à vos livres?
R: Nous traduisons depuis 1969 et nous sommes reconnus dans ce domaine.
Nous avons été soutenus, à plusieurs reprises par de grands chercheurs arabes
et par des critiques. C'est pour cette raison qu'il nous arrive de rééditer des
ouvrages traduits qui rencontrent beaucoup de succès. Cela a par exemple été
le cas de deux tomes consacrés au patrimoine de l'islam (The legacy of Islam, de
Joseph Schacht et Clifford Edmund Bosworth) ou encore certaines pièces de
théâtre (telle Mother of men de Percival Wilde).
© Transeuropéennes, Paris - 2010
B. La Fondation koweitienne pour l'avancée scientifique (FKAS):
La Fondation koweitienne pour l'avancée scientifique est une association reconue
d'interet général, créée le 12 décembre 1976 par décret princier. Un conseil de direction,
présidé par l'émir du Koweït et composé de six membres choisis par lui pour une duré de
trois ans. La Fondation est financée en partie par 1% de chiffre d'affaire annuel des
entreprises koweitiennes. Le conseil de direction nomme un directeur général, qui met en
place les politiques et les orientations du conseil et dirige les questions administratives et
financières de la fondation.
1. Les buts de la Fondation :
-
Soutenir les traveaux de recherche.
-
Proposer des projets scientifiques en fonction des interets nationaux.
-
Offrire des bourses et des prix pour soutenir les progrès intellectuels au Koweit et
dans le reste du monde arabe.
-
Organiser des congrès et des séminaires internationaux.
-
Enrichir les bibliothèques arabes en publiant des livres, des revues et des
encyclopédies.
La Fondation offre des bourses pour l'écriture, la traduction et la publication d'ouvrages
scientifiques en langue arabe. Les domaines privilégiés sont les sciences naturelles,
l'architecture, le médecine, la nutrition, les sciences sociales et économiques. Ces bourses
sont offertes à des auteurs arabes, vivant dans l'ensemble du monde arabe. La Fondation se
charge de faire réviser les ouvrages avant publication pour s'assurer de ses qualités
scientifiques.
2. Les foires et les salons du livre :
La Fondation participe à des nombreuses foires du livre, à l'intérieur ou à l'extérieur du
Koweït, en coopération avec le conseil national de la Culture, des Arts et des Lettres, le
Ministère de la communication, l’Université du Koweït et le Centre de Recherches et
d'Etudes koweitien.
Le principal intérêt de la participation à ces différentes foires et expositions, dans le
monde arabe ou à l'international, est la visibilité qu'elle apporte à cette institution. Celle-ci
lui permet de diffuser et de vendre ses publications à une échelle plus ou moins grande, mais
pas véritablement d'en tirer profit puisque celles-ci sont cédées à un prix symbolique, la
Fondation était une organisation à but non lucratif.
o
Les foires extérieures:
© Transeuropéennes, Paris - 2010
- Salon international du Caire.
- Salon international de Casablanca.
-
Salon international de Mascate.
- Semaine culturelle du Koweït en Jordanie.
-
Salon international de Téhéran.
- Salon de la bibliothèque al-Assad (Syrie).
- Salon international du Yémen.
- Salon international de Francfort (Allemagne).
- Salon international de Sharjah (Emirats Arabes Unis).
- Salon international de Beyrouth (Liban).
- Salon international de Doha (Qatar).
o
La Fondation participe également à diverses foires locales, notamment
dans le milieu universitaire.
3. Les publications de la Fondation:
La Fondation édite une publication intitulée "L'avancée scientifique". Rédigée en
langue arabe, elle publie parfois des textes traduits vers l'arabe11.
La Fondation traduit actuellement l'Encyclopédie du Coran vers plusieurs langues étrangères
(la traduction anglaise est déjà achevée).
La Fondation apporte un soutien financier à l'Association des Handicapés koweitiens pour
l'impression de certaines publications.
4. Les Prix décernés par la Fondation:
4.1. Le Prix du Koweït:
L'un des objectifs de la Fondation est d'aider à la reconnaissance des travaux
accomplis par les scientifiques koweitiens et arabes: dans ce but, elle leur octroie des prix.
L'un des ces prix revient à un ressortissant koweitien et le second à un autre ressortissant
arabe. Le prix remis recouvre différents domaines, tels que les sciences dures, les sciences
appliquées, les sciences économiques et sociales, les arts et la littérature et récompense des
travaux traduits ou pas.
Ainsi, l'un des numéros a traduit le texte The Elegant Universe [Al-Kawn al-anîq] de Brian Greene. Le
traducteur est Abd al-Halîm Mansour.
11
© Transeuropéennes, Paris - 2010
L'analyse des profils des gagnants entre 2005 et 2009 nous permet de réaliser le
graphe suivant:
Sc. Dures et
appliquées
SHS
Proportion des travaux de recherche primés entre 2005 et 2009 par le prix du Koweït (FKAS) selon
les catégories
Nous pouvons noter une augmentation concernant la remise des prix dans le domaine des
SHS: jusqu'en 2007, aucun prix n'avait été remis dans ce domaine12. En 2007, un prix est
remis à un chercheur syrien, Mohammed Radwan Al-Dayah, pour ses recherches en
Littérature andalouse, deux prix sont remis en 2008 dans la catégorie "Patrimoine et
civilisation" et un prix est remis en 2009, pour la catégorie "Urbanisme". Le graphe montre
que malgré l'augmentation de prix dans la catégorie qui nous intéresse, le pourcentage de
recherches récompensées en SHS est encore bien inférieur à celui des autres catégories.
4.2. Le Prix du salon du livre du Koweït:
Par le biais de la remise de ce prix, la Fondation déclare soutenir le travail des
auteurs, des traducteurs et les maisons d'édition – au Koweït et dans l'ensemble des pays
arabes. Il consiste en la remise d'un prix dans différents domaines:
- Le Prix du meilleur livre écrit sur le Koweït.
- Le Prix du meilleur ouvrage scientifique écrit en langue arabe.
- Le Prix du meilleur ouvrage scientifique traduit vers la langue arabe.
- Le Prix du meilleur ouvrage d'arts, de littérature et de sciences humaines
écrit en langue arabe.
- Le Prix du meilleur ouvrage d'arts, de littérature et de sciences humaines
traduit vers l'arabe.
- Le Prix du meilleur ouvrage de littérature de jeunesse arabe.
Détail des catégories et des chercheurs primés entre 2005 et 2009 disponible à l'adresse suivante:
http://www.kfas.com/arabic_pages/ga_awardsandprizes.html, consulté le 24 octobre 2010.
12
© Transeuropéennes, Paris - 2010
L'édition 2009 n'a pas récompensé de traduction dans le domaine des arts, de la
littérature et de sciences humaines mais a remis un prix pour la traduction d'un ouvrage
scientifique sur l'architecture géotechnique à Abdallah Al-Mouhaidib.
L'édition 2008 a récompensé, pour le domaine des sciences humaines, Mohammed Hilel
pour un ouvrage traduit sur la "traduction et le sens". Celle de 2006 a récompensé un
ouvrage traduit à plusieurs mains, sur l'Histoire de l'écriture, dont l'auteur est Anne-Marie
Christin13.
Le montant du prix est de 5000 dinars koweitiens, i. e. 13.000 €. La Fondation offre
également 2000 dinars, i. e. 5000 € à l'éditeur de l'ouvrage primé.
Nous avons pu rencontrer Khaled al-Roubayaan, directeur de la section culturelle de
la Fondation. Voici la transcription de l'entretien effectué:
Q: Parlez-moi des livres traduits vers l'arabe ou de l'arabe vers d'autres langues.
R: nous traduisons beaucoup d'ouvrages de l’anglais vers l'arabe et la plupart
sont des livres scientifiques. Nous avons commencé cela depuis 1992. Mais le
seul ouvrage traduit de la langue arabe vers les autres langues, est
l'encyclopédie de Coran14; nous l'avons déjà traduit en anglais. Ce projet est né
sous l'impulsion de l'émir Jaber Al-Ahmad Al-Sabah (1977-2006) à destination
des populations non arabophones. Les traductions se font avec l'aide des
ambassades de l'Etat du Koweït dans les pays concernés.
Q: Qui décide des ouvrages à traduire? Qui décide des aides à la traduction? Et
selon quels critères?
R: Notre Fondation finance de nombreux projets. En qui concerne le choix
d'un ouvrage, nous le sélectionnons d'abord en fonction du sujet abordé et des
besoins des bibliothèques arabes. Nous nous faisons aider par des spécialistes
arabes, en leur demandant leur avis concernant cet ouvrage. Cependant, tous
les spécialistes n'acceptent pas de nous répondre et bien que nous demandions
l'avis d'environ 1000 chercheurs arabes, nous ne recevons que très peu de
réponses à nos interrogations. Après cette première étape de consultation,
nous effectuons – ou pas – la traduction.
Q: Quelle est votre position par rapport aux droits d'auteur?
R: Soit nous, soit les maisons d'édition partenaires s'occupent de la question
des droits d'auteur. Bien évidemment, nous citons le nom de l'auteur sur la
couverture du livre, ainsi que celui du traducteur. Une fois les droits d'auteur
obtenus, nous avons le droit de faire censurer ou de faire retirer des passages
qui ne conviennent pas à notre culture.
La
liste
des
lauréats
suivant
les
éditions
est
disponible
sur
le
lien
suivant:
http://www.kfas.com/arabic_pages/ga_awardsandprizes.html, consulté le 24 octobre 2010.
14 Outre l'aspect religieux de cette œuvre, on entend également par "Encyclopédie du Coran" un certain nombre
de dictionnaires concernant l'environnement, la faune et la flore tels qu'ils sont présentés par l'islam, etc.
13
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Q: De quelle(s) langue(s) traduisez-vous le plus?
R: Nous traduisons majoritairement de l'anglais.
Q: Comment choisissez-vous vos traducteurs et comment évaluez-vous le
travail de traduction?
R: Nous choisissons des traducteurs qui se trouvent à l'intérieur ou à
l'extérieur du pays, après réunion d'un comité et sur la base de leurs
curriculum vitae. Il arrive que ce soit la maison d'édition qui propose un
traducteur. Après remise de la traduction, un comité de révision juge de la
qualité du texte.
Q: Quelle est la nature des livres traduits? Comment sont-ils présentés (design
de la couverture, etc.)? Où peut-on trouver les livres que vous traduisez?
R: Nous traduisons principalement des ouvrages scientifiques et notre logo
figure sur la couverture de ces ouvrages. Nous sommes une institution à but
non lucratif; nous offrons aux instances de l'Etat et aux organisations privées les
ouvrages que nous avons traduits et vous pouvez acheter nos livres dans la
plupart des librairies koweitiennes. Nous participons également à des foires
internationales du livre.
Q: Certains de vos livres traduits ont-ils été réédités? Et existe-t-il des
ouvrages bilingues?
R: Non, aucun des livres que nous avons traduits n'a été réédité. Nous ne
publions pas d'ouvrages bilingues mais en revanche certaines de nos
encyclopédies le sont.
Q: Quelle est la réaction des critiques par rapport à vos livres?
R: Nous bénéficions d'un très large soutien de la part des critiques. Bien
entendu, quand vous traduisez un ouvrage de grande importance dans un
secteur clé vers l'arabe, pour faciliter le travail au lectorat arabe, votre travail
est très apprécié.
Q: Formez-vous des traducteurs, par le biais de résidences de traduction par
exemple? Remettez-vous des Prix de traduction?
R: Non, nous ne formons pas les traducteurs avec lesquels nous travaillons.
Nous sommes l'une des Fondations du Koweït qui distribuons le plus de prix, y
compris le Prix de la meilleure traduction (voir ci-dessus).
C. Le Centre Al-Babtain pour la traduction :
Ce centre appartient à la Fondation du prix Abdulaziz Saud Al-Babtain pour la créativité
poétique qui a fondé ce centre en 2004 dans le but de contribuer au soutien du mouvement
de traduction des langues étrangères vers l'arabe et vice versa.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Le centre Al-Babtain déclare encourager les maisons d'édition à traduire des œuvres
majeures, par le biais d'accords signés avec elles. Il leur fournit le soutien financier pour la
traduction et la publication d'ouvrages étrangers traduits vers l'arabe.
Le centre dit vouloir "interagir avec son époque, dialoguer avec les civilisations et s'enrichir
des connaissances dont manque le monde arabe afin de fournir à la nation arabe [oumma] les
facteurs d'une renaissance [nahda]". Dans cette optique Il considère que la traduction est
essentielle pour toutes les cultures et pour la promotion des échanges culturels.
Procédés de mise en œuvre de la politique de traduction du centre:
Le centre passe des accords avec de jeunes maisons d'éditions privées pour la traduction
de certains ouvrages, choisis en accord avec "les orientations du centre", c'est-à-dire que les
traductions d'œuvres poétiques et littéraires sont privilégiées, au détriment d'ouvrages
politiques d'actualité. Le centre déclare vouloir combler le manque qui existe, dans ce
domaine, dans le paysage éditorial arabe. Il octroie ensuite une certaine somme à la maison
d'édition qui comprend la traduction, la publication et la diffusion du texte choisi, y compris
l'achat, par la maison d'édition, des droits de l'œuvre à traduire. Les gains résultant de la
vente des ouvrages sont remis à la maison d'édition.
Le centre privilégie la traduction d'œuvres historiques, politiques, ou encore
scientifiques et technologiques (peu ou presque pas d'œuvres littéraires). Il estime que la
traduction de ces œuvres aide à combler le manque de connaissances des peuples arabes. Il
faut souligner que cette institution met en ligne, en accès gratuit, ses publications – y
compris les traductions – consultables par les internautes qui n'ont même pas besoin, pour
cela, d'ouvrir un compte ou une session. Même si nous ne disposons pas du nombre de
livres diffusés en dehors des pays du Golfe, la fondation Al-Babtain dispose de plusieurs
bureaux dans le monde arabe, dont un au Caire (qui supervise les activités de la fondation en
Egypte et au Soudan), un à Amman en Jordanie (pour l'ensemble du Machrek) et un autre à
Tunis (pour le Maghreb).
Entretien avec Elias Al-Barrage, directeur du Centre Al-Babtain pour la traduction.
Voici la transcription de l'entretien effectué:
Q: Pourquoi avoir ouvert ce centre? Pouvez-vous me présenter le projet de
traduction?
R: Nous avons créé ce centre pour donner un coup de pouce au mouvement
de traduction et combler les besoins du monde arabe. Le projet de traduction
s'est fait dans deux directions: de l'arabe vers les langues étrangères et des
langues étrangères vers l'arabe. En ce moment, nous ne traduisons toutefois
que vers l'arabe, plus précisément de l'anglais. La plupart de ces ouvrages
appartiennent au domaine des sciences humaines et sociales et jusqu'à
© Transeuropéennes, Paris - 2010
aujourd'hui, nous avons traduit vingt-quatre ouvrages de l'anglais vers l'arabe,
comme par exemple Muslims in Europe de Jorgen S. Nielsen, traduit par Walid
Chemit.
Q: Quel accès à la production intellectuelle dans les autres langues?
R: Nous suivons au fur et à mesure la parution de nouveaux ouvrages dans les
pays occidentaux, en coopération avec les maisons d'édition qui se chargent de
sélectionner les livres intéressants pour le monde arabe et que nous n'avons
pas.
Q: Qui décide des ouvrages à traduire? Et qui décide des aides à la traduction?
Sur quels critères?
R: Nous proposons, ainsi que nos partenaires parmi les maisons d'éditions, un
certain nombre d'ouvrages. Celui qui finance est celui qui a le dernier mot,
c'est-à-dire M. Abdul-Aziz al-Babtain. Les livres sélectionnés doivent enrichir le
paysage intellectuel arabe et combler un manque. L'un de ces ouvrages, édité
en partenariat avec Dar al-Saqi, est par exemple The Public Good, The Problem of
the Individual and Society in The Modern Age, de Amitai Etzioni, traduit par Nada
Assayed15.
Q: Comment traitez-vous les questions des droits d'auteur?
R: Nous nous mettons d'accord avec la maison d'édition ou avec l'auteur pour
l'achat des droits. Bien évidemment, l'achat de ces droits nous donne la
possibilité de censurer ou de supprimer les passages qui ne sont pas en
adéquation avec la culture du pays.
Q: Comment sont présentés les livres traduits? Quels sont les mécanismes de
contrôle de la qualité des traductions?
R: Nous mettons le nom de la Fondation al-Babtain ainsi que celui de la maison
d'édition partenaire sur la couverture. Les noms de l'auteur et du traducteur
figurent aussi sur cette même couverture.
En ce qui concerne les mécanismes de contrôle, les ouvrages sont révisés par la
maison d'édition partenaire. Les textes nous sont ensuite remis et nous nous
réservons le droit d'accepter la traduction, qui est jugée par notre propre
comité de révision. Celui-ci peut à son tour remettre en cause la qualité du
travail effectué.
Q: Editez-vous des ouvrages bilingues?
R: Non, pas pour l'instant. C'est toutefois une idée à développer.
Q:
Sur
quels
critères
choisissez-vous
vos
traducteurs?
R: En ce qui concerne le traducteur, nous ou la maison d'édition partenaire le
choisissons par rapport à sa réputation dans le milieu de la traduction. Quant
L'ouvrage cité par Al-Babtain ne figure pas sous ce titre dans la biographie d’Amitai Etzioni (dont l'orthographe
a par ailleurs été modifiée). Il se peut que le véritable titre du livre soit The common good (Cambridge, MA: Polity
Press, 2004).
15
© Transeuropéennes, Paris - 2010
aux jeunes traducteurs, encore peu connus dans le milieu, nous étudions
attentivement leurs curriculum vitae et nous lui demandons, en guise d'examen,
de traduire pour nous un petit manuscrit. Tous nos traducteurs actuels se
trouvent hors du Koweït.
Q: Formez-vous des traducteurs? Et comment les rémunérez-vous? Avez-vous
des Prix de traduction?
R: Nous ne nous occupons ni de la formation ni de la rémunération des
traducteurs: notre mission est de financer le projet. C'est la maison d'édition
qui s'en charge. Mis à part le financement, notre mission consiste également en
la révision des traductions (je fais moi-même partie de ce comité).
Quant aux Prix de traduction du centre, c'est un projet auquel nous
réfléchissons. Il fera partie de l'un des Prix de la Fondation.
Q: Comment vos ouvrages traduits sont-ils reçus par la critique?
R: Notre travail est très bien accueilli par le milieu de la critique. Notre but est
non lucratif: nous œuvrons en vue d'encourager les mouvements de traduction.
Q: Où peut-on trouver vos ouvrages traduits?
R: Dans toutes les librairies locales et les bibliothèques (au Koweït). Avec les
maisons d'édition partenaires, nous participons à des foires internationales du
livre.
Q: Rééditez-vous des ouvrages?
R: Non, cela ne nous est pas encore arrivé.
D. Le Centre de Recherches et d'Etudes koweitien :
Le centre a été créé par décret princier en 1992. Ses missions sont les suivantes :
Mener des études relatives à l'histoire de l'Etat du Koweït et à sa situation politique,
économique, sociale et patrimoniale ainsi que ses relations avec les Etats voisins. Publier ces
études aussi bien au niveau local qu'à l'extérieur du pays.
-
Fonder une bibliothèque spécialisée et qui abriterait les documents relatifs à l'Etat du
Koweït, en différentes langues.
-
Collecter les documents et études relatifs à l'invasion du Koweït par l'Iraq.
-
Mettre en place une veille pour recueillir tous documents publiés sur le Koweït.
Faire connaître l'Etat du Koweït – localement et internationalement – notamment
par la publication d'une revue spécialisée et par l'organisation de conférences,
expositions, et d'autres activités médiatiques.
Dans le cas de ce centre, la traduction se limite donc à des domaines spécialisés, tous
relatifs au Koweït. Nous avons pu interviewer Abdallah Youssef Al-Ghunaim, président du
Centre. Voici la transcription de notre entretien:
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Q: Quelle est la mission de votre institution ?
R: Après la libération du Koweït, nous avons eu besoin de faire connaître la
vérité dans le monde. L'ouvrage Kuwait Statehood and Boundaries16 a été traduit
en dix langues (anglais, français, russe, chinois et d'autres langues). Nous l'avons
traduit grâce à l'aide de l'ambassade de l'Etat du Koweït dans les différents pays
concernés.
Q: Comment choisissez-vous vos traducteurs et comment évaluez-vous le
travail de traduction?
R: Concernant le choix des traducteurs, nous nous mettons d'accord avec les
maisons d'éditions avec qui nous travaillons. Pour être sûrs, nous demandons
un CV du traducteur et nous vérifions la connaissance et l'expérience du
traducteur dans le domaine sur lequel nous travaillons. Une fois les ouvrages
traduits, s'ils sont traduits à l'extérieur du pays, l'ambassade se charge de les
faire réviser par un comité spécialisé et si les ouvrages sont traduits au Koweït
nous faisons faire le travail de révision par un autre comité. Il arrive que
l'auteur participe à la traduction de son ouvrage, cela montre que les auteurs
sont soucieux du travail de traduction. Cela a par exemple été le cas de
l'ouvrage The Origins of Kuwait17 de B.J. SLOT.
Q: Comment choisissez-vous les livres à traduire? Selon quels critères?
R: Nous choisissons un livre en fonction de son importance académique et
politique, pour répondre aux allégations irakiennes. Bien évidemment, ces
ouvrages sont objectifs. Ainsi, nous avons par exemple jugé utile de faire
traduire en plusieurs langues un ouvrage intitulé Les débouchés maritimes de
l'Irak [traduction personnelle]. C'est un ouvrage éminemment politique. Nous
avons un comité qui se réunit pour choisir les ouvrages à traduire. La première
étape consiste, pour les livres dont la langue originale est l'arabe, d'effectuer la
traduction vers l'anglais. Nous traduisons ensuite vers les autres langues.
Q: Qui octroie les aides à la traduction?
R: Nous finançons nous-mêmes les traductions. Nous nous mettons d'accord
avec les maisons d'édition pour le choix des traducteurs.
Q: Quelle est votre position par rapport aux droits d'auteur?
R: En ce qui concerne les ouvrages de langue arabe, nous contactons les
auteurs ou la maison d'édition pour obtenir l'accord. En ce qui concerne les
ouvrages étrangers, c'est l'ambassade du Koweït qui s'en occupe.
Q: Où peut-on trouver vos ouvrages?
R: Nous avons une bibliothèque importante, où vous pouvez les trouver. Vous
pouvez également les trouver dans les bibliothèques de toutes les ambassades
16
17
Le titre original est Al-koweit woujoudan wa houdoudan, édité par le Centre.
Le titre traduit est Nashaat alKoweit [en arabe] et L'origine du Koweït en français.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
du Koweït. Par ailleurs, nous participons à des foires internationales.
Evidemment, le prix que nous demandons est purement symbolique: notre but
n'est pas lucratif. Si vous venez dans nos établissements, nous vous offrons ces
livres à titre gracieux.
Q: Certains de vos ouvrages ont-ils été réédités?
R: Oui, certains de nos ouvrages l'ont été18. Cela dépend de la demande.
Franck Mermier souligne la vitalité du secteur public koweitien en matière de diffusion du
livre mais explique qu'en revanche, l'édition privée koweitienne est, elle bien plus modeste –
les maisons d'édition Souad Al-Sabah et Dâr Qurtâs font partie des rares acteurs du paysage
éditorial privé koweitien19.
3. Les Emirats Arabes Unis :
Aux Emirats Arabes unis, il existe deux principaux programmes de traduction. Le
premier est le programme "Kalima" qui est dirigé par le Conseil d'Abu Dhabi pour la
Culture et le Patrimoine et qui se situe à Abu Dhabi, la capitale des Emirats Arabes Unis. Le
deuxième est le programme "Tarjem" qui est mis en place par la Fondation de Mohammed
bin Rashid Al Maktoum à Dubaï. Ce dernier programme vient d'être suspendu –
officiellement pour des raisons d'organisation et de révision de sa stratégie"20.
A. Le Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine :
Le Conseil d'Abu Dhabi est fondé en octobre 2005, il est l'une des organisations les plus
importantes du gouvernement d'Abu Dhabi. Sa mission consiste à protéger la culture et le
patrimoine de la ville. Ce Conseil est présidé par le Cheikh Sultan Al Nahyan et il obéit à
une stratégie mise en place par un comité d'experts de l'Unesco, en partenariat avec des
experts locaux. Il prône la protection du patrimoine des Emirats, le dialogue des cultures et
a l'ambition de devenir une organisation pionnière non seulement dans la région, mais
également au niveau international. Voici les projets mis en place par le Conseil d'Abu Dhabi
pour la Culture et le Patrimoine :
o
Le prix du Cheikh Zayed pour le livre (www.zayedaward.com) :
Ce prix est délivré à des intellectuels du monde arabe, dans les domaines des arts et des
sciences humaines. Il consacre des chercheurs qui contribuent aux domaines de l'édition, de
Les ouvrages réédités par le Centre de Recherches et d'Etudes koweitien figurent dans le tableau Excel qui
accompagne la présente étude.
19Franck Mermier, Le Livre et la Ville, Beyrouth et l'édition arabe, Actes Sud, Arles, 2005, p. 113-114.
20
D'après le site Internet de la Fondation Mohammad Bin Rashid Al Maktoum:
http://www.mbrfoundation.ae/English/Culture/Pages/Turjuman.aspx, consulté le 05 octobre 2010.
18
© Transeuropéennes, Paris - 2010
l'écriture et de la traduction et encourage la traduction "d'œuvres majeures vers la langue
arabe". Le prix accorde également une importance particulière à la littérature de jeunesse.
Le prix de traduction de l'édition 2008 a été remis au jordanien Fayez Al-Suyyagh pour sa
traduction de Sociology d'Anthony Giddens.
o
Le salon international de livre d'Abu Dhabi (www.adbookfair.com) :
Ce salon est financé par l'émirat d'Abu Dhabi. La première manifestation de ce type a eu
lieu en 1990. Le salon du livre de 2008 a été organisé par un comité conjoint composé
d'experts issus du Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine et de spécialistes de
la Foire du livre de Francfort. Ce groupement est connu sous le nom d'une société, "Kitab"
[livre]. Outre l'organisation du salon du livre d'Abu Dhabi, il œuvre à faire de cet évènement
le "point de rencontre des éditeurs de l'Orient et de l'Occident afin qu'ils échangent leurs
points de vue et réfléchissent à des possibilités de travail commun". Le but déclaré de
"Kitab" est de faire d'Abou Dhabi "un centre d'édition pour le monde arabe". En mars 2010,
"Kitab" a organisé le 7e congrès international pour les droits de l'édition21 et a accordé une
attention particulière à la question de la piraterie au sein du marché du livre dans le monde
arabe.
o
Le programme Kalima (www.kalima.ae) :
Le Conseil d'Abu Dhabi a lancé le projet non lucratif Kalima pour financer la traduction,
l'édition et la diffusion d'œuvres classiques et contemporaines, à partir de langues étrangères
vers l'arabe. Le programme Kalima réunit donc auteurs, traducteurs, éditeurs et diffuseurs.
Chaque année, 100 titres sont choisis pour être traduits dans le cadre de ce programme.
Kalima concentre principalement ses activités sur les domaines suivants :
-
Le financement de la traduction vers l'arabe d'un certain nombre de titres, leur
édition et leur publication. La coopération avec des maisons d'édition connues
dans le monde arabe.
-
Renforcer et soutenir les circuits de distribution du livre.
-
Soutenir l'industrie du livre dans le monde arabe et essayer de grouper les
efforts dans ce sens.
-
Investir dans le secteur de la traduction en encourageant la formation de
traducteurs.
Plus d'information sur ce congrès sur le site du Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine [page
disponible en arabe]: http://www.adach.ae/ar/news/conference.ended.aspx, consulté le 05 octobre 2010.
21
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Sur cette base, Kalima se charge de:
- Sélectionner les titres à traduire (voir ci-dessous) ;
- Financer les maisons d'édition arabes qui font traduire, impriment et diffusent le
livre traduit ;
- Soutenir les initiatives de distribution et de diffusion de livre ;
- Faire appel à des traducteurs pour les projets futurs, les former dans le cadre de
formations universitaires ;
- Soutenir la distribution du livre en langue arabe dans le monde arabe.
Modalités de choix des titres à traduire:
-
Etablir une liste des ouvrages connus – et reconnus – dans tel ou tel domaine,
d'ouvrages ayant reçu des prix ou d'ouvrages ayant été très largement vendus.
-
Comparer les manques en matière de traduction avec cette liste.
-
Classer
les
ouvrages
"candidats"
en
catégories:
œuvres
classiques/modernes/contemporaines, Lettres, Sciences, etc.
-
Trier et sélectionner les ouvrages à traduire.
A savoir: Kalima repose, selon les déclarations de ses représentants, sur "le manque
de traductions de qualité constaté sur la scène intellectuelle arabe". Il fait référence à "l'âge
d'or" du monde arabe, durant lequel, en parallèle aux siècles "sombres" [de l'ignorance] de
l'Europe, les "intellectuels et les bibliothèques arabes" étaient "pionniers dans la traduction,
l'édition et la protection des trésors des sciences, de la médecine, de la philosophie et de la
littérature" et où les traducteurs étaient très respectés. L'ambition déclarée de Kalima est de
faire renaître cet "âge d'or de la traduction"22.
Où trouver les livres traduits dans le cadre du projet Kalima?
Les livres diffusés dans le cadre du projet Kalima sont principalement vendus dans les
librairies des différents émirats ainsi que dans les pays du Golfe.
22
D'après le site du programme Kalima : www.kalima.ae, consulté le 05 octobre 2010.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
A titre indicatif, voici le tableau des langues d'origine de la première livraison de traductions
du projet Kalima, pour un total de 100 livres :
Langues d'origine
Nombre de livres
Langues d'origine
traduits
Nombre de livres
traduits
Anglais
52
Japonais
2
Grec ancien
4
Danois
1
Anglais ancien
3
Yiddish
1
Allemand
9
Russe
1
Français
10
Suédois
1
Latin
7
Norvégien
1
Italien
2
Grec
3
Chinois
2
Polonais
1
Source: www.kalima.ae
Nous constatons donc que plus de 50% des ouvrages traduits le sont à partir de
l'anglais, alors même que ce n'est pas la langue originale de l'ouvrage (la sélection 2007
recense par exemple un ouvrage de Camus, à traduire vers l'arabe à partir de la version
anglaise (The First Man) de son livre Le Premier homme23.
D'autres
exemples
du
même
type
sur
le
site
du
http://www.kalima.ae/new/candidatetitles_ar_32.php, consulté le 05 octobre 2010.
23
© Transeuropéennes, Paris - 2010
programme
Kalima:
Kalima a achevé de traduire 48 ouvrages sur les 100 sélectionnés en 2007. Voici la
répartition détaillée de ces traductions par domaines:
Arts
30
Histoire et
géographie
Droit
25
20
Littérature
15
Sc. Naturelles et
appliquées
Psychologie et
philosophie
Religion
10
5
0
Selon Ali bin Timim, directeur du programme Kalima, dans une interview donnée le
21 mai 2010 au journal Alquds Al'arabiyya [interviewé par Fatima Atfa] : "notre choix
d'ouvrage dépend de plusieurs critères, premièrement nous remarquons les ouvrages qui
ont été sélectionnés pour l'obtention de prix prestigieux: le Nobel ou le Booker par
exemple. Nous pouvons citer l'ouvrage de Herta Müller la lauréate du prix Nobel de
littérature en 2009 avec son ouvrage qui s'intitule Atemschaukel [La bascule du souffle en
français], nous avons choisi et traduit cet ouvrage avant même qu'il ne gagne le prix, et cela
montre l'efficacité de notre travail pour le choix des ouvrages." Un entretien accordé par
Moustafa Al-Slaiman à la revue Qantara le 16 avril 201024 montre que les choix des ouvrages
à traduire ne se font pas par hasard. Al-Slaiman, responsable de la section de traduction
allemande du projet Kalima est également enseignant en interprétariat du programme de
traduction Germersheim à l'Université allemande Mainz, s'est notamment fait conseiller,
pour le choix du livre de Herta Müller, par Michael Maar, membre de l'Académie allemande
de langue et de littérature, équivalent allemand de l'Académie française, par Klaus Reichbert,
président de l'académie ainsi que d'autres noms prestigieux du milieu littéraire et
académique allemand. Al-Slaiman confie également que la traduction des classiques n'est pas
une priorité et qu'une attention particulière est accordée aux jeunes écrivains, jusque là
négligés. Concernant la question de la censure, il affirme que le choix de supprimer certains
Article disponible sur le lien suivant: www.qantara.de/webcom/show_article.php/_c-310/_nr-747/i.html,
consulté le 24 octobre 2010.
24
© Transeuropéennes, Paris - 2010
passages – critiques vis-à-vis de la religion ou qui abordent des sujets considérés "sensibles"
dans le monde arabe tels que l'homosexualité – est discuté avec l'auteur et/ou l'éditeur, mais
que, souvent, le texte n'est pas modifié, même s'il n'est pas compatible avec la culture du
pays dans lequel il va être diffusé.
Selon bin Timim, une attention particulière est accordée à la collaboration et au
partenariat avec différentes maisons d'édition et centres culturels dans le monde entier:
"nous avons des accords avec l'université Johannes Gutenberg en Allemagne, mais également
avec le centre culturel indo-arabe de New Delhi, ainsi que l'Institut oriental de Rome et
différentes maisons d'édition néerlandaises et suisses. Nous sommes actuellement en train
de nous tourner vers d'autres pays comme la France et la Corée".
Toujours selon Ali bin Timim, "le projet Kalima vise à soutenir les traducteurs
arabes, qui ont la possibilité de proposer eux-mêmes des ouvrages à traduire. De plus, les
éditeurs arabes ont aussi leur place dans le projet puisqu'une initiative leur est consacrée :
"Jossur" [ponts], qui vise à tisser des relations entre eux et les maisons d'édition mondiales.
Dans le cadre de "Jossur", chaque livre traduit vers l'arabe perçoit la somme de 2200 euros
pour l'impression de 5000 exemplaires". Ce programme est exclusivement réservé aux
maisons d'édition.
En réponse à une question portant sur le choix des traducteurs, Ali bin Timim
répond: "Nous n'avons pas de liste officielle des traducteurs sur laquelle se baser. Plusieurs
institutions ont leurs propres listes, qu'elles refusent de nous communiquer. Nous
choisissons nos traducteurs selon plusieurs critères et tous, sans exception, doivent passer
un examen avant d'être habilités à traduire pour nous. Il existe dans le monde arabe des
centaines de traducteurs qui n'ont pas eu la chance de traduire des ouvrages ; nous leur
donnons cette chance. Nous avons par ailleurs contacté des traducteurs connus dans le
monde arabe et nous leur avons demandé de former un groupe de traducteurs. C'est nous
qui finançons ces formations. Une fois le traducteur sélectionné, nous lui envoyons des
passages de l'ouvrage sur lequel nous voulons qu'il travaille. Ce travail est révisé par un
comité qui accepte ou refuse de donner à traduire l'intégralité de l'ouvrage au traducteur".
Plus loin, Ali bin Timim insiste sur l'apport de la traduction: ''lorsque nous parlons de
traduction, nous parlons également d'opposition et d'acceptation de l'autre malgré ses
différences. Le respect de l'autre ne vient pas seulement du partage de valeurs communes,
mais également des différences […]".

Autres institutions établies à Abu Dhabi :
© Transeuropéennes, Paris - 2010
i. La Fondation pour la culture (Al-Mujamma' al-thaqâfi) met en ligne sur le site
www.alwaraq.net des milliers d'œuvres sur les patrimoines arabe et islamique. Une
parite de son travail est également consacré à la traduction et l'édition.
ii. The Emirates Center for Strategic Studies and Research, fondé en 1994.
Ces deux institutions culturelles publient des auteurs arabes et étrangers et occupent
une place importante dans le paysage éditorial des Emirats.
B. La Fondation de Mohammed Bin Al Maktoum (Dubaï) :
1. Le programme Tarjem :
Le Programme Tarjem qui veut dire en français « traduis » à l'impératif, est un projet
financé par la Fondation de Mohammed Bin Al Maktoum, vice-président des Emirats arabes
unis, Premier ministre et dirigeant de Dubaï. Le programme Tarjem cherche à développer les
processus de traduction dans le monde arabe en traduisant des œuvres étrangères vers
l'arabe et inversement. Le programme cherche aussi à enrichir la bibliothèque arabe en
traduisant les grandes œuvres mondiales dans les différents domaines.
Le programme se concentre sur des ouvrages qui contribuent au développement
économique du monde arabe. Par conséquent, les livres de gestion et d'administration
viennent en première position.
La Fondation reçoit des demandes des maisons d'édition à travers son site web. La
demande doit inclure une liste de livres à traduire proposés par une maison d'édition. Les
renseignements suivants doivent être renseignés avec la demande:

Un résumé du livre.
 La biographie de l’auteur (pays d'origine, parcours (prix, certificats d'appréciation),
etc..

Information sur les droits de traduction et de la maison d'édition originale.

Une brève notice sur l'évaluation de la maison d'édition de la valeur du livre et de
ce qu'il apportera au monde arabe.
 Une proposition de prix pour la vente du livre.
Les demandes en ligne sont examinées, triées et examinées par une commission. Une fois la
liste de livres approuvée, la Fondation signe un contrat avec la maison d'édition, en
s'engageant à acheter 1500 exemplaires de chaque titre traduit. La maison d'édition s'engage
à obtenir toutes les approbations nécessaires auprès des auteurs et éditeurs d'origine. En
outre, la maison d'édition doit signer un accord avec le traducteur, spécifiant la date de
© Transeuropéennes, Paris - 2010
remise de l'ouvrage. Ensuite, le script est examiné par le « comité de qualité » de la
Fondation. S’il est approuvé, le script est renvoyé à la maison d'édition. En vertu du contrattype de la Fondation, les auteurs perçoivent 10% des recettes résultant des ventes totales de
livres de la maison d'édition, y compris les 1500 exemplaires achetés par la Fondation.

La sélection des œuvres à traduire :
La Fondation accorde une attention particulière à la "traduction des principaux apports
culturels publiés dans les autres pays arabes". La Fondation travaille également à "développer
le niveau de transfert de connaissances en provenance de pays produisant des connaissances,
en particulier en Amérique du Nord, les pays scandinaves et en Asie"25. Un réseau
intellectuel arabe, des universitaires et des experts dans différents domaines sont en charge
du processus de sélection et de développement de la stratégie de traduction.

Les règles de la coopération entre la Fondation et les maisons d'édition :
La Fondation a prévu une série de critères et de conditions, fixant ses relations avec les
maisons d'édition:
 La Fondation ne travaille pas directement avec le traducteur ; il faut que ce dernier
passe par une maison d’édition.

Les maisons d'édition désirant s'associer à la Fondation doivent être certifiées et
enregistrés dans leur pays d'origine.
 Les maisons d'édition doit avoir déjà traduit et publié au moins 10 livres.
 Les livres proposés par chaque maison d'édition ne doivent pas être plus de 20.
2. Le programme Tarjaman
Le Programme Tarjaman veut dire en français « traducteur ». Lui aussi a été –
temporairement – arrêté en 2010. Le programme vise à "élever la qualité de la traduction
dans le monde arabe, en fournissant aux traducteurs la possibilité de se former ou d'obtenir
une qualification supérieure, afin de produire des œuvres quantitatives et qualitatives
correspondant aux attentes les plus élevées".

Les objectifs du programme :
Le programme vise à promouvoir la traduction dans le monde arabe par :
 L'augmentation du nombre de traducteurs hautement qualifiés et expérimentés.
 L'amélioration de la qualité des ouvrages traduits de et vers l'arabe.
25
www.mbrfoundation.ae/ : Consulter le 05 octobre 2010
© Transeuropéennes, Paris - 2010
 La formation des traducteurs pour l'utilisation du système de "Computer Aid
Translation (CAT)".
Par le biais de Tarjaman, la Fondation offre des cours de formation dans les domaines de
la gestion et des affaires. La Fondation offre aux candidats qualifiés la possibilité d'assister à
une session de formation de six semaines et les initie aux outils de CAT. La Fondation
couvre tous les frais de scolarité de la session, et ceux qui passent la session obtiennent le
certificat de traducteur agréé. Pour avoir cette formation il faut remplir certaines
conditions :
 Le candidat doit être titulaire d'un baccalauréat ou un diplôme équivalent.
 Le candidat doit avoir un minimum de deux ans d'expérience dans la traduction.
 Le candidat doit être citoyen de l'un des 22 pays de la Ligue des États arabes. Ces
Etats sont l'Algérie, le Bahreïn, les îles Comores, Djibouti, l'Egypte, l'Irak, la Jordanie,
le Koweït, le Liban, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, Oman, la Palestine, le Qatar,
l'Arabie Saoudite, la Somalie, le Soudan, la Syrie, la Tunisie, les Émirats Arabes Unis
et le Yémen.
Une fois les demandes approuvées, les candidats doivent s'inscrire à la session de
formation en s'engageant à assister à au moins 70% des conférences et à réussir les examens.
Par ailleurs, la Fondation offre aux traducteurs arabes la possibilité d'obtenir un Master
en traduction délivré par des universités arabes. Pour se qualifier, les candidats doivent
répondre aux critères suivants :
 Titulaire d'un baccalauréat ou un diplôme équivalent.
 Avoir un minimum de deux ans d'expérience dans la traduction.
 Etre citoyen de l'un des 22 pays de la Ligue des États arabes.
C. Département de la Culture et de l'Information (Sharjah):
Le gouvernement de Sharjah et son département de la Culture et de l'Information
organisent chaque année la remise de différents prix. Deux prix nous intéressent plus
particulièrement: le premier est le prix de Sharjah – Unesco pour la culutre arabe; le second
est le prix du salon international du livre de Sharjah.
o
Le prix de Sharjah - Unesco pour la culture arabe26:
Même s'il ne s'agit pas à proprement parler d'un prix récompensant la traduction, le prix
Sharjah - Unesco contribue toutefois à promouvoir la circulation de savoirs et le dialogue
Voici
le
lien
du
site
Web
du
prix:
http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.phpURL_ID=35086&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html, consulté le 10 octobre 2010.
26
© Transeuropéennes, Paris - 2010
entre le monde arabe et le reste du monde. Dans cette optique, il récompense également
des traducteurs tels, en 2008, Gaber Asfour, directeur du Centre National de Traduction
égyptien ou encore, en 2009, Anna Parzymies, éditrice et universitaire polonaise spécialisée
dans la culture arabe.
o
Le prix du salon international du livre de Sharjah27:
Dans le cadre du salon de livre de Sharjah, plusieurs prix sont distribués, dont l'un
récompense "le meilleur livre émirati traduit". Les conditions d'attribution sont les suivantes
:
- Les œuvres proposés doit être originales et doivent aborder des sujets inédits.
- Les ouvrages proposés doivent être traduits vers l'arabe ou vers d'autres langues.
- L'ouvrage doit avoir été publié depuis moins de 3 ans.
- Il ne doit pas avoir été déjà primé.
- Les droits d'auteurs doivent avoir été obtenus.
4. Le Sultanat d’Oman :
Nous avons pu contacter par mail Ahmad Al Mueini, président du centre de
traduction du Cercle culturel omani (voir ci-dessous). Il a accepté de nous fournir les
extraits d'une étude qu'il a lui-même rédigée – en arabe – sur l'état de la traduction au
Bahreïn28. De l'aveu même des spécialistes omanis, il n'existe pas de statistiques exactes
relatives à la situation de traduction dans le sultanat d'Oman29, ce qui rend difficile le travail
de recherche. Ajoutons à cela que les personnes contactées dans le cadre de cette étude
(voir liste infra) n'ont répondu à aucune de nos sollicitations.
Al Mueini distingue deux périodes importantes pour l'étude de l'état des
mouvements de traduction au sein du sultanat d'Oman:
-
La première s'étend de 1970 à 2002: l'essentiel de la traduction est le résultat
d'initiatives privées et d'efforts gouvernementaux dispersés. La plupart des
traductions concernaient l'histoire, la géographie, l'état de l'agriculture, de la
culture et du patrimoine omanis. C'est ainsi que le Ministère du Patrimoine et de
la Culture publie, dans les années 1980 et 1990, un grand nombre de traductions
d'ouvrages écrits par des chercheurs ou des explorateurs occidentaux, qui se
sont intéressés à Oman. Quant aux initiatives privées, elles aussi s'intéressent en
très grande majorité à ce qui est écrit sur Oman. Il y a cependant une exception:
la traduction, en 1998, par Abdullah Habib, de l'ouvrage de Robert Bresson,
Voici le lien du site Web de l'ensemble des prix remis à l'occasion de la tenue du salon du livre international de
Sharjah: http://www.sdci.gov.ae/awards6.html, consulté le 10 octobre 2010.
28 L'étude d’Ahmad Al Mueini (2010) est soumise au droit d'auteur et ne peut être publiée sans l'autorisation de
son auteur. Elle est jointe, en annexe, à la présente étude.
29 Abdullah Al-Hourasi, http://harrasi.blogspot.com/2008/07/blog-post_15.html, consulté le 10 octobre 2010.
27
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Notes sur le Cinématographe. A part cela, quelques revues omanies publiaient, de
temps à autres, des extraits d'ouvrages littéraires et culturels.
-
La seconde a commencé à partir de 2002. En effet, à partir de cette date, selon
Al Mueini, la traduction "s'institutionnalise": en 2002, un "club de la traduction"
est créé à l'université du Sultan Qaboos et la traduction d'ouvrages relatifs au
Sultanat d'Oman se poursuit. En 2003, un ouvrage traduit par Abdullah Al Kindi,
Nouveaux médias, nouvelle politique30 est publié. C'est à cette période que les
traductions littéraires augmentent: en 2004, une anthologie poétique de la
poétesse Nasrah Al Adawi est traduite de l'arabe vers l'anglais par le "club de la
traduction" et en 2005 une traduction anglaise de la nouvelle Le goût de la
patience31, signée Saleh Al Khemyassi, est publiée. Un effort est donc déployé
pour traduire des auteurs du Sultanat vers l'anglais.

Les principales organisations:
A l'heure actuelle, les principales institutions qui se préoccupent de la question de la
traduction sur la scène culturelle omanie sont les suivantes:
A. Le club de la traduction:
La création de ce groupe a été à l'origine d'une initiative lancée par des étudiants du
département d'anglais de la faculté des Lettres et des Sciences Sociales de l'université
Qaboos. Né en 2002, ce groupe s'intéresse aux pratiques estudiantines de la traduction. Le
club de la traduction organise des formations du soir en traduction générale et en traduction
littéraire, organisées par des membres du club, soutenus par des professeurs du
département de langue et de littérature anglaises. Des conférences sont également
organisées, au cours desquelles les membres du club interviennent au sujet de leur
expérience dans le domaine de la traduction, des problèmes auxquels ils sont confrontés et
des procédés mis en œuvre en vue de les contourner. Le club organise par ailleurs, une fois
par an, un évènement intitulé "la semaine de la traduction" au cours de laquelle des
conférences sont données et des films, traduits par le club, projetés. Le club de la traduction
a également lancé, en 2005, un forum en ligne sur la traduction32. Autre initiative importante:
le club a mis sur pied différents projets visant à encourager ses membres à pratiquer la
traduction, tels: "le projet de la littérature chinoise", "le projet de la littérature indienne", "le
projet de la littérature africaine", "le projet de la littérature de jeunesse", "le projet de la
Le titre et la langue originaux de cet ouvrage ne sont pas fournis par Al Mueini.
En arabe dans le texte: Mazaq al sabr. D'autres traductions citées par Al Mueini (de et vers l'arabe sont
recensées dans le tableau Excel joint à la présente étude.
32 A la date de notre dernière consultation du site (www.transqu.net/vb), nous avons découvert que celui-ci
n'était plus opérationnel.
30
31
© Transeuropéennes, Paris - 2010
littérature imaginaire scientifique" et "le projet de la littérature populaire omanie". Le club a
réussi à se faire connaître hors du cercle universitaire en publiant des articles dans des
revues omanies et arabes.
B. Autres groupes universitaires:
Après le club de la traduction, d'autres groupes estudiantins ont vu le jour, tels "le
groupe de la traduction" de l'université des Sciences Appliquées en 2007, "le groupe de
langue anglaise et de traduction" de l'université Sohar en 2008, "le groupe de traduction" de
l'université Nizwa, également en 2008. Ces groupements universitaires organisent des
séminaires autour de la traduction et ont pour objectif d'encourager les étudiants à
pratiquer la traduction. Ainsi, le groupe appartenant à l'université Nizwa organise lui aussi
une "semaine de la traduction" au cours duquel un film étranger est projeté et traduit par le
groupe.
C. Le centre de traduction, dépendant du Cercle culturel omani:
Le centre de traduction du cercle cultuel omani a été créé le 12 avril 2008 et ses
activités ont cessé en 200933. Il avait pour objectifs d'encourager la "traduction culturelle" et
l'un de ses projets était d'établir une base de données à destination des traducteurs omanis,
recensant les textes traduits ainsi que les textes à traduire. Le centre projetait également
l'organisation d'un concours annuel de traduction.

Les revues:
a) Les revues généralistes:
Voilà pour ce qui est des principales institutions omanies qui s'occupent de la traduction.
Il nous faut cependant signaler que certaines revues publient des extraits de traductions
littéraires, tels:

Le supplément "Chouroufat" du journal Oman.

La revue trimestrielle Nizwa (www.nizwa.com). L'un des textes traduits dans
le numéro 61 (janvier 2010) est celui de Maurice Maeterlinck, Le Miracle de
Saint-Antoine.

Le journal Al Zaman, qui consacre 2 pages, tous les mercredis, à la
publication de traductions littéraires.

La revue trimestrielle Al Thaqafiyyah, publiée par le centre du Sultan Qaboos
pour la culture islamique.

33
Le supplément hebdomadaire "Afaq" du journal Al Chabibah.
Officiellement, pour des "raisons administratives et de gestion".
© Transeuropéennes, Paris - 2010

Le supplément hebdomadaire "Achria" du journal Al Watan.
Toutes les revues n'étant pas en ligne ou ne publiant pas sur Internet l'intégralité de leurs
articles, nous ne donnons, pour chacune d'entre elles, des exemples de publications que
lorsque nous en avons trouvé.
b) Les revues spécialisées:
Aux côtés de ces revues, plutôt générales, nous devons également signaler la publication
de trois revues spécialisées sur la traduction:

Le supplément "Al Jissr" [Le pont]. Le club de traduction de l'université Qaboos a
lancé, en septembre 2007, "Al Jissr". Cette publication est préparée par les
étudiants, membres du club, sous la direction d'un académicien spécialiste de la
traduction. "Al Jissr" était publié par le journal "Oman", dans le suplément
"Chouroufat". Il était spécialisé dans la traduction et publiait des traductions
littéraires, des entretiens avec des traducteurs ainsi que des articles sur la
traduction. "Al Jisr" a cessé de paraître en novembre 2008 puis a revu le jour moins
d'un an plus tard, en juillet 2009. Publié cette fois dans la revue "Al Chabibah", il est
l'objet d'un partenariat entre le club de la traduction et le centre de traduction du
cercle culturel omani. Moins orienté vers le milieu universitaire, il cherche cette fois
à attirer davantage les académiciens et les traducteurs confirmés. Il publie cette fois
davantage de traductions scientifiques et techniques que de traductions littéraires.

Le supplément "Beacon". Créé en novembre 2008, il paraît en anglais et il est
spécialisé dans la traduction de la littérature omanie vers l'anglais. Il est édité une
fois par mois par l'association omanie du livre et par le journal "Times of Oman".
"Beacon" a pour objectif de faire connaître la littérature omanie auprès des
étrangers vivant dans le sultanat.

Le supplément "Qiraat" [Lectures]. A partir de juillet 2008, il est publié, une fois par
semaine, dans le journal "Oman". A partir de mai 2010, il est intégré au supplément
"Chouroufat". Préparé par le traducteur Ahmad Chafii, le supplément publie des
traductions de textes littéraires et d'ouvrages étrangers.
c) Autres diffusions:
Par ailleurs, le traducteur Ahmad Chafii que nous citons ci-dessus a organisé, en
partenariat avec la radio omanaise, deux émissions consacrées à la traduction. La première
est "Voix d'ailleurs" [Aswat min hounak], qui a commencé en 2006 et dont le thème tourne
autour d'un poème du monde. La seconde est "Autres écritures" [Kitabat oukhra], qui a
© Transeuropéennes, Paris - 2010
commencé en 2008 et qui s'est arrêté la même année. Elle tournait autour de la traduction
d'articles, de textes et de débats internationaux.
Le chercheur français Franck Mermier souligne que le nombre très limité d'éditeurs privés
omanis empâche les auteurs modernistes du Sultanat de publier leurs écrits. L'un d'entre eux
est Roya Publishing, maison d'édition fondée en 1994 par Hâtim Al-Tayya34
d) Prix et concours:
Jusqu'à récemment, le sultanat d'Oman ne comptait pas de prix pour la traduction. Voici
ceux qui existent à l'heure actuelle:
-
Le premier prix omani récompensant la traduction a été créé en 2005 par
l'université du Sultan Qaboos. Il est réservé au milieu estudiantin et récompense
les traductions littéraires.
-
Le forum littéraire d'Oman a également mis en place un concours et la remise
d'un prix annuel récompensant les traductions littéraires.
-
Le prix le plus important était celui du centre de traduction du cercle culturel
omani, qui avait pour objectif d'encourager la traduction d'ouvrages à partir de
l'anglais, du français et de l'espagnol vers l'arabe. Ce prix a cessé en même temps
que le centre de traduction.
-
D'autres prix, non officiels, existent. Ils récompensent principalement des
étudiants et l'un d'entre eux, le "concours de traduction mensuel" était organisé
par le forum du club de traduction. Le comité du concours choisissait trois
textes que les candidats – issus de tout le monde arabe – traduisaient. Un
comité composé de cinq traducteurs jugeait ensuite la traduction. Ce prix a duré
de janvier 2007 à février 2008. Le deuxième prix non officiel est celui organisé
depuis 2008 par la faculté des Sciences Appliquées de l'université de Sohar. Les
modalités de jugement sont les mêmes mais le concours est exclusivement
réservé aux étudiants faisant partie de la faculté.
e) La formation des traducteurs omanis:
Jusqu'en 1998, il n'existait aucune formation de traduction, à l'exception des
départements de langue anglaise au sein des facultés et des universités qui posaient quelques
fois les problématiques relatives à la traduction.
En 1998, l'institut "Polyglotte" a mis en place des cycles longs de formation à la
traduction. Ce n'est qu'en 2003 que le premier programme universitaire consacré à la
traduction a vu le jour dans le sultanat d'Oman: il s'agit d'une licence de traduction arabe34
Franck Mermier, Le Livre et la Ville, Beyrouth et l'édition arabe, Actes Sud, Arles, 2005, p. 112.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
anglais à l'université Qaboos. En 2004, l'université omanaise Dhofar a également mis en place
une licence de traduction arabe-anglais, suivie, en 2005, par l'université Sohar. Toujours en
2005, l'université Nizwa a mis en place une licence de langue et de traduction anglaises, une
licence de langue et de traduction françaises ainsi qu'une licence de langue et de traduction
allemandes. Un diplôme de Master en traduction a vu le jour à l'université Qaboos en 2006
et la faculté "Al Buraimi" a créé une licence de langue et traduction anglaises en 2010.
f) Manifestations organisées autour de la traduction:
Selon Al Mueini, l'augmentation des conférences autour de la traduction dans le sultanat
d'Oman montre l'intérêt croissant du pays pour la traduction, même si le nombre de
traducteurs omanis est encore très peu élevé:
-
La conférence annuelle du club de traduction, organisée par le club de
traduction de l'université Qaboos dans le cadre de la "semaine de la traduction"
mentionnée ci-dessus.
-
La conférence du dialogue entre les cultures et les civilisations, organisée à
l'université Nizwa en 2006 a accordé une importante particulière à la question
de la traduction.
-
Le sultanat d'Oman a accueilli en décembre 2009 le troisième congrès arabe
pour la traduction, organisé par l'Organisation Arabe de la Traduction (OAT).
g) Le statut du traducteur:
Jusqu'en 2003, aucun texte de loi ne régissait la profession de traducteur. Tout citoyen
omani avait la possibilité d'obtenir une licence pour effectuer des travaux de traduction.
L'arrêté 18/2003 du sultanat a ordonné la mise en place d'un texte de loi régissant les
sociétés de traduction légale selon des critères qualitatifs et en vue de "préserver" la
profession de traducteur. Aucune distinction n'est faite entre la traduction légale et la
traduction littéraire. L'une des conditions de ce texte de loi est que le traducteur doit avoir
au moins 5 ans d'expérience (les diplômés de traduction ne sont pas concernés par cette
condition). Le texte de loi prévoit une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois
ans ainsi qu'une amende de 2.000 riyals omanis [environ 3.700 euros] pour ceux qui
enfreindraient la loi. Il existe à ce jour deux types de permis pour travailler dans le secteur
de la traduction:
-
Les bureaux de traduction légale – ou assermentée.
-
Les bureaux "offrant des services de traduction".
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Selon les chiffres du Ministère du Commerce et de l'Industrie du 1er mai 2010, cités par Al
Mueini, 18 permis d'exercer ont été délivrés aux bureaux de traduction assermentée, contre
448 pour les bureaux "offrant des services de traduction".
5. Le Qatar :

Le Conseil National pour la Culture, les Arts et le Patrimoine:
Créée en 1998, cette institution est chargée de plusieurs missions, y compris celle de la
sauvegarde et de la défense du patrimoine culturel et artistique qatari.

Le Centre de traduction, dépendant du Conseil National:
En 2005, le Conseil National a ouvert un centre de traduction. A l'origine de cette
initiative, un article publié par Hossam Al Khatib, professeur de la langue arabe à l'université
de Qatar et qui demandait au Centre National d'ouvrir un centre de traduction. Le Conseil
National a chargé Al Khatib d'être le directeur du Centre de traduction.
Le centre de traduction du Conseil National pour la Culture, les Arts et le
Patrimoine fonctionne sur le mode suivant :
Choix des ouvrages
à traduire
Directeur Général
Administration
Ouvrages à traduire
Spécialiste de la
traduction
Traduction
Secrétaire
Révision
Correction
linguistique
Diffusion
Le Centre de traduction a déjà traduit vers l'arabe des langues comme l'anglais, le
français, l'espagnol et l'hindi, et il est en train de traduire des ouvrages à partir de l'italien, du
perse, du japonais, de l'allemand, du chinois vers l'arabe. Pour traduire les ouvrages, le
Centre déclare utiliser les outils suivants :
-
Les articles de références.
-
Les outils informatiques et numériques pour la traduction.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
-
Les dictionnaires et les glossaires présents sur le Web.
-
La formation de traducteurs.
-
Les entreprises de traduction.
-
L'index des livres traduits de l'UNESCO (IT) et la charte du traducteur.

Les prix attribués :
Le Conseil National distribue chaque deux ans deux prix, respectivement intitulés "Le
prix d'encouragement'' [Jaizat aldawlah altashjiiya] et "Le Prix d'appréciation" [Jaizat
aldawlah altaqdiriyyah] dans les domaines suivants :
o
Les études islamiques (études coraniques, la Sunna, le fiqh, la doctrine musulmane).
o
Les sciences sociales, humaines, économiques (sciences de l'homme, psychologie,
sciences politiques, histoire, géographie, sciences de l'éducation, philosophie, études
économiques, études du développement et des ressources humaines et sciences de
gestion).
o
Les sciences dures et appliquées :
-
Les sciences naturelles et mathématiques (physique, chimie, géologie,
mathématiques, statistiques et informatique).
-
Les sciences appliquées (études d'ingénieurs, biologie, études de médecine,
pharmaceutique et sciences de l'environnement).
o

Arts et littérature :
-
Poésie, théâtre, art du spectacle, art musical, roman, nouvelles, littérature.
-
Etudes littéraires, critiques, linguistique et traductions.
Les conditions d'éligibilité à ces deux prix sont les suivantes :
-
Les participants peuvent être des candidats libres ou être rattachés à un
établissement.
-
Etre de nationalité qatarie.
-
Avoir "bonne réputation".
-
Le travail proposé doit être une valeur ajoutée et enrichir la vie culturelle et
intellectuelle.

Les écrits doivent être rédigés en arabe littéraire.
Modalités de sélection des candidats pour les deux prix :
1- Les candidats doivent fournir au comité la liste des travaux qu'il a effectués, un
curriculum vitae ainsi qu'une "lettre de motivation pour l'obtention du prix".
© Transeuropéennes, Paris - 2010
2- Les candidats doivent fournir quatre exemplaires du travail pour lequel ils
candidatent.
3- Le comité général d'attribution du prix forme des délégations pour chaque
catégorie. Chaque délégation est composée de trois membres qui étudient le travail
proposé et émettent un avis au comité général.
4- Le comité général annonce les résultats des différentes délégations et donne le nom
des gagnants.
Le Conseil National commence à recevoir les candidatures à partir du premier janvier
de chaque année, et ce jusqu'au 30 avril de la même année. Les candidatures sont triées en
août et les différentes délégations sont mises en place en septembre, octobre et novembre.
Les résultats sont annoncés en décembre.
Seule la somme allouée aux candidats des deux prix diffère : les gagnants du "prix
d'encouragement'' obtiennent chacun 150.000 riyals [près de 30.000 €] alors que les
gagnants du "Prix d'appréciation" obtiennent chacun 250.000 riyals [près de 50.000 €].

Partenariat Bloomsbury Publishing (GB) – Fondation du Qatar
(http://www.bqfp.com.qa/)35:
Ce partenariat est né en octobre 2008 et la société qui en résulte est la Bloomsbury
Qatar Foundation Publishing. Elle est la propriété de la Fondation du Qatar (dirigée par
Cheikha Moza bin Missned) et est dirigée par la maison d'édition britannique Bloomsbury. Sa
mission première est la traduction d'ouvrages de l'anglais vers l'arabe et vice versa. Il s'agit
d'ouvrages littéraires, de littérature enfantine et de dictionnaires36. Il s'agit de la première
maison d'édition au Qatar et elle œuvre pour renforcer le secteur des métiers du livre au
Qatar, notamment en organisant des manifestations littéraires – elle s'investit par exemple
dans les évènements relatifs à la Journée mondiale du Livre – et encourage les "nouvelles
vocations littéraires de par le monde arabe". Enfin, elle soutient le secteur de l'édition au
Qatar, notamment en mettant en place des formations destinées aux éditeurs qataris et qui
sont dispensées au siège de la maison d'édition Bloomsbury à Londres. Toujours dans cette
optique d'améliorer le niveau du travail éditorial, notamment celui relatif à la traduction, la
Bloomsbury Qatar Foundation Publishing a été à l'origine de l'organisation du premier
congrès mondial pour la traduction37, qui a eu lieu les 19 et 20 mai 2010 à Doha en
partenariat avec l'université Carnegie Mellon du Qatar. Le but déclaré de ce congrès est de
créer une "plateforme basée dans le Golfe pour débattre de questions relatives à la
Site consulté le 09 octobre 2010.
Les ouvrages traduits par la Bloomsbury Qatar Foundation Publishing sont recensés dans le tableau Excel
accompagnant la présente étude.
37
Le
programme
du
congrès
est
disponible
sur
le
lien
suivant:
http://qatar.cmu.edu/assets/Arabic_Program_final_ed.doc.pdf. Consulté le 09 octobre 2010.
35
36
© Transeuropéennes, Paris - 2010
traduction" mais elle s'attache principalement à analyser les mouvements de traduction entre
l'arabe et l'anglais.
6. Le Bahreïn :

Le Centre Culturel Kanou : Mahdi Abdullah et Farouq Amin, traducteurs
du Bahreïn.
Le Centre Abdelrahman Kanou est un centre culturel qui organise des conférences et des
colloques au Bahreïn. A travers le parcours d'un traducteur réputé au Bahreïn, Mahdi
Abdullah, nous nous proposons de dépeindre la situation de la traduction au Bahreïn, pour
laquelle nous avons entrepris d'entrer en contact avec plusieurs personnes, sans succès.
Voici donc la synthèse d'une intervention de Mahdi Abdullah, retrouvée sur le Web.
Le 6 octobre 2009, le Centre culturel Kanou a organisé un débat intitulé "la
traduction au Bahreïn" en invitant Mahdi Abdullah, traducteur bahreïni38. Ce dernier a ouvert
le débat en disant qu'il "était temps d'ouvrir un centre de traduction dans le pays". Dans les
années 1930, l'école américaine "Al Irsaliyah"39 et l'entreprise pétrolière "Bapco" ont joué un
rôle majeur pour enseigner et diffuser la langue anglaise auprès des citoyens bahreïnis.
D'après Abdullah, le premier traducteur bahreïni était le professeur et le grand poète
Ibrahim Al Ureidhi, qui maîtrisait plusieurs langues, l'anglais, le perse et l'ourdou. Dans les
années 1950, Il a traduit en arabe "diwan ruba'iyat Al khayam", les quatrains de Omar
Khayyâm, qui a eu un large succès auprès des critiques litéraires.

Le parcours de Mahdi Abdullah dans le milieu de la traduction :
Tout d'abord, Abdullah s'est intéressé à la traduction des ouvrages concernant
l'histoire du Bahreïn. Il s'est ensuite penché sur la question de la traduction littéraire: "au
début, je traduisais des textes politiques, au bout d'un certain moment j'ai arrêté car cela ne
me plaisait pas, et je me suis dirigé vers la traduction littéraire. Le premier contrat de travail
de traduction a été signé en 1987 avec le magazine hebdomadaire bahreïni "Almawaqif". Je
traduisais des articles politiques venant de deux revues américaines, "Times" et "Newsweek"
ainsi que d'autres magazines européens. Chaque article faisait deux à trois pages avec des
photos, ce travail a duré 1 an. Mon deuxième pas concernant la traduction politique, c'était
avec le journal "Al Ayyam" en 1989. Nous étions un groupe de traducteurs et nous
traduisions vers l'arabe, des articles politiques provenant des différentes agences
d'information anglaises".
38
39
http://www.mutak2.com/vb/showthread.php?t=10678, consulté le 10 octobre 2010.
Ecole fondée en 1902 exclusivement réservée aux garçons.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
Abdullah a ensuite commencé à traduire des ouvrages historiques et littéraires. Il a traduit
l'ouvrage "Muthakirat Belgrave- Personal Column", l'un des ouvrages les plus importants dans
l'histoire du Bahreïn puisque l'auteur, en rédigeant ses mémoires, raconte son expérience au
Bahreïn. Abdullah est également l'auteur d'autres traductions que nous recensons dans le
tableau Excel relatif au Bahreïn. Revenant cependant sur sa traduction de l'ouvrage de
Belgrave dont il dit que lorsqu'il l'a présentait au chef de rédaction de la revue "Sada Al Usbu'
", celui-ci a supprimé certains passages jugés "sensibles", notamment concernant les
événements politiques des années 1950, les coutumes religieuses des chiites ou encore les
conflits entre le Qatar et le Bahreïn40. La traduction a été publiée dans la revue sous la
forme d'une série d'articles. Le traducteur a ensuite fait publier l'intégralité de sa traduction
à Beyrouth en 1991 – Abdullah dit avoir privilégié la publication au Liban parce qu'à l'époque,
il n'existait pas encore au Bahreïn de loi de protection de la propriété intellectuelle.
Abdullah, qui a demandé à plusieurs reprises la nécessité de soutenir la construction d'un
centre de traduction au Bahreïn, est soutenu par Faruq Amin, autre traducteur Bahreïni qui
a déclaré dans le journal Al Ahd : "Nous avons au Bahreïn de bons traducteurs mais ils ont
besoin de soutiens officiels"41. L'Etat ne s'investit donc pas encore suffisamment dans le
secteur de la traduction et les traducteurs n'ont pas les moyens de faire connaître leurs
travaux, par manque de moyens et de dispositifs leur permettant de faire valoir leurs
traductions.
7. Le Yémen :
Le Yémen serait tout en bas de "l'échelle de la traduction arabe"42. Le chaos du
paysage de la traduction yéménite se fait ressentir sur le niveau et la quantité de traductions
produites dans le pays. Les différentes institutions qui s'en occupent sont les suivantes:

Le comité général du livre ;

Le Ministère de la Culture: en 2004, le nombre de livres traduits par le Ministère
n'a pas dépassé 2% du total d'ouvrages publiés ;

La bibliothèque nationale de Sanaa. Selon Mahmoud Al Khamiri, archiviste de la
bibliothèque, cité par Soumayya Ghazi, la bibliothèque abriterait environ 600
titres dont seulement 30 ou 40 seraient des traductions. De ces 30 ou 40
traductions, 12 seulement seraient faites par des traducteurs yéménites ;

Le centre d'études anglaises et de traduction de l'université d'Aden
(http://www.aden-univ.net/cest.aspx): son ambition est de former de nouveaux
http://www.mutak2.com/vb/showthread.php?t=10678, consulté le 10 octobre 2010.
"Al Ahd", hebdomadaire bahreïni du 28 octobre 2009.
42
Selon
Soumayya
Ghazi,
Journal
"Al
Joumhouriyya",
http://algomhoriah.net/newsweekarticle.php?sid=58125. Consulté le 10 octobre 2010.
40
41
© Transeuropéennes, Paris - 2010
15
mars
2008:
traducteurs, "spécialistes des langues arabe et anglaise et des études britannique
et américaine". Voici le nombre d'étudiants de ce centre depuis sa création:
Années universitaires
Nombre d'étudiants
1998-1999
11
2002-2003
14
2005-2006
6
2007-2008
31
2008-2009
34
2009-2010
23
Source: site de l'université d'Aden (http://www.aden-univ.net/cest.aspx)
Mis à part le Ministère de la Culture, dont le site ne donne aucune information sur la
traduction au Yémen et le centre d'études anglaises et de traduction de l'université d'Aden,
aucune de ces institutions n'est présente sur le Web. N'ayant reçu aucune réponse des
personnes contactées, les informations dont nous disposons sur ce pays sont éparses et peu
nombreuses.
Les institutions délivrant les permis d'exercer le métier de traducteur sont au nombre de
deux:

Le Ministère de la Culture ;

La délégation nationale pour l'Education, la Culture et les Sciences, qui dépend du
Ministère de l'Education et de l'Enseignement (http://www.yncecs.gov.ye/main.htm).
Le traducteur doit déposer sa demande auprès du bureau du Ministère de la Culture. Celleci est transmise à la délégation yéménite auprès de l'Unesco et les candidats sont soumis à
un examen. Les conditions sont les suivantes:

Le candidat doit avoir au moins une licence en Lettres, en Langues ou en Sciences de
l'Education ;

Il faut qu'il soit diplômé depuis au moins 5 ans ;

Il faut qu'il ait obtenu au moins une mention Bien ;

Etre de nationalité yéménite ;

Etre titulaire du contrat de location du local où il compte exercer son métier de
traducteur.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
La quasi-inexistence de traductions yéménites est également à lier au niveau universitaire du
pays, qui souffre du manque de moyens financiers et institutionnels43. Comme pour le
Sultanat d'Oman, il ne semble pas y avoir de distinction entre les traducteurs littéraires et
les traducteurs assermentés.
Synthèse générale
La question de la volonté politique et des moyens financiers, facteurs clés
des politiques de traduction
Cette étude nous permet de mettre en évidence les disparités qui existent entre les
différents pays du Golfe. Comme nous le voyons, la question de la traduction ne repose pas
uniquement sur des exigences qualitatives : les moyens financiers doivent largement être pris
en compte, puisque nous remarquons que la différence de traitement de cette question est
notamment tributaire des moyens financiers mis en œuvre pour la mise en pratique d’une
véritable politique de traduction. Ainsi, les pays de Golfe réputés les plus riches (Arabie
Saoudite, Emirats Arabes Unis, etc.) investissent beaucoup d’argent sur la traduction,
contrairement à d’autres Etats, plus pauvres, comme le Yémen ou le Bahreïn, qui n’ont pas
les moyens financiers de mettre en œuvre une véritable politique de traduction. La question
financière est d’autant plus importante qu’elle a amené certains programmes de traduction –
« Tourjim » – à être suspendus, en raison de la crise économique, y compris dans les Etats
du Golfe jusque là réputés les plus riches.
Toutefois, la question financière ne doit pas nous laisser occulter le manque de
volonté politique : dans des pays tels que le Yémen et le Bahreïn, le pouvoir institutionnel
n’encourage pas les initiatives privées, telles celle du traducteur Mahdi Abdullah qui appelle à
la création d’un Centre de traduction national. Sans soutien politique, au sein de sociétés où
les acteurs civils ont encore peu de pouvoir mais surtout peu de marges de manœuvre, il est
aujourd’hui quelque peu difficile de créer des initiatives viables dans le domaine de la
traduction.
Choix des domaines et des langues de traduction
A ce jour, la majorité des traductions effectuées concernent les domaines des
sciences (dures, appliquées et naturelles) et la technologie. Tout naturellement, les prix
43Article
de Soumayya Ghazi, http://algomhoriah.net/newsweekarticle.php?sid=58125, consulté le 10 octobre
2010.
© Transeuropéennes, Paris - 2010
décernés par les institutions du Golfe vont majoritairement à des chercheurs ayant travaillé
dans ces domaines.
Dans les pays du Golfe, la langue à partir de laquelle il y a le plus de traductions est
l’anglais, même lorsque la version originale du livre a été publiée dans une autre langue : c’est
la traduction à partir de l’anglais qui est privilégiée.
La question de la censure
Il est étonnant de noter que les personnes interviewées – au Koweït, notamment –
font le lien entre achat des droits d’auteur et droit de censure, comme si l’obtention des
droits octroyait à l’institution responsable de la traduction de modifier ou de supprimer, à
loisir, des passages jugés « incompatibles » avec la culture, la religion ou encore la politique.
La foire du livre annuelle du Koweït est de plus en plus souvent l’occasion d’interdire la
diffusion de certains ouvrages. Ainsi, l’édition 2010 de la Foire a interdit la diffusion de 35
ouvrages égyptiens44. Il s’agit d’ouvrages politiques (Les dossiers de Suez, écrit par Mohammad
Haikal, ancien conseillé de Gamal Abdel Nasser, Les intellectuels arabes, de Jalal Amin, etc.),
de romans, tel Les récits de l’institution, de Gamal al-Ghitany ou encore d’ouvrages de poésie.
Selon le comité de surveillance koweitien, l’interdiction « ne vise pas le peuple ni la culture
égyptiens, mais quelques ouvrages incompatibles avec la politique générale du pays »45. Il en a
été de même en 2009, mais c’est le Liban qui était visé cette fois, avec une soixantaine de
livres interdits46, y compris des anthologies poétiques telle celle du poète Nizar Qabbani, des
ouvrages pour adultes ou encore L’histoire de Beyrouth de Samir Kassir.
Diffusion des ouvrages traduits et lecture
D’après les chiffres avancés par la revue Qantara, le Centre National du livre
égyptien n’imprime que 3000 exemplaires de chacun de ses titres pour l’ensemble du monde
arabe47, et le programme ‘’Kalima’’ 2000 seulement48. Ces chiffres dérisoires montrent le
peu d’engouement du lectorat arabe pour la lecture en général et la traduction en
particulier. Cela est sans doute à lier à l’appauvrissement général de la vie intellectuelle
arabe : nous le voyons, une grande partie des ouvrages traduits sont des ouvrages de
Liste disponible sur le lien suivant : http://www.qadita.net/2010/09/%D9%85%D8%B9%D8%B1%D8%B6%D8%A7%D9%84%D9%83%D9%88%D9%8A%D8%AA-%D9%8A%D9%85%D9%86%D8%B9-35%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8%A7%D9%8B-%D9%84%D8%AF%D9%88%D8%B1%D9%86%D8%B4%D8%B1-%D9%85%D8%B5%D8%B1%D9%8A/, consulté le 23 octobre 2010.
45
http://www.alazma.com/site/index.php?option=com_content&view=article&id=8712:------------video&catid=26:1&Itemid=5, consulté le 23 octobre 2010.
46
Liste
disponible
sur
le
lien
suivant :
http://www.mobashernews.net/index.php?go=news&r=1112009&more=98076
47Article sur la 40e foire du livre du Caire, http://www.qantara.de/webcom/show_article.php/_c-310/_nr502/i.html, consulté le 23 octobre 2010.
48 Interview avec Mustafa al-Slaiman, responsable des traductions dans le programme ‘’Kalima’’ :
http://www.qantara.de/webcom/show_article.php/_c-310/_nr-747/i.html, consulté le 24/10/2010.
44
© Transeuropéennes, Paris - 2010
sciences dures et appliquées, dont on pense qu’ils pourront aider à combler le fossé
séparant les sociétés arabes, majoritairement islamiques, des sociétés occidentales. Ces
traductions sont d’autant plus encouragées qu’elles n’ont pas besoin d’être censurées pour
une quelconque raison politique ou religieuse. Un autre pan important d’ouvrages est
traduit : ceux traitant de l’histoire des pays concernés. Ainsi, l’Arabie Saoudite ainsi que le
Koweït traduisent et financent la traduction de nombreux ouvrages revenant sur leurs
histoires respectives et sur des périodes-clé de cette histoire– comme la guerre irakokoweitienne pour le Koweït, etc. Des centres sont mêmes créés exclusivement dans ce but,
comme le Centre de recherches et d’étude koweïtien.
La question du statut des traducteurs dans le Golfe
Malgré les contacts pris avec différents traducteurs issus ou travaillant dans les pays
du Golfe et l’envoi d’un questionnaire destiné à nous renseigner sur leur statut, nous avons
eu très peu de retours.
De façon générale, il ressort que la profession de traducteur est sous estimée, alors même
qu’il occupe une position académique importante. Le plus souvent, il cumule le travail de
traduction avec un poste de chercheur universitaire.
Si dans certains pays, les textes de loi mentionnent les droits des traducteurs, ils ne
font pas la différence entre les traducteurs littéraires et les traducteurs assermentés
(exemples du Bahreïn et du sultanat d’Oman). La profession de traducteur littéraire ne
semble donc pas reconnue en tant que telle.
© Transeuropéennes, Paris - 2010