Mouvement de la traduction dans les pays du golfe (Koweit, Arabie
Transcription
Mouvement de la traduction dans les pays du golfe (Koweit, Arabie
Traduire en Méditerranée TRADUIRE DES LANGUES DES PAYS DE L’UE AINSI QUE DU TURC VERS L'ARABE DANS LES PAYS DU GOLFE (ARABIE SAOUDITE, KOWEIT, EMIRATS ARABES UNIS, QATAR, YEMEN, BAHREIN ET OMAN) Dans le cadre de l’état des lieux de la traduction en Méditerranée, co-produit par la Fondation Anna Lindh et Transeuropéennes en 2010 Collecte des données, analyse et rédaction Ali Hajji © Transeuropéennes, Paris - 2010 Préambule La présente étude est réalisée par Transeuropéennes, Paris. Elle est une composante du premier état des lieux de la traduction en Méditerranée que conduisent à partir de 2010 Transeuropéennes et la Fondation Anna Lindh (programme euro-méditerranéen pour la traduction), en partenariat avec plus d’une quinzaine d’organisations de toute l’Union pour la Méditerranée. Partageant une même vision ample de la traduction, du rôle central qu’elle doit jouer dans les relations euro-méditerranéennes, dans l’enrichissement des langues, dans le développement des sociétés, dans la production et la circulation des savoirs et des imaginaires, les partenaires réunis dans ce projet prendront appui sur cet état des lieux pour proposer et construire des actions de long terme. I- Bref historique des processus de traduction dans les pays du Golfe : Les populations qui forment actuellement la région connue sous la dénomination « monde arabe » ont des modes de vie et des cultures qui remontent à plusieurs siècles. Si le croissant fertile, composé de l’actuelle Syrie, de l’actuel Liban, de l’Irak et de la Palestine était plutôt habité par des populations sédentaires, qui vivaient grâce au commerce et à l’agriculture, les populations de la Péninsule arabique (plus tard l’Arabie Saoudite, le Yémen ainsi que les autres pays du Golfe) abritaient des populations nomades ou semi-nomades, dont l’environnement climatique et géographique a déterminé le mode de vie. La naissance de l’islam, au VIIe siècle, a laissé une empreinte durable sur la région et en a modelé, de diverses façons, l’histoire, la culture et la langue. Si l’histoire des différents califats qui ont régné sur l’ancien empire musulman est traversée par les efforts de traduction entrepris par les intellectuels de l’époque, il n’en reste pas moins que l’arabe était plutôt la langue source ou la langue intermédiaire de traduction et non la langue cible, à l’exception de l’époque omeyyade et abbasside, qui a favorisé les traductions vers l’arabe1. Les Etats du Golfe sont des pays jeunes, qui ont accédé à l’indépendance assez tardivement – 1932 pour l’Arabie Saoudite, 1961 pour le Koweït, 1971 pour le Sultanat d’Oman, les Emirats Arabes Unis, le Qatar et le Bahreïn, et 1990 pour le Yémen. Le premier livre traduit dans les pays du Golfe l’aurait été en Arabie Saoudite, en 19552. Mona Baker, Kirsten Malmkjær, Routledge Encyclopedia of Translation Studies, 1998, London & New York, 654 pages, p. 317. 2 Noura AL-NASSER, La traduction des livres vers l’arabe en Arabie Saoudite (étude bibliométrique), Bibliothèque publique du roi Abdul-Aziz, Riyad, 1998. 1 © Transeuropéennes, Paris - 2010 II- Méthodologie suivie : L’impossibilité de se déplacer dans les pays concernés pour la présente étude a été handicapante pour la collecte des données et la prise de contact avec les éditeurs, auteurs, traducteurs et autres acteurs des mouvements de traduction. Nous avons donc privilégié les prises de contact par courrier électronique et par téléphone, mis à part pour le Koweït, où nous avons pu rencontrer, en juin 2010, des responsables des principales institutions travaillant dans le domaine de la traduction. Voici, dans le détail, les personnes / institutions rencontrées et/ou contactées : 1. Arabie Saoudite: - Le Prix International du Roi Abdullah de la traduction (Riyad, Arabie Saoudite). - Le Centre de traduction à l’Université du Roi Saoud (Riyad, Arabie Saoudite). - La bibliothèque nationale du Roi Fahad (Riyad, Arabie Saoudite). - La bibliothèque du Roi Abdelaziz (Riyad, Arabie Saoudite). - L’université Islamique de l’Imam Mohammed bin Saoud (Riyad, Arabie Saoudite). - La maison d’édition privée Khaled Bashmakh (Djeddah, Arabie Saoudite). - La maison d’édition privée Okaz (Djeddah, Arabie Saoudite). - La maison d’édition Saoudiya (Djeddah, Arabie Saoudite). - L’université du Roi Abdelaziz (Djeddah, Arabie Saoudite). - La maison d’édition privée Jarîr (Riyad, Arabie Saoudite). - La maison d’édition privée Almarrîkh (Riyad, Arabie Saoudite). - La maison d’édition privée Al-Obeikan (Riyad, Arabie Saoudite). 2. Koweït: - Le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres, Koweït. Mansour ALANEZI, directeur de la publication et de la diffusion– juin 2010. - La Fondation Koweitienne pour l'Avancée Scientifique, Koweït. Khaled ALROUBAYAAN, direction culturelle – juin 2010. - Le Centre de Recherches et d' Etudes Koweitien, Koweït. Abdallah Youssef ALGHUNAIM, président du Centre – juin 2010. - Le Centre Al-Babtain pour la traduction, privé, Koweït. Elias AL-BARRAGE, directeur du Centre – juin 2010. - La maison d'édition privée Souad Al-Sabah, Koweït. 3. Emirats Arabes Unis: - Le Programme « Kalima » (Emirats Arabes Unis, Abou Dhabi). © Transeuropéennes, Paris - 2010 - La Fondation Mohammed Bin Rashid Al Maktoum, programme « Tourjim » (Emirats Arabes Unis, Dubaï). - Le Département de la Culture et de l'Information de Sharjah (Emirats Arabes Unis, Sharjah). 4. Qatar: - Le Conseil National de la Culture, des Arts et du Patrimoine (Qatar). 5. Bahreïn: - Le Centre Culturel Kanou : Mahdi Abdullah et Farouq Amin, traducteurs du Bahreïn. 6. Sultanat d'Oman: - Le Cercle culturel omani, Abdullah AL-HOURASI et Ahmad AL-MUEINI, (Oman). - L’université du Sultan Qaboos (Oman). 7. République du Yémen: - Le Ministère de la Culture (Yémen). - La Commission Nationale Yéménite pour l’éducation, la Culture et les Sciences (Yémen). 8. Autres institutions: - Le Bureau Arabe de l’Education pour les Pays du Golfe. Sources des informations bibliographiques utilisées pour la présente étude : Institutions impliquées dans les processus de traduction, dans les différents pays étudiés : Pour le Koweït, la majorité de ces institutions (citées dans le corps de l’étude) nous ont fourni, à titre gracieux, les informations bibliographiques demandées. Les rencontres effectuées sur place ont été, dans ce sens, très bénéfiques. Les représentants des autres institutions du Golfe n’ayant pu être rencontrées, les informations sont quelque peu parcellaires : nous avons utilisé les fichiers mis en ligne sur Internet – lorsqu’il y en a – et ceux obtenus grâce à des entretiens téléphoniques ou à des contacts par email. Il en a été de même pour les grands prix de traduction de la région. © Transeuropéennes, Paris - 2010 L’Index Translationum de l’UNESCO3 : cette base de données de l’UNESCO se présente comme étant une « véritable bibliographie internationale des traductions ». Créée en 1932, elle souffre du manque d’implications des délégations des pays, qui ne fournissent pas toujours les informations complètes et exhaustives concernant les traductions dans leurs propres pays. Une « immersion » dans le secteur de l’Index (grâce à un stage effectué entre octobre 2010 et janvier 2011) nous a permis de relever les difficultés rencontrées par l’Index : les transcriptions des noms d’auteurs (arabes, dans le cas de figure qui nous intéresse) ne sont pas toutes unifiées, ce qui crée une véritable difficulté pour le chercheur. L’autre grande difficulté est le caractère incomplet de la base. Bureau virtuel du projet « Traduire en Méditerranée », mis en place par Transeuropéennes. III- Les institutions centralisées : Il existe des institutions étatiques qui se donnent pour mission, dans chacun des pays du Golfe, de mettre en place des politiques de traduction de – mais surtout vers – l’arabe. Nous y reviendrons plus loin, dans notre présentation détaillée des pays du Golfe. Arrêtons-nous d’abord un instant sur une institution – la seule, à notre connaissance – présente dans tous les pays du Golfe, et qui mène une politique de traduction plus ou moins centralisée pour tous ces pays. Il s’agit du Bureau Arabe de l’Education pour les Pays du Golfe4, qui dépend du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe. La mission principale de cette organisation est la mise en place de nouveaux programmes de recherche dans le domaine de la pédagogie, leur mise à jour ainsi que la création d’un centre pédagogique d’apprentissage de la langue arabe. Dans ce cadre, il œuvre également à faire évoluer la méthodologie d’enseignement de la langue arabe destinée aux arabophones, afin qu’elle soit en adéquation avec les enseignements modernes d’autres langues. C’est ainsi que les traductions « sponsorisées » par ce bureau relèvent généralement du domaine de la pédagogie et de l’éducation5. Le Bureau possède par ailleurs sa propre imprimerie ; il distribue auprès des bibliothèques des Etats du Golfe et de « leurs partenaires » ses publications, dans le but avoué de les faire connaître du plus grand nombre. www.uneso.org/culture/translationum Arab Bureau of Education for the Gulf States: http://www.abegs.org/Aportal/ , consulté le 30 septembre 2010. 5 Les ouvrages traduits par le Bureau Arabe de l’Education pour les Pays du Golfe sont recensés dans le tableau des ouvrages traduits dans les pays du Golfe, en annexe de la présente étude. Nous pouvons citer, à titre d’exemple, la traduction d’un ouvrage de Rick Wormeli, L’art du résumé [Fann al talkhîs] en 2008. 3 4 © Transeuropéennes, Paris - 2010 IV- La situation par pays : 1. L’Arabie Saoudite : Comme indiqué précédemment, l'Arabie Saoudite est le pays du Golfe qui dispose du plus grand nombre de maisons d'éditions qui effectuent des traductions. Nous avons contacté toutes ces maisons d'édition ainsi que les organisations qui traduisent. Tableau numéro 1: le nombre de livres traduits en Arabie Saoudite de 1930 à 2005 (source : Mamdouh ALKHATIB, 2007). Année Nombre Année de livres Nombre Année de livres Nombre de livres 1930-1954 0 1975 4 1990 15 1955 1 1976 14 1991 33 1956-1962 0 1977 12 1992 28 1963 1 1978 14 1993 13 1964 1 1979 15 1994 19 1965 1 1980 13 1995 28 1966 3 1981 29 1996 20 1967 0 1982 61 1997 29 1968 2 1983 41 1998 50 1969 0 1984 31 1999 70 1970 0 1985 23 2000 163 1971 0 1986 37 2001 29 1972 5 1987 44 2002 170 1973 1 1988 28 2003 56 1974 4 1989 43 2004 97 2005 12 1260 Total Le tableau numéro (T1) nous montre que le nombre de livres traduits vers la langue arabe en Arabie Saoudite en 75 ans, de 1930 à 2005, est de 1260 livres. Il faut savoir que ce nombre correspond à celui des livres traduits, toutes organisations présentes en Arabie Saoudite, gouvernementales ou privées, confondues. Ce tableau nous confirme que le premier livre traduit était en 1955 donc 25 ans après la création de pays. A partir des années © Transeuropéennes, Paris - 2010 1990, le pays témoigne d'une progression au niveau de la traduction comme nous montre le tableau (T1). Cet autre tableau nous présente le pourcentage des différents livres traduits en fonction des catégories: Tableau numéro 2 (T2) : catégories des livres traduits de 1930 à 2005: Catégorie Nombre de livres Pourcentage Sciences Sociales 491 38.97 Sciences Humaines 252 20 Sciences Appliquées 218 17.3 Sciences de l'information 125 9.92 Sciences dures 114 9.05 Lettres et Arts 60 4.67 1260 100 et de la communication Total Le tableau numéro 2 (T2) nous montre que les livres de sciences sociales sont classés premiers parmis les autres avec (38.97%), suivis par ceux de sciences humaines (20%), puis les sciences appliquées (17%), ensuite, Sciences de l'information et de la communication (9.92%). Le poucentage des sciences dures (physique, chimie…etc) est de 9.05%, enfin, nous retrouvons les livres de lettres et art en dernière position, avec un poucentage de 4.67%. Parmi les 1260 livres traduits, 95% l'ont été à partir de la langue anglaise et 5% d'autres langues comme le français, le russe, l'allemand et l'ourdou6. Il est à noter que l'Arabie Saoudite entreprend d'encourager la traduction d'ouvrages écrits par des Saoudiens dans d'autres langues que l'arabe7. Mamdouh ALKHATIB L'industrie de la traduction en Arabie Saoudite [sinâ'at al tarjama fil mamlaka al-'arabiyya alsa'oudiyya], Université du Roi Saoud, Riyad, 2007. 7 Bibliothèque Nationale du Roi Fahd, http://www.kfnl.gov.sa/idarat/pplo/Translatwd/pdf/fornt.pdf , consulté le 30 septembre 2010. 6 © Transeuropéennes, Paris - 2010 Détail des branches traduites jusqu'en 2005 en Sciences Humaines en Arabie Saoudite Psychologie 25 Ethique 20 Philosophie Patrimoine 15 Traductologie Religion 10 5 Sc. Du langage Arts Sport Histoire 0 Géographie © Transeuropéennes, Paris - 2010 Psychologie 25 Ethique 20 Philosophie Patrimoine 15 Traductologie Religion 10 5 Sc. Du langage Arts Sport Histoire 0 Géographie Source : d'après les chiffres avancés par Mamdouh ALKHATIB (2007) © Transeuropéennes, Paris - 2010 Détail des branches traduites jusqu'en 2005 en Sciences Sociales en Arabie Saoudite Sociologie 40 35 Economie 30 Sc. Politiques 25 Droit 20 15 10 5 Administratio n Sc. Militaires Sc. de l'éducation Commerce 0 Us et Coutumes Source : d'après les chiffres avancés par Mamdouh ALKHATIB (2007) © Transeuropéennes, Paris - 2010 Les maisons d'édition et bibliothèques: Le tableau numéro 3 (T3) recense les différentes maisons d'édition et établissements publieurs les plus importants en Arabie Saoudite ainsi que le nombre d'ouvrages traduits entre 1955 et 2004 : Etablissement Ville Ouvrages traduits Université du Roi Saoud Riyad 141 Bibliothèque nationale du Riyad 8 Riyad 9 Riyad 10 Djeddah 12 Maison d’édition Okaz Djeddah 16 Maison d’édition Saoudiya Djeddah 17 Université du Roi Djeddah 25 Maison d’édition Jarîr Riyad 99 Maison d’édition Al- Riyad 194 Riyad 275 Roi Fahad Bibliothèque du Roi Abdelaziz Université Islamique de l’Imam Mohammed bin Saoud Maison d’édition Khaled Bashmakh Abdelaziz Marrîkh Maison d’édition AlObeikan D'après Mamdouh ALKHATIB (2007) La maison d'édition Al-Obeikan à Riyad prend la première position avec 275 ouvrages traduits sur 1260 livres traduits en Arabie Saoudite jusqu'en 2005. Cette maison d'édition traduit des ouvrages culturels, politiques (c'est le cas par exemple de The Delhi Sultanate: a political and military history de Peter Jackson, 1998) ainsi que des romans destinés à un public généraliste. En deuxième position, avec 194 ouvrages traduits, vient la maison d'édition AlMarrîkh. Elle vise plutôt un public académique (suivant ou ayant suivi des études © Transeuropéennes, Paris - 2010 universitaires supérieures, professeurs, etc.…). L'université du Roi Saoud avec son Centre de traduction se situe en troisième position, avec 141 ouvrages traduits fin 2004. Depuis 2004, ce nombre a augmenté et il est aujourd'hui de 247 livres traduits selon le site du Centre8. Il déclare traduire des ouvrages de "tous domaines": littérature, psychologie, sciences dures, nutrition, éducation, médecine, etc.. Le Centre de traduction de l'université du Roi Saoud est un établissement non lucratif, son but est d'offrir l'opportunité aux professeurs d'université de traduire des ouvrages récents pour "enrichir les bibliothèques arabes". Pour encourager les traducteurs, le Centre leur offre une récompense. Les critères de jugement sont la "valeur scientifique" et la "qualité de la traduction". La récompense varie entre 16.000 [3.000 €] et 50.000 riyals saoudiens [10.000 €] et le montant dépend du nombre de pages de l'ouvrage et de la qualité de la traduction. Cette décision est prise par un comité spécialisé. Concernant les droits d'auteur, le Centre de traduction de l'université du Roi Saoud prend contact avec l'auteur ou la maison d'édition pour l'achat des droits qui varient entre 700 et 2200 euros. Une fois l'ouvrage traduit et diffusé, il est vendu à un prix symbolique. Le Centre traduit également de la langue arabe vers d'autres langues des ouvrages concernant le patrimoine et la culture arabo-musulmanes. Notons que la maison d'édition privée Jarîr traduit de nombreux livres pour enfants, comme les différents épisodes de la collection du Club des Cinq, écrites par Enid Blyton. Selon Franck Mermier, les trois principales maisons d'édition privées en Arabie Saoudite sont Al-Obeikan, Jarîr et Tihâma9. Tous les ouvrages traduits en Arabie Saoudite sont présents dans les bibliothèques nationales du pays; l'une de ces bibliothèques est la bibliothèque nationale du Roi Fahad à Riyad. Cette bibliothèque ne traduit pas beaucoup d'ouvrages mais ce qui la distingue des autres est qu'elle a une salle consacrée aux ouvrages ottomans et turques Al Salah Al Othmaniyyah wa Al Turkiyyah. La bibliothèque est en train de les traduire vers la langue arabe. La bibliothèque du Roi Abdelaziz (http://www.kapl.org.sa/index.php) La bibliothèque du Roi Abdelaziz a été inaugurée le 27 Février 1987 par Le Roi Abdullah Bin Abdelaziz. La bibliothèque se concentre surtout sur la langue arabe, sur le patrimoine islamique et sur l'histoire du Royaume d'Arabie Saoudite. http://www.ksu.edu.sa/sites/KSUArabic/aboutUs/Centers/TranslationCenter/Pages/default.aspx, consulté le 30 septembre 2010 9 Franck Mermier, Le Livre et la Ville, Beyrouth et l'édition arabe, Actes Sud, Arles, 2005, p. 110. 8 © Transeuropéennes, Paris - 2010 Le prix du Roi Abdullah pour la traduction (http://www.translationaward.org) Le 31 octobre 2006, La bibliothèque a créé le prix international du Roi Abdullah pour la traduction. Les domaines concernés par ce prix sont : Le prix de traduction récompensant les efforts déployés par les organisations - encourageant la traduction. Le prix de traduction des sciences humaines traduites de l'arabe vers d'autres - langues. - Le prix de traduction des sciences humaines traduites vers l'arabe. - Le prix de traduction des sciences naturelles traduites de l'arabe vers d'autres langues. Le prix de traduction des sciences naturelles traduites vers l'arabe. - La valeur de chaque prix est de 500.000 riyals [95.000 €]; un certificat et une médaille sont également décernés aux gagnants. o Les buts déclarés du Prix du Roi Abdullah pour la traduction sont : - Promouvoir les échanges interculturels et de savoir entre les langues. - Encourager la traduction vers la langue arabe dans le domaine scientifique. - Enrichir les bibliothèques arabes. - Encourager les organisations et les maisons d'édition. - Améliorer le niveau de la traduction. 2. Le Koweït : Après notre visite au Koweït, nous avons pu rencontrer des responsables de différentes organisations qui traduisent des livres. Nous allons présenter en détail la situation de chaque organisation concernant la traduction. Ce travail est le seul que nous avons pu le faire sur terrain. Cette méthodologie ne concerne donc pas les autres pays du Golfe. La première organisation au Koweït qui a commencé à traduire des livres vers l’arabe est le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres du Koweït. Les deux premiers ouvrages traduits, respectivement en octobre et en novembre 1969, sont un livre de Manuel Galich10 (titre original non précisé) et le Jeanne d’Arc de Jean Anouilh. A. Le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres au Koweït (CNCALK) : Ce Conseil National a été reconnu en 17 juillet 1973 par le gouvernement comme une organisation qui diffuse la pensée du monde occidental en traduisant vers l’arabe des ouvrages afin qu’ils soient lus par le plus grand nombre possible de lecteurs monolingues. Par 10 Le titre arabe de l’ouvrage de Manuel Galich est :"Samak Assir Alhadhm". © Transeuropéennes, Paris - 2010 ailleurs, le CNCALK a d’autres fonctions comme protéger la culture, les Arts et la littérature du pays, préserver le folklore koweitien et la langue arabe, susciter l'intérêt dans la lecture des livres, soutenir la créativité intellectuelle et artistique des culture et musique locales. Le CNCALK remplit notamment ces missions par le biais de la diffusion des revues suivantes : 1. Revue « Alfonoun » [les Arts]: spécialiste des arts plastiques, du cinéma, de la musique, de la photographie, du folklore populaire etc. 2. Collection « Alem al Maarefa » [le monde de la connaissance]: parution mensuelle dont le premier numéro date de janvier 1978. Elle traduit et publie des textes de la pensé contemporaine mondiale. 3. Collection « Ibdaat Alamiyya » [les chefs-d'œuvre internationaux]: publie tous les deux mois un nouveau numéro contenant des textes traduits de théâtre et littéraires. Le premier numéro date d'octobre 1969. 4. Collection « Almasrah al Alami » [théâtre international]: un nouveau numéro paraît tout les deux mois et constitue la traduction d'une pièce de théâtre célèbre. 5. Revue « Alam alfikr » [le monde de la pensée]: parution trimestrielle dont le premier numéro date de janvier 1970. Elle publie essentiellement des textes de sciences humaines. 6. Revue « Althaqafa al’alamiyya » [la culture mondiale]: publiée tous les deux mois, elle traduit des textes sur la culture contemporaine mondiale. Son premier numéro date d'avril 1981. Le Conseil National assure l’organisation de la foire du livre au Koweït tous les ans ainsi que la participation à des foires du livre au niveau local et mondial. Le (CNCALK) gère la Bibliothèque nationale du Koweït, qui a été créée dans le but de répondre aux besoins de l'expansion de l'éducation dans l'enseignement supérieur et dans la recherche scientifique. Elle entreprend les tâches suivantes : 1. Superviser le système de dépôt légal des œuvres. 2. Superviser la répartition du nombre de normes internationales pour les livres imprimés localement. 3. Collecter, organiser, et préserver le patrimoine et la production intellectuelle de milliers de livres, périodiques, en particulier ceux qui traitent de l'État du Koweït. 4. Coopérer avec les bibliothèques de recherche spécialisées à l'intérieur et à l’extérieur du Koweït. 5. La Bibliothèque nationale du Koweït prend en charge le fonds des bibliothèques privées, lorsque leurs propriétaires décèdent. © Transeuropéennes, Paris - 2010 Nous avons pu rencontrer M. Mansour Al Aneizi, directeur de la publication et la distribution du CNCALK. Voici la teneur de l’entretien que nous avons réalisé avec lui : Mansour Al Aneizi : « Le Conseil National de la Culture, des Arts et des Lettres a pour tâche de traduire des livres vers la langue arabe. Nous traduisons des ouvrages de littérature, de poésie, de théâtre, de sciences sociales, de sciences humaines, mais très peu de sciences dures. Nous avons un comité de rédaction qui se réunit pour la collection de livres. Le choix d’un livre se porte sur le succès qu’il rencontre dans sa langue d’origine, et il apporte un plus pour la bibliothèque arabe. Nous évitons bien sûr de choisir des ouvrages spécialisés, car notre vision porte sur le grand public. Après avoir choisi un livre, nous contactons l’auteur ou la maison d’édition pour avoir l’accord de la traduction et obtenir les droits du livre en langue arabe ainsi que le droit de censurer les passages qui ne conviennent pas à notre culture …etc.» Q : Comment et selon quels critères choisissez-vous votre traducteur ? R : « Nous avons un comité qui se réunit pour choisir le traducteur. Tout d’abord, nous sommes très connus dans le domaine de la traduction de livres. Cela fait 30 ans que nous travaillons et nous avons une liste de traducteurs qui ont déjà travaillé pour nous tout au long de ces années. Pour donner la chance aux jeunes diplômés, nous recevons au fur à mesure, des CV de différents traducteurs venant de différents pays arabes ou les maisons d’édition avec qui nous travaillons nous proposent des traducteurs. Les traducteurs choisis par le comité passent un examen écrit ainsi qu’un examen oral. Nous sommes très exigeants sur ce point car nous voulons effectuer un bon travail de traduction. Nous n’avons pas le temps de former des traducteurs. Nous sommes plutôt une organisation qui finance le projet. Q : Quels sont les droits du traducteur ? R : « Le traducteur est une sorte de petit auteur c'est-à-dire que son nom paraît à coté de celui de l’auteur en tant que traducteur. Il a le droit de censure. Si le livre traduit est réédité, il est prioritaire pour traduire plus de livres que les autres traducteurs. Le traducteur dispose d’un délai de 6 mois à 1 an pour traduire son livre. Après remise de la traduction, celle-ci doit être présentée devant un comité de révision pour être lue et corrigée avant l’impression du livre. Pour la première diffusion nous imprimons 40 000 exemplaires et le livre est vendu 1 USD par exemplaire. Notre but n’est pas de faire du bénéfice, mais de faciliter au lecteur arabe l’accès à de nouveaux ouvrages. Bien évidemment, nos livres sont présents partout (librairies, bibliothèques, nous participons également à des expositions du livre aux niveaux local et mondial). Les Marocains lisent beaucoup ; nous envoyons donc beaucoup d’ouvrages au © Transeuropéennes, Paris - 2010 Maroc. Et nous en envoyons également en dehors des pays arabes, en GrandeBretagne et en France. Concernant le paiement du traducteur, si le livre fait 350 pages nous lui payons 1500 dinars (4000 euros) et si c’est une revue, nous lui payons par mot, 20 fils (5 cents d’EURO) par mot. Q : Décernez-vous des Prix pour la traduction ? R : « Notre organisation ne décerne pas de prix, mais nous participons à la remise de prix d’autres institutions. D’ailleurs, nous avons déjà gagné plusieurs prix, celui de la Fondation du Koweït pour l'Avancement des Sciences, et celui du Roi Abdullah pour la traduction ». Q : Quelle est la langue la plus traduite vers l’arabe ? R : « Nous pouvons mettre en première position l’anglais à 70%, ensuite, à 28% trois autres langues : l’allemand, le français et le persan, et enfin, 2% d’autres langues ». Q : Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans votre travail de traduction ? R : « Il faut savoir que nous ne sommes pas la seule institution qui fait de la traduction, nous avons des concurrents partout dans les pays arabes. C’est une bonne chose mais malheureusement il n’y a pas de structures pour réunir tous ces pays. Une autre difficulté à signaler est que les maisons d’édition des auteurs que nous voulons traduire ne répondent pas toujours à nos sollicitations. Enfin, le manque des traducteurs constitue également un handicap. Q: Avez-vous des livres bilingues? R: Non, nous n'en avons pas. Q: Comment vos livres sont-ils présentés? Avez-vous un mécanisme de contrôle de la qualité des traductions? R: Notre logo figure sur la couverture de nos ouvrages. Le titre arabe y figure, ainsi que les noms de l'auteur et du traducteur. Le titre original de l'œuvre figure sur la deuxième de couverture. En ce qui concerne les mécanismes de contrôle des traductions, un comité surveille de très près la qualité de la traduction. Q: Quelle est la réaction des critiques par rapport à vos livres? R: Nous traduisons depuis 1969 et nous sommes reconnus dans ce domaine. Nous avons été soutenus, à plusieurs reprises par de grands chercheurs arabes et par des critiques. C'est pour cette raison qu'il nous arrive de rééditer des ouvrages traduits qui rencontrent beaucoup de succès. Cela a par exemple été le cas de deux tomes consacrés au patrimoine de l'islam (The legacy of Islam, de Joseph Schacht et Clifford Edmund Bosworth) ou encore certaines pièces de théâtre (telle Mother of men de Percival Wilde). © Transeuropéennes, Paris - 2010 B. La Fondation koweitienne pour l'avancée scientifique (FKAS): La Fondation koweitienne pour l'avancée scientifique est une association reconue d'interet général, créée le 12 décembre 1976 par décret princier. Un conseil de direction, présidé par l'émir du Koweït et composé de six membres choisis par lui pour une duré de trois ans. La Fondation est financée en partie par 1% de chiffre d'affaire annuel des entreprises koweitiennes. Le conseil de direction nomme un directeur général, qui met en place les politiques et les orientations du conseil et dirige les questions administratives et financières de la fondation. 1. Les buts de la Fondation : - Soutenir les traveaux de recherche. - Proposer des projets scientifiques en fonction des interets nationaux. - Offrire des bourses et des prix pour soutenir les progrès intellectuels au Koweit et dans le reste du monde arabe. - Organiser des congrès et des séminaires internationaux. - Enrichir les bibliothèques arabes en publiant des livres, des revues et des encyclopédies. La Fondation offre des bourses pour l'écriture, la traduction et la publication d'ouvrages scientifiques en langue arabe. Les domaines privilégiés sont les sciences naturelles, l'architecture, le médecine, la nutrition, les sciences sociales et économiques. Ces bourses sont offertes à des auteurs arabes, vivant dans l'ensemble du monde arabe. La Fondation se charge de faire réviser les ouvrages avant publication pour s'assurer de ses qualités scientifiques. 2. Les foires et les salons du livre : La Fondation participe à des nombreuses foires du livre, à l'intérieur ou à l'extérieur du Koweït, en coopération avec le conseil national de la Culture, des Arts et des Lettres, le Ministère de la communication, l’Université du Koweït et le Centre de Recherches et d'Etudes koweitien. Le principal intérêt de la participation à ces différentes foires et expositions, dans le monde arabe ou à l'international, est la visibilité qu'elle apporte à cette institution. Celle-ci lui permet de diffuser et de vendre ses publications à une échelle plus ou moins grande, mais pas véritablement d'en tirer profit puisque celles-ci sont cédées à un prix symbolique, la Fondation était une organisation à but non lucratif. o Les foires extérieures: © Transeuropéennes, Paris - 2010 - Salon international du Caire. - Salon international de Casablanca. - Salon international de Mascate. - Semaine culturelle du Koweït en Jordanie. - Salon international de Téhéran. - Salon de la bibliothèque al-Assad (Syrie). - Salon international du Yémen. - Salon international de Francfort (Allemagne). - Salon international de Sharjah (Emirats Arabes Unis). - Salon international de Beyrouth (Liban). - Salon international de Doha (Qatar). o La Fondation participe également à diverses foires locales, notamment dans le milieu universitaire. 3. Les publications de la Fondation: La Fondation édite une publication intitulée "L'avancée scientifique". Rédigée en langue arabe, elle publie parfois des textes traduits vers l'arabe11. La Fondation traduit actuellement l'Encyclopédie du Coran vers plusieurs langues étrangères (la traduction anglaise est déjà achevée). La Fondation apporte un soutien financier à l'Association des Handicapés koweitiens pour l'impression de certaines publications. 4. Les Prix décernés par la Fondation: 4.1. Le Prix du Koweït: L'un des objectifs de la Fondation est d'aider à la reconnaissance des travaux accomplis par les scientifiques koweitiens et arabes: dans ce but, elle leur octroie des prix. L'un des ces prix revient à un ressortissant koweitien et le second à un autre ressortissant arabe. Le prix remis recouvre différents domaines, tels que les sciences dures, les sciences appliquées, les sciences économiques et sociales, les arts et la littérature et récompense des travaux traduits ou pas. Ainsi, l'un des numéros a traduit le texte The Elegant Universe [Al-Kawn al-anîq] de Brian Greene. Le traducteur est Abd al-Halîm Mansour. 11 © Transeuropéennes, Paris - 2010 L'analyse des profils des gagnants entre 2005 et 2009 nous permet de réaliser le graphe suivant: Sc. Dures et appliquées SHS Proportion des travaux de recherche primés entre 2005 et 2009 par le prix du Koweït (FKAS) selon les catégories Nous pouvons noter une augmentation concernant la remise des prix dans le domaine des SHS: jusqu'en 2007, aucun prix n'avait été remis dans ce domaine12. En 2007, un prix est remis à un chercheur syrien, Mohammed Radwan Al-Dayah, pour ses recherches en Littérature andalouse, deux prix sont remis en 2008 dans la catégorie "Patrimoine et civilisation" et un prix est remis en 2009, pour la catégorie "Urbanisme". Le graphe montre que malgré l'augmentation de prix dans la catégorie qui nous intéresse, le pourcentage de recherches récompensées en SHS est encore bien inférieur à celui des autres catégories. 4.2. Le Prix du salon du livre du Koweït: Par le biais de la remise de ce prix, la Fondation déclare soutenir le travail des auteurs, des traducteurs et les maisons d'édition – au Koweït et dans l'ensemble des pays arabes. Il consiste en la remise d'un prix dans différents domaines: - Le Prix du meilleur livre écrit sur le Koweït. - Le Prix du meilleur ouvrage scientifique écrit en langue arabe. - Le Prix du meilleur ouvrage scientifique traduit vers la langue arabe. - Le Prix du meilleur ouvrage d'arts, de littérature et de sciences humaines écrit en langue arabe. - Le Prix du meilleur ouvrage d'arts, de littérature et de sciences humaines traduit vers l'arabe. - Le Prix du meilleur ouvrage de littérature de jeunesse arabe. Détail des catégories et des chercheurs primés entre 2005 et 2009 disponible à l'adresse suivante: http://www.kfas.com/arabic_pages/ga_awardsandprizes.html, consulté le 24 octobre 2010. 12 © Transeuropéennes, Paris - 2010 L'édition 2009 n'a pas récompensé de traduction dans le domaine des arts, de la littérature et de sciences humaines mais a remis un prix pour la traduction d'un ouvrage scientifique sur l'architecture géotechnique à Abdallah Al-Mouhaidib. L'édition 2008 a récompensé, pour le domaine des sciences humaines, Mohammed Hilel pour un ouvrage traduit sur la "traduction et le sens". Celle de 2006 a récompensé un ouvrage traduit à plusieurs mains, sur l'Histoire de l'écriture, dont l'auteur est Anne-Marie Christin13. Le montant du prix est de 5000 dinars koweitiens, i. e. 13.000 €. La Fondation offre également 2000 dinars, i. e. 5000 € à l'éditeur de l'ouvrage primé. Nous avons pu rencontrer Khaled al-Roubayaan, directeur de la section culturelle de la Fondation. Voici la transcription de l'entretien effectué: Q: Parlez-moi des livres traduits vers l'arabe ou de l'arabe vers d'autres langues. R: nous traduisons beaucoup d'ouvrages de l’anglais vers l'arabe et la plupart sont des livres scientifiques. Nous avons commencé cela depuis 1992. Mais le seul ouvrage traduit de la langue arabe vers les autres langues, est l'encyclopédie de Coran14; nous l'avons déjà traduit en anglais. Ce projet est né sous l'impulsion de l'émir Jaber Al-Ahmad Al-Sabah (1977-2006) à destination des populations non arabophones. Les traductions se font avec l'aide des ambassades de l'Etat du Koweït dans les pays concernés. Q: Qui décide des ouvrages à traduire? Qui décide des aides à la traduction? Et selon quels critères? R: Notre Fondation finance de nombreux projets. En qui concerne le choix d'un ouvrage, nous le sélectionnons d'abord en fonction du sujet abordé et des besoins des bibliothèques arabes. Nous nous faisons aider par des spécialistes arabes, en leur demandant leur avis concernant cet ouvrage. Cependant, tous les spécialistes n'acceptent pas de nous répondre et bien que nous demandions l'avis d'environ 1000 chercheurs arabes, nous ne recevons que très peu de réponses à nos interrogations. Après cette première étape de consultation, nous effectuons – ou pas – la traduction. Q: Quelle est votre position par rapport aux droits d'auteur? R: Soit nous, soit les maisons d'édition partenaires s'occupent de la question des droits d'auteur. Bien évidemment, nous citons le nom de l'auteur sur la couverture du livre, ainsi que celui du traducteur. Une fois les droits d'auteur obtenus, nous avons le droit de faire censurer ou de faire retirer des passages qui ne conviennent pas à notre culture. La liste des lauréats suivant les éditions est disponible sur le lien suivant: http://www.kfas.com/arabic_pages/ga_awardsandprizes.html, consulté le 24 octobre 2010. 14 Outre l'aspect religieux de cette œuvre, on entend également par "Encyclopédie du Coran" un certain nombre de dictionnaires concernant l'environnement, la faune et la flore tels qu'ils sont présentés par l'islam, etc. 13 © Transeuropéennes, Paris - 2010 Q: De quelle(s) langue(s) traduisez-vous le plus? R: Nous traduisons majoritairement de l'anglais. Q: Comment choisissez-vous vos traducteurs et comment évaluez-vous le travail de traduction? R: Nous choisissons des traducteurs qui se trouvent à l'intérieur ou à l'extérieur du pays, après réunion d'un comité et sur la base de leurs curriculum vitae. Il arrive que ce soit la maison d'édition qui propose un traducteur. Après remise de la traduction, un comité de révision juge de la qualité du texte. Q: Quelle est la nature des livres traduits? Comment sont-ils présentés (design de la couverture, etc.)? Où peut-on trouver les livres que vous traduisez? R: Nous traduisons principalement des ouvrages scientifiques et notre logo figure sur la couverture de ces ouvrages. Nous sommes une institution à but non lucratif; nous offrons aux instances de l'Etat et aux organisations privées les ouvrages que nous avons traduits et vous pouvez acheter nos livres dans la plupart des librairies koweitiennes. Nous participons également à des foires internationales du livre. Q: Certains de vos livres traduits ont-ils été réédités? Et existe-t-il des ouvrages bilingues? R: Non, aucun des livres que nous avons traduits n'a été réédité. Nous ne publions pas d'ouvrages bilingues mais en revanche certaines de nos encyclopédies le sont. Q: Quelle est la réaction des critiques par rapport à vos livres? R: Nous bénéficions d'un très large soutien de la part des critiques. Bien entendu, quand vous traduisez un ouvrage de grande importance dans un secteur clé vers l'arabe, pour faciliter le travail au lectorat arabe, votre travail est très apprécié. Q: Formez-vous des traducteurs, par le biais de résidences de traduction par exemple? Remettez-vous des Prix de traduction? R: Non, nous ne formons pas les traducteurs avec lesquels nous travaillons. Nous sommes l'une des Fondations du Koweït qui distribuons le plus de prix, y compris le Prix de la meilleure traduction (voir ci-dessus). C. Le Centre Al-Babtain pour la traduction : Ce centre appartient à la Fondation du prix Abdulaziz Saud Al-Babtain pour la créativité poétique qui a fondé ce centre en 2004 dans le but de contribuer au soutien du mouvement de traduction des langues étrangères vers l'arabe et vice versa. © Transeuropéennes, Paris - 2010 Le centre Al-Babtain déclare encourager les maisons d'édition à traduire des œuvres majeures, par le biais d'accords signés avec elles. Il leur fournit le soutien financier pour la traduction et la publication d'ouvrages étrangers traduits vers l'arabe. Le centre dit vouloir "interagir avec son époque, dialoguer avec les civilisations et s'enrichir des connaissances dont manque le monde arabe afin de fournir à la nation arabe [oumma] les facteurs d'une renaissance [nahda]". Dans cette optique Il considère que la traduction est essentielle pour toutes les cultures et pour la promotion des échanges culturels. Procédés de mise en œuvre de la politique de traduction du centre: Le centre passe des accords avec de jeunes maisons d'éditions privées pour la traduction de certains ouvrages, choisis en accord avec "les orientations du centre", c'est-à-dire que les traductions d'œuvres poétiques et littéraires sont privilégiées, au détriment d'ouvrages politiques d'actualité. Le centre déclare vouloir combler le manque qui existe, dans ce domaine, dans le paysage éditorial arabe. Il octroie ensuite une certaine somme à la maison d'édition qui comprend la traduction, la publication et la diffusion du texte choisi, y compris l'achat, par la maison d'édition, des droits de l'œuvre à traduire. Les gains résultant de la vente des ouvrages sont remis à la maison d'édition. Le centre privilégie la traduction d'œuvres historiques, politiques, ou encore scientifiques et technologiques (peu ou presque pas d'œuvres littéraires). Il estime que la traduction de ces œuvres aide à combler le manque de connaissances des peuples arabes. Il faut souligner que cette institution met en ligne, en accès gratuit, ses publications – y compris les traductions – consultables par les internautes qui n'ont même pas besoin, pour cela, d'ouvrir un compte ou une session. Même si nous ne disposons pas du nombre de livres diffusés en dehors des pays du Golfe, la fondation Al-Babtain dispose de plusieurs bureaux dans le monde arabe, dont un au Caire (qui supervise les activités de la fondation en Egypte et au Soudan), un à Amman en Jordanie (pour l'ensemble du Machrek) et un autre à Tunis (pour le Maghreb). Entretien avec Elias Al-Barrage, directeur du Centre Al-Babtain pour la traduction. Voici la transcription de l'entretien effectué: Q: Pourquoi avoir ouvert ce centre? Pouvez-vous me présenter le projet de traduction? R: Nous avons créé ce centre pour donner un coup de pouce au mouvement de traduction et combler les besoins du monde arabe. Le projet de traduction s'est fait dans deux directions: de l'arabe vers les langues étrangères et des langues étrangères vers l'arabe. En ce moment, nous ne traduisons toutefois que vers l'arabe, plus précisément de l'anglais. La plupart de ces ouvrages appartiennent au domaine des sciences humaines et sociales et jusqu'à © Transeuropéennes, Paris - 2010 aujourd'hui, nous avons traduit vingt-quatre ouvrages de l'anglais vers l'arabe, comme par exemple Muslims in Europe de Jorgen S. Nielsen, traduit par Walid Chemit. Q: Quel accès à la production intellectuelle dans les autres langues? R: Nous suivons au fur et à mesure la parution de nouveaux ouvrages dans les pays occidentaux, en coopération avec les maisons d'édition qui se chargent de sélectionner les livres intéressants pour le monde arabe et que nous n'avons pas. Q: Qui décide des ouvrages à traduire? Et qui décide des aides à la traduction? Sur quels critères? R: Nous proposons, ainsi que nos partenaires parmi les maisons d'éditions, un certain nombre d'ouvrages. Celui qui finance est celui qui a le dernier mot, c'est-à-dire M. Abdul-Aziz al-Babtain. Les livres sélectionnés doivent enrichir le paysage intellectuel arabe et combler un manque. L'un de ces ouvrages, édité en partenariat avec Dar al-Saqi, est par exemple The Public Good, The Problem of the Individual and Society in The Modern Age, de Amitai Etzioni, traduit par Nada Assayed15. Q: Comment traitez-vous les questions des droits d'auteur? R: Nous nous mettons d'accord avec la maison d'édition ou avec l'auteur pour l'achat des droits. Bien évidemment, l'achat de ces droits nous donne la possibilité de censurer ou de supprimer les passages qui ne sont pas en adéquation avec la culture du pays. Q: Comment sont présentés les livres traduits? Quels sont les mécanismes de contrôle de la qualité des traductions? R: Nous mettons le nom de la Fondation al-Babtain ainsi que celui de la maison d'édition partenaire sur la couverture. Les noms de l'auteur et du traducteur figurent aussi sur cette même couverture. En ce qui concerne les mécanismes de contrôle, les ouvrages sont révisés par la maison d'édition partenaire. Les textes nous sont ensuite remis et nous nous réservons le droit d'accepter la traduction, qui est jugée par notre propre comité de révision. Celui-ci peut à son tour remettre en cause la qualité du travail effectué. Q: Editez-vous des ouvrages bilingues? R: Non, pas pour l'instant. C'est toutefois une idée à développer. Q: Sur quels critères choisissez-vous vos traducteurs? R: En ce qui concerne le traducteur, nous ou la maison d'édition partenaire le choisissons par rapport à sa réputation dans le milieu de la traduction. Quant L'ouvrage cité par Al-Babtain ne figure pas sous ce titre dans la biographie d’Amitai Etzioni (dont l'orthographe a par ailleurs été modifiée). Il se peut que le véritable titre du livre soit The common good (Cambridge, MA: Polity Press, 2004). 15 © Transeuropéennes, Paris - 2010 aux jeunes traducteurs, encore peu connus dans le milieu, nous étudions attentivement leurs curriculum vitae et nous lui demandons, en guise d'examen, de traduire pour nous un petit manuscrit. Tous nos traducteurs actuels se trouvent hors du Koweït. Q: Formez-vous des traducteurs? Et comment les rémunérez-vous? Avez-vous des Prix de traduction? R: Nous ne nous occupons ni de la formation ni de la rémunération des traducteurs: notre mission est de financer le projet. C'est la maison d'édition qui s'en charge. Mis à part le financement, notre mission consiste également en la révision des traductions (je fais moi-même partie de ce comité). Quant aux Prix de traduction du centre, c'est un projet auquel nous réfléchissons. Il fera partie de l'un des Prix de la Fondation. Q: Comment vos ouvrages traduits sont-ils reçus par la critique? R: Notre travail est très bien accueilli par le milieu de la critique. Notre but est non lucratif: nous œuvrons en vue d'encourager les mouvements de traduction. Q: Où peut-on trouver vos ouvrages traduits? R: Dans toutes les librairies locales et les bibliothèques (au Koweït). Avec les maisons d'édition partenaires, nous participons à des foires internationales du livre. Q: Rééditez-vous des ouvrages? R: Non, cela ne nous est pas encore arrivé. D. Le Centre de Recherches et d'Etudes koweitien : Le centre a été créé par décret princier en 1992. Ses missions sont les suivantes : Mener des études relatives à l'histoire de l'Etat du Koweït et à sa situation politique, économique, sociale et patrimoniale ainsi que ses relations avec les Etats voisins. Publier ces études aussi bien au niveau local qu'à l'extérieur du pays. - Fonder une bibliothèque spécialisée et qui abriterait les documents relatifs à l'Etat du Koweït, en différentes langues. - Collecter les documents et études relatifs à l'invasion du Koweït par l'Iraq. - Mettre en place une veille pour recueillir tous documents publiés sur le Koweït. Faire connaître l'Etat du Koweït – localement et internationalement – notamment par la publication d'une revue spécialisée et par l'organisation de conférences, expositions, et d'autres activités médiatiques. Dans le cas de ce centre, la traduction se limite donc à des domaines spécialisés, tous relatifs au Koweït. Nous avons pu interviewer Abdallah Youssef Al-Ghunaim, président du Centre. Voici la transcription de notre entretien: © Transeuropéennes, Paris - 2010 Q: Quelle est la mission de votre institution ? R: Après la libération du Koweït, nous avons eu besoin de faire connaître la vérité dans le monde. L'ouvrage Kuwait Statehood and Boundaries16 a été traduit en dix langues (anglais, français, russe, chinois et d'autres langues). Nous l'avons traduit grâce à l'aide de l'ambassade de l'Etat du Koweït dans les différents pays concernés. Q: Comment choisissez-vous vos traducteurs et comment évaluez-vous le travail de traduction? R: Concernant le choix des traducteurs, nous nous mettons d'accord avec les maisons d'éditions avec qui nous travaillons. Pour être sûrs, nous demandons un CV du traducteur et nous vérifions la connaissance et l'expérience du traducteur dans le domaine sur lequel nous travaillons. Une fois les ouvrages traduits, s'ils sont traduits à l'extérieur du pays, l'ambassade se charge de les faire réviser par un comité spécialisé et si les ouvrages sont traduits au Koweït nous faisons faire le travail de révision par un autre comité. Il arrive que l'auteur participe à la traduction de son ouvrage, cela montre que les auteurs sont soucieux du travail de traduction. Cela a par exemple été le cas de l'ouvrage The Origins of Kuwait17 de B.J. SLOT. Q: Comment choisissez-vous les livres à traduire? Selon quels critères? R: Nous choisissons un livre en fonction de son importance académique et politique, pour répondre aux allégations irakiennes. Bien évidemment, ces ouvrages sont objectifs. Ainsi, nous avons par exemple jugé utile de faire traduire en plusieurs langues un ouvrage intitulé Les débouchés maritimes de l'Irak [traduction personnelle]. C'est un ouvrage éminemment politique. Nous avons un comité qui se réunit pour choisir les ouvrages à traduire. La première étape consiste, pour les livres dont la langue originale est l'arabe, d'effectuer la traduction vers l'anglais. Nous traduisons ensuite vers les autres langues. Q: Qui octroie les aides à la traduction? R: Nous finançons nous-mêmes les traductions. Nous nous mettons d'accord avec les maisons d'édition pour le choix des traducteurs. Q: Quelle est votre position par rapport aux droits d'auteur? R: En ce qui concerne les ouvrages de langue arabe, nous contactons les auteurs ou la maison d'édition pour obtenir l'accord. En ce qui concerne les ouvrages étrangers, c'est l'ambassade du Koweït qui s'en occupe. Q: Où peut-on trouver vos ouvrages? R: Nous avons une bibliothèque importante, où vous pouvez les trouver. Vous pouvez également les trouver dans les bibliothèques de toutes les ambassades 16 17 Le titre original est Al-koweit woujoudan wa houdoudan, édité par le Centre. Le titre traduit est Nashaat alKoweit [en arabe] et L'origine du Koweït en français. © Transeuropéennes, Paris - 2010 du Koweït. Par ailleurs, nous participons à des foires internationales. Evidemment, le prix que nous demandons est purement symbolique: notre but n'est pas lucratif. Si vous venez dans nos établissements, nous vous offrons ces livres à titre gracieux. Q: Certains de vos ouvrages ont-ils été réédités? R: Oui, certains de nos ouvrages l'ont été18. Cela dépend de la demande. Franck Mermier souligne la vitalité du secteur public koweitien en matière de diffusion du livre mais explique qu'en revanche, l'édition privée koweitienne est, elle bien plus modeste – les maisons d'édition Souad Al-Sabah et Dâr Qurtâs font partie des rares acteurs du paysage éditorial privé koweitien19. 3. Les Emirats Arabes Unis : Aux Emirats Arabes unis, il existe deux principaux programmes de traduction. Le premier est le programme "Kalima" qui est dirigé par le Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine et qui se situe à Abu Dhabi, la capitale des Emirats Arabes Unis. Le deuxième est le programme "Tarjem" qui est mis en place par la Fondation de Mohammed bin Rashid Al Maktoum à Dubaï. Ce dernier programme vient d'être suspendu – officiellement pour des raisons d'organisation et de révision de sa stratégie"20. A. Le Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine : Le Conseil d'Abu Dhabi est fondé en octobre 2005, il est l'une des organisations les plus importantes du gouvernement d'Abu Dhabi. Sa mission consiste à protéger la culture et le patrimoine de la ville. Ce Conseil est présidé par le Cheikh Sultan Al Nahyan et il obéit à une stratégie mise en place par un comité d'experts de l'Unesco, en partenariat avec des experts locaux. Il prône la protection du patrimoine des Emirats, le dialogue des cultures et a l'ambition de devenir une organisation pionnière non seulement dans la région, mais également au niveau international. Voici les projets mis en place par le Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine : o Le prix du Cheikh Zayed pour le livre (www.zayedaward.com) : Ce prix est délivré à des intellectuels du monde arabe, dans les domaines des arts et des sciences humaines. Il consacre des chercheurs qui contribuent aux domaines de l'édition, de Les ouvrages réédités par le Centre de Recherches et d'Etudes koweitien figurent dans le tableau Excel qui accompagne la présente étude. 19Franck Mermier, Le Livre et la Ville, Beyrouth et l'édition arabe, Actes Sud, Arles, 2005, p. 113-114. 20 D'après le site Internet de la Fondation Mohammad Bin Rashid Al Maktoum: http://www.mbrfoundation.ae/English/Culture/Pages/Turjuman.aspx, consulté le 05 octobre 2010. 18 © Transeuropéennes, Paris - 2010 l'écriture et de la traduction et encourage la traduction "d'œuvres majeures vers la langue arabe". Le prix accorde également une importance particulière à la littérature de jeunesse. Le prix de traduction de l'édition 2008 a été remis au jordanien Fayez Al-Suyyagh pour sa traduction de Sociology d'Anthony Giddens. o Le salon international de livre d'Abu Dhabi (www.adbookfair.com) : Ce salon est financé par l'émirat d'Abu Dhabi. La première manifestation de ce type a eu lieu en 1990. Le salon du livre de 2008 a été organisé par un comité conjoint composé d'experts issus du Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine et de spécialistes de la Foire du livre de Francfort. Ce groupement est connu sous le nom d'une société, "Kitab" [livre]. Outre l'organisation du salon du livre d'Abu Dhabi, il œuvre à faire de cet évènement le "point de rencontre des éditeurs de l'Orient et de l'Occident afin qu'ils échangent leurs points de vue et réfléchissent à des possibilités de travail commun". Le but déclaré de "Kitab" est de faire d'Abou Dhabi "un centre d'édition pour le monde arabe". En mars 2010, "Kitab" a organisé le 7e congrès international pour les droits de l'édition21 et a accordé une attention particulière à la question de la piraterie au sein du marché du livre dans le monde arabe. o Le programme Kalima (www.kalima.ae) : Le Conseil d'Abu Dhabi a lancé le projet non lucratif Kalima pour financer la traduction, l'édition et la diffusion d'œuvres classiques et contemporaines, à partir de langues étrangères vers l'arabe. Le programme Kalima réunit donc auteurs, traducteurs, éditeurs et diffuseurs. Chaque année, 100 titres sont choisis pour être traduits dans le cadre de ce programme. Kalima concentre principalement ses activités sur les domaines suivants : - Le financement de la traduction vers l'arabe d'un certain nombre de titres, leur édition et leur publication. La coopération avec des maisons d'édition connues dans le monde arabe. - Renforcer et soutenir les circuits de distribution du livre. - Soutenir l'industrie du livre dans le monde arabe et essayer de grouper les efforts dans ce sens. - Investir dans le secteur de la traduction en encourageant la formation de traducteurs. Plus d'information sur ce congrès sur le site du Conseil d'Abu Dhabi pour la Culture et le Patrimoine [page disponible en arabe]: http://www.adach.ae/ar/news/conference.ended.aspx, consulté le 05 octobre 2010. 21 © Transeuropéennes, Paris - 2010 Sur cette base, Kalima se charge de: - Sélectionner les titres à traduire (voir ci-dessous) ; - Financer les maisons d'édition arabes qui font traduire, impriment et diffusent le livre traduit ; - Soutenir les initiatives de distribution et de diffusion de livre ; - Faire appel à des traducteurs pour les projets futurs, les former dans le cadre de formations universitaires ; - Soutenir la distribution du livre en langue arabe dans le monde arabe. Modalités de choix des titres à traduire: - Etablir une liste des ouvrages connus – et reconnus – dans tel ou tel domaine, d'ouvrages ayant reçu des prix ou d'ouvrages ayant été très largement vendus. - Comparer les manques en matière de traduction avec cette liste. - Classer les ouvrages "candidats" en catégories: œuvres classiques/modernes/contemporaines, Lettres, Sciences, etc. - Trier et sélectionner les ouvrages à traduire. A savoir: Kalima repose, selon les déclarations de ses représentants, sur "le manque de traductions de qualité constaté sur la scène intellectuelle arabe". Il fait référence à "l'âge d'or" du monde arabe, durant lequel, en parallèle aux siècles "sombres" [de l'ignorance] de l'Europe, les "intellectuels et les bibliothèques arabes" étaient "pionniers dans la traduction, l'édition et la protection des trésors des sciences, de la médecine, de la philosophie et de la littérature" et où les traducteurs étaient très respectés. L'ambition déclarée de Kalima est de faire renaître cet "âge d'or de la traduction"22. Où trouver les livres traduits dans le cadre du projet Kalima? Les livres diffusés dans le cadre du projet Kalima sont principalement vendus dans les librairies des différents émirats ainsi que dans les pays du Golfe. 22 D'après le site du programme Kalima : www.kalima.ae, consulté le 05 octobre 2010. © Transeuropéennes, Paris - 2010 A titre indicatif, voici le tableau des langues d'origine de la première livraison de traductions du projet Kalima, pour un total de 100 livres : Langues d'origine Nombre de livres Langues d'origine traduits Nombre de livres traduits Anglais 52 Japonais 2 Grec ancien 4 Danois 1 Anglais ancien 3 Yiddish 1 Allemand 9 Russe 1 Français 10 Suédois 1 Latin 7 Norvégien 1 Italien 2 Grec 3 Chinois 2 Polonais 1 Source: www.kalima.ae Nous constatons donc que plus de 50% des ouvrages traduits le sont à partir de l'anglais, alors même que ce n'est pas la langue originale de l'ouvrage (la sélection 2007 recense par exemple un ouvrage de Camus, à traduire vers l'arabe à partir de la version anglaise (The First Man) de son livre Le Premier homme23. D'autres exemples du même type sur le site du http://www.kalima.ae/new/candidatetitles_ar_32.php, consulté le 05 octobre 2010. 23 © Transeuropéennes, Paris - 2010 programme Kalima: Kalima a achevé de traduire 48 ouvrages sur les 100 sélectionnés en 2007. Voici la répartition détaillée de ces traductions par domaines: Arts 30 Histoire et géographie Droit 25 20 Littérature 15 Sc. Naturelles et appliquées Psychologie et philosophie Religion 10 5 0 Selon Ali bin Timim, directeur du programme Kalima, dans une interview donnée le 21 mai 2010 au journal Alquds Al'arabiyya [interviewé par Fatima Atfa] : "notre choix d'ouvrage dépend de plusieurs critères, premièrement nous remarquons les ouvrages qui ont été sélectionnés pour l'obtention de prix prestigieux: le Nobel ou le Booker par exemple. Nous pouvons citer l'ouvrage de Herta Müller la lauréate du prix Nobel de littérature en 2009 avec son ouvrage qui s'intitule Atemschaukel [La bascule du souffle en français], nous avons choisi et traduit cet ouvrage avant même qu'il ne gagne le prix, et cela montre l'efficacité de notre travail pour le choix des ouvrages." Un entretien accordé par Moustafa Al-Slaiman à la revue Qantara le 16 avril 201024 montre que les choix des ouvrages à traduire ne se font pas par hasard. Al-Slaiman, responsable de la section de traduction allemande du projet Kalima est également enseignant en interprétariat du programme de traduction Germersheim à l'Université allemande Mainz, s'est notamment fait conseiller, pour le choix du livre de Herta Müller, par Michael Maar, membre de l'Académie allemande de langue et de littérature, équivalent allemand de l'Académie française, par Klaus Reichbert, président de l'académie ainsi que d'autres noms prestigieux du milieu littéraire et académique allemand. Al-Slaiman confie également que la traduction des classiques n'est pas une priorité et qu'une attention particulière est accordée aux jeunes écrivains, jusque là négligés. Concernant la question de la censure, il affirme que le choix de supprimer certains Article disponible sur le lien suivant: www.qantara.de/webcom/show_article.php/_c-310/_nr-747/i.html, consulté le 24 octobre 2010. 24 © Transeuropéennes, Paris - 2010 passages – critiques vis-à-vis de la religion ou qui abordent des sujets considérés "sensibles" dans le monde arabe tels que l'homosexualité – est discuté avec l'auteur et/ou l'éditeur, mais que, souvent, le texte n'est pas modifié, même s'il n'est pas compatible avec la culture du pays dans lequel il va être diffusé. Selon bin Timim, une attention particulière est accordée à la collaboration et au partenariat avec différentes maisons d'édition et centres culturels dans le monde entier: "nous avons des accords avec l'université Johannes Gutenberg en Allemagne, mais également avec le centre culturel indo-arabe de New Delhi, ainsi que l'Institut oriental de Rome et différentes maisons d'édition néerlandaises et suisses. Nous sommes actuellement en train de nous tourner vers d'autres pays comme la France et la Corée". Toujours selon Ali bin Timim, "le projet Kalima vise à soutenir les traducteurs arabes, qui ont la possibilité de proposer eux-mêmes des ouvrages à traduire. De plus, les éditeurs arabes ont aussi leur place dans le projet puisqu'une initiative leur est consacrée : "Jossur" [ponts], qui vise à tisser des relations entre eux et les maisons d'édition mondiales. Dans le cadre de "Jossur", chaque livre traduit vers l'arabe perçoit la somme de 2200 euros pour l'impression de 5000 exemplaires". Ce programme est exclusivement réservé aux maisons d'édition. En réponse à une question portant sur le choix des traducteurs, Ali bin Timim répond: "Nous n'avons pas de liste officielle des traducteurs sur laquelle se baser. Plusieurs institutions ont leurs propres listes, qu'elles refusent de nous communiquer. Nous choisissons nos traducteurs selon plusieurs critères et tous, sans exception, doivent passer un examen avant d'être habilités à traduire pour nous. Il existe dans le monde arabe des centaines de traducteurs qui n'ont pas eu la chance de traduire des ouvrages ; nous leur donnons cette chance. Nous avons par ailleurs contacté des traducteurs connus dans le monde arabe et nous leur avons demandé de former un groupe de traducteurs. C'est nous qui finançons ces formations. Une fois le traducteur sélectionné, nous lui envoyons des passages de l'ouvrage sur lequel nous voulons qu'il travaille. Ce travail est révisé par un comité qui accepte ou refuse de donner à traduire l'intégralité de l'ouvrage au traducteur". Plus loin, Ali bin Timim insiste sur l'apport de la traduction: ''lorsque nous parlons de traduction, nous parlons également d'opposition et d'acceptation de l'autre malgré ses différences. Le respect de l'autre ne vient pas seulement du partage de valeurs communes, mais également des différences […]". Autres institutions établies à Abu Dhabi : © Transeuropéennes, Paris - 2010 i. La Fondation pour la culture (Al-Mujamma' al-thaqâfi) met en ligne sur le site www.alwaraq.net des milliers d'œuvres sur les patrimoines arabe et islamique. Une parite de son travail est également consacré à la traduction et l'édition. ii. The Emirates Center for Strategic Studies and Research, fondé en 1994. Ces deux institutions culturelles publient des auteurs arabes et étrangers et occupent une place importante dans le paysage éditorial des Emirats. B. La Fondation de Mohammed Bin Al Maktoum (Dubaï) : 1. Le programme Tarjem : Le Programme Tarjem qui veut dire en français « traduis » à l'impératif, est un projet financé par la Fondation de Mohammed Bin Al Maktoum, vice-président des Emirats arabes unis, Premier ministre et dirigeant de Dubaï. Le programme Tarjem cherche à développer les processus de traduction dans le monde arabe en traduisant des œuvres étrangères vers l'arabe et inversement. Le programme cherche aussi à enrichir la bibliothèque arabe en traduisant les grandes œuvres mondiales dans les différents domaines. Le programme se concentre sur des ouvrages qui contribuent au développement économique du monde arabe. Par conséquent, les livres de gestion et d'administration viennent en première position. La Fondation reçoit des demandes des maisons d'édition à travers son site web. La demande doit inclure une liste de livres à traduire proposés par une maison d'édition. Les renseignements suivants doivent être renseignés avec la demande: Un résumé du livre. La biographie de l’auteur (pays d'origine, parcours (prix, certificats d'appréciation), etc.. Information sur les droits de traduction et de la maison d'édition originale. Une brève notice sur l'évaluation de la maison d'édition de la valeur du livre et de ce qu'il apportera au monde arabe. Une proposition de prix pour la vente du livre. Les demandes en ligne sont examinées, triées et examinées par une commission. Une fois la liste de livres approuvée, la Fondation signe un contrat avec la maison d'édition, en s'engageant à acheter 1500 exemplaires de chaque titre traduit. La maison d'édition s'engage à obtenir toutes les approbations nécessaires auprès des auteurs et éditeurs d'origine. En outre, la maison d'édition doit signer un accord avec le traducteur, spécifiant la date de © Transeuropéennes, Paris - 2010 remise de l'ouvrage. Ensuite, le script est examiné par le « comité de qualité » de la Fondation. S’il est approuvé, le script est renvoyé à la maison d'édition. En vertu du contrattype de la Fondation, les auteurs perçoivent 10% des recettes résultant des ventes totales de livres de la maison d'édition, y compris les 1500 exemplaires achetés par la Fondation. La sélection des œuvres à traduire : La Fondation accorde une attention particulière à la "traduction des principaux apports culturels publiés dans les autres pays arabes". La Fondation travaille également à "développer le niveau de transfert de connaissances en provenance de pays produisant des connaissances, en particulier en Amérique du Nord, les pays scandinaves et en Asie"25. Un réseau intellectuel arabe, des universitaires et des experts dans différents domaines sont en charge du processus de sélection et de développement de la stratégie de traduction. Les règles de la coopération entre la Fondation et les maisons d'édition : La Fondation a prévu une série de critères et de conditions, fixant ses relations avec les maisons d'édition: La Fondation ne travaille pas directement avec le traducteur ; il faut que ce dernier passe par une maison d’édition. Les maisons d'édition désirant s'associer à la Fondation doivent être certifiées et enregistrés dans leur pays d'origine. Les maisons d'édition doit avoir déjà traduit et publié au moins 10 livres. Les livres proposés par chaque maison d'édition ne doivent pas être plus de 20. 2. Le programme Tarjaman Le Programme Tarjaman veut dire en français « traducteur ». Lui aussi a été – temporairement – arrêté en 2010. Le programme vise à "élever la qualité de la traduction dans le monde arabe, en fournissant aux traducteurs la possibilité de se former ou d'obtenir une qualification supérieure, afin de produire des œuvres quantitatives et qualitatives correspondant aux attentes les plus élevées". Les objectifs du programme : Le programme vise à promouvoir la traduction dans le monde arabe par : L'augmentation du nombre de traducteurs hautement qualifiés et expérimentés. L'amélioration de la qualité des ouvrages traduits de et vers l'arabe. 25 www.mbrfoundation.ae/ : Consulter le 05 octobre 2010 © Transeuropéennes, Paris - 2010 La formation des traducteurs pour l'utilisation du système de "Computer Aid Translation (CAT)". Par le biais de Tarjaman, la Fondation offre des cours de formation dans les domaines de la gestion et des affaires. La Fondation offre aux candidats qualifiés la possibilité d'assister à une session de formation de six semaines et les initie aux outils de CAT. La Fondation couvre tous les frais de scolarité de la session, et ceux qui passent la session obtiennent le certificat de traducteur agréé. Pour avoir cette formation il faut remplir certaines conditions : Le candidat doit être titulaire d'un baccalauréat ou un diplôme équivalent. Le candidat doit avoir un minimum de deux ans d'expérience dans la traduction. Le candidat doit être citoyen de l'un des 22 pays de la Ligue des États arabes. Ces Etats sont l'Algérie, le Bahreïn, les îles Comores, Djibouti, l'Egypte, l'Irak, la Jordanie, le Koweït, le Liban, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, Oman, la Palestine, le Qatar, l'Arabie Saoudite, la Somalie, le Soudan, la Syrie, la Tunisie, les Émirats Arabes Unis et le Yémen. Une fois les demandes approuvées, les candidats doivent s'inscrire à la session de formation en s'engageant à assister à au moins 70% des conférences et à réussir les examens. Par ailleurs, la Fondation offre aux traducteurs arabes la possibilité d'obtenir un Master en traduction délivré par des universités arabes. Pour se qualifier, les candidats doivent répondre aux critères suivants : Titulaire d'un baccalauréat ou un diplôme équivalent. Avoir un minimum de deux ans d'expérience dans la traduction. Etre citoyen de l'un des 22 pays de la Ligue des États arabes. C. Département de la Culture et de l'Information (Sharjah): Le gouvernement de Sharjah et son département de la Culture et de l'Information organisent chaque année la remise de différents prix. Deux prix nous intéressent plus particulièrement: le premier est le prix de Sharjah – Unesco pour la culutre arabe; le second est le prix du salon international du livre de Sharjah. o Le prix de Sharjah - Unesco pour la culture arabe26: Même s'il ne s'agit pas à proprement parler d'un prix récompensant la traduction, le prix Sharjah - Unesco contribue toutefois à promouvoir la circulation de savoirs et le dialogue Voici le lien du site Web du prix: http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.phpURL_ID=35086&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html, consulté le 10 octobre 2010. 26 © Transeuropéennes, Paris - 2010 entre le monde arabe et le reste du monde. Dans cette optique, il récompense également des traducteurs tels, en 2008, Gaber Asfour, directeur du Centre National de Traduction égyptien ou encore, en 2009, Anna Parzymies, éditrice et universitaire polonaise spécialisée dans la culture arabe. o Le prix du salon international du livre de Sharjah27: Dans le cadre du salon de livre de Sharjah, plusieurs prix sont distribués, dont l'un récompense "le meilleur livre émirati traduit". Les conditions d'attribution sont les suivantes : - Les œuvres proposés doit être originales et doivent aborder des sujets inédits. - Les ouvrages proposés doivent être traduits vers l'arabe ou vers d'autres langues. - L'ouvrage doit avoir été publié depuis moins de 3 ans. - Il ne doit pas avoir été déjà primé. - Les droits d'auteurs doivent avoir été obtenus. 4. Le Sultanat d’Oman : Nous avons pu contacter par mail Ahmad Al Mueini, président du centre de traduction du Cercle culturel omani (voir ci-dessous). Il a accepté de nous fournir les extraits d'une étude qu'il a lui-même rédigée – en arabe – sur l'état de la traduction au Bahreïn28. De l'aveu même des spécialistes omanis, il n'existe pas de statistiques exactes relatives à la situation de traduction dans le sultanat d'Oman29, ce qui rend difficile le travail de recherche. Ajoutons à cela que les personnes contactées dans le cadre de cette étude (voir liste infra) n'ont répondu à aucune de nos sollicitations. Al Mueini distingue deux périodes importantes pour l'étude de l'état des mouvements de traduction au sein du sultanat d'Oman: - La première s'étend de 1970 à 2002: l'essentiel de la traduction est le résultat d'initiatives privées et d'efforts gouvernementaux dispersés. La plupart des traductions concernaient l'histoire, la géographie, l'état de l'agriculture, de la culture et du patrimoine omanis. C'est ainsi que le Ministère du Patrimoine et de la Culture publie, dans les années 1980 et 1990, un grand nombre de traductions d'ouvrages écrits par des chercheurs ou des explorateurs occidentaux, qui se sont intéressés à Oman. Quant aux initiatives privées, elles aussi s'intéressent en très grande majorité à ce qui est écrit sur Oman. Il y a cependant une exception: la traduction, en 1998, par Abdullah Habib, de l'ouvrage de Robert Bresson, Voici le lien du site Web de l'ensemble des prix remis à l'occasion de la tenue du salon du livre international de Sharjah: http://www.sdci.gov.ae/awards6.html, consulté le 10 octobre 2010. 28 L'étude d’Ahmad Al Mueini (2010) est soumise au droit d'auteur et ne peut être publiée sans l'autorisation de son auteur. Elle est jointe, en annexe, à la présente étude. 29 Abdullah Al-Hourasi, http://harrasi.blogspot.com/2008/07/blog-post_15.html, consulté le 10 octobre 2010. 27 © Transeuropéennes, Paris - 2010 Notes sur le Cinématographe. A part cela, quelques revues omanies publiaient, de temps à autres, des extraits d'ouvrages littéraires et culturels. - La seconde a commencé à partir de 2002. En effet, à partir de cette date, selon Al Mueini, la traduction "s'institutionnalise": en 2002, un "club de la traduction" est créé à l'université du Sultan Qaboos et la traduction d'ouvrages relatifs au Sultanat d'Oman se poursuit. En 2003, un ouvrage traduit par Abdullah Al Kindi, Nouveaux médias, nouvelle politique30 est publié. C'est à cette période que les traductions littéraires augmentent: en 2004, une anthologie poétique de la poétesse Nasrah Al Adawi est traduite de l'arabe vers l'anglais par le "club de la traduction" et en 2005 une traduction anglaise de la nouvelle Le goût de la patience31, signée Saleh Al Khemyassi, est publiée. Un effort est donc déployé pour traduire des auteurs du Sultanat vers l'anglais. Les principales organisations: A l'heure actuelle, les principales institutions qui se préoccupent de la question de la traduction sur la scène culturelle omanie sont les suivantes: A. Le club de la traduction: La création de ce groupe a été à l'origine d'une initiative lancée par des étudiants du département d'anglais de la faculté des Lettres et des Sciences Sociales de l'université Qaboos. Né en 2002, ce groupe s'intéresse aux pratiques estudiantines de la traduction. Le club de la traduction organise des formations du soir en traduction générale et en traduction littéraire, organisées par des membres du club, soutenus par des professeurs du département de langue et de littérature anglaises. Des conférences sont également organisées, au cours desquelles les membres du club interviennent au sujet de leur expérience dans le domaine de la traduction, des problèmes auxquels ils sont confrontés et des procédés mis en œuvre en vue de les contourner. Le club organise par ailleurs, une fois par an, un évènement intitulé "la semaine de la traduction" au cours de laquelle des conférences sont données et des films, traduits par le club, projetés. Le club de la traduction a également lancé, en 2005, un forum en ligne sur la traduction32. Autre initiative importante: le club a mis sur pied différents projets visant à encourager ses membres à pratiquer la traduction, tels: "le projet de la littérature chinoise", "le projet de la littérature indienne", "le projet de la littérature africaine", "le projet de la littérature de jeunesse", "le projet de la Le titre et la langue originaux de cet ouvrage ne sont pas fournis par Al Mueini. En arabe dans le texte: Mazaq al sabr. D'autres traductions citées par Al Mueini (de et vers l'arabe sont recensées dans le tableau Excel joint à la présente étude. 32 A la date de notre dernière consultation du site (www.transqu.net/vb), nous avons découvert que celui-ci n'était plus opérationnel. 30 31 © Transeuropéennes, Paris - 2010 littérature imaginaire scientifique" et "le projet de la littérature populaire omanie". Le club a réussi à se faire connaître hors du cercle universitaire en publiant des articles dans des revues omanies et arabes. B. Autres groupes universitaires: Après le club de la traduction, d'autres groupes estudiantins ont vu le jour, tels "le groupe de la traduction" de l'université des Sciences Appliquées en 2007, "le groupe de langue anglaise et de traduction" de l'université Sohar en 2008, "le groupe de traduction" de l'université Nizwa, également en 2008. Ces groupements universitaires organisent des séminaires autour de la traduction et ont pour objectif d'encourager les étudiants à pratiquer la traduction. Ainsi, le groupe appartenant à l'université Nizwa organise lui aussi une "semaine de la traduction" au cours duquel un film étranger est projeté et traduit par le groupe. C. Le centre de traduction, dépendant du Cercle culturel omani: Le centre de traduction du cercle cultuel omani a été créé le 12 avril 2008 et ses activités ont cessé en 200933. Il avait pour objectifs d'encourager la "traduction culturelle" et l'un de ses projets était d'établir une base de données à destination des traducteurs omanis, recensant les textes traduits ainsi que les textes à traduire. Le centre projetait également l'organisation d'un concours annuel de traduction. Les revues: a) Les revues généralistes: Voilà pour ce qui est des principales institutions omanies qui s'occupent de la traduction. Il nous faut cependant signaler que certaines revues publient des extraits de traductions littéraires, tels: Le supplément "Chouroufat" du journal Oman. La revue trimestrielle Nizwa (www.nizwa.com). L'un des textes traduits dans le numéro 61 (janvier 2010) est celui de Maurice Maeterlinck, Le Miracle de Saint-Antoine. Le journal Al Zaman, qui consacre 2 pages, tous les mercredis, à la publication de traductions littéraires. La revue trimestrielle Al Thaqafiyyah, publiée par le centre du Sultan Qaboos pour la culture islamique. 33 Le supplément hebdomadaire "Afaq" du journal Al Chabibah. Officiellement, pour des "raisons administratives et de gestion". © Transeuropéennes, Paris - 2010 Le supplément hebdomadaire "Achria" du journal Al Watan. Toutes les revues n'étant pas en ligne ou ne publiant pas sur Internet l'intégralité de leurs articles, nous ne donnons, pour chacune d'entre elles, des exemples de publications que lorsque nous en avons trouvé. b) Les revues spécialisées: Aux côtés de ces revues, plutôt générales, nous devons également signaler la publication de trois revues spécialisées sur la traduction: Le supplément "Al Jissr" [Le pont]. Le club de traduction de l'université Qaboos a lancé, en septembre 2007, "Al Jissr". Cette publication est préparée par les étudiants, membres du club, sous la direction d'un académicien spécialiste de la traduction. "Al Jissr" était publié par le journal "Oman", dans le suplément "Chouroufat". Il était spécialisé dans la traduction et publiait des traductions littéraires, des entretiens avec des traducteurs ainsi que des articles sur la traduction. "Al Jisr" a cessé de paraître en novembre 2008 puis a revu le jour moins d'un an plus tard, en juillet 2009. Publié cette fois dans la revue "Al Chabibah", il est l'objet d'un partenariat entre le club de la traduction et le centre de traduction du cercle culturel omani. Moins orienté vers le milieu universitaire, il cherche cette fois à attirer davantage les académiciens et les traducteurs confirmés. Il publie cette fois davantage de traductions scientifiques et techniques que de traductions littéraires. Le supplément "Beacon". Créé en novembre 2008, il paraît en anglais et il est spécialisé dans la traduction de la littérature omanie vers l'anglais. Il est édité une fois par mois par l'association omanie du livre et par le journal "Times of Oman". "Beacon" a pour objectif de faire connaître la littérature omanie auprès des étrangers vivant dans le sultanat. Le supplément "Qiraat" [Lectures]. A partir de juillet 2008, il est publié, une fois par semaine, dans le journal "Oman". A partir de mai 2010, il est intégré au supplément "Chouroufat". Préparé par le traducteur Ahmad Chafii, le supplément publie des traductions de textes littéraires et d'ouvrages étrangers. c) Autres diffusions: Par ailleurs, le traducteur Ahmad Chafii que nous citons ci-dessus a organisé, en partenariat avec la radio omanaise, deux émissions consacrées à la traduction. La première est "Voix d'ailleurs" [Aswat min hounak], qui a commencé en 2006 et dont le thème tourne autour d'un poème du monde. La seconde est "Autres écritures" [Kitabat oukhra], qui a © Transeuropéennes, Paris - 2010 commencé en 2008 et qui s'est arrêté la même année. Elle tournait autour de la traduction d'articles, de textes et de débats internationaux. Le chercheur français Franck Mermier souligne que le nombre très limité d'éditeurs privés omanis empâche les auteurs modernistes du Sultanat de publier leurs écrits. L'un d'entre eux est Roya Publishing, maison d'édition fondée en 1994 par Hâtim Al-Tayya34 d) Prix et concours: Jusqu'à récemment, le sultanat d'Oman ne comptait pas de prix pour la traduction. Voici ceux qui existent à l'heure actuelle: - Le premier prix omani récompensant la traduction a été créé en 2005 par l'université du Sultan Qaboos. Il est réservé au milieu estudiantin et récompense les traductions littéraires. - Le forum littéraire d'Oman a également mis en place un concours et la remise d'un prix annuel récompensant les traductions littéraires. - Le prix le plus important était celui du centre de traduction du cercle culturel omani, qui avait pour objectif d'encourager la traduction d'ouvrages à partir de l'anglais, du français et de l'espagnol vers l'arabe. Ce prix a cessé en même temps que le centre de traduction. - D'autres prix, non officiels, existent. Ils récompensent principalement des étudiants et l'un d'entre eux, le "concours de traduction mensuel" était organisé par le forum du club de traduction. Le comité du concours choisissait trois textes que les candidats – issus de tout le monde arabe – traduisaient. Un comité composé de cinq traducteurs jugeait ensuite la traduction. Ce prix a duré de janvier 2007 à février 2008. Le deuxième prix non officiel est celui organisé depuis 2008 par la faculté des Sciences Appliquées de l'université de Sohar. Les modalités de jugement sont les mêmes mais le concours est exclusivement réservé aux étudiants faisant partie de la faculté. e) La formation des traducteurs omanis: Jusqu'en 1998, il n'existait aucune formation de traduction, à l'exception des départements de langue anglaise au sein des facultés et des universités qui posaient quelques fois les problématiques relatives à la traduction. En 1998, l'institut "Polyglotte" a mis en place des cycles longs de formation à la traduction. Ce n'est qu'en 2003 que le premier programme universitaire consacré à la traduction a vu le jour dans le sultanat d'Oman: il s'agit d'une licence de traduction arabe34 Franck Mermier, Le Livre et la Ville, Beyrouth et l'édition arabe, Actes Sud, Arles, 2005, p. 112. © Transeuropéennes, Paris - 2010 anglais à l'université Qaboos. En 2004, l'université omanaise Dhofar a également mis en place une licence de traduction arabe-anglais, suivie, en 2005, par l'université Sohar. Toujours en 2005, l'université Nizwa a mis en place une licence de langue et de traduction anglaises, une licence de langue et de traduction françaises ainsi qu'une licence de langue et de traduction allemandes. Un diplôme de Master en traduction a vu le jour à l'université Qaboos en 2006 et la faculté "Al Buraimi" a créé une licence de langue et traduction anglaises en 2010. f) Manifestations organisées autour de la traduction: Selon Al Mueini, l'augmentation des conférences autour de la traduction dans le sultanat d'Oman montre l'intérêt croissant du pays pour la traduction, même si le nombre de traducteurs omanis est encore très peu élevé: - La conférence annuelle du club de traduction, organisée par le club de traduction de l'université Qaboos dans le cadre de la "semaine de la traduction" mentionnée ci-dessus. - La conférence du dialogue entre les cultures et les civilisations, organisée à l'université Nizwa en 2006 a accordé une importante particulière à la question de la traduction. - Le sultanat d'Oman a accueilli en décembre 2009 le troisième congrès arabe pour la traduction, organisé par l'Organisation Arabe de la Traduction (OAT). g) Le statut du traducteur: Jusqu'en 2003, aucun texte de loi ne régissait la profession de traducteur. Tout citoyen omani avait la possibilité d'obtenir une licence pour effectuer des travaux de traduction. L'arrêté 18/2003 du sultanat a ordonné la mise en place d'un texte de loi régissant les sociétés de traduction légale selon des critères qualitatifs et en vue de "préserver" la profession de traducteur. Aucune distinction n'est faite entre la traduction légale et la traduction littéraire. L'une des conditions de ce texte de loi est que le traducteur doit avoir au moins 5 ans d'expérience (les diplômés de traduction ne sont pas concernés par cette condition). Le texte de loi prévoit une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à trois ans ainsi qu'une amende de 2.000 riyals omanis [environ 3.700 euros] pour ceux qui enfreindraient la loi. Il existe à ce jour deux types de permis pour travailler dans le secteur de la traduction: - Les bureaux de traduction légale – ou assermentée. - Les bureaux "offrant des services de traduction". © Transeuropéennes, Paris - 2010 Selon les chiffres du Ministère du Commerce et de l'Industrie du 1er mai 2010, cités par Al Mueini, 18 permis d'exercer ont été délivrés aux bureaux de traduction assermentée, contre 448 pour les bureaux "offrant des services de traduction". 5. Le Qatar : Le Conseil National pour la Culture, les Arts et le Patrimoine: Créée en 1998, cette institution est chargée de plusieurs missions, y compris celle de la sauvegarde et de la défense du patrimoine culturel et artistique qatari. Le Centre de traduction, dépendant du Conseil National: En 2005, le Conseil National a ouvert un centre de traduction. A l'origine de cette initiative, un article publié par Hossam Al Khatib, professeur de la langue arabe à l'université de Qatar et qui demandait au Centre National d'ouvrir un centre de traduction. Le Conseil National a chargé Al Khatib d'être le directeur du Centre de traduction. Le centre de traduction du Conseil National pour la Culture, les Arts et le Patrimoine fonctionne sur le mode suivant : Choix des ouvrages à traduire Directeur Général Administration Ouvrages à traduire Spécialiste de la traduction Traduction Secrétaire Révision Correction linguistique Diffusion Le Centre de traduction a déjà traduit vers l'arabe des langues comme l'anglais, le français, l'espagnol et l'hindi, et il est en train de traduire des ouvrages à partir de l'italien, du perse, du japonais, de l'allemand, du chinois vers l'arabe. Pour traduire les ouvrages, le Centre déclare utiliser les outils suivants : - Les articles de références. - Les outils informatiques et numériques pour la traduction. © Transeuropéennes, Paris - 2010 - Les dictionnaires et les glossaires présents sur le Web. - La formation de traducteurs. - Les entreprises de traduction. - L'index des livres traduits de l'UNESCO (IT) et la charte du traducteur. Les prix attribués : Le Conseil National distribue chaque deux ans deux prix, respectivement intitulés "Le prix d'encouragement'' [Jaizat aldawlah altashjiiya] et "Le Prix d'appréciation" [Jaizat aldawlah altaqdiriyyah] dans les domaines suivants : o Les études islamiques (études coraniques, la Sunna, le fiqh, la doctrine musulmane). o Les sciences sociales, humaines, économiques (sciences de l'homme, psychologie, sciences politiques, histoire, géographie, sciences de l'éducation, philosophie, études économiques, études du développement et des ressources humaines et sciences de gestion). o Les sciences dures et appliquées : - Les sciences naturelles et mathématiques (physique, chimie, géologie, mathématiques, statistiques et informatique). - Les sciences appliquées (études d'ingénieurs, biologie, études de médecine, pharmaceutique et sciences de l'environnement). o Arts et littérature : - Poésie, théâtre, art du spectacle, art musical, roman, nouvelles, littérature. - Etudes littéraires, critiques, linguistique et traductions. Les conditions d'éligibilité à ces deux prix sont les suivantes : - Les participants peuvent être des candidats libres ou être rattachés à un établissement. - Etre de nationalité qatarie. - Avoir "bonne réputation". - Le travail proposé doit être une valeur ajoutée et enrichir la vie culturelle et intellectuelle. Les écrits doivent être rédigés en arabe littéraire. Modalités de sélection des candidats pour les deux prix : 1- Les candidats doivent fournir au comité la liste des travaux qu'il a effectués, un curriculum vitae ainsi qu'une "lettre de motivation pour l'obtention du prix". © Transeuropéennes, Paris - 2010 2- Les candidats doivent fournir quatre exemplaires du travail pour lequel ils candidatent. 3- Le comité général d'attribution du prix forme des délégations pour chaque catégorie. Chaque délégation est composée de trois membres qui étudient le travail proposé et émettent un avis au comité général. 4- Le comité général annonce les résultats des différentes délégations et donne le nom des gagnants. Le Conseil National commence à recevoir les candidatures à partir du premier janvier de chaque année, et ce jusqu'au 30 avril de la même année. Les candidatures sont triées en août et les différentes délégations sont mises en place en septembre, octobre et novembre. Les résultats sont annoncés en décembre. Seule la somme allouée aux candidats des deux prix diffère : les gagnants du "prix d'encouragement'' obtiennent chacun 150.000 riyals [près de 30.000 €] alors que les gagnants du "Prix d'appréciation" obtiennent chacun 250.000 riyals [près de 50.000 €]. Partenariat Bloomsbury Publishing (GB) – Fondation du Qatar (http://www.bqfp.com.qa/)35: Ce partenariat est né en octobre 2008 et la société qui en résulte est la Bloomsbury Qatar Foundation Publishing. Elle est la propriété de la Fondation du Qatar (dirigée par Cheikha Moza bin Missned) et est dirigée par la maison d'édition britannique Bloomsbury. Sa mission première est la traduction d'ouvrages de l'anglais vers l'arabe et vice versa. Il s'agit d'ouvrages littéraires, de littérature enfantine et de dictionnaires36. Il s'agit de la première maison d'édition au Qatar et elle œuvre pour renforcer le secteur des métiers du livre au Qatar, notamment en organisant des manifestations littéraires – elle s'investit par exemple dans les évènements relatifs à la Journée mondiale du Livre – et encourage les "nouvelles vocations littéraires de par le monde arabe". Enfin, elle soutient le secteur de l'édition au Qatar, notamment en mettant en place des formations destinées aux éditeurs qataris et qui sont dispensées au siège de la maison d'édition Bloomsbury à Londres. Toujours dans cette optique d'améliorer le niveau du travail éditorial, notamment celui relatif à la traduction, la Bloomsbury Qatar Foundation Publishing a été à l'origine de l'organisation du premier congrès mondial pour la traduction37, qui a eu lieu les 19 et 20 mai 2010 à Doha en partenariat avec l'université Carnegie Mellon du Qatar. Le but déclaré de ce congrès est de créer une "plateforme basée dans le Golfe pour débattre de questions relatives à la Site consulté le 09 octobre 2010. Les ouvrages traduits par la Bloomsbury Qatar Foundation Publishing sont recensés dans le tableau Excel accompagnant la présente étude. 37 Le programme du congrès est disponible sur le lien suivant: http://qatar.cmu.edu/assets/Arabic_Program_final_ed.doc.pdf. Consulté le 09 octobre 2010. 35 36 © Transeuropéennes, Paris - 2010 traduction" mais elle s'attache principalement à analyser les mouvements de traduction entre l'arabe et l'anglais. 6. Le Bahreïn : Le Centre Culturel Kanou : Mahdi Abdullah et Farouq Amin, traducteurs du Bahreïn. Le Centre Abdelrahman Kanou est un centre culturel qui organise des conférences et des colloques au Bahreïn. A travers le parcours d'un traducteur réputé au Bahreïn, Mahdi Abdullah, nous nous proposons de dépeindre la situation de la traduction au Bahreïn, pour laquelle nous avons entrepris d'entrer en contact avec plusieurs personnes, sans succès. Voici donc la synthèse d'une intervention de Mahdi Abdullah, retrouvée sur le Web. Le 6 octobre 2009, le Centre culturel Kanou a organisé un débat intitulé "la traduction au Bahreïn" en invitant Mahdi Abdullah, traducteur bahreïni38. Ce dernier a ouvert le débat en disant qu'il "était temps d'ouvrir un centre de traduction dans le pays". Dans les années 1930, l'école américaine "Al Irsaliyah"39 et l'entreprise pétrolière "Bapco" ont joué un rôle majeur pour enseigner et diffuser la langue anglaise auprès des citoyens bahreïnis. D'après Abdullah, le premier traducteur bahreïni était le professeur et le grand poète Ibrahim Al Ureidhi, qui maîtrisait plusieurs langues, l'anglais, le perse et l'ourdou. Dans les années 1950, Il a traduit en arabe "diwan ruba'iyat Al khayam", les quatrains de Omar Khayyâm, qui a eu un large succès auprès des critiques litéraires. Le parcours de Mahdi Abdullah dans le milieu de la traduction : Tout d'abord, Abdullah s'est intéressé à la traduction des ouvrages concernant l'histoire du Bahreïn. Il s'est ensuite penché sur la question de la traduction littéraire: "au début, je traduisais des textes politiques, au bout d'un certain moment j'ai arrêté car cela ne me plaisait pas, et je me suis dirigé vers la traduction littéraire. Le premier contrat de travail de traduction a été signé en 1987 avec le magazine hebdomadaire bahreïni "Almawaqif". Je traduisais des articles politiques venant de deux revues américaines, "Times" et "Newsweek" ainsi que d'autres magazines européens. Chaque article faisait deux à trois pages avec des photos, ce travail a duré 1 an. Mon deuxième pas concernant la traduction politique, c'était avec le journal "Al Ayyam" en 1989. Nous étions un groupe de traducteurs et nous traduisions vers l'arabe, des articles politiques provenant des différentes agences d'information anglaises". 38 39 http://www.mutak2.com/vb/showthread.php?t=10678, consulté le 10 octobre 2010. Ecole fondée en 1902 exclusivement réservée aux garçons. © Transeuropéennes, Paris - 2010 Abdullah a ensuite commencé à traduire des ouvrages historiques et littéraires. Il a traduit l'ouvrage "Muthakirat Belgrave- Personal Column", l'un des ouvrages les plus importants dans l'histoire du Bahreïn puisque l'auteur, en rédigeant ses mémoires, raconte son expérience au Bahreïn. Abdullah est également l'auteur d'autres traductions que nous recensons dans le tableau Excel relatif au Bahreïn. Revenant cependant sur sa traduction de l'ouvrage de Belgrave dont il dit que lorsqu'il l'a présentait au chef de rédaction de la revue "Sada Al Usbu' ", celui-ci a supprimé certains passages jugés "sensibles", notamment concernant les événements politiques des années 1950, les coutumes religieuses des chiites ou encore les conflits entre le Qatar et le Bahreïn40. La traduction a été publiée dans la revue sous la forme d'une série d'articles. Le traducteur a ensuite fait publier l'intégralité de sa traduction à Beyrouth en 1991 – Abdullah dit avoir privilégié la publication au Liban parce qu'à l'époque, il n'existait pas encore au Bahreïn de loi de protection de la propriété intellectuelle. Abdullah, qui a demandé à plusieurs reprises la nécessité de soutenir la construction d'un centre de traduction au Bahreïn, est soutenu par Faruq Amin, autre traducteur Bahreïni qui a déclaré dans le journal Al Ahd : "Nous avons au Bahreïn de bons traducteurs mais ils ont besoin de soutiens officiels"41. L'Etat ne s'investit donc pas encore suffisamment dans le secteur de la traduction et les traducteurs n'ont pas les moyens de faire connaître leurs travaux, par manque de moyens et de dispositifs leur permettant de faire valoir leurs traductions. 7. Le Yémen : Le Yémen serait tout en bas de "l'échelle de la traduction arabe"42. Le chaos du paysage de la traduction yéménite se fait ressentir sur le niveau et la quantité de traductions produites dans le pays. Les différentes institutions qui s'en occupent sont les suivantes: Le comité général du livre ; Le Ministère de la Culture: en 2004, le nombre de livres traduits par le Ministère n'a pas dépassé 2% du total d'ouvrages publiés ; La bibliothèque nationale de Sanaa. Selon Mahmoud Al Khamiri, archiviste de la bibliothèque, cité par Soumayya Ghazi, la bibliothèque abriterait environ 600 titres dont seulement 30 ou 40 seraient des traductions. De ces 30 ou 40 traductions, 12 seulement seraient faites par des traducteurs yéménites ; Le centre d'études anglaises et de traduction de l'université d'Aden (http://www.aden-univ.net/cest.aspx): son ambition est de former de nouveaux http://www.mutak2.com/vb/showthread.php?t=10678, consulté le 10 octobre 2010. "Al Ahd", hebdomadaire bahreïni du 28 octobre 2009. 42 Selon Soumayya Ghazi, Journal "Al Joumhouriyya", http://algomhoriah.net/newsweekarticle.php?sid=58125. Consulté le 10 octobre 2010. 40 41 © Transeuropéennes, Paris - 2010 15 mars 2008: traducteurs, "spécialistes des langues arabe et anglaise et des études britannique et américaine". Voici le nombre d'étudiants de ce centre depuis sa création: Années universitaires Nombre d'étudiants 1998-1999 11 2002-2003 14 2005-2006 6 2007-2008 31 2008-2009 34 2009-2010 23 Source: site de l'université d'Aden (http://www.aden-univ.net/cest.aspx) Mis à part le Ministère de la Culture, dont le site ne donne aucune information sur la traduction au Yémen et le centre d'études anglaises et de traduction de l'université d'Aden, aucune de ces institutions n'est présente sur le Web. N'ayant reçu aucune réponse des personnes contactées, les informations dont nous disposons sur ce pays sont éparses et peu nombreuses. Les institutions délivrant les permis d'exercer le métier de traducteur sont au nombre de deux: Le Ministère de la Culture ; La délégation nationale pour l'Education, la Culture et les Sciences, qui dépend du Ministère de l'Education et de l'Enseignement (http://www.yncecs.gov.ye/main.htm). Le traducteur doit déposer sa demande auprès du bureau du Ministère de la Culture. Celleci est transmise à la délégation yéménite auprès de l'Unesco et les candidats sont soumis à un examen. Les conditions sont les suivantes: Le candidat doit avoir au moins une licence en Lettres, en Langues ou en Sciences de l'Education ; Il faut qu'il soit diplômé depuis au moins 5 ans ; Il faut qu'il ait obtenu au moins une mention Bien ; Etre de nationalité yéménite ; Etre titulaire du contrat de location du local où il compte exercer son métier de traducteur. © Transeuropéennes, Paris - 2010 La quasi-inexistence de traductions yéménites est également à lier au niveau universitaire du pays, qui souffre du manque de moyens financiers et institutionnels43. Comme pour le Sultanat d'Oman, il ne semble pas y avoir de distinction entre les traducteurs littéraires et les traducteurs assermentés. Synthèse générale La question de la volonté politique et des moyens financiers, facteurs clés des politiques de traduction Cette étude nous permet de mettre en évidence les disparités qui existent entre les différents pays du Golfe. Comme nous le voyons, la question de la traduction ne repose pas uniquement sur des exigences qualitatives : les moyens financiers doivent largement être pris en compte, puisque nous remarquons que la différence de traitement de cette question est notamment tributaire des moyens financiers mis en œuvre pour la mise en pratique d’une véritable politique de traduction. Ainsi, les pays de Golfe réputés les plus riches (Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, etc.) investissent beaucoup d’argent sur la traduction, contrairement à d’autres Etats, plus pauvres, comme le Yémen ou le Bahreïn, qui n’ont pas les moyens financiers de mettre en œuvre une véritable politique de traduction. La question financière est d’autant plus importante qu’elle a amené certains programmes de traduction – « Tourjim » – à être suspendus, en raison de la crise économique, y compris dans les Etats du Golfe jusque là réputés les plus riches. Toutefois, la question financière ne doit pas nous laisser occulter le manque de volonté politique : dans des pays tels que le Yémen et le Bahreïn, le pouvoir institutionnel n’encourage pas les initiatives privées, telles celle du traducteur Mahdi Abdullah qui appelle à la création d’un Centre de traduction national. Sans soutien politique, au sein de sociétés où les acteurs civils ont encore peu de pouvoir mais surtout peu de marges de manœuvre, il est aujourd’hui quelque peu difficile de créer des initiatives viables dans le domaine de la traduction. Choix des domaines et des langues de traduction A ce jour, la majorité des traductions effectuées concernent les domaines des sciences (dures, appliquées et naturelles) et la technologie. Tout naturellement, les prix 43Article de Soumayya Ghazi, http://algomhoriah.net/newsweekarticle.php?sid=58125, consulté le 10 octobre 2010. © Transeuropéennes, Paris - 2010 décernés par les institutions du Golfe vont majoritairement à des chercheurs ayant travaillé dans ces domaines. Dans les pays du Golfe, la langue à partir de laquelle il y a le plus de traductions est l’anglais, même lorsque la version originale du livre a été publiée dans une autre langue : c’est la traduction à partir de l’anglais qui est privilégiée. La question de la censure Il est étonnant de noter que les personnes interviewées – au Koweït, notamment – font le lien entre achat des droits d’auteur et droit de censure, comme si l’obtention des droits octroyait à l’institution responsable de la traduction de modifier ou de supprimer, à loisir, des passages jugés « incompatibles » avec la culture, la religion ou encore la politique. La foire du livre annuelle du Koweït est de plus en plus souvent l’occasion d’interdire la diffusion de certains ouvrages. Ainsi, l’édition 2010 de la Foire a interdit la diffusion de 35 ouvrages égyptiens44. Il s’agit d’ouvrages politiques (Les dossiers de Suez, écrit par Mohammad Haikal, ancien conseillé de Gamal Abdel Nasser, Les intellectuels arabes, de Jalal Amin, etc.), de romans, tel Les récits de l’institution, de Gamal al-Ghitany ou encore d’ouvrages de poésie. Selon le comité de surveillance koweitien, l’interdiction « ne vise pas le peuple ni la culture égyptiens, mais quelques ouvrages incompatibles avec la politique générale du pays »45. Il en a été de même en 2009, mais c’est le Liban qui était visé cette fois, avec une soixantaine de livres interdits46, y compris des anthologies poétiques telle celle du poète Nizar Qabbani, des ouvrages pour adultes ou encore L’histoire de Beyrouth de Samir Kassir. Diffusion des ouvrages traduits et lecture D’après les chiffres avancés par la revue Qantara, le Centre National du livre égyptien n’imprime que 3000 exemplaires de chacun de ses titres pour l’ensemble du monde arabe47, et le programme ‘’Kalima’’ 2000 seulement48. Ces chiffres dérisoires montrent le peu d’engouement du lectorat arabe pour la lecture en général et la traduction en particulier. Cela est sans doute à lier à l’appauvrissement général de la vie intellectuelle arabe : nous le voyons, une grande partie des ouvrages traduits sont des ouvrages de Liste disponible sur le lien suivant : http://www.qadita.net/2010/09/%D9%85%D8%B9%D8%B1%D8%B6%D8%A7%D9%84%D9%83%D9%88%D9%8A%D8%AA-%D9%8A%D9%85%D9%86%D8%B9-35%D9%83%D8%AA%D8%A7%D8%A8%D8%A7%D9%8B-%D9%84%D8%AF%D9%88%D8%B1%D9%86%D8%B4%D8%B1-%D9%85%D8%B5%D8%B1%D9%8A/, consulté le 23 octobre 2010. 45 http://www.alazma.com/site/index.php?option=com_content&view=article&id=8712:------------video&catid=26:1&Itemid=5, consulté le 23 octobre 2010. 46 Liste disponible sur le lien suivant : http://www.mobashernews.net/index.php?go=news&r=1112009&more=98076 47Article sur la 40e foire du livre du Caire, http://www.qantara.de/webcom/show_article.php/_c-310/_nr502/i.html, consulté le 23 octobre 2010. 48 Interview avec Mustafa al-Slaiman, responsable des traductions dans le programme ‘’Kalima’’ : http://www.qantara.de/webcom/show_article.php/_c-310/_nr-747/i.html, consulté le 24/10/2010. 44 © Transeuropéennes, Paris - 2010 sciences dures et appliquées, dont on pense qu’ils pourront aider à combler le fossé séparant les sociétés arabes, majoritairement islamiques, des sociétés occidentales. Ces traductions sont d’autant plus encouragées qu’elles n’ont pas besoin d’être censurées pour une quelconque raison politique ou religieuse. Un autre pan important d’ouvrages est traduit : ceux traitant de l’histoire des pays concernés. Ainsi, l’Arabie Saoudite ainsi que le Koweït traduisent et financent la traduction de nombreux ouvrages revenant sur leurs histoires respectives et sur des périodes-clé de cette histoire– comme la guerre irakokoweitienne pour le Koweït, etc. Des centres sont mêmes créés exclusivement dans ce but, comme le Centre de recherches et d’étude koweïtien. La question du statut des traducteurs dans le Golfe Malgré les contacts pris avec différents traducteurs issus ou travaillant dans les pays du Golfe et l’envoi d’un questionnaire destiné à nous renseigner sur leur statut, nous avons eu très peu de retours. De façon générale, il ressort que la profession de traducteur est sous estimée, alors même qu’il occupe une position académique importante. Le plus souvent, il cumule le travail de traduction avec un poste de chercheur universitaire. Si dans certains pays, les textes de loi mentionnent les droits des traducteurs, ils ne font pas la différence entre les traducteurs littéraires et les traducteurs assermentés (exemples du Bahreïn et du sultanat d’Oman). La profession de traducteur littéraire ne semble donc pas reconnue en tant que telle. © Transeuropéennes, Paris - 2010