B2K Consultants

Transcription

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Programme de recherche et d’innovation dans les transports terrestres
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
PREDIT3/GO5 Logistique et transports de marchandises
INFLUENCE DES POLITIQUES PUBLIQUES
SUR LES STRATEGIES LOGISTIQUES DES ENTREPRISES DE DISTRIBUTION
ET LEURS PRESTATAIRES DE TRANSPORT ET DE LOGISTIQUE
Une recherche rétrospective des quarante dernières années
Le cas de la France, de l’Italie et de la Suisse
RAPPORT FINAL PRINCIPAL
Novembre 2004
Marché n° 0203032
B2K Consultants
Basile KEITA, B2K CONSULTANTS 3, rue des Iris 94240 L’Hay-Les-Roses
SIRET : 433 332 889 00016 Code APE 741 G Téléphone : 01 46 87 29 05
[email protected] Télécopie : 01 46 86 71 91
Avec la collaboration de :
Università degli Studi di Genova
Dipartimento di economica e metodi quantitativi
B2K Consultants
Collège du Management de la Technologie
Chaire LEM – Logistique Economie Management
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
SOMMAIRE
Résumé
Executive summary
4
9
Chapitre I - Introduction
I. Contexte global
II. Problématique
III. Méthodologie
IV. Contenu du rapport
14
15
15
16
19
Chapitre II – Le cadrage de la recherche
I. Evolution du contexte économique général
II. La forte croissance de la mobilité des marchandises
III. Les concepts de logistique et de stratégie logistique
20
21
24
32
Chapitre III – L’évolution du contexte des politiques publiques
I. Définition et méthode de reconstitution
II. Les acteurs publics et leurs orientations stratégiques
III. Les outils ou instruments d’action publique
IV. Conclusion du chapitre
36
37
38
49
65
Chapitre IV – Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques
des entreprises de distribution
I. Introduction
II. Les changements logistiques significatifs
III. Les pratiques logistiques induites par la centralisation logistique
IV. Influence des politiques publiques
V. Les autres facteurs de changements logistiques
VI. Les principaux résultats du chapitre
66
67
68
78
85
100
104
Chapitre V – Influence des politiques publiques sur les stratégies des
entreprises de transport et de logistique
I. Introduction
II. Les changements significatifs de stratégies
III. Les tendances majeures des prestataires logistiques
IV. Influence des politiques publiques
V. Les autres facteurs de changement
VI. Les principaux résultats du chapitre
107
108
121
123
133
135
Chapitre VI – Synthèse analytique et comparée des principaux résultats
I. Les changements logistiques significatifs de la distribution
II. Les changements stratégiques significatifs des prestataires
III. Les facteurs de changements logistique dans distribution
IV. Les facteurs de changements dans le secteur du transport et la logistique
V. Evaluation de l’impact sur le transport et la mobilité des marchandises
VI. Quel contexte de politique publique
136
137
137
138
141
144
158
Chapitre VII. Conclusion et Perspectives
158
Les Annexes
Bibliographie sélective
162
175
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Rapport final
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
L’EQUIPE DE RECHERCHE
Pour réaliser cette recherche, B2K Consultants a mobilisé une équipe internationale
de chercheurs suivants :
-
-
Basile Keïta (Chef d’équipe, B2K Consultants) ;
Aymeric Sevestre (Unité Logistique – Economie – Management, EPFL de
Lausanne) ;
Enrico Musso (Unité d’Economie des Transports, Université de Gênes) ;
Claudia Burlando (Unité d’Economie des Transports, Université de Gênes ;
Manuela Basta (Unité d’Economie des Transports, Université de Gênes ;
Jean-Philippe Fouquet (Beauvais Consultants).
REMERCIEMENTS
Nous tenons à remercier toutes les personnes en France, en Italie et en Suisse
qui par leurs contributions nous ont aidés dans la réalisation de cette
recherche. Il s’agit des directeurs logistiques ou responsables d’entreprises de
distribution, des prestataires de transport et de logistique.
Nous remercions également les membres du Groupe Opérationnel 5 du Predit
3 pour les remarques et commentaires pertinents sur la version provisoire ; ils
ont permis d’améliorer le présent rapport final.
Nous remercions particulièrement Monsieur Marc Cottignies (ADEME), qui a
suivi avec rigueur l’exécution de ce travail, pour sa grande disponibilité et ses
conseils.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
RESUME
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
1 – Contexte de la recherche
Cette recherche, financée par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME)
dans le cadre du Programme Interministériel sur les Transports (PREDIT), s’inscrit dans un contexte
de forte croissance de la mobilité des marchandises en France et en Europe. Les tendances lourdes
de la logistique de ces deux dernières décennies génèrent une très forte croissance des distances
cumulées de transport, une concentration des flux sur certains axes et une polarisation des sites
logistiques s'accompagnant d'une utilisation presque exclusive du mode routier. Ces évolutions
logistiques ont un impact qui devient de plus en plus inquiétant au regard de plusieurs enjeux portés
par les politiques publiques. Or, il est actuellement difficile pour les pouvoirs publics de définir des
stratégies publiques efficaces en continuant à ignorer comment les transformations profondes de la
production et de la distribution des biens, qu’on vise sous le terme de logistique, en déterminent les
évolutions et en limitent les marges de manœuvre. C’est donc par l’acquisition de connaissances sur
l’influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises qu’il sera possible de
concevoir des stratégies publiques susceptibles de réduire ou ralentir la croissance à long terme de la
mobilité des marchandises.
2 – Problématique
L’objectif de la présente recherche était de mener une analyse rétrospective de l’influence des
politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires
de transport et logistique. Le propos n’était pas de réaliser une recherche historique ; il a été choisi de
partir des changements logistiques significatifs ou des ruptures de tendances logistiques des
entreprises pour analyser si ceux-ci sont dus, entre autres facteurs, à des décisions de politique
publique. Un changement logistique significatif est défini comme étant une réorganisation de long
terme des stratégies logistiques des entreprises du pays concerné. Au niveau d’une entreprise, il fait
référence au passage, au basculement d’une stratégie logistique à une autre. Cette recherche
rétrospective revient ainsi à déterminer comment les politiques publiques et les autres facteurs ont
influencé les changements significatifs et/ou les évolutions des stratégies logistiques des entreprises
de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique durant les quarante dernières années.
En plus de la France, les cas de l’Italie et de la Suisse ont été analysés, de manière à apporter un
éclairage complémentaire d’expériences étrangères.
3 – Méthodologie
L’analyse s’est concentrée sur deux secteurs qui sont stratégiques en matière de développement
logistique : la grande distribution et le secteur du transport de marchandises et de la logistique.
Deux sources d’informations complémentaires ont été utilisées : l’analyse bibliographique ; les
enquêtes par entretien approfondi auprès des entreprises. Des enquêtes ont été menées auprès de
26 entreprises dans les trois pays dont 14 entreprises structurantes de la grande distribution et 12
entreprises de transport et de logistique.
Ce sont les responsables au niveau stratégique dans l’entreprise qui ont été interrogés : directeurs de
logistique ou de supply chain, de communication et de marketing. Le contenu des entretiens, mis en
forme, a ensuite été validé par nos interlocuteurs. Cet échantillon constitue une bonne représentation
pour produire des résultats de portée générale. Le Rapport final Annexe consigne 120 pages de
comptes rendus des entretiens réalisés.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
4 – La description du cadrage global et du contexte des politiques publiques
Le cadre global de la recherche a été décrit, à savoir, l’évolution du contexte économique général, la
forte croissance de la mobilité de marchandises et la définition des concepts de logistique et de
stratégie logistique. Les contextes des politiques publiques (au sens plus large) dans les trois pays ont
été reconstitués dans tous leurs aspects susceptibles d’influencer les stratégies logistiques des
entreprises.
5 – L’influence des politiques publiques et d’autres facteurs sur les stratégies
logistiques des entreprises de distribution
Durant les quarante dernières années, le changement logistique significatif des entreprises de
distribution concerne la centralisation logistique, c’est à dire le passage à des stratégies logistiques
fondées sur la concentration des flux. Les processus de changement logistique, qui ont démarré dans
les années 1970, ont été variables selon le pays. Les changements logistiques identifiés et analysés
sont :
- le passage des livraisons directes à la centralisation logistique en France ;
- le passage des entrepôts régionaux à la centralisation logistique en Suisse ;
- le passage des livraisons directes à la construction des entrepôts et plates-formes en Italie.
Le concept de centralisation logistique, dans la présente recherche, est défini comme un triangle
ayant comme sommets la polarisation des infrastructures logistiques (entrepôts et plates-formes) sur
quelques sites, la massification des flux et la concentration des entreprises. La centralisation
logistique est, aujourd’hui, bien établie en France et en Suisse ; mais elle est à ses débuts en Italie.
Les pratiques logistiques fondamentales des entreprises de distribution, induites par la centralisation
logistique, ont été mises en évidence ; il s’agit de l’utilisation des entrepôts et plates-formes, de la
polarisation des infrastructures logistiques, de la massification des flux, du choix de l’intégration ou de
l’externalisation des activités logistiques, de la diversification des sources d’approvisionnement et
l’expansion des marchés, du développement des approches supply chain management.
Il n’y a pas eu de politiques publiques visant à influencer intentionnellement et directement les
stratégies logistiques des entreprises de distribution durant les quarante dernières années. Les
politiques publiques ont eu peu d’influence sur les changements de stratégies logistiques des
distributeurs dans les trois pays étudiés. Néanmoins, on a détecté en France, les lois Galland et
Raffarin et le Contrat de Progrès, qui n’avaient aucune visée directe sur les stratégies logistiques des
distributeurs, ont accéléré et consolidé la constitution par les distributeurs d’un réseau d’entrepôts à
travers la France, et favorisé ainsi le passage à la centralisation logistique. Ce type de phénomène n’a
pas été observé en Italie ni en Suisse. On a observé aussi en France que des politiques des
collectivités locales ont favorisé l’implantation des entrepôts en acceptant de dédier des zones aux
activités logistiques.
Dans les trois pays, les politiques publiques ont influé davantage sur les décisions logistiques
opérationnelles d’exécution. En France, le manque d’investissement dans le fret ferroviaire a favorisé
l’utilisation intensive du transport routier. Les entreprises sont de plus en plus sensibilisées à la
politique environnementale mais sous son aspect de respect de la réglementation. En Italie, les
politiques de transport (investissements en infrastructure de transport), du travail (manque de flexibilité
du travail, etc.) et de l’environnement ont eu des impacts sur l’évolution logistique de la distribution. En
Suisse, la massification des flux conjuguée avec la politique des transports favorable au rail et la
politique environnementale ont entraîné une utilisation du rail.
La recherche à permis d’identifier les principaux outils publics qui ont influé sur les décisions
logistiques (stratégiques et opérationnelles) des entreprises. Il s’agit des outils de politique de
transport, de réglementation, de politique locale, de politique environnementale, de politique de travail,
de fiscalité et des aides et incitations financières.
Un autre résultat important, que l’on tire des analyses, est que c’est l’utilisation combinée de plusieurs
outils publics qui a eu des influences efficaces sur les logistiques des entreprises. On peut citer
l’exemple de la France où les effets conjugués des lois Raffarin et Galland, et du Contrat de progrès
ont favorisé le développement des entrepôts. En Suisse également, les effets combinés de la politique
de transport en faveur du rail, de la Redevance Poids Lourds liée aux Prestations (RPLP) et
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
l’interdiction pour les poids lourds de circuler la nuit ont entraîné une utilisation du rail très importante
comparativement.
La recherche à permis d’identifier les autres facteurs de changements significatifs des stratégies
logistiques. Dans les trois pays, les facteurs économiques (économies d’échelle, réduction des stocks,
remises fournisseur) ont été les moteurs des changements logistiques ; puis il y a l’évolution
technologique dans l’informatique et les communications. Les autres facteurs de changements
concernent les modifications dans le management de l’entreprise, la globalisation et la délocalisation
de la production.
6 – L’influence des politiques publiques et d’autres facteurs sur les stratégies des
prestataires de transport et de logistique
Au cours des quarante dernières années, le changement de stratégie significatif des entreprises de
transport et de logistique concerne le passage du « métier » de transporteur à celui de « prestataire
logistique ». C’est durant la seconde moitié des années 1990 qu’émergent des prestataires
logistiques. En France et en Suisse, les entreprises de transport ont procédé à des rachats, des
fusions ou acquisitions d’entreprises pour atteindre une ‘taille critique’ et se transformer en
prestataires logistiques. En Italie, le processus de transformation des opérateurs traditionnels en
intégrateurs logistiques s’est fait principalement par acquisitions d’entreprises italiennes par des
groupes étrangers.
On n’a pas observé d’influence directe et significative des politiques publiques sur l’émergence des
prestataires logistiques. On a cependant détecté des politiques publiques ayant influé, mais d’une
manière indirecte, sur les restructurations des entreprises du secteur et sur l’émergence des
prestataires logistiques. Elles ont entraîné d’abord soit une vive concurrence sur le marché (mesures
de déréglementation, etc.), soit une hausse des coûts logistiques (Contrat de Progrès, RPLP, écopoints, etc.) lesquelles ont rendu nécessaire des réorganisations au niveau des plans de transport,
des restructurations et concentrations pour atteindre une taille critique afin d’être des prestataires
logistiques. En France, la déréglementation des transports a entraîné une vive concurrence sur le
marché qui a rendu nécessaire des restructurations, des concentrations et l’émergence des
prestataires logistiques ; le Contrat de Progrès et les hausses du prix du carburant ont eu pour effet
d’augmenter les coûts; ceci a rendu nécessaire des réorganisations dans les transports et des
concentrations. En Italie, un certain nombre de lois et décrets ont entraîné une hausse des coûts,
avec la nécessité de leur réduction par une croissance de la taille de l’entreprise ou par une
diversification vers les activités logistiques. Les entreprises italiennes déplorent surtout l’absence de
politique adéquate de transport. En Suisse, la RPLP a entraîné une augmentation des coûts de
transport qui a eu pour effet d’accélérer la concentration dans le secteur et l’émergence des
prestataires logistiques.
La recherche à permis d’identifier les principaux outils publics qui ont influé sur les stratégies des
entreprises de transport et de logistique. Ces instruments publics sont de même nature que ceux
ayant influencé les stratégies logistiques des entreprises de distribution.
Les autres facteurs significatifs de changements ont été identifiés. Le développement de la demande
logistique des distributeurs et des industriels, les facteurs économiques, le marché unique européen
ont été ici les moteurs de l’émergence des prestataires logistique. L’innovation technologique a été
également un facteur puissant de changement.
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Rapport final
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7 – Evaluation de l’impact de la centralisation logistique et des politiques publiques
sur le transport de marchandises
L’analyse des enquêtes a mis en évidence une forte utilisation du transport routier dans les
organisations logistiques des distributeurs, par rapport aux autres modes (rail, voie d’eau, transport
combiné, etc.) dans les trois pays étudiés.
On a observé cependant que le fret ferroviaire continue à croître en Suisse, moins rapidement certes
que le fret routier, alors qu’il décroît en France et en Italie. En Suisse, une politique volontariste des
pouvoirs publics en faveur du rail a entraîné un utilisation plus importante du rail dans les
organisations logistiques des distributeurs. En France et en Italie, le manque d’investissement dans le
fret ferroviaire a favorisé l’usage accru du transport routier.
Beaucoup des pratiques logistiques fondamentales repérées ci-dessus ont des impacts sur la mobilité
des marchandises. Le résultat de l’évaluation de ces impacts, fondées sur des travaux d’experts et sur
nos enquêtes, est le suivant : la tendance à l’accroissement des flux de transport de marchandises est
imputable pour la plus grande part à la polarisation des sites logistiques et à la diversification des
sources d’approvisionnements.
Les politiques publiques ayant influé sur la logistique du secteur de la distribution ont la capacité à
réduire les flux de trafic de marchandises dans la mesure où elles ont eu des impacts en faveur de la
massification des flux et de la concentration des entreprises.
Ces résultats ne nous permettent pas d’affirmer si la centralisation logistique a contribué a aggraver la
croissance de la mobilité des marchandises. En revanche, il est possible d’affirmer que les
organisations logistiques des distributeurs, induites par la centralisation logistique, sont des
déterminants, parmi d’autres, de la demande de transport.
8 – Quel contexte de politique publique pour élaborer des stratégies publiques
Sur la base des résultats de la présente recherche rétrospective, les principaux outils publics cidessus identifiés comme ayant influencé les évolutions logistiques, nous semblent les plus appropriés
pour influer également sur les stratégies logistiques des entreprises au cours des prochaines années.
Il serait très difficile d’inverser la tendance à la concentration logistique par des incitations
institutionnelles, étant donné l’ampleur des économies d’échelle que les grandes entreprises sont
parvenues à réaliser. Plutôt que de lutter contre ce phénomène, il est suggéré plutôt de mener des
études et recherches sur les stratégies publiques à concevoir pour faire évoluer un ou plusieurs des
éléments constitutifs de la centralisation logistique: massification des flux, réduction des stocks,
approches supply chain, externalisation, etc. Notre recherche montre, avec l’exemple suisse, qu’il est
possible de tirer parti de la massification des flux ainsi engendrée pour favoriser le rail, en s’appuyant
sur les outils publics adéquats.
9 – Prolongements de la recherche
Pour prolonger la présente recherche, cinq axes de recherche sont suggérés :
- impact des organisations logistiques sur les flux de transport de marchandises ;
- supply chain management, optimisation des chaînes logistiques et politiques ;
- élaboration des scénarios prospectifs de stratégies publiques visant à influencer les stratégies
logistiques de entreprises ;
- état des lieux de l’influence des politiques publiques sur les changement de comportement
logistiques des entreprises au niveau européen ;
- rééquilibrage entre modes de transport et politiques publiques.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
EXECUTIVE SUMMARY
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
1 – The context of the study
This research was funded by the Agency for the Environment and Energy Management (ADEME) in the
framework of the Interministerial Transport Research and Innovation Programme (PREDIT), in a context
of a rapid increase in freight transport in France and Europe. In the last two decades, the major trends
that have affected logistics are a dramatic increase in total transport distances, a concentration of traffic
flows on certain major routes and a polarization of logistical sites which has been accompanied by the
almost exclusive use of road transport. The impact of these logistics changes is increasingly worrying
with regard to a number of issues that are of concern to the public authorities. The profound
modifications that have occurred in the production and distribution of goods (for which we use the term
“logistics”) determine change and reduce the room for political manoeuvre. Public authorities cannot
anymore ignore them when they seek to specify effective public strategy. Thus, we believe that it is by
gaining a better understanding of how public policies can influence the logistical strategies of firms that
it will be possible to develop public strategies that have the potential to reduce or slow down the long
term growth in freight traffic.
2 – The issues
The purpose of this study is to conduct a retrospective analysis of how public policies have influenced
the logistics strategies of firms. We did not intend to conduct historical research: we rather examined
whether when firms make significant logistics changes or depart from logistics trends they do so partly
influenced by public policy decisions. A ‘significant logistics change’ has been defined as a long-term
reorganization of the logistics strategies of the firms in the country investigated. For a firm, it refers to
the shift from one logistics strategy to another.This retrospective study thus aims to determining how
public policies and other factors have influenced significant changes and/or changes in logistics
strategies of distribution firms and their transport and logistics companies during the last forty years.
Apart from France, the situation in Italy and Switzerland has been analysed in order to obtain additional
insights at international level.
3 – Methodology
Our analysis has been focused on two strategic domains of logistics development : mass distribution
sector and the freight transport and logistics sector. We have used two data sources : a literature
survey and in-depth interviews conducted within firms. Surveys have been conducted in 26 firms in the
three countries (France, Italy and Switzerland). Fourteen of the firms were important firms in the mass
distribution sector and 12 were transport and logistics companies.
The interviewees were the persons responsible for the firm’s strategy, i.e. directors of logistics or the
supply chain, communication and marketing. The interviews were then edited and validated by the
subjects. This sample provides a good representation of the general situation. The descriptions of the
interviews can be found in the Appendix of the Final Report (120 pages).
4 – A description of the general framework and the public policy contexts
The general framework of the study has been described, namely the general economic context, the
marked growth in freight transport, the concepts of logistics and logistics strategy.
For each of the three countries we have attempted to identify the aspects of the public policies, that are
likely to influence the logistics strategies of distribution firms and their transport and logistics companies.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
5 – Influence of public policies and other factors on the logistics strategies of
distribution companies
Over the last forty years, the significant logistics change that has affected distribution companies relates
to logistics centralization, i.e. the shift to logistics strategies based on flows concentration. The
processes of logistics change, which had started in the 1970s, varied from one country to another. The
logistics changes we have identified and analyzed relate to:
- the move from direct deliveries to logistics centralization in France;
- the move from regional warehouses to logistics centralization in Switzerland;
- the move from direct deliveries to the construction of warehouses and platforms in Italy.
Logistics centralization is now firmly established in France and Switzerland: but it is only just beginning
in Italy. The process of logistics centralization, as it emerges from our analyses, involves the
massification of supply flows to shops, the polarization of the logistics sites (warehouses and platforms)
that are involved in the distribution of goods, and the merging of companies. Logistics centralization is
thus defined as a triangle with three vertices: the polarization of logistics sites, the massification of
flows, and the merging of companies.
The fundamental logistics practices of distribution firms, which are generated by logistics centralization,
have been highlighted. They include the use of warehouses and platforms, the polarization of logistics
infrastructure, the massification and concentration of freight flows, the decision to integrate or outsource
logistic activities, the geographic diversification of the development of supply flows (globalization),
supply chain management approaches.
Public policies have not had a real influence on the logistic strategies of distribution companies during
the last forty years. We have not detected effective public policies to influence directly logistics
strategies of firms. Nevertheless, we found in France that public policies have had a unintentional
influence on the logistics strategies of distribution companies. The Galland and Raffarin Acts, the
Progress Contract and the local authorities warehouses and platforms policies have accelerated and
consolidated the development, on the part of the distributors, of warehouses across France, thereby
encouraging logistics centralization. This point applies specifically to France, the same type of change
has not been observed in Italy or Switzerland. It is nevertheless noteworthy that the strategic logistics
decisions made by distribution companies are neither inspired by nor determined by public policies (or
another extern factors).
In all three countries, public policies have had more impact on operational logistics decisions than on
strategic decisions of distribution companies. In France, the lack of investment in rail freight has
favoured the intensive use of road transport. Firms are increasingly aware of environmental policy, but
this awareness is limited to compliance with regulations. In Italy, transport policies (such as investment
in transport infrastructure), employment policies (lack of job flexibility, etc.) and the environment have
had impacts on the logistics changes that have affected distribution. In Switzerland, the massification of
flows combined with the pro-rail transport policy and the environmental policy have led to increased use
of rail transport.
Our research has identified the main public policy instruments that have influenced logistics changes in
distribution companies in the period we have studied. These instruments relate to transport policy, local
authorities policy, regulations, environmental policy, employment policy, taxation and financial aids and
incentives.
Another result emerged from our analyses is that it is the use of a combination of several public policy
instruments that has been effective in influencing the logistics strategies of firms. One example that can
be given is that of France where the combined effects of the Raffarin and Galland Acts and the
Progress Contract have encouraged the development of warehouses. In Switzerland too, the combined
effects of the pro-rail transport policy, the heavy vehicles fee (HVF/RPLP) and the ban on night-time
truck traffic have reinforced rail transport.
This research has also identified other factors that significantly influence in logistics strategies of
distribution firms. In all three countries, economic factors (economies of scale, reduction in stock levels,
supplier discounts) have been the driving force of logistics change; technological advances in
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
computing and communications have also played a great role. The management of firms and the
globalization and relocation of production contributed to change as well.
6 – Influence of public policies and other factors on changes in the strategies of
transport and logistics companies
During the last forty years, the significant strategy change that has affected transport and logistics
companies is the move from being a “transport company” to being a logistics service provider. Logistics
service providers first appeared during the second half of the nineties, but they took different forms in
different countries. In France and Switzerland, transport companies were involved in company buyouts,
mergers and acquisitions to increase concentration and become logistics service providers. In Italy, the
process by which traditional operators have turned themselves into logistic integrators involved mainly
the acquisition of Italian companies by foreign transport and logistics groups.
Public policies have not had a direct and significant influence on the strategies of transport and logistics
service companies. Public policies have only indirectly influenced the concentration strategies of firms in
the sector and the appearance of logistics service providers. First, these policies either created lively
competition in the market (through deregulation measures, etc.), or increased transport and logistics
costs (Progress Contracts, heavy vehicles fee, eco-points, etc.) which have made it necessary to
reorganize transport and undertake restructuring or concentration to achieve the critical size required for
a logistics service provider. In France, transport deregulation led to strong competition in the market
which made necessary the restructuring, concentration and the emergence of logistics service
providers; the Progress Contact and fuel price rises have increased costs thereby making transport
reorganization and concentration necessary. In Italy, a number of laws and decrees have increased
costs: in order to reduce them it has been necessary to increase the size of firms or diversify into
logistics activities. The key concern of Italian companies is the absence of a satisfactory transport
policy. In Switzerland, the levy on heavy vehicles has led to an increase in transport costs which has
accelerated concentration in the sector and the appearance of logistic service providers.
Our research has identified the main public policy instruments that have influenced the strategies of
transport and logistics companies in the period we have studied. These instruments are of the same
type as those which have influenced the logistics strategies of distribution companies.
The other significant factors for change have also been identified. These can be of the development of
logistics demand among distributors and manufacturers and of an economic nature : strong competition
(costs, quality and time limits), the single European market, the attempt to achieve the critical size, etc.
have been the driving force behind strategic changes. Technologic innovation has also been an
important factor in change. The other factors relate to changes in company management.
7 – Impact of logistics centralization and publics policies on transport and on the
freight traffic flow
Our research has identified the increased use of road transport by the fundamental logistics practices of
distribution companies, particularly in France and in Italy. In Switzerland, as mentioned above, the prorail transport policy, the heavy vehicles fee (RPLP) have reinforced rail transport. In France and Italy
the lack of investment in rail freight has favoured the intensive use of road transport.
Many of the practices identified above have an impact on the on the freight traffic flow. On the basis of
French and European research and interviews conducted among firms we evaluated the impact of
logistic centralization on freight transport flows. The results of our evaluation are : The polarization of
logistic sites and the diversification of source of supply (globalisation), mainly, are inclined to increase
the freight traffic flow.
Consequently, the public policies detected in France (The Galland and Raffarin Acts, the Progress
Contract and the local authorities policies), which are favourable to the use of warehouses and
platforms, to the massification of freight flows, are inclined to reduce the freight traffic flow.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
According to this result, we cannot affirm if the logistics centralization of distribution firms contributed or
not to the growth in transport. But we can affirm that the logistics centralization of distribtion companies
is one of the driving forces behind the increase in freight transport.
8 – What public policy context to make public strategies influencing logistics strategies
of firms
Our retrospective research of the last forty years suggests that the public policy tools identified above as
having influenced logistic changes could also provide appropriate means of influencing the logistics
strategies of firms in coming years. Forward studies are required to develop public strategy scenarios
which contain powerful and coherent public policy tools and which are capable of modifying companies’
logistical strategies.
It will be extremely difficult for public policies to reverse the trend towards logistics concentration firms in
view of the extent of the economies of scale that large distribution firms have achieved. We therefore
suggest rather that research should be conducted into the type of public policies that might influence
one or more of the constituents of logistics centralization: the massification of flows, cost reductions,
supply chain approaches, outsourcing, etc. On the basis of the Swiss example, our research shows that
coherent public policy instruments can be used to take advantage of the resulting massification of flows
in order to favour rail.
9 – Directions for further research
We suggest these following additional research projects:
- impact of firm logistics organization on the freight traffic flow;
- Supply chain management, optimization of logistics chain of transport and the role of public policies;
- Elaboration of public strategy scenarios which contain powerful and coherent public policy
instruments and which are capable of modifying companies’ logistics strategies;
- State of art on the influence of public policies on the logistic strategies of firms in Europe;
- Research to balance the different modes of transport and public policies.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE I
INTRODUCTION
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I. Contexte global
Cette recherche, financée par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie
(ADEME), est réalisée dans le cadre du Programme de Recherche Interministériel sur les
Transports PREDIT3 (France). Elle s’intègre dans l’axe de recherche 5 « Logistique et
transport de marchandises ». Le PREDIT est placé sous l’égide de quatre ministères :
Recherche (MR), Transports (METL), Industrie (MINEFI) et Environnement (MEDD) et deux
agences : l’ADEME et Agence nationale de valorisation de la recherche (ANVAR).
La présente recherche s’inscrit dans un contexte de forte croissance de la mobilité des
marchandises en France et en Europe. Les tendances lourdes de la logistique de ces deux
dernières décennies, génèrent une très forte croissance des distances cumulées de transport, une
concentration des flux sur certains axes et une polarisation des sites logistiques s'accompagnant
d'une utilisation presque exclusive du mode routier dont l’efficacité énergétique et
environnementale est médiocre en comparaison d’autres modes comme le rail, la voie d’eau ou
le cabotage maritime. Ces évolutions logistiques ont un impact « qui devient de plus en plus
inquiétant au regard de plusieurs enjeux portés par les politiques publiques» 1. Or, il est
actuellement difficile pour les pouvoirs publics de définir des politiques cohérentes et efficaces
en matière de transport, d’environnement, d’aménagement du territoire en continuant à ignorer
comment les transformations profondes de la production et de la distribution des biens, qu’on
vise sous le terme de logistique, en déterminent les évolutions et en limitent les marges de
manœuvre. C’est dans ce contexte que s’inscrit la présente recherche.
C’est, en effet, par l’amélioration des connaissances sur l’influence des politiques publiques sur
les stratégies logistiques des entreprises que l’on peut concevoir des stratégies publiques
susceptibles d’agir sur la croissance de la mobilité des marchandises. C’est dans ce cadre que
s’inscrit la présente recherche.
II. Problématique
L’objectif de la présente recherche est de mener une analyse rétrospective de l’influence des
politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs
prestataires de transport et de logistique en France. Notre propos n’est pas de réaliser une
recherche historique ; nous avons choisi de partir des changements logistiques significatifs ou
des ruptures de tendances logistiques pour analyser si ceux-ci sont dus, entre autres facteurs, à
des décisions de politique publique. La problématique de la présente recherche revient
donc à déterminer comment les politiques publiques ont influencé les changements
significatifs et/ou les évolutions des stratégies logistiques des entreprises durant les
quarante ou vingt dernières années, et quel est l’impact des organisations logistiques sur
la mobilité des marchandises.
Un changement logistique significatif est défini comme étant une réorganisation de long
terme des stratégies logistiques des entreprises dans un pays. Au niveau d’une entreprise, il fait
référence au passage, au basculement d’une stratégie logistique à une autre. Les stratégies
logistiques ne changent pas brutalement ; elles se mettent en œuvre progressivement sur
1
Christophe RIPERT (ADEME), Jean-Guy DUFOUR (METL-DRAST) « Note à l’attention du groupe thématique « transport
de marchandises du PREDIT3 sur les recherches à dominantes socio-économique et politique, "Evolutions logistiques et
politiques publiques »
B2K Consultants
15
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
plusieurs années, voire sur plusieurs décennies. Les changements logistiques significatifs
n’évoluent donc pas très vite, étant à la charnière entre les enjeux anciens et nouveaux. C’est
pour cette raison que dans les enquêtes réalisées, on s’est attaché, avec les personnalités
interrogées, à identifier aussi finement que possible les changements significatifs intervenus,
durant les quarante dernières années, dans les stratégies logistiques des entreprises de
distribution et leurs prestataires de transport et de logistique ainsi que les « dates » ou les
« moments » de démarrage de ces changements significatifs.
La présente recherche rétrospective porte sur les quarante dernières années, au lieu des vingt
dernières années comme c’était prévu dans le projet initial. Les enquêtes auprès des entreprises
ont montré qu’il était indispensable de remonter jusqu’aux années soixante afin de bien
comprendre les changements ou ruptures de tendances dans les évolutions logistiques en
France. Notre approche consiste à prendre ainsi du recul et tenter de saisir le phénomène sur
une période relativement longue, des années 1960 à actuellement ; ceci permet de bénéficier du
décapage que réalise l’histoire sur les événements au fur et à mesure qu’ils s’éloignent.
En plus du cas de la France, on analyse les cas de l’Italie et de la Suisse, de manière à
apporter un éclairage complémentaire d’expériences étrangères. La France comme l’Italie sont
membres de l’Union européenne et la Suisse ne l’est pas. Par ailleurs, la France reste un état
relativement centralisé, tandis que l’Italie est un pays au régionalisme très poussé, et que la
Suisse est une confédération. Comparé à la France et à la Suisse, la logistique est une réalité
récente en Italie.
III. Méthodologie
1. Les secteurs et filières analysés
Pour cette recherche, on a sélectionné deux secteurs ou filières qui nous paraissent stratégiques
en matière de développement logistique :
- le secteur de la grande distribution ;
- et le secteur du transport de marchandises et de logistique.
Les distributeurs sont à l’origine en France de beaucoup de flux de transport par camion
(environ un camion sur quatre); et du point de vue des politiques publiques, ils présentent de
gros potentiels autant en terme de génération des flux de marchandises (transport) et qu’en
terme environnemental (consommation d’énergie, émission de polluants et de gaz à effet de
serre). Les gisements de report du trafic routier vers d’autres modes (rail, fluvial, maritime,
etc.) sont d’autant plus importants que le secteur utilise presque exclusivement le transport
routier.
Le secteur du transport de marchandises et de logistique nous semble aussi stratégique. Les
entreprises de ce secteur présentent l’intérêt d’avoir une vision synthétique de ce que lui
demandent les différents distributeurs, mais aussi les industriels.
Ces deux secteurs ont d’ailleurs des liens très forts. Les impulsions innovatrices dans la
logistique au cours des quarante dernières années sont venues plutôt du côté des distributeurs.
Les entreprises de transport et de logistiques sont tendanciellement conservatrices.
B2K Consultants
16
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. La collecte des données
La présente recherche s’appuie sur deux sources d’informations complémentaires :
- l’analyse bibliographique et documentaire;
- les enquêtes par entretien approfondi auprès des entreprises de distribution et leurs
prestataires de transport et de logistique.
2.1 L’analyse bibliographique et documentaire
Les documents traités sont des livres, des rapports de recherche et d’étude, des thèses, des
articles publiés dans les magazines et journaux spécialisés. On a recherché aussi des
informations disponibles sur les sites Internet des entreprises et des associations
professionnelles ainsi que de l’administration. L’analyse bibliographique et documentaire a
permis d’élaborer le cadrage global de l’étude, de sélectionner les entreprises à enquêter, de
reconstituer le contexte des politiques publiques de chacun des pays étudiés.
2.2 Les enquêtes auprès des entreprises
Mais, la présente recherche s’appuie principalement sur les enquêtes par entretien approfondi
réalisées auprès des grandes entreprises de distribution et leurs prestataires de transport de
marchandises en France, et en complément en Italie et en Suisse.
Afin de garantir une base commune d’observation dans les trois pays (France, Italie et Suisse),
les enquêtes ont été conçues et réalisées sur la base d’une même méthodologie. Un guide
d'entretien a ainsi été conçu à cet effet.
Les entreprises ont été sélectionnées sur la base d’enquêtes et d’analyse documentaire
(journaux spécialisés, analyse des informations disponibles sur les Sites Internet des
entreprises). Par rapport aux objectifs de la recherche, nous avons privilégié les entretiens
auprès des grandes entreprises de distribution. Ces entreprises structurantes, c’est à dire
celles qui ont une position dominante dans la chaîne logistique et obligent les autres à jouer
leurs jeux, nous semblent être des cibles clefs en matière de définition des stratégies logistiques
et la mobilité de marchandises derrière qui est générée, et que l’on cherche à maîtriser. Les
entreprises de transport de marchandises et de logistique s’adaptent à la demande de leurs
clients constitués des grandes entreprises de distribution et industrielles. On a sélectionné ici, à
la fois des entreprises de transport de taille à la fois importante et moyenne, dans le transport de
lot et dans la messagerie et l’express.
Les entreprises sélectionnées ont été sollicitées pour des entretiens. Certains ont accepté,
d’autres ont refusé. Ainsi 26 entreprises ont été enquêtées sur les 31 entreprises pressenties.
Dans les entreprises enquêtées, les acteurs interrogés ont été des responsables au niveau
stratégique dans l’entreprise : directeurs de logistique ou de la supply chain, de communication,
de marketing, etc. Ces responsables au niveau stratégique ont parlé :
- des changements significatifs de leurs stratégies au cours des dernières années ;
- de l’influence des politiques publiques sur ces changements stratégiques et sur l’évolution
de leurs activités;
- l’influence des autres facteurs - ne dépendant des politiques publiques – ayant influé sur
l’évolution de leurs stratégies.
Le contenu des entretiens, mis en forme, a ensuite été validé par nos interlocuteurs.
B2K Consultants
17
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Bien que variable d’un pays à l’autre, le travail d’enquête réalisé est dans l’ensemble de très
bonne qualité, alors que les conditions d’enquête étaient difficiles dès lors que l’on cherchait à
approcher les cadres dirigeants des entreprises peu accessibles. Le contenu des entretiens
réalisés et la diversité des entreprises interrogées (entreprises de taille mondiale, entreprises de
centre-ville, etc.) permettent d'affirmer que cet échantillon de 26 entreprises interrogées,
dont 14 entreprises structurantes de la grande distribution et 12 entreprises de transport et de
logistique, constitue une bonne représentation des contextes des trois pays étudiés (France,
Italie et Suisse) pour produire des résultats de portée générale à propos de «l’influence des
politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises». Le tableau 1 présente la liste
des entreprises interrogées par pays. Le Rapport Final Annexe consigne les comptes rendus des
entretiens réalisés.
Pays
France
Italie
Suisse
Total
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Tableau 1 : la liste des entreprises enquêtées
Entreprises de
Entreprises de transport et de logistique
distribution
Carrefour
Auchan
Casino
Monoprix
Galeries Lafayette
Coop
Groupe PAM
GS Spa
Conad
Groupe Coin
Migros
Coop
Redoute
Galexis
14
Norbert Dentressangle
Easydis
Chronopost International
Satrap-Sotratour
Züst Ambrosetti
Deutsche Post
Saima Avandero
Arcese Transports
Bartolini Spa
La Poste
Sauvin-Schmidt
BTL Logistics
12
18
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
IV. Contenu du Rapport
Les résultats de la recherche sont regroupés en deux rapports :
1. un Rapport annexe qui regroupe les comptes-rendus détaillés des enquêtes menées dans les
trois pays (France, Italie et Suisse) ;
2. et le présent Rapport principal qui rassemble et synthétise l’ensemble des analysées
menées. Plus concrètement, ce rapport aborde, outre cette introduction (Chapitre I), les
chapitres successifs suivants :
Le chapitre II décrit le cadre global de la recherche, à savoir, l’évolution du contexte
économique général, la forte croissance de la mobilité de marchandises et la définition des
concepts de logistique et de stratégie logistique.
Après avoir reconstitué les contextes des politiques publiques (au sens plus large) dans les trois
pays (chapitre III), on analyse l’influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques
des entreprises de distribution (Chapitre IV) et leurs prestataires de transport et de logistique
(Chapitre V).
Le chapitre VI est consacré à la synthèse analytique comparée des principaux résultats de la
recherche sur les trois pays et à l’évaluation de l’impact des organisations logistiques des
entreprises de distribution et des politiques publiques sur le transport et sur mobilité des
marchandises.
En conclusion du rapport, on suggère des perspectives pour prolonger la présente recherche.
B2K Consultants
19
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE II
LE CADRAGE DE LA RECHERCHE
B2K Consultants
20
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
I. Evolution du contexte économique global
Il n’entre pas dans notre propos d’analyser les phénomènes économiques survenus depuis les
années 1960; nous souhaitons présenter ici les caractéristiques des principales transformations
du contexte économique de la France et des pays développés à partir d’indicateurs macroéconomiques durant les quarante dernières années.
1. De la croissance économique à la crise
La période 1959-1973 a été caractérisée par une croissance économique remarquable. Le trait
marquant de cette croissance est la progression de l’industrie au sein de la richesse nationale
française. Mesurée en terme de contribution à la valeur ajoutée de l’ensemble de l’économie, la
part de l’industrie passe de 22,2% à 26% de 1959 à 1973 ; l’agriculture, quant à elle, régresse
de 9,8% à 6,6%; la part des services se maintient ; le commerce connaît une légère baisse de
12,2% à 11,4% (Tableau 2) .
Agriculture
Bât. et génie civil
Commerce
Energie
IAA
Industrie
Tableau 2 : contribution des branches à la valeur ajoutée
1959
1963
1969
9,8
8,7
7,3
7,7
7,9
8,2
12,2
12,2
11,7
4,0
4,4
4,9
4,1
4,0
4,4
22,2
23,6
24,5
Service
Total
41,3
100
40,9
100
41,9
100
1973
6,6
7,4
11,4
5,1
4,5
26,0
42,1
100
Source : INSEE – La crise du système productif – décembre 1981
Les années 1974-1975 constituent une « rupture » sous la forme d’une crise économique qui a
frappée tous les pays développés. Cette crise économique s’est manifestée par les éléments
marquants décrits ci-après.
Une croissance économique ralentie. En comparaison d’autres pays, l’entrée de la France dans
la récession a été tardive (3ème trimestre 1974), mais son ampleur n’en a pas été moindre pour
autant : - 10% de la production industrielle au creux de la vague récessive (3ème trimestre
1975)2. Si le temps nécessaire à la reprise d’activité a été très variable d’un pays à l’autre, le
taux de croissance tendanciel des années (1974-1980) a été de moitié inférieur à celui de la
période 1966-1973, comme le montre le Tableau 3.
France
Allemagne (Rép. Fédérale)
Italie
Royaume Uni
CEE
Source : OCDE
2
Tableau 3 : Evolution du PIB en volume
1966-1973
1974-1980
+ 5,6
+2,8
+5,3
+2,3
+5
+2,8
+3,4
+0,9
+5
+2,3
1981
+0,3
-0,2
-0,2
-2,2
-0,6
INSEE – La crise du système productif
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21
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Dans le cas de la France, la croissance du produit intérieur brut (PIB) a été, entre 1974 et 1979,
en moyenne divisée par deux mais elle est restée légèrement plus élevée que celle de ses
partenaires de la CEE.
A l’exception de l’Allemagne Fédérale et du Japon, la plupart des pays développés avaient des
problèmes d’équilibre des échanges commerciaux. L’augmentation brutale du prix du pétrole
de 1974 allait durement affecter les pays vulnérables dont la France. Ainsi, entre 1973 et 1974,
le taux de couverture des échanges extérieurs chute de 10 points pour s’établir à 93%,
traduisant une détérioration des termes de l’échanges3. La situation s’est encore dégradée en
1980 et 1981, dégradation liée à l’augmentation d’environ 170% (nominalement) des prix du
pétrole brut en 1981 par rapport en 1978. Le taux de couverture des échanges passe de 97,7%
en 1979 à 90,8% en 1981, consécutivement à un accroissement des importations supérieur à
celui des exportations pendant les années 1980 et 1981.
Une forte inflation. La France a conservé sur toute la période 1973-1981 un taux d’inflation
supérieur à la moyenne des pays développés, malgré le recours à des mesures de politiques
publiques tels que le blocage temporaire des prix et des accords de modération par branche
(Tableau 4).
Tableau 4 : Taux d’inflation moyens comparés
1967-1973
1973-1980
France
5,9
11,1
Allemagne (Rép. Fédérale)
4,3
4,8
Italie
5
17
Royaume Uni
7
16
CEE
5,5
10,7
OCDE
5 ,4
10,4
Source : OCDE
1981
13,4
5,9
19,5
11,9
11,4
10,6
La montée du chômage. Dans tous les pays industrialisés, la récession de 1974-1975 s’est
accompagnée d’une élévation du chômage. Elle a fortement progressé en 1980 et 1981. Ce
processus n’a pas pris fin avec la reprise de l’activité ; au contraire, le chômage a continué à
augmenter.
Différents événements ou phénomènes économiques ont été à l’origine de cette crise
économique et sociale, entre autres : les dérèglements monétaires, l’affaiblissement de la
rentabilité des entreprises, l’émergence de nouveaux pays dans la concurrence internationale et,
bien sur, le renchérissement du prix du pétrole.
3
Le niveau de termes de l’échange peut s’apprécier par le rapport : prix des exportations / prix des importations. La chute est
de 14% pour la France consécutive au renchérissement de l’énergie en 1974.
B2K Consultants
22
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. Depuis le milieu des années 1980
On observe un nouveau modèle de croissance « flexible », caractérisé par la persistance de la
crise économique, même s’il y a des périodes de croissance qui succèdent à des années de
ralentissement de la croissance économique au cours des années 1980-1990 (Tableau 5).
Tableau 5 : Variation du PIB à prix constants* (variations en % par rapport à l’année précédente)
Pays de l’OCDE
Pays de l’U.E.
Italie
France
1981
1,6
0,1
0,6
1,2
1982
0,0
0,7
0,2
2,5
1983
2,7
1,5
1,0
0,7
1984
4,4
2,3
2,7
1,3
1985
3,3
2,4
2,6
1,9
1986
2,8
2,8
2,9
2,5
1987
3,2
2,7
3,1
2,3
1988
4,4
4,1
4,1
4,5
1989
3,3
3,4
2,9
4,3
1990
2,4
3,0
2,1
2,5
1991
0,7
1,4
1,3
0,7
*Variations réelles, net d’inflation.
Source: Conto Nazionale dei Trasporti - Ministero dei Trasporti e delle Infrastrutture, 1993
Royaume uni
-1,0
1,5
3,5
2,3
3,8
4,1
4,8
4,4
2,1
0,5
-2,2
La fin du XX siècle se caractérise toujours par la persistance de cette crise économique qui se
manifeste par la faiblesse de la croissance économique, en comparaison des années d’avant
crise, et par la dégradation des conditions du marché du travail avec un fort taux du chômage ;
l’inflation ayant atteint des niveaux raisonnables (Tableau 6).
éme
Tableau 6 : PIB, indice des prix à la consommation et taux de chômage
PIB à prix constants*
Italie
France
Royaume uni
UE des 15
Pays de
l’OCDE
1999
1,6
3,0
2,1
2,6
3,1
2000
2,9
3,6
3,0
3,4
3,9
2001
1,8
2,0
2,2
1,7
1,0
Indices des prix à la
consommation
1999
2000
2001
1,7
2,6
2,7
0,0
1,6
1,7
1,3
2,9
1,8
1,3
2,4
2,5
1,5
2,6
2,2
Taux de chômage standardisé
1999
11,5
10,8
6,0
8,7
6,6
2000
10,7
9,4
5,5
7,8
6,1
*Variations réelles, net d’inflation.
Source: Conto Nazionale delle Infrastrutture e dei Trasporti - Ministero dei Trasporti e delle Infrastrutture, 2001
B2K Consultants
23
Rapport final
2001
9,6
8,7
5,1
7,4
6,4
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
II. La forte croissance de la mobilité des marchandises
Au cours de la période observée, en particulier durant les vingt dernières années, la mobilité de
marchandises a considérablement augmenté en France, en Italie, en Suisse comme dans le reste
de l’Union européenne. La croissance de la mobilité des marchandises en France, annuellement
supérieure à l’évolution du Produit Intérieur Brut (PIB)4, est désormais en contradiction avec la
notion de développement durable5. Durant la période observée, c’est le transport routier qui a le
plus profité de cette croissance de la mobilité des marchandises. Or l’efficacité énergétique et
environnementale du transport routier est médiocre, par rapport au rail, à la voie d’eau et
transport maritime.
L’analyse bibliographique a permis de mettre en évidence d’une part la forte croissance de la
mobilité des marchandises et d’autre part l’hégémonie du mode routier.
1. La croissance du trafic de marchandises et l’hégémonie du transport routier
Au niveau européen, le rapport « analyse technico-économique du rôle du transport routier de
marchandises », réalisé par un groupe d’experts scientifiques de l’OCDE en 19866, met en
évidence les grandes tendances de la croissance de la mobilité sur la période 1970-1982.
Le Tableau 7 présente les taux de croissance annuels moyens du trafic de marchandises et du
Produit Intérieur Brut (PIB) marchands, hors service dans les pays étudiés. Durant la période
observée, les principaux constats et enseignements qui se dégagent peuvent être les suivants :
-
à l’exception du Danemark, les deux taux de croissance considérés (trafic et PIB) sont
positifs ;
-
le trafic de marchandises connaît, dans la plupart des pays, sauf en Italie, une croissance
plus importante « avant » comme « après » le choc pétrolier de 1974 ;
-
on observe d’un pays à l’autre, un taux de croissance relativement uniforme du trafic de
marchandises, généralement compris entre 1,5 % et 3,5%, celui-ci pouvant être supérieur ou
inférieur au taux de croissance de la production, suivant le pays. L’Italie et l’Espagne sont
deux pays qui ont connu la plus forte augmentation de leur trafic avec respectivement
5,70% et 3,75%.
4
Voir : INSEE "Comptes transport de la nation 1999" – page n°13 "PIB 99 : + 2,9 %" et page n° 30 "TM 99 : + 4,2 %".
Voir : Serge Antoine, Martine Barrère et Geneviève Verbrugge – "La planète Terre entre nos mains" La documentation
Française" 1994 – Chapitre n° 3 pages 29 à 38 " Le développement durable ou l'éco-développement : du concept à l'action".
5
6
OCDE « analyse technico-économique du rôle du transport routier de marchandises », réalisé par un groupe
d’experts scientifiques en 1986
B2K Consultants
24
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Tableau 7: taux de croissance annuel moyen du trafic de marchandises global hors cabotage (en
tonnes*kilomètres) et taux de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB) marchands hors service (en %)
Pays
1970-1974
1975-1982
1970-1982
Croissance
Croissance du Croissance Croissance du Croissance
Croissance
du trafic
PIB
du trafic
PIB
du trafic
du PIB
marchandises
marchand
marchandises
marchand
marchandises
marchand
Allemagne
+3,37
+2,73
+3,88
+2,33 (1)
+2,28
+1,78 (1)
Autriche (2)
+5,52
+5,18
+3,84
+2,49
+3,36
+2,69
Belgique
+4,35
+5,70
+2,05
+1,15
+0,88
+2,13
Danemark
+4,27
+2,95
-2,80 (1)
+1,43 (1)
+1,45 (1)
+1,07 (1)
Espagne
+9,26
+7,89
+2,11
+0,82 (1)
+3,65
+2,79 (1)
France
+5,31
+4,64
+0,46
+1,83 (1)
+0,72
+2,39 (1)
Italie
+1,50
+3,73
+9,20
+2,81
+5,70
+3,98
Luxembourg
+12,44
+6,03
+0,70
+1,14 (1)
+1,99
+0,62 (1)
Norvège
+4,30
+4,88
+1,59 (1)
+5,82 (1)
+2,94 (1)
+5,66 (1)
Pays-Bas
+2,75
+4,82
+2,67 (3)
+1,89 (4)
+1,72 (3)
+2,41 (4)
Grande-Bretagne
+0,84
+1,37
+0,08
+0,53
+0,71
+0,60
Suisse
+7,63
(nd)
+4,56 (1)
(nd)
+1,13 (1)
(nd)
Source : OCDE « analyse technico-économique du rôle du transport de marchandises » - Paris 1986.
(1) Jusqu’en 1981 seulement ; (2) Transport routier longue distance uniquement ; (3) Jusqu’en 1980 seulement ;
(4) Jusqu’en 1979 seulement.
Les taux de croissance sont obtenus par régression linéaire sur les séries de trafic total tous modes. Afin d’avoir
des chiffres comparables d’un pays à l’autre, la tendance obtenue est divisée par la moyenne de la série sur la
période 1970-1982.
La part du secteur routier dans les transports de marchandises en Europe (hors aérien et
maritime) n’a cessé d’augmenter au cours des 30 dernières années, au détriment du rail et de la
voie d’eau (Tableau 8). La part de la route est passée de 30,8 % à 44,5 % entre 1970 et 1999 ;
pendant la même période, le rail a perdu plus de la moitié de sa part de marché, en passant de
21,1 % à 8 % .
Tableau 8 : évolution de la répartition modale dans les pays de l’Union européenne (en % de
tonnes*kilomètres)
1970
1980
1990
1995
1997
1998
1999
Route
Rail
Voie navigable
Pipelines
30.8
33.1
40.7
43.2
43.4
43.7
44.5
21.1
15.2
11.1
8.4
8.6
8.4
8.0
7.7
5.7
4.7
4.4
4.3
4.2
4.1
5.1
4.9
3.3
3.2
3.1
3.1
3.0
Cabotage (intra
européen)
35.3
41.2
40.2
40.8
40.6
40.7
40.4
Source : UE Energy and Transport in Figures 2001
B2K Consultants
25
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Le Tableau n° 9 montre que durant la période observée la croissance de la part de marché de la
route dans le transport de marchandises a été le fait dominant dans tous les pays européens,
ainsi que la baisse généralisée du rail. La décroissance de la voie d’eau est moins accentuée.
Tableau 9 : évolution des parts de marché des différents modes (rail, route, voie navigable et
cabotage), au prorata des tonnes*kilomètres, en tendances annuelles de 1970 à 1982.
Pays
1970-1982
Route
Rail
Voie navigable
Cabotage
Allemagne
+1,22
-1,02
-0,21
Autriche
+1,97
-1,79
-0,18
Belgique
+0,93
-0,33
-0,6
Danemark
+0,56
-0,56
Espagne
+0,55
-0,55
France
+0,94
-0,68
-0,26
Italie
+7,60
-0,3
-2,10
+1,05
Luxembourg
+2,41
-2,26
-0,15
Norvège
+0,53
-0,53
Pays-Bas
+0,54
-0,24
-0,3
Grande-Bretagne
+0,61
-0,61
Suisse
+0,54
-0,46
-0,03
Source : OCDE « analyse technico-économique du rôle du transport de marchandises » - Paris 1986.
Pour les quelques pays dont les données sont disponibles avant 1970, le rapport constate une
tendance identique : soit une augmentation constante (en part de marchés) du trafic routier. Le
rail décline à un rythme comparable, la voie navigable ne varie que plus faiblement avec une
tendance à la baisse à partir de 1970.
Le Tableau 10 fait apparaître une croissance à peu près généralisée du parcours moyen d’une
tonne de marchandises par la route, cette croissance étant généralement supérieure à celle que
l’on observe pour l’ensemble du trafic tous modes confondus.
Tableau 10 : parcours moyen d’une tonne transportée par la route : taux de croissance annuel moyen
(entre parenthèse : tous modes)
Pays
1970-1982
Route
Tous modes
Allemagne
+3,21
+1,06
Autriche
+4,11
Nd
Belgique
+2,72
+1,05
France
+3,91
+2,35
Italie
-2,82 (1)
Nd
Luxembourg
+5,02
+1,93
Norvège
+2,29
+1,61 (2)
Pays-Bas
+1,24
+0,32
Grande-Bretagne
+3,17
Nd
Suisse
+1,53
+0,78
Source : OCDE « analyse technico-économique du rôle du transport de marchandises » - Paris 1986.
(2) Jusqu’en 1981 seulement ; (2) Transport routier longue distance uniquement.
En France, le Laboratoire d’Economie des Transports (Lyon) a reconstitué des séries longues
de la répartition modale de transport de fret en France (1841 – 1994) 7. Il ressort qu’entre le
début et la fin du XXème siècle, le rail est passé d’une position dominante, avec près de 80% de
7
Pr. Alain Bonnafous ‘La politique Française de Développement du fret ferroviaire’ CEMT ‘ Politiques nationales concernant
le transfert des marchandises de la route vers le rail : le cas de la Suisse, du Royaume Uni et de la France’ Janvier 2003 ; P. 48
et suivant
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26
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
la répartition modale, à une position beaucoup plus modeste, avec moins de 30% en 1994. Dès
le début de 1970, le fret routier a rattrapé le fret ferroviaire, alors que 10 ans plus tôt la part du
fer représentait plus du double de celle de la route. Cette analyse rejoint l’analyse du rapport
OCDE.
Selon Philippe Poudevigne « depuis plus d’un siècle, la route gagne des parts de transport face
au rail et à la voie d’eau en France. Les années 1980 à 1990 sont particulièrement
représentatives à cet égard puisque le partage modal évolue au profit de la route successivement
de 1%, 4% et 5% tous les 5 ans» 8. L’Etude REDEFINE9 a montré que de 1981 à 1995, il y a eu
en France une extraordinaire amélioration de l’efficacité logistique du transport routier :
augmentation du chargement moyen des véhicules, véhicule de plus grande taille et diminution
du taux de parcours à vide, etc.
L’activité fret de la SNCF a globalement progressé de 15% entre 1996 et 2000 et a même repris
des parts de marché à la route (environ 3% ) en 2000, avec une augmentation de 6,2 % en 2000
par rapport à 199910. Mais la part modale reste faible et se situe aux alentours de 20% des
volumes nationaux transportés. Le fret ferroviaire en France souffre d’un double handicap11 :
- des vitesses commerciales très inférieures à ce que peut offrir, porte à porte, le système
routier ;
- et une organisation du travail et de la production insuffisamment souple.
Cela s’explique notamment par le fait que les missions des trains de fret concernent des
itinéraires relativement chargés (axes Paris-Lyon-Marseille ou Paris-Lille), empruntés
également par les trains dits de grandes lignes, par des trains express régionaux (TER) et,
souvent par des TVG. Les ‘horairistes’ qui établissent les grilles d’exploitation des lignes
travaillent selon un système de priorité qui correspond aux pressions des autres services. C’est
ainsi que les ‘sillons’ de TGV sont évidemment prioritaires, ensuite les trains de grandes lignes,
puis les TER. Les trains de fret ne peuvent donc utiliser que les capacités restantes.
Tableau 11 : évolution du produit moyen du transport terrestre de marchandises (en % d’une année sur
l’autre) en France
Trafic routier de marchandises (ensemble)
Trafic ferroviaire (produit moyen de la TK)
Trafic fluvial
(produit moyen de la TK)
Sources : SNCF, VNF, SES
1993
+0,7
-5,1
0,0
1994
+0 ,8
-0,3
-0,6
1995
-3,4
-4,6
-2,9
1996
+1,3
+1,0
+4,4
1997
+1,0
-2,9
+4,9
1998
-0,2
-0,2
-11,1
1999
+0,4
-1,3
+6,2
En Italie, de 1959 à 1994, la mobilité des marchandises a augmenté de 340 %, passant ainsi de
58 à 257 milliards de tonnes*kilomètres12. Dans cette croissance, la part du transport par voie
ferrée a constamment diminué depuis la fin des années 1960 pour atteindre 13-14%13 au milieu
des années 1990. Il y a donc une prédominance du transport routier, qui détient plus de 60% (et
plus de 90% pour des transports sur des distances inférieures à 50 km). En 2000, 63,65% des
8
Poudevigne P. « Les déterminants de la circulation routière de fret en France de 1980 à 1995 », Notes de Synthèse du SES,
Mars –Avril 2000
9
Poudevigne P. « Les déterminants de la circulation routière du fret en France et en Europe de 1985 à 1995 » Notes de
synthèse du SES, Mars-avril 2000
10
38 ème rapport de la Commission des Comptes des transports de la Nation.
11
Pr. A. Bonnafous ‘La politique Française de Développement du fret ferroviaire’ CEMT ‘ Politiques nationales concernant le
transfert des marchandises de la route vers le rail : le cas de la Suisse, du Royaume Uni et de la France’ Janvier 2003
12
Conto Nazionale dei Trasporti 1998 Ministero Italiano dei Trasporti e della Navigazione
13
Le pourcentage de référence sont les tonnes-km (Conto Nazionale dei Trasporti 1999 - Ministero Italiano dei Trasporti e
della Navigazione).
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27
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
marchandises sont transportées par route, 21,12% par mer, 14,94% par voie ferrée et par
oléoduc et 0,32% par voie aérienne14. Le transport routier présente les principales
caractéristiques suivantes:
− la distribution territoriale de la demande de transport routier est déséquilibrée ; elle est
concentrée dans cinq régions du nord du pays15;
− la forte concentration des trafics sur quelques axes : environ 60% des flux inter-urbains se
concentrent sur 2% du réseau routier et autoroutier;
− la demande de transport les transports sur courtes et moyennes distances est très élevée, à
cause de l’extrême atomisation du tissu commercial et productif italien.
Durant les vingt dernières années, la dimension, la typologie et la position du système productif
a changé, surtout au Centre-Nord, tandis que le réseau d’infrastructures répond encore à la
vieille géographie industrielle. Aux variations que la demande subie s’oppose la structure
désormais obsolète des réseaux ferroviaires italiens (et européens) qui, ne s’étant pas adaptés au
progrès commercial, social et urbain. L’analyse des données relatives au réseau ferroviaire
(réseau des chemins de fer italien), montre que de 1981 à 2000 la situation est restée presque
stable16 alors que le réseau routier a augmenté d’environ 61%.
En Suisse, sur les vingt dernières années, la route a absorbé l'essentiel de la croissance du trafic
de marchandises (Figure 1). Les prestations du rail ont stagné au niveau de 1980. Ces chiffres
comprennent le trafic domestique ainsi que le trafic de transit. Ce dernier représente un quart
des prestations de transports (en tonnes-kilomètres) fournies en Suisse.
14
Conto Nazionale delle Infrastrutture e dei Trasporti 2001 – Ministero Italiano dei Trasporti e della Navigazione
Piémont, Lombardie, Ligurie, Vénétie et Emilie Romagne.
16
On passe 16.166 Km en 1981, à 16.066 en 1991 et enfin à 16.147 en 2000, la répartition au niveau régional restant également
stable.
15
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28
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Figure 1: Évolution du trafic de marchandises en Suisse
source: Office fédérale de la statistique
La plupart des analyses prospectives annoncent l’intensification du transport de marchandises.
Peter Eder17, qui reprend les conclusions du Programme européen sur le changement
climatique, estime que si les tendances actuelles perdurent, le transport de marchandises devrait
augmenter de 38 % (soit une moyenne annuelle de 2,7 %) et les transports de passagers de 24
% (soit une moyenne de 1,8 %) d’ici 2010 ».
Dans sa présentation du Livre blanc en matière de politique commune des transports, la
Commissaire européenne18, Loyola de Palacio, disait ceci en 2001: « l’objet de ce document
est de doter la communauté européenne d’un programme d’action visant à découpler
progressivement la croissance des transports et la croissance économique. En effet, tiré par la
croissance économique, le transport de marchandises devrait augmenter de 38% d’ici 2010 ».
En tendance, dans ce même document, on estime que si aucune mesure d’envergure n’est prise
dans l’Union des quinze pour utiliser plus rationnellement les avantages de chaque mode de
transport, d’une part le seul trafic poids lourds augmenterait d’ici à 2010 de près de 50% par
rapport à 1998, d’autre part les coûts externes de la congestion dus au seul trafic routier qui
représentent 0,5% du Produit Intérieur Brut communautaire, atteindraient 1 % en 2010.
En France, les travaux du SES mettent en évidence la croissance du transport de marchandises
au profit majoritairement de la route. En reprenant les travaux effectués au sein du SES, on
estime que sous l’hypothèse d’une croissance moyenne de la production industrielle de 2,2% /
an entre 1992 et 2015, les transports de marchandises devraient progresser de 2,1% / an dans
leur ensemble, avec une évolution toujours favorable à la route puisqu’elle augmenterait quant
à elle de 2,6% / an sur cette période19.
17
Peter EDER “Intensification du transport de marchandises: son rôle dans l’agenda de la durabilité”, traduit de
l’anglais par BGS Spain- IPTS N°62 –JRC –Sévilee, mars 2002, page 22.
18
Commission Européenne « Note d’Orientation du Livre blanc sur l’avenir de la politique commune des
transports », IP/01/1008, Bruxelles le 18 juillet 2001.
19
Giraul M. , Puig J.P. « Projections de la demande de transport à l’horizon 2015 » Note de synthèse du SES,
n°109, janvier-février 1997
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29
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Tableau 12: Evolution des parts modales des transports interurbains de marchandises en France, en tkm
Routier
Ferroviaire
Fluvial
Source : Girault, Puig, 1997
1971
51%
41%
8%
1992
75%
22%
3%
2010
81%
17%
2%
2. Les principaux facteurs en faveur du mode routier
En France les facteurs sont à rechercher du côté de la demande et de l’offre de transport.
Les profondes transformations du système de production-distribution dans un contexte
d’internationalisation des échanges, ont eu deux conséquences en matière de répartition modale
du trafic de marchandises en France:
- les matériaux pondéreux ont fortement baissé alors que le fer et la voie d’eau sont très
efficaces pour leur transport ;
- au contraire, les produits à haute valeur ajoutée et de faible densité ont considérablement
augmenté.
La route, qui était mieux placée pour ce type de transport (flux diffus, rapidité, fiabilité,
flexibilité, accessibilité, prix, réactivité, etc.), a su profiter de cette évolution structurelle de la
demande.
Côté offre, les facteurs, jouant en faveur de la forte expansion du secteur routier de ces
dernières années, établis par Maurice Bernadet20, sont les suivants:
- la très forte croissance du réseau autoroutier a permis aux entreprises de transport routier de
réduire leurs délais d’acheminement et d’améliorer leur fiabilité ;
- la route s’adapte plus facilement que les autres modes au progrès technique du fait d’une
rotation plus rapide du parc de véhicules ;
- depuis toujours le mode routier possède des caractéristiques concurrentielles, avec un grand
nombre d’entreprises de toutes tailles et plus ou moins spécialisées.
En Italie, une des caractéristiques principales de la demande de transport est le fort déséquilibre
entre le transport routier -favorisé- et les autres modes de transport. Cette différence s’est
amplifiée entre 1969 à 1995 où les transports routiers internes de marchandises ont augmenté
de 325%, contre 46% pour les transports par voie ferrée. Au cours des décennies 1980 et 1990,
la répartition des investissements publics a nettement favorisé le transport routier (82,79% en
1981 et 87,63% en 1991) par rapport aux chemins de fer (6,9%)21. Cette préférence du transport
routier trouve son explication dans le fractionnement du tissu industriel italien en une multitude
de petites et moyennes entreprises (PME), la route étant en effet le seul mode de transport
capable de permettre le transport de « porte à porte », en évitant ainsi la « rupture de
cargaison ».
En Suisse, l'augmentation de la part du trafic routier de marchandises au détriment du rail peut
s'expliquer par différents éléments.
20
Maurice Bernadet « Le transport routier de marchandises –fonctionnement et ses dysfonctionnements, Editions Economica,
Paris 1997
21
Conto Nazionale dei Trasporti 1981,1991,2001 – Ministero Italiano dei Trasporti e della Navigazione
B2K Consultants
30
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
D'une part, l'offre s'est améliorée; le réseau routier et plus particulièrement le réseau autoroutier
se sont développés de façon beaucoup plus importante que le rail (Tableau 13).
Tableau 13: évolution des réseaux de transport en Suisse (en km)
1960
1970
1980
1990
2000
Rail
5 099
4 991
4 982
5 030
5 035
Route (total)
55 934
60 139
66 545
70 970
71 132
Autoroute
112
651
1 171
1 495
1 638
Source: Office fédérale de la statistique
Les coûts de production du transport de marchandises ont diminué de façon plus importante
pour la route comparativement au rail. Ceci peut s'expliquer notamment par une augmentation
importante de la productivité pour les transports routiers. Cette augmentation provient en partie
des mêmes raisons citées ci-dessus pour la France, mais aussi par une évolution technologique
des véhicules. Le rail n'a pas bénéficié des mêmes améliorations, tant au niveau des véhicules,
qu'au niveau du management du système.
D'autre part, la demande en transport a aussi évolué pour s'orienter vers un besoin accru de
services rapides et flexibles. Ceci implique des faibles volumes transportés et favorise ainsi la
route au détriment du rail.
B2K Consultants
31
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
III. La définition des concepts de logistique et de stratégie logistique
1. La logistique sous son acception la plus large
Il existe de multiples définitions de la logistique dont la valeur et la conception se sont
fortement modifiées au cours des dernières années. On cite traditionnellement la définition
d’origine militaire : « la logistique consiste à apporter ce qu’il faut, là où il faut et quand il
faut »22. La logistique, recouvre toujours des fonctions de base de transport, de stockage et de
manutention dans les entreprises ; mais elle a étendu son domaine en amont vers l’achat,
l’approvisionnement, la production, et en aval vers la gestion commerciale et la distribution. La
logistique est définie alors comme « la gestion des flux de produits et d’informations, depuis la
livraison aux clients jusqu’à l’achat des produits, matières et composants aux fournisseurs,
visant à satisfaire la demande finale sous les contraintes de délai, de flexibilité, de coût et de
qualité23 ». Cette définition de la logistique a ensuite évolué en poursuivant son intégration en
amont et en aval de l’entreprise pour concerner la gestion de « l’ensemble des flux physiques
(des produits), d’informations et financiers depuis les clients des clients jusqu’aux fournisseurs
des fournisseurs 24», formant ainsi la logistique globale ou Supply Chain (SC). Ce concept
repose sur une vision globale et non plus partielle de l'entreprise, et vise à obtenir une
optimisation de l'ensemble de la chaîne de valeur (l’Annexe 3 décrit, schématiquement, les
phases d’évolution du concept de la logistique ).
La logistique sera considérée dans cette recherche sous son acception la plus large ; on définit
la logistique comme l’optimisation des flux de biens matériels, de main-d’œuvre et
d’informations, qui conduisent du fournisseur le plus en amont au client le plus en aval,
incluant la conception, la production ou la fabrication des produits, la distribution, le service
après vente, la récupération et la gestion des produits en fin de vie (déchets et emballages).
Cette définition, même si elle ne recouvre pas tout, constitue une logique directrice dans cette
recherche. C’est autour de cette logique directrice que tendent à se structurer les stratégies
actuelles des grandes entreprises, en ce qui concerne non seulement leurs relations avec leurs
fournisseurs et leurs clients, mais aussi les choix de localisation de leur appareil de production
et leur politique d’externalisation.
22
Yves Pimor « Logistique – Techniques et mise en œuvre » Dunod, 2 ème Edition, Paris 2001, P.3
Alain Garreau « E-commerce –Etat des lieux – Impact sur la gestion des entreprises », Rapport au Séminaire Conjoint
OCDE/CEMT, organisé à Paris du 5-6 juin 2001, P. 11
24
Alain Garreau, déjà cité, Note n°4 P. 27
23
B2K Consultants
32
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. Le concept de stratégie logistique
Ignorée il y a 20 ans, à peine émergente il y a une quinzaine d’années mais encore très centrée
sur l’opérationnel et la gestion quotidienne du transport et du stockage, la logistique est
reconnue aujourd’hui dans des missions beaucoup plus larges et stratégiques des entreprises de
distribution.
21. Qu’est ce que la stratégie?
Etymologiquement, la stratégie désigne la conduite des armées, l’expression vient de deux mots
grecs : stratos (qui signifie armée) et argeîn (conduire). Il s’agit donc à l’origine d’une notion
militaire. Le sens de l’expression va s’étendre. Les entreprises ont mis en œuvre des stratégies
élaborées avant que les théoriciens ne se manifestent.
L’initiateur de la formalisation de la pensée stratégique est, semble-t-il, Bruce Henderson25, le
fondateur de Boston Consulting Group (créé en 1963). Il conçut l’idée que la stratégie devait
être adossée aux lois économiques et entreprit de mettre au point un instrument simple
d’analyse stratégique, destiné à frapper l’esprit des dirigeants d’entreprise : le fameux
graphique à deux dimensions, le taux de croissance du secteur et la part de marché de
l’entreprise. La stratégie consiste alors à choisir un ensemble d’activités judicieusement
réparties sur ce graphique.
A la suite de ce « pionnier », le conseil en stratégie devait se développer avec rapidité, tout
d’abord outre-atlantique, sous l’impulsion des théoriciens. H.I. Ansof est un des premiers
universitaires à avoir écrit sur la stratégie des entreprises. La définition qu’il en donne réserve
l’utilisation du concept à un domaine précis de la politique de l’entreprise : « les décisions
stratégiques ont tout simplement pour objet de choisir une combinaison de produits et de
marchés par l’adjonction de nouveaux produits et marchés, par l’abandon de certains autres qui
ont cessé d’être intéressants et par l’expansion des positions actuelles »26. Par rapport à cette
notion de choix de la combinaison des produits et des marchés de l’entreprise, M.E. Porter27
étend le domaine des décisions qui relèvent de la stratégie mais en restreint les objectifs à la
seule rentabilité financière : « Une stratégie suppose l’adoption de mesures offensives et
défensives, pour mettre la firme dans une position tenable au sein du secteur, pour lui permettre
de faire face avec succès aux cinq forces de la concurrence, et par là, lui assurer un meilleur
rendement de son investissement »28. D’autres auteurs généralisent encore la notion et en
arrivent à une définition pouvant s’appliquer à de très nombreux domaines (militaire, politique,
économique, etc.). A ce titre, il est intéressant de citer la définition proposée par Capet, Cause
et Meunier : « La stratégie est (donc) la répartition des moyens par grandes masses, de manière
à atteindre, à des dates déterminées, des sous-objectifs qui permettent de réaliser des objectifs
ou un objectif plus fondamental. La stratégie s’appuie donc sur une certaine finalité. C’est elle
qui détermine la nature de cet objectif fondamental »29. Dès la fin des années soixante-dix, les
consultants privés avaient élargi le domaine de la stratégie stratégique, notamment H. De
Bodinat et V. Mercier pour qui le champ stratégique s’étend encore pour couvrir un « ensemble
25
Harvard-L’expansion « la stratégie », Paris 1978, P.9
H.I. Ansoff « Stratégie du développement de l’entreprise », Paris, Edtion Hommes et Techniques, 1984, Traduction de
Corporate startegy, McGraw-Hill, 1965.
27
M.E. Porter « Choix stratégiques et concurrence », Paris Economica 1986, Traduction de Competitive Strategy, The Free
Press, McMillan, New York, 1980
28
M.E. Porter, op. cit. P. 37
29
M. Capet, G. Caube et J. Meunier « diagnostique, organisation, planification d’entreprise » Economica, Paris, 1986, P. 81
26
B2K Consultants
33
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
de décisions et d’actions permettant d’anticiper, ou, au moins, de se prémunir face à un avenir
peut-être prévisible mais en tout cas incertain »30. L’accent est alors mis sur les motivations à
long terme des actions et décisions stratégiques. A.C. Martinet, partant de la distinction opérée
par H.I Ansof31, propose une typologie des décisions dans l’entreprise qui nous paraît
intéressante, par rapport à l’objet de notre recherche. Il observe que deux catégories de
décisions s’opposent par toute une série de caractères ayant trait à différents domaines : les
décisions stratégiques et les décisions courantes. Une synthèse en est présentée dans le Tableau
14.
Tableau 14 : Caractéristiques décisionnelles
Décisions stratégiques
Décisions courantes
Global
Local
Longue
Courte
Faible
Forte
Pluri
Mono
Variable
Donné
Variable
Contrainte
Pluri ou englobant « flous »
Mono « clairs »
Partielle, agrégée
Large, fine
Faible
Forte
Heuristiques
Algorithmiques
Elevé
Variable
Entrepreneuriale,
Exploitation
Création
Gestion
Source : A.C. Martinet « Stratégie », Vuibert, Paris 1983, P. 15
Caractères
Impact
Durée
Réversibilité
Dimensions
Environnement
Temps
Objectifs
Information
Structuration
Modèles
Niveau
Nature
En conclusion, la stratégie apparaît comme un ensemble de décisions stratégiques et d’actions
qui orientent fortement l’activité de l’entreprise à long terme.
22. La stratégie logistique d’une entreprise de distribution
L’âpreté croissante de la concurrence rend la logistique inéluctable dans la formulation de toute
stratégie d’une grande entreprise de distribution. Il y a deux raisons à cela : la nécessité d’une
part de réduire les coûts (économie d’échelle, rationalisation des circuits de distribution, etc.)
et, d’autre part d’offrir les meilleurs services à la clientèle. Cette stratégie logistique devra être
cohérente la stratégie globale de l’entreprise.
Pour la plupart des entreprises de distribution, interrogées dans le cadre de nos enquêtes, « la
logistique est stratégique parce qu’elle contribue aux résultats et aux performances de
l’entreprise » (citation). Elle est donc perçue comme un levier de création de valeur et comme
un des moyens de différenciation par rapport à la concurrence.
L’entreprise de distribution, qui se définit elle-même avant tout comme une entreprise de
commerce, la logistique est un service. Les directions logistique, qui se sont mise en place
progressivement, élaborent des stratégies très dépendantes de l’évolution du commerce, et de
l’ensemble de l’entreprise. Les stratégies logistiques sont des stratégies de ‘second niveau’,
davantage inspirées par l’intérieur que par l’extérieur. Dans le cadre de la présente recherche,
30
31
H. De Bodinat et V. Mercier « l’analyse stratégique moderne » in Harvard -L’expansion, « La Stratégie », Paris 1978, P.11.
A.C. Martinet « Stratégie », Paris Vuibert, 1983 P. 13
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dans la stratégie logistique d’une entreprise de distribution on a fait une distinction entre les
décisions logistiques stratégiques et les décision opérationnelles :
-
les décisions stratégiques qui concernent, par exemple, les collaborations entre distributeurs
et fournisseurs ; intégration ou externalisation logistique, investissements dans les entrepôts
(nombre, localisation, dimension, etc.); localisation des magasins ; internationalisation des
réseaux, maîtrise des enjeux et des coûts, définition de l’ampleur et du rythme des
changements ;
-
les décisions opérationnelles d’exécution qui concernent principalement les opérations
spécifiques de la distribution physique (transport, commandes, manutention, stockage).
La stratégie logistique d’un entreprise de distribution est un ensemble de décisions stratégiques
et d’actions qui orientent fortement l’ensemble des activités de l’entreprise à long terme. Elles
sont davantage inspirées par l’intérieur que par l’extérieur.
23. La stratégique d’une entreprise prestataire de transport et de logistique
Les entreprises de transport, contrairement aux distributeurs, ont comme cœur de métier les
prestation de transport et de logistique. Dans le cas présent, les stratégies ‘logistiques’ des
prestataires de transport et de logistique se confondent avec leurs stratégies générales
d’entreprise.
B2K Consultants
35
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE III
L’EVOLUTION DU CONTEXTE DES POLITIQUES PUBLIQUES
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36
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I. Définition et méthode de reconstitution
1. Le contexte de politiques publiques sous son acception la plus large
La France est un état unitaire. Cependant, il convient d’observer qu’il s’agit d’une apparente
unité qui cache en réalité une certaine différenciation des acteurs publics et des rationalités
visées à travers les politiques publiques. En plus des ministères et d’un parlement bicaméral
(Assemblée nationale et Sénat), les conseils régionaux, les conseils généraux et les
municipalités exercent également des responsabilités dans le secteur des transports au niveau
local. L’Etat central lui-même n’est pas un acteur unique : des départements ministériels, autre
que celui du transport, interviennent (ceux des finances, de l’environnement, de
l’Aménagement du territoire et de l’Intérieur, etc.). Par ailleurs, le domaine des transports n’est
pas un champ clos de rationalités intrinsèques, mais un carrefour où se croisent d’autres
finalités : sécurité militaire, lutte contre l’inflation, équipement du milieu rural, transferts
sociaux, etc. S’avoir ainsi où commencent et où finissent les politiques publiques est donc un
problème difficile à résoudre. Ainsi, dans la présente recherche, le contexte des politiques
publiques, est défini comme l’ensemble des acteurs publics et leurs d’outils
d’interventions qui s’inscrivent en général dans un cadre global commun pour faire
prévaloir l’intérêt général. On entend par acteurs publics, l’Etat central, les collectivités
territoriales (régions, départements et communes) et les institutions européennes et
internationales. Ces acteurs publics s’expriment et interviennent dans les différents domaines
de la vie économique et sociales du pays à travers des outils d’action publique : lois,
règlements, directives, documents de planification et textes.
2. Méthode de reconstitution
Il serait fastidieux de présenter un inventaire exhaustif du contexte des politiques publiques.
Dans la présente recherche, on limite l’analyse aux politiques publiques ayant eu des impacts
ou qui sont susceptibles d’influées sur les stratégies logistiques des entreprises au cours des
quarante dernières années. Pour la reconstitution du contexte des politiques publiques, on a
opéré en deux étapes.
-
-
Dans une première étape, avant la réalisation des enquêtes auprès des entreprises et d’après
les connaissances qu’on en a, on a recensé les principaux acteurs publics et les outils et
moyens d’actions publics (passés et actuels) dans tous leurs aspects susceptibles
d’influencer les stratégies logistiques des entreprises. Cette première description de
l’évolution du contexte des politiques publiques constitue une première hypothèse de
travail. Cette analyse a été réalisée sur la France, sur l’Italie et la Suisse ;
Dans un deuxième temps, après les enquêtes, on a amélioré la description de ce contexte sur
la base des entretiens approfondis réalisés auprès des entreprises. On a rajouté notamment
des politiques publiques évoquées par les entreprises ; celles ayant eu des influences sur
leurs stratégies logistiques et qui étaient absentes de la description initiale.
Le contexte des politiques publiques ainsi reconstitué s’articule autour d’une part des
principaux acteurs publics, à différents niveaux d’échelle géographique, et leurs orientations
stratégiques en matière de transport, d’environnement et d’aménagement du territoire, et
d’autre part des outils et moyens d’intervention publics (lois, directives, règlements, documents
de planification, etc.).
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37
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
II. Les acteurs publics et leurs orientations stratégiques
Les analyses bibliographiques et documentaires ont permis de repérer et d’identifier, à
différents niveaux d’échelle territoriale, les principaux acteurs publics et leurs orientations
stratégiques en faveur des transports, de l’environnement et de l’aménagement du territoire. Les
principaux acteurs institutionnels en jeu peuvent être les suivants :
- l’Union européenne
- l’Etat central ;
- les régions ou cantons ;
- les départements ou provinces ;
- les communes.
Nous les analysons dans cet ordre en se concentrant sur leurs politiques en matière de transport,
d’environnement et d’aménagement du territoire.
1. L’Union européenne et ses orientations stratégiques
Il y a de plus en plus des règlements nationaux en matière de politique de transport,
d’environnement qui résultent de la transposition de règlements et directives de l’Union
européenne32. Celle-ci intervient également en vue de la construction du marché unique
européen. L’aménagement du territoire ne relève pas de l’Union européenne découlant du traité
d’Amsterdam , mais des compétences nationales ou locales.
La France et l’Italie font partie de l’Union européenne (UE). Dans ces deux pays, ce sont les
parlements qui ratifient les directives et règlements communautaires. La Confédération suisse
n’est pas membre à part entière de l’Union européenne ; seuls certains points sont régis par des
accords bilatéraux et qui l’engagent. Par ailleurs, l'importance des pays de l'UE dans l'économie
(76.3% des exportations suisses en 2001) et sa position géographique enclavée font que la
Suisse est fortement influencée par la politique communautaire.
Les principales institutions européennes sont décrites dans le schéma ci-après. Le Conseil de
l’Union européenne (CE) est le principal organe législatif et décisionnel de l’UE. Il réunit les
représentants des gouvernements des Etats membres. Le Conseil, en collaboration avec le
Parlement européen, fixe les lois (directives, règlements, budget) régissant les activités de la
communauté européenne (marché intérieur, politiques communes et communautaires, liberté de
circulation des marchandises, des personnes et des capitaux). Directement élus pour cinq ans,
les membres du Parlement européen (PE) siègent, non pas par nationalité, mais par affinité
politique. A l’instar des parlements nationaux, le PE dispose de commissions parlementaires
chargées de problèmes particuliers (relations extérieurs, budget, environnement, etc.). La
Commission européenne est le moteur de l’UE. Elle agit indépendamment des gouvernements
des Etats membres. Le Président est choisi par les gouvernements des Etats membres et doit
être approuvé par le PE. Les autres membres sont nommés les Etats pour cinq ans. Elle
accomplit une grande partie du travail quotidien nécessaire au fonctionnement de l’Union. Elle
élabore les propositions de nouvelles lois, qu’elle soumet au Conseil et au PE. Elle veille à la
bonne exécution des décisions de l’UE et supervise la manière dont les fonds européens sont
dépensés. Elle veille aussi au respect des traités européens et du droit communautaire.
32
Les Etats membres : Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas,
Portugal, Royaume-Uni, Suède.
Nouveaux Etats membres : Chypre, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Malte, Pologne, République tchèque, Slovaquie, Slovénie.
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38
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Conseil européen
15 membres (1 par Etat)
(25 avec l'élargissement)
Adopte
Accords internationaux
Adopte
Commission européenne
Propose
Parlement européen
20 membres pour 5 ans
626 députés
Adoptent
(732 avec l'élargissement)
Lois européennes
(directives, règlements, budget)
S'appliquent
Les Etats membres (15 Etats membres et 25 avec l'élargissement)
Figure 3 : organigramme des principales institutions européennes
Les autres institutions de l’UE sont : la cour de justice, la cour des comptes, la Banque centrale
européenne, la Banque européenne d’investissements, le Comité économique et social et le
Comité des régions.
Les orientations stratégiques de l’Union européenne en matière de transport et
d’environnement, définies dans le Livre Blanc33, incitent au rééquilibrage du transport de
marchandises entre les différents modes pour fluidifier les principaux axes d’échanges
européens. Ces orientations s’appuient sur la création d’un marché intérieur européen ainsi que
sur une mobilité durable qui implique, entre autres, une réduction de l’émission des gaz à effet
de serre. Pour les transports, il s’agit de parvenir à une intégration des réseaux nationaux par
des mesures de planification, du système d’information (chaîne de transport intermodale), de
l’interopérabilité, de la fiscalité (concurrence), de la tarification d’usage des infrastructures et
de la revitalisation du rail. Ces orientations stratégiques européennes rejoignent, comme on le
verra, complètement celles qui sont affichées au plan national.
33
Le Livre Blanc relatif à « la politique européenne des transports à l’horizon 2010 :l’heure des choix » publié le 12
septembre 2001 par la Commission des Communautés européennes.
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39
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. Les orientations stratégiques nationales
La France est un état unitaire doté d’un parlement bicaméral (Assemblée nationale et Sénat) qui
est l'organe de législation. Les ministères qui jouent un rôle important dans la définition des
stratégies et politiques d’aménagement du territoire, de transport et d’environnement du pays
sont, entre autres ceux des transports, de l’économie et finance, de l’écologie et du
développement durable, et le ministère de l’intérieur. Les transports dépendent d’un grand
ministère de l’équipement, qui coiffe aussi le tourisme, la mer et le logement. Le ministère de
l’économie et des finances détient un pouvoir considérable via la fiscalité, entre autre la taxe
intérieure sur les produits pétroliers (PIPP). Ce ministère a également en charge la politique
économique, donc le soutient à la croissance. Le ministère de l’écologie et du développement
durable a en charge, outre l’aménagement du territoire, les accords internationaux concernant
notamment le réchauffement climatique (Kyoto) ; il est concerné au premier chef par la
difficulté, plus grande que les autres ministères, qu’ont les transports de maîtriser leur
consommation d’énergie et leurs nuisances. Le Ministère de l’Intérieur a la tutelle des
collectivités territoriales dont on verra le rôle croissant. Il partage avec la justice la charge de la
répression routière.
L’Etat était, à l’origine, seul acteur dans le domaine de l’aménagement du territoire. Désormais,
il a à ses côtés les collectivités territoriales, auxquelles les lois de décentralisation du début des
années quatre-vingt, a donné de nouvelles responsabilités. Le développement durable est
devenu l’objectif principal affiché de la politique de transport, de l’aménagement du territoire
et environnement. Car, depuis des années, la politique de transport a favorisé le transport
routier en mettant en place un réseau d’infrastructures autoroutières de qualité. Les orientations
de politique de transport, qui affirment clairement la nécessité de rééquilibrer le transport entre
les différents modes en faveur des modes alternatifs à la route (la navigation fluviale, le fret
ferroviaire et du cabotage maritime) afin de préserver l’environnement, sont relativement
récentes : il s’agit de la Loi d’Orientation pour l’Aménagement et le Développement Durable
du Territoire de 1999 et de manière plus concrète les Schémas de Services Collectifs des
transports 34 (se reporter au Paragraphe suivant).
L’Italie, est aussi un état unitaire ayant un Parlement bicaméral (Chambre des députés et Sénat)
qui est l'organe principal de législation. Sur la base du principe de la séparation des pouvoirs,
les fonctions du Parlement ne se limitent pas à la législation; il a aussi les pouvoirs de contrôle
des actes du Gouvernement, d’enquêtes, d’évaluation de l’Etat, de désignation du Président de
la République, de désignation du tiers des juges de la Cour Constitutionnelle. Les principaux
Ministères impliqués dans la définition des politiques nationales sont ceux des transports et des
infrastructures, de l’environnement et du territoire et du travail. Les orientations politiques et
stratégiques nationales sont définies 36 dans les domaines de la protection de l’environnement,
de politique de transport et d’investissement en infrastructures, de planification territoriale et
de sécurité.
35
La Suisse, en revanche, est une confédération de 26 cantons qui disposent d'une relative
autonomie (ci-dessous l’organigramme). L’Etat est représenté en Suisse par le canton. L'organe
34
Les schémas multimodaux de services collectifs de transport de voyageurs et de transports de marchandises ont été
approuvés par le CIADT du 9 juillet 2001.
35
La Chambre a le siége au Palais de Montecitorio, le Sénat au Palais Madama. Mais il y a quelques « séances communes »,
comme par exemple : l’élection et le serment du Président de la République, la mise en état d’accusation du Président de la
République, du Président du Conseil des Ministres et des ministres, la nomination des juges de la Cour Constitutionnelle.
36
Source : Piano Generale dei Trasporti e della Logistica, 2000
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40
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
principal de législation est l'assemblée fédérale (Conseil national et Conseil des Etats). Dans
certains domaines, les citoyens ont la possibilité de participer directement à la législation par le
biais d'un référendum ; il s’agit là d’une particularité de la démocratie suisse. Tous les citoyens
majeurs disposent du ‘droit d’initiative’; ce qui permet à 100 000 citoyens de revendiquer une
‘votation’ sur les projets de modifications constitutionnelles, nécessitant la double majorité du
peuple des cantons ; ou bien à 50 000 citoyens de réclamer un référendum sur les lois fédérales
ou arrêtés fédéraux de portée générale. L'acceptation de "l'initiative sur les Alpes", est un
exemple de l’exercice de ce ‘droit d’initiative’. La population désirait limiter au maximum les
nuisances du transport et particulièrement celles du transport de marchandises.
Le Conseil fédéral, organe exécutif suprême de la Confédération (équivalent au gouvernement
en France), est composé de sept membres, élus par l'assemblée fédérale pour une période de
quatre ans, en veillant à garder une représentation proportionnelle à chaque région linguistique
et importance des partis politiques. Le Conseil désigne en son sein un président. Ils dirigent
l'administration fédérale organisée en départements (équivalent des Ministères en France).
Chacun des membres du Conseil fédéral est à la tête d’un département. Le pouvoir judiciaire
est exercé par le Tribunal fédéral et par les cours inférieures cantonales.
Assemblée
fédérale
Tribunal
fédéral
Conseil fédéral
Département
des affaires étrangères
Département
de l'intérieur
Département
de justice et police
Département
de la défense
Département
des finances
Département
de l'économie
Département
de l'environnement,
des transports
et de l'énergie
Figure 4: Organigramme de la confédération suisse
Les questions de préservation de l'environnement ont pris une importance de plus en plus
grande dans la population suisse. La constitution donne au Conseil fédéral le rôle de favoriser
le développement durable du pays (art. 2). Les orientations stratégiques s’articulent autour de
trois axes :
- responsabiliser les entreprises et les particuliers sur les implications de leurs actions. Les
mesures prises visent à informer et à inciter (par exemple en ce qui concerne le recyclage) ;
- faire fonctionner les mécanismes du marché en faisant apparaître le véritable coût des
ressources utilisées (internalisation des coûts externes). Cela passe par l'intégration du
principe du pollueur-payeur. L'introduction de la RPLP en est un exemple ;
- prescrire et interdire dans les cas où les mesures volontaires et les instruments économiques
ne permettent pas d'atteindre les buts.
La politique des transports, définie au niveau du Conseil fédéral, s’inscrit dans cette optique.
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41
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. Les Régions et Cantons et leurs orientations stratégiques
En matière de décentralisation, l’Etat français, jadis très centralisateur, a connu des réformes
majeures dans les années quatre-vingts. La loi de décentralisation du 2 mars 1982, en effet, a
créé la Région qui regroupe un ensemble de départements en fonction de leurs intérêts
économiques et culturels. La France compte 25 régions (métropole : 21 ; outre mer : 4) qui
agissent dans le cadre des compétences qui leur ont été conférées par les lois de
décentralisation. La figure 5 consigne les régions métropolitaines.
L’exécutif régional est constitué par le Conseil régional dont les membres sont élus pour 6 ans
au suffrage universel direct. Le président est élu par les conseillers régionaux. L’organisation
de la région comporte également un bureau et plusieurs commissions dont une commission
permanente. Il élabore et approuve le plan régional, en respectant les orientations du plan
national et les prescriptions de la loi. A côté du Conseil régional, il y a un « conseil économique
et social régional » dont les membres sont désignés et non élus. Cet organe donne des avis
préalables sur les affaires examinées par le conseil régional.
Dans le secteur des transports, de l’environnement et de l’aménagement du territoire, la Région
co-finance les travaux des infrastructures de transport (routes, aéroports, canaux, ports, gares
ferroviaires) dans le cadre des Contrats de Plan Etat-Région (CPER). La première génération de
CPER est entrée en vigueur en 1984 pour une durée de cinq ans. La quatrième génération fut
engagée en 2000 pour sept ans (2000-2006). Dans ces CPER, l’Etat et les régions ont affiché
trois priorités : le développement durable ; l’emploi ; la cohésion sociale.
Avec ses programmes d’aides financières aux entreprises industrielles et commerciales, le
Conseil régional favorise le développement économique qui est susceptible d’influencer les
stratégies logistiques des entreprises. Elle agit le plus souvent en partenariat avec d’autres
acteurs publics (Etat, collectivités territoriales, organismes consulaires, associations, et la
population régionale) à travers leurs représentants au niveau du Conseil Economique et Social
Régional.
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42
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Figure 5: les régions françaises
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
L’Italie, comparée à la France, connaît un régionalisme plus poussé. Il y a 20 régions dont 15
régions à « statut ordinaire » et 5 à « statut spécial »37. Les cartes 34 et 35 consignent les
régions et principales italiennes. Au terme des transformations majeures du paysage politicoinstitutionnel du pays de 1997 à 2001, les régions ont bénéficié notamment des compétences
législatives (avec des lois de même valeur que les lois nationales), dans les limites fixées par la
Constitution38.
Le pouvoir exécutif et législatif est exercé par le Conseil régional. Le pouvoir législatif des
régions à statut spécial est dit « exclusif », c’est à dire qu’en cas de contradiction entre la loi
(Etat) et une loi régionale, prévale la deuxième39. Celui des régions à statut ordinaire est limité
soit par les lois (« leggi-cornice »), soit par l’intérêt national et des autres Régions. Les
conseillers régionaux sont élus au suffrage universel direct pour cinq ans. Le conseil régional
élit, en son sein, un président. Depuis 2000, un président de la région (différent du président du
conseil général) est élu au suffrage universel direct pour cinq ans ; il s’entoure d’un bureau
(giunta) dont les membres ne sont pas nécessairement issus du conseil régional. Le président de
la région et la giunta constitue l’exécutif.
En matière de transport, d’aménagement du territoire et d’environnement, les régions élaborent
des Plans Régionaux des Transports sur la base des lignes directives du Plan Général des
Transports et de la Logistique. Les zones urbaines, caractérisées par un taux de mobilité élevé,
ont pour mission de présenter d’élaborer des Plans Urbains de la Mobilité.
Figure 6 : Régions d’Italie
Figure 7 : Cités principales d’Italie
37
Les 15 Régions à statut ordinaire sont : Piémont, Lombardie, Vénétie, Ligurie, Emilie – Romagne, Toscane, Ombrie,
Marches, Latium, Abruzzes, Molise, Campanie, Pouille, Basilicate, Calabre.
Les 5 régions à statut spécial sont : Sicile, Sardaigne, Trentin Haut-Adige, Vallée d’Aoste et Frioul, Vénétie Julienne.
38
Les Régions ont l’autonomie financière dans la forme et dans les limites établies par les lois de la République, qui la
coordonnent avec la finance de l’Etat, des Provinces et des Communes. Aux Régions sont attribuées contributions propres et
part de contributions du Trésor public en relation au besoin des Régions pour les dépenses nécessaires pour formaliser les leurs
fonctions normales.
39
Par exemple, le pouvoir législatif exclusif prévu par les statuts de la Région Sicile, concerne les suivantes matières :
agriculture et forêt, industrie et commerce, travaux publiques, etc.
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44
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La Suisse est une confédération de 26 cantons. En comparaison avec la France et l’Italie,
chacun des 26 cantons est plus autonome et jouit de compétences très étendues qu’il exerce
dans le cadre de la constitution et fixées dans sa propre constitution. Il définit sa propre
organisation politique et administrative. Les 26 cantons sont notamment souverains en ce qui
concerne l'aménagement du territoire et la fiscalité. Une grande liberté leur est aussi accordée
dans les domaines des infrastructures, de la politique sociale et du droit.
Figure 8 : Les 26 cantons formant la confédération
Chaque canton édite un plan directeur qui fixe sa politique en matière d'aménagement du
territoire40. Celui-ci doit être approuvé par le conseil fédéral ce qui permet une cohésion au
niveau national. Il énumère les mesures à prendre à court et à moyen terme, leur calendrier et
leurs effets. Il n'est contraignant que pour les autorités. Le plan directeur cantonal doit aussi
bien tenir compte des plans sectoriels de la Confédération que des plans communaux.
Inversement, il sert de référence pour la planification de la Confédération et des communes. En
ce sens il joue un rôle de charnière important. Les programmes de réalisation décrivent et
concrétisent les mesures à court et moyen terme qui se fondent sur les Grandes lignes. La loi
sur l'aménagement du territoire (LAT) traduit ces stratégies au niveau législatif.
40
La stratégie du gouvernement en matière d'aménagement du territoire a été explicitée en 1996, dans le rapport du Conseil
fédéral sur les grandes lignes de l'organisation du territoire suisse.
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45
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
4. Les Départements et Provinces et leurs compétences
En France, le département regroupe plusieurs communes ; il est l’échelle territoriale entre la
région et la commune. La France se compose de 100 départements. Depuis les lois de
décentralisation 1982/1983, l’organe exécutif du département est le Président du Conseil
général dont les membres (conseillers régionaux) sont élus au suffrage universel direct tous les
6 ans. Le président du conseil général est élu par les conseillers régionaux.
Les principales compétences du département sont : action sanitaire et sociale, transports
routiers non urbains des personnes, construction et entretien des collèges, réseau des routes
départementales (construction et entretien); solidarité financière à l’égard des zones rurales. Les
départements élaborent également les schémas directeurs des transports, organisent les services
réguliers routiers non urbains et scolaires sur des lignes d’intérêt local.
En Italie, la Province est le niveau territorial intermédiaire entre la région et la Commune. Les
organes de la province, semblables à ceux de la région, comprennent : le conseil provincial élu
pour cinq ans au suffrage universel direct ; le président du conseil provincial (élu par le
conseil) ; la giunta ; le président de la province (élu au suffrage universel depuis 1993).
Depuis 1990 (la loi sur le règlement des autonomies locales des années) et surtout depuis 1997
(Décret législatif de la loi 616/1977) les provinces se sont vus attribuer un grand nombre de
compétences : la défense du sol ; la valorisation et la sauvegarde de l’environnement, des
ressources hydriques et énergétiques, des biens culturels ; la prévention des calamité; les
transports et la viabilité ; la protection de la fleure, de la faune, des parcs et réserves naturels ;
la chasse et de la pêche ; l’organisation de l’élimination des déchets au niveau provincial et le
control des décharges ; les services sanitaires, d’hygiène et prophylaxie, etc.
5. Les Communes et leurs compétences
En France la Commune est l’unité élémentaire de l’organisation territoriale, comme en Italie et
en Suisse.
La France compte plus de 36 000 communes, dont plus des trois quarts ont moins de 1 000
habitants ; mais quelle que soit la taille, elles ont le même statut (à l’exception de Paris qui est
également département).
Les conseillers municipaux sont élus tous les six ans au suffrage universel direct. Le maire est
élu par le conseil municipal qu’il préside. Les adjoints qui constituent avec le maire la
« municipalité » sont élus de la même façon. Le maire est réellement l’exécutif et il dirige
l’administration communale.
Les communes jouent un rôle vital dans la pérennisation et la création d’espaces industriels,
commerciaux ou logistiques. Les Plans Locaux d’Urbanismes (qui ont remplacé les Plans
d’Occupation des Sols (POS)) sont des outils de planification, à la disposition des communes,
qui définissent les règles d’occupation de l’espace pour les différentes fonctions urbaines
(activités industrielles et commerciales, équipements logistique, normes d’accès et de
stationnement, construction des bâtiments, etc.) ; mais ils contiennent aussi de nombreuses
possibilités de réglementation du transport de marchandises, limitation de vitesse, règles de
stationnement, zone piétonne. Les communes entretiennent et développent également le réseau
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46
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
routier communal. Toutes ces décisions sont susceptibles d’influencer les stratégies logistiques
des entreprises.
L’Italie, compte plus de 15 000 communes. Les organes sont le conseil, la giunta et le maire.
Le conseil municipal élit un président qui n’est pas le maire. Depuis 1993, dans les communes
de plus de 15 000 habitants, le maire est élu au suffrage universel direct.
Les communes gèrent de nombreux services publics en régie directe. En plus des fonctions
déléguées par les provinces, les régions et l’Etat, la commune a des compétences dans les
domaines de la santé, de l’assistance scolaire, de la police (par exemple : la discipline du
trafic), de l’urbanismes (c’est le commune qui adopte le plan d’aménagement et accorde les
concessions du bâtiment), du logement, des transports et des routes, etc.
La Suisse compte 2 842 communes. Cet émiettement des structures communales, comparable à
celui de la France, a bien sûr des conséquences sur l’aménagement du territoire. L’organisation
politique et administrative des communes varie beaucoup d’un canton à l’autre, notamment en
matière d’autonomie. Les communes possèdent elles aussi une certaine liberté dans les
domaines de la fiscalité et de l'aménagement du territoire.
Les communes établissent un plan d'affectation ayant force obligatoire pour chacun. Il
détermine le mode et la mesure de l'utilisation du sol parcelle par parcelle. Des zones sont
définies (par exemple zone industrielle ou zone agricole) qui restreignent fortement les activités
possibles. L'élaboration des plans d'affectation vise à coordonner la délimitation des zones avec
la protection de l'environnement (protection de l'air OpAir, protection contre le bruit OpB).
Dans certaines parties du territoire ou pour des objets particuliers (par exemple aéroport ou
centre commercial), des plans d'affectation de détail peuvent être établis. Ces plans permettent
de fixer des normes différentes et précises pour des secteurs clés (notamment en terme de
génération de trafic). L'Ouest lausannois par exemple suit une telle procédure; toute nouvelle
construction ou réaffectation de bâtiment dans cette zone doit respecter une limite maximale de
génération de mouvements de véhicules.
On peut présenter des données synthétiques les principaux acteurs publics en fonction de leur
niveau d’échelle géographique de compétences.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
France
Italie
Suisse
UNION EUROPENNE
Conseil européen
(15 membres (1 par Etat) et 25 avec l'élargissement)
Organes
législatifs et
décisionnels
Commission européenne
(20 membres nommés pour 5 ans)
Parlement européen
(626 députés et 732 avec l'élargissement
élus au suffrage universel pour 5 ans)
ETAT / CONFEDERATION
L'exécutif
Pouvoir législatif
REGION / CANTON
Nombre
L'exécutif
Mode d'élection
Durée du mandat
DEPARTEMENT / PROVINCE
Nombre
L'exécutif
Mode d'élection
Durée du mandat
COMMUNE
Nombre
L'exécutif
Mode d'élection
Durée du mandat
Président de la
république +
gouvernement
Président de la
république +
gouvernement
Président de la
Confédération +
Conseil fédéral
Parlement
(Assemblée
nationale et Sénat)
Parlement
(Chambre
des députés et Sénat)
Assemblée fédérale
(Conseil national et
Conseil des Etats)
25 régions
20 régions
26 cantons
Conseil régional et
son Président
Conseil régional et
son Président
Conseil d'Etat
Suffrage universel direct
Suffrage universel direct
Suffrage universel direct
6 ans
5 ans
4 ou 5 ans
100 départements
103 provinces
Conseil général et
son Président
Conseil provincial et
son Président
Suffrage universel direct
Suffrage universel direct
6 ans
5 ans
36 000 communes
15 000 communes
2842 communes
Le Maire et Conseil
municipal
Le Maire et Conseil
municipal
Le Maire et Conseil
communal
Suffrage universel direct
Suffrage universel direct
Suffrage universel direct
6 ans
5 ans
4 ou 5 ans
Figure 9 : Les acteurs publics en fonction de l’échelle territoriale
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48
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
III. Les outils ou instruments d’action publics
1. Le cadre législatif et réglementaire au niveau national
On a sélectionné les principales lois et dispositions juridiques au niveau national, ainsi que les
documents de planifications créés par ces lois, en matière de transport, d’aménagement du
territoire et d’environnement susceptibles d’influencer les stratégies logistiques des entreprises.
1.1 En FRANCE
La France s’est dotée d’un dispositif législatif d’intervention actif, notamment à partir des
années 1990, en matière de transport, d’environnement et d’aménagement du territoire. Les lois
éditées ont créé des documents de planification qui sont tout autant des outils de politiques
publiques. Les principaux outils recensés sont décrits ci-après. Ils sont présentés des plus
anciens au plus récents.
La Loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (LAURE) du 30 décembre 1996 a
marqué un tournant. Elle a rendu obligatoire les plans de déplacements urbains (PDU), créés
par l’article 28 de la LOTI (pour les agglomérations de plus de 100 000 habitants). Par
agglomération, les PDU définissent les modalités de réduction de circulation automobile,
d’organisation du transport de marchandises, de développement de modes alternatifs à
l’automobile et aux moyens de déplacements économes en énergie et les moins polluants. La
loi a instauré aussi deux autres documents majeurs de planification : les plans régionaux de
qualité de l’air (PRQA) pour la surveillance de la qualité de l’air, et les plans de protection de
l’atmosphère (PPA) dans toutes les agglomérations de plus de 250 000 habitants et certaine
zones spéciales. Les PDU doivent être compatibles avec les PRQA et les PPA.
La loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire
(LOADDT) du 25 juin 1999 propose une nouvelle organisation du territoire visant à mettre en
place les conditions d’un développement durable. Elle a prescrit l’élaboration de neuf schémas
de services collectifs (SSC) dont un pour le transport de voyageurs, un pour le transport de
marchandise et un pour l’énergie. L’élaboration des SSC s’inscrit dans un ensemble de textes
ou de documents de planification des transports à différents niveaux : mondial (protocole de
Kyoto) ; européen (Schéma de Développement de l’Espace Communautaire-SDEC) ; national
(LOADDT) ; régional (Schéma Régional d’Aménagement et de Développement du TerritoireSRADT) et local (Schéma de Cohérence Territoriale et Plans Locaux d’Urbanisme). Ces
documents de planification à long terme (horizon 2020) traduisent les choix stratégiques de la
politique française d’aménagement du territoire fondée sur le concept du développement
durable. Ils remplacent le Schéma national d’aménagement et de développement du territoire.
Les SSC ont été promulgués par le décret du 18 avril 2002. Les orientations stratégiques des
schémas multi-modaux de services collectifs des transports de voyageurs et de marchandises
sont les suivantes :
- répondre aux besoins de transport dans le respect des objectifs de limitation ou de réduction
des risques, accidents, nuisance, émissions de polluants, notamment gaz à effet de serre ;
- définir une nouvelle politique des transports fondée sur un rééquilibrage de l’offre de
transport (la priorité au fret ferroviaire, au cabotage maritime et à la voie d’eau par rapport
B2K Consultants
49
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
au mode routier), sur une régulation générale (tarification et de la législation sociale) des
transport et une amélioration de leur efficacité.
Ces objectifs seront atteints, notamment par le développement des liaisons aériennes
internationales, l’organisation des grands corridors de fret ferroviaire et de transport combiné,
l’organisation des traversées alpines et pyrénéennes, un doublement des tonnages fer à
l’horizon 2010.
L’adoption du Programme national de lutte contre le changement climatique (PNLCC)
en janvier 2000. A l’initiative de la Mission Interministérielle de l’Effet de Serre (MIES) 41, le
parlement a ratifié en 2000 l’engagement de ramener à l’horizon 2008-2012 les émissions de
gaz à effet de serre à leur niveau de 1990 (144 Mtec42). Le PNLCC propose plusieurs mesures
pour satisfaire cet objectif de stabilisation. Selon la MIES, les émissions françaises seraient
stables, voire en légère baisse de 1% entre 1990 et 2000, en dehors des « puits de carbone »
c’est à dire de la captation du gaz carbonique par les forêts et les terres agricoles dont l’impact
est encore contesté. Malgré ces bons résultats, les tendances relevées, selon la MIES,
conduisent à douter que les objectifs de Kyoto soient tenus avec les seules mesures
actuellement en œuvre.
La loi Solidarité et renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000 a pour but de
coordonner et de rendre plus cohérentes les politiques d’urbanismes et de transport au niveau
des agglomérations. Elle a ainsi conforté la nécessité d’une coordination entre les documents
de planification suivants: les Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT) ; les PDU ; les Plans
Locaux d’Urbanisme (PLU) qui se substituent aux POS ; la Carte communale. Elle a introduit
aussi différents instruments et démarches pour gérer les déplacements, notamment par la
réalisation de Plan de mobilité des salariés. A travers la loi SRU mais aussi la LAURE, le
législateur a clairement exprimé sa volonté de favoriser, sur le moyen et le long terme, les
modes de transports alternatifs à la route afin de réduire les impacts environnementaux.
L’actualisation de la circulaire sur la prise en compte de coûts environnementaux dans
l’évaluation des projets en 2001
Les coûts environnementaux sont désormais pris en compte dans l’évaluation des projets. Les
travaux de la commission Boiteux de 1994, repris dans une circulaire ministérielle, ont été
actualisés en 2001 et intègrent les effets du gaz carbonique, de la congestion, de la
consommation d’espace par les infrastructures dans l’évaluation des projets d’infrastructures.
La législation sur les installations classées et la protection de l’environnement du 17
janvier 2001
La législation des ‘installations classées’ vise d’une part à protéger l’environnement, et d’autre
part à encadrer la construction des entrepôts de dernière génération. Héritée d’une loi de 1917,
la législation actuelle des ‘installations classées et la protection de l’environnement’ est régie
par le Code de l’Environnement (depuis la codification de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976,
complétée par le décret datant de 1977 et intégrée au code de l’environnement le 17 janvier
2001) vise43 ‘les installations qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour
la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité et la salubrité publique, soit pour
l’agriculture’ ainsi que, plus généralement, celles pouvant porter atteinte à la ‘protection de la
nature et de l’environnement’. La loi réglemente, entre autres, les entrepôts et lieux stockage
(quantités et conditions de stockage) ; l’aménagement de l’espace (emprise de l’entreprise ou
41
http://www.effet-de-serre.gouv.fr/main.cfm ?page=/fr/actions/presentation.htm
Millions de tonnes d’équivalent-carbone
43
L. 511-1 Code de l’environnement, anciennement L. 76-663, Art.1
42
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50
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
établissement) ; le transport (respect des normes d’émission de polluants, de bruit et de
sécurité) ; la maîtrise de l’information : la loi précise que toute activité sur le site doit être
connue, que les règles de sécurité doivent être visibles et que la traçabilité de tout produit
(matière première, etc.) doit être maîtrisée.
1.2 En ITALIE
Décret de Loi du 19 septembre 1994 n° 626, modifié par le D. lgs. 19 mars 1996 n° 242 sur
la sécurité et la santé des travailleurs. Il prescrit des mesures de prévention pour la protection
de la santé et pour la sécurité des travailleurs de tous les secteurs (public et privé) (art. 1). Le
décret rend obligatoire l’information, la formation, la consultation et la participation des
travailleurs ou leur représentants sur les problèmes concernant la sécurité et la santé sur le lieu
de travail (art.3). En ce qui concerne la mise en œuvre des obligations de sécurité, les
innovations les plus importantes sont : l’obligation de l’employeur d’effectuer une évaluation
des risques et d’élaborer un plan de sécurité pour l’environnement en matière de prévention et
de protection. Le travailleur également a l’obligation de s’occuper de sa propre sécurité et
santé. Concernant la manutention manuelle, le décret précise que l’on ne puisse pas déplacer du
haut vers le bas des chargements de plus d’1,75 m de hauteur. En outre, un homme adulte peut
porter au maximum 30 Kg, une femme adulte 20 et on prévoit une répartition entre mineurs et
majeurs.
Décret de la loi du 26 mai 1997 n°155, relatif aux industries alimentaires, appelé HACCP
(Hazard Analysis and Critical control Points) porte sur l’hygiène des produits alimentaires.
L’art 2 du décret définit l’industrie alimentaire comme « toute entité publique ou privée qui
exerce avec ou sans but lucratif une ou plusieurs des activités suivantes: la préparation, la
transformation, la fabrication, le conditionnement, le dépôt, le transport, la distribution, la
manipulation, la vente ou la fourniture, y compris l’administration de produits alimentaires ».
Le législateur, par l’intermédiaire de contrôles et de méthodes de préventions vise à réduire au
minimum le risque de contamination du produit alimentaire par des agents nocifs. D’autres lois
et décrets découlent de ce 155/1997 et portent sur chaque filière: les surgelés44, les produits
frais, etc.; en particulier le Décret de la loi 156/1997, qui préconise des mesures
supplémentaires en matière de contrôle des produits alimentaires. Un exemple de mise en
œuvre de ce décret est l’impossibilité de charger sur un véhicule des emballages pendant le
voyage de retour si, à l’aller, le véhicule a transporté certaines marchandises pour ne pas
polluer le chargement suivant. Ces dispositions impliquent des retours à vide fréquents ; d’où
des changements aussi bien l’organisation des trajets que les camions (recours à des véhicules à
compartiments multiples) destinés aux diverses filières de marchandises et la structure des
dépôts pour réduire le nombre de camions sur les routes.
Le Décret de la loi du 5 février 1997 n° 22 (appelé Décret Ronchi) résulte d’une directive de
l’Union Européenne sur la gestion des déchets et des emballages. Ce Décret a complètement
révolutionné -du moins en théorie- le système de responsabilité relatif à la gestion des déchets
et des emballages. Le décret s’inspire du principe selon lequel la pollution provenant des
déchets doit réduire la quantité de déchets produits et favoriser les technologies de gestion
orientées vers la récupération, la réutilisation et le recyclage. En ce qui concerne
principalement les emballages, le décret définit la responsabilité partagée des producteurs45 et
44
D. Lgs. 27 janvier 1997 n° 110.
Sont considérés producteurs: les fournisseurs de matériaux d’emballage, les fabricants, les transformateurs et les importateurs
d’emballages vides et de matériaux d’emballage.
45
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
utilisateurs46. Cette responsabilité se concrétise dans la contribution des parties versées au
CONAI (Consortium National des Emballages), organisme privé institué par ce même décret
(art. 41), dont le rôle est d’assurer le ramassage et la gestion des déchets d’emballage. Le
système Conai prévoit de Consortiums spécialisés par filière : plastique, verre, papier, métal,
bois.
La loi du 14 décembre 1994 n° 686 qui a instauré le système des « éco-points », en vigueur
jusqu’à 2003, pour le transport routier de marchandises (compte propre et compte d’autrui)
passant à travers l’Autriche. L’Union européenne attribue à chaque transporteur dont les
camions passent à travers l’Autriche une part des eco-points sur la base des émissions d’oxyde
d’azote. Les points diminuent en fonction des caractéristiques polluantes de chaque véhicule.
La loi 240/1990, en vigueur jusqu’en 1996, a instauré des subventions aux transporteurs pour
des investissements en matériel et équipements de transport47. Le « Registre des transporteurs
automobiles », institué par la loi 298/1974, finance également des investissements spécifiques.
Le Décret de Loi 446/1997, en instituant l’impôt sur les activités de production (IRAP),
a eu des impacts certains sur les entreprises des deux secteurs étudiés (distribution et transport).
La loi 298/1974, a instauré le régime obligatoire des tarifs en fourchette. Toutefois, cette loi est
en voie de disparition selon la loi 454/1997.
La loi 114/1998, relative au secteur commercial, simplifie de façon importante les procédures
pour l’ouverture de nouveaux points de vente, en cohérence avec les dispositions en matière
d’urbanisme de chaque région.
1.3 En SUISSE
Le Conseil Fédéral a fait du développement durable l’objectif suprême de sa politique. Les
orientations stratégiques sont formulées dans deux document : la stratégie du Conseil fédéral,
« le Développement durable en Suisse », adopté le 9 avril 1997, ainsi que le « Plan d’action
environnement et santé » de la même année.
La loi sur la protection de l’environnement (LPE). Elle vise à mettre en œuvre la stratégie
de développement durable. Cette loi définit aussi un principe important, celui de la causalité :
les responsables de la pollution doivent prendre en charge les coûts de sa diminution ou de son
élimination. Cette règle est connue sous le nom du principe du pollueur-payeur. Un certain
nombre de dispositions concrètes découlent de cette loi:
- l’ordonnance sur la protection de l'air (OpAir) – décembre 1985 prescrit des valeurs
d'émission pour un certain nombre de polluants : SO2, NO2, O3, etc.
- l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OpB), en vigueur en 1986, fixe les valeurs
limites d’exposition au bruit du trafic routier, des chemins de fer, des installations de tir, de
l’industrie et de l’artisanat ainsi que des petits aéronefs.
- les programmes d’actions Energie 2000 puis SuisseEnergie visant à promouvoir les
économies d’énergie.
46
Appartiennent à la catégorie des utilisateurs: les commerçants, les distributeurs, les employés de remplissage, les utilisateurs
d’emballages et les importateurs d’emballages pleins.
47
avec la loi 240/1990, on commence à parler d’interports et à affecter de l’argent pour la construction de zones publiques
équipées.
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52
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
- l’étude d’impact sur l’environnement est rendue obligatoire pour de nombreuses
infrastructures en 1989.
- la loi sur le CO2, en vigueur en 2000, définit des objectifs contraignants de réduction du CO2
d’ici à 2010. Par des incitations et l’application des normes dans un premier temps. Une taxe
sur les émissions devrait voir le jour d’ici à 2005.
Le remplacement de l’impôt sur le chiffre d’affaire (ICHA) par la taxe sur la valeur ajoutée
(TVA) – 1995. Au 1er janvier 1995, la TVA a remplacé l'ICHA (impôt sur le chiffre d'affaire).
La taxe sur la valeur ajoutée est un impôt indirect. Sont assujetties pour l'essentiel les personnes
qui exercent une activité commerciale ou professionnelle indépendante, dans la mesure où le
montant de leurs livraisons ou de leurs prestations de services en Suisse dépasse 75'000 francs
par an.
Le financement des infrastructures au niveau cantonal et communal. L’octroi d’un permis
de construire est conditionné par l’existence des infrastructures nécessaires (routes, électricité,
assainissement) pour le terrain concerné. Ces travaux coûtent chers et sont du ressort des
autorités. Celles-ci possèdent donc par ce biais, un outil pour orienter les nouvelles installations
vers des emplacements qui leur conviennent. Le canton de Vaud, par exemple, a décidé de
n’équiper que les terrains situés près d’un embranchement ferroviaire.
La construction des nouvelles lignes ferroviaires à travers les Alpes (NLFA) : approbation
du projet en 1992 et début des travaux de construction en 1999. En 1992, le peuple suisse a
approuvé le projet NLFA. La première phase concerne la construction de deux tunnels de base
au Lötschberg (37 km) et au Gothard (57 km). La deuxième phase verra la construction de
divers accès ou aménagements de la ligne du Gothard (tunnel du Monte-Ceneri, ligne et accès
pour la Suisse orientale). Il est prévu que le tunnel du Lötschberg soit opérationnel en 20072008 et le tunnel du Gothard dès 2012-2015. Les voies d'accès au Gothard, les galeries du
Ceneri, du Zimmerberg seraient en fonction d'ici 2016-2018.
L’initiative pour la protection des régions alpines contre le trafic de transit - 1994
L'association « Initiative des Alpes » a été créée le 25 février 1989 avec comme but de protéger
l'espace alpin contre les effets négatifs du trafic de transit et de le préserver en tant que milieu
vital. En mai 1989, l'association lançait une initiative populaire - l'initiative dite des Alpes pour faire entrer cet objectif dans la législation. Ce que beaucoup considéraient comme
impossible est devenu réalité le 20 février 1994. L'initiative populaire fédérale « pour la
protection des régions alpines contre le trafic de transit » est acceptée par le peuple et les
cantons. Depuis lors, un article sur la protection des Alpes figure dans la constitution fédérale
suisse. Cet article 84 prescrit deux mesures pour assurer la protection des régions alpines contre
les effets négatifs du trafic de transit : le transfert du trafic marchandises de la route au rail ;
l'interdiction d'augmenter la capacité des routes de transit dans l'espace alpin.
La réforme des chemins de fer (CFF) en 1999. Afin d'améliorer l'offre du chemin de fer et de
se mettre en conformité avec les accords signés avec l'Union européenne, des mesures a été mis
en œuvre le 1er janvier 1999 ; il s’agit :
- de la transformation des CFF (chemins de fer fédéraux) en une Société Anonyme (SA) de
droit public ;
- de la libéralisation du trafic de marchandises ; les CFF SA sont mis sur un pied d'égalité
avec les autres entreprises de transport ;
- et d’une série de textes qui régissent les conditions d'octroi des concessions de transport et
d'infrastructure.
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53
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La loi sur la circulation routière (LCR) de 1958. Un point important de cette loi stipule qu’il
est interdit aux véhicules de plus de 3,5 tonnes de circuler la nuit entre 22h et 5h et les
dimanches. Des exceptions sont cependant prévus pour certains types de transports (urgences,
véhicules agricoles, etc.). Cette loi ne concerne évidemment pas la circulation ferroviaire.
La mise en place de la redevance poids lourd liée aux prestations (RPLP) en 2001. La
RPLP est une taxe prélevée par les autorités suisses sur chaque kilomètre parcouru par un poids
lourd en Suisse. Elle est fonction du poids maximal du véhicule (et non du poids de son
chargement) et de sa catégorie d'émission de polluants (Euro 0, Euro I, etc.). Par exemple, un
camion de 40T de classe Euro I effectuant le trajet Bâle-Chiasso devra payer une redevance de :
1.68 [Cts/Tkm] x 40 [T] x 300 [km] = 201.60 CHF (135 €).
L'introduction de cette taxe a concordé avec le passage de la limite maximal des poids lourds de
28T à 34T. La loi prévoit l'augmentation de cette taxe jusqu'à 2.75 Cts/Tkm en 2008.
En 2005 le passage à 40T comme poids limite maximal et l'ouverture du premier tunnel de base
ferroviaire transalpin (Lötschberg) seront effectifs (des contingents de 40T sont toutefois
prévus dès 2001).
Deux tiers des recettes de cette redevance sont investis dans des projets d’infrastructure des
transports publics, en particulier les nouvelles lignes ferroviaires alpines (NLFA).
La loi sur le transfert de la route au rail pour le trafic de longue distance et les mesures
d'accompagnement en 2001. Afin que le transfert sur le rail puisse avoir lieu rapidement, le
parlement a adopté une loi sur le transfert du trafic ainsi que des mesures d'accompagnement.
La loi et les mesures sont entrées en vigueur le 1er janvier 2001. Il s’agit :
- du renforcement des contrôles du trafic lourd. Les prescriptions de circulation routière (par
exemple les périodes de repos et de conduite, le poids maximal, la vitesse maximale) sont
appliquées systématiquement ;
- des prescriptions sur la durée du travail en trafic routier de marchandises. La Suisse a ratifié
la «Convention européenne sur le travail du personnel roulant dans le trafic routier
international» sur la durée du travail en trafic marchandises routier (par exemple les
périodes de repos et de conduite) et la met en œuvre systématiquement ;
- de la reconfiguration des indemnités (subventions). Pour dynamiser la concurrence en trafic
de marchandises sur rail : les subventions du trafic marchandises par rail sont accordées
pour faire baisser le prix du sillon et pour commander des offres supplémentaires en trafic
combiné (trafic par conteneurs). La Confédération subventionne aussi des places de
chargement sur la chaussée roulante par le Loetschberg-Simplon (en exploitation depuis le
11 juin 2001) ainsi que sur celle du St Gothard (elle existe déjà depuis quelques années) ;
- de la participation financière aux terminaux à l'étranger. La Confédération participe à la
construction des terminaux de transbordement supplémentaires pour le trafic combiné à
l'étranger afin d'empêcher, si possible, tout goulet d'étranglement futur. La Suisse a ainsi
soutenu la construction des terminaux "Busto" et "Domo II" dans le Nord de l'Italie. La
Suisse a également participé au financement du terminal de "Singen" dans le sud de
l'Allemagne ;
- l’allégement fiscal pour le trafic d'apport aux terminaux de transbordement. Le trafic
d'apport (parcours initiaux et terminaux sur la route) vers les terminaux de transbordement
du trafic combiné non accompagné sera grevé d'une RPLP moins élevée. En d'autres
termes: si les parcours initiaux et terminaux sur la route sont inférieurs à 40 km, on obtient
un remboursement supérieur à la RPLP dont on s'est acquitté. Les transporteurs sont ainsi
incités à se rendre au terminal de transbordement le plus proche ;
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
-
-
la coordination internationale. Comme le transfert de la route au rail ne peut être réalisé que
dans un cadre international, la Confédération siège dans les organes internationaux
compétents en s'engageant pour la promotion coordonnée du trafic marchandises par rail et
l'accélération des formalités douanières ;
le soutien accordé à la construction de rails privés. La Confédération soutient annuellement
la construction de raccordements d'entreprises privées au réseau ferroviaire à hauteur de 15
millions de francs ;
l’augmentation de la productivité pour l'infrastructure et l'exploitation ferroviaire. La
Confédération a prescrit aux divisions CFF Infrastructure et Trafic des marchandises
d'augmenter leur productivité. Les coûts d'infrastructure par train ayant circulé doivent être
réduits de 5% par an jusqu'en 2002, la productivité de la division Trafic des marchandises
doit augmenter de 5%. Ces deux objectifs ont déjà été atteints en l'an 2000.
Les accords bilatéraux Suisse - Union européenne (UE) en Juin 2002. Ces accords,
négociés de 1993 à 1998, sont entrés en vigueur en juin 2002. La partie concernant les
transports terrestres portent :
i) sur l'harmonisation des limites de poids et des normes (la limite de poids des camions passera
à 34 T à 40 T en 2005 ; les temps de conduite et de repos des chauffeurs sont réglementés ainsi
que l'accès à la profession aux marchés du transport routier) ;
ii) sur l'attribution réciproque de l'accès au réseau ferroviaire et les conditions ad hoc à remplir
par les diverses compagnies ferroviaires ;
iii) sur la politique destinée à protéger la région alpine (préserver l'environnement, améliorer
l'offre ferroviaire, notamment dans le trafic combiné, simplifier les formalités douanières, etc.) ;
iv) sur la libre circulation progressive des personnes en Suisse et dans l'UE par l'ouverture du
marché du travail ceci est complété par la reconnaissance mutuelle des diplômes
professionnels.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. Evolution de la réglementation dans le secteur du transport de marchandises
en France
2.1 Du régime de réglementation contraignante à la déréglementation
En France, le secteur des transports est passé, en l’espace de quarante ans, d’un régime très
réglementé (où les interventions de l’Etat étaient très nombreuses), à un régime d’économie
plus ouverte.
2.1.1 Le régime d’une réglementation très contraignante
Au lendemain de la deuxième guerre mondiale, les professions des transporteurs routiers et des
loueurs de véhicules furent réorganisées par le décret du 14 novembre1949. Le secteur a connu,
de 1949 à 1979, la réglementation la plus contraignante (contingentement, tarification routière
obligatoire, etc.). La mise en place d’une telle réglementation répondait au double souci de
limiter la concurrence faite au chemin de fer et d’éviter par un encadrement strict des activités,
certains comportements anarchiques dans une profession où les petites entreprises sont en
nombre important.
Le champ d’application du décret du 14 novembre 1949
L’article 22 du décret du 14 novembre 1949 pose pour principe que tous les transports routiers
de marchandises sont soumis à coordination. Toutefois, l’article 23 exclut plusieurs catégories
de transport du champ de la coordination notamment le transport pour compte propre. Pour le
transport pour compte d’autrui, soumis à coordination, le décret de 1949 distingue
juridiquement les différents intervenants que sont le transporteur, le loueur et le
commissionnaire. On s’intéresse ici au transporteur.
L’accès à la profession
Le décret prévoit l’inscription des entreprises sur un registre départemental. Mais dès 1967, il
est apparu des dysfonctionnements dans ce système. Ainsi, depuis le 1er janvier 1967, une
justification d’aptitude à l’exercice de la profession est nécessaire pour obtenir une inscription
au Registre des transporteurs routiers (un diplôme d’enseignement supérieur reconnu
équivalent ou examen oral). L’accent est donc mis sur une meilleure formation des chefs
d’entreprise. De plus l’inscription au registre de commerce ainsi que l’installation d’un
établissement dans le département où une inscription est sollicitée, sont requis. Enfin, il faut
être de nationalité française ou ressortissant d’un pays qui accorde un régime de réciprocité aux
français. L’accès à la profession est matérialisé par l’inscription au registre des transporteurs
qui est tenu au comité technique départemental des transports (CTDT).
Licences d’exploitation
Les textes distinguaient initialement trois zones pour l’exécution des transports : la zone
longue, la zone courte et la zone de camionnage. Cette dernière correspond à un cercle, centré
sur le chef lieu, d’un rayon de 70 km environ. La zone courte couvre un rayon de 150 km
centré sur le chef lieu de département. La zone longue quant à elle couvre le territoire national.
En conformité avec ces différentes zones, plusieurs sortes de licences d’exploitation sont
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requises pour effectuer des transports de marchandises dans les zones correspondantes : les
licences des zones de camionnage et courtes, hors contingent depuis 1971 et 1973
respectivement, sont délivrées pour une durée limitée aux entreprises inscrites au CTDT ; les
licences de zone longue sont soumises à contingentement. Cette ‘licence spéciale zone longue’
ne peut être obtenue qu’à l’occasion de l’ouverture par le Ministre des Transports des
contingents supplémentaires (Article 27 du décret). En dehors des cas d’ouverture d’un
contingent, la seule façon de détenir des licences supplémentaires consiste à acheter tout ou
partie du fonds de commerce d'un autre transporteur.
La tarification routière obligatoire
Le décret de 1949 avait posé les principes constitutifs d’une tarification : équilibre financier des
entreprises ; couverture des prix de revient. La tarification routière obligatoire (TRO) est entrée
en vigueur le 1/07/61. Le tarif de transport dans le cadre de la TRO est un prix à la tonne par
tranche de distance, dégressif avec la distance. Les tarifs routiers sont des prix à fourchette qui
comprennent un maximum et un minimum à l’intérieur desquels le prix peut s’établir (l’écart
entre les deux est de 13%). Les transports en zone courte, les camions de moins de 3 tonnes, les
denrées périssables, les transports spécialisés et les transports internationaux échappaient à la
TRO.
2.1.2 Les principales étapes de la déréglementation
A partir de 1979, le cadre réglementaire a été assoupli par étapes avec le décontingentement
progressif des licences de transport, la suppression des tarifs obligatoires et l’adoption d’un
régime libéral pour la location de véhicule avec chauffeur.
Une première période de libéralisation (1979-1981)
Les premières mesures de libéralisation prises dans le secteur des transports routiers remonte à
1979, et s’inscrivent dans les orientations du rapport Guillaumat48. Le secteur a connu une
première période de libéralisation entre 1979 –1981.
Les mesures liées au contingentement. Le 2 mars 1979, le contingentement de la capacité des
transports est supprimé pour les transports en zones courtes et de camionnage ainsi que les
licences correspondantes. A partir de juillet 1980, une entreprise a la possibilité d’effectuer des
transports limités à une zone courte même si l’entreprise n’y possède pas d’établissements. Par
ailleurs, un contingent de 3 250 licences de transports et de 800 licences de location successive
est ouvert en 1979 puis renouvelé en 1980.
En matière de tarification, le seuil d’application de la tarification a été porté de 150 à 200 kms
à partir du 28 janvier 1979.
48
Guillaumat P. « Orientations pour les transports terrestres. Rapport de la Commission d’étude », Documentation française
1978.
Michel Violland « la déréglementation des transports routiers de marchandises – l’expérience française » Etudes et Recherches
du LET, novembre 1985.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La Loi d’Orientation des Transports Intérieurs (LOTI)49 et l’abandon de la libéralisation
L’orientation politique libérale a été abandonnée à partir de 1981 (changement de régime
politique) pour faire place aux principes de la LOTI. L’article 35 de la LOTI stipule que « le
transport public routier de marchandises et les opérations qui lui sont connexes…
peuvent…faire l’objet de tarification d’ordre public ». La tarification routière obligatoire et
surtout son contrôle ont été mis en vigueur.
En matière de réglementation sociale, l’article 9 précise que « la responsabilité de l’expéditeur,
du commissionnaire, de l’affréteur, du mandataire…ou de tout autre donneur d’ordre est
engagée par les manquements qui lui sont imputables ».
La libéralisation effective du marché des transports routiers à partir de 1986
Le décret du 14 mars 1986 a substitué au contingentement l’attribution, au niveau régional,
d’autorisations de transport en zone longue fondées sur les besoins de l’entreprise.
En février 1990, toutes les règles d’encadrement quantitatif de la délivrance des licences ont été
supprimées. L’attribution des titres demandés se fait en tenant compte d’un certain nombre de
critères portant sur la gestion de l’entreprise (importance des critères financiers) et le respect
des réglementations sociales (temps de conduite et de repos) et de sécurité (code de la route –
chargement des voitures- transport de matières dangereuses).
La tarification routière obligatoire a également été supprimée par une ordonnance du 1er
décembre 1986, rétablissant la liberté des prix.
2.2 La réglementation du travail
2.2.1 Le Contrat de Progrès du 23 novembre 1994
Le Contrat de progrès (accord social) a été signé le 23 novembre 1994 par les partenaires
sociaux (syndicats et patronat) et est entré en vigueur le 1er octobre 199550. Le Contrat de
progrès vise à accompagner la modernisation de la profession et d’assainir le marché du
transport routier de marchandises. Il comporte trois volets : réglementaire, social et
économique, organisation de la profession. On s’intéresse ici au volet social.
Le volet social du Contrat de progrès porte sur ‘le temps de service, les repos compensateurs et
la rémunération des personnels de conduite marchandises grands routiers ou longue distance’.
Il s’agit d’une convention qui n’a donc pas force de loi.
Le temps de service à prendre en compte pour 100% de leur durée comprend « les temps de
conduite ; les autres travaux (chargement, déchargement, entretien du véhicule, formalités
administratives) ; les temps à disposition (surveillance des opérations de chargement et
déchargement, sans y participer, et/ou temps d’attente) ».
49
50
J.O 31 décembre 1982
Les différents partenaires sont : organisations patronales (UFT et UNOSTRA) ; syndicats (FO, CFDT).
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58
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La rémunération des temps de service correspond à l’intégralité du temps de service. Les
heures supplémentaires sont majorées de 25% au delà de 169 mensuelles et jusqu’à la 200ème
heure ; de 50% au delà. L’accord préconise une ‘rémunération mensuelle professionnelle
garantie’ pour une durée mensuelle de temps de service de 200 heures ; ce qui empêche une
baisse des rémunérations des chauffeurs.
L’attribution des repos récupérateurs varie selon un calendrier également indiqué dans
l’accord social, avec deux dates charnières : le 1er octobre 1995 et le 1er janvier 1997.
Tableau 15 : attribution de repos en fonction du nombre d’heures de temps de service
1 demi-journée
à partir de 1er octobre 1995
à partir du 1er janvier 1997
1 journée
1 journée et demie
200 – 219 heures 200-239 heures 240 heures
200-214 heures
215-224 heures 225-229 heures
2 jours
230 heures
Le temps de service se traduisent ainsi par des repos récupérateurs de plus en plus importants
au cours du temps, à salaire inchangé.
Le bulletin de paie doit mentionner, par souci de transparence : la durée des temps de conduite ;
la durée des temps, autres que la conduite ; l’ensemble de ces temps constitutifs du temps de
service rémunéré ; les informations relatives aux repos récupérateurs.
2.2.2 La Loi des 35 heures (Loi Aubry) du 13 juin 1998 et impact sur le secteur
La loi du 13 juin 1998 (Loi Aubry) porte sur l’abaissement de la durée légale du travail à 35
heures à partir du 1er janvier 2000 pour les entreprises de 20 salariés et plus, et du 1er janvier
2002 pour les autres. Elle ne prévoit pas de dispositions spécifiques pour les entreprises de
transport. Afin de combiner la législation sur la réduction du temps de travail à 35 h et les
impératifs de la profession, l’article 5 du décret du 25 avril 2002 a instauré un système d’heures
d’équivalence (prévu par l’article L.212-4 du code du travail) applicable au temps de service
hebdomadaire de chaque catégorie au-delà de 35h, soit 8 h pour les conducteurs longue
distance et 4 h, pour les autres conducteurs. Dès lors, les durées hebdomadaires de servie sont
les suivantes :
- pour le personnel roulant « longue distance » : 43 h hebdomadaires ou 186 h par mois, avec
une durée maximale de temps de service sur une semaine isolée de 56 heures ;
- pour les autres personnels roulants marchandises ‘exceptés les conducteurs de messagerie et
les convoyeurs de fonds) : 39 h hebdomadaires ou 169 h par mois, avec une durée
maximale de temps de service sur une semaine isolée de 48 h.
La conséquence directe du système des heures d’équivalence (prévu par l’article L.212-4 du
code du travail) est, d’une part, d’inclure forfaitairement les temps d’attente inhérents à la
profession de conducteur et de rémunérer les heures comme des heures de travail effectif, sans
majoration pour heures supplémentaires.
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59
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2.2.3 Les autres textes s’appliquant au transport routier de marchandises
Le décret du 23 juillet 1992 sur la « coresponsabilité pénale » entre les donneurs d’ordre et
transporteurs routiers de marchandises.
La loi du 31 décembre 1992 (Journal Officiel du 1er janvier 1993) porte sur la sous-traitance et
la notion de prix abusivement bas. Elle encadre les relations de sous-traitance dans le domaine
des transports routiers de manière à éviter les prix abusivement bas.
Loi n°95-96 du 1er février 1995 de modernisation –sécurité des transports, dit loi « Bosson »
porte sur le contrat de transport et la clarification des relations contractuelles.
Les décrets n° 96-1082 du 12 décembre 1996 et n° 96-1115 du 19 décembre 1996 ; qui sont
l’une des conséquences du conflit social de novembre 1996 dans le transport routier, renforce
les dispositions de l’accord social de 1994. Ils portent sur les conditions de travail du personnel
de conduite et sur la durée journalière maximale de travail.
La loi, dite ‘Loi Gayssot’, n° 98-69 du 6 février 1998) porte sur l’amélioration des conditions
d’exercice de la profession de transporteur routier. Les chargeurs sont désormais directement
impliqués comme expéditeurs et comme destinataires. La loi comporte trois grandes
orientations : la modernisation des conditions d’exercice de la profession ; l’amélioration des
dispositifs de contrôle et de sanctions ; le rééquilibrage des relations transporteurs-chargeurs.
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60
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. Evolution de cadre législatif et réglementaire de la grande distribution en
France
Pour la période considérée par la recherche, on analysera les lois Galland de juillet 1996 et
Raffarin de juillet 1996 ; ces deux lois consolident, en effet, les autres textes législatifs produits
sur la distribution depuis les années 1970.
31 La loi Galland de 1996 (succédant à l’Ordonnance Balladur (1986) et au plan PME (1995))
Avec la loi n° 96-588 du 1er juillet 199651, qui porte sur la ‘loyauté et à l’équilibre des relations
commerciales’ (Loi Galland), le gouvernement voulait établir plus de transparence et
d’équilibre dans les relations entre la grande distribution et ses fournisseurs. La loi Galland
succède à l’ordonnance Balladur et au plan PME. L’Ordonnance Balladur du 1er décembre
1986 est relative à la liberté des prix et de la concurrence. Le plan PME, présenté par Juppé le
27 novembre 1995, est un ensemble de mesures destinées à faciliter la vie des petites et
moyennes entreprises. Dans ce Plan, la volonté de rééquilibrage du droit de la concurrence est
explicite. Elle se traduira dans les textes avec la loi Galland le 1er juillet 1996.
La loi Galland vise à ‘rétablir l’équilibre dans les négociations commerciales et à sanctionner
certaines pratiques de concurrence déloyale’. Elle poursuit un triple objectif :
- renforcer la loyauté de la concurrence au sein du commerce. Il s’agit de juguler les
‘comportements abusifs sur les prix de vente’ (promotions excessives et surenchères sur les
prix, revente à perte, etc.). La loi stipule que « sont prohibées les offres de prix ou pratiques
de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production,
de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques ont pour
objet ou peuvent avoir pour effet d’éliminer d’un marché ou d’empêcher d’accéder à un
marché une entreprise ou l’un de ses produits » et que « toute publicité à l’égard du
consommateur, diffusée sur tout support ou visible de l’extérieur du lieu de vente,
mentionnant une réduction de prix ou un prix promotionnel sur les produits alimentaires
périssables doit préciser la nature et l’origine du ou des produits offerts et la période
pendant laquelle est maintenue l’offre proposée par l’annonceur ». Elle précise aussi que
« lorsque de telles opérations promotionnelles sont susceptibles, par leur ampleur ou leur
fréquence, de désorganiser les marchés, un arrêté interministériel ou, à défaut préfectoral
fixe, pour les produits concernés, la périodicité et la durée de telles opérations ». L’article
32 prévoit que « le fait, pour tout commerçant, de revendre ou d’annoncer la revente d’un
produit en l’état à un prix inférieur à son prix d’achat effectif est puni de 500 000 francs
d’amende (soit 75 000 euros). Cette amende peut être portée à la moitié des dépenses de
publicité dans le cas où une annonce publicitaire, quel qu’en soit le support, fait état d’un
prix inférieur au prix d’achat effectif ».
- simplifier et clarifier les règles de facturation. Le prix figurant sur la facture détermine
désormais le seuil de revente à perte. Selon la loi les factures doivent mentionner « toute
réduction de prix acquise à la date de la revente ou de la prestation de services et
directement liée à cette opération de vente ou de prestation de services, à l’exclusion des
escomptes non prévus sur la facture ».
- équilibrer la relation entre fournisseur et distributeur. Deux principaux points sont à
souligner : d’une part la notion ‘d’abus de dépendance économique’ et, d’autre part ‘le
refus de vente’ désormais autorisé.
51
Journal Officiel du 3 juillet, n° 96-588
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61
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La loi Galland interdit la vente à perte et essaie de définir de façon officielle le seuil de cette
revente à perte par une simplification de la facturation : on prend la facture du fournisseur, on
ajoute la facture du transporteur jusqu’au point de livraison par le fournisseur, et ceci quelque
soit le lieu de facturation.
L’abus de dépendance économique décrit certaines pratiques comme la menace de rupture de
relations commerciales afin d’obtenir des prix, des délais de paiement ou de modalités de vente
particulière. Désormais l’article 14 de la loi interdit « d’obtenir ou de tenter d’obtenir, sous la
menace d’une rupture brutale des relations commerciales, des prix, des délais de paiement, des
modalités de vente ou de conditions de coopération commerciale manifestement dérogatoires
aux conditions générales de vente » et de « rompre brutalement, même partiellement, une
relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte des relations commerciales
antérieures ou des usages reconnus par des accords interprofessionnels ».
Le refus de vente est désormais autorisé, améliorant le pouvoir de négociation des fournisseurs
et rétablissant la symétrie dans cette négociation. Mais il doit respecter les règles générales sur
le respect de la concurrence.
32 La loi Raffarin de 1996 (succédant à la loi Royer de 1973 et de la loi Sapin de 1993)
La loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au ‘développement et à la promotion du commerce et
de l’artisanat’ porte sur l’urbanisme commercial et est un durcissement à la loi Royer du 20
décembre 1973 (n° 73-1193) portant sur « l’orientation du commerce et de l’artisanat ». Cette
loi définit les conditions d’implantation des grandes surface en France. C’est fut la création des
Commissions départementales d’urbanisme commercial (CDUC) qui se prononcent à la
majorité relative sur les demandes d’implantations nouvelles de plus de 1 500 m² de surface de
vente pour les communes de plus de 40 000 habitants, et de plus de 1 000 m² pour les
communes moins peuplées.
La loi Sapin du 29 janvier 1993 (n° 93-122) est relative à la prévention de la corruption et à la
transparence de la vie économique et des procédures publiques. Elle modifie la composition des
CDUC qui deviennent des Commissions départementales d’équipement commercial (CDEC),
où les élus locaux étaient fortement représentés. Le nombre des membres est réduit au niveau
départemental et une commission nationale tranche en dernière instance (la Commission
nationale d’équipement commercial - CNEC).
Dans le plan PME de Juppé, l’une des principales mesures annoncées porte sur la durcissement
de la loi Royer qui débouchera ensuite sur un texte législatif le 5 juillet 1996 avec la loi
Raffarin. Cette loi est contemporaine de la loi Galland du 1er juillet 1996.
Les deux principales dispositions de la Loi Raffarin portent d’une part sur le seuil
d’autorisation et, d’autre part, sur la composition des commissions en charge des dossiers.
-
Le seuil d’autorisation : La loi Raffarin subordonne l’ouverture de surface de vente
supérieure à 300 m² à une autorisation, afin de protéger le petit commerce local. La loi
précise notamment, dans son article 5, que « Sont soumis à une autorisation d’exploitation
commerciales les projets ayant pour objet la création d’un magasin de commerce de détail
d’une surface de vente supérieure à 300 m², résultant soit d’une construction nouvelle, soit
de la transformation d’un immeuble existant ». Il en va de même pour « l’extension de la
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62
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
surface de vente d’un magasin de commerce de détail ayant déjà atteint le seuil des 300 m²
ou devant le dépasser par la réalisation du projet ». Les modalités de l’autorisation ont été
simplifiées par la suppression de toute distinction démographique entre les communes et
l’établissement d’un seuil unique de 300 m² désormais applicables à toutes les opérations
d’urbanisme commercial lorsque l’activité est à prédominante alimentaire (création,
extension, réutilisation).
-
quant aux Commissions Départementales d’Equipement Commercial (CDEC); elles voient
le nombre d’élus locaux se réduire parmi les membres. L’article 8 définit la composition
des nouvelles commissions : la CDEC « est présidé par le préfet qui, sans prendre part au
vote, informe la commission sur le contenu du programme national. Dans les départements
autres que Paris, elle est composée de trois élus suivants : le maire de la commune
d’implantation ; le président de l’établissement public de coopération intercommunale
compétent en matière d’aménagement de l’espace et de développement dont est membre la
commune d’implantation ou, à défaut, le conseiller général du canton d’implantation ; le
maire de la plus peuplée de l’arrondissement, autre que la commune d’implantation ainsi
que de trois personnalités suivantes : le président de la chambre de commerce et d’industrie
dont la circonscription, ou son représentant ; le président de la chambre des métiers dont la
circonscription territoriale comprend la commune d’implantation, ou son représentant ; un
représentant des associations de consommateurs du département ». Les CDEC disposent
des délais d’instruction des demandes d’autorisation d’ouverture allongés, quatre mois au
lieu de trois.
33 La circulaire Dutreil du 16 mai 2003 relative à la négociation commerciale entre fournisseurs et
distributeurs
La circulaire exprime le souhait d’un transfert des marges arrière vers des marges avant. Elle
affirme la primauté des conditions générales de vente sur les conditions générales d’achat et en
précise ensuite le contenu (barème de prix, conditions de règlement, rabais, remises et
ristournes, escompte). La Circulaire invite à la différenciation tarifaire en soutenant le principe
selon lequel celle-ci peut exister sans relever de la discrimination abusive. C’est ainsi qu’il est
précisé qu’ : « il n’est pas interdit à l’acheteur de négocier ses conditions d’achat avec le
vendeur conduisant ainsi à s’éloigner des conditions générales de vente. Toutefois, d’une part,
le vendeur n’est pas tenu d’accepter les demandes particulières de l’acheteur (b), d’autre part ,
le traitement différencié qui en résulte doit être justifié par une contrepartie ».
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63
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
4. Aides et incitations financières publiques
La mise en place des aides publiques pourrait inciter et stimuler les entreprises à modifier
leurs choix de stratégies logistiques. Ces dispositifs d’aides ou subventions peuvent par
exemple les amener à reporter tout ou partie de leurs flux de produits de la route vers les autres
modes alternatifs (fluvial, ferré, combiné). On insistera ici sur le dispositif d’aide de l’Agence
De l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie (ADEME) aux entreprises.
Rappelons que l’ADEME, Créé en 1992, est un établissement public à caractère industriel et
commercial. Il est placé sous la tutelle des Ministères de l’écologie et développement durable,
de l’industrie et de la recherche. Les orientations de l’ADEME s’insèrent dans les politiques
nationales et s’articulent autour des objectifs de maîtrise de l’énergie et des matières premières,
de maîtrise de la mobilité subie sur le long terme, de gestion des déchets, de lutte contre la
pollution de l’air, les nuisances sonores, de la pollution du sol. Dans le secteur des transports,
l’ADEME intervient surtout comme organisme de recherche, de diffusion technique,
d’information-sensibilisation, mais aussi comme organisme d’aide financière aux entreprises ;
elle exerce un rôle d’expert public, basé à la fois sur les enseignements des travaux qu’elle
conduit, et aussi sur ses relations établies avec les collectivités locales, les entreprises, les
associations, les organismes publics, les acteurs de la recherche et du développement. Les aides
financières de l’ADEME s’adressent aux chargeurs (entreprises industrielles et commerciales),
aux entreprises de transport routier afin de les inciter à utiliser le transport combiné (rail-route,
fleuve-route), le transport ferroviaire ou le transport fluvial. L’ADEME propose ainsi quatre
types d’aides financières aux entreprises : les aides à la décision, à l’investissement, aux
opérations de démonstration et aux opérations exemplaires de transfert modal.
Il faut noter aussi que, dans le cadre de sa mission de développement de l’utilisation des voies
navigables, Voies Navigables de France (VNF)52 accorde aux entreprises des aides à
l’embranchement fluvial pour les inciter à utiliser le transport fluvial. Ces aides financières
peuvent atteindre 25% du montant hors taxe des investissements aux infrastructures (quais,
appontements, etc.) et/ou aux superstructures (grue, portique, tapis roulants, etc.).
Au niveau Européen, la Commission européenne met en œuvre actuellement le Programme
Marco Polo, qui succède au PACT (Pilot Actions for Combined Transport). Le programme
PACT, qui fut mis en œuvre de 1997-2001, ne concernait que des subventions au transport
combiné. Le présent Programme Marco Polo porte sur tous les segments du marché de
transport de marchandises massifié (vrac, classique ou en conteneurs uni modaux). Son objectif
est de contribuer au transfert du surplus futur total du fret routier international vers les autres
modes alternatifs : la voie ferrée, la voie d’eau, le transport maritime à courte distance
(cabotage). Ceci représenterait 12 milliards de tonnes*kilomètres par an. La durée du
programme porte sur la période 2003 – 2010, avec une première phase allant de 2003 à 2007.
52
Etablissement public à caractère industriel et commercial créé en 1991 (loi de finance de 1990), Voies Navigables de France
(VNF) est chargé de l’exploitation, de l’entretien, de l’amélioration, de l’extension des voies navigables, de la gestion du
domaine public fluvial qui lui est confié par l’Etat, du développement de l’utilisation des voies navigables (transport de
marchandises et de passagers ; activités sportives, culturelles et de loisirs).
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64
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
IV. Conclusion du chapitre 3
La décentralisation des collectivités locales est plus forte en Italie et en Suisse qu’en France.
Les régions en Italie disposent des pouvoirs exécutifs mais aussi législatifs. Les cantons en
Suisse jouissent d’une grande autonomie et des compétences très étendues, notamment en
matière d'aménagement du territoire, de fiscalité, d’infrastructures et de politique sociale.
Malgré les grandes lois de décentralisation de 1982 qui a bouleversé les rapports entre les
collectivités et l’Etat, la France reste un pays unitaire très centralisé, ne connaissant ni la
souplesse, ni la diversité des structures locales qui caractérisent la Suisse (Etat fédéral) ou
l’Italie (Etat à pouvoirs régionaux forts).
La France, tout comme l’Italie et la Suisse, se sont dotés de dispositifs législatifs d’intervention
actifs en matière de transport, d’environnement et d’aménagement du territoire.
Dans les secteurs de la distribution et du transport de marchandises, un cadre législatif et
règlement s’est progressivement mis en place. Dans le domaine de la distribution il s’agissait
d’établir, le plus souvent, plus de transparence et d’équilibre dans les relations entre la grande
distribution et ses fournisseurs. Dans le secteur du transport de marchandises, les enjeux étaient
de protéger les petits transporteurs ou de protéger le rail.
Le contexte des politiques publiques est défini comme l’ensemble des acteurs publics et leurs
outils d’intervention. Les acteurs publics comprennent l’Etat central, les collectivités
territoriales (régions, départements et communes) et les institutions européennes et
internationales ; ils s’expriment et interviennent dans les différents domaines de la vie
économique et sociale du pays à travers des outils d’action publique : lois, règlements,
directives, outils de planification.
On analyse, dans les chapitres IV et V suivants, comment les contextes des politiques publiques
ainsi reconstitués ont influencé (ou non) les stratégies logistiques des entreprises de distribution
et leurs prestataires de transport et de logistique durant les quarante dernières années pour la
France et les vingt dernières années pour la Suisse et l’Italie et quels ont été les mécanismes
d’influence ?
B2K Consultants
65
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE IV
INFLUENCE DES POLITIQUES PUBLIQUES SUR LES STRATEGIES
LOGISTIQUES DES ENTREPRISES DE DISTRIBUTION
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66
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
I. Introduction
Au niveau du chapitre précédent, on a reconstitué l’évolution des contextes des politiques
publiques ayant eu des impacts ou qui sont susceptibles d’influencer les stratégies logistiques
des entreprises au cours des quarante dernières années.
Les acteurs publics comprennent l’Etat central, les collectivités territoriales (régions,
départements et communes) et les institutions européennes et internationales ; ils s’expriment et
interviennent dans les différents domaines de la vie économique et sociale du pays à travers des
outils d’action publique : lois, règlements, directives, documents de planification.
L’analyse de l’influence de ces contextes sur les stratégies logistiques des entreprises de
distribution revient à déterminer comment les politiques publiques ont influé sur les
changements significatifs des stratégies logistiques et/ou sur l’évolution logistique des
entreprises de distribution durant les quarante dernières années.
La distribution physique des produits est définie, dans le cadre de la présente recherche, au sens
large. La distribution assure le passage des produits depuis leur lieu de production jusqu’à leur
lieu d’acquisition ou de consommation. Cette définition est à rapprocher de celle de Mc Kinnon
pour qui « La distribution physique est l’ensemble des activités interconnectées (principalement
le transport, la détention des stocks, l’entreposage, la manutention et le processus de
réapprovisionnement) impliquées dans le transfert physique des biens finis (du fournisseur)
vers le consommateur »53. Quant à la grande distribution, elle désigne « les entreprises de
commerce de détail dont les surfaces de vente sont supérieures à 400 mètres carrés »54.
(L’Annexe 1 décrit les tendances d’évolution du secteur de la distribution en France, en Italie
et en Suisse).
Les stratégies logistiques s’inscrivent dans les stratégies générales des entreprises de
distribution ; et elles sont davantage inspirées de l’intérieur que par l’extérieur. La stratégie
globale d’une entreprise de distribution est, en général, de maximiser la rentabilité de ses
surfaces de vente. Cette rentabilité sera d’autant plus élevée que la surface de vente est vaste et
bien localisée par rapport à la clientèle. Dans ce contexte, la chaîne logistique globale (supply
chain) est considérée comme stratégique dans la mesure où elle contribue à la rentabilité et aux
performances de l’entreprise du fait qu’elle est d’une part un levier de création de la valeur et
d’autre part un facteur de différenciation concurrentielle (Chapitre II). En matière
d’organisation logistique, l’enjeu principal des distributeurs est également de sécuriser et
d’optimiser l’approvisionnement des magasins.
On définit d’abord les changements significatifs des stratégies logistiques des entreprises de
distribution durant les quarante dernières années, avant d’analyser l’influence des contextes des
politiques publiques et d’autres facteurs sur ces changements et/ou l’évolution logistique des
distributeurs dans les trois pays étudiés.
53
54
Mc Kinnon, 1989 cité par MELT – SES, op cité p. 15
“ MELT – SES, Op. cité, page 15.
B2K Consultants
67
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
II. Les changements logistiques significatifs
Dans ce paragraphe, on tente de répondre à la question suivante : quels ont été, durant les
quarante dernières années, les changements logistiques significatifs des entreprises de
distribution dans les trois pays étudiés ?
Les changements logistiques significatifs retenus pour l’analyse sont ceux qui ont concernés la
majorité des entreprises de distribution interrogées dans chaque pays étudié, et donc
représentatifs de l’évolution générale des stratégies logistiques déployées dans le secteur de la
distribution sur la période étudiée dans le pays concerné. L’analyse des enquêtes a permis
d’identifier les principaux changements logistiques significatifs. Il s’agit :
1. du passage des livraisons directes à la centralisation logistique en France ;
2. du passage des entrepôts régionaux à la centralisation logistique en Suisse ;
3. du passage des livraisons directes à la centralisation logistique en Italie (étape de
construction des entrepôts).
La centralisation logistique telle que définie dans la présente recherche fait référence à la
massification des flux d’approvisionnements des magasins sur des entrepôts et des platesformes appartenant aux distributeurs, à la réduction du nombre d’entrepôts et de plates-formes
traitant la distribution des marchandises (polarisation des sites logistiques55) et à la
concentration des entreprises. Dans cette recherche, la centralisation logistique est ainsi définie
comme un triangle ayant comme sommets la polarisation des sites logistiques, la massification
des flux et la concentration d’entreprises (Figure 10).
MASSIFICATION DES FLUX
CENTRALISATION
LOGISTIQUE
CONCENTRATION DES
ENTREPRISES
POLARISATION DES
ESPACES LOGISTIQUES
Figure 10 : La centralisation logistique
Dans la centralisation logistique, les opérations de distribution d’un produit (du fournisseur aux
points de vente du distributeur) sont concentrées sur quelques sites géographiques du territoire.
55
Jacques Colin « La polarisation des espaces logistiques européennes » Recherche réalisée dans le cadre du Club
EUROTRANS – Synthèse- septembre 1994. Pour l’auteur « La polarisation est un modèle de localisation (pôle logistique)
concentrant de multiples activités logistiques et transport dans un espace assez vaste mais non strictement délimité. Il rayonne
sur une région européenne grâce aux nombreuses infrastructures qui la desservent ».
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68
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
1. Des livraisons directes à la centralisation logistique en France
Ce changement logistique se définit comme le passage des stratégies logistiques fondées sur les
livraisons en direct des magasins par les fournisseurs aux stratégies logistiques fondées sur la
centralisation des flux. Dans les enquêtes menées, les analyses des cas de Casino, Galeries
Lafayette, Carrefour, Auchan, Monoprix permettent de valider ce passage à la centralisation
logistique.
Des livraisons directes . . .
En France, jusqu’au début des années 1980, les magasins s’approvisionnaient par eux-mêmes.
Avec l’émergence des hypermarchés au début des années 1960, la taille des commandes par
point de vente augmente sensiblement pour correspondre à des unités de charge complète (une
remorque routière). Les hypermarchés, et dans une moindre mesure les supermarchés, sont
livrés en direct depuis les usines ou les entrepôts régionaux dans de bonnes conditions de coût
et de qualité par les fournisseurs avec leurs camions. C’était la tendance dominante jusqu’à la
fin des Trente Glorieuses. Cette période est caractérisée aussi par le fait que ce sont les
fournisseurs industriels, dotés de dépôts régionaux ou locaux, qui contrôlaient les opérations
logistiques de distribution physique de produit de grande consommation par le jeu des
livraisons franco. Dans ce schéma d’organisation logistique, la distribution achète deux
composantes dans le cadre d’un prix global : le produit physique (boisson, yaourt, textile, etc.) ;
les services d’approvisionnement des magasins (transport, délais, fréquence, etc.).
Il convient, cependant, de relativiser cette tendance dominante dans le secteur de la grande
distribution par le fait que déjà, dès le début du dix-neuvième siècle, les entreprises
succursalistes (Casino, Radar, etc.) et les groupements de détaillants sont des distributeurs qui
avaient, par nature, leurs entrepôts. « Les entrepôts de stockage chez ces entreprises là
existaient » (citation). Les fondateurs de Casino, par exemple, « avaient décidé, pour améliorer
leur logistique à l’époque, de créer des entrepôts (…). Le premier entrepôt a été créé à SaintÉtienne en 1905. Nous avons accéléré ce processus d’implantation de nos entrepôts
pratiquement dans toutes les régions » (citation). Ces entreprises succursalistes avaient déjà
compris tout l’intérêt d’une centralisation des activités logistiques. Le fait marquant ou le
changement est que les entreprises « succursalistes » ont été suivies par les autres distributeurs
en matière de centralisation logistique dans les années 1980 et 1990.
Durant cette période initiale de 1960 à 1980, le système logistique de la distribution est resté
relativement stable. La logique repose sur les livraisons en direct des magasins à partir des
plusieurs entrepôts (stocks) locaux ou régionaux des fournisseurs.
. . . à la centralisation logistique
Progressivement, les achats se sont massifiés et concentrés. Les différents hypermarchés ont
petit à petit eu les mêmes gammes et les mêmes fournisseurs, et c’est devenu intéressant de
passer par les entrepôts. Le mouvement a commencé au milieu des années 1970 où des
entreprises de distribution ont décidé de rompre avec les livraisons directes et de prendre le
contrôle des paramètres logistiques liés à l’approvisionnement de leurs magasins (manutention
et stockage des produits). Les distributeurs vont développer des stratégies logistiques,
indépendantes de celles des fournisseurs et des intermédiaires (grossistes), fondées sur la
centralisation des flux. La plupart des enseignes ont investi dans la construction des entrepôts
et plates-formes, qu’il s’agisse d’entrepôts régionaux, centraux ou de plates-formes
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69
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
d’éclatement, et imposé aux fournisseurs de livrer sur ces entrepôts. Il s’agit d’un changement
radical à la fois d’organisation logistique mais aussi d’état d’esprit des distributeurs. A la fin
des années 1990, la tendance dominante des entreprises de distribution est de ne plus faire
réaliser des livraisons directes par les fournisseurs, mais d'intercaler entre eux et le point de
vente, un échelon intermédiaire constitué par les entrepôts distributeurs ; c’est le passage à la
centralisation logistique. Pour approvisionner les magasins, on est ainsi passé des livraisons en
direct des magasins à des livraisons via des entrepôts régionaux et centraux.
Le groupe Casino (Easydis) exploite aujourd’hui trente cinq sites (soit un million de m²
d’entrepôts) dont six ont une couverture nationale (entrepôts centraux) et les autres sont des
entrepôts régionaux qui desservent dans un rayon de zone courte d’au moins de 200 km.
« Précurseurs dans cette voie, les Nouvelles Galeries ont ouvert, dans les années 70, trois
dépôts régionaux pour couvrir, en partie, l’approvisionnement de l’ensemble de leurs
magasins » (citation).
Pour Auchan, les années 80 furent des années de construction d’entrepôts et donc de
concentration des flux : « cette logique de concentration a commencé par les plus gros flux,
mais c’est une logique qui fait ‘boule de neige’ : plus on crée d’entrepôts plus c’est rentable de
concentrer des flux. Elle s’est stabilisée aux environs de 1995 » (citation). Auchan est
actuellement à 95% de passage par entrepôts et plates-formes pour l’alimentaire, et 50 % pour
le non-alimentaire avec l’objectif d’atteindre 80% en 2005.
C’est durant les années 1990, que Carrefour est passé des livraisons directes à la centralisation
logistique. La stratégie logistique a été de créer et d’utiliser les entrepôts et plates-formes
logistiques pour approvisionner les magasins : « Les premiers entrepôts du groupe Carrefour
ont été mis en place en 1988. A la fin des années 1990, l’essentiel de la logistique a été
centralisé au niveau national. Aujourd’hui, les livraisons directes des magasins ont
pratiquement disparu au bénéfice de l’utilisation des nos entrepôts et plates-formes logistiques.
On a bien une centralisation, une massification de nos approvisionnements sur nos entrepôts et
plates-formes » (citation). Pour Carrefour, 90% des flux passent actuellement par entrepôts et
plates-formes.
Monoprix est passé des livraisons directes dans un premier temps vers un système d’éclatement
national aux alentours des années 1970, pour évoluer au début des années 1990 vers une
logistique de stockage : « on a pris la décision de mettre en place du stockage relativement tard.
Les entrepôts de produits secs doivent dater de 1993 ; et tous ne passent pas par entrepôt encore
aujourd’hui. Il y a de la livraison directe pour deux grands types de produits à savoir les
assortiments locaux et les assortiments qui supposent beaucoup de marchandising dans le
magasin (poivre, produits fins) » (citation).
Très rapidement, les entreprises de distribution s’orientent vers l’externalisation logistique. De
ce fait les distributeurs profitent à la fois de l’amélioration de productivité grâce à la
massification des flux en amont des points de vente et d’une meilleure gestion des stocks
confiés à des prestataires logistiques et des transporteurs.
Durant la deuxième moitié de la décennie 1990, l’évolution de la logistique de la distribution a
été marquée également par un fort mouvement des fusions logistiques, consécutives aux
processus de concentration parmi les entreprises de distribution. Dans notre enquête, cette
tendance est concrétisée par les fusions des logistiques Auchan et Docks de France (1996), et
B2K Consultants
70
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
de Carrefour et Promodès (1999). Cette évolution logistique n’est qu’un aspect de la
centralisation logistique des distributeurs.
Avant la fusion, Docks de France et Promodès avaient des stratégies d’intégration logistique ;
alors que Carrefour et Auchan avaient plutôt des stratégies orientées vers l’externalisation.
Docks de France et Promodès considéraient que la logistique faisait partie du métier de
commerce ; ils avaient donc intégré leur logistique (transport et entreposage). Depuis les
fusions-acquisitions respectives d’entreprises, des plans d’intégration des schémas logistiques
sont mis en œuvre par les groupes Auchan « Auchan-Docks de France » et Carrefour
« Carrefour et Promodès ». L’organisation logistique de Carrefour a évolué de l’externalisation
complète à une situation mixte ‘externalisation / intégration’ des entrepôts et des plates-formes
: 50% sont en sous-traitance et 50 % intégrés au groupe. Auchan qui n’avait que trois régions
logistiques56 est passé à dix après la fusion ; il a réduit ce nombre à cinq régions logistiques
dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’intégration des systèmes logistiques.
Les entreprises ont mené des stratégies d’expansion hors des frontières ou
d’internationalisation. Aujourd’hui Carrefour a des magasins dans 29 pays (Europe, Asie,
Amérique Latine et Moyen-Orient), le groupe Auchan dans 14 pays. La part du chiffre
d’affaires réalisé à l’international atteignait en 1998, 3% pour Leclerc, 21% pour Auchan, 27%
pour Casino, 36% pour Intermarché , 40% pour Promodès et 41% pour Carrefour57. En 2002, la
part de chiffre d’affaires réalisé à l’international atteint 52% pour Carrefour et 37% pour
Auchan (notre enquête).
La Figure 11 illustre de façon simplifiée le changement des stratégies logistiques des
entreprises de distribution en France. La centralisation a pris un double aspect :
- d’une part, les fournisseurs ne livrent plus qu’aux entrepôts distributeurs ;
- d’autre part, ce sont les distributeurs qui approvisionnent leurs magasins.
Les réapprovisionnements, autant des magasins que des entrepôts, sont effectués en flux tendus
afin d’être en mesure de maintenir des stocks moins importants.
56
Une région logistique Auchan est un site logistique regroupant plusieurs entrepôts et desservant environ une
trentaine de magasins.
57
Selon Panel de Gestion international, cité in Beauvais Consultants ‘Evolution du commerce et utilisation de la voiture’,
Rapport pour MELT-DRAST, février 2003, p.18
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71
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Fournisseur
FOURNISSEUR
Entrepôt
fournisseur
Magasin
FOURNISSEUR
Fournisseur
DISTRIBUTEUR
Plate-forme
/entrepôt
Magasin
Figure 11 : changements des stratégies logistiques en France
Principaux enseignements
La livraison en direct des magasins était la tendance dominante jusqu’au début des années 1980.
Depuis cette période les volumes de produits ne gagnent plus directement le magasin, mais
passent par des entrepôts et plates-formes distributeur (régional ou central). La livraison en
direct des magasins est marginalisée.
Le passage à la centralisation logistique s’est déroulé durant les décennies 1980 et 1990, et le
processus se poursuit.
Les distributeurs ont pris le contrôle de la logistique d’approvisionnements des magasins au
dépend des fournisseurs.
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72
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. Des entrepôts régionaux à la centralisation logistique en Suisse
Le secteur de la distribution suisse est caractérisé par l’importance de deux entreprises, Migros
et Coop suisse qui détiennent près d’un tiers du chiffre d’affaire dans le commerce de détail et
50% du commerce alimentaire. Ces deux entreprises se sont développées sur le modèle d’une
« fédération de coopératives ». Historiquement, chaque coopérative possédait une autonomie
plus ou moins grande. Les coopératives géraient leurs points de vente et possédaient des
entrepôts régionaux. Il est donc possible de considérer Migros et Coop comme les entreprises
« succursalistes » en France à l’instar de Casino. La livraison directe aux magasins a ainsi
toujours été marginale pour ces deux sociétés. Le principal changement identifié ici concerne le
passage des stratégies logistiques fondées sur des entrepôts régionaux à celles fondées sur la
centralisation des flux. Les exemples de Migros, Coop et Galexis permettent de bien illustrer
cette évolution.
Des entrepôts régionaux . . .
Chez Migros, avant la centralisation logistique, chacune des dix coopératives commandait et
entreposait les marchandises pour les magasins de sa région. Les stocks se trouvaient aux
niveaux des entrepôts des coopératives et des magasins. La gestion des stocks et des
commandes se situaient à la fois à l’échelon du magasin et de la coopérative. Chaque
coopérative avait une grande indépendance.
A partir des années 1950-1960 les coopératives Coop, créées indépendamment les unes des
autres, ont commencé à se regrouper pour constituer des entités plus larges. Cette fusion assez
linéaire a abouti en 2000 à la création d'une entreprise unique. Jusqu’à cette date, chaque
coopérative possédait son propre système d’approvisionnement. Pour certaines filières de
produits, les coopératives avaient cependant déjà commencé à collaborer étroitement et des
entrepôts nationaux existaient. Néanmoins, les produits étaient stockés dans des entrepôts à la
fois au niveau national, de la coopérative et du magasin. Aucun système de gestion centralisé
n’existait.
Jusqu’à la fin des années 1990, Galexis disposait de onze centres de distribution. Les
fournisseurs livraient leurs marchandises dans chaque centre. Ce nombre important reflétait le
souhait de l’entreprise d’être très proche de ses clients - avant tout des pharmacies. Galexis a
été fondée à la base par des pharmaciens comme une centrale d’achat commune. Elle a donc
pendant longtemps défendu les intérêts de ceux-ci.
. . . à la centralisation logistique
A partir de la fin des années 1970, Migros a commencé à centraliser les produits nonalimentaires au niveau national. Les fournisseurs apportent les marchandises au centre de
Neundorf qui ensuite les distribue directement aux magasins ou en passant par les centres de
distribution des coopératives. Environ 60% des magasins sont livrés « en direct » à partir des
entrepôts régionaux et 40% reçoivent leurs marchandises d’un centre régional. La centralisation
logistique des produits non-alimentaires ne s’est mise en place que beaucoup plus tard. Elle
s’est achevée en 2004. Les produits secs ont été centralisés beaucoup plus tard, entre 1998 et
2002, sur le centre de distribution national de Suhr. Les produits surgelés ont suivi la même
voie avec un ou deux ans de décalage. Actuellement les produits frais sont les seuls produits
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
encore livrés aux coopératives Migros par les fournisseurs sans passer par un centre de
distribution national.
C’est en 2000 que Coop a revu complètement son organisation interne. La société Coop n’est
plus un agglomérat de coopératives mais une entreprise partagée en cinq régions de vente. La
fonction d'approvisionnement des points de vente est séparée en trois catégories: le circuit du
frais (fruits, légumes, boulangerie), le circuit du froid (surgelés, viande, lait) et le circuit de
"l'ambiant" (boisson, non-alimentaire, etc.). Le schéma logistique a été restructuré en
conséquence. On distingue désormais entre:
- les centrales de distribution nationales, qui approvisionnent soit directement soit via les
centrales régionales, tous les magasins de Suisse. Il s’agit des centrales de Wangen
(marchandises générales/non-alimentaire) et de Pratteln (boissons) ainsi que de celles de
Hinwil et de Givisiez (produits surgelés);
- les centrales de distribution décentralisées, situées à Aclens, Berne, Bâle, Schafisheim,
Zurich, Kriens et Gossau. Ce qui correspond à une ou deux centrales par région de vente.
Galexis a fermé huit centres de distribution en fin 1990. Les trois restants ont été agrandis afin
d’absorber le surplus de trafic. En parallèle à cette concentration, les tournées, auparavant
dédiées à une seule catégorie de clients (pharmacie, droguerie, hôpital ou médecin), sont depuis
1999 regroupées (tournées mixtes).
La Figure 12 illustre de façon simplifiée le changement des stratégies logistiques chez Coop et
Migros.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
FOURNISSEUR
Fournisseur
DISTRIBUTEUR
Plate-forme /entrepôt
(Coopérative)
Magasin
FOURNISSEUR
Fournisseur
DISTRIBUTEUR
Centre national
Plate-forme /entrepôt
(Coopérative)
Magasin
Figure 12: changements des stratégies logistiques en Suisse
Principaux enseignements
Jusqu’en 1990, la logistique des entreprises de distribution était fondée sur un système
d’entrepôts et plates-formes régionaux de coopératives.
Pour les distributeurs suisses, à l’instar des entreprises « succursalistes » en France, la
livraison en direct des magasins a toujours été marginale.
Le passage aux stratégies logistiques fondées sur la centralisation logistique s’est déroulé
entre les années 1970 et 2004.
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75
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. Des livraisons directes à la création des entrepôts et plates-formes en Italie
En Italie, en comparaison de la France et de la Suisse, le processus de passage des livraisons
directes à la centralisation logistique est encore à ses débuts, autrement dit au stade de
construction et de développement des entrepôts distributeurs.
Les enquêtes montrent que durant les années 1980 seulement Coop Italie (qui détient
aujourd’hui 20% du marché) a créé un réseau d’entrepôts, en substitution des livraisons directes
des fournisseurs aux magasins, et a, par cette voie, établi un contrôle centralisé sur la logistique
d’approvisionnement, qui était auparavant contrôlée par les fournisseurs. Le groupe PAM ne
donnera lieu à une pareille démarche que dans les années 1990.
Un système de centralisation logistique n’est donc pas encore complètement établi en Italie.
Les distributeurs réduisent plutôt leurs coûts logistiques dans une optique d’optimisation des
déplacements des véhicules. Toutefois, la mise en place de véritables réseaux d’entrepôts et
plates-formes logistiques est une tendance forte en cours de réalisation.
Des livraisons directes . . .
Jusque dans les années 1980 (et en partie 1990), la grande distribution n’avait pas encore
d’entrepôts ; les rapports avec les fournisseurs étant gérés par les magasins. La marchandise
était livrée directement aux points de vente. Cependant, les changements dans les besoins de la
clientèle et surtout l’agrandissement de la gamme des produits, en particulier pour ce qui
concerne les secteurs des surgelés et des produits périssables, rendaient de plus en plus
coûteuse la gestion de petites livraisons directes aux nombreux magasins.
. . . à la création des entrepôts et plates-formes.
Le premier distributeur qui a établi des entrepôts en Italie est Coop Italie, à la fin des années
1970 – début des années 1980, suite à une forte croissance. A la fin des années 1980 la société
Coop commence à considérer le problème du « froid » pour la Ligurie, le Piémont et la
Lombardie et après pour toute l’Italie. Aujourd’hui, neuf coopératives principales (générant
entre 80–85% du chiffre d’affaires de Coop) disposent de treize entrepôts fonctionnels ; ceux-ci
ont des rapports directs avec les points de vente et avec les fournisseurs en ce qui concerne les
activités logistiques opérationnelles. C’est Coop Italie qui s’occupe directement des rapports
contractuels avec les fournisseurs (elle représente les différentes coopératives ; mais les
différents points de vente ont la liberté d’ajouter quelques produits, tels que des produits
locaux) et qui concentre les fonctions logistiques stratégiques (dans le sens de coordination et
non de logistique opérationnelle) afin de chercher des solutions standardisées par rapport aux
différents fournisseurs (par exemple en palettisant des produits pour toutes les structures de
vente).
Le groupe Pam a commencé à parler des plates-formes des produits périssables au début des
années 1990. « Auparavant, chaque point de vente avait ses propres fournisseurs (fruits et
légumes, poissonniers, etc.) qui livraient directement sans passer par un entrepôt. Au début des
années 1990, le groupe met en place et gère ses entrepôts avec sa propre direction logistique»
(citation). La massification des flux de marchandises, qui a suivi la centralisation des livraisons
via les entrepôts et plates-formes, a donné lieu à une restructuration totale du système
logistique du groupe, visant principalement à uniformiser les transports: « c’est-à-dire que l’on
a cherché des solutions pour faire voyager ensemble des produits de nature différentes, afin de
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
réduire le nombre de voyages et d’augmenter le coefficient de chargement des camions »
(citation).
La Figure 13 illustre de façon simplifiée le changement des stratégies logistiques en Italie.
FOURNISSEUR
Fournisseur
Magasin
FOURNISSEUR
Fournisseur
DISTRIBUTEUR
Plate-forme
/entrepôt
Magasin
Figure 13 : changements de stratégies logistiques en Italie
Principaux enseignements
Le passage des livraisons en direct à la centralisation logistique est à ses débuts.
Commencé à la fin des années 1970, les créations d’entrepôts ne commencent à se
généraliser que durant les années 1990.
Le processus devrait s’accélérer avec la mondialisation qui autorise l’arrivée sur le
marché italien des distributeurs étrangers (Promodès à la fin des années 1990, etc.).
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
III Les pratiques logistiques induites par la centralisation logistique
On tente de répondre à la question suivante : quelles sont les pratiques logistiques
fondamentales déployées par les entreprises depuis les changements logistiques ?
Depuis le changement pour la centralisation logistique, les entreprises de distribution ont mis
en œuvre des pratiques logistiques qui ont évolué avec les stratégies commerciales poursuivies
et les caractéristiques propres des magasins à approvisionner. Néanmoins il est possible de
mettre en évidence des pratiques logistiques fondamentales qui ont été développées durant les
dernières années. En France, mais aussi en Suisse et en Italie, les pratiques logistiques
observées sont tout à fait proches et répondent aux mêmes préoccupations des distributeurs.
1. L’utilisation des entrepôts et plates-formes
En France, les distributeurs ont créé et développé leurs propres infrastructures logistiques
(entrepôts et plates-formes) dans les années 1980 et 1990. A l’origine, l’entrepôt était cantonné
dans des fonctions de stockage des produits et de préparation des commandes à destination des
magasins.
Progressivement, les entrepôts et les plates-formes se sont affirmés comme des lieux
multidimensionnels et multifonctionnels permettant :
- la création de valeur ajoutée, notamment la transformation des produits avec la préparation
des commandes et colis en palettes hétérogènes, etc. ;
- la réception des livraisons des fournisseurs, le regroupement par magasin et l’expédition
dans les délais les plus brefs (flux tendus) ;
- la facilité liée à l’approvisionnement d’un seul entrepôt par rapport à la livraison directe de
plusieurs points de vente (moins de litiges, etc.);
- des spéculations ponctuelles, en anticipant la constitution de certains stocks, en vue d’un
avantage financier consenti par un fournisseur ;
- des négociations d’achats : le passage par entrepôts facilite l’obtention de ristournes ;
- et l’accompagnement des stratégies commerciales en adaptant leur fonctionnement au
format des points de vente.
En Italie, la situation de la logistique de distribution accuse des retards par rapport à la France
et à la Suisse. Il n’y a que quelques grands opérateurs, comme Coop Italie (dans l’enquête) qui
ont tendance à centraliser les fonctions logistiques au niveau régional ou interrégional ; la
plupart des distributeurs sont encore fortement présents sur le territoire avec de nombreux petits
entrepôts.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. La réduction du nombre d’entrepôts et de plates-formes
Les distributeurs ont réduit le nombre d’entrepôts et plates-formes, tant en France qu’en
Suisse ; ce qui entraîne la concentration des flux qui a pour corollaire d’augmenter
l’importance des flux traités par entrepôt.
En France, Auchan est passé d’une dizaine de régions logistiques à cinq régions durant les
années 199058. Pour le textile, Carrefour est passé de cinq à un entrepôt central au niveau
national qui reçoit les produits de tous les fournisseurs et approvisionne quotidiennement tous
les hypermarchés de France. Casino est passé également de deux à un entrepôt central national
dans le textile. Le groupe Galeries Lafayette a réduit le nombre d’entrepôts (textilehabillement) à deux : l’un pour approvisionner les magasins Haussmann ; et l’autre pour
approvisionner les magasins de province. Monoprix est passé des livraisons directes à cinq
entrepôts en 1993 puis à deux entrepôts pour les marchandises générales sur un seul site
national.
En Suisse, Galexis est passé de dix à trois plates-formes logistiques. Les anciens sites sont soit
transformés en plate-formes d’éclatement, soit abandonnés. La Poste est passée de dix centres
de tri à trois centres nationaux. Les entrepôts de Migros à Suhr et à Neuendorf sont parmi les
plus gros de Suisse. La mise en place de système de tri et de stockage automatique et un
élément important car il a permis à la centralisation logistique de déployer tous ses effets.
Migros a ainsi mis en place un système de stockage automatique de grande hauteur dans son
entrepôt central de Suhr. La Poste a mis en place une installation de tri automatique dans ses
trois centres colis.
En France, durant les années 1990, la construction des entrepôts de plus en plus importants (de
plus de 10 000 m²) s’est fortement développée. La part des entrepôts de plus de 10 000 m² ne
cesse d’augmenter depuis le début des années 1980 (Tableau 16).
Tableau n° 16 : Surface des mises en chantier d’entrepôts (France entière)
Années
Surface totale en
Dont plus de % de 10 000 m²
millions de m²
10 000 m²
1981-1985
17,1
2,0
11,20 %
1986-1990
24,5
3,2
13,00 %
1991-1995
21,2
3,1
14,80 %
1996-2000
17,0
4,0
23,50 %
Source : SES – Note de synthèse – mars avril 2002
Par ailleurs, la réduction du nombre d’entrepôts s’accompagne en France d’une concentration
des entrepôts et plates-formes sur un petit nombre de régions avec pour double conséquence
d’augmenter les trafics sur les axes qui relient ces régions entre elles et d’engendrer la
congestion des régions logistiques terminales qui attirent ces flux. Selon une étude du SES59,
les entrepôts de plus de 10 000 m² sont concentrés dans cinq régions : Ile-de-France, RhôneAlpes, Nord-Pas-de- Calais, Picardie et Lorraine. Les trois premières régions représentent à
elles seules 58% du total. Les deux autres régions Picardie et Lorraine représentent 11% des
surfaces de ces grands entrepôts.
58
Une Région logistique Auchan dessert environ une trentaine de magasins ; elle regroupe plusieurs entrepôts.
Le Blanc F., Sauvant A. « localisation des grandes plates-formes logistiques » SES-Note de synthèse, Mars - Avril 2002.
Le SES a réalisé une étude portant sur la construction neuve d’entrepôts en France à partir d’exploitations de la base de
données SITADEL. Seules les surfaces de locaux de stockage à usage non agricole ont été retenues.
59
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Rapport final
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3. La concentration des entreprises et leurs moyens logistiques
En France, la décennie 1990 a été caractérisée par le processus de concentration des entreprises
de distribution, lesquelles cherchaient à devenir des acteurs globaux sur un marché et
d’atteindre une taille critique pour optimiser les achats et la logistique. On peut mentionner les
fusions-acquisitions ci-après : Auchan et Docks de France (1996), Carrefour et Promodès
(1999) Galeries Lafayette et Nouvelles Galeries (1992), Casino et Rallye en 1992, Leclerc et
System U en 1998. Cette concentration, qui dépasse largement le cadre hexagonal, a entraîné
une forte réduction du nombre d’enseignes comme le montre le Tableau 17.
Tableau 17 : évolution de la concentration et classement des enseignes en terme de part de marché
Rang 1965
1
Printemps
2
Galeries Lafayette
3
Nouvelles Galeries
4
Docks Rémois
5
Casino
6
Coop de Lorraine
7
Magasins Modernes
8
La Redoute
9
Comptoirs Français
10
Goulet Turpin
Source : Dornier P-P, Fender
Paris 2001, P.198
1975
1980
1990
1999
Galeries Lafayette Carrefour
Leclerc
Carrefour -Promodès
Carrefour
Leclerc
Intermarché
Leclerc – System U
Printemps
Casino
Carrefour
Intermarché
Casino
Galeries Lafayette Auchan
Auchan– Docks de France
Leclerc
Docks de France
Promodès
Casino
Nouvelles Galeries Printemps
Casino
Radar
Promodès
System U
Promodès
Euromarché
Cora
Docks de France
Radar
Printemps
Euromarché
Intermarché
Euromarché
M « La logistique globale – enjeux – principes – exemples » Editions Organisation,
La grande distribution a atteint un degré très élevé de concentration ; les cinq premiers groupes
de distribution de la liste, en effet, détiennent actuellement 84 % des parts de marché (juin
2004)60.
4. La massification des flux
Rétrospectivement, en France, le développement des entrepôts et des plates-formes logistiques
distributeurs a été accompagné d’une massification des flux et d’une réduction constante du
nombre d’entrepôts ou sites logistiques (polarisation) tout en augmentant la quantité des flux
traités par entrepôt. Il s’agit de centraliser, de regrouper et concentrer les commandes et de
massifier les flux sur des entrepôts ou des plates-formes avant d’assurer ensuite la livraison des
magasins. Selon Jacques Colin : « le mouvement de massification que connaissent les flux de
marchandises s’observe aussi bien dans les opérations de transport, avec la concentration des
trafics sur certains axes, que dans les opérations de stockage, avec l’émergence d’entrepôts
centraux desservant des régions très vastes, dans les opérations de groupages /dégroupage avec
le développement de réseaux centrés sur un « hub », dotés de chaînes de tri automatisées »61.
60
« Rapport du groupe d’experts constitué sur les rapports entre industrie et commerce », présidé par Guy Canivet,
Rapport pour le Ministère des finances, octobre 2004, P. 27
61
Jacques COLIN « La logistique d’entreprise » déjà cité, P. 240.
Voir aussi Jacques COLIN – « La polarisation des espaces logistiques européens » - Recherche réalisée dans le
cadre du club EUROTRANS – Synthèse - Septembre 1994
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Rapport final
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5. L’intégration des activités logistiques
Des enquêtes menées, il ressort que certains distributeurs, même s’ils sous-traitent le transport,
gèrent en interne leurs activités d’entreposage. La gestion des entrepôts par le distributeur
correspond à une volonté de maîtriser ses opérations logistiques. Monoprix a toujours eu une
stratégie d’intégration logistique ; il n’y a que quelques produits qui sont externalisés, à savoir
les produits frais, la boisson sans alcool, le surgelé et la viande. « Tout ce qui est le grand
classique est traité en interne, et tout ce qui est spécialisation est traitée en externe » (citation).
Casino également a toujours eu une stratégie de logistique intégrée. En 2001, le groupe a
filialisé l’activité logistique. Il ne s’agit pas d’une ‘externalisation’ mais de création d’une
filiale, Easydis, avec un double objectif : mieux se situer dans le marché par rapport à la
concurrence ; développer une clientèle extérieure.
En Italie Coop a une stratégie d’intégration logistique. Elle externalise seulement le transport et
gère en interne les entrepôts et plates-formes. « Chez Coop, la logistique est également un
élément de contrôle du produit : si la logistique est gérée par des tiers, on risque de perdre une
partie du contrôle du produit entre la phase de production et la vente » (citation).
6. L’externalisation des activités logistiques
En France, c’est durant les années 1990 que beaucoup de distributeurs ont externalisé ou soustraité tout ou partie de leurs activités logistiques auprès des prestataires logistiques (Géodis,
Norbert Dentressangle, etc.). En externalisant sa logistique, le distributeur se procure à
l’extérieur des services flexibles, de meilleure qualité et au moindre coût pour se concentrer
sur son cœur de métier (core business).
Le degré d’externalisation des activités logistiques, tel que l’on observe à travers nos enquêtes,
est variable selon les entreprises et selon le pays. Si les activités de transport sont largement
sous-traitées, le degré d’externalisation de l’entreposage demeure en revanche très contrasté.
Auchan a une stratégie d’externalisation de l’entreposage ; celle-ci consiste à sous-traiter tous
les entrepôts, mais à en conserver un en interne dans chaque métier afin d’acquérir de la
compétence : «En produits frais, sept plates-formes sont prestées sauf celui de Tours ; en non
alimentaire, deux entrepôts sont intégrés et dix sont sous-traités ; il y a 50% de plates-formes
prestés et 50% intégrées en PGC (produits de grande consommation)» (citation).
Originellement, Carrefour était totalement orienté vers la logistique externalisée, c’est à dire
vers la sous-traitance du transport et de l’entreposage. Depuis la fusion avec Promodès en 1999,
le taux d’externalisation de l’entreposage est tombé à 50%. « Il s’agit d’un héritage de la fusion
avec Promodès. En revanche, on peut dire que chaque fois que l’on crée une nouvelle
logistique, on a plutôt vocation à la sous-traiter » (citation).
L’externalisation des entrepôts et des plates-formes à des prestataires logistiques devrait
cependant se renforcer ou s’auto-entretenir en France par le fait que les marchés deviennent
européens ou mondiaux (complexité de la gestion des flux), mais sous le contrôle des
distributeurs.
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81
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
En Suisse, l’externalisation, telle qu’observée chez Coop et Migros, ne concerne qu’une partie
des transports nationaux routiers : l’acheminement entre le centre national et le centre
d’éclatement régional ou directement aux points de vente tend à être sous-traité à des
entreprises spécialisées.
En Italie, des distributeurs externalisent la gestion des entrepôts (Coin, Conad, Pam) afin
d’avoir la flexibilité du travail et la réduction des coûts (notamment des coûts fixes). La
volonté d’externaliser les entrepôts en Italie est moins liée à la qualité professionnelle des
prestataires logistiques qu’à une «politique du travail (…) qui ne permet pas d’obtenir de la part
des travailleurs la flexibilité dont l’entreprise de distribution a besoin, à savoir des fréquentes
phases d’expansion et de baisse de la demande, qui ont lieu même en une semaine. » (citation).
En comparaison d’autres pays européens, le taux d’externalisation français est relativement
important (27%), mais inférieur à celui du Royaume Uni (34%) ; ce qui rend vraisemblable une
poursuite de cette stratégie. La Figure 14 montre l’évolution du degré d’externalisation des
activités logistiques en Europe.
Figure 14 : Degré d’externalisation par pays
Source : “La nuova logistica”, BOSCACCI F. (a cura di) – EGEA (2003)
L’Italie se positionne au treizième rang (12%). C’est la crainte de « perte de pouvoir » pour des
entreprises italiennes qui sont de petite et moyenne taille (habituées à un contrôle maximum à
toutes les phases) qui est la principale cause du faible niveau d’externalisation logistique du
pays.
7. Diversification des zones géographiques d’approvisionnement
Dans le système des livraisons directes, les magasins s’adressaient de préférence à des
fournisseurs locaux capables de livrer fréquemment. Avec la centralisation logistique, les
grandes entreprises de distribution ont mené des stratégies d’expansion hors des frontières
(internationalisation), comme indiqué plus haut, et de diversification des lieux géographiques
d’approvisionnements. « Il y a trois partenaires : le fournisseur, le client et le magasin. La seule
chose qui bouge, ce sont les fournisseurs : d’une part au lieu d’être souvent proches des
magasins, comme c’était le cas après la guerre, les fournisseurs sont devenus nationaux, puis
européens voire maintenant mondiaux; au lieu que le produit final soit fabriqué dans une des
usines du fournisseur, on a de plus en plus une fragmentation : les produits peuvent être
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82
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
fabriqués à différents endroits, puis assemblés dans un autre et stockés en un troisième endroit.
Cette partie là des fournisseurs s’est donc complexifiée. Les fournisseurs délocalisent ; et les
très gros fournisseurs ont des stratégies logistiques européennes et mondiales dont nous
subissons un certain nombre de conséquences. Par ailleurs, une majorité d’approvisionnements
vient de l’importation; mais l’origine géographique change assez rapidement, tous les deux ou
trois ans » (citation).
L’origine des fournisseurs de la grande distribution évolue donc constamment, et comme
l’indique le rapport Canivet «la période récente montre un effritement des entreprises françaises
(PME et groupes) au profit de celles d’origine étrangère. L’européanisation des
approvisionnements de la grande distribution explique en partie ce phénomène. Les groupes qui
fournissent la grande distribution française en produits de grande consommation sont à 70%
étrangers ; seuls cinq d’entre eux sont français parmi les vingt plus importants. Ils sont
internationaux pour 95% d’entre eux »62.
Tableau n° 18 : évolution de la nature des fournisseurs de la grande distribution
En %
1999/1992
2001/1999
PME
françaises
- 0,7 %
-0,3 %
étrangères
+ 0,5 %
+1,4%
Groupes
français
- 1,5 %
- 1,3 %
étrangers
0,5 %
+ 0,9 %
Source : Panel International. Etude FCD 03/2001
En nombre de fournisseurs
1999/1992
2001/1999
- 35
+ 15
- 20
+ 36
-1
-1
-1
+2
8. Le développement du Supply Chain Management (SCM)
L’une des innovations logistiques des dernières années concerne le développement du Supply
Chain Management (SCM) ou gestion globale de la chaîne d’approvisionnement et l’utilisation
simultanée des outils de collaboration inter-entreprises. Les fournisseurs industriels, les
prestataires logistiques et les distributeurs ont le même client, l’acheteur ; et ils ont intérêt à
collaborer au sein de la Supply Chain. Les distributeurs estiment, en effet, qu’il n’est pas
suffisant d’améliorer les performances internes, mais qu’il est indispensable d’améliorer
l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Les outils et techniques de collaborations les
plus utilisés par les entreprises de distribution en France sont l’ECR (Efficient Consumer
Response), la GPA (gestion partagée des approvisionnements), la CPFR (Collaborative
Planning, Forecasting and Replenishment), les places de marché électronique et les fonctions
« tracing » et « tracking ».
Les approches SCM et le développement des systèmes d'informations intégrés permettent une
connaissance plus fine des mouvements et des besoins, une gestion globale de la chaîne
logistique, une sécurisation des approvisionnements magasins à l’aide de prévisions fiables,
une maîtrise des stocks et une réduction des coûts.
Autant en France qu’en Suisse, les entreprises interrogées ont toutes citées cette approche
Supply Chain Management comme une condition de leur choix stratégique pour la
62
Rapport du groupe d’experts constitué sur les rapports entre industrie et commerce, présidé par G. Canivet, pour
le Ministère des finances, 18 octobre 2004, P. 29 et suivants
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83
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
centralisation logistique. La gestion globale de la chaîne logistique nécessite l’appui de moyen
informatique en raison de sa complexité.
Le passage à la centralisation logistique a été le changement logistique significatif des
quarante dernières années dans le secteur de la distribution.
La centralisation logistique est définie comme un triangle ayant comme sommets la
polarisation des sites logistiques, la massification des flux et la concentration
d’entreprises.
Les pratiques logistiques fondamentales déployées par les entreprises de distribution
depuis les changements des stratégies logistiques sont :
-
l’utilisation des entrepôts et plates-formes ;
la réduction du nombre d’entrepôts et de plates-formes ;
la concentration des entreprises et leurs moyens logistiques ;
la massification des flux ;
l’intégration des activités logistiques ;
l’externalisation des activités logistiques ;
la diversification des zones géographiques d’approvisionnement et l’expansion des
marchés ;
le développement du Supply Chain Management (SCM).
Ces pratiques logistiques sont celles que les entreprises de distribution combinent pour
bâtir leurs stratégies logistiques.
Ces stratégies logistiques sont davantage inspirées par l’intérieur des entreprises que
par l’extérieur.
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84
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
IV. Influence des politiques publiques
Nous tentons de répondre à deux types de questions pour analyser l’influence des contextes des
politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises : quels facteurs, dépendant du
contexte des politiques publiques, ont influé directement sur les changements significatifs et/ou
les évolutions logistiques des entreprises de distribution? Et quels en ont été les
mécanismes d’influence ?
1. En FRANCE
Nos enquêtes et analyses ont montré que les politiques publiques ont été de peu d’influence sur
les changements de stratégies logistiques des entreprises de distribution. Il n’y a pas eu de
politique publique visant à influencer intentionnellement et directement les stratégies logistique
des distributeurs.
On n’a pas identifié de politique publique visant à influencer directement les stratégies
logistiques des entreprises de distribution.
Néanmoins, on a détecté :
- que des politiques publiques ont influé accidentellement et involontairement sur le passage
des stratégies logistiques des entreprises à la centralisation logistique.
-
et que des politiques de collectivités locales ont été mises en œuvre en faveur de
l’implantation des entrepôts et plates-formes.
Nous les analysons dans cet ordre.
1.1 Les politiques publiques ayant influé sur le passage à la centralisation logistique
Les lois énoncées comme ayant influé indirectement et accidentellement sur le changement
logistique dans la distribution sont les lois Raffarin et Galland, Contrat de Progrès et des
politiques des collectivités locales.
La Loi Raffarin
La loi Raffarin, prolongeant la loi Royer, soumet à des autorisations, difficiles à obtenir, toute
création de grandes surfaces afin de protéger le petit commerce. Cette législation, relative à
l’urbanisme commercial, limite très fortement les possibilités d’extension des surfaces de vente
des magasins et donc le développement même des entreprises de distribution. De fait, depuis
1996, le nombre d’ouverture de supermarchés a significativement diminué63 (moins de 200 par
an alors qu’il y en avait plus de 300 par an entre 1986 et 1995. En 1997, 25% des projets
d’ouvertures ont été rejetées par les commissions départementales.
63
Rapport Canivet, op cité P. 14
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85
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Ne pouvant plus augmenter le nombre de magasins en France, les grands distributeurs ont été
obligés de déployer diverses stratégies, entre autres : conquérir des marchés à l’étranger ; se
concentrer pour augmenter le parc en achetant aux concurrents (fusions-acquisitions) ;
transformer les réserves magasins en surface de vente (l’autorisation pour cette transformation
est plus facile à obtenir). Cette transformation des réserves arrières en surface de vente a
poussé les distributeurs à la création des entrepôts et plates-formes. Elle a eu également pour
effet d’accroître la fréquence des livraisons entre les entrepôts et les magasins avec la mise en
tension des flux.
La loi Raffarin a également eu une influence sur les mouvements de concentration dans la
distribution à partir du milieu des années 1990. Elle a été une incitation à la concentration de la
distribution par la croissance externe, en limitant les possibilités de croissance interne. Comme
indiqué plus haut, ce dispositif législatif a freiné la croissance des créations de grandes surfaces
en France. Ne pouvant plus augmenter le nombre de magasins en France, les grands
distributeurs ont été obligés de se restructurer et de se concentrer ; ils se sont tournés vers des
stratégies de croissance externe pour augmenter leur parc de magasins en France et à
l’international; de ce fait elle a accéléré le mouvement de fusions-acquisitions des entreprises
de distribution, lequel entraîna les grandes fusions logistiques observées durant la deuxième
partie des années 1990 (Carrefour-Promodès, Auchan-Docks de France, etc.).
Cette législation sur l’urbanisme commercial protège par ailleurs la position actuelle des
principaux opérateurs de la grande distribution. Un nouvel entrant, dont la stratégie s’appuierait
sur des formats d’une surface supérieure à 300 m², ne pourrait en effet que difficilement
s’implanter en France sauf par le biais du rachat des magasins existants. Ainsi, grâce à cette loi,
la distribution française vit à l’abri de la menace d’un nouvel entrant, notamment d’un
opérateur significatif. L’existence d’une barrière à l’entrée dans le secteur due aux règles
restrictives qui gouvernent l’urbanisme commercial et la tendance à la concentration du secteur
ont eu pour effet de renforcer le pouvoir de la grande distribution sur ses fournisseurs et de
limiter le développement de nouveaux opérateurs dans les circuits de distribution.
La loi Raffarin n’a pas non plus atteint l’un des objectifs principaux qui était de « de protéger le
petit commerce ». Le Tableau n°19 montre que cette loi n’a pas sauvegardé le commerce de
proximité d’alimentation générale ; en effet, la quantité de supermarchés de proximité, de petits
libres-services, et autres petits commerces indépendants diminue continûment aussi bien avant
que depuis 1996.
Tableau n° 19: l’évolution du nombre de points de vente de la proximité de 1985 à 2003 :
Formats de proximité
Petits libre-service
Supérettes
1985
1990
1994
1996
1998
2000
2002
2003
-
-
-
19.033
16.300
Nd
Nd
15.000
5.808
5.038
4.831
4.337
4.500
4.526
4514
4.605
Supermarchés
de proximité <1200 m²
Maxidiscounts
< 1200 m²
Convenience-store
-
-
4.030
3.831
3.500
3.154
3.130
2.931
0
242
1.044
1.791
2.300
2.574
2.727
3.049
-
-
-
385
400
nd
nd
nd
Total
-
-
-
29.377
27.000
nd-
nd-
26.000
Source : IFLS ( nd : chiffres non disponibles ), citée par le rapport Canivet
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86
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La loi Galland
La loi Galland, prolongeant la loi Sapin, cherche, à cette époque là, à encadrer le seuil de
revente à perte qui était relativement mal défini. Elle interdit la vente à perte et définit de façon
officielle le seuil de cette revente à perte : on prend la facture du fournisseur, on ajoute la
facture du transporteur jusqu’au point de livraison par le fournisseur, et ceci quel que soit le
lieu de facturation. Elle modifie aussi les conditions de ventes auprès des industriels. Ainsi la
loi Galland oblige à plus de transparence sur les coûts associés à la vente des produits (les coûts
de ventes, les coûts logistiques et les remises commerciales).
A la notion floue de « principe acquis » a été substituée celle de « réduction de prix acquise à la
date de la vente (…) directement liée à cette opération de vente (…) à l’exclusion des
escomptes non prévues par la facture ».
L’article 10 de la loi du 1er juillet 1996 est devenu l’article L.441-3 alinéa 2 du Code de
commerce qui dispose que : « La facture doit mentionner (…) le prix unitaire hors TVA des
produits vendus et des services rendus ainsi que toute réduction de prix acquise à la date de la
vente (…) et directement liée à cette opération de vente (…) à l’exclusion des escomptes non
prévues sur la facture ».
Les règles de la facturation ont donc été aménagées et leur mise en œuvre simplifiée, de sorte
que la facture est devenue, tout à la fois, un instrument plus transparent de la relation
commerciale et une référence pour les opérateurs leur assurant une plus grande sécurité
juridique.
La figure ci-après présente la composition du prix pour le fournisseur et le distributeur.
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87
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Figure 15: Construction du prix fournisseur / prix distributeur
à l’initiative
du distributeur
Prix tarif
Prix net sur facture
de marchandises 89
zone de non
transparence
Prix net net net
ENCADREMENT
Remises inconditionnelles
acquises lors de la vente
11
SEUIL de REVENTE à PERTE
Ristournes conditionnelles
non acquises lors de la vente
1
Réductions
de prix
accordées par
le fournisseur
sur la vente de
marchandises
PVC
92
Marge
avant : 3
88
SERVICES
Prix net net
MARCHANDISES
encadrement
par les CGV
du fournisseur
(transparence)
100
Services spécifiques
du distributeur
28
Achats de
services de
coopération
commerciale
facturés par
le distributeur
Marge
arrière : 29
60
PRIX DES MARCHANDISES
(STRUCTURE TARIFAIRE)
OBJETS de NEGOCIATION
MARGE DU
DISTRIBUTEUR
Source : « Rapport du groupe d’experts constitué sur les rapports entre industrie et commerce », présidé par Guy
Canivet, du Ministère des l’économie et des finances, 18 octobre 2004, P. 12
Pour obtenir le prix le plus bas possible selon le mode de calcul de la loi Galland, il est
nécessaire d’augmenter très sensiblement le volume d’achats et en tout cas chercher, dans les
Conditions Générales de Vente avec les fournisseurs, des conditions d’achats les plus basses
possible; c’est à dire celles finalement qui concourent à des camions complets, voire des trains
complets (massification de flux). Mais en achetant par quantité complète, il faudrait pouvoir les
stocker puisque les magasins n’avaient pas la rotation suffisante pour acheter un camion
complet ; il était donc nécessaire de pouvoir disposer d’entrepôts régulateurs du flux ; d’où un
argument en faveur de la création et de l’utilisation des entrepôts et plates-formes logistiques.
Le Contrat de Progrès
Dans la mesure où les temps d’attente des conducteurs routiers sont considérés comme des
temps de travail dans le cadre du Contrat de Progrès, il a fallu organiser et supprimer ce temps
d’attente magasin pour réduire les coûts du transport routier; d’où également un facteur
favorable à la création d’entrepôts et/ou des plates-formes logistiques.
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88
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Des politiques de collectivités locales en faveur de l’implantations des entrepôts
La législation relative aux plans d’occupation du sol (POS) ne définit que des grandes
catégories de zones (affectées d’un règlement spécifique) telles qu’urbaines ou naturelles;
laissant la possibilité aux autorités locales compétentes de distinguer au sein de celles-ci des
zones à dominante d’activités économiques. Comme le fait remarquer le Rapport Becker64 « il
n’y a donc aucune obligation, ni même aucune incitation, à créer des « zones d’accueil pour des
entrepôts » si bien que, dans la pratique, rares sont les communes qui ont adopté des règlements
propres à identifier les activités logistiques ». Beaucoup de communes ont tendance à refuser
des implantions d’entrepôts. Mais, il y a des collectivités qui ont accepté, durant la période
observée, de dédier des zones géographiques aux opérations logistiques. C’est ainsi que les
entrepôts et plates-formes des entreprises se sont installés dans les régions parisienne, lyonnaise
(Isle d’Abeau), d’Orléans, de Lille, etc.
« Les municipalités comprennent de moins en moins les implantations logistiques sur leur
territoire. Il y a beaucoup de communes qui refusent la logistique. On voit aussi qu’il y a des
communes qui se sont intéressées au problème, qui ont créé des zones spécifiques » (citation).
En pratique, il est donc possible d’affirmer que les politiques publiques des collectivités
locales, en acceptant de dédier des zones d’accueil aux entrepôts, ont influé sur les stratégies
logistiques des entreprises de distribution fondées sur la centralisation des flux. Ces
collectivités, par leurs politiques locales, ont favorisé l’implantation des entrepôts et platesformes sur leur territoire.
La loi solidarité et renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000 (cf. Chapitre III)
devrait, au cours des prochaines années, justifier une réflexion sur le développement de la
grande logistique et entraîner l’apparition d’espaces qui lui soient réservés dans les
agglomérations françaises les plus concernées. La loi SRU vise à intégrer les plans de
déplacements urbains (PDU) dans la logique générale de la planification des grandes
agglomérations. Substituant les nouveaux schémas de cohérence territoriale (SCOT) aux
schémas directeurs (SDAU), la loi SRU indique que les PDU devront s’y conformer ou, plus
précisément, être compatibles. Or les PDU, obligatoires dans les agglomérations de plus de 100
000 habitants, doivent depuis la loi sur l’air du 30 décembre 1996, traiter de l’organisation des
transports et des livraisons pour en réduire les impacts ; ils doivent donc proposer une réponse
adaptée à l’utilisation des infrastructures logistiques existantes et en prévoir le développement
en cohérence avec le schéma général d’urbanisme. Cette évolution qui modifie l’article 28 de la
loi sur l’organisation des transports intérieurs (LOTI) indique aussi que le plan local
d’urbanisme (PLU) qui va succéder au POS, devra quant à lui être comptable avec le PDU. Il
ressort de cette mutation que le PDU s’inscrira désormais dans une planification spatiale
hiérarchisée allant du Scot au PLU, ce qui devrait justifier une réflexion sur le développement
de la grande logistique et pourrait entraîner l’apparition d’espaces qui lui soient réservés dans
les agglomérations françaises les plus concernées. Il convient néanmoins d’attendre quelques
années pour que ces différents documents de planification existent et soient effectivement mis
en cohérence.
64
Conseil général des ponts et chaussées « le développement des implantations logistiques en France et ses enjeux
pour les politiques d’aménagement », Rapport n° 2001-0104-01 du groupe de travail présidé par D. BECKER,
mars 2003.
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89
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Synthèse partielle
Le dispositif législatif applicable aux relations entre les fournisseurs et les distributeurs depuis
1996 ont accéléré et consolidé le développement des entrepôts et plates-formes et donc favorisé
le passage à la centralisation logistique. Les appréciations des mécanismes d’influence de ces
différentes lois, qui ressortent des enquêtes, peuvent être synthétiser comme suit. Le dispositif
législatif décrit ci-dessus :
- a été un des facteurs décisifs pour passer par entrepôt
Pour certains distributeurs comme Monoprix, les lois Galland et Raffarin ont été un des
facteurs décisifs pour passer par entrepôt : « On ne pouvait plus faire de livraisons directes sous
peine de justifier telles ou telles remises qui nécessitent de passer par entrepôts. C’est un des
points importants qui a amené Monoprix à décider d’aller dans ce sens là »(citation).
- a été un facteur réel d’accélération et de consolidation de développement des
entrepôts
Le mouvement de centralisation logistique était lancé avant 1996 ; mais les lois Galland et
Raffarin ont été « un argument de plus pour passer sur entrepôt » (citation) ; et elles ont eu des
effets réels sur la constitution par les distributeurs d’un faisceau d’entrepôts à travers la
France : « il y a un ensemble d’éléments (il n’y a pas qu’un élément) qui justifieraient la
forme que représentent aujourd’hui les organisations logistiques des distributeurs. Mais
sincèrement, sans ce dispositif législatif, il y aurait sans doute des infrastructures logistiques
différentes » (citation). Il est exact qu’investir dans une infrastructure d’entrepôt n’est pas le
seul moyen de contrôler la chaîne logistique des approvisionnements. Pour preuve, au
Royaume Uni, Sainsbury sous-traite toutes les activités de distribution physique, mais introduit
son propre système d’information pour surveiller et contrôler les performances des tiers
prestataires logistiques. De manière générale, en comparaison de la France, les distributeurs
anglais sous-traitent l’ensemble de leur logistique, ce qui pousse les transporteurs à s’orienter
vers ce métier ; souvent à travers une logistique dédiée. Ainsi Exel Logistics, qui va devenir le
numéro 1 mondial, a pour origine (1977), la demande d’une division spécialisée par
Marc&Spencer, à NCF, le plus grand groupe de transport du pays65. On peut donc imaginer que
s’il n’y avait pas eu en France, ni loi Galland, ni loi Raffarin, il y aurait sans doute des
infrastructures logistiques (entrepôts et plates-formes) différentes. On peut affirmer qu’il s’agit
là d’un point « spécifiquement français » (citation).
a été un des facteurs d’accélération des fusions-acquisitions et de
marchés étrangers
conquête de
La loi Raffarin a été, un facteur parmi d’autres, de nombreuses fusions-acquisitions durant la
décennie 1990 et de conquête de nouveaux marchés étrangers.
65
A. Artous, P. Salini « Les transporteurs routiers français dans la compétition internationale », Rapport INRETS
pour la Direction des Transports Terrestres, Décembre 2003. P.49
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90
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
a été en grande partie anticipé
Les entreprises sont comme des citoyens ; elles suivent l’évolution du cadre législatif et
réglementaire qui les concerne. Les lois Galland et Raffarin ont été en grande partie anticipée,
notamment parce qu’elles étaient annoncées depuis 1995, dans le plan PME d’Alain Juppé66.
En conclusion, les lois Raffarin et Galland, le Contrat de Progrès ont accéléré et consolidé le
passage à la centralisation logistique durant la décennie 1990. Cependant, ces réglementations
n’avaient aucune visée directe sur les stratégies logistiques des distributeurs. Il est donc
possible d’affirmer que ces trois lois ont influé involontairement ou accidentellement sur les
organisations logistiques des distributeurs.
Les politiques publiques de certaines collectivités locales, en pratique, ont favorisé
l’implantation des entrepôts sur leur territoire en acceptant de dédier des zones aux activités
logistiques.
1.2 Autres politiques publiques ayant influé sur l’évolution logistique des distributeurs
D’autres politiques publiques ont été évoquées par les entreprises de distribution comme ayant
influé sur l’évolution de leur logistique ; elles ont plus influé sur les décisions logistiques
d’exécution que stratégiques. Nous les analysons ci-après.
La politique de transport
Les distributeurs interrogés ont clairement indiqué que les politiques publiques, au cours des
dernières années, ont favorisé le développement des réseaux routiers et autoroutiers ; et qu’en
matière ferroviaire, il y a eu un manque d’investissements pour le fret ferroviaire.
De fait, il ressort d’une étude de la CEMT67 que sur la période 1985 à 1995, la part des
investissements en infrastructures routières des pays de l’Union européenne a augmenté de 35
% alors que les investissements ferroviaires ne s’étaient accrus que de 27%.
La longueur des lignes ferroviaires exploitées68 a baissé entre 1980 et 2002 passant de 34 362
km à 31 320 km respectivement en raison de la fermeture de lignes secondaires. La longueur
des lignes utilisées uniquement par des trains de marchandises sur la période a été réduite de
presque de moitié sur la même période ; passant de 11 036 km en 1980 à 6 984 km en 2002.
Dans le même temps, la longueur des lignes parcourues par des TGV (transport de voyageurs)
est passée de 0 en 1980 à 7 113 km en 2002. La longueur des lignes à grande vitesse est passée
de 0 en 1980 à 1 540 km en 2002.
Le réseau autoroutier français69, est devenu en revanche l’un des plus denses d’Europe : ne
représentant que 4 862 km en 1980, le réseau autoroutier a atteint 6 838 km en 1990 et puis 10
66
MELT-DRAST « Evolution du cadre réglementaire de la grande distribution française » Etudes du SES, octobre
1998
67
CEMT « Evolution des investissements en infrastructures de transport – 1985 –1995 » Note de couverture
68
Union routière de France « statistiques du transport en France – Faits & chiffres 2003 » P. 28
69
Union routière de France « statistiques du transport en France – Faits & chiffres 2003 » P. 6
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91
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
226 km en 2002, soit un doublement en vingt ans. La longueur des routes nationales est restée
relativement stable sur la même période et a même baissé à partir de 1990 passant de 28 515
km en 1980 à 26 118 km en 2002. Au 31 décembre 2002, le réseau routier et autoroutier de la
France métropolitaine se compose de 1,5 millions de kilomètre de voiries (autoroutes, routes
nationales, routes départementales, routes communales et chemins ruraux).
Ce manque d’investissements dans le fret ferroviaire, durant les dernières années, n’a fait que
renforcer le recours au transport routier dans les organisations logistiques.
« Par rapport au transport, on a la plupart de nos entrepôts qui sont embranchés fer, par contre
on n’utilise pas le fer au profit de la route. En pourcentage, en 1985, le groupe Casino utilisait
35% des approvisionnements par fer ; aujourd’hui c’est presque rien » (citation).
La politique environnementale
Les entreprises interrogées ont parlé de la façon dont elles prenaient en compte les aspects
environnementaux dans leurs organisations logistiques. Il ressort de nos enquêtes que c’est
souvent le respect de la réglementation qui dicte leurs démarches environnementales. Cette
démarche permet aux entreprises d’une part de faire des économies sur les charges de
fonctionnement et d’autre part de se profiler d’un point de vue marketing comme attentive aux
préoccupations environnementales. On observe, cependant, une réelle prise en compte
progressive des enjeux écologiques. Cette tendance résulte d’une prise de conscience, mais
également, d’une double pression des consommateurs-clients (opinion publique) et des acteurs
publics (réglementation). Les principales pratiques environnementales des entreprises, tirées
des nos enquêtes, sont les suivantes :
- la logistique s’inscrit de plus en plus dans la politique de développement durable des
entreprises de distribution;
- les distributeurs incitent leurs transporteurs (sous-traitants) à convertir leur parc en norme
euro 3 (Auchan, Carrefour, Casino);
- un intérêt réel pour les modes alternatifs à la route se développe : des distributeurs, comme
Auchan et Carrefour ont transféré une partie de leurs trafics de conteneur en grand import
de la route sur la voie d’eau (Le Havre-Paris, Marseille-Lyon)
- un ‘Rapport de développement durable’ est élaboré chaque année par les grandes
entreprises;
- la gestion et le traitement des déchets s’inscrivent de plus en plus dans les politiques
logistique des distributeurs (reverse logistique) (Carrefour, Galeries Lafayette, Monoprix)
- la tendance générale des distributeurs à mieux remplir les camions (réduction du nombre de
camion en circulation en préparant mieux les palettes, regroupement des entrepôts, gestion
des retours, etc.).
De telles initiatives méritent d’être encouragées et accompagnées par les pouvoirs publics.
En matière environnementale, la politique européenne jugée efficace par les distributeurs
concerne les limites d’émissions pour les véhicules (normes Euro1 et Euro2, 3 et 4). Mais cette
politique n’est pas bien relayée en France. « Je ne pense pas qu’il y ait des incitations des
transporteurs à passer à des normes euro supérieures. C’est dommage à mon avis, par ce que
tout ne se fera pas par le fer. Il ne faut pas que le fait de travailler sur le ferroviaire empêche
d’avancer sur le mode routier » (citation).
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92
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Rappelons que, parmi les diverses façons de lutter contre les nuisances du transport routier, le
contrôle à la source des émissions de nuisances atmosphériques et acoustiques a été choisi par
l’Union européenne par l’établissement de normes imposées à la construction des véhicules
lourds. On a ainsi défini successivement les normes Euro 1 et Euro 2, 3 et 4 (Tableau suivant).
Tableau 20 normes d’émission des véhicules lourds (en g/kWh)
Date d’application
CO
HC
NOX
Particules
Euro 1
1er octobre 1993
4,9
1,23
9,0
0,4
Euro 2
1er octobre 1996
4,0
1,1
7,0
0,15
Euro 3
1er janvier 2000
2,1
0,66
5,0
0,1
Euro 4
1er juin 2005
1,5
0,46
3,5
0,02
On peut constater qu’un véhicule Euro 3 est, pour les critères considérés, plus de deux fois
moins polluant qu’un véhicule Euro 1. Un véhicule Euro 4 le sera plus de trois fois moins.
Les Plans de Déplacements Urbains (PDU)
On a essentiellement observé l’influence des Plans de Déplacements Urbains (PDU) et des
réglementations de la circulation des marchandises en ville (accès au centre-ville et
stationnement) sur l’évolution logistique des distributeurs opérant dans le centre-ville, comme
les Galeries Lafayette, Monoprix, etc. L’exemple de Galeries Lafayette est éclairant :
Les PDU des villes de Strasbourg et de La Rochelle ont interdit l’accès des poids lourds au
centre-ville et déterminé des horaires de livraison. Ces restrictions ont conduit les magasins
Galeries Lafayette de ces deux villes à construire des entrepôts intermédiaires en périphérie.
L’impact du passage obligatoire par ces entrepôts intermédiaires fut un surcoût logistique de
18%.
La fiscalité sur les entrepôts en région Ile-de-France
En région Ile-de-France, les entrepôts de plus de 5 000 m² sont, depuis 1999, soumis à une taxe
au mètre. L’instauration de cette taxe a entraîné, selon les entreprises, des délocalisations des
entrepôts hors de la région Ile-de-France ; ce qui a eu pour effet une augmentation des flux de
véhicules entre Paris et sa proche banlieue et les régions limitrophes où beaucoup de ces
entrepôts sont installés, et donc une augmentation de la pollution.
« On a instauré une taxe sur les entrepôts. L’effet de cette mesure est que les entrepôts sont
allés s’installer hors de l’Ile-de-France, juste à la périphérie de l’IDF, donc loin de Paris qui est
une zone de consommation. C’est une mauvaise idée du point de vue environnemental en tout
cas » (citation).
« La politique publique fait qu’on nous incite à aller en dehors de la région parisienne du fait de
l’instauration d’une taxe qui s’applique au mètre carré d’entrepôt construit. Plus vous éloignez
les implantations d’entrepôts de Paris où la consommation existe, plus vous augmentez les flux
de véhicules qui rentrer dans Paris ou dans la proche banlieue pour nourrir les
consommateurs » (citation).
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93
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
« Le problème (je parle pour la région parisienne) de la taxe sur entrepôts fait qu’on est amené
à s’éloigner de plus en plus des villes ; et donc en s’éloignant de l’agglomération parisienne, à
mon avis, on crée de la circulation et de la pollution. » (citation).
« Ajouté aux prix déjà élevés de la région parisienne (immobilier, personnel), la taxe sur les
entrepôts nous a dissuadé jusqu’à présent de construire ou louer un grand dépôt à proximité de
Paris dont nous avons pourtant besoin »(citation).
La politique de travail
C’est la « loi des 35 heures » qui a été le plus évoquée. Rappelons que la loi du 13 juin 1998
dite « loi Aubry » a abaissé la durée légale du travail hebdomadaire à 35 heures à partir du 1er
janvier 2000 pour les entreprise de 20 salariés et plus, et du 1er janvier 2002 pour les autres.
Selon notre enquête, dans un premier temps, cette loi a eu un impact positif sur les entreprises
de distribution en les obligeant à mettre en place une série d’actions pour améliorer fortement
notre productivité. En logistique, cette recherche de gains s’est traduite par une forte
accélération de la centralisation logistique.
Cependant, au fur et à mesure que les « allègements Aubry » accompagnant l’application de la
loi ont diminué, l’effet de la loi fut très négatif sur l’emploi. « En 2003, pour compenser cette
baisse des allègements, il nous aura fallu réduire les effectifs de près de 500 personnes. »
(citation).
Les aides et incitations financières publiques
Les dispositifs d’aides publiques existants au niveau national ou européen ont été évoqués par
certains distributeurs à l’occasion de la mise en œuvre d’expérimentations mais ; ce sont
généralement les difficultés d’accès à ces subventions qui ont été remarquables dans nos
enquêtes.
« L’exemple du camion au gaz naturel qu’on a mis en test (Monoprix et Géodis) dans Paris ; en
dehors de l’ADEME qui nous aide un tout petit peu, on ne bénéficie pas d’autres subventions !
Au niveau européen, c’est très compliqué. Il est difficile de connaître les conditions ou non
d’avoir de subventions, de savoir à qui il faut s’adresser et où il faut passer au niveau pouvoirs
publics français. Je ne comprends pas qu’il n’y ait pas à ce niveau là, des organismes qui nous
aideraient à bien connaître les démarches et les conditions d’attribution dans différents
domaines ; pour nous c’est très compliqué » (citation).
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94
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Principaux enseignements
Durant les quarante dernières années, les politiques publiques ont été de peu d’influence
sur les changements de stratégies logistiques des entreprises de distribution. Il n’y a pas
eu de politique publique visant à influencer intentionnellement et directement les
stratégies logistique des distributeurs.
Néanmoins on a détecté que les lois Raffarin et Galland ainsi le Contrat de Progrès, qui
n’avaient aucune visée directe sur les stratégies logistiques des distributeurs, ont
accéléré et consolidé le passage à la centralisation logistique durant la décennie 1990.
Mais la décision logistique stratégique des entreprises pour ce changement était déjà
prise et le processus lancé.
On a observé aussi que des politiques des collectivités locales avaient, en pratique,
favorisé l’implantation des entrepôts sur leur territoire en acceptant de dédier des zones
d’accueil aux activités logistiques.
Les politiques publiques, intentionnellement ou non, ont influé davantage sur les
décisions logistiques d’exécution des entreprises de distribution.
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95
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. En SUISSE
En Suisse, il ressort des enquêtes que les politiques publiques sont perçues par les entreprises
comme des cadres de mise en place et d’évolution de leurs stratégies logistiques. On n’a pas
observé d’influence directe du contexte des politiques publiques sur le processus de
changement vers la centralisation logistique.
En revanche, il a été constaté que la massification des flux conjuguée avec la politique des
transports en faveur du rail et la politique environnementale ont entraîné une utilisation accrue
du rail dans les organisations logistiques des distributeurs. La massification des flux sur les
entrepôts et les plates-formes résulte de la centralisation logistique. Cette massification des flux
a toujours été favorable au mode ferroviaire ; elle constitue donc une condition nécessaire mais
pas suffisante pour que les entreprises utilisent le rail. Seule la politique volontariste des
pouvoirs publics suisses en faveur du rail a amené les entreprises de distribution à utiliser le rail
pour assurer le transport d’une partie importante du trafic généré par la centralisation
logistique. Les politiques publiques se sont appuyées sur les effets conjugués de la politique de
transport qui vise explicitement à dynamiser le rail, de l’adoption d’une redevance poids lourds
liée aux prestations (RPLP) et de l’interdiction pour les poids lourds de circuler la nuit et les
dimanches. L’objectif global de ces politiques est de freiner la croissance du secteur de
transport routier de marchandises.
Figure 16 : évolution des investissements – rail et route
Investissements en mio CHF
4500
4000
3500
3000
2500
2000
ROUTE
1500
RAIL
1000
500
0
1960
1970
1980
1990
2000
2010
Sour ce: L IT R A
L’entreprise ferroviaire nationale, les CFF propose des tarifs assez concurrentiels par rapport à
la route. Il y a deux raisons à cela : les subventions en faveur du rail et le renchérissement du
transport routier par la RPLP.
Les incitations financières (subventions) et les investissements en faveur du rail
Des montants considérables sont alloués par l’Etat à l’opérateur afin de baisser le prix du sillon.
Par ailleurs, la Confédération a investi fortement dans les infrastructures ferroviaires (entretien,
construction de nouvelles lignes). La Figure 16 illustre l’engagement de la confédération en
faveur du rail. Les dépenses pour le rail n’ont cessé d’augmenter alors que celles en faveur de
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96
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
la route ont stagné depuis une dizaine d’années. Signalons que la majeure partie du produit de
la redevance RPLP, est utilisée pour financer des projets d’infrastructure ferroviaire.
La redevance poids lourd liée aux prestations (RPLP)
Les responsables logistiques des entreprises ont relevé que les tarifs pratiqués par les CFF
étaient compétitifs par rapport à ceux pratiqués par la route, voire même avantageux sous
certaines conditions (distance et volume). La RPLP a eu comme conséquence de renchérir le
transport routier. Cette taxe s’applique à tous les mouvements des poids lourds, qu’ils soient
pleins ou vides. La concurrence entre les entreprises de transport s’en est retrouvée accrue. Ce
phénomène a favorisé l’externalisation d’une partie des transports. C’est le cas par exemple de
Migros où les camions arrivant pleins du centre national à un point de vente seraient obligés de
repartir à vide. Des transporteurs tiers ont plus de possibilités d'optimiser leurs chargements et
ainsi proposer des prix avantageux.
La RPLP a par ailleurs eu comme autre conséquence sur les transports des entreprises, de les
inciter à accélérer le renouvellement de leur parc de poids lourds. Cette taxe étant
proportionnelle à la classe de pollution du véhicule. Dans l’année qui a précédé l’adoption de la
RPLP « les ventes de poids lourds ont augmenté de 45% »70. En renouvelant sa flotte, le
propriétaire de camions réalise des économies d’un double point de vue : les nouveaux
véhicules font partie de la catégorie qui rejette le moins d’émissions, et donc qui coûte le moins
cher, et la taille des poids lourds (c’est à dire leur poids autorisé) permet de mieux s’adapter
aux besoins du marché. La coopérative Migros de Genève a par exemple renouvelé l’ensemble
de son parc avant 2001.
L’interdiction de rouler la nuit
La loi sur la circulation (1958) interdit aux poids lourds de circuler durant la nuit et les weekends. Cette disposition est très ancienne (années 30) et est ancrée dans la mentalité suisse. Les
entreprises comme la Coop ou Migros utilisent donc le train afin que leurs marchandises soient
transportées la nuit en profitant du fait que la rapidité n’est pas exigée dans ce cas.
La pression de l’opinion publique, qui est soucieuse des questions environnementales, explique
aussi la part importante du rail en Suisse. Pour des entreprises de la taille de Migros et Coop, il
est nécessaire de montrer qu’elles sont actives dans ce domaine. L’utilisation du rail est dans ce
contexte aussi un élément important (soucis éthique de l’entreprise).
Principaux enseignements
On n’a pas observé d’influence des politiques publiques sur le changement vers la
centralisation logistique. Les politiques publiques sont perçues par les entreprises
comme des cadres dans lesquels elles doivent inscrire l’évolution de leurs stratégies
logistiques.
En revanche, la massification des flux conjuguée avec une politique des transports en
faveur du rail et la politique environnementale ont entraîné une utilisation du rail dans
les organisations logistiques des distributeurs.
70
Balmer U. « Bilan après un an d’application : la nouvelle redevance sur le trafic de poids lourds a-t-elle
influencé la demande de transport suisse ? » - CEMT, Séminaire International – Bruxelles novembre 2002
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. En ITALIE
Des enquêtes il ressort qu’en Italie, en comparaison de la France et de la Suisse, c’est
davantage l’absence de politiques publiques favorables aux exigences des entreprises de
distribution qui a influencé les décisions et les stratégies logistiques de la grande distribution.
Les lois énoncées comme ayant eu des impacts sur les logistiques de la distribution sont celles
relatives : aux responsabilités en matière de sécurité et de santé des travailleurs, au système
d’autocontrôle des industries alimentaires, à l’urbanisme commercial et à la politique
environnementale (essentiellement gestion des emballages).
La politique de sécurité et de santé des travailleurs
Le décret de la loi 626/1994 sur a entraîné une multiplication des contrôles ; ce qui a eu
comme conséquence d’augmenter les coûts logistiques des entreprises de distribution dans la
mesure où il fixe des limites strictes pour la manutention manuelle des
chargements/déchargements afin d’assurer la sécurité des travailleurs.
« En réalité les normes de sécurité imposées s’appliquaient déjà précédemment, sur la base de
la logique, dans les grandes entreprises : le changement plus important est l’attribution
officielle des responsabilités, qui existaient déjà avant mais qui n’avaient jamais été explicitées
et promues » (citation).
La loi sur l’autocontrôle des industries alimentaires
Le décret de la loi 155/1997 vise à réduire le plus possible le risque de contamination du
produit alimentaire (produits surgelés, frais, etc.) par des agents nocifs ; ceci a rendu
indispensable une restructuration des entrepôts, des magasins et des véhicules, avec, comme
conséquence, l’augmentation des coûts dans la mesure où il fallait des espaces plus grands avec
une autre organisation et donc des coûts supplémentaires.
L’urbanisme commercial (permis et autorisations)
Jusqu’à l’instauration de la loi 114/1998 sur l’urbanisme commercial, la grande distribution a
rencontré beaucoup de problèmes par rapport à l’obtention de permis et autorisations. La loi
citée a cherché à simplifier les rapports entre l’administration et le secteur commercial pour
l’ouverture d’une surface de vente. Mais les obstacles ne sont pas tous éliminés. Aujourd’hui
encore, les autorisations sont toujours difficiles à obtenir, à cause autant de la lenteur qui
caractérise l’administration qu’à des complications dues à un excès de régionalisme (les
modalités changent selon les régions, les districts sanitaires ASL ou les communes). Dans un
tel contexte, la grande distribution rencontre d’innombrables difficultés dans le ravitaillement
des points de vente à l’intérieur des centres urbains: « alors que les Communes, pour éviter de
créer des « cités dortoirs » occupées seulement par des bureaux et des personnes âgées,
autorisent l’ouverture de centres d’attraction qui peuvent être des supermarchés et
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98
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
hypermarchés, en même temps, ils imposent l’interdiction d’accès dans les centres urbains »71
(citation).
La politique de protection de l’environnement
En général les entreprises interrogées déclarent « suivre cette loi concernant la protection de
l’environnement », c'est-à-dire le Décret Ronchi, qui instaure le partage des responsabilités de
la pollution provenant des emballages entre producteur et utilisateur. Les distributeurs paient la
taxe d’inscription au CONAI (Consortium National des Emballages) qui gère les flux de retour
(reverse logistics). Mais le Décret Ronchi n’a pas encore été bien appliqué ; et n’a donc pas
réussi à sensibiliser les entreprises au problème de l’environnement, dans la mesure où elles ne
mettent pas en place des techniques destinées à la réduction des emballages. Seule l’entreprise
GS SPA met en œuvre des stratégies de diminution de la pollution : « GS SPA propose des
initiatives qui vont bien plus loin que celles qui sont imposées par la loi. Le directeur du
transport est également « mobility manager » et s’occupe justement de trouver des solutions
moins polluantes: on peut citer l’imposition aux transporteur d’utiliser ce que l’on appelle le
« gazole blanc », l’adoption de caissettes « chep » qui remplacent les emballages en plastique et
en carton et peuvent être réutilisées » (citation).
Principaux enseignements
On n’a pas observé d’influence du contexte des politiques publiques sur le processus de
changement vers la création des entrepôts et plates-formes.
En revanche, les politiques de transport (investissements en infrastructure de transport),
du travail (manque de flexibilité du travail, etc.) et de l’environnement ont eu des
impacts sur l’évolution logistique de la distribution.
71
On fait remarquer qu’en Italie le ravitaillement nocturne est seulement prévu pour les grandes surfaces de banlieue, ce qui ne
résout pas les problèmes dans les villes.
B2K Consultants
99
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
V. Les autres facteurs de changements logistiques
Nous tentons de répondre à deux types de questions : quels sont les autres facteurs, ne
dépendant pas du contexte des politiques publiques, ayant influé sur ces changements de
stratégies logistiques des entreprises? Et quels sont les mécanismes ?
Bien que variable d’un pays à l’autre, il ressort des enquêtes menées que les autres facteurs de
changement des stratégies logistiques, durant la période analysée, sont très proches. Les
facteurs qui ont été repérés dans les enquêtes pour justifier les changements de stratégies pour
la centralisation logistique sont: les facteurs économiques, l’évolution technologique dans
l’informatique et les communications ; le développement des prestataires logistiques ; les
modifications dans le management des entreprises, la globalisation et la délocalisation de la
production.
1. Les facteurs économiques
En France comme en Italie et en Suisse, pour les entreprises interrogées, les facteurs
économiques, ont été les principaux moteurs des changements logistiques. Il convient de
rappeler que le début des années 1980 marque le début de la « crise » pour la grande
distribution. Les causes sont multiples : situation de crise économique générale (voir Chapitre
II), clientèle de plus en plus exigeante et volatile, concurrence accrue notamment avec la percée
de nouveaux formats tels que les hard-discounters, etc. Tous ces éléments pèsent, à des degrés
divers, sur les performances financières des distributeurs et commandent les choix stratégiques
envisageables. Une étude monographique menée auprès des principaux groupes français à
dominante alimentaire souligne la lente érosion de la marge financière. Les rabais, remises et
ristournes, etc. sont devenus vitaux pour les distributeurs français72. La prise de contrôle des
opérations logistiques d’approvisionnement en amont des surfaces de ventes apparaît comme
une stratégie de restaurer la rentabilité des distributeurs73. Les principaux avantages
économiques et financiers évoqués par les entreprises enquêtées sont les suivants.
Des économies d’échelle
La production d’un bien ou d’un service augmente en volume à un prix donné, quand la
demande dont il fait l’objet augmente. L’augmentation du volume du bien ou du service
pousse, en raison des économies d'échelle, les prix unitaires à la baisse. Le développement des
entrepôts et plates-formes par les distributeurs répond à cet objectif de baisse des coûts
d’approvisionnement des points de vente en s’appuyant sur l’effet volume. Ces économies
d’échelle peuvent être substantielles. Avec la centralisation logistique, on obtient des
économies d’échelle sur le stockage, la manutention, le transport et le traitement des
commandes.
72
Prarienté S. « Rentabilité comparée d’entreprises européennes de distribution en magasins », Institut de
Commerce et de la Consommation, Paris 1988.
73
Paché G. , Sauvage T. « La logistique : enjeux stratégiques » Vuilbert Entreprise, 2ème édition, Paris 1999.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Des remises fournisseurs liées à la massification des flux et au passage par
entrepôts
En France, le regroupement des approvisionnements de magasins (plusieurs centaines) sur un
nombre réduit d’entrepôts et plates-formes donne l’opportunité aux distributeurs de négocier
favorablement des remises avec les fournisseurs. Les pratiques des achats massifiés permettent
l’obtention d’une remise distribution en achetant par camions complets (entre 2,5 et 5%), le
fournisseur ne livrant plus des lots sur des magasins mais en chargement complet à un nombre
limité d’entrepôts et de plates-formes. Cette remise, indiquée dans la facture permet d’abaisser
le seuil de revente à perte. Les achats massifiés permettent également de profiter des barèmes
tarifaires sur les quantités, qui permettent d’abaisser le prix unitaire du produit.
« Les industriels ont poussé dans ce sens là (le passage par entrepôts) par le biais des
remises » (citation).
« On fait supporter aux fournisseurs une partie des coûts logistiques. Nous disions aux
fournisseurs : au lieu de livrer 60 magasins, vous ne livrez que 3 dépôts, vous ne faites que 3
factures, vous n’avez que 3 possibilités de litiges au lieu d’avoir 60 cas à chaque fois ; au lieu
de livrer de petites quantités, vous livrez de grosses quantités, etc. ; vous faites une série de
gains, donc nous vous demandons de nous restituer des remises logistiques qui paient en gros
50% du coût. D’abord réticents, la quasi-totalité des fournisseurs a fini par nous consentir des
remises allant de 1 à 7 ou 8% » (citation).
La réduction des stocks
La remontée en amont des stocks autorise une dissociation des opérations physiques et des
opérations purement commerciales exercées sur le point de vente ; l’entreposage étant reporté
sur des zones péri-urbaines où le prix du foncier demeure abordable. En France, comme en
Suisse, les distributeurs interviewés ont justifié la centralisation logistique par le fait que cela
leur permettait de concentrer leurs stocks et donc de les réduire. C’est donc un des principaux
moteurs du changement de stratégies logistiques.
« Notre objectif était de diminuer de moitié nos coûts logistiques » (citation).
« L’objectif est de décharger les magasins des opérations de manutention et de gestion de
stocks » (citation).
« Ce qu’on cherche sur un entrepôt, c’est d’avoir le minimum de stocks tout en
s’approvisionnant en camions complets pour faire le plein des conditions d’achats » (citation).
La résorption de la congestion au niveau des magasins
En France, le regroupement des commandes et la massification des flux sur les entrepôts
permettent d’éliminer des fils d’attente et la congestion au niveau des réceptions magasins, une
plus grande maîtrise des chaînes d’approvisionnements et une réduction des stocks et des coûts
logistiques.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
« Eviter ce qu’on a connu dans le passé avec les livraisons directes, c’est à dire une congestion
au niveau des réceptions magasins. Cette organisation (transit par entrepôt) permet en
particulier de réduire le temps d’attente et les flux de camions» (citation).
« Cette stratégie a été motivée par des problèmes créés par des livraisons en magasins.
L’engorgement des réceptions magasins posait des problèmes d’organisation, de sécurité (files
sur la voie publique) et de temps d’attente » (Citation)
2. L’évolution technologique dans l’informatique et les communications
En France, comme en Italie et en Suisse, le progrès de l’informatique et le développement des
nouvelles technologies d’information et de communication ont permis une grande rapidité dans
l’échange et le partage d’informations, et un plus grand contrôle sur chaque phase du processus
logistique. Ils ont rendu possible une meilleure gestion des entrepôts et des chaînes logistiques
d’approvisionnements (Supply Chain) : approvisionnement des entrepôts, préparation des
commandes, livraison des magasins (hypermarchés, supermarchés, etc.), adaptation des
logistiques aux types d’entrepôts (centraux et régionaux) et aux types de produits (frais, secs,
pondéreux, etc.). Il s’agit là d’un facteur important de changements logistiques.
« La centralisation ne peut fonctionner qu’avec des systèmes informatiques très performants et
fiables….La qualité des systèmes informatiques, elle-même condition sine qua non de
l’efficacité de la logistique, est un levier essentiel de rentabilité pour une entreprise de
distribution « (Citation).
« En entreposage, la grande révolution c’est le début des années 90 ; les logiciels de gestion
d’emplacements des entrepôts ont véritablement changé la façon de travailler à l’intérieur des
entrepôts » (citation).
3. L’évolution dans le management de l’entreprise
En France, ce sont les fusions - Auchan et Docks de France ; et Carrefour et Promodès qui ont
été le principal facteur des fusions logistiques de ces quatre distributeurs.
En Suisse, il a été observé que pour trois des quatre entreprises de distribution interrogées, la
décision de changer de stratégie à coïncider avec des changements importants dans la direction
de l’entreprise. Ces changements ont pris différentes formes. Dans un cas cela a consisté à des
modifications importantes dans l’actionnariat de l’entreprise et donc sur une remise en question
de ses objectifs. Dans un autre cas l’entreprise a finalisé son processus d’intégration pour
passer d’un ensemble de coopératives à une entreprise unique et bien intégrée. Dans le dernier
exemple c’est l’évolution de son marché qui a poussé vers un changement dans ses objectifs et
de la manière de gérer l’entreprise. Dans tous les cas, ces changements dans le management de
l’entreprise ont été en quelque sorte, le déclencheur du changement de stratégie logistique.
En Italie, il y a des changements logistiques qui ont été opérés suite à une modification dans la
composition de l’actionnariat (l’acquisition de GS SPA par Carrefour-Promodès).
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
4. La globalisation du marché et la délocalisation de la production
Non seulement la mondialisation se traduit par l’internationalisation de la concurrence et donc
du réseau de distribution, mais aussi la délocalisation de la production (de la part des
fournisseurs) dans les pays à faible coût de main-d’œuvre ; ce qui oblige les entreprises de
distribution à se restructurer de façon à répondre efficacement et rapidement à ces nouvelles
exigences. Une conséquence importante liée à la délocalisation concerne l’utilisation plus
importante et plus fréquente du transport maritime.
L’un des problèmes pour les entreprises européennes, depuis quelques années, est celui de la
Chine : « La Chine conditionne l’ouverture de son marché intérieur à la contrainte que les Etats
étrangers permettent à leur tour l’entrée de certains quotas de marchandises chinoises,
d’insuffisante qualité quoique à bas coût. » (citation). Dans un tel contexte, les entreprises qui
travaillent avec les fournisseurs fiables (par exemple, qui n’exploitent pas le travail des
mineurs) et évitent l’intermédiation de main-d’œuvre sont nettement pénalisées. Cet
élargissement des marchés de vente a donc augmenté le niveau de compétitivité entre
entreprises. Ceci implique la nécessité de réduire les coûts en ayant recours à l’externalisation
des opérations logistiques de façon à permettre à l’entreprise de mettre l’accent sur son cœur de
métier.
Principaux enseignements
Les facteurs économiques ont été les moteurs des changements des stratégies logistiques
des entreprises de distribution durant les quarante dernières années.
A cela s’ajoute le développement des technologies dans l’informatique et les
communications.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
VI. Les principaux résultats du chapitre 4
Dans les trois pays étudiés, le passage à la centralisation logistique a été le changement
logistique significatif des quarante dernières années dans la grande distribution. La
centralisation logistique est définie comme un triangle ayant comme sommets la massification
de flux, la polarisation des sites logistiques et la concentration des entreprises de distribution et
leurs moyens logistiques.
Les pratiques logistiques fondamentales des entreprises, induites par la centralisation
logistique, concernent l’utilisation des entrepôts et plates-formes, la réduction du nombre
d’entrepôts et plates-formes, la concentration des entreprises et leurs moyens logistiques, la
massification des flux, le choix de l’intégration ou de l’externalisation des activités logistiques,
la diversification géographique des zones d’approvisionnement et l’expansion des marchés, le
développement des approches supply chain management.
Il n’y a pas eu de politique publique visant à influencer directement les changements de
stratégies logistiques des entreprises de distribution. En France, comme en Italie et en Suisse,
durant les quarante dernières années, les politiques publiques ont été de peu d’influence sur les
les stratégies logistiques des entreprises de distribution.
Cependant, les lois Raffarin et Galland ainsi le Contrat de Progrès, qui n’avaient aucune visée
directe sur les stratégies logistiques des distributeurs, ont eu une influence réelle, mais
accidentelle et involontaire, sur les changements logistiques des entreprises de la grande
distribution en France. Ces différentes lois ont accéléré et consolidé le passage à la
centralisation logistique durant la décennie 1990. En Suisse, comme en Italie, on n’a pas
observé ce type d’influence des politiques publiques sur le changement vers la centralisation
logistique, et donc sur leurs stratégies logistiques.
On a également observé qu’en France, des politiques des collectivités locales avaient, en
pratique, favorisé l’implantation des entrepôts sur leur territoire en acceptant de dédier des
zones d’accueil aux activités logistiques.
Les politiques publiques, intentionnellement ou non, ont influé davantage sur les décisions
logistiques d’exécution des entreprises de distribution dans les trois pays. Ainsi en Suisse par
exemple, des politiques publiques se sont appuyées sur les effets conjugués de la politique de
transport qui vise explicitement à dynamiser le rail, de l’adoption d’une redevance poids lourds
liée aux prestations (RPLP) et de l’interdiction pour les poids lourds de circuler la nuit et les
dimanches pour freiner la croissance du secteur de transport routier de marchandises et
préserver les parts de marché du rail. En France, la politique de transport a plus favorisé le
développement des réseaux routiers et autoroutiers que les investissements dans le fret
ferroviaire. Il en est résulté un recours accru des entreprises de distribution au transport routier.
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104
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Les outils de politique publique et d’autres facteurs significatifs, détectés comme ayant
influencé le passage stratégique à la centralisation logistiques des entreprises de distribution en
France, sont représentés sur la figure ci-après.
Figure 17 : influence des politiques publiques et d’autres facteurs sur le passage à la centralisation logistique en
France
Comme on peut l’observer sur ce schéma, l’impact logistique du contexte des politiques
publiques, en combinaison avec d’autres facteurs, a été de favoriser l’utilisation des entrepôts et
plates-formes, la massification des flux et la concentration des entreprises et leurs moyens
logistiques :
- les lois Galland et Raffarin, le Contrat de Progrès et des politiques locales, en combinaison
avec les facteurs économiques et le développement technologique, ont influé sur le
développement des entrepôts et plates-formes et sur les pratiques de massification des flux ;
- la loi Galland, combinée avec les facteurs économiques, ont influé sur les pratiques de
massification des flux ;
- la loi Raffarin et les facteurs économiques ont accéléré la concentration des entreprises de
distribution.
Les facteurs économiques, le développement technologique et la mondialisation ont eu un
impact sur la ‘réduction du nombre d’entrepôts (polarisation des sites logistiques)’,
‘l’externalisation des activités logistiques’, ‘la diversification des zones géographiques
d’approvisionnement’ et le ‘développement des approches supply chain’.
Dans les trois pays étudiés, ces sont les facteurs économiques qui ont été les moteurs des
changements de stratégies logistiques des distributeurs durant les quarante dernières années. Le
développement technologique dans l’informatique et les communications a été également un
facteur important pour passer à la centralisation logistique.
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105
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE V
INFLUENCE DES POLITIQUES PUBLIQUES SUR LES STRATEGIES
DES PRESTATAIRES DE TRANSPORT ET DE LOGISTIQUE
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106
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
I. Introduction
Les entreprises prestataires de services de transport de marchandises et de logistique,
contrairement aux distributeurs, ont comme cœur de métier « le transport et la logistique ».
Leurs stratégies consistent à offrir des prestations de services répondant aux exigences de leurs
clients commerciaux et industriels en termes de coût, de délai et de qualité de service. La
prestation de services logistiques ne se réduit pas uniquement à la gestion de stock : « La
logistique est la gestion des flux physiques de marchandises et d’informations entre le départ
des usines de nos clients et l’arrivée des produits chez les clients de nos clients. Ce qui suppose,
soit par des moyens propres, soit par des moyens sous-traités, la maîtrise de cette chaîne (…).
Cette maîtrise globale suppose bien évidemment des opérations de transport, de stockage, mais
elle comprend également du co-manufacturing, du co-packaging, de la distributions finale »74.
Cette définition de la logistique est représentative de ce que peuvent fournir la plupart des
prestataires logistiques.
Le prestataire de transport et de logistique peut se définir comme une entreprise qui gère des
flux physiques de marchandises et d’informations entre le fournisseur le plus en amont le client
le plus en aval, pour le compte de ses clients; et cette maîtrise globale du processus logistique
implique la mise en œuvre des opérations de transport et de stockage, du co-manufacturing, du
co-packaging et de la distributions finale et bien d’autres activités annexes (L’annexe 2 décrit
l’évolution des entreprises de transport et de logistique dans les trois pays).
L’analyse revient à déterminer comment le contexte des politiques publiques ont influé sur les
changements significatifs des stratégies des entreprises prestataires de services de transport et
de logistique durant les quarante dernières années ; et quels en sont les mécanismes.
74
« Entretien avec Jean-Claude Michel, directeur général de Norbert Dentressangle » Logistiques Magazine n°
124, janvier-février 1998, page 28.
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107
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
II. Les changements significatifs de stratégies
Dans ce paragraphe, nous tentons de répondre à la question suivante : quels ont été, durant les
quarante dernières années, les changements stratégiques significatifs des prestataires de
transport et de logistique ?
L’analyse des enquêtes montre que c’est le passage du « métier » de transporteur à celui de
prestataire logistique qui a été le changement stratégique significatif des entreprises de
transport de marchandises, en France, en Italie et en Suisse. Les conditions d’émergence et de
structuration des prestataires de transport et de logistique ont été variables d’un pays à l’autre ;
ceci a des conséquences sur le profil des prestataires logistiques.
1. De transporteur à prestataire logistique global en France
L’émergence des prestataires logistiques en France durant les années 1980 et 1990 s’est faite en
lien avec le mouvement d’externalisation du stockage-distribution des grands distributeurs et
industriels. Ce processus de changement stratégique dans le secteur est illustré à partir de
l’étude de cas du groupe Norbert Dentressangle (qui est, en France, l’un des modèles de ce
processus de changement), mais également des cas de Easydis, Chronospost international
(enquêtes) de Géodis et Giraud (analyse bibliographique pour ces deux derniers – Annexe).
De transporteur . . .
A sa création en 1955, Norbert Dentressangle n’était qu’une entreprise de transport de produits
fruitiers. En 1979, elle a pris la forme de société. Faisant le constat d'une réglementation moins
contraignante pour les transports internationaux qu’intérieurs, la société fonde sa stratégie de
développement sur le transport l'international : « En 1979, la société Dentressangle est créée sur
l'idée que c'est le transport international qui va être le moteur de son développement. Le
transport international était même encouragé à l'époque puisque entre deux voyages,
l'administration donnait l'autorisation de faire un transport national ; il suffisait d’avoir
l'Autorisation de Transport International d'Encadrement (ATIE) » (citation). Ainsi, les activités
de transport ont été développées sur les liaisons avec la Grande-Bretagne : « de 1979 à 1988,
l'entreprise va connaître une croissance interne très forte, uniquement basée sur le transport
international, entre la France et la Grande-Bretagne mais par extension avec d'autres pays
d'Europe comme l’Espagne, la Belgique et l’Italie. Et on développe cet axe de transport NordSud ». L’international est ici synonyme de trafic européen. En 1988, 75 % du chiffre d’affaires
de Norbert Dentressangle est réalisé à l’international75.
La stratégie de développement du groupe connaît une deuxième évolution à partir de 1988, date
à laquelle est envisagée la déréglementation du marché des transports routiers en France. Il
s’agit d'être présent en France, marché qui a été moins investi pendant la période 1979-1988 :
« Acquérir une vraie dimension européenne, ça veut dire pour nous stratégiquement, finalement
avoir beaucoup plus de poids sur le marché français, qu'on considère comme étant au centre du
marché européen » (citation). La stratégie de conquête du marché français est fondée sur la
75
Artous A., Salini P. « Les transporteurs routiers français dans la compétition internationale » Rapport INRETS
pour la Direction des Transports Terrestres, Décembre 2003 P. 42
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108
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
croissance autant interne qu'externe (fusions-acquisitions) : « entre 1988 et 1993, nous avons
donc acquis entre 25 et 30 sociétés, essentiellement françaises puisque l'objectif, c'était
d'acquérir cette dimension européenne et de renforcer notre présence sur le marché français »
(citation).
. . . à prestataire logistique global
C’est en 1994 que Norbert Dentressangle a décidé de créer le métier de logistique. « Ajouter un
nouveau métier, nous paraît nécessaire, toujours pour accompagner nos clients et rester un
interlocuteur de premier rang. On sait que la logistique va être un point important dans notre
offre. La logistique, c'est le fait d'assurer l'acheminement de marchandises, depuis l'état de
matière première jusqu'à la consommation finale, au meilleur coût et dans le respect de
l'ensemble de la réglementation » (citation). Il s’agit également d’innover, de proposer au client
une organisation logistique globale : « on va amener nos clients à ne plus segmenter leur
approche du transport mais à raisonner au plan global, la Supply Chain Management, en leur
montrant que l'optimisation de l'ensemble, ce n'est pas l'optimisation de chaque chaînon, au
contraire il faut jouer des synergies » (citation). Il s’agit d’un tournant stratégique comme
l’indiquait Jean-Claude Michel, directeur général de Dentressangle « Si nous ne sommes pas
dans une logique de prestataire logistique, on risque à un moment de finir tractionnaire de
professionnels qui auront, eux, cette dimension de service logistique (…) Pour nous, c’est un
choix stratégique »76. D’où une volonté du groupe d’atteindre une taille critique dans ce
marché. Il s’agit « de disposer d’un pôle qui réalise plus du milliards (de francs) de chiffre
d’affaires et qui puisse avoir les moyens de développer une organisation et un management
adaptés.… Passer d’une culture de transporteur à une culture de prestataire logistique n’est pas
évident»77. On remarquera l’importance des investissements (ressources humaines, matériels,
etc.) à réaliser pour devenir prestataire logistique.
Pour opérer ce changement, le groupe Norbert Dentressangle et d’autres entreprises de
transport ont utilisé des moyens et techniques qui sont décrits ci-après.
La cotation en bourse de Norbert Dentressangle, afin d’acquérir une puissance financière
suffisante tout en conservant le caractère familial de l’entreprise : « en 1994, le groupe est
introduit en bourse. Norbert Dentressangle reste l'actionnaire de référence, avec 70 % du
capital ; mais il y aura 30 % de flottant sur le marché » (citation).
Les fusions-acquisitions. En 1997, les responsables du groupe estiment ne pas détenir des
compétences suffisantes en logistique. Ils s'orientent alors vers des rachats, des fusionsacquisitions d'entreprises spécialisées et leaders de logistique afin d’atteindre une « taille
critique » et d’être présent sur de façon significative sur ce marché : « la logistique, même si
c'est un métier de service comme le transport, nous sommes convaincus qu'il s'agit d'un métier
qui répond à des systèmes d'organisation et de management différents du transport. On va
rentrer sur le marché de la logistique par croissance externe ». En 1997, le groupe Norbert
Dentressangle prend le contrôle de Confluent (gestion d’entrepôts) et de UTL (logistique de
distribution). Ces deux sociétés sont intégrées au groupe pour constituer son pôle logistique ; ce
qui permettra au groupe de passer de zéro à l'époque à huit cents millions de francs de chiffre
76
« Entretien avec Jean-Claude Michel, directeur général de Norbert Dentressangle » Logistiques Magazine n°
124, janvier-février 1998.
77
« Entretien avec Jean-Claude Michel, déjà cité, P. 30
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109
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
d'affaire en logistique. En 1999, le groupe prend le contrôle de l’Italien Soluzione Logistica
(logistique du textile-habillement) et de la société Stockalliance (gestion d’entrepôts) en 2002.
Recrutement d’ingénieurs systèmes et investissement dans de nouveaux logiciels. Pour proposer
des solutions logistiques globales, les compétences existantes ne suffisaient plus ; il a fallu
acquérir de nouvelles. Citons à nouveau le directeur général de Dentressangle sur le
positionnement de l’entreprise qui doit disposer d’une offre logistique globale par rapport au
client : il s’agit de lui donner « un avantage compétitif sur ses propres marchés, ce qui va nous
tirer vers avec lui dans son développement. A mon avis, l’erreur serait d’établir des clivages
entre deux populations, celle du transport et celle de la logistique. Chacun dans son expertise et
son métier doit être partie prenante du projet unique qui est la prise en charge du service
logistique du client »78. A partir de 2000, le groupe Dentressangle procède au recrutement des
ingénieurs systèmes : « On a du intégrer une vingtaine d'ingénieurs en systèmes et méthodes.
On a investi dans des nouveaux logiciels d'optimisation et de recherche stratégique, etc. afin de
pouvoir dire à nos clients : donnez-nous vos flux, expliquez- nous comment vous fonctionnez
et on va vous proposer des scénarios pour améliorer la qualité de service auprès de vos clients »
(citation).
Le profil de Norbert Dentressangle a ainsi fortement changé puisque la logistique représentera
40 % de son chiffre d’affaires en 2003. Ce groupe est devenu l’un des premiers transporteurs et
prestataires logistiques actuels notamment grâce à une suite d’anticipations inspirées, comme
les perspectives de du trans-Manche, la valorisation en Bourse, la pérennité du développement
par la formation interne des cadres et du personnel79.
On a observé également dans nos enquêtes, ce même mouvement de restructuration et de
concentration dans le secteur de la messagerie et du transport express avec Chronopost
International (La Poste)80 dans les années 1990. Aujourd'hui, il ne reste plus que trois grands
expressistes en France qui sont en compétition avec quelques grandes entreprises étrangères :
« Sur le marché de l'express, purement franco-français (…) il y a Chronopost, Jet Service,
Extand. On est trois, avec quelques petits encore qui interviennent mais qui sont de taille
beaucoup plus restreinte. Les autres intégrateurs de type DHL, aujourd'hui, n'ont pas de réseau
domestique proprement dit. Donc voilà, c'est trois-quatre maximum, opérateurs qui font de
l'express » (citation).
On a observé également, dans notre enquête, la naissance de Easydis comme opérateur
logistique en juillet 2000; il est issu de la filialisation des activités logistiques du groupe
Rallye-Casino pour proposer des solutions logistiques globales. Même s’il fait actuellement 95
% de son chiffre d’affaires Casino et 5 % avec d’autres clients ; l’un des objectifs d’Easydis est
de développer des clients extérieurs à Casino.
Il ressort de nos analyses bibliographiques (voir en Annexe) que Géodis et Giraud ont
également eu recours principalement aux techniques des fusions-acquisitions pour atteindre une
taille critique et devenir des prestataires logistiques. Créé en 1995 par la SNCF, Géodis a
78
« Entretien avec Jean-Claude Michel, directeur général de Norbert Dentressangle » Logistiques Magazine, janvier-février
1998.
79
Dix ans de prise de participation dans le transport routier de marchandises – marchés, acteurs, stratégies, DAEI – Ministère
des transports, Chiffres & analyses – Les documents de travail du SES, mai 2004, P. 39
80
Créée en 1985 à 66% par la Poste et à 34% par la compagnie aérienne TAT, Chronopost est une société
française de messagerie-express nationale et internationale (documents et petits colis). A l’international, il s’appuie
sur le réseau EMS (Express Mail Service), créé en 1989 par les 21 postes de l’International Post corporation.
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110
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
procédé à la prise de contrôle de Tailleur Industrie en 1996, etc. L’activité logistique a démarré
chez Giraud en 1993. De nombreux rachats ont été effectués par le Groupe Giraud dont Lotra et
Maublanc (1997), Stock Inter Logistique (1998), TBM Logistique (1998), Chalange
Logistique (1998), Durousseaud (1999).
A la suite de Antoine Artous, on peut affirmer que « En France, la présence de Géodis, Norbert
Dentressangle, Giraud, Stef-TFE, Gefco, Daher dans le peloton de tête montre que les groupes
de transport se sont clairement tournés ver la logistique qui est devenu un métier à part
entière »81. En 2000, selon le Top 100 de Logistiques Magazine82, neuf prestataires logistiques
contrôlent 45% du marché de la logistique: Géodis, Hays Logistique, FM Logistics, Easydis,
Stef-TFE, Norbert Dentressangle, Gefco, SDV, Daher et Giraud Logistics.
Le secteur du transport de marchandises et de la logistique en France comprend actuellement
trois catégories d’entreprises (Annexe 2):
- les entreprises de pur transport (taille moyenne et artisans) ;
- les prestataires logistiques de type « Third Part Logistics Providers (3 PL)» ;
- les prestataires logistiques de type « Fourth Part Logistics Providers (4 PL) » .
Les principaux prestataires logistiques français comme Géodis, Giraud, Norbert Dentressangle,
etc. correspondent davantage à des 3PL ; mais elles progressent toutes vers le type 4PL
(Figure 18).
Figure 18 - Offre de services logistiques pour compte d'autrui
+
4PL
Chargeurs
Destinataires
3PL
Entreprises de transport
de marchandises
-
Principaux enseignements
Le secteur du transport de marchandises et de la logistique a commencé à se restructurer
dans la seconde moitié des années 1980. Mais c’est durant la seconde moitié des années 1990
qu’émergent les grands groupes français de prestataires logistiques.
La constitution de ces groupes a été réalisée principalement par des rachats et des fusions
ou acquisitions d’entreprises françaises et étrangères.
81
Les études du SES « Les prestataires logistiques en France et en Europe », N° 145 Octobre 2003, étude réalisée par Antoine
Artous en collaboration avec Isabelle Leroy-Dutilleul, P.27
82
Antoine Artous « Prestataires : une concentration qui se poursuit », Logistiques Magazine n° 124 décembre
2001.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. De transporteur à prestataire logistique en Suisse
Les enquêtes menées auprès de trois entreprises ont montré que les entreprises de transport de
marchandises ont connu un changement de stratégie important à partir du milieu des années 90.
Ces sociétés ont décidé à partir de ce moment, de proposer une gamme de services plus large à
leurs clients. Les exemples des trois entreprises interrogées permettent de bien comprendre
l’évolution dans le secteur en Suisse.
De transporteur . . .
Jusqu’au milieu des années 1990, le transport représentait le cœur de l’activité de BTL
Logistics. En 1994, les prestations d'entreposage et de conditionnement représentaient 20 % du
chiffre d’affaires et le transport 80 %.
Sauvin-Schmidt réalisait, pour sa part, environ 60% à 70% de son chiffre d’affaires dans le
transport, jusqu’au début des années 2000. Bien que déjà très actif également dans les
transports spéciaux, le transport et le groupage routier représentaient la plus grosse part de ses
prestations.
Historiquement La Poste est l’opérateur postal de la Suisse. Il a de tout temps été actif dans le
domaine du transport des lettres et des colis.
. . . à prestataire logistique
En 2003, la part transport et les prestations logistiques (entreposage et conditionnement) dans le
chiffre d’affaires de BTL Logistics était passée respectivement à 40% et 60%. A partir des
années 1990, l’entreprise a commencé à proposer d’autres services que le transport à ses
clients. Cette nouvelle orientation s'est traduite notamment par le rachat en 1994 d'une filiale de
Henkel et de BLM, une société créée par d'anciens employés. Un de leurs clients importants
souhaitait se développer en Suisse. Une série d'opérations devait être effectuée afin de
conformer les produits de la marque allemande au marché suisse (notamment par le rajout
d'une notice en français et en italien dans les emballages). L'offre de BTL s'est développée par
ces premières prestations supplémentaires. Leur client principal, Bosch-Siemens leur a confié,
par la suite, les opérations de mise en conformité de leur appareil au marché suisse
(changement de prise, programme de fonctionnement, etc.). Pour des entreprises de la taille de
Bosch-Siemens et IBM, par exemple, en regard des relatifs faibles volumes en jeu, il est
intéressant d'externaliser les opérations d'adaptation au marché suisse. Le site d'Urdorf (Zürich)
a notamment été racheté à Swisscom dans l'optique de satisfaire les demandes de BoschSiemens, leur principal client.
Sauvin-Schmidt ne réalise plus que 50% de son chiffre d’affaires dans le transport. Ce chiffre
continue de diminuer. L'entreprise s’est concentrée sur les secteurs tels que la gestion de stock,
les convois exceptionnels, la manutention de grosses pièces (l'entreprise possède un nombre
important de camions-grues) mais aussi dans le domaine de la distribution sur des courtes
distances contenant une part de savoir-faire. C'est-à-dire la distribution à partir ou vers
l'aéroport (résolution des problèmes de normes, de douane, etc.) et aussi des produits
dangereux. En un mot l'entreprise ne souhaite pas traiter de gros volumes mais se concentrer là
où son savoir-faire est valorisé. Ainsi dans toutes les activités développées chez SauvinSchmidt, la part du transport pur est minime aux regards des autres coûts (humains surtout). Un
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
des faits marquants de cette nouvelle politique peut être reconnu dans la vente du secteur du
groupage routier à l'entreprise Planzer en 2003. Cette vente traduit la volonté de l'entreprise de
se concentrer sur les services à valeur ajoutée.
L’apparition de concurrent tels que DHL, La Poste française ou Fedex en même temps que le
changement de statut de La Poste a poussé les responsables de l’entreprise à chercher de
nouvelles pistes profitables. Depuis quelques années, la Poste propose des solutions globales à
ses clients. Cette politique s'est matérialisée en 1997 par le rachat de Setz SA et en 2003 de
BTL SA, ces deux entreprises étant actives dans ce domaine.
La décision de réorienter la stratégie de l’entreprise vers l’offre de solution logistique globale, a
nécessité pour celles-ci l’acquisition d’un savoir-faire et de l’infrastructure nécessaire. BTL
Logistics a, par exemple, acquis une petite entreprise déjà active dans le domaine et a ensuite
acheté des locaux lui permettant de traiter et d’entreposer des marchandises. La Poste a acheté
successivement une série d’entreprises dont Setz et BTL Logistics. Le changement de stratégie
s’est aussi traduit pour Sauvin-Schmidt par la vente de leur secteur de transport pur (vente du
secteur de groupage routier en 2003).
Principaux enseignements
C’est durant les années 1990 que l’on a observé l’émergence des prestataires logistiques.
Comme en France, les entreprises de transport ont procédé à des rachats, fusionsacquisitions pour se concentrer et se transformer en prestataires logistiques
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. De transporteur à prestataire logistique en Italie
Les résultats des enquêtes menées suggèrent qu'en Italie – dans le secteur de la logistique et du
transport de marchandises – le principal changement logistique concerne le passage de
l'opérateur traditionnel à l'intégrateur logistique, parfois par fusions - acquisitions entre
entreprises italiennes destinées à soutenir, avec une plus grande taille, la concurrence des
grands opérateurs étrangers, et souvent par acquisitions d’entreprises italiennes par des groupes
étrangers.
De transporteur . . .
Quatre des cinq entreprises interrogées sont nées comme des entreprises individuelles de
transport pour compte des tiers (opérant notamment dans le transport routier) dès la fin du XIX
– début XX siècle. Jusque dans les années 1990, le secteur des transports en Italie est
caractérisé par la fragmentation et l’atomisation du marché.
Cette évolution suit les tendances du tissu industriel italien, caractérisé principalement par une
forte présence des petites et moyennes entreprises (PME). Au cours des années 1980 et jusqu’à
la moitié des années 1990, les PME ont traversé une période de croissance, qui a d’ailleurs
permis à l’Italie de se reprendre de la crise de la grande industrie notamment d’Etat, et a
dessiné une nouvelle géographie économique, portant davantage sur le « districts industriels »
du Nord-Est et de l’Est et beaucoup moins sur le Nord-Ouest du « triangle industriel » MilanTurin-Gênes. Cependant, avec l’ouverture des marchés et la mondialisation de l’économie, la
compétitivité des PME et du modèle même des « districts industriels » s’est réduite. Celles-ci,
en effet, n’apparaissent plus adéquates dans un contexte de forte concurrence à l’échelle
mondiale, à cause notamment de leur fragilité financière, du développement technologique
assez limité, d’une relativement faible présence internationale (sauf pour un petit nombre de
biens de consommations, notamment dans le haut de gamme) et d’une organisation insuffisante
à soutenir la compétition avec les grands sujets étrangers.
Dans le domaine des transports, comme indiqué plus haut, on retrouve plusieurs des
caractéristiques de l’entreprise italienne, et c’est surtout l’aspect de la fragmentation et
atomisation du marché qui est le plus frappant. Comme le montrent les tableaux 21 et 22, cette
fragmentation est plus forte en 1981 qu’en 1991 ; et c’est justement dans le transport routier de
marchandises qu’elle atteint son maximum avec 97.1% d’entreprises avec moins de 10
employés en 1981 et 96.3% en 1991. En plus, face à une diminution du total des entreprises de
transport (qui pourrait faire penser à une externalisation des structures de production et de
distribution avec une réduction des besoins de déplacements), on enregistre un pourcentage
croissant des unités locales de transport routier de marchandises sur le total (on passe de 55%
en 1981 à 68% en 1991), une donnée qui confirme avant tout la prédominance au niveau
national du transport routier.
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Tableau n° 21 : Unités locales et employés du secteur des transports et du magasinage.
1-9
EMPLOYES
50-99
>100
1981
1991
1981
1991
1981
1991
Sans
Total
employés83
1981
1991 1981
1991
138 231 121 929 6 928
8 018
857
869
831
868
28 326
59 218
398 380 299 087 -
1981
10-49
1991
Entreprises
Employés
229 911 224 593 134 011 156 508 58 952
481
175 173 132.165
-
821 254 739 406
Source: 6éme et 7éme Recensements Généraux de l’Industrie et des Services (1981 et 1991 respectivement) - Istat
1981, 1991
Tableau n° 22 : Unités locales et employés pour la section “transport routier de marchandises
1-9
EMPLOYES
50-99
100-499
10-49
1981
1991
1981
Entreprises
94 089
86 632
Employés
141 611 146 797 43 324
2 327
1991
1981
1991
1981
Sans
employés
1991 1981 1991
Total
1981
1991
3 044
143
160
65
50
223
86
96 847
89 972
55 029
9 660
10 789
10 293
7 542
-
-
204 888 220 157
Source: 6éme et 7éme Recensements Généraux de l’Industrie et des Services (1981 et 1991 respectivement) - Istat
1981, 1991
Or, même si l’on reconnaît l’importance de ces micro entreprises en termes de dynamisme,
flexibilité et capacité à répondre et à s’adapter à un marché en évolution, c’est un fait que les
petites entreprises italiennes et la carence des grands groupes industriels constituent une
anomalie par rapport au contexte européen84. Et cette fragmentation comporte également des
problèmes, principalement à cause du retard dans l’introduction des innovations. Ceci est dû
principalement à une plus lente diffusion et expansion de la connaissance et du savoir-faire, à la
faiblesse des capacités et disponibilités financières et à plus de difficultés par rapport au
processus d’internationalisation.
83
Le chiffre relatif aux entreprises locales sans employés nécessite quelques précisions. Tout d’abord, l’Istat
définit comme entreprises locale sans employés « les entreprises temporairement inactives à la date du
recensement et celles dont les employés effectuent surtout leur activité dans d’autres filiales de la même entreprise
(locaux affectés à des activités saisonnières, ou en cours de restructuration à la date du Recensement…) ». Le
recensement de 1981 comprend toutes les entreprises de toute taille ; alors que celui de 1991 a utilisé un
échantillon constitué d’entreprises de services de 6 employés ou plus. La quasi totalité des 28.326 entreprises sans
employés relevées en 1981 est constituée par des « entrepôts de consigne et dépôts et frigos ». Du fait de cette
différence d’échantillonnage entre les deux Recensements, il y a évidemment une sous-estimation de la situation
réelle en 1991 par rapport à celle de 1981.
84
Plus précisément, l’extrême fragmentation du système industriel et de production voit en Italie une présence de
petites et moyennes entreprises (moins de 50 employés) telle qu’elle couvre, à la moitié des années 90, plus de
55% du marché de l’emploi, alors que la moyenne de l’Union Européenne est de 33%. (Source : ISTAT,
Recensement intermédiaire de l’industrie, 1996).
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115
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
. . . à prestataire logistique
A partir des années 1990, on remarque un lent, mais réel processus de transformation des
opérateurs traditionnels en prestataires logistiques. Les moyens et techniques utilisés par les
entreprises pour opérer ce changement sont de trois types d’opérations :
-
Fusions - acquisitions (et parfois joint venture) entre entreprises italiennes pour atteindre
une taille plus importante et exploiter leurs potentialités en créant de la valeur ajoutée pour
devenir des prestataires logistiques. Par exemple, « la tournant logistique d’Arcese a lieu
entre 1990 et 1994 suite à l’achat de Ventana Cargo (auparavant propriété du Groupe Fiat)
et à la joint-venture avec le Groupe Mercurio (important opérateur dans le secteur du
transport de voitures) ; il a ainsi commencé à offrir divers services apportant une valeur
ajoutée à la marchandise» (citation). On observe aussi que la fusion de Saima avec
Avandero « a permis d’unir le savoir-faire qu’ils avaient acquis dans différents domaines en
créant une valeur ajoutée logistique pour leurs clients respectifs et en transformant ainsi
Saima Avandero en un opérateur multimodal » (citation).
Fig. 19 - Le repositionnement stratégique des opérateurs
N° filières traitées
N° service offert
Opérateurs
traditionnels
26%
4%
Intégrateurs
logistiques
4%
Opérateurs
de filière
Intégrateurs
de filière
43%
Source : Politechnico di Milano – DIAP, 2003
Comme indiqué plus haut (chapitre II, IV, 2), les principaux opérateurs du secteur sont : les
transporteurs traditionnels, les opérateurs de filière, les prestataires logistiques de filières. La
Figure 19 montre que les principaux changements sont en direction horizontale, à travers
l’élargissement des services offerts.
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116
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
-
Acquisitions d’entreprises italiennes par des groupes étrangers, qui de cette façon
poursuivent leur processus d’internationalisation. Par ailleurs, ces opérations permettent
aux entreprises italiennes (notamment de simple transport) de pénétrer le marché
international et surtout d’acquérir les compétences nécessaires pour se transformer en
intégrateurs logistiques. On peut citer l’exemple de l’acquisition de Zust par Geodis en
2001 « avec laquelle on a pu avoir un véritable changement culturel durant la dernière
décennie du siècle: Zust, même si elle est née comme entreprise de transport international, a
toujours eu un caractère patronal, tandis que l’influence de Geodis lui fournit les principes
pour devenir multinationale » (Citation).
Cas de l’acquisition de Züst Ambrosetti par Géodis
La société Züst Ambrosetti est fondée en 1906 à Turin. Pendant toutes les années 70 et 80,
l’organisation de l’entreprise en termes de structures comme en termes de personnel
reste inchangée.
Les premiers signes de changement commencent en 1987 lorsque Géodis entre dans le
capital social de Züst par échange d’actions.
Au cours des années 90, on a assisté à un bouleversement progressif de l’organisation
logistique de Züst. Déjà avant l’acquisition par Géodis, il existait chez Züst une division
logistique.
L’année 1998 est l’année où Géodis a obtenu le contrat de sous-traitance de toute
l’activité logistique d’IBM pour toute l’Europe occidentale, à savoir l’Italie, la France,
l’Espagne, l’Allemagne. Cette année-là naît donc une nouvelle réalité qui est Geodis
Logistics, chargée de la gestion de la logistique d’IBM en Italie ; d’où partira ensuite le
développement de l’entreprise dans le secteur de la logistique :
- dès le 1er janvier 2001 Géodis achète 100% du capital de Züst ;
- et à la fin de 2001, la société Züst est intégrée dans le groupe Géodis.
Zust, même si elle est née comme entreprise de transport international, a toujours eu un
caractère patronal, et l’intégration dans le groupe Géodis lui permet de devenir un
prestataire logistique multinationale.
Source : Enquête
-
Création d’installations logistiques et internalisation de phases du processus de transport
afin d’offrir des services accessoires (exemple : la gestion des commandes, du magasin, le
contrôle de qualité, etc.) « pour fidéliser les clients, dans un but de transformation,
initialement, en coursier express » (citation).
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117
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Les analyses de Sergio Bologna85 suggèrent également de considérer les trois périodes ci-après
dans l’évolution structurelle des entreprises de transport et de logistique en Italie.
Pendant la première période, la structure de la messagerie national était assez forte pour
contrôler les flux des produits en trafic national et en trafic d’exportation. Les réseaux mis en
place par les corrieri nazionali (messageries) assuraient une couverture presque totale du
territoire. Ils étaient les maîtres du trafic national et à partir de cette position de force ils
pouvaient bloquer l’invasion étrangères. Les grandes compagnies étrangères utilisaient même
ces corrieri86 soit pour la distribution sur le territoire italien, soit souvent pour des opérations à
l’étranger.
La deuxième période correspond à l’entrée sur le marché italien des intégrateurs87 américains
(DHL, UPS, Federal express) et australien (TNT) qui ont commencé à gérer les services
postaux, les petits colis, les services rapides pour une clientèle non industrielle (banques,
Ministères, Universités, etc.) en faisant appel non pas à des sous-traitants utilisant de grands
véhicules lourds mais à des « louageurs » qui utilisent des véhicules de 3,5 tonnes. Un
deuxième marché s’est ainsi installé en Italie, celui des « louageurs » au service des grands
intégrateurs ; et ceci a mis à l’écart les messageries traditionnelles avec leurs flottes de
véhicules et leur système d’entrepôts. Peu à peu les intégrateurs ont commencé à remplacer les
messageries traditionnelles auprès de la clientèle des PMI et de la grande industrie. Une fois
perdu le marché des PMI et des entreprises manufacturières et de distribution, les messageries qui étaient le hard core du transport de marchandises par route en Italie – ont fini par déposer
leurs bilans ou se vendre aux grands groupes étrangers.
La troisième période est celle des acquisitions des entreprises italiennes par des opérateurs
logistiques ou des grandes groupes étrangers (Deutsche Post, ABX, Géodis, etc.) et de l’entrée
sur le marché italien des spécialistes de la logistique de distribution (Fiege, Exel, Salvesen,
etc.).
Aujourd’hui le nombre d’entreprises italiennes, de taille moyenne, qui existent et résistent sur
le marché italien est très réduit : Arcese et Bertani dans le secteur automobile grâce à Fiat,
Automarocchi et Spielli dans le transport routier de conteneurs, Figioli pour les transports
exceptionnels, Artoni pour la messagerie fine, Savino del Bene pour les Etats Unis, Rasimelli e
Coleti pour le transport combiné, Numéro 1 de Barilla. On observe qu’il s’agit en général
d’opérateurs de filières qui travaillent souvent en sous-traitance.
En revanche, si on prend la liste des entreprises les plus importantes, selon leurs chiffres
d’affaires, au début des années 1990, comme Züst Ambrosetti, Saima Avandero, Domenichelli,
on ne trouve pas une seule qui soit encore à capital national. Elles sont entrées dans la galaxie
Géodis ou ABX ou Deutsche Post ; elles ont été rachetées par TNT ou par Fiege ou bien elles
ont déposé le bilan (comme Domenichelli).
Les prévisions des stratégies de réorganisation dans le secteur (Figure 20) confirment les
tendances décrites pour le passage de transporteur à prestataire logistique.
85
P. Salini avec A. Artous, S. Bologna et Alii « Le « Taux de pavillon » : visions européennes » Rapport
INTRETS pour le MELT –Direction des Transports Terrestres, 24 septembre 2002, P. 23 et suivants.
86
Il ne s’agit pas d’entreprises de « courriers » ni de course.
87
L’appellation ‘intégrateur’ tient au fait que dans l’express international, les intégrateurs s’appuient sur des
réseaux et des moyens de transport (avion) intégrés. Mais au-delà de ce point commun, les différences sont
importantes, en ce qui concerne le profil de leur stratégie d’implantation en Europe.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Figure 20 - Stratégies de réorganisation sociétaire
Changements
prévus
39%
Participations
dans autres sociétés
logistiques
25%
Nombre de
changements
61%
Réorganisation
intérieurs/alliances
14%
Source : Politechnico di Milano – DIAP, 2003
La situation générale de l’Italie est bien représentée par la Figure 21, qui montre d’une part la
dynamique assez importante (ligne jaune) pour les acquisitions d’entreprises italiennes par des
groupes étrangers, et d’autre part le grand nombre de fusions-acquisitions internes à l’Italie
(ligne bleue) dont le but est d’obtenir un double effet sur les coûts et les prix : la réduction des
coûts moyens de production grâce aux économies d’échelle ; les faibles pressions des prix vers
le bas en fournissant des marges économiques plus satisfaisantes aux clients.
Figure 21 : opérations fusions-acquisitions dans l’industrie de la logistique
Source: F. BOSCACCI, E. MAGGI « Ruolo e definizione dell’industria della logistica nel sistema economico
italiano ed europeo: Ipotesi di aggiornamento delle classificazioni statistiche » - AISRE 2002
Toutefois, aujourd’hui encore, le transport routier de marchandises présente un degré très élevé
d’atomisation : il y a environ 187 000 entreprises avec plus de 360 000 véhicules ; elles sont de
petite taille dans la mesure où 70% des entreprises ont moins de trois véhicules, dont une très
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
grande partie de « padroncini » ou « petits-patrons » c’est à dire de chauffeurs propriétaires
uniquement du véhicule qu’ils conduisent88.
Principaux enseignements
Durant les années 1990 on constate un réel processus de transformation des opérateurs
traditionnels en prestataires logistiques. Ce changement se fait parfois par fusionsacquisitions entre entreprises italiennes, mais très souvent par acquisitions d’entreprises
italiennes par des groupes étrangers (Deutsche Post, ABX, Géodis, Exel, etc.).
Les groupes étrangers contrôlent actuellement les principaux opérateurs italiens. En
comparaison de la France, on ne trouve plus en Italie un seul prestataire logistique
important à capital national. Les prestataires logistiques italiens existants sont de taille
moyenne et correspondent souvent à des ‘opérateurs de filières’. Les marchés du transport
routier de marchandises reste caractérisé, cependant, par un degré élevé d’atomisation.
88
Centrale dei Bilanci – Progetto SIRC Analisi di Settore (aprile 2004)
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
III. Les tendances majeures des prestataires logistiques
On tente de répondre à la question suivante : Quelles sont les tendances significatives qui
caractérisent l’évolution des entreprises de transport et de logistique ? Les résultats des
enquêtes mettent en évidence trois tendances :
- la restructuration et la concentration ;
- l’élargissement du transport aux services logistiques ;
- l’élargissement de la couverture géographique.
1. La recherche d’une taille critique et tendance à la concentration
La tendance à la concentration des entreprises de transport et de logistique, observée dans les
enquêtes, est surtout le produit du mouvement de restructuration du secteur et de ses effets sur
la logistique. La concentration au niveau de l’entreprise de transport correspond à la recherche
d’une taille critique sur le marché de transport. La taille des opérateurs s’est fortement accrue
grâce aux opérations de fusions-acquisitions.
Le secteur de transport de marchandise de lot, est peu concentré contrairement à la grande
distribution. Les quatre principaux acteurs (Giraud, Norbert Dentressangle, Géodis BM et
Transalliance) contrôlent seulement autour de 7% du marché du lot89. Il s’agit donc où on
trouve de nombreux transporteurs artisans et peu de grands groupes. En revanche le secteur de
la messagerie a un haut degré de concentration.
Depuis 2000 on observe une forte tendance à la concentration du secteur de la logistique. Selon
le Top 100 de Logistiques Magazines de 2000, les neufs premiers prestataires représentent 45%
du marché de la logistique. La concentration est moins importante que dans le marché du
transport de la messagerie et de l’express où la Poste et Géodis contrôlent à eux seuls près de
50% du marché français90.
2. L’élargissement du champ des services offerts
La deuxième tendance que l’on peut tirer des enquêtes porte sur l’extension des prestations
proposées des entreprises à leurs clients. L’offre des prestataires est passée des activités
classiques (entreposage et transport) pour intégrer d’une part les services à valeur ajoutée
touchant à l’emballage (constitution de lots, opérations promotionnelles, étiquetage,
remplissage de box et de présentoirs), au conditionnement du produit ou au retraitement du
produit lui-même pour adapter le produit au marché final, etc., et d’autre part à la gestion des
stocks, des informations.
Afin de répondre à la question de l’optimisation du Supply Chain Management de leurs clients,
les prestataires logistiques se sont orientés aussi vers une politique d’offre logistique globale ;
ils cherchent à se positionner, non plus sur un maillon de la chaîne logistique, mais comme
opérateur global, capable de prendre en charge l’organisation de l’ensemble des maillons afin
de mettre en œuvre une politique d’optimisation des flux.
89
P. Salini et Alii « Le « Taux de pavillon » : visions européennes », Rapport INRETS pour la Direction des
Transports Terrestres, Arcueil ? D2CEMBRE 2002 P. 24
90
A. Artous « dossier sur la messagerie et l’express » Logistique Magazine, Septembre 2001.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. L’élargissement de la couverture géographique.
Du fait de la mondialisation des échanges et les fusions-acquisitions de ces dernières années,
nous sommes passés d’une logistique locale-régionale (années 1950-1960) à une logistique
nationale (années 1970-1980) pour parler davantage aujourd’hui de logistique européenne et
internationale depuis le début des années quatre-vingt-dix91. La présence d’implantations dans
un nombre croissant de pays (ou des accords de partenariats) permet aux prestataires
logistiques de proposer à leurs clients un service aux différents niveaux d’échelle géographique
(régional, national, européen ou mondial). Ceci permet aux distributeurs et aux industriels de se
recentrer sur leur « cœur de métier » et avoir un seul interlocuteur pour les activités logistiques.
La mondialisation accroît la demande pour des solutions logistiques globales.
91
Jacques COLIN « La polarisation des espaces logistiques européennes » Recherche réalisée dans le cadre du Club
EUROTRANS – Synthèse- septembre 1994.
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
IV. Influence des politiques publiques
Le présent paragraphe tente de répondre aux questions suivantes : Quels facteurs, dépendant du
contexte des politiques publiques, ont influé sur les changements stratégiques des entreprises
prestataires de transport de marchandises et de logistique ? Quels sont les mécanismes
d’influence ?
1. En FRANCE
De toutes les activités économiques, le secteur des transports des marchandises est celui où
l’intervention des pouvoirs publics est la plus anciennement établie, la plus multiforme et peutêtre la plus directive. Outre les réglementations (droit du travail, fiscalité, etc.) qui s’appliquent
à toutes les entreprises, l’activité du secteur est soumise à une réglementation de droit public.
Les transports de marchandises sont donc restés enfermés dans un carcan réglementaire très
pesant jusqu’au moment où pendant les années 1980, les politiques publiques ont commencé à
les déréglementer.
La réglementation du marché des transports de marchandises
Le dispositif législatif du marché des transports routiers de marchandises des années 1970 et
1980, était très contraignant (cf. Chapitre III) ; de ce fait, il a été un des facteurs importants qui
amena Norbert Dentressangle à accorder la priorité au transport international pour son
développement, au dépend du transport intérieur : « à l'époque, le transport national était
extrêmement réglementé. Le poids de l'Etat était extrêmement fort puisqu'il fallait disposer
d'une licence par véhicule pour exercer le métier de transporteur en France et il fallait une
autorisation de transport ensuite pour faire du transport entre Lille et Marseille par exemple. Et
quand Norbert Dentressangle se lance dans les affaires, il voit bien que cette réglementation
annihilait tout espoir de développement des entreprises » (citation). Au début des années 1980,
en effet, «réglementairement, le contingentement doublé de la tarification routière obligatoire
(TRO) ont conduit d’une part à protéger le marché intérieur et, à pousser les entreprises vers
l’international, certes moins rémunérateur, mais qui permettait d’obtenir des ‘autorisations de
transport intérieur d’encadrement’ couvrant du transport intérieur sans qu’il ne soit nécessaire
de disposer d’une licence (dont le coût d’achat ou pseudo-location était prohibitif)….Tant qu’il
a existé, le système contingentaire a été un obstacle à la croissance interne des entreprises
lotières, puisqu’elles devaient acquérir ou louer des fonds de commerce routiers pour
augmenter leur niveau d’activité »92.
La déréglementation du marché des transports de marchandises
La déréglementation du marché des transports intérieurs, à partir de 1988, fut l’un des facteurs
décisifs de la décision stratégique de Dentressangle de reconquérir le marché français : « Entre
1988 et 1993, on s'intéresse d'autant plus au marché français, que 1988, c'est la perspective
européenne mais c'est surtout la dérégulation du marché. C'est-à-dire que les autorisations, les
licences, etc. disparaissent. Donc pour nous, ça a un sens de s'intéresser à un marché qui va
devenir "normal" », c’est à dire concurrentiel. (citation).
92
Artous A., Salini P. déjà cité, P. 41et 42
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123
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
La déréglementation des transports en France et en Europe a rendu la concurrence très vive
dans le secteur ; ceci a eu pour effet, durant la seconde moitié des années 1980, d’accélérer la
restructuration dans le secteur et la constitution de grands groupes de transport français comme
Giraud ou Norbert Dentressangle. « La fermeture des bureaux de fret (début des années 80)
constitue une rupture importante et le moment d'une nouvelle façon de travailler. Les rachats,
les regroupements et l'apparition des grands groupes de transport se situent dans ces années 80.
Ce processus n'a jamais cessé » (citation).
La politique de déréglementation change profondément les conditions de construction d’un
secteur façonné par la période réglementaire. Les entreprises de transport ont réagi aussi en
développant la sous-traitance, « laissant à de petites entreprises (le plus souvent le seul patronchauffeur), le soin de rentabiliser des opérations de transport qu’il était difficile d’effectuer au
niveau de prix du marché en respectant intégralement la réglementation sur les temps de
conduite par exemple »93. Selon A. Artous et P. Salini94, le compte d’autrui progresse de 50%
de 1985 à 1995. Cette explosion s’accompagne d’une forte création de petites entreprises
(environ 9 000) sous-capitalisées et fonctionnant en qualité de sous-traitant. Ceci renforce le
phénomène de tractionnariat, et comme le fait remarquer M. Bernadet « du schéma qui veut
que ce soient les entreprises marginales qui sont éliminées, ce processus concoure au contraire
à l’apparition d’entreprises marginales, sans possibilité de développement»95.
Le Contrat de Progrès
Le premier effet de cette réglementation, énoncé par les entreprises de transport et de
logistique, concerne l’amélioration des conditions de travail (limitation du temps de conduite)
et de sécurité des conducteurs routiers. Ceux-ci sont devenus des salariés comme les autres :
« Les chauffeurs (grands routiers) étaient à 340 heures par mois, c’était complètement en
désaccord avec le code du travail ; et aujourd’hui ils arrivent à des horaires mensuels moindres
(200 heures / mois) » (citation). Le Contrat de progrès a introduit dans le secteur une rupture
fondamentale dans la gestion du temps des chauffeurs.
La répercussion sur les chargeurs des hausses tarifaires, résultant de l’application du Contrat de
Progrès, étant souvent difficile et longue, le deuxième effet direct de cette mesure a été une
augmentation des coûts pour les entreprises de transport. Il « accélère la prise en compte du
temps de travail comme facteur clé d’exploitation »96. Ce renchérissement des coûts a poussé la
plupart les transporteurs à mettre en place des réorganisations des transports (lignes, relais,
doubles-équipages, etc.) afin de supporter une partie des surcoûts. Le Contrat de Progrès
renforce ainsi le processus d’industrialisation d’une couche d’entreprises (groupes et PME)
dans lequel elles étaient engagées : utilisation au maximum des véhicules poussant à la
dissociation du couple camion/conducteur, optimisation des plans de transport, etc. Les
éléments ci-après permettent d’illustrer ce processus.
93
M. Violland «La déréglementation des transports routiers de marchandises : l’expérience française », LET Etudes et Recherches, novembre 1985.
94
A. Artous, P. Salini, op cité p.43
95
Maurice Bernadet « CEMT - La réforme des réglementations dans le transport routier de marchandise » Actes
de la Conférence Internationale, février 2001, P. 51
96
A. Artous, P. Salini, op cité p.23
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
« Certaines tournées ont été modifiées (lignes régulières, relais, recours ponctuel au double
équipage, etc.). Il s'agit de faire autant avec moins d'heures pour que les clients conservent la
même qualité de services. Les responsables (…) modifient les semaines de travail des
conducteurs : certains travaillent du mardi au samedi inclus (temps de travail et voyages à
l'étranger) alors qu'ils exerçaient jusqu'alors du lundi au vendredi inclus » (citation).
La rigidité des mesures publiques (pas de lissage des heures dans tous les départements)
concernant le temps de travail a été également évoquée : « Prenons l'exemple du mois de mars
ayant 23 jours ouvrables ; les conducteurs arrivent rapidement au maximum des heures
travaillées autorisées (20 jours). L'entreprise est donc obligée de recourir à l'intérim et de payer
les chauffeurs titulaires pour rester chez eux » (citation).
L’influence du Contrat de Progrès a été la réduction du temps de travail en général dans les
entreprises de transport. « Avec la mise en place du Contrat de Progrès à partir de 1995, il était
effectivement bien clair qu'on devait réduire les temps de service de manière générale »
(citation).
Jusqu'au début des années 1990, Chronopost International recourait au double équipage. Dans
le cadre du contrat de progrès, le paiement de toutes les heures de travail a été décidé. Jugé très
onéreux, le double équipage a été supprimé : « le double équipage (deux chauffeurs) coûte deux
fois plus cher. Avant, on payait juste le chauffeur qui conduisait, le second qui ne conduisait
pas était payé à moitié de son temps ; maintenant il faut payer le plein temps. Cette mesure
grève énormément les coûts de fonctionnement des transporteurs » (citations).
Du fait de la concurrence de plus en plus vive sur le marché et des coûts devenus très élevés, le
troisième effet du Contrat de Progrès a accéléré les fusions-acquisitions parmi les entreprises
du secteur et l’émergence des prestataires logistiques dans la deuxième moitié des années 1990.
Mais on a observé aussi, sur la même période, un fort mouvement de création de nombreuses
entreprises de transport contrairement aux prévisions de certains groupes de transport comme
Giraud : « dans l’évolution du transport, le Contrat de Progrès ne changera rien à la stratégie
des entreprises (les grandes). Si les chargeurs n’acceptent pas les hausses tarifaires obligatoires,
il en résultera que les plus petits disparaîtront purement et simplement »97 ; mais pour l’avenir
«je crois que le phénomène de concentration va se poursuivre, et dans le cadre de ces
regroupements, d’autres grands acteurs vont émerger »98. On peut caractériser en effet cette
évolution subséquente des transports routiers de marchandises à partir de quelques chiffres :
« d’octobre 1994 à octobre 1996, plus de 10 000 entreprises de transport routier de marchandise
ont été créées en France, soit une augmentation de 30% du nombre d’entreprises en deux ans.
L’indice des créations d’entreprise atteint le niveau 80 à la fin 1996 par rapport au niveau 100
début 1995. En fait, 25% des entreprises disparaissaient avant leur deuxième d’existence »99. Il
semble ainsi que le secteur se caractérise par l’importance des entreprises individuelles, mal
rémunérées, et dont le nombre est en expansion continue.
97
Guillaume J. P. « Entretien avec Dominique Provost, Directeur général de GEFCO » Logistiques Magazine n° 104
Janvier/février 1996, P. 87
98
Guillaume J. P. « Entretien avec Michel Giraud, PDG de Transports Giraud» Logistiques Magazine n° 104 Janvier/février
1996, P. 90
99
Maurice Bernadet « CEMT - La réforme des réglementations dans le transport routier de marchandise » Actes
de la Conférence Internationale, février 2001, P. 52
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Les hausses successives du prix du carburant (gazole)
Les hausses successives du gasoil, qui résultent des choix de politiques publiques, ne sont pas
automatiquement répercutées par les transporteurs sur les clients qui ne l’acceptent pas très
souvent. Il en résulte des réorganisations des transports, des restructurations et des
concentrations. « En 1999, les transporteurs avaient attendu plus de sept mois avant de
répercuter les hausses de carburant sur leurs prix de transport. La concurrence au sein du
secteur et les pressions des chargeurs expliquent ce délai ; puisqu'il n'était pas rare que les
transporteurs ayant augmenté leurs tarifs perdent des marchés. En 2003, les professionnels du
transport ont réagi à la nouvelle hausse du gasoil. Beaucoup ont cette fois expliqué
immédiatement la situation à leurs clients et évoqué une probable augmentation de leurs tarifs.
Si certains chargeurs ont compris voire accepté cette hausse, la plupart ont exercé les mêmes
pressions et menaces de cessation (non-renouvellement) de contrats » (citation).
La politique environnementale
Des enquêtes, il ressort que les entreprises de transport et de logistique s'inscrivent dans des
réflexions sur le respect de l'environnement. Les principales pratiques adoptées sont celles à
moins consommer de carburant. Le choix du mode dépend très souvent du client.
« On est forcément sur la recherche de solutions qui consomment moins de ressources. (…) si
pour un client, c'est plus intéressant de faire une traction ferroviaire entre un pays et un autre et
après reprendre les camions etc., on le fait naturellement » (citation)
Durant les quarante dernières années, on n’a pas observé d’influence directe et significative
des politiques publiques sur ce processus de changement stratégique du passage de
transporteur de marchandises à prestataire de logistique.
Néanmoins on a détecté des politiques publiques ayant influé, de manière indirecte, sur les
restructurations des entreprises du secteur et sur l’émergence des prestataires logistiques.
La forte concurrence sur le marché du transport de marchandises et la hausse des coûts,
toutes imputables à des mesures de politiques publiques (déréglementation, Contrat de
Progrès, prix du carburant) ont été des facteurs importants pour expliquer ce
changement.
C’est durant les décennies 1980 et 1990, notamment dans la deuxième moitié des années
1990, que plusieurs entreprises de transport sont devenus de grands prestataires de
transport et de logistique.
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2. En SUISSE
L’exploitation des enquêtes réalisées auprès des entreprises met en évidence le fait que le cadre
législatif et réglementaire du secteur des transports de marchandises a influencé directement ce
changement logistique. Les entreprises évoquent essentiellement une mesure qui a eu une
influence sur le choix de la nouvelle stratégie ; il s’agit de la RPLP (se reporter au Chapitre III).
La redevance poids lourd liée aux prestations (RPLP)
La RPLP a eu comme conséquence immédiate de renchérir le coût du transport. Dans le
contexte du marché de transport connaissant une grande concurrence, cette augmentation a joué
un rôle important dans leur choix d’être prestataire logistique. Selon les responsables
logistiques interviewés, la RPLP a joué le rôle d’accélérateur dans la décision de changer de
stratégie. Le surcoût de cette taxe n'a pu être, en effet, que partiellement répercuté sur les
clients, notamment les plus gros qui ont un pouvoir de négociation très important. La RPLP a
ainsi augmenté la tension sur le marché de transport qui était déjà difficile. La nouvelle taxe,
selon les enquêtes menées, a entraîné une concentration de la profession de transport routier,
que ce soit par des fusions ou par des fermetures de petites entreprises. Les plus gros
transporteurs sont à même de gérer plus efficacement leur flotte et, en particulier, d’éviter les
parcours à vide.
Les effets de la RPLP sur le secteur de transport ont été si importants, selon les personnalités
interrogées, qu’une société de transport doit posséder une taille critique si elle veut survivre
dans ce marché. Ceci est fondé sur les deux raisons suivantes :
-
La RPLP a conduit les transporteurs à des investissements importants pour renouveler leur
parc de poids lourds, afin de réduire l’impact de la taxe sur les coûts (la RPLP est en effet
fonction de la classe de pollution du véhicule). Il faut donc atteindre une taille critique pour
assurer ces investissements et les rentabiliser. Ce coût d'investissement a, certes, été limité
par les économies de carburant réalisées avec le passage à des camions de nouvelles
technologies (passage de 40L/100km à 25L environ) dans certains cas; mais ces économies
ne suffisent pas en général à renouveler le parc de véhicules dont la technologie ne
progresse pas aussi vite que les exigences des politiques publiques. La RPLP va encore
augmenter deux fois sur les dix prochaines années alors que la durée de vie des véhicules
est d'environ dix ans.
-
Le montant de la RPLP se basant sur la capacité du véhicule et non sa charge effective, la
taxe pénalise fortement les camions peu chargés et les retours à vide. Il est nécessaire
d’avoir comme clients les chargeurs possédant une envergure nationale et traitant des
volumes suffisamment importants pour pouvoir prétendre optimiser leurs flux.
-
Pour un véhicule qui fait beaucoup de kilomètres dans l'année, la part de la RPLP dans les
coûts est comparable à celle du carburant100. En revanche, dans les activités logistiques, la
RPLP n'est plus perçue comme une charge dont il faut se soucier, en raison du faible
nombre de kilomètres parcourus et de la part prépondérante du coût humain.
100
Un rapide calcul montre que la RPLP représente un coût même supérieur au carburant :
Véhicule de 40 T (Euro I) roulant 100'000 km par année et consommant 30 litres/100km, prix moyen du diesel en Suisse en
2000 1,44 CHF ;
RPLP : 0.0168 x 40 x 100'000 = 67’200 CHF
Carburant: 1.44 x 30 x 1000 = 43’200 CHF
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127
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Face à cette situation, les responsables logistiques ont eu le sentiment de devoir faire le choix,
entre rester sur le marché du transport en acquérant une taille critique ou de sortir de ce marché
en proposant d’autres services. Deux des entreprises interrogées et principalement actives dans
le transport auparavant ont fait le choix de se diversifier.
Selon la première, le renchérissement de la RPLP en 2005 (passage de 1.68 à 2.5 cts par Tkm
en moyenne) va accentuer ce phénomène de concentration dans les entreprises de transport.
Pour l'exemple, il mentionne le calcul qui avait été effectué afin de savoir s'il fallait changer la
flotte de véhicule en raison de cette augmentation. A moins de 70'000 km parcourus par an, il
n'est pas avantageux de remplacer un camion Euro I par un camion Euro II afin d'économiser
sur la taxe RPLP. Le kilométrage moyen chez ce prestataire logistique est actuellement bien
inférieur.
Principaux enseignements
Durant les quarante dernières années, comme en France, on n’a pas observé d’influence
directe et significative des politiques publiques sur ce processus de changement stratégique
du passage de transporteur de marchandises à prestataire de logistique.
Les politiques publiques ont influé, de manière indirecte, comme en France, sur la
concentration dans le secteur et sur l’émergence des prestataires logistiques : La RPLP a
entraîné une forte augmentation des coûts de transport qui a eu pour effet d’accélérer la
concentration dans le secteur et l’émergence des prestataires logistiques.
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128
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
3. En ITALIE
Les enquêtes semblent montrer qu’en Italie les politiques publiques n’ont influencé que d’une
façon indirecte les décisions des entreprises. Elles ont entraîné d’abord une hausse des coûts
qui a rendu nécessaire une réorganisation au niveau des transports et de la logistique ou la
production d’un service rendu à haute valeur ajoutée afin de fidéliser le client. Les références
juridiques et de politique économique les plus importantes à cet égard sont les suivantes: la loi
686/1994 qui a fait appliquer le système des « éco-points », en vigueur jusqu’à 2003, pour le
transport routier de marchandises à travers l’Autriche effectué pour propre compte par
l’entreprise et pour le compte de tiers; les politiques fiscales : taxes et aides financières
publiques ; les deux derniers codes de la route, établis respectivement par la loi 285/1992 et le
Décret de Loi 151/2003; la politique environnementale, notamment à travers le Décret de Loi
22/1997 (Décret Ronchi) sur la gestion des déchets et des emballages.
Le système des « éco-points »
Le principe des éco-points, en vigueur depuis 2003 (Loi 686/1994) pour le transport à travers
l’Autriche, consiste à comptabiliser une utilisation des points sur la base de la production
d’émissions d’oxyde d’azote : plus un véhicule est « écologique », moins il utilise de points. La
Commission européenne attribue à chaque pays, dont les poids lourds passent à travers
l’Autriche, un quota d’ éco-points101.
Système des Eco-points pour le trafic en transit en Autriche
Des Eco-points pour le trafic de transit en Autriche sont accordés aux véhicules de plus de 7,5
tonnes. L'’échelle de distribution a été établie sur la base d’environ 1,5 millions de voyages de
transit répartis dans les pays de l'Union européenne. 11 millions d’Eco-points ont été distribués en
1999, mais il est prévu de n’en distribuer au 8 millions en 2003. En fait, comme ce sont des
véhicules plus favorables à l’environnement qui sont utilisés, il a été possible d’avoir une croissance
du trafic malgré une réduction du nombre d’Eco-points. Cependant, une clause de sécurité stipule
que si le nombre total de camions en transit sur un an excède le nombre de 1991 par plus de 8%, le
nombre d’Eco-points sera réduit, selon une formule établie. Il faut noter que le système des Ecopoints devrait être suspendu en 2003.
Source : CEMT « La réforme des réglementations dans le transport routier de marchandises » Actes
de la Conférence Internationale – Février 2001, P. 44
Les entreprises qui ne sont pas accréditées et/ou autorisées à entrer en Autriche ont l’obligation
de passer par l’Etat, ce qui rend moins coûteux de remettre le chargement à la frontière à une
entreprise autrichienne qui s’occupera du reste du trajet au-delà de la frontière italienne. Cette
loi a eu pour effet d’augmenter les coûts des transports et donc des stratégies visant à éliminer
le plus possible les intermédiaires. Elle a pour effet direct (bien que limité) d’inciter les
entreprises à avoir une grande taille afin de pouvoir bénéficier d’une base plus importante
d’éco-points, ou à s’internationaliser vers l’Autriche.
101
Le même système a été adopté à partir du 1er janvier 2002 également en ce qui concerne les transports effectués avec des
véhicules commerciaux ayant un poids total de 40 tonnes maximum en transit par la Suisse.
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129
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Les aides financières publiques
Durant les vingt dernières années, il y a eu de nombreuses aides qui ont réduit les péages
d’autoroute102. Ces aides s’adressent à tous les utilisateurs du réseau autoroutier (de façon à
transférer les parts de trafic de la route vers l’autoroute) mais se basent sur un chiffre d’affaires
important, très difficiles à obtenir pour les (petites) entreprises italiennes. D’où une poussée
importante vers la recherche d’une grande taille d’entreprise.
Des aides fiscales importantes ont été également appliquées surtout dans les années 1990, en
termes de réduction des péages, de déduction des coûts de téléphonie mobile103, de détaxation
des bénéfices réinvestis en équipements104 (y compris les véhicules automobiles et camions), la
réduction des taxes sur le gazole105 et la récupération de la taxe carbone106.
Mais la loi qui a réellement eu le plus d’influence à été la loi 240/1990 qui, entrée en vigueur
en 1996, a permis de financer des investissements d’infrastructures publiques comme des
interports107. Par ailleurs, les aides financières étaient destinées aux entreprises qui s’engagent
dans les activités d’entreposage, de logistique et de transport combiné. Ces aides favorisent les
prestataires logistiques par rapport aux transporteurs routiers.
Le nouveau code de la route
Le nouveau code de la route de 2003 introduit le permis de conduire « à points ». Les points
sont ôtés en fonction de la gravité de l’infractions. L’introduction de ce système a entraîné un
allongement du temps de parcours et une augmentation des prix routiers (surtout sur les
moyennes et longues distances). Il incite les entreprises à recourir à l’intermodalité ainsi qu’à la
diversification vers les services logistiques du fait des marges de profit décroissante du simple
transport routier.
La gestion des déchets et emballages
Les opérateurs logistiques sont inscrits au CONAI (Consortium National des Emballages) dans
le cadre du décret de la loi 22/1997, mais ils sont aussi impliqués dans la gestion des déchets et
des emballages pour compte de tiers. En ce sens les logisticiens pourraient exploiter des
nouvelles opportunités qui dérivent du marché de la « reverse logistic ». Mais les entreprises
sont dans l’attente que le Décret Ronchi soit effectivement appliqué. Le marché noir étant
actuellement très développé dans ce domaine, les entreprises qui utilisent un système régulier
d’écoulement des déchets subissent des coûts trop élevés. Une fois appliqué, le décret
contribuerait à créer davantage de marges de profit sur les activités logistiques (et notamment
102
Par exemple: loi du 4 décembre 1996 n° 611, loi du 5 mars 1997 n° 38, (réduction des taxes automobiles et des péages
d’autoroute), loi du 7 mars 1997 n° 48.
103
Loi 488/2001
104
Loi 383/2001
105
Loi 343/2000
106
Loi 488/1999
107
Avec la loi 240/1990, on commence à investir sur les interports et à affecter de l’argent pour la construction de zones
publiques équipées. La tentative de répéter les succès de la loi 240 a été fait avec l’émanation de la loi 454/1997, qui a essayé
d’obtenir le regroupement d’entreprises pour dépasser le fractionnement qui caractérise le tissu industriel italien, mais a
simplement provoqué un exode de nombreuses entreprises de taille modeste.
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130
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
sur la reverse logistics), poussant ainsi une partie des opérateurs de transport à diversifier leurs
activités vers la logistique.
Le manque d’investissements en faveur du rail
Par rapport aux principaux pays européens, les infrastructures économiques italiennes sont
encore sensiblement moins développées. Une augmentation décisive des ressources destinées à
l’accumulation de capital public, outre le fait de soutenir la croissance à court terme, est la
condition nécessaire pour atténuer les obstacles logistiques à l’expansion du trafic et pour
améliorer l’offre de services essentiels pour les perspectives de développement des entreprises.
Comme on peut le voir dans le tableau 23, au cours de la décennie 1980 – 1990 -et quoi qu’il
en soit jusqu’en 1995 au moins- la répartition des investissements publics a nettement favorisé
le transport routier ( 82,79% en 1981 et 87,63% en 1991) par rapport aux chemins de fer
(6,9%), en attribuant des parts minoritaires aux autres modes de transport (on remarque la
baisse des investissements pour le secteur de la navigation maritime).
C’est seulement à la fin de la décennie que l’on enregistre une inversion de tendance, en phase
avec les directives européennes, qui voit les investissements en installations fixes augmenter
(normalement reconductibles au réseau de chemins de fer) qui cependant, comme le démontre
l’extension relativement constante du réseau de chemins de fer au fil des années reportée dans
le tableau 24, se concentrent désormais en d’urgentes améliorations technologiques
(électrification du réseau et redoublement des voies ferrées) et non pas en agrandissement du
réseau.
Tableau 23: Investissements publics dans les différents secteurs (pourcentage sur le total).
Secteurs
Installations fixes
Route
Navigation interne
Navigation maritime
Navigation aérienne
Oléoducs
Dépenses non attribuables
Source CNT 1981,1993,2001
1981
6,90
82,79
0,19
6,12
2,36
0,06
1,58
1991
6,82
87,63
0,07
2,94
2,36
0,06
0,12
2000
39,1
48,4
0,2
5,3
2,9
4,0
Tableau 24: Extension du réseau de chemins de fer et routier (Km)
1991
2000
Route *
Chemins de
Route
Chemins de
Route
Chemins de fer
fer**
fer
298.382
19.832
307.157
19.583
479.874
16.590
Source CNT 1981,1993,2001
1981
* Comprend: Autoroutes, routes nationales, départementales et communales extra-urbaines
** FS + Chemins de fer en concession
Si l’on analyse les données relatives au réseau ferroviaire seulement (réseau des chemins de fer
italien), on remarque que de 1981 à 2000 la situation est restée stable108 tandis que l’extension
108
On passe 16.166 Km en 1981, à 16.066 en 1991 et enfin à 16.147 en 2000, la répartition au niveau régional restant
également stable.
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131
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
du réseau routier a été décidément développée: en 2000, on calcule environ 61%
d’augmentation par rapport à 1981, un chiffre qui confirme les déséquilibres entre les
investissements dans les différents modes de transport précédemment cités.
On n’a pas observé d’influence directe significative des politiques publiques sur le
processus de changement. Les entreprises de transport et de logistique déplorent surtout
l’absence de politique adéquate de transport et d’infrastructures.
Toutefois, et de façon indirecte, un certain nombre de lois et décrets ont entraîné une hausse
des coûts, avec la nécessité de leur réduction et rationalisation, soit un avantage à la
croissance de la taille de l’entreprise, soit un avantage à la diversification vers les activités
logistiques.
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132
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
V. Les autres facteurs de changements
Quels autres facteurs ont influé sur l’évolution générale des stratégies des entreprises ? Et quels
ont été les mécanismes d’influence?
Les facteurs qui ont été repérés dans les enquêtes pour justifier les changements stratégiques
des entreprises dans le secteur du transport et de la logistique sont: les facteurs économiques ;
l’émergence de la demande logistique; le développement technologique, les modifications dans
la direction de l’entreprise.
1. Facteurs économiques
La forte concurrence sur le marché
Le secteur du transport de marchandises et de la logistique se caractérise par une forte
concurrence; ceci a conduit à la restructuration et à la concentration dans le secteur. Il fallait,
pour se maintenir sur le marché, rechercher « la taille critique » pour affronter la concurrence.
Le mouvement de restructuration et de concentration des entreprises de transport et de
logistique, durant les dernières années, a été motivé par la recherche d’une taille critique afin de
devenir prestataire logistique et traiter l'ensemble des activités logistiques d'un client (transport,
entreposage, information, couverture géographique, distribution, production, etc.).
La libre circulation des capitaux et le marché unique européen
En Italie, la libre circulation des capitaux a permis des opérations plus souples pour les sociétés
étrangères qui ont voulu entrer sur le marché italien de la logistique et de la grande distribution
par des fusions et acquisitions109.
2. Les nouvelles technologies
Les technologies d’information et des communications (TIC) sont devenus des armes
stratégiques dans le secteur du transport de marchandises et de la logistique. La production des
solutions logistiques globales nécessite beaucoup d’investissements dans les nouvelles
technologies, les logiciels de gestion de flotte de véhicules, les GPS. Les clients distributeurs et
industriels exigent aussi très souvent des entreprises de transport de posséder des systèmes de
communication électronique (EDI, Internet) compatibles avec leur système.
L’innovation technologique comme facteur de changement se manifeste aussi dans une certaine
mesure au niveau de l’évolution technique des véhicules. Des progrès importants ont été
réalisés en matière de consommation de carburant et des rejets de polluants. Le carburant étant
un poste important des coûts d’opération, les entreprises sont incitées à opter pour des
véhicules relativement modernes. « On utilise aujourd'hui des appareils qui nous permettent de
saisir l'information en temps réel et de la transmettre en temps réel. (..) ça nous aide à travailler
finalement et à produire notre service » (citation).
109
La directive 88/361 de l’Union européenne a décidé de l’abolition, à partir du 1er juillet 1990, de toutes les restrictions aux
mouvements de capitaux entre résidents des Etats membres afin de contribuer à l’instauration du marché unique.
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133
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
En Italie, du fait des dimensions réduites des entreprises et leur fragilité financière, la
propension à l’innovation technologique et à l’organisation demeure modeste. Toutefois les
exigences d’une gestion rapide des informations a encouragé beaucoup d’opérateurs à adopter
des techniques télématiques de communication avec les clients (EDI) et les véhicules.
3. Le développement de la demande logistique
En France, dans les années 1980 et 1990, le développement de la demande logistique de la
grande distribution et des industriels produisant pour elle (pratiques d’externalisation) a été un
des facteurs décisifs dans l’émergence des prestataires logistiques. Comme l’indique Jacques
Colin « les entreprises industrielles et commerciales, en se dotant d’une démarche et d’une
organisation logistique, modifient leur demande de transport, qui passe d’une demande de
transport très classique et le plus souvent modale, à une demande beaucoup plus complexe de
‘prestations de service’ logistiques dont le transport ne constitue ‘que’ le noyau central »110.
C’est pour répondre à la demande de ces deux secteurs que se construit d’abord le métier de la
logistique en France.
Jusqu’en 1995, le profil dominant des prestataires logistiques est lié aux chargeurs importants
de ces secteurs (industrie et distribution). Citons encore une fois Jacques Colin « Il semble que
cette évolution se soit d’abord faite sous la pression des chargeurs importants dotés d’une
démarche logistique et d’une volonté de ‘sous-traiter’ leurs opérations logistiques, qui leur
apparaissent comme relevant de la compétence des spécialistes en mesure de réaliser les
investissements nécessaires (en hommes, en organisation, en structures, en matériel) »111. Selon
certaines estimations, le rythme de la croissance de la logistique externalisée est de l’ordre de
10% par an en France, alors que sur les cinq dernières années, le TRM a connu une croissance
de 5,3%112. Pour répondre à cette demande logistique, les entreprises devaient se concentrer et
devenir des prestataires logistiques.
En Suisse, le milieu des années 90 a vu apparaître la demande des clients industriels pour des
services proposant la gestion intégrale de leur distribution.
4. Le changement dans la direction de l’entreprise
En Suisse, la décision de changer de stratégie coïncide dans les trois cas observés avec un
changement à la tête de l’entreprise. Cette transformation dans le management de l’entreprise
peut être considérée à chaque fois comme le déclencheur dans le processus du changement de
stratégie logistique. En France, on peut citer le cas de Easydis qui résulte de la réorganisation
des activités du groupe Casino.
Principaux enseignements
Parmi les autres facteurs des changements, le développement d’une demande logistique
a été un facteur important dans l’émergence des prestataires logistiques.
110
Jacques Colin « Le rôle des chargeurs et des transporteurs dans la logistique » CEMT - Table Ronde 76, Paris
1987, P. 23
111
Jacques Colin déjà cité, P. 22
112
Les études du SES « Les prestataires logistiques en France et en Europe », N° 145 Octobre 2003, étude réalisée par Antoine
Artous en collaboration avec Isabelle Leroy-Dutilleul, P.27
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134
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
VI. Les principaux résultats du chapitre 5
Il est devenu de plus en plus difficile de parler de transport de marchandises sans parler de
logistique pour trois raisons113. Tout d’abord, pour l’essentiel, le métier de prestataire logistique
est issu du monde du transport : on ne peut parler de leur stratégie sans traiter de la logistique.
Ensuite, la plupart des prestations logistiques contiennent une part importante de transport.
Enfin, dans une problématique de supply chain management, les prestataires logistiques jouent
un rôle important dans la structuration des flux de marchandises, donc du transport.
Le changement stratégique significatif observé dans le secteur, durant les dernières années en
France, comme en Suisse et en Italie, a été l’émergence des prestataires logistiques. L’analyse
des résultats des enquêtes suggère que l’avenir, dans le secteur du transport et de la logistique,
appartient soit aux plus grands ensembles (prestataires logistiques), soit aux plus petits
transporteurs (artisans). La mondialisation des échanges a pour effet que les clients des
entreprises de transport et de logistique demandent toujours plus à ces dernières des solutions
leur garantissant une continuité au-delà des frontières nationales, et ce quel que soit le(s)
mode(s) de transport adopté(s). Si les petites entreprises peuvent espérer se contenter des
marchés dits « de niche », les entreprises moyennes sont en général relativement mal préparées
pour concurrencer les grands opérateurs de transport et de logistique. Dans le paysage varié des
entreprises de transport en France les « tout petits vivent bien mieux que des entreprises
moyennes (200 salariés). Les ajustements sont permanents et complexes dans ces PME tandis
que les plus petits qui se limitent à du transport régional ont moins de souci, moins de
personnel et moins de coûts de fonctionnement » (citation).
Il n’y a pas eu d’influence directe et significative des politiques publiques sur ce processus de
changement stratégique.
On a détecté, cependant des politiques publiques qui ont influencé, de manière indirecte, les
restructurations des entreprises du secteur et l’émergence des prestataires logistiques.
Le développement d’une demande logistiques, les facteurs économiques et le développement
technologique ont cependant été les principaux facteurs d’émergence des prestataires
logistiques.
113
Se reporter à Artous A., Salini P. « Les transporteurs routiers français dans la compétition internationale »
Rapport INRETS pour la Direction des Transports Terrestres, Décembre 2003
B2K Consultants
135
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE VI
SYNTHESE ANALYTIQUE COMPAREE DES PRINCIPAUX
RESULTATS DE LA RECHERCHE
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136
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
I. Les changements logistiques significatifs des entreprises de
distribution
Durant les quarante dernières années, le changement logistique significatif concerne la
centralisation logistique, c’est à dire des stratégies logistiques fondées sur la concentration des
flux. La stratégie logistique, comme indiqué plus haut (Chapitre II), est un ensemble de
décisions stratégiques et d’actions qui orientent fortement l’ensemble des activités de
l’entreprises à long terme. Quant au concept de centralisation logistique, il est défini comme un
triangle ayant comme sommets la massification de flux, la polarisation des sites logistiques et
la concentration des entreprises et leurs moyens logistiques.
La centralisation logistique a démarré dans les années 1970. Les processus des changements
des stratégies logistiques des entreprises de distribution ont été les suivants :
- le passage des livraisons directes à la centralisation logistique en France ;
- le passage des entrepôts régionaux à la centralisation logistique en Suisse ;
- le passage des livraisons directes à la construction des entrepôts et plates-formes en Italie.
La centralisation logistique est actuellement relativement bien établie en France et en Suisse.
En Italie, ce processus de changement logistique est à ses débuts. Les créations d’entrepôts et
plates-formes ne commencent à se généraliser depuis les années 1990.
Les pratiques logistiques fondamentales des entreprises, induites par la centralisation logistique
concernent l’utilisation des entrepôts et plates-formes, la réduction du nombre d’entrepôts et
plates-formes (polarisation des sites logistiques), la concentration des entreprises et leurs
moyens logistiques, la massification des flux, le choix de l’intégration ou de l’externalisation
des activités logistiques, la diversification géographique des zones d’approvisionnement, le
développement des approches supply chain management.
II. Les changements stratégiques significatifs des prestataires de
transport de marchandises et de logistique
C’est l’émergence des prestataires logistiques, durant les années 1990, qui a été le changement
le plus significatif dans ce secteur dans les trois pays étudiés.
En France et en Suisse le passage du métier de transporteur à celui de prestataire s’est opéré
principalement par croissance externe (rachats, fusions ou acquisitions d’entreprises nationales
et étrangères).
En Italie, le processus de transformation des opérateurs traditionnels en prestataires logistiques
se fait par fusions ou acquisitions entre entreprises italiennes mais surtout par acquisitions
d’entreprises italiennes par des groupes étrangers.
B2K Consultants
137
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
III. Les facteurs de changements logistiques dans la distribution
Les principaux facteurs ayant influencé les stratégies et/ou les évolutions logistiques des
entreprises de distribution, durant les quarante dernières années , sont synthétisés sur la Figure
22. On distingue les facteurs dépendant du contexte des politiques publiques des autres
facteurs.
FACTEURS
ECONOMIQUES
MONDIALISATION
POLITIQUE DU
TRAVAIL
POLITIQUE DES
TRANSPORTS
INCITATIONS
FINANCIERES
STRATEGIE LOGISTIQUE DES
ENTREPRISES DE DISTRIBUTION
REGLEMENTATION
FISCALITE
POLITIQUE
ENVIRON.
POLITIQUE
LOCALE
MANAGEMENT
DE L’ENTREPRISE
INNOVATION
TECHNOLOGIQUE
Figure 22 : Les principaux facteurs de changement logistique dans le secteur de la distribution
Les principaux outils publics détectés comme ayant influé (intentionnellement ou non), sur les
stratégies logistiques des entreprises de distribution peuvent être regroupés par type comme suit
:
- la politique de transport ;
- la réglementation ;
- la politique environnementale ;
- la politique de travail ;
- la politique des collectivités locales ;
- la fiscalité ;
- les incitations financières.
Les autres principaux facteurs de changement de stratégies logistiques identifiés sont les
suivants :
- les facteurs économiques ;
- l’évolution technologique dans l’informatique et les communications ;
- la globalisation et la délocalisation de la production.
- les modifications dans la direction de l’entreprise.
Nous les analysons dans cet ordre.
B2K Consultants
138
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
1. L’influence des politiques publiques
Durant les quarante dernières années, il n’y a pas eu de politique publique visant à influencer
directement les stratégies logistiques des distributeurs. Les politiques publiques ont donc été de
peu d’influence sur les changements de stratégies logistiques des entreprises de distribution.
Néanmoins on a détecté en France que les lois Raffarin et Galland ainsi le Contrat de Progrès,
qui n’avaient aucune visée directe sur les stratégies logistiques des distributeurs, ont accéléré et
consolidé le passage à la centralisation logistique durant la décennie 1990 (influence
stratégique). On a observé aussi que des politiques des collectivités locales, en pratique, ont
favorisé l’implantation des entrepôts sur leur territoire en acceptant de dédier des zones
d’accueil aux activités logistiques (influence stratégique). En Italie et en Suisse on n’a pas
détecté des politiques publiques ayant influé sur le passage à la centralisation logistique (Figure
23).
Figure 23 : influence des politiques publiques sur la logistique des entreprises de distribution
En France, comme en Italie et en Suisse, les politiques publiques ont influé davantage sur les
décisions logistiques opérationnelles ou d’exécution des entreprises (influence opérationnelle)
que sur les décisions stratégiques comme le montre la Figure 23.
B2K Consultants
139
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Un autre résultat de portée générale, que l’on peut tirer des analyses, est que la mise en oeuvre
combinée de plusieurs outils publics permet d’influer plus efficacement sur l’organisation
logistique des entreprises. On peut citer l’exemple en France des effets conjugués des lois
Raffarin et Galland, du Contrat de progrès et des politiques locales qui ont été favorables au
développement des entrepôts. En Suisse également, les effets combinés de la politique de
transport en faveur du rail, de la redevance RPLP et l’interdiction pour les poids lourds de
circuler la nuit ont entraîné une utilisation du rail.
2. L’influence des autres facteurs de changements logistiques
Dans les trois pays étudiés, les facteurs économiques ont été les moteurs des changements
logistiques (économies d’échelle, réduction des stocks, augmentation de la surface de vente,
remises et ristournes, etc.) opérés par les distributeurs durant la période observée.
Le progrès de l’informatique et le développement des technologies d’information et de
communication ont été également des facteurs importants de changement pour la centralisation
logistique. Ils ont rendu possible la gestion des entrepôts centraux et des chaînes logistiques
(supply chain). Ils constituent des supports importants à la mondialisation.
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140
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
IV. Les facteurs des changements stratégiques dans la prestation
des services de transport de marchandises et de logistique
Les principaux facteurs des changements stratégiques des entreprises de transport de
marchandises et de logistique sont synthétisés sur la Figure 24. Il y a les facteurs dépendants
des politiques publiques et les autres facteurs.
FACTEURS
ECONOMIQUES
DEMANDE
LOGISTIQUE
POLITIQUE DU
TRAVAIL
POLITIQUE DES
TRANSPORTS
INCITATIONS
FINANCIERES
STRATEGIE DES ENTREPRISES
DE TRANSPORT ET DE
LOGISTIQUE
REGLEMENTATION
FISCALITE
POLITIQUE
ENVIRONNEMENTALE
MANAGEMENT
DE L’ENTREPRISE
INNOVATION
TECHNOLOGIQUE
Figure 24 : les facteurs de changement stratégique des prestataires de transport et de logistique
Durant la période observée, les instruments publics détectés comme ayant influé
(intentionnellement ou non) sur les stratégies des entreprises prestataires de services de
transport et de logistique peuvent être regroupés comme suit :
- la politique des transports ;
- la politique environnementale ;
- la réglementation ;
- la fiscalité ;
- les incitations financières ;
- la politique de travail.
Les autres principaux facteurs de changements de stratégies logistiques des entreprises sont les
suivants :
- les facteurs économiques ;
- les nouvelles technologies ;
- le développement de la demande logistique ;
- les modifications dans la direction de l’entreprise.
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141
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Nous les analysons dans cet ordre.
1. L’influence des politiques publiques
Durant la période observée, on n’a pas identifié de politique publique ayant eu une influence
directe et significative sur les processus d’émergence du métier de prestataire logistique.
Cependant, en France, comme en Italie et en Suisse, on a détecté des politiques publiques qui
ont influé, de manière indirecte, sur les restructurations du secteur et l’émergence des
prestataires logistiques. Les mesures de politique publique ont entraîné d’abord soit une vive
concurrence sur le marché (déréglementation du marché, etc.), soit une hausse des coûts
logistiques (Contrat de Progrès, RPLP, éco-points, etc.) qui ont rendu nécessaire des
réorganisations des plans de transport, des restructurations et des fusions-acquisitions parmi les
entreprises pour atteindre une taille critique donc suffisante afin d’être des prestataires
logistiques.
Les politiques publiques, dans les trois pays, ont influé aussi bien sur les décisions stratégiques
des prestataires logistiques (influence stratégique) que sur les fonctions opérationnelles ou
d’exécution (influence opérationnelle), comme le montre la figure 25 ci-après.
Figure 25 : influence des politiques publiques sur les changements stratégiques des
prestataires de transport et de logistique
secteur du transport et de la logistique
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142
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. L’influence des autres facteurs de changements
Le développement de la demande logistique des distributeurs et des industriels, durant les
années 1980 et 1990, a été un facteur décisif dans l’émergence des prestataires logistiques.
Les facteurs économiques ont été ici également les moteurs des changements stratégiques. Le
mouvement de restructuration et de concentration d’entreprises de transport et de logistique,
durant les années 1990, a été motivé par la recherche d’une taille critique afin de devenir
prestataire logistique et traiter l'ensemble des activités logistiques d'un client.
Les technologies d’information et des communications sont devenues des armes stratégiques
dans le secteur du transport de marchandises et de la logistique. L’innovation technologique
comme facteur de changement se manifeste aussi au niveau de l’évolution technique des
véhicules. Des progrès techniques importants ont également été réalisés en matière de
carburants propres.
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143
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
V. Evaluation de l’impact de la centralisation logistique et des
politiques publiques sur le transport et sur la mobilité des
marchandises
La présente recherche a permis de dégager les pratiques logistiques fondamentales déployées
par les entreprises de distribution (Chapitre IV). Il s’agit de l’utilisation des entrepôts et platesformes, de la massification des flux, de la concentration des entreprises, de la réduction du
nombre d’entrepôts et plates-formes, de l’externalisation des activités logistiques, de la
diversification et de l’extension des zones géographiques d’approvisionnement et du
développement des approches supply chain management. Ces pratiques constituent les
tendances fortes actuelles des organisations logistiques des distributeurs.
Elle a montré que le contexte de politique publique, en combinaison avec d’autres facteurs
d’influence, ont eu des influences favorables sur le développement des entrepôts et platesformes, sur la massification des flux et sur la concentration des entreprises et leurs moyens
logistiques. Les facteurs économiques, du développement technologique et de la mondialisation
ont eu des impacts sur la réduction du nombre d’entrepôts et plates-formes (polarisation des
sites logistiques), sur l’externalisation des activités logistiques, sur la diversification des zones
géographiques d’approvisionnement et sur le développement des approches supply chain
management.
L’objet de ce paragraphe est d’évaluer l’impact de la centralisation logistique et des politiques
publiques sur le transport et sur les flux de trafics des marchandises. L’évaluation consiste à
dégager des éléments permettant de porter une appréciation sur la tendance de chacune des
pratiques logistiques fondamentales à augmenter ou à réduire les flux de transport de
marchandises. Pour cette évaluation, on se fonde sur des enseignements tirés des travaux
d’experts et sur nos enquêtes menées auprès des directeurs logistiques.
1. L’impact de la centralisation logistique et des politiques publiques sur
l’utilisation des modes de transport
1.1 Impact de la centralisation logistique
Les résultats de nos enquêtes, dans les trois pays, mettent en évidence une forte utilisation du
transport routier dans les organisations logistiques des distributeurs par rapport aux autres
modes (rail, voie d’eau, transport combiné, etc.).
En France, pour les entreprises de distribution, le transport routier constitue actuellement la
seule solution pratique qui satisfasse aux exigences des organisations logistiques en termes, de
fiabilité, de flexibilité, de rapidité, d’accessibilité et de prix. Les efforts déployés par les
transporteurs durant la période considérée, en matière d’organisation, ont considérablement
contribué à abaisser les prix du transport routier114. Les distributeurs interrogés utilisent peu le
transport ferroviaire, excepté pour le transport de boisson, pour des raisons d’insuffisance
d’offre, de manque de fiabilité, de coûts jugés élevés et du manque de dynamisme de la SNCF.
114
Jacques Colin J, et allii, « La logistique d’entreprise », déjà cité, P. 237.
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144
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
« On aimerait faire beaucoup plus de ferroviaire, de combiné rail-route. Nous avons un
potentiel de transfert très important de la route vers ces modes alternatifs; mais il n’y a pas
d’offre» (citation).
« Je ne suis pas du tout opposé à utiliser le transport ferroviaire; ça suppose deux choses :
- d’une part que les infrastructures le permettent (ce qui n’a pas été le cas) ;
- que la SNCF assure une certaine fiabilité. Ce qui n’est pas le cas non plus » (citation).
« La SNCF privilégie certains axes, supprime un certain nombre de gares etc., à terme, les gros
chargeurs comme nous, privilégient la route. On a la plupart de nos entrepôts qui sont
embranchés fer, mais cependant on utilise peu le fer au profit de la route pour des raisons qui
sont connues, à savoir le manque de fiabilité du fer» (citation).
« Pour la partie transport, on sous-traite à des transporteurs. Mais on organise le transport nousmêmes. En amont, on n’a pas a priori comme politique de maîtriser le transport amont, c’est le
rôle de nos fournisseurs de venir nous livrer (sur entrepôt ou plate-forme). On mène une
réflexion sur l’utilisation globale en terme d’optimisation. On a été le premier distributeur du
fluvial ; on utilise le fer en amont. Mais on fait le constat qu’on arrive, par rapport aux modes
alternatifs à la route, à une limite. On n’a pas matière à faire beaucoup plus de fer qu’on en fait
aujourd’hui. On a 93% de nos distances en aval qui font moins de 450 km. On est en dessous
du domaine d’application du fleuve et du train » (citation).
« La création des plates-formes nous a permis d’approvisionner par train complet. Donc sur les
liquides, 80% des volumes arrivent par trains complets sur nos entrepôts » (citation).
« Le transport est effectué principalement par route, plus de 99 %. Le fer est très peu utilisé,
compte tenu de la nature des produits que nous vendons (très peu de lourd). Par ailleurs, un
frein est aujourd’hui le manque de dynamisme de la SNCF : accès difficile, fils d’attente,
rigidité, temps d’embarquement et de débarquement très longs. La voie d’eau n’est pas du tout
utilisée » (citation).
En Italie, les données montrent et les enquêtes confirment que durant les vingt dernières
années, le transport ferroviaire continue à perdre des parts de marché en faveur de la route.
« Le transport a toujours été effectué sur route, parce que les chemins de fer ne garantissent ni
la certitude des livraisons ni les délais adéquats en ce qui concerne les produits périssables»
(citation). Les entreprises déplorent l’absence d’une politique des transports en cohérence avec
de délais (actuellement on est à 24 heures environ) et de la flexibilité du service.
Si, la totalité des entreprises interrogées ont exprimé le souhait de prendre en considération la
possibilité d’utiliser le transport ferroviaire, elles ont également conclu qu’actuellement c’est le
transport routier qui demeure nettement le plus compétitif aussi bien en termes de coûts que de
fiabilité du service115. En outre, l’utilisation efficace des chemins de fer devrait être
accompagnée d’un bon fonctionnement du système des interports116, ce qui est loin d’être le
115
En 2003, avec l’approbation du nouveau code de la route et du permis à points, on a bouleversé le secteur des
transports: en augmentant les temps de parcours des camions, on a généré un déséquilibre en faveur des transports
maritimes sur moyennes et longues distances.
116
De nouveaux espoirs sont donnés par quelques entreprises dans le nouvel interport de Novara qui, avec la
nouvelle ligne ferroviaire rapide, pourrait proposer une utilisation efficace des chemins de fer.
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145
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
cas117. « Par rapport à des coûts plutôt élevés, on n’a absolument pas la certitude du service. En
Italie, il manque le concept de multimodalité des transports, ce qui oblige les entreprises à
choisir le transport routier. » (citation).
En ce qui concerne les transports secondaires des centres de distribution jusqu’aux points de
vente dispersés sur le territoire, on constate un manque d’infrastructures adéquates pour opérer
sur le réseau ferroviaire (ou par voie maritime). « On a souvent été mis en difficulté par
l’absence d’interventions publiques, surtout des interventions concernant les infrastructures
relatives au transport ferroviaire… » (citation). Quant aux possibilités d’optimiser, à travers le
transport ferroviaire, le transport primaire du fournisseur à l’entrepôt, on se heurte, une fois de
plus, au manque de flexibilité du réseau ferroviaire et à son obsolescence par rapport au
nouveau tissu industriel qui s’est développé. Même si les entrepôts sont construits dans les
alentours des gares, les frais de raccordement sont désormais totalement à la charge des
entreprises118 et restent un investissement trop risqué tant que le service ferroviaire garde les
caractéristiques d’inefficacité et de rigidité qui lui font obstacle actuellement.
Dans le cas de la Suisse, contrairement à la France et à l’Italie, on observe que le train a gardé
des parts de marché importantes au lieu de les perdre, même si le transport routier est le mode
le plus utilisé. Les centres nationaux de Migros possèdent tous un embranchement ferroviaire et
utilisent le rail. La Poste assure les transports entre les trois centres nationaux par le train
exclusivement.
1.2 Impact des politiques publiques
On a cependant observé des différences entre la Suisse d’une part et la France et l’Italie d’autre
part concernant le rail. Alors que le fret ferroviaire continue à croître en Suisse, moins
rapidement certes que le fret routier, il décroît en France et en Italie.
En Suisse, une politique volontariste des pouvoirs publics en faveur du rail (investissement et
subvention), l’adoption d’une redevance poids lourds liée aux prestations (RPLP) pour freiner
la croissance du trafic routier de marchandises et l’interdiction pour les camions de circuler la
nuit ont entraîné une utilisation du rail dans les organisations logistiques des distributeurs.
En France, comme en Italie, le manque d’investissement public dans le fret ferroviaire, entre
autres facteurs, a contribué à renforcer le recours des entreprises au transport routier dans leurs
organisations logistiques.
117
Un même raisonnement est aussi fait pour le transport maritime, qui est considéré optimal seulement pour les
activités sur Palerme et la Sicile en général.
118
Au début, quand les chemins de fer étaient encore une organisation de l’Etat, l’entreprise qui demandait un
raccordement pouvait utiliser les quais que les FS (Chemins de fer italiens) étaient obligés de changer sur les
trajets principaux mais qui pouvaient être réutilisés sur des tracés secondaires. Par la suite, les Chemins de fer de
l’Etat limitèrent leur frais seulement à l’adaptation des infrastructures qui était nécessaire à l’intérieur de la zone
de la gare. Avec la réorganisation de la société ferroviaire, le total des frais est à la charge de la société.
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146
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
2. L’impact de la centralisation logistique sur la mobilité des marchandises
Quelles pratiques logistiques, induites par la centralisation logistique, ont tendance à augmenter
le transport de marchandises? Et quelles sont celles qui tendent à diminuer l’augmentation du
trafic? Peut-on affirmer que la centralisation logistique contribue à aggraver la croissance du
trafic de marchandises ?
2.1 Les enseignements tirés de l’analyse des travaux d’experts
Peu de travaux de recherche ont encore porté sur ce thème. Les quelques recherches identifiées
ont porté :
- sur la concentration géographique de l’entreposage (réduction du nombre d’entrepôts),
réduction des stocks et flux tendus (Juste-à-temps) ;
- sur la diversification des sources d’approvisionnement et l’expansion des marchés
(mondialisation) ;
- et sur les approches Supply Chain Management.
Nous les analysons dans cet ordre.
Concentration géographique de l’entreposage (réduction du nombre
d’entrepôts), réduction des stocks et flux tendus (Juste-à-temps)
La concentration géographique de l’entreposage ou des stocks se traduit par la réduction du
nombre d’entrepôts; ce qui a tendance à augmenter les transports de marchandises dans la
mesure où elle affecte le nombre et la longueur des maillons de la chaîne de transport.
Selon Jacques Colin : « autrefois, les logistiques s’adossaient à de multiples stocks locaux ou
régionaux ne générant que des trafics de proximité. Aujourd’hui, la centralisation des entrepôts
et des usines à vocation nationale voire européenne, si elle permet de réduire le niveau des
stocks, est fortement génératrice de transport, tout particulièrement sur les axes qui relient entre
eux les principaux pôles logistiques…. Bien sûr, en généralisant des livraisons en flux tendus à
partir de lointains entrepôts centraux (très économe en stock et où la disponibilité des
marchandises est maximisée ne font qu’exacerber la consommation de transport »119.
Avant le changement logistique vers la centralisation logistique, selon McKinnon, « la
distribution des produits manufacturés depuis l’usine jusqu’au magasin était définie par l’offre ;
des palettes étaient chargées à hauteur maximale d’un seul type de produit à emballage
standard.
Le développement de la ‘logistique à réponse rapide’ et du transbordement (cross-docking)
oblige maintenant les manufacturiers à assembler des commandes mixtes pour les clients sur le
marché de détail ou de gros soit à l’usine soit dans un entrepôt central. Les flux des produits
aux niveaux supérieurs de la chaîne d’approvisionnement devient par conséquent de plus en
plus déterminés par la demande et les charges des palettes sont adaptées aux besoins des client.
119
J. Colin « Quelques pistes de recherche sur le transport de marchandises », contribution d’experts à la
préparation du PREDIT 3, Novembre 2000.
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147
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Ces charges palettisées sont en général moins hautes, ont un profil irrégulier et se prêtent moins
bien à l’empilage ; ce qui entraîne une augmentation des transports »120.
L’augmentation de la longueur moyenne des maillons de la chaîne d’approvisionnement en
Europe, selon la CEMT, « a été en moyenne de 1,5 à 2 pour cent par an »121.
Selon Jean-Claude Michel (groupe Norbert Dentressangle) « …Mattel, en réduisant à deux le
nombre de ses entrepôts destinés à livrer toute l'Europe, augmente les flux de transport »122.
Pour Alan Mc Kinnon « l’allongement des distances de transport a été le principal facteur
d’accroissement du fret routier. Au cours des trente dernières années, environ les deux tiers de
l’augmentation du nombre de tonnes*kilomètres routières en Europe lui sont attribuables» 123.
Cette augmentation de la longueur moyenne du parcours s’explique :
- par la centralisation de la production et de l’entreposage (plus haut);
- par la diversification des sources d’approvisionnement (mondialisation).
L’office fédéral de la statistique a mis en évidence, en Suisse, la stagnation du volume alors que
la distance moyenne parcourue a doublée durant les dix dernières années pour passer de 29 km
en 1991 à 64 km en 2001 (cf. figures 26 et 27).
120
McKinnon A. « Modifier la gestion logistique des entreprises » - Séminaire International CEMT, Bruxelles,
décembre 2002
121
CEMT - « Évolution des transports : 1970-1998 », Paris 2000
122
Jean-Claude Michel , président du directoire du groupe Norbert Dentressangle) « Les voyants sont au vert »,
L’officiel des transports n°2279, octobre 2004, propos recueillis par Johanne Collot
123
McKinnon A. op cité
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
F i g u r e 2 7 : p r e s t a t i o n d u t r a n s p o r t d e m a r c h a n d i s e s p a r m o d e
35
80%
30
70%
60%
25
20
50%
R OUT E
R AIL
40%
P ar t modal e du r ai l
15
30%
10
20%
5
10%
0
0%
La concentration spatiale du stock est un des facteurs à l’origine de l’allongement des
distances; or l’impact de ce phénomène d’allongement des distances sur la croissance générale
du trafic est démontré par le rapport REDEFINE (Netherlands Economics Institute, 1997) ; il
fournit un certain nombre d’indices concernant le lien pouvant exister entre ce processus de
restructuration industrielle et logistique et les modifications apportées au secteur de transport.
Cette étude met en évidence six facteurs influençant le lien entre la production des
marchandises et le volume des trafics de fret : densité, répartition modale, nombre de chaînons
dans la chaîne logistique, longueur moyenne des trajets, taux de remplissage et efficacité des
gestions de la flotte. Le Tableau 25 résume un ensemble de données attestant de l’importance
de ces facteurs pour un échantillon de quatre pays de l’Union européenne durant la période
1985-1995 (1993 pour l’Allemagne). On observe que, à l’exception de l’Allemagne,
l’allongement du trajet moyen a été le principal déterminant de la croissance du trafic.
Tableau 25 : Déterminants de l’évolution du trafic routier de marchandise 1985-1995
Tonnes chargées sur le transport routier
Longueur moyenne des trajets
Tonnes*kilomètres
Véhicules*kilomètres
Source : Rapport REDEFINE (NEI, 1997)
RoyaumeUni
18%
24%
46%
37%
France
Allemagne
Pays-Bas
16%
36%
57%
28%
30%
17%
52%
Nd
25%
29%
60%
30%
Les facteurs qui se trouvent à l’origine des modifications de l’organisation logistique et de la
chaîne d’approvisionnement sont :
§
la restructuration des systèmes logistiques - concentration spatiale de la production ou
du stock ;
§
le réalignement des chaînes d’approvisionnement-désintégration verticale de la
production, modification des structures d’approvisionnement, modification des
marchés ;
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149
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
§
§
la reprogrammation du flux des produits-utilisation du juste à temps, etc. ;
la gestion des ressources de transport – modification de la taille des véhicules,
renforcement de l’efficacité d’utilisation des véhicules, des systèmes de manutention.
Diversification des sources d’approvisionnement et l’expansion des marchés
(mondialisation)
La diversification des sources d’approvisionnement (mondialisation) a tendance à augmenter le
trafic de marchandises.
Les enquêtes réalisées par A.T. Kearney124 pour European Logistics Association entre 1987 et
1998 ont révélé un recul marqué de la proportion des achats et ventes industriels effectués à
l’intérieur des pays et, inversement, une forte augmentation de la proportion de ces opérations
effectuées au plan international, que ce soit en Europe ou ailleurs dans le monde.
« Salomon a délocalisé en Roumanie la fabrication de ses chaussures de skis. Il n'y aura pas
forcément plus de ventes mais du fait de l'éloignement, il y aura plus de transport»125.
L’intensité de transport, indique McKinnon « augmente dans la durée à mesure que les zones
d’approvisionnement et de commercialisation s’élargissent » 126.
Pour le groupe conjoint d’experts des transports et de l’environnement127 « le développement
du commerce électronique inter-entreprises devrait renforcer l’allongement des lignes
d’approvisionnement car il permet aux entreprises d’élargir leur recherche de fournisseurs
répondant à leurs besoins ».
« Dans la majorité des pays développés, pour le transport de marchandises, la tendance à
l’allongement des trajets répondant à l’expansion géographique des marchés, elle-même induite
par les économies d’échelle, a été plus ou moins annihilée par une diminution du poids moyen
des marchandises »128. L’allégement des biens produits, qu’on constate, selon cet expert devrait
en principe se traduire par une baisse des tonnes*kilomètres.
Holzafpel préconise le développement de « structures d’approvisionnements régionales » dans
lesquelles les entreprises s’approvisionnent dans la mesure du possible auprès des fournisseurs
locaux. En s’appuyant sur les données recueillies par Böge129 sur la « logistique des transports
du yaourt à la fraise », il a calculé que si, dans le processus de production et de distribution de
ce produit, on avait eu recours aux fournisseurs les plus proches, le nombre total de camionskilomètres aurait pu être réduit de 67%. Si cette démarche était suivie de façon plus générale,
elle inverserait radicalement l’augmentation récente du nombre de « kilomètres alimentaires »
124
A.T. Kearney « Insight to impact : Results of the Fourth Quinquennial European Logistics Study » European Logistics
Association, Bruxelles, 1999
125
Jean-Claude Michel « Les voyants sont au vert », L’officiel des transports n°2279, octobre 2004, propos
recueillis par Johanne Collot
126
McKinnon A. « Modifier la gestion logistique des entreprises » - Séminaire International CEMT, Bruxelles,
décembre 2002, P. 6
127
Commission européenne « Impacts of E-commerce on transport and the Environnment », Groupe conjoint
d’experts des transports et de l’environnement – Bruxelles 2001
128
Roger Vickerman « Transport et développement économique » CEMT-Table ronde 119, 2002, P. 153
129
Böge S. « The well travelled yogurt pot : lessons for new freight transport policies and regional production »
World Transport Problems and Practice, 1,1 - 1994
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150
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
(food miles), c’est à dire l’allongement de la distance que les aliments doivent parcourir jusqu’à
leur lieu de consommation » 130.
Approches Supply Chain Management
Les approches Supply Chain Management (SCM) permettent de réaliser des prévisions fiables,
d’optimiser le système de transport (réduction des parcours à vide, amélioration du taux de
chargement, etc.) ; d’où une tendance à la réduction du nombre de camion en circulation.
Un aspect parmi d’autres de ce qu’on entend par SCM est la collaboration active entre
industriels, distributeurs et prestataires logistiques au travers de l’ECR (Effective Consumer
Response) permettant de mettre en commun leur gestion des approvisionnements (GPA). Ceci
permet notamment à des industriels différents d’organiser les transports en camion complet
vers la plate-forme distributeurs (multipick). Les industriels et distributeurs les plus importants
sont, en France, regroupés en association (ECR) afin de partager leur savoir-faire en la matière.
L’approche supply chain permet aussi une collaboration accrue entre industriels et distributeurs
sur des sujets tels que les emballages secondaires (unités d’expédition). Une étude-pilote du
Conseil National de l’Emballage et de Yoplait sur l’optimisation des plateaux carton d’un
produit (Petits Filous) et l’amélioration du plan de palettisation a permis une réduction de 24%
du volume transporté (130 camions)131.
22. Les enseignements tirés des enquêtes
Des entreprises interrogées en France, en Italie et en Suisse, les principaux enseignements et
constats peuvent être résumés comme ci-après.
Les pratiques logistiques fondamentales des entreprises énoncées pendant les enquêtes comme
ayant tendance à réduire la mobilité des marchandises sont les suivantes :
- massification des flux sur les entrepôts ou plates-formes ;
- et les approches supply chain management.
Pour la majorité des directeurs logistiques, ces pratiques logistiques permettent une meilleure
optimisation du transport (meilleur taux de remplissage, diminution des taux de distance à vide,
réduction du temps d’attente devant les magasins, etc.) et donc globalement une réduction des
transports.
Les pratiques logistiques fondamentales des entreprises ayant tendance à augmenter les trafics
de marchandises sont les suivantes :
-
la polarisation des sites logistique avec la mise en tension des flux (juste-à-temps) ;
la mondialisation ou la diversification des sources d’approvisionnements et l’expansion des
marchés.
Des enquêtes, il ressort également que la centralisation logistique est un des déterminants,
parmi d’autres, de la croissance de la mobilité des marchandises. Les autres déterminants
130
Holzapfel H. « potential focus of regional economic co-operation to reduce goods transport » World Transport
Problems and Practice, 1, 2 - 1995
131
ECR/France
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
évoqués dans les enquêtes sont la croissance économique, l’augmentation des revenus,
l’évolution des styles de consommation, la pression de la concurrence sur les marchés.
Nous reproduisons ci-après les citations des personnalités interrogée (distributeurs et
prestataires de transport et de logistique) sur l’impact de la centralisation logistique et d’autres
facteurs sur la mobilité des marchandises dans les trois pays.
En France
« Quand on regroupe deux sites logistiques, on divise le stock et on augmente le transport dont
le prix était réellement bas. Notre axe de travail aujourd’hui c’est de mieux remplir nos
camions, de réduire le nombre de camions en circulation en préparant mieux nos palettes pour
remonter plus haut, en regroupant nos bâtiments (entrepôts). On a un objectif de réduction du
nombre de camions de 10% à l’échéance 2005 » (citation).
« ….Au fond (dans les approches Supply Chain), la problématique n’est pas de réduire les
coûts de transport - et là au touche directement à l’environnement - mais de supprimer des
transports. Pour cela, on imagine qu’on puisse travailler en commun avec des industriels et des
prestataires, et mettre en commun sur une plate-forme électronique un outil d’optimisation du
transport. On pense démarrer un chantier avec sept gros industriels et deux gros prestataires. On
voit bien que là on doit être capable de diminuer notre consommation de pétrole de 15% ou
20% sans trop de difficulté mais aussi il y a des économies à la clé.
On travaille, bien sûre sur l’emballage. Si vous regarder la chaîne des produits frais (yaourt,
etc.), c’est peut-être 1% du poids de la marchandise qui détruite dans la journée. Il y a
également le sur-emballage, et puis la palette et ce qu’on met sur la palette. En tout cas, le
packaging est indiscutablement un axe de réflexion.» (citation).
«La centralisation est un facteur de réduction du transfert de marchandises dans les points de
vente : regroupement des flux, moins de camions mais de gros camions » (citation).
« Le groupe Monoprix est très en avance dans ce domaine de la stratégie ‘développement
durable, commerce équitable’ ; et la logistique s’inscrit dans cette politique. C’est dans cet
esprit que nous avons lancé aussi les tests de camions et de camionnettes avec motorisation au
gaz naturel. Un autre point important, qui n’est pas très perceptible, c’est les aspects
environnementaux, qui sont des raisons par exemple pour lesquelles on ne peut plus admettre,
surtout chez Monoprix où les magasins sont à 50% en région Parisienne, d’avoir 3, 4, 5 petites
camionnettes qui viennent livrer 2 à 3 cartons.
Les autres aspects qui jouent dans ce cadre là c’est plus l’aspect transport. Par exemple, une des
raisons pour lesquelles chez Monoprix on maintient trois entrepôts alimentaires c’est
essentiellement lié à des problèmes de transport. Et si je maintiens dans ma stratégie logistique
de Paris un entrepôt au nord de Paris, un entrepôt au sud de Paris, c’est véritablement des
questions de réduction de transport et son impact sur l’environnement.
L’autre point, qui joue un peu, c’est la rapidité des flux, le raccourcissement de traitement des
flux qui fait qu’ on est passé, y compris dans des produits simples, sur un flux de plus en plus
tendu. Ça nous pose d’ailleurs toujours des soucis dans la mesure où on a très souvent de plus
en plus de distances à couvrir et de moins en moins de temps pour le faire » (citation).
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152
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
En Suisse
Chez Galexis, après 1999 une certaine rationalisation a prévalu et les économies d'échelle
d'une polarisation ont conduit à la fermeture de 8 centres régionaux. En parallèle à cette
concentration, les tournées auparavant dédiées à une seule catégorie de clients (pharmacie,
droguerie, hôpital ou médecin) sont depuis 1999 regroupées (tournées "mixtes"). Cette
modification a permis, malgré la concentration des activités, de diminuer la distance totale
parcourue par les véhicules de manière très significative. Ces tournées mixtes ont été
organisées afin de limiter l’augmentation des km parcourus dus à la centralisation. Concernant
les perspectives de changements futurs, la poursuite de la polarisation des activités dépendrait
avant tout des futures décisions des pouvoirs publics en matière d'infrastructures et de
tarification des transports. Une attention particulière sera portée aux possibles futures taxes sur
le carburant et/ou sur le CO2. Concernant les infrastructures, la poursuite des projets
autoroutiers est un des sujets importants à leurs yeux.Dans la situation actuelle, un seul centre
serait clairement avantageux pour Galexis en terme d'économie d'échelle (avec une qualité de
service garantie) mais Galexis attend de voir les futures mesures avant de se décider. Un seul
centre signifierait en effet un accroissement des km parcourus.
Chez Migros, outre les entretiens réalisés, la lecture du rapport sur l’environnement de
l’entreprise est très intéressante :
Die Filialbelieferung erfolgt auf der Strasse. Mehrverkehr wird durch die Filialanlieferung der
Sortimente non-food und kolonial aus den zentralen Logistikzentren verursacht. Dafür fallen in
diesen Logistikzentren gegenüber der Verteilung über die Betriebszentralen weniger
Vortransporte an. Die Grafik zeigt, dass die absolut gefahrenen Kilometer ansteigen.
Traduction: la livraison des filiales se fait chez Migros par la route. La croissance des
transports de livraison des filiales s’explique par la centralisation des produits non alimentaires coloniaux sur les plates-formes logistiques centrales. Moins de transports en amont
sont par contre effectués pour ces centres. Le graphique montre l’augmentation du nombre
absolu de kms parcourus.
Figure 28 : augmentation du nombre absolu de kilomètres parcourus (1990-2003)
En Italie
« Le nombre de déplacements a augmenté parce que le nombre de clients et de secteurs sur
lesquels on opère a augmenté » (citation).
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153
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
« On peut affirmer qu’avec le changement de 1995 l’entreprise a amélioré l’optimisation du
système de chargement, mais évidemment si l’on enregistre une augmentation de la demande, il
est normal que l’on ait d’autre part une augmentation des déplacements, même si ce n’est
qu’une mesure moins que proportionnelle par rapport à l’augmentation de la demande »
(citation).
« Avec la délocalisation des processus de production dans des pays à faible coût de maind’œuvre, on utilise de plus en plus fréquemment et en masse le transport maritime » (citation).
« Quant au fait que l’entreprise, après les changements que l’on a décrits, génère plus ou moins
de déplacements par rapport au passé, il faut dire que si le nombre de déplacements a tendance
à augmenter avec l’augmentation de la demande, il est également vrai qu’avec de plus grands
volumes de demande et de marchandises transportées on arrive à réduire le nombre de voyages
parce que l’on peut les rationaliser et mieux organiser les déplacements. Tandis que, jusqu’au
début des années 90, on utilisait des véhicules de 12-14 palettes, aujourd’hui, on est arrivé à des
véhicules de 30 palettes et plus, avec une meilleure organisation des livraisons sur des
véhicules de plus grande taille » (citation).
« Les changements de consommation ont également été importants et ont augmenté
quantitativement et sont devenus de plus en plus variés...un exemple de changement des
exigences de la collectivité est l’énorme augmentation de la consommation de boissons en
général et de l’eau minérale en particulier; il s’agit d’un produit très coûteux du point de vue de
la logistique mais à très faible valeur, c’est donc un très mauvais rapport pour la logistique »
(citation).
« On a agrandi les entrepôts parce que la variété des produits a augmenté de façon démesurée
suite au fait que les exigences des consommateurs se sont développées, dans le sens où le client
actuel veut trouver tous les produits disponibles dans le supermarché, il est donc nécessaire de
garantir le maximum d’assortiments possibles » (citation).
« Actuellement, une grande partie des fournisseurs du groupe sont situés dans le Far-East, on a
alors la nécessité d’aller prendre la marchandise et la quantité des déplacements et leur nature
augmente » (citation).
« Tous ces quatre types de changement (externalisation, construction des entrepôts et plateformes, union des filières de produits en voyage) en théorie ont porté à réduire les
déplacements (justement parce que l’on a cherché une rationalisation des livraisons) et, en ce
sens, opère également l’augmentation de l’utilisation des technologies informatiques. Il faut
cependant rappeler que, les années de 1980 à 2000 sont des années de demande en forte
croissance et ceci, au contraire, a déterminé une croissance des déplacements. Il n’est pas
possible de dire quel est le solde de telles diminutions et augmentations » (citation)
« L’augmentation de la demande, que ce soit en termes quantitatifs comme en termes
qualitatifs...un autre élément qui puisse avoir une incidence sur la logistique est le Marketing
qui arrive à orienter la demande. Malheureusement, souvent les logiques de Marketing sont loin
d’être efficaces, un fait que l’on voit en regardant le problème des emballages: la majeure partie
des produits est considérée de meilleure qualité également sur la base de l’emballage »
(citation).
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154
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
23. Synthèse de l’évaluation de l’impact de la centralisation logistique sur la
mobilité des marchandises
Les enseignements tirés des travaux d’experts et des enquêtes nous permettent de porter une
appréciation sur la tendance de chacune des pratiques logistiques fondamentales à augmenter
ou à réduire les flux de transport de marchandises. Les résultats de l’évaluation sont résumés
sur la figure 29.
Les pratiques logistiques auxquelles est imputable la tendance à l’accroissement du trafic de
marchandises sont les suivantes :
- la polarisation des sites logistiques avec la mise en tension des flux (juste-à-temps) ;
- la mondialisation ou la diversification des sources d’approvisionnements.
Les pratiques logistiques auxquelles est imputable la tendance à la réduction du trafic de
marchandises sont les suivantes :
- massification des flux sur les entrepôts ou plates-formes ;
- l’utilisation des entrepôts et plates-formes ;
- les approches supply chain management.
Figure 29 : impact de la centralisation logistique et des politiques publiques sur le transport de marchandises en
France
Les résultats de cette évaluation ne nous permettent pas, cependant, d’affirmer si les stratégies
logistiques des distributeurs, fondées sur la centralisation logistique, ont contribué à aggraver
ou non la croissance de la mobilité des marchandises. Pour répondre à cette question, d’autres
recherches plus fines sont nécessaires.
En revanche, on il est possible d’affirmer que l’organisation logistique de la distribution,
fondée sur la centralisation logistique, est un déterminant, parmi d’autres, de la demande de
transport.
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155
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
24. Evaluation de l’impact des politiques publiques sur la mobilité des
marchandises
Il est possible de déduire des résultats qui précèdent, l’impact des politiques publiques sur la
mobilité des marchandises.
Les politiques publiques détectées en France comme ayant influé (accidentellement ou non) sur
les stratégies logistiques des distributeurs ont favorisé la massification des flux, le
développement des entrepôts ou plates-formes et de la concentration des entreprises de
distribution (Chapitre IV). Or, comme montré précédemment, ces trois pratiques logistiques ont
tendance à réduire les flux de trafics de marchandises. On peut déduire que les impacts
logistiques des politiques publiques ont tendance à réduire les trafics de marchandises.
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156
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
V. Quel contexte de politique publique pour concevoir des stratégies
publiques
La présente recherche a montré qu’il n’y a pas eu de politique publique visant à influencer
directement les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires
logistiques.
Elle a permis de démontrer, cependant, que des politiques publiques, qui n’avaient pas de visé
directe sur le secteur de la logistique, avaient influencé l’organisation logistique des entreprises
de distribution. On a montré de quelle manière leurs décisions stratégiques et opérationnelles
ont pu (ou pas) être influencées par les outils publics. Les principaux types d’outils publics,
ayant influencé les évolutions logistiques au cours des quarante dernières années, nous
semblent les plus appropriés pour influer également sur les stratégies logistiques des entreprises
au cours des prochaines années. Les pouvoirs publics peuvent donc directement agir, durant les
prochaines années, sur les stratégies logistiques des entreprise par les mesures suivants :
- la politique des transports ;
- la politique du travail ;
- la politique environnementale ;
- la réglementation ;
- la fiscalité ;
- les incitations financières.
A ces outils, on recommande d’ajouter les ‘conseils et incitations’. Les pouvoirs publics se sont
en général limités, dans ce domaine, à identifier et à promouvoir les ‘bonnes pratiques’ en
matière de chargements de véhicules et de consommation. La démarche pourrait être étendu à
la conception des systèmes logistiques, pour montrer aux grandes entreprises chargeurs qu’il
est possible d’en diminuer l’intensité de transport, sans perte de compétitivité particulière.
Ainsi, ce contexte de politiques publiques nous semble susceptible d’influencer les décisions
logistiques (stratégiques ou opérationnelles d’exécution). Dans le cadre de recherches
prospectives, il s’agit de concevoir des stratégies publiques efficaces à partir des outils publics
ainsi identifiés. Notre recherche montre, avec l’exemple suisse, qu’il est possible de tirer parti
de la massification des flux ainsi engendrée pour favoriser le rail, en s’appuyant sur les outils
publics adéquats. La conduite de telles recherches prospectives implique la combinaison de
plusieurs des instruments de politique publique ainsi identifiés
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157
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
CHAPITRE VII
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Cette recherche a permis de démontrer qu’en France, comme en Suisse et en Italie, durant les
quarante dernières années, le changement logistique significatif du secteur de la distribution
concerne la centralisation logistique ; et que c’est l’émergence des prestataires logistiques qui a
été le changement significatif dans le secteur du transport et de la logistique.
Elle a permis de démontrer qu’il n’y a pas eu de politique publique visant à influencer
directement et intentionnellement les stratégies logistiques des entreprises de distribution et
leurs prestataires de transport et de logistique. Les politiques publiques ont donc eu peu
d’influence sur les changements logistiques de ces dernières années.
On a, néanmoins détecté qu’en France, les lois Galland et Raffarin et le Contrat de Progrès, qui
n’avaient aucune visée directe sur les stratégies logistiques des distributeurs, ont favorisé le
passage à la centralisation logistique des entreprises de distribution. On a également observé en
France que des politiques des collectivités locales ont favorisé l’implantation des entrepôts en
acceptant de dédier des zones aux activités logistiques. Ce type de phénomène n’a pas été
observé en Italie ni en Suisse. Dans les trois pays, les politiques publiques ont influé davantage
sur les décisions logistiques opérationnelles d’exécution des entreprises de distribution.
Dans le secteur des transports et de la logistique, on a également détecté des politiques
publiques ayant influé, mais d’une manière indirecte, sur les restructurations des entreprises de
transport de marchandises et l’émergence des prestataires logistiques.
On a démontré de quelle manière les décisions logistiques stratégiques et opérationnelles des
entreprises de distribution et des prestataires logistiques ont pu (ou pas) être influencées par les
outils publics.
La recherche a permis d’identifier les outils de politiques publiques ayant eu des impacts, à des
degrés divers, sur l’évolution logistique du secteur de la distribution et de celui du transport et
de la logistique. Ces principaux outils sont :
- la politique des transports ;
- la politique du travail ;
- la politique environnementale ;
- la réglementation ;
- la fiscalité ;
- les incitations financières.
Les principaux outils publics ci-dessus détectés et qui ont influencé les évolutions logistiques
des entreprises au cours des dernières années, nous semblent les plus appropriés pour influer
également sur les stratégies logistiques des entreprises au cours des prochaines années.
Dans les trois pays étudiés, la recherche a montré que ce sont les facteurs économiques qui ont
été les moteurs des changements logistiques, puis il y a l’évolution technologique dans
l’informatique et le moyens de communication.
On a montré aussi que la centralisation logistique, au travers de la polarisation des sites
logistiques et de la diversification des sources d’approvisionnements et l’expansion des
marchés qu’elle a engendrées, est responsable d’une partie significative de la croissance des
transports. Mais les résultats de la recherche ne permettent pas d’affirmer si la centralisation
logistique a contribué à aggraver ou non la croissance de la mobilité des marchandises. En
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
revanche, il est possible d’affirmer que les organisations logistiques des distributeurs, induites
par la centralisation logistique, sont des déterminants, parmi d’autres de la croissance de la
mobilité des marchandises.
La présente recherche permet ainsi de suggérer un certain nombre de perspectives. Les
prolongements qui pourraient être donnés à ce travail peuvent s’articuler autour des cinq axes
de recherche suivants :
i) Impact des organisations logistiques sur les flux de transport de marchandise
L'impact des organisations logistiques sur les flux de transport de marchandises est encore mal
connu. La conduite des recherches sur ce thème permettraient d’estimer quantitativement
l'impact de la centralisation logistiques et des politiques publiques sur le transport de
marchandises.
ii) Supply Chain Management, optimisation des chaînes logistiques et politiques
publiques
Le développement de la gestion intégrée des chaînes logistiques d’approvisionnement (Supply
Chain Management) a un certain potentiel pour contenir la croissance de la mobilité. L’
approche insiste sur le renforcement des relations inter-entreprises. Or, les relations
distributeurs-fournisseurs-prestataires ne sont pas encore des modèles de collaboration et
d’optimisation globale. Des approches collaboratives effectives pourraient cependant permettre
d’avoir des chaînes logistiques mieux optimisées. Des recherches supplémentaires
permettraient d’évaluer le potentiel de ces approches collaboratives inter-entreprises au sein de
la chaîne logistique globale et d’apprécier le rôle des politiques publiques.
iii) Elaboration des scénarios prospectifs de stratégies publiques visant à
influencer les stratégies logistiques des entreprises
Sur la base des résultats de la présente recherche rétrospective des quarante dernières années,
les principaux outils publics ci-dessus identifiés comme ayant influencé les évolutions
logistiques, nous semblent les plus appropriés pour influer également sur les stratégies
logistiques des entreprises au cours des prochaines années. Des recherches prospectives sont
nécessaires pour élaborer des scénarios de stratégies publiques, qui combinent des outils
publics cohérents, susceptibles d’influencer les stratégies logistiques. Il serait très difficile
d’inverser la concentration logistique par des politiques publiques, étant donné l’ampleur des
économies d’échelle que les grandes entreprises sont parvenues à réaliser. Il est plutôt suggéré
de mener des recherches sur des stratégies publiques à concevoir pour faire évoluer un ou
plusieurs des éléments constitutifs de la centralisation logistique : massification des flux,
réduction des stocks, approches supply chain, externalisation, etc. Notre recherche montre, avec
l’exemple suisse, qu’il est possible de tirer parti de la massification des flux ainsi engendrée
pour favoriser le rail, en s’appuyant sur les outils publics cohérents.
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iv) Impact de Politiques Publiques sur les changements de comportements
logistiques des entreprises au niveau européen
Cette recherche viserait à recenser, au niveau d’autres pays européens des recherches ayant
traité de l’impact des politiques publiques sur les changements de comportements logistiques.
Ce travail permettrait d’avoir un diagnostics global de la situation européenne, d’identifier des
politiques visant directement les stratégies logistiques des entreprises.
v)
Rééquilibrage entre modes de transport et politiques publiques
Un domaine dans lequel les politiques publiques, notamment au niveau européen, peuvent avoir
une très grande efficacité sur les stratégies logistiques des entreprises est celui du rééquilibrage
entre les modes de transport et du bénéfice environnemental qui peut en découler.
En effet, la plupart des experts et du milieu politique souligne que la répartition du trafic entre
les différents modes de transport est très déséquilibrée, ce qui provoque un coût total (direct +
externe) des activités de transport bien supérieur au minimum. Ceci est dû principalement au
fait que les choix de mode de transport ne prennent pas en compte les coûts externes, donc les
transporteurs choisissent davantage les modes ayant une grande incidence des coûts externes
sur le coûts totaux (notamment : le transport routier).
Toute politique visant à la durabilité du système des transport et du système économique tout
court doit donc veiller à ce que la quantité de transport demandée par le système productif,
ainsi que son coût global, ne dépassent pas le niveau optimale et efficient. Donc, les politiques
publiques devront de plus en plus pousser le système logistique vers l’efficience à travers un
ensemble de mesure qui internalisent les coûts externes de façon à rendre efficient le marché du
transport (mesures pour réduire les émissions polluantes des véhicules, comme dans les
standards européens introduits progressivement ; tarification sur le transport routier, comme il
est actuellement en discussion au niveau européen ; mesure pour la sécurité routière ; etc.).
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LES ANNEXES
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ANNEXE 1
Tendances d’évolution du secteur de la grande distribution
1. L’évolution du secteur de la distribution en FRANCE
Pour comprendre comment a évolué la distribution en France, évolution ayant des liens directs
avec les stratégies logistiques déployées, il est indispensable de rechercher un minimum de
repères. On a cherché ces repères tant à travers l’évolution du secteur de la grande distribution
qu’à travers celle des entreprises.
1.1 Fresque historique132 du secteur de la distribution en FRANCE
La fresque historique du secteur de la distribution est présentée du point de vue français.
L’ordre chronologique peut être différent d’un pays à l’autre. En France, on est passé des
magasins de proximité et des supermarchés vers des hypermarchés. On observe donc une
période avant et depuis l’hypermarché.
Avant l’hypermarché
Le premier grand magasin a été créé par Aristide Boucicaut en 1852 sous l’enseigne Au Bon
Marché à Paris : le seul édifice spécialement construit et entièrement affecté à l’usage d’un
grand commerce des nouveautés où il développe des innovations qui marquent une première
rupture par rapport au commerce traditionnel avec le passage à la distribution moderne : le
client est roi ; l’entrée est libre ; les prix sont fixes et non discutés ; la vente est à bon marché ;
etc. En second lieu, il proposait un assortiment large et profond. Le Printemps s’est développé
autour de cette forme de vente.
Le premier magasin populaire a été créé en 1928 par les Nouvelles Galeries sous l’enseigne
Uniprix. Il vise à satisfaire les besoins courants de la clientèle populaire, aussi bien en
alimentaire qu’en marchandises générales (bazar, habillement). Les magasins populaires seront
les inventeurs de l’affiliation, et les développeurs des marques de distributeurs.
La création du premier supermarché date de 1957, avec l’ouverture par Henri Bardou d’un
magasin de 750 m² à Paris, rue Pierre-Demours (dans le 17ème). Un second supermarché est
implanté l’année suivante à Ruel-Malmaison. Il porte l’enseigne ‘Express Marché’ de GouletTurpin, et sa surface de vente atteint 560 m². Le concept repose sur le libre service133, le
discount134, et une grande surface de vente.
132
Cette évolution est présentée du point de vue français. Les principales sources utilisées : . E. Thil ‘les inventeurs du
commerce moderne’, 1991, Arthaud, Paris ; Beauvais Consultants ‘Evolution du commerce et utilisation de la voiture’, Rapport
pour MELT-DRAST, février 2003 ; M. Filser, V. des Garets, G. Paché ‘La distribution : organisation et stratégie’ Edition
EMS Management&société’ , 2001
133
L’épicerie en Libre service en France date de 1948, chez Goulet-Turpin à Paris. Selon cette formule, la vente n’est pas
assistée par un vendeur.
134
Le premier discount date de 1949, année où Edouard Leclerc ouvre une nouvelle enseigne destinée à vendre à bas prix des
gâteaux bretons fabriqués tout près de chez lui.
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Le concept nouveau de libre service vient des Etats-Unis. Il est introduit en 1916 par Carence
Sunders dans ses épiceries Piggly Wiggly. Cette innovation créa les conditions nécessaires à
l’émergence du marketing moderne (conditionnement, marque, publicité) avec la disparition
notamment du vendeur.
Le discount est une forme de vente dont le principal axe de communication est le prix bas. Le
premier discount date de 1949 en France, année où Edouard Leclerc ouvre une nouvelle
enseigne destinée à vendre à bas prix des gâteaux bretons fabriqués tout près de chez lui.
Depuis l’hypermarché
Le premier hypermarché135 naît en juin 1963 sous l’impulsion de Marcel Fournier, de Jacques
Defforey et de Denis Defforey qui lancent à Sainte-Geneviève-des-Bois, le premier
hypermarché Carrefour avec la formule du ‘tout sous le même toit’ (alimentaire et nonalimentaire), sur une très grande surface (2 500 m²) permettant la vente de masse, en libre
service, avec des prix bas, et 400 places de parking pour drainer la clientèle lointaine. Il s’agit
de la plus récente innovation majeure du commerce de détail. Le changement vient de
l’application d’un même principe commercial (libre-service et discount) à toutes les familles de
produits dans un même magasin. C’est avec l’émergence de l’hypermarché, il y a environ 40
ans, qu’on assiste véritablement à la naissance de la grande distribution.
La grande surface spécialisée (GSS) est apparue dans plusieurs secteurs en quelques années :
l’électrodomestique avec Darty en 1966, l’équipement de la maison avec Conforama en 1967,
le bricolage avec Castorama en 1969 à Englos sur 5 000 m², puis, sensiblement plus tard, le
sport avec Décathlon en 1976. Les GSS s’imposent généralement par leur proximité avec les
hypermarchés (dont ils partagent souvent le parking), par leurs bas prix, mais surtout par le
choix qu’ils offrent.
Le premier maxi-discompte s’installe à Croix dans le Nord en 1988. Il s’agit d’un magasin
Aldi ; la formule vient d’Allemagne. Le concept repose sur des prix d’acquisition bas liés à un
assortiment réduit (1 millier de références au maximum, ce qui permet d’accroître les volumes)
et peu ou pas de marques nationales mais des marques de distributeurs voire des produits sans
marque, et des frais généraux limités grâce à une présentation sommaire et un personnel réduit.
Sur les quarante dernières années, et notamment depuis les années 1980, le développement des
grandes surfaces a joué un rôle déterminant dans l’émergence d’une logistique de la
distribution. Le concept d’hypermarché est considéré comme le fer de lance du développement
de la grande distribution. Cette surface de vente repose sur quatre principes qui ont une
répercussion sur les stratégies logistiques mises en place :
- le libre service, quelque soit l’endroit en France ou à l’étranger. Les opérations de ‘picking’
en magasin et de préparation de commande unitaire sont donc prises en charge par le
consommateur final ;
- le discount : nécessité de procéder à des achats massifiés pour obtenir les effets souhaités
sur les prix ;
- le ‘tout sur le même toit’ y compris les services : un grand nombre de références rend la
logistique complexe ;
- le stationnement gratuit d’où des implantations des surfaces de vente en périphérie des
centres urbains.
135
Le mot lui-même d’hypermarché date de 1966 et revient à Jacques Pictet, le fondateur de LSA
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164
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2. L’évolution du secteur de la distribution en Italie et en Suisse
La grande distribution organisée (GDO) en Italie est très différente de la situation française,
dominée par les « géantes » (ex : Auchan, Carrefour, etc.). L’Italie est typiquement la nation
des petites et moyennes entreprises, qui forment sur le territoire un tissu très ramifié des
entreprises de modestes dimensions. Il n’y a que quelques entreprises qui ont une taille
relativement importante avec des caractéristiques semblables à celles des grands opérateurs de
la distribution européenne (Coop, groupe Rinascente et groupe Coin).
En Suisse, le secteur de la distribution est dominé par deux entreprises : Migros et Coop.
Ces deux entreprises représentent 70% du marché de l'alimentaire en Suisse (cf. la figure cidessous). L’historique du secteur se confond avec celui de Migros et Coop.
Figure 30 : commerce de détail en alimentaire en Suisse
Les deux entreprises, à la différence des grands groupes français de distribution, ne sont
présentes activement que sur le territoire national. Une revue de leur histoire respective est
représentative de la situation de la grande distribution en Suisse.
La société Migros, fondée en 1925, était une organisation commerciale sans intermédiaire136.
Elle a commencé par la vente ambulante au moyen de camions-magasins garnis de six articles
de base (café, riz, sucre, pâtes, graisse de coco et savon). La société approchait les
136
Le pont jeté entre le producteur et le consommateur est devenu le symbole et le logo de Migros.
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165
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consommateurs directement à leur domicile. Elle avait une politique de bas prix et offrait ses
produits à des prix parfois de 40 % inférieurs à celui des concurrents.
En 1941 le grand distributeur devint une fédération de dix coopératives qui possède un réseau
de onze entreprises industrielles, surtout dans le secteur des aliments et boissons, mais
produisant aussi dans les cosmétiques, les produits de nettoyage, etc. Dans le domaine des
aliments et boissons, Migros exploite des conserveries, des chocolateries confiseries, des usines
de produits laitiers, des boulangeries, des fabriques de pâtes, des fromageries, des usines de
boissons non alcoolisées, des usines de mets préparés, etc. En fait, un poulet sur deux
consommés en Suisse provient de Migros.
La plupart des exportations est constituée de produits vendus sous des marques de distributeurs
par de grands détaillants comme Marks & Spencer et Sainsbury’s au Royaume-Uni, Cora en
France, Albert Heijn en Hollande. La marque d’exportation Migros Swiss Delice est distribuée,
entre autres, par Cora en France, par Spar en Autriche, ainsi que par Cold Storage et NTCU à
Singapour.
La société Coop trouve son origine dans le regroupement de coopératives de consommation
créées à partir de 1840 en Suisse. L'idée de ces coopératives a émergé avec l'avènement de l'ère
industrielle. Le travail en usine ne laissait guère le temps aux ouvriers de s'approvisionner de
manière autonome à la manière des paysans. De cette situation est née, dans beaucoup de pays
d'Europe, l'idée des coopératives de consommation qui auraient pour mission d'acheter des
denrées alimentaires et de les vendre à prix réduits à leurs membres. Petit à petit, les
coopératives, créées indépendamment, vont se regrouper dans une Union des Sociétés
Coopératives (USC) qui comptera jusqu'à 572 sociétés en 1950. Ces sociétés vont ensuite dans
un deuxième temps se rapprocher et fusionner par étapes pour finalement former le 1er janvier
2001 une seule entreprise. Coop s'est donc formée à partir d'un ensemble de coopératives
locales qui se sont progressivement intégrées à partir des années 1960 (l'USC devient Coop en
1969).
Le principal concurrent de Migros et Coop reste Denner. Le reste du marché est fragmenté
entre de petits magasins indépendants ou franchisés (notamment Usego et Primo). Certains
groupes français (dont Carrefour) ont tenté de s'installer sur le marché suisse ces dernières
années mais pour le moment sans succès.
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ANNEXE 2
Evolution des entreprises de transport et de logistique
Pour analyser le (s) changements de stratégie des entreprises de transport de marchandises
durant les dernières années, il est nécessaire de distinguer les trois principaux métiers autour
desquels se structure le secteur : le transport de lot ; la messagerie et l’express ; la logistique.
Parmi eux le transport de lot occupe une place importante. Dans sa définition la plus
générale137, le transport de lot existe en opposition avec la messagerie. Celle-ci suppose une
activité de groupage et de distribution impliquant un passage à quai alors que, dans sa version
la plus simple, le premier consiste à tracter une "« charge complète » (camion complet) d’un
point A à un point B. Ainsi défini, le transport de lot désigne aussi bien un transport exigeant
un matériel spécialisé (camion frigorifique, citerne, benne) que le transport dit de marchandise
générale (general cargo) ou de produits conditionnés. Au-delà de la charge complète, les lotiers
peuvent compléter le chargement par un lot destiné à un autre client ; ou pratiquer le groupagedistribution de lots partiels qui consiste à remplir le camion avec plusieurs lots et, après une
traction, de desservir plusieurs clients ; voire organiser ce groupage avec des passages à quai.
Pour Patrice Salini et Antoine Artous, le transport de lot français représenterait 122 milliards de
tkm pour le transport public, soit environ 60% des tk. A ce total national s’ajoutent le transport
réalisé par le pavillon étranger de ou vers la France. On obtient ainsi au total 150 milliards de
tkm.
Alors que dans la messagerie, il s’agit d’optimiser la circulation des flux dans un réseau de
plates-formes, dans le transport de lot, il s’agit d’optimiser le remplissage des camion et de la
traction afin de faire circuler du fret dans un espace qui, a priori, n’est délimité que par la
demande du chargeur et du destinataire.
1. Les entreprises de transport et de la logistique en FRANCE
Face à l’évolution de la demande croissante et exigeante des industriels et des distributeurs
(prix, fiabilité, flexibilité, rapidité, accessibilité et couverture globale), l’offre des prestataires
de transport et de logistique a aussi évolué au cours des dernières années. Initié en 1990, le
mouvement de concentration des entreprises du secteur s'est accéléré en 1995 par croissance
interne (participation ou création) et externe (acquisition, fusion collaboration ou participation
croisée). L’objectif des entreprises était d’atteindre une taille critique sur le marché hexagonal
et européen. Dans le secteur du transport et de la logistique en France, on peut distinguer
actuellement trois catégories d’entreprises :
•
les entreprises de pur transport (moyennes et artisans), qui n’interviennent que sur le
maillon transport de la chaîne logistique globale ; ils sont ainsi souvent dépendants de
l’organisation des prestataires logistiques ;
•
les prestataires logistiques de type « Third Part Logistics Providers ou 3 PL » : ces
prestataires prennent en charge, pour autrui, l’exécution des activités logistiques pouvant
137
A. Artous, P. Salini « Les transporteurs routiers français dans la compétition internationale - analyse du
développement des groupes français de transport et des prestation de services logistiques à l’international et des
problèmes rencontrés par les lotiers français », Rapport INRETS pour la Direction des transports terrestres,
décembre 2003 P. 19
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Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
englober le transport, l’entreposage, les activités de distribution (réception, postmanufacturing, picking) et même des activités de production ;
•
les prestataires logistiques de type « Fourth Part Logistics Providers ou 4 PL » :
d’avantage présents aux Etats Unis, ce sont aussi des intégrateurs, mais dont les prestations
vont jusqu’à la prise en charge de l’intégralité de la logistique d’une entreprise, y compris
l’aspect informatique, la gestion des commandes, le paiement sécurisé, la gestion des
retours, etc. sur une filière à l’échelle mondiale.
Les grands prestataires logistiques comme Géodis, Giraud, Norbert Dentressangle, etc.
correspondent davantage à des 3PL . Tout en développant leurs activités, ces prestataires soustraitent à leur tour les opérations de pur transport à des petits et moyens transporteurs.
2. Les entreprises de transport et de la logistique en ITALIE et en SUISSE
Le secteur logistique est une réalité récente en Italie. On peut situer sa naissance autour des
années 90, quand les entreprises de transport se rendent compte que les services de ‘pur
transport’ ne sont plus une activité stratégique de business ; ainsi les grandes entreprises
s’orientent vers la prestation de services à forte valeur ajoutée (gestion d’une ou plusieurs
phases de la chaîne de production). En relation avec les étapes d’évolution de la demande de
services logistiques, on identifie deux principales catégories d’opérateurs:
- Les transporteurs traditionnels ; ce sont les fameux « chauffeurs-propriétaires de camions »
qui se définissent comme ‘des entreprises qui exécutent physiquement une ou plusieurs
activités logistiques sur la base des décisions tactiques et stratégiques prises par leur client’.
Généralement ce sont des petites entreprises, dotées de peu de ressources. Elles effectuent
seulement la fonction de transporteur (généralement mono-modal) ; et tous les coûts du service
qu’elles assurent (achat, gestion du moyen, assurance, etc..) sont à leur charge. En ce sens, elles
permettent à l’entreprise pour laquelle elles opèrent de diminuer les coûts et de ‘transformer’
une partie de leurs coûts fixes en coûts variables.
- Le prestataire logistique, se définit comme une entreprise qui organise et effectue une partie
ou la totalité du processus logistique138 pour le compte de ses clients. Il prend des décisions au
niveau de la gestion et de l’organisation et en plus -naturellement- au niveau opérationnel, en
déléguant aux sous-traitants des parties de l’activité. Ces opérateurs donnent lieu à quatre types
de professionnelles139 :
• opérateur de niche: dans cette catégorie apparaissent des entrepôts de produits
alimentaires et des silos pour céréales.
• opérateur traditionnel: les opérateurs traditionnels, qui représentent encore la majorité
au point de vue du nombre, détiennent une bonne part de chiffre d’affaires dans le
secteur ; ils tirent leurs avantages des économies de spécialisation, des avantages liés à
leur traditionnelle présence sur le marché et à leur localisation, aussi bien près
d’infrastructures comme les ports et les aéroports, qu’en référence à des zones
territoriales qui présentent des espaces limités pour la réalisation de nouveaux
équipements (tous types d’entrepôts : génériques, fiduciaires, douaniers, etc.).
138
Sur la base d’une définition plus moderne de la logistique (SCM), par processus logistique on entend “l’ensemble des
activités qui, selon une vision systématique, planifient et gèrent les flux de biens et d’informations liées à ceux-ci tout au long
de la filière de production
139
Boscacci F., Maggie « Ruolo e definizione dell’industria della logistica nel sistema economico italiano ed europeo: ipotesi
di aggiornamento delle classificazioni statistiche » XXIII Conferenza Italiana di Scienze Regionali - 2002
B2K Consultants
168
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
•
•
intégrateur de filière: on identifie dans cette catégorie des grandes, moyennes et petites
entreprises, capables d’exploiter des économies d’échelle et de localisation, en
particulier sur des produits qui requièrent des déplacements et des manipulations
particulières. Font souvent partie de cette catégorie -surtout dans les phases initiales de
l’activité- des entreprises qui faisaient partie d’entreprises industrielles et qui s’en sont
détachées.
intégrateur logistique: deux types d’entreprises tendent à se fondre dans cette catégorie:
(i) celles qui appartiennent à la catégorie précédente et qui exploitent des économies
d’objectif et de localisation pour offrir une gamme de services étendus adaptés à une
multiplicité de catégories de produits ; (ii) les entreprises “externes”, qui se diversifient
vers les services logistiques, en s’intégrant verticalement et en partant souvent d’activités
liées aux diverses formes de transport (Postes, transporteurs, expéditionnaires,
transporteurs automobiles).
L’activité des transporteurs traditionnels est plus importante en Italie par rapport à celle des
intégrateurs logistiques.
Le marché du transport de marchandises en Suisse est, à l'instar de la France et de l’Italie, en
mutation. Une étude récente140 a permis de déboucher sur les constats suivants:
140
•
les entreprises d’affrètement sont, à l’exception de quelques rares secteurs, orientés
uniquement sur l’économie interne, exposées aux développements de la mondialisation
et à la libéralisation simultanée des marchés.
•
il en résulte un durcissement croissant de la pression concurrentielle accompagnée d'une
contrainte sur la réduction des coûts. La pression des coûts augmente massivement dans
le domaine des transports et de l'entreposage pour constituer aujourd’hui l’élément de
régulation principal du marché.
PNR 41, Rapport B9; Verladerverhalten, Helmut Schad (2000)
B2K Consultants
169
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
ANNEXE 3
Les étapes du développement logistique
L’utilisation du terme « logistique » naît dans le milieu militaire, comme science de la
planification, d’organisation et de gestion des mouvements des militaires et des marchandises
en période de guerre.
Dans les années 1950, la logistique abandonne le champ de bataille pour entrer dans
l’entreprises aux USA. Par ailleurs, dans les années 80 au Japon -et plus précisément chez
Toyota- on développe la méthode de production just in time, avec, pour conséquence,
l’abattement des stocks, dont la quantité importante -autrefois considérée comme un facteur
stratégique- désormais va jusqu’à devenir nuisible, pour la double raison qu’ils ne contribuent
pas au processus de création de valeur du produit et qu’ils ne déterminent pas d’augmentation
dans la durée du cycle de production, incitant ainsi de façon négative sur sa valeur.
Schématiquement, l’évolution de la logistique peut se résumer en cinq phases qui marquent de
grands changements141:
•
logistique de distribution : avec l’accroissement de la consommation de masse, après la
seconde guerre mondiale, les entreprises mettent l’accent sur les stratégies de vente, avec
une attention particulière à la distribution. A cette phase naît une fonction autonome ayant
comme objectif d’appliquer une méthode systématique de distribution, qui comprend le
magasinage, le transport et la livraison du produit fini;
•
logistique d’approvisionnement : au début des années 70, la crise pétrolière et
l’augmentation des coûts de production conduisent les entreprises à focaliser leur attention
sur le système d’approvisionnement. L’objectif dans cette phase est d’optimiser les
approvisionnements, en intégrant les processus de transport interne, de magasinage et
d’entrepôt de composants et de matières premières ;
•
logistique de production : suite à la globalisation du marché et à de fréquentes
délocalisations de la production, la logistique commence à pénétrer toute la sphère de la
production. Jusqu’à cette phase, la logistique se disperse à l’intérieur de l’entreprise entre
les fonctions d’approvisionnement, de production et de distribution, de manière totalement
indépendante entre elles ;
•
logistique intégrée: dans les années 80, on développe un concept de logistique selon lequel
les diverses activités logistiques dispersées dans l’entreprise sont réunies dans une seule
fonction responsable de tout le système logistique de l’entreprise, éliminant ainsi toutes les
fonctions qui n’ajoutent pas de valeur au processus et qui comportent en elles une
dispersion des ressources employées. L’objectif de la logistique intégrée est de “planifier,
mettre en place et contrôler les flux -aussi bien physiques que virtuels- qui vont des
activités de fourniture de matières premières à la livraison du produit fini au consommateur
final”. Cet objectif doit être atteint en satisfaisant la double condition d’efficacité et
141
Maggi E. et Borruso ‘A theoretical framework of the new approach to logistics : supply chain management’, 2001
B2K Consultants
170
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
d’efficience. La logistique est donc transformée d’un coût nécessaire dans l’entreprise à un
élément stratégique d’avantage compétitif ;
•
supply chain management (SCM): récemment, le concept de logistique intégrée dépasse la
frontière des entreprises pour embrasser tout le canal qui devient la base de la recherche de
la minimisation du coût total. Cette nouvelle approche implique une coordination entre les
entreprises, et non pas à l’intérieur de l’entreprise, étendant ainsi les concepts de base de la
logistique intégrée à tous les acteurs de la chaîne de valeur. Quelques entreprises ‘leader’
ont commencé à stipuler des alliances stratégiques avec des fournisseurs, des distributeurs
et des opérateurs logistiques, au lieu de recourir à l’intégration verticale par fusions et
acquisitions.
B2K Consultants
171
Rapport final
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ANNEXE 4
Evolutions majeures en matière de concentration et d’internationalisation
Année
Geodis
Norbert Dentressangle (ND)
1983
Giraud
Elaboration d’une politique de croissance
externe (1983-1991): acquisition,
collaboration, diversification, etc.
1988
Acquisition des transporteurs :
Romulus, Volutrans, Bianco,
Philibest & Lywestre, Bellmas .
Naissance du groupe ND
1991
Poursuite de la croissance en
France et en Europe par des
acquisitions d’entreprises
1993
Acquisition de Translittoral qui
permet à ND d’être n°1 dans la
maîtrise des trafics et échanges
trans-manche
Démarrage de l’activité logistique
1994
Introduction au second marché
boursier
Organisation du Groupe en divisionsproduits.
1995
Création de Géodis
Création au sein du groupe ND
de la branche logistique (NDL)
Création de ND Portugal
(croissance du groupe)
Acquisition en GB et au Pays –
de-Galles d’OTA international et
de Sheddick Transport
1996
Prise de contrôle de Tailleurs
Industries par Géodis
Acquisition de Novamar
(Espagne) et Free flog (RU)
Développement des activités de
ND vers l’Europe de l’Est selon
le principe de la collaboration
avec les entreprises locales.
1997
Prise de participation dans le
capital de Deltasped (ent. TRM
Hongrois)
Evolution vers le concept de ‘logistique
globale’
Acquisition de Lota et Maublancs
Acquisition des entreprises
Confluent et UTL, spécialistes
de l’entreposage et de la
distribution
Acquisition de l’entreprise AJG :
société anglaise spécialisée dans
le groupage international
B2K Consultants
172
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
1998
1999
Acquisition de Borghi en Italie
(une entreprise familiale) et le
groupe Vitesse aux Pays-Bas
2000
Acquisition de Manugitics afin
d’étendre ses activités de supply
chain management pan-européen
et mondial.
Intégration au groupe ND de
Mani ( entreprise de produits
sous température), de Geraul et
Thier (ent. Spécialisées dans le
vrac)
Giraud prend le contrôle de Stock Inter
Logistique à hauteur de 67% (croissance
externe en logistique), de TBM et de
Chalange Logistique
Renforcement de l’expertise
logistique avec l’acquisition de
Soluzione Logistics (Italie),
spécialiste en logistique globale
dans les produits textiles et
habillement
Prise de contrôle de Durousseaud.
Création de Giraud International pour le
transport et Giraud logistics pour les
prestations logistiques, séparation
juridique des deux pôles de métiers.
Philipps Consumer Electronics et
Géodis signent un partenariat
logistique Pan-européen
Rapprochement Géodis et Sivom
spécialisé dans la logistique
portuaire (consignation,
manutention, transit)
La ‘branche route’ signe un contrat
de 30 milliards avec Plastic
Omnium.
2001
Acquisition de Bétourné
International, spécialisé dans le
TRM international surtout EstScandinave
Acquisition de la société Savam,
n°1 européen en transport de
volumineux
EB Trans ouvre son capital à Giraud
International
Giraud Logistics renforce sa présence en
Espagne et en Italie.
Geodis et Freelog réalisent un
partenariat pour développer une
offre 4PL (déploiement du système
logistic, performance
opérationnelle de la Supply Chain
2002
Géodis devient le principal
actionnaire d’Elix (34%)
Géodis vend 50% du capital de
Thales Freight & Logistics
(spécialisée dans le domaine de la
défense et de l’aéronautique)
Acquisition de la société
logistique Stockalliance. Cédée
par le Consortium de réalisation
(CDR), Stockalliance exploite en
France 460 000 m² d’entrepôts
sur 20 sites.
Acquisition Calberson de Valenda
(gestion de déchets automobiles).
Démarche environnementale : Iso
14000
Géodis se positionne au Royaume
Uni et en Irlande : prise de
contrôle de Pan European
B2K Consultants
173
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
Transport Ltd (Dublin) spécialisé
dans la messagerie et le TR
européens
2003
Géodis confirme sa croissance sur
le Far East (Amérique Latine), en
Indonésie avec la création de PT
Géodis (agence), en Corée avec
Géodis Asie (transport et
logistique).
Sources : www.norbert-dentressangle.com ; www.giraud.fr ; www.geodis.com ; magazines spécialisés ; enquêtes
B2K Consultants
174
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Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE
B2K Consultants
175
Rapport final
Influence des politiques publiques sur les stratégies logistiques des entreprises de distribution et leurs prestataires de transport et de logistique
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L’organisation des collectivités territoriales dans les 15 pays de l’Union européenne,
CERTU, 2004 www.certu.fr
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Commissariat Général au Plan – La documentation française, Paris novembre 2003
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l’international et des problèmes rencontrés par les lotiers français, A. Artous, P. Salini
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Politiques nationales concernant le transfert des marchandises de la route vers le rail : le cas de
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Comment agir sur les déterminants de la demande de transport, Actes du séminaire
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Urban Goods Movement A guide to policy and planning, Ogden K.W. Ashgate, 1992
Magazine et presses spécialisées
-
LSA (Libre-Servive-Actualité)
Logistiques Magazine,
Stratégies logistiques,
Le Journal ‘Les Echos’
Le Journal ‘Transports Actualités’
Transport Info
L’officiel des transporteurs ;
Solutions Transport
Fördertechnik
-
Cargo
Trasporti – diritto, economia, politica
Trasporti Europei
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